Evaluation de l’approche participative en matière - … · décisionnels spécifiques requis par...

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0 Evaluation de l’approche participative en matière de gestion forestière Cas de la commune rurale Oued Ifrane Sous la direction de : Avec la collaboration de : Abdelilah BAGUARE Mohammed ABDOUH Abdelrhani BOUAYAD Abdelqader CHARBA Mars 2013

Transcript of Evaluation de l’approche participative en matière - … · décisionnels spécifiques requis par...

0

Evaluation de l’approche participative en matière

de gestion forestière

Cas de la commune rurale Oued Ifrane

Sous la direction de :

Avec la collaboration de :

Abdelilah BAGUARE

Mohammed ABDOUH

Abdelrhani BOUAYAD

Abdelqader CHARBA

Mars 2013

1

Remerciements

ette recherche a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre

l’Observatoire National du Développement Humain et

l’Université Moulay Ismaïl de Meknès, avec le soutien des

Agences des Nations Unies au Maroc.

Que les responsables de ces institutions en soient ici vivement

remerciés.

Nos sincères remerciements également à la Faculté des Sciences

Juridiques, Economiques et Sociales de Meknès, qui a pris l’initiative de

publier ce travail.

Nous exprimons aussi notre gratitude à l’ensemble des institutions,

publiques et privées, et personnes ressources, qui ont contribué, de près

ou de loin, à la réalisation de ce travail.

C

2

Sommaire

I. Objectifs et méthodologie de l’étude……………………………….

5

II. Fondements et principes de l’approche participative……………...

8

III. Profil de l’aire de l’étude…………………………………………

11

IV. Déroulement de l’approche participative sur le terrain…………...

38

V. Evaluation de l’approche participative dans le domaine forestier…

63

VI. Conclusions, recommandations et ouvertures…………………… 82

3

SIGLES ET ACRONYMES

ADS Agence de Développement Social

AGAM Association de gestion et d’aménagement du massif

AGAT Association de gestion et d’aménagement du terroir

AGR Activités génératrices de revenus

CCDRF Centre de conservation et de développement des ressources

forestières

CLDH

CPDH

DAS

DAR

DCL

DPA

Comité local de développement humain

Comite provincial de développement humain

Division des affaires sociales

Division des affaires rurales

Division des collectivités locales

Direction Provinciale de l’Agriculture

DPEFLCD-IF Direction Provinciale aux Eaux et Forêts et à la Lutte

Contre la Désertification d’Ifrane

DREFLCD-MA Direction Régionale aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre

la Désertification du Moyen Atlas

FFEM

FNF

GEFRIF

Fonds français pour l’environnement mondial

Fonds national forestier

Projet de protection et gestion participative des écosystèmes

forestiers du Rif

HCEFLCD Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre

la Désertification

ILDH

INDH

Initiative locale de développement humain.

Initiative Nationale de Développement Humain

ODCO Office de Développement de la Coopération

PAGER

PAN-LCD

PDC

PDD

Programme d’alimentation groupée en eau potable

Plan d’action national de lutte contre la désertification

Plan de développement communal

Plan de développement de douar

PMH Petite et Moyenne Hydraulique

4

Introduction

Les liens qui s’établissent entre la pauvreté et la dégradation de l’environnement

sont étroits, complexes et réciproques. En particulier, cette dégradation tend à

pénaliser davantage les populations pauvres. D’une part, parce qu’elle réduit la

productivité des ressources naturelles dont ces populations tirent leur moyen

d’existence (sols fragiles, pâturages dégradés, etc.) et elle les oblige à consacrer

plus de temps à des tâches ménagères comme le ramassage du bois (sous l’effet

de la déforestation), ce qui ampute d’autant le temps consacré au travail agricole

et contribue par conséquent à faire chuter les revenus. D’autre part, les

populations pauvres sont plus vulnérables à certains types de pollution et risques

environnementaux.

Réciproquement, la pauvreté tend à mettre en péril le développement durable. A

la limite de la survie, les pauvres se livrent à une exploitation destructrice des

ressources naturelles (extension des cultures sur des terres marginales et à pentes

élevées, défrichement en quête de nouvelles terres, etc.) et sont souvent

incapables de réaliser les investissements nécessaires à la protection de ces

ressources.

Ces liens renvoient en fait aux interactions entre les différentes dimensions du

développement durable. Ce concept, largement médiatisé, est défini dans le

rapport Brundtland comme « (…) un développement qui répond aux besoins du

présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à

leurs propres besoins ». Au-delà de la pluralité des interprétations qu’il a

suscitée, le développement durable est un développement qui tente d’articuler

l’efficacité économique, l’équité sociale et la préservation de l’environnement.

De par sa complexité, une telle articulation requiert un nouveau mode

d’organisation des acteurs, c’est-à-dire une bonne gouvernance. De ce fait, cette

dernière peut être considérée comme un « quatrième pilier » du développement

durable (Brodhag 1999, cité par Zuindeau et al., 2007). En particulier, la

dimension délibérative et participative contenue dans la notion de gouvernance

est, de plus en plus, considérée comme une réponse adaptée aux besoins

décisionnels spécifiques requis par les caractéristiques de développement

durable.

