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À feu et à sang

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Du même auteur

Deux femmes au royaume des hommes, en collaborationavec Geneviève Fraisse, Hachette Littérature, 1999.

Le PACS entre haine et amour, Plon, 1999.Les maires : fête ou défaite ?, Anne Carrière, 2001.Le combat est une fête, Robert Laffont, 2006.

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Roselyne Bachelot

À feu et à sang

Flammarion

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© Flammarion, 2012.ISBN : 978-2-0812- -8791 4

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Avant-Propos

J’aurais pu ne pas publier ces carnets. Les gar-der dans un coin, les laisser au hasard de la curio-sité de mes petits-enfants, les abandonner dansl’obscurité mortelle d’un tiroir.

J’aurais pu, mais je me le serais reproché. Alorscombien même ce que l’on confie au papier selivre parfois difficilement à des lecteurs ano-nymes et inconnus, mieux vaut se débarrasser desa mémoire avant qu’elle ne se débarrasse de vous,puis vous engloutisse. On n’emporte avec soi quece que l’on a transmis aux autres… Le reste dis-paraît, n’a plus de sens quand personne n’est plus

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là pour le donner.Témoin à la subjectivité assumée d’une cam-

pagne extraordinaire, j’ai estimé que chacunméritait de la vivre depuis les coulisses, dans lesconditions exactes dans lesquelles je l’avais tra-versée.

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Certes, j’avoue avoir écrit pour la subir moinsdurement. Quand s’ouvre ce récit fin novembre2011, les Français ont atteint le point culminantde l’incompréhension et de l’exaspération. Uneterrible crise financière et économique secouel’Europe depuis des mois, le président bat desrecords d’impopularité, et cette campagne prési-dentielle apparaît comme la chronique d’unedéfaite annoncée.

Partout en Europe, les gouvernements ont étédésignés par les citoyens comme responsables deleurs difficultés et sont chassés du pouvoir les unsaprès les autres, quelle que soit leur couleur poli-tique.

En France, la victoire de Jacques Chirac en2002 relevait du miracle. Quant à la défaite deSégolène Royal, ses amis socialistes – et au pre-mier chef, François Hollande – y ont sérieuse-ment donné la main. Nos adversaires ne nousferont pas de cadeau une troisième fois.

Pour ne rien arranger, alors que son bilan estremarquable, Nicolas Sarkozy s’est empêtré dansune succession de maladresses d’autant plusdéplorables qu’elles étaient facilement évitables.

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En face de nous, un adversaire sûr de lui, arro-gant, qui travaille sa victoire en coureur de fondet brandit l’antisarkozysme comme seul argumentpour masquer le désert idéologique de son campet la vacuité de son programme.

Voilà pourquoi j’aurais pu tourner la page, sansvous la soumettre, et fuir devant l’échec de mon

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candidat et voilà précisément pourquoi je ne l’aipas fait.

La violence dans laquelle la campagne est néeet la tension extrême dans laquelle elle s’estdéroulée m’ont poussée à tenir un journal, seulrefuge raisonnable au milieu d’une folie déclinéesur tous les tons politiques.

Dans cet univers de craintes et de doutes, uneseule certitude subsiste et elle concerne NicolasSarkozy que je connais si bien et en qui j’ai unefoi profonde : il n’a rien pour lui, sauf lui-même,et tout contre lui, dont lui-même…

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Le bal de la cruauté

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Mardi 29 novembre 2011

Elle vient s’asseoir devant moi, à la table où j’aipris place pour ce dîner organisé par Actioncontre la faim afin de récolter des fonds contre lafamine qui touche la Corne de l’Afrique. Éton-née de son incursion, je la dévisage et remarquel’expression de son regard : la peur s’y litclairement. Après un rapide bonjour, elle medemande : « Dites-moi, ce ne sera pas trop dur,cette campagne ? Vous n’allez pas être trop

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méchants ? Il n’y aura pas de choses tropcruelles ? »

La compagne de François Hollande, ValérieTrierweiler, vient de me poser une question dontelle maîtrise parfaitement la réponse. En journa-liste politique avisée, elle ne peut qu’être lucide

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sur la gravité de l’enjeu de cette campagne etl’âpreté du combat à mener.