En matière de gestion forestière, la participation des acteurs aux processus

décisionnels est reconnue comme une démarche pouvant permettre d’assurer

une gestion durable des écosystèmes forestiers, eu égard à la multifonctionnalité

de ces derniers.

5

La présente étude se propose d’évaluer l’approche participative dans le domaine

forestier. Cette approche est entendue ici comme l’implication dans les

processus décisionnels des acteurs extérieurs au cercle politico-administratif

formel. Plus précisément, la notion « d’approches participatives » désigne « (…)

tout arrangement par lequel des acteurs de types différents sont réunis dans le

but de contribuer de manière plus ou moins directe et plus ou moins formelle au

processus de décision » (S. van den Hove, 2002). Le processus décisionnel

recouvre l’ensemble du cycle de vie des actions, projets et politiques :

identification du problème, élaboration des solutions possibles, décision,

évaluation et révision de la décision.

Pour procéder à cette évaluation, la commune rurale Oued Ifrane (province

d’Ifrane), et les massifs forestiers qui chevauchent son territoire (Senoual et

Bekrit), a été choisie comme aire de l’étude. Ainsi, une structuration du travail

en six parties a été adoptée: objectifs et choix méthodologiques de l’étude (I), la

place des approches participatives en matière des politiques de développement

(II), le profil de l’aire de l’étude (III), le déroulement de l’approche participative

sur le terrain(IV), et puis évaluation de cette approche dans l’aire de l’étude(V).

En guise de conclusions, nous dégagerons des conclusions et formulerons des

recommandations (IV).

I. Objectifs et méthodologie de l’étude

L’objectif général de l’étude est de contribuer à développer un référentiel

méthodologique pour l’évaluation des approches participatives dans le domaine

forestier.

L’étude s’assigne aussi les objectifs spécifiques suivants :

-Elaborer et tester une grille d’évaluation des approches participatives ;

-Contribuer à comprendre les liens qui s’établissent entre les différentes

dimensions (économique, humaine, sociale et environnementale) du

développement;

-Formuler des recommandations pour mettre en synergie les programmes de

développement humain et les projets de gestion des ressources naturelles.

-Faire des propositions pour améliorer la conduite des approches participatives

en matière de gestion forestière.

6

-Identifier les besoins en termes de renforcement des capacités des parties

prenantes à la gestion forestière.

Comme nous l’avons précisé, l’étude portera sur la commune rurale 0ued Ifrane,

province d’Ifrane (cf. carte).

Quatre raisons principales justifient ce choix :

D’abord, de par les recettes forestières importantes ainsi que les fonctions

socioéconomiques et environnementales de la forêt (forêts Senoual et Bekrit)

dans cette zone, la gestion forestière est au centre d’importants enjeux

économiques, environnementaux et sociaux, et offre, de ce fait, un champ

particulièrement fertile à étudier. L’aire de l’étude est considérée, en effet,

comme une des zones les plus « litigeuses » de la gestion forestière au Maroc.

Ensuite, des expériences participatives ont été initiées par l’Administration des

Eaux et Forêts du Moyen Atlas dans cette zone. De plus, des projets de

développement forestier et socio-économique ont été réalisés dans les massifs

forestiers indiqués et notamment dans la zone du Parc national d’Ifrane. Ces

expériences et projets offrent une remarquable opportunité pour pratiquer

l’approche participative que nous proposons d’évaluer dans le cadre de cette

étude.

Carte I.1 : La province d'Ifrane

Aire de l’étude

Aire de l’étude

7

Une autre raison de notre choix réside dans le fait que la forêt de l’aire de

l’étude subit une dégradation inquiétante, due notamment à l’utilisation abusive

des droits d’usage (pâturage, ramassage du bois de feu, etc.) et aux coupes

illicites. On note aussi l’existence de dynamiques régressives dans les forêts de

l’aire de l’étude .Cela implique la recherche d’une gouvernance forestière à

même de réaliser un équilibre entre les différentes fonctions des écosystèmes

forestiers.

Par ailleurs, la C.R.Oued Ifrane souffre d’un déficit social inquiétant. Les taux

de pauvreté et de vulnérabilité y sont respectivement de 20,07% et de 24,85% ;

en revanche, les indices de développement humain et de développement social

n’y sont respectivement que de 0,496 et 0,313. Cela fait de la C.R.Oued Ifrane

une des communes rurales les plus pauvres, après celles de Dayet Aoua et

Timahdite.

Du point de vue méthodologique, l’étude adopte une approche qualitative et se

déroule en trois étapes :

-Etape 1: Visite de terrains, rencontre des acteurs locaux et recueil des

documents disponibles. L’étude vise, à la suite de cette première étape, à baliser

le terrain, collecter les données disponibles à travers une revue documentaire, et

esquisser un cadrage socioéconomique et environnemental de l’aire de l’étude.

-Etape 2: Des entretiens approfondis avec des «focus groups» afin

d’appréhender les rôles, les attitudes et les perceptions des différentes parties

prenantes impliquées dans la gestion de la forêt.

Cette technique de collecte de données nous semble mieux adaptée à la

complexité du thème, articulant plusieurs dimensions et composantes (sociale,

humaine, économique, environnementale, institutionnelle, etc.), et imposant un

niveau d’approfondissement et de compréhension fine de l’approche

participative.

Par ailleurs, trois grandes catégories de « focus groups » seront interviewées :

les services techniques, notamment l’administration forestière ; les populations

et les ONG (pastorales et celles œuvrant dans le développement local), et les

communes rurales1. Bien évidemment, d’autres acteurs (autorité locale, conseil

provincial forestier, etc.) et personnes ressources, pour lesquels la gestion

forestière constitue un enjeu, seront interviewés.

Pour recueillir les données, des guides d’entretiens nous ont servis de base de

discussion.

1 Il s’agit bien évidemment de la CR Oued Ifrane (aire de l’étude) mais aussi d’autres communes

forestières s’inscrivant dans le même contexte : Sidi El Mekhfi, Aïn Leuh et Timahdite.

8

-Etape 3: Organisation d’un atelier multi-acteurs, qui rassemblera toutes les

parties prenantes identifiées. L’objectif étant de faire ressortir la nature et les

origines des conflits qui opposent les différents acteurs ainsi que les enjeux de

gouvernance autour de la forêt.

II. Fondements et principes de l’approche participative

L’approche participative, en permettant aux populations de contrôler ou

d’influencer les décisions qui les concernent, tend à devenir un des moteurs

essentiels du développement humain, entendu comme « un processus permettant

aux individus dans une société, d’élargir leur possibilité de choix et leurs

opportunités d’action au sein de cette société » (PNUD, 1992).

La gestion des ressources naturelles constitue un domaine de prédilection des

approches participatives. En matière de politique forestière, le recours à ces

approches est une réponse aux problèmes posés par la gestion centralisée,

considérée comme incapable de garantir la durabilité des écosystèmes forestiers.

Désormais, « le développement participatif » renvoie aux applications de ces

approches aux programmes et projets de développement (rural ou urbain).

En établissant des relations partenariales entre les différentes parties prenantes

concernées par un problème, la démarche participative tente d’articuler les

approches « descendantes » (top-down) et les approches « ascendantes »

(bottom-up). Dès lors, les populations « cibles » deviennent de véritables

« acteurs » de développement (Lazarev G.,1993).

L’essor de cette démarche est lié aux multiples atouts qui peuvent en être

escomptés : légitimation et efficacité des actions engagées, durabilité des effets,

meilleur ciblage des catégories défavorisées, identification des solutions

adaptées, etc.

Même si elle peut se dérouler selon des modalités différentes, l’approche

participative constitue « (…) un ensemble méthodologique qui respecte une

logique d’approche des problèmes et qui se définit à travers la réalisation

d’une série d’étapes » (FAO, 1995). C’est fondamentalement un processus

itératif, qui se déroule selon le cheminement suivant :

9

Tableau II.1: Composantes de l’approche participative

Phases Composantes

Phase préparatoire -Information et sensibilisation de la population concernée

-Choix de la zone d’intervention

-Collecte de données de base

-Programmation des activités sur terrain

Phase de diagnostic

participatif

-Validation des données de base issues de la première phase

-Etablissement d’un profil environnemental et

socioéconomique de la zone d’intervention

-Identification des problèmes, besoins et contraintes

-Identification des potentialités

-Analyse des problèmes et recherche de solutions

-Hiérarchisation des problèmes

Planification -Identification participative des actions prioritaires

-Analyse de faisabilité sociale, technique, économique,

financière et institutionnelle des actions

-Elaboration d’un plan de développement communautaire

-Etablissement du programme d’actions annuel et d’un contrat

relatif à ce programme

Mise en œuvre, suivi et

évaluation

-Programme détaillé de l’exécution

-Exécution et supervision des travaux

-Mise en place d’un dispositif de suivi

-Evaluation des programmes Source : Fait à partir de Secrétariat d’Etat chargé de l’environnement, Rapport de l’atelier de

formation sur « L’approche participative : méthodes et outils », 24-25 avril 2004.

A l’issue de ce cheminement, on assiste à un retour à la première phase de sorte

que le processus continue de façon cyclique. L’objectif ultime étant de créer les

conditions d’un auto-développement et de permettre aux populations de prendre

activement en charge leur propre avenir.

La participation varie en intensité, des formes ayant une faible portée

participative aux formes caractérisées par un véritable transfert de pouvoir aux

individus et populations. L’échelle de participation de Sherry Arnstein (Sherry

R. Arnstein, 1969) permet de mettre en évidence l’existence de paliers

significatifs de participation. Elle montre que la participation à proprement

parler ne commence qu’avec le troisième niveau (pouvoir effectif).