Mais, en compagne de candidat à l’électionprésidentielle, elle la redoute. Elle me fait penserà une nageuse qui, jaugeant la hauteur de sonplongeon, panique le court instant précédant lesaut.

Je lui réponds ce qu’elle craint d’entendre :« Vous savez, j’ai vu bien des campagnes. Celle-ci,je peux vous garantir sa cruauté, vous ne serez pasdéçue. »

Je n’exagère pas dans le but de l’épouvantersous prétexte qu’elle appartient au camp de mesadversaires politiques. Mon propos est aussifranc que son interrogation l’était. D’autant que,Angevine comme moi, Valérie Trierweiler, queje connais depuis longtemps, ne suscite chez moiaucune animosité.

Dans ce bref échange donc, pas l’ombre d’uncalcul, aucune stratégie de découragement, seule-

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ment une mise en garde verbalisée, l’anticipationpartagée de la lutte sans pitié que sera cette cam-pagne.

Ce soir-là, je me contente de lui annoncer cequ’elle sait déjà, ce que cette campagne ne man-quera pas d’être. Il s’agit non pas d’une prédiction

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hasardeuse, mais d’une vision étayée par monexpérience des batailles électorales, par ma fonc-tion de ministre des Solidarités et de la Cohésionsociale, et par mon observation des crises mul-tiples qui ligotent le pays après l’avoir secoué etqui créent un climat de paralysie, de défiance etd’incompréhension.

L’incompréhension, c’est ce qui me frappe enpremier lieu. Où que j’aille, j’entends ce sen-timent, j’écoute les questions des citoyens quime paraissent résignés, comme s’ils n’espéraientplus obtenir de réponses claires. Certains, ceuxque les sociologues appellent « les Invisibles »parce qu’ils se tiennent en marge de la vie poli-tique, ont même cessé d’interroger les élus etles experts, pourtant censés être en mesure delivrer une explication valable, c’est-à-dire cohé-rente et compréhensible, du monde qui nousentoure.

Tous les jours, sur le terrain, dans les médias,je rencontre une immense confusion chez lesFrançais.

Invitée, en novembre dernier, de l’émission de

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Vincent Parizot sur RTL, j’entends un auditeuravouer ne pas saisir le rapport entre la dégrada-tion ou la perte d’un A et le taux d’intérêtpuisque lui, quand il emprunte, le fait à taux fixe.

Je mesure encore une fois combien le principeselon lequel le pays doit emprunter plusieursdizaines de milliards par an pour rembourser sa

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dette demeure obscur pour la plupart de nosconcitoyens.

Déstabilisés par la crise économique et finan-cière, les Français ont l’impression qu’on lesétrangle, sans très bien percevoir l’identité de ce« on ». La baguette de pain a augmenté et il fautl’imputer au seul coupable identifiable, l’euro.

Dans cette brèche simpliste peuvent hélass’engouffrer les populismes de tout bord. Quandla situation économique se dégrade, la tentationdu repli, de la réaction plutôt que de la réflexion,se fait irrésistible. Le niveau limbique l’emportesur le cortex cérébral !

Contrairement à la crise de 1929 dont les consé-quences matérielles désastreuses s’étaient accompa-gnées d’une offre idéologique riche, la crisefinancière actuelle ne propose rien d’autre qu’unséisme, qu’une disparition de l’ancien monde sansqu’une amorce de renouveau se dessine.

Cette fois, c’est comme s’il ne s’agissait pasd’une crise cyclique « naturelle », mais d’unemutation radicale qui doit aboutir à l’éclosiond’une société nouvelle, dont les contours demeu-

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rent largement indéterminés.

Les citoyens paraissent ne plus rien voir dedemain et ne plus rien attendre d’aujourd’hui.

Comme le soulignait très intelligemment lephilosophe Marcel Gauchet, invité à une réunionde réflexion du think tank « Le Rameau » que j’ai

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formé il y a quinze ans : « Les économistes ne fontque décrire la crise, ils n’en donnent pas une véri-table explication. La crise reflète une crise intellec-tuelle qui ne propose aucune alternative. Nousdéfinissons nos sociétés occidentales comme étantdes démocraties libérales ; en réalité l’adjectif“libéral” renvoie aux libertés privées, alors quel’aspect démocratique suppose la transformationde ces libertés en pouvoirs politique et collectif. »

Anesthésié par les sévères effets de la crise,amplifiés en juin-juillet 2011, et remis en causedans ses contradictions structurelles – être à lafois un travailleur soucieux de ses droits sociaux,un consommateur avide de produits à bas prix, etun citoyen concerné –, l’individu se recroquevilletoujours davantage sur ses intérêts personnels etse désengage toujours plus de la vie de la cité.