Au Maroc, l’approche participative a été principalement initiée par

l’Administration forestière (Banque mondiale, 2006), et a, par la suite, trouvé un

champ d’application plus large en matière de développement rural. Elle s’est

10

Pouvoir effectif des citoyens – Ce niveau comporte trois échelons. Partenariat :

Ici les acteurs sont invités, non seulement à débattre, mais à négocier. Ces

partenariats se déclinent à travers la formation de comités associant les différents

stakeholders, qui deviennent responsables des décisions et de la planification des

actions. Délégation de pouvoir : Les acteurs ont un réel pouvoir ; ils peuvent

imposer des décisions et disposent d’un droit de véto. Contrôle citoyen : Les

tâches de conception, de planification et de direction du programme relèvent

directement des partenaires.

Coopération symbolique – Ce niveau comporte trois échelons. Information : elle

privilégie un flux à sens unique, sans mise en place de retour (feed back).

Consultation : Elle est censée légitimer la participation, sans aucune assurance

que les attentes et suggestions des acteurs consultés seront prises en compte au

moment de la décision. Il s’agit alors plus d’un simple rituel que d’une véritable

instance de négociation. Réassurance : Elle consiste à autoriser ou même

inviter des acteurs à faire des propositions mais sans leur déléguer un quelconque

pouvoir décisionnaire.

Non participation – ce niveau comporte deux échelons : Manipulation et

Thérapie : Le seul objectif ici est d’éduquer les participants, de traiter (thérapie)

leurs pathologies à l’origine des difficultés du territoire concerné. Le plan qui leur

est proposé est jugé comme le meilleur. La « participation » se résume à obtenir le

soutien du public, au travers des politiques de communication et de publicité.

L’échelle de participation de Sherry Arnstein pour évaluer l’implication des acteurs dans la gestion forestière, cité par Benoît BOUTEFEU, La forêt

mise en scène, L’Harmattan, 2009.pp.255-256.

Echelle de participation de Sherry Arnstein

11

faite selon plusieurs modalités : une participation obligatoire (dans les grands

projets hydro-agricoles, les projets d’aménagement des bassins versants, etc.),

une participation/ partage des coûts (programmes sectoriels : PAGER, PERG,

PNCRR, etc.), et une participation fondée sur les principes du développement

conduits par les communautés (élaboration des plans de développement des

douars (PDD), etc.) (Banque mondiale, 2006).

L’approche développée par l’INDH est une réelle rupture dans cette évolution :

plutôt que de solliciter l’adhésion des populations aux projets proposés, un

dispositif de participation, permettant aux acteurs participants de prendre eux-

mêmes des initiatives locales de développement, a été mis en place. L’objectif

étant d’enclencher une dynamique pérenne de développement.

En somme, il existe donc un référentiel marocain en matière de participation, qui

mérite d’être évalué. C’est ce que le présent travail cherche, modestement, à

faire en partant du cas de la gestion forestière.

III. Profil de l’aire de l’étude

L’approche participative prend place dans un contexte socioéconomique et

institutionnel régi par de représentations, et des rapports de pouvoir et d’intérêts

différents, voire contradictoires. Son déroulement ainsi que ses performances

s’en trouvent profondément influencés. Afin d’esquisser le profil de ce contexte,

nous examinerons successivement le contexte socioéconomique (1), le profil

environnemental (2) et le dispositif institutionnel (3).

1. Profil socioéconomique

La C.R.Oued Ifrane a été créée en 1992. Elle s’étend sur un territoire de 583,71

km2 limité (Monographie de la commune) :

-Au Nord par les communes de Sidi El Mekhfi et Ain Leuh

-A l’Est par les communes de Sidi El Mekhfi et Ain Leuh

-Au Sud et l’Ouest par la province de Khénifra.

La population de la commune est composée des fractions des Ait Boubker, Ait

Ahmed ou Naceur, Ait Sidi Moussa, Ait Sidi Moussa ou Lyass, Ichouaouene et

Zaouia d’Ifrane, et se trouve répartie sur 28 douars.

12

Pour esquisser le profil socioéconomique de la commune, il est important de

développer les axes suivants : démographie, caractéristiques socioéconomiques,

et atouts et contraintes de l’aire de l’étude.

1.1. Démographie

- Evolution démographie

Cette analyse vise à esquisser le profil et la dynamique démographiques de la

commune, en vue d’en connaître les caractéristiques. Le tableau suivant donne

l’évolution de la population totale par milieu de résidence, selon les résultats des

recensements 1994 et 2004.

Tableau III.1: Evolution de la population de la commune d’oued Ifrane (1994-2004)

Commune 1994 2004 TAAM TAG

Oued Ifrane 9882 11 028 1.1 11.6

Dont Centre Had Oued

Ifrane

2488

Population rurale 8540

TAAM : taux d’accroissement annuel moyen ; TAG : taux d’accroissement général

Source : RGPH(2004)

De l’examen de ce tableau, il ressort les constats suivants :

-Le taux d’accroissement annuel moyen de la population de la commune Oued

Ifrane serait de 1.1% ; ce taux est proche de celui de la province (1.2%).

-Le taux d’accroissement général durant la période 1994-2004 s’élève à 11.6%.

-La population rurale de la commune s’élève à 77.4%, contre 22.6% pour le

centre oued Ifrane . - Structure de la population

Le tableau ci-après présente la répartition de la population de la commune selon

l’âge et le sexe.

Tableau III.2: Structure par âge et par sexe de la population

Tranche d’âge Sexe Ensemble

masculin Féminin

Moins de 6 ans 11.3 10.9 11.1

6 à 14 ans 19.1 18.4 18.7

15 à 59ans 58 59.9 58.9

60 et plus 11.7 10.8 11.3

effectif 5400 5628 11028 Source : RGPH (2004)

13

La principale caractéristique de la structure d’âge de la population de la C.R

Oued Ifrane est la proportion des personnes en âge d’activité, qui s’élève à

58,9%.

La proportion des moins de 15 ans s’élève à 29,8% de la population communale,

ce qui implique un grand besoin au niveau des infrastructures de base, en

particulier les services d’éducation et de santé.

La proportion de personnes âgées de plus de 60 ans serait, quant à elle, de

11.5%, ce qui témoigne du poids inhérent à la prise en charge des personnes

âgées et des besoins en termes de soins de santé correspondants.

Quant à la répartition de la population selon le sexe, il est important de souligner

qu’il existe presque une égalité entre les deux sexes dans toutes les tranches

d’âge.

- Evolution de la structure par ménages

Le tableau suivant montre une évolution croissante des ménages de 1761 en

1994 à 2150 en 2004, soit une augmentation de 22%.Cela s’explique

probablement par la création de nouveaux foyers pour des jeunes couples et par

une certaine tendance à l’effritement des familles élargies.

Tableau III.3: Evolution du nombre de ménages

1994 2004

Oued Ifrane effectif ménages effectif ménages

9882 1761 11028 2150 Source : RGPH, 2004

Quant à la taille moyenne des ménages, elle s’élève à 5,1 personnes par ménage.

Au total, le profil démographique de la commune est marqué par :

- la prépondérance de la population active (58.9%), ce qui pose la question de la

capacité de la commune à relever le défi de l’emploi.

-le poids relativement important des moins de 15 ans (29.8%) ; ce qui implique

un effort considérable pour l’offre des services de santé et d’éducation.

- une égalité entre deux sexes dans toutes les tranches d’âge.

14

1.2. Caractéristiques socio-économiques

-Scolarisation

Outre le taux élevé d’analphabétisme dans la commune Oued Ifrane (68,3% au

total et 78,1% pour les femmes), l’aire de l’étude se caractérise par des bas

niveaux de scolarisation, notamment dans les zones péri forestières.

Tableau III.4 : Population de 10 ans et plus selon le niveau d’études

C R Oued Ifrane Centre de Souk El Had Milieu rural

Préscolaire M F T M F T M F T

1,7 0,2 0,9 3 0,1 1,4 1,3 0,2 0,7

Primaire,

collégial et

secondaire

38 21,3 29,55 58,2 38,1 47,3 32,

4

15,9 24,1

Supérieur 2 0,7 1,3 4,6 1,9 3,2 1,3 0,3 0,8 Source : RGPH 2004

Plusieurs remarques peuvent être tirées de ce tableau :

-L’enseignement préscolaire est presque inexistant dans la commune.

-Le taux de scolarisation dans le primaire – collégial et secondaire- ne dépasse

guère 29,5%. Ce taux masque une disparité énorme entre le milieu rural et

urbain. A Souk El Had, ce taux s’élève à 47,3% contre 24,1% dans le milieu

rural.

Concernant le taux de scolarisation par sexe, il est important de souligner que

l’écart est impressionnant : le taux de scolarisation des garçons dans la

commune s’élève à 38%, contre 21% par les filles. Vraisemblablement, cette

différence tient à la conjugaison de plusieurs facteurs tels que la distance

séparant l’école du domicile, le problème d’accessibilité surtout durant les

périodes de neige, le niveau de vie modeste des ménages, le mariage précoce de

la jeune fille, etc.

- Le taux d’inscription au niveau supérieur ne dépasse guère 1,3% au niveau de

la commune, avec 0,8% au milieu rural. Cela s’explique par un taux de

déperdition élevé au niveau secondaire et par l’incapacité d’une grande partie

des ménages à supporter les coûts inhérents à la poursuite des études de leurs

enfants en université.