Ce désenchantement de la chose politique semanifeste également chez les plus impliqués quesont les militants. De vieux gaullistes encartés,qui jusqu’alors marchaient au son du canon et sebattaient avec une énergie incroyable, se sontdécouragés et l’expriment de manière nostalgique

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ou brutale, y compris par l’abstention. Dans lesrangs des militants de toute obédience, la foi s’estémoussée.

Le divorce est consommé entre la sociétéfrançaise et ses chefs car celle-ci est caractériséepar une homogénéité qui favorise l’inertie et

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n’encourage pas un projet démocratique et collec-tif. Les repères sont brouillés, les phares presqueéteints, et les acteurs de la scène politique, eux aussi,ont perdu de leur voix et de leur crédit, montrantune usure mal à propos. Un ressort s’est bel et bienbrisé.

La veille du dîner au profit d’Action contre lafaim, je suis amenée à dialoguer sur le plateau de« Mots croisés » avec Marisol Touraine, la conseil-lère de François Hollande sur les questions sociales,et Bernard Thibault, qu’on ne présente plus.

Je suis atterrée : l’un comme l’autre sont murésdans des convictions qui insultent la réalité etpréfèrent la posture idéologique à la positionpragmatique. Les propos archaïques tenus par lesyndicaliste ne suggèrent aucune voie d’action etcontrastent singulièrement avec ceux des syndi-cats allemands qui, par leur fermeté, ont aidé legouvernement à sortir leur pays de l’ornière.

Quant à Marisol Touraine, que j’estime parailleurs, elle campe pendant toute l’émission sur

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des réflexions irréalistes. En l’écoutant, jem’alarme. Faudra-t-il remettre les clés de la mai-son France à des hommes et des femmes poli-tiques qui semblent si lointains, si déconnectésdes véritables préoccupations nationales ?

Je ressens combien de telles séquences télévi-suelles sont anxiogènes pour les Français, en quoi

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elles sont susceptibles de résonner comme unecondamnation. Les remèdes, indiqués par cer-tains politiques afin de les guérir des maux qui lesassaillent, s’apparentent plus à des poisons inven-tés pour les achever !

Une défiance s’est d’ailleurs immiscée progres-sivement dans le pacte qui liait les Français àleurs élus. Les scandales ayant entaché la classepolitique en 2011 ont profondément empoisonnél’atmosphère de la campagne électorale. L’affaireDSK n’a, en aucun cas, servi les intérêts del’UMP, ni ceux des autres partis.

Mon père, qui exerçait le métier de chirurgien-dentiste en plus de ses responsabilités politiques,expliquait un jour à ma sœur en pleine préparationd’un doctorat de chirurgie dentaire qu’il ne fallaitjamais critiquer ses confrères : « Tu vas ouvrir desbouches et voir des travaux calamiteux. Mais, sur-tout, n’en dis jamais de mal. Parce que le patientne pensera pas : “J’ai eu un dentiste épouvantableet maintenant j’ai un bon dentiste.” Il pensera :“Tous ces types-là sont des incapables.” »

Cette leçon s’applique à la vie politique : il ne

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vaut mieux pas se réjouir du malheur de sesadversaires.

Je n’éprouve aucune joie devant l’angoisse de lacompagne du candidat du Parti socialiste. Ni

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aucune peine car la vie politique ne laisse pas deplace à la tendresse.

L’intranquillité que son regard trahit symbo-lise pour moi le début de cette campagne électo-rale. Sa dureté se reflète dans les yeux et, en cemardi 29 novembre, je perçois avec Valérie Trier-weiler que le bal de la cruauté a commencé.

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18. Place de la discorde .............................. 21519. Faux résultats........................................ 22720. Duel nucléaire ...................................... 23721. L’équation magique.............................. 247

Épilogue ...................................................... 257Remerciements ............................................ 259Table............................................................ 261

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N° d’éditeur : L.01ELKN000432.N001Dépôt légal : mai 2012

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