15

-Emploi

S’agissant de l’emploi, le taux d’activité au niveau de la commune serait de 38%

(RGPH 2004) et la situation dans la profession des actifs occupés se présente

comme suit :

Tableau III.5: Répartition des actifs occupés selon le statut professionnel

H F Total

Employeur 1,8 1,0 1,6

Indépendant avec local 31,0 8,4 26,3

Indépendant à

domicile

0,5 38,4 8,4

Indépendant ambulant 4,5 5,4 4,7

Salarié secteur public 4,1 2,6 3,8

Salarié secteur privé 27,7 18,5 25,8

Aide familial 30,0 25,4 29,1

Apprenti 0,2 0,2 0,2 Source : RGPH 2004

L’analyse de la répartition des actifs selon la profession montre la prédominance

des statuts « indépendant avec local », « salarié secteur privé » et « aide

familial ». Les femmes sont relativement bien représentées au niveau de la

catégorie « indépendants à domicile ».

-Equipements collectifs2

Dans l’aire de l’étude, l’accès à certains services de base est estimé par le

tableau ci-après :

Tableau III.6 : Accès à l’eau potable et l’électricité

Taux d’accès à l’eau potable 68%

Taux de couverture en électricité 80% Source : Monographie communale

Ces taux doivent être interprétés avec prudence car ils cachent d’importantes

disparités entre le Centre Had Oued Ifrane et le reste de la commune. L’indice

de développement social de la commune(0,313) témoigne d’ailleurs du faible

niveau d’équipement de celle-ci.

Dans les zones péri forestières, l’accès à certaines infrastructures

socioéconomiques de base s’avère plus difficile, comme en témoignent les

2 Ce point sera approfondi ultérieurement

16

distances parcourues entre les triages et les centres de santé et établissements

scolaires.

Tableau III.7: Distances entre triages et établissements scolaires et centres de

santé (en Km)

Disrtict Triage Dispensaire Primaire Collège Lycée Université

Meknès

Bekrit Assaka

N’ouwam

5 5 40 70 140

Senoual Est 8 0 60 90 160

Senoual

Ouest

8 0 60 90 160

Source : Plan d’aménagement de la forêt Senoual, p.37.

Comme le montre ce tableau, l’accès à un dispensaire ou la fréquentation des

établissements scolaires oblige parfois à parcourir de longues distances allant de

5 km (dispensaire et primaire) à 90 km (pour les élèves du lycée).

1.3. Contraintes et atouts de l’aire de l’étude

L’aire de l’étude se caractérise par un système de production de type agro-sylvo-

pastoral avec une nette dominante de l’élevage.

La SAU est estimée à 13.850 ha, dont 7400 (céréales), 2365 ha (cultures

fourragères), 415 ha (arboriculture).

L’élevage, de type extensif, est pratiqué sur les parcours collectifs (31.883 ha) et

forestiers (12.638 ha). L’effectif du cheptel serait de 101.314 têtes,

dont 64,35% ovins, 34,54% caprins et 1,1% bovins.

Cette activité est handicapée par plusieurs problèmes, dont en particulier:

-L’insuffisance des ressources fourragères ;

-La hausse du prix des aliments de bétail ;

-La faible structuration du secteur ;

-Le problème de commercialisation des produits ;

-La faible valorisation des produits de terroir (viande, lait, etc.).

La forêt couvre une superficie de 12.094ha, soit 10,43% de la forêt provinciale.

Bien qu’elle connaisse une dégradation et des dynamiques régressives, la forêt

remplit des fonctions socio-économiques et environnementales incontestables.

Elle génère aussi des recettes forestières non négligeables :

17

Tableau III.8: Evolution des recettes forestières de la C.R. Oued Ifrane

Source : DCL, Province d’Ifrane

Les recettes forestières dont dispose la commune, qui contribuent à raison de

95% au budget communal, affichent une tendance baissière à cause notamment

de la dégradation du patrimoine forestier. A cela s’ajoute une gestion financière

basée sur un partage « équitiste » du budget selon les circonscriptions

électorales, ce qui impacte négativement les interventions de la commune en

matière de développement.

En dépit des contraintes au développement local, l’aire de l’étude dispose

d’atouts incontestables.

Les principales faiblesses/contraintes se résument en :

-L’étendue de la commune. Celle-ci s’étend sur une grande superficie (583,71

km2). Il en découle un renchérissement des coûts d’équipement (eau potable,

électricité, aménagement hydraulique, etc.), et ce d’autant plus que l’habitat

dans certaines localités de la commune est assez dispersé.

-Hétérogénéité du milieu physique. Globalement, ce milieu est composé de trois

composantes occupant des franges altitudinales variées : plateau central ou

Azaghar (s’étendant de 600m à 1300m), le Jbel (au-delà de 1500m) et le Dir, au

milieu. Dans la zone forestière, Bekrit notamment, l’altitude peut aller jusqu’à

2300m. Cette hétérogénéité requiert une diversité des actions et projets à mener

dans le territoire communal.

-Le problème de l’accessibilité. Le maillage routier insuffisant et l’enclavement

des populations en période de neige entravent l’accès des populations aux chefs

lieux des communes ou/centres ruraux à des fins d’alimentation en denrées

alimentaires et aliments de bétails. Ils portent aussi préjudice aux actions de

soutien et de proximité.

-La faiblesse des filières économiques aval. Comme le reste de la province,

l’aire de l’étude souffre d’une faible valorisation des produits agricoles et

forestiers (viande, lait, laine, bois) (Plan d’aménagement du parc national

Année Recettes forestières(DH)

2005 18 611 418,50

2006 13 698 847,06

2007 10 526 355,00

2008 12 506 335,00

2009 9 171 039,00

18

d’Ifrane, 2007, p.5). L’essentiel de la valeur ajoutée de ces filières se crée

ailleurs ; d’où une faible dynamique d’amélioration des systèmes de production

agro-sylvo-patoraux.

-Déficit en infrastructure socio économique de base. Au niveau de l’aire de

l’étude, on note l’existence d’un centre de santé communal et de deux

dispensaires ruraux, dont l’équipement laisse beaucoup à désirer. En matière

éducative, la distance parcourue par les élèves pour se rendre aux établissements

scolaires, pouvant aller dans certaines localités jusqu’à 5 km pour l’école

primaire et nettement plus pour le collège et le lycée, est un puissant facteur de

déperdition scolaire en général et des filles en particulier.

Afin de contribuer à lever ces contraintes, surtout en zone de montagne, un

ambitieux projet de développement intégré Bekrit-Agdal est en cours

d’exécution, dans le cadre du programme transversal INDH.

Schéma : Projet intégré Bekrit-Agdal

INDHPROMOTION NATIONALE

CR S EL MEKHFIO.IFRANE

CONEIL PROVINCIAL

ÉDUCATION NATIONALE

G C ATTANMIA

SANTETerrain +Travaux de finition des

2 l’internats1 400 000,00

Construction et équipement de 2 écoles communautaires

Équipement des 2 internats

2 652 724,00

Terrain + Equipement du module d’accouchement et

centre hospitalier rural

550 000,00

Acquisition d’une ambulance 380 000,00

Construction de 2 internats 5 024 860,00

5 404 860,00

35 550 457,00

PROJET INTÉGRÉ

BEKRITE AGDAL

Construction d’un module d’accouchement et logement

d’ infirmiers

1 332 873,00

Travaux de finition de 2 internats

1 200 000,00

Acquisition

2 chasses neige Un Chargeur trax

Camions citernes

6 500 000,00

Projet intégré2009 - 2010

Construction d’un poste khalifa

Acquisition d’ 1 fraise

5 550 000,00 Aménagement du dépôt communautaire

30 000,00

Local 370 000

Aménagement des Seguias

1 480 000,00

Aménagement et construction des routes

9 080 000,00

DGCL et BG

DPA

DPE

ANOC

Source : La D.A.S, Province d’Ifrane.

19

Ce projet a été conçu et élaboré suite à un diagnostic participatif avec la

population de la zone. Avec un effet de levier de 84%, il touche bon nombre de

dimensions de la vie économique et sociale (module d’accouchement,

renforcement des moyens de déneigement, cantine scolaire et internat,

rapprochement de l’administration, dépôt communautaire, aménagement

hydraulique, etc.).

Face aux différentes contraintes/faiblesses, l’aire de l’étude dispose

d’atouts/opportunités pouvant ouvrir de larges perspectives de développement.

Ces atouts/opportunités se situent surtout dans le domaine agricole et le tourisme

de montagne.

En matière agricole, l’aire de l’étude dispose d’un potentiel d’arboriculture non

négligeable (olivier, notamment). La décélération des mouvements de

transhumance offre l’occasion d’intensifier l’élevage et, ce faisant, d’augmenter

la productivité. L’aire de l’étude possède également des atouts majeurs pour le

développement du tourisme écologique (cédraie, SIBE, produits du terroir, etc.).

Un tel développement trouve sa place dans le concept pays d’accueil touristique

(PAT), projet visant à organiser et structurer l’offre touristique rurale afin d’en

faire un levier de développement économique et social.

2. Profil environnemental

Les forêts Senoual et Bekrit s’étendent respectivement sur 5923 ha et 10.345,08

ha. Le territoire communal de la C.R.Oued Ifrane comprend 82% de la

superficie de Senoual (soit 4873,47 ha) et 69,86% de celle de Bekrit (7221ha).

20

Carte III.1 : Situation administrative des forêts Senoual et Bekrit

Source : Plans d’aménagement des forêts Senoual et Bekrit

21

Homologués et en cours d’immatriculation, ces deux massifs se composent

essentiellement des essences forestières suivantes :

Tableau III.9: Répartition des superficies forestières des forêts Senoual et Bekrit

Forêt Senoual Forêt Bekrit

Essence Composition Superficie

(ha)

superficie

(en %)

Superficie

(ha)

superficie

(en %)

Cèdre Cèdre pur

Cèdre en mélange

avec le chêne vert

871,90

3019,26

17,88

61,91

3424,87

3337,05

33

33

Chêne

vert

Chêne vert pur 400,75 8,22 727,53 7

Autres

581,56 11,92 2855,63 27

Total

4873,47 100,00 10.345,08 100,00

Source : fait à partir de :

- Plan d’aménagement de la forêt Senoual, septembre 2007.

- Plan d’aménagement de la forêt Bekrit, septembre 2007. Les chiffres fournis ici concernent toute la

forêt, c’est-à-dire y compris la partie du massif appartenant à la commune rurale de Sidi El Makhfi.

Les données de ce tableau montrent que :

-Les peuplements de cèdre purs occupent 17,88% de la superficie totale de la

forêt dans le cas de Senoual et 33% à Bekrit.

-Les peuplements de cèdre pur et en mélange avec le chêne vert représentent

79,79% de la superficie totale de la forêt à Senoual et 66% à Bekrit.

Les plans d’aménagement des deux forêts montrent aussi que le cèdre (pur ou en

mélange avec le chêne vert) présente un état de rajeunissement assez important.

De par cette composition (poids de la cédraie), les deux massifs génèrent des

recettes forestières substantielles et se trouvent, de ce fait, au centre

d’importants enjeux économiques, sociaux et environnementaux.

Ces forêts présentent des atouts considérables tant sur le plan écologique que sur

le plan socio-économique. Comme tous les écosystèmes forestiers, elles assurent

en effet plusieurs fonctions écologiques telles que la régulation du régime des

cours d’eau, la protection des sols contre l’érosion, la lutte contre la

désertification, l’humidification du climat, la préservation de la biodiversité, etc.

22

Ce rôle écologique capital est doublé d’une valeur socioéconomique non moins

importante. Outre son potentiel de création de richesses, d’emplois et de

revenus, la forêt est un élément essentiel d’attrait touristique et de récréation.

Des dynamiques destructives empêchent cependant les écosystèmes forestiers de

l’aire de l’étude de remplir convenablement ces multiples fonctions. Ces

dynamiques tiennent à la conjugaison de plusieurs facteurs tels que la fragilité

des écosystèmes, le poids des structures économiques et sociales, le surpâturage,

le rétrécissement de la transhumance et les délits forestiers.

2.1-Vulnérabilité écologique

Les conditions climatiques défavorables semblent être un important facteur de

dépérissement de la forêt. Les sécheresses longues et fréquentes ayant sévi ces

dernières années participent, fort vraisemblablement, au dépérissement du cèdre,

espèce s’accomodant le plus avec des climats humide et subhumide froid.

De telles conditions rendent la forêt (cèdre, en particulier) particulièrement

vulnérable aux attaques et infections diverses (mjej, tordeuse du cèdre, etc.).

L’écorçasse des cèdres par le singe magot est aussi considéré comme une des

causes du dépérissement du cèdre.

2.2 -Pauvreté, démographie et enclavement

De manière générale, la pauvreté tend à mettre en péril les écosystèmes

forestiers. A la limite de la survie, les pauvres se livrent à l’exploitation

destructrice de ces écosystèmes pour y puiser des moyens d’existence (produits

ligneux et non ligneux, défrichement en quête de nouvelles terres, etc.).

Cet impact tend à s’accentuer durant certaines périodes (sécheresse, neige,) où

les populations péri forestières3 se rabattent sur la forêt en quête d’unités

fourragères gratuites4 et de produits forestiers commercialisables.

On rappellera que les taux de pauvreté et de vulnérabilité, dans l’aire de l’étude,

sont respectivement de 20,07% et de 24,85%. C’est dire le déficit social

3 Les populations péri forestières sont déterminées selon un critère de proximité de l’habitat principal

ou secondaire par rapport à la forêt. Elles habitent des localités dont la limite a été fixée aux alentours

de 5km par rapport à la lisière de la forêt (Sogreah-TToba, 2005). 4 En périodes de sécheresse, les populations, vulnérables et pauvres, propriétaires du bétail se trouvent

souvent contraints de vendre leurs troupeaux dans l’urgence à bas prix, ce qui peut les faire tomber

dans la pauvreté ou sombrer davantage dans la pauvreté chronique.

23

inquiétant dont souffre l’aire de l’étude, et en particulier les zones péri

forestières.

De ce fait, la forêt devient une véritable « caisse de sécurité sociale », appelée à

fournir des moyens d’existence aux populations pauvres et vulnérables.

Par ailleurs, l’évolution démographique accentue la pression sur les écosystèmes

forestiers. Comme l’ont montré des études menées sur différents problèmes

d’environnement (déforestation, désertification, dégradation des sols, etc.) dans

diverses régions des pays en développement (D.Tabultin et E.Thilgès, 1992), la

démographie n’intervient pas seule, mais en association avec d’autres facteurs

(pauvreté, régimes fonciers, etc.).

A Senoual et Bekrit, les prélèvements de bois de feu sont à rattachés au climat

rigoureux de la zone, à la disponibilité du bois et au bas coût de son ramassage.

Ces prélèvements peuvent être grossièrement estimés moyennant les données

des plans d’aménagement des deux forêts.

Tableau III.10: Estimation des prélèvements du bois dans les forêts Senoual et Bekrit

Senoual Bekrit

Population en 2009* 2136 2894

Nombre de ménages** 350 508

Consommation de bois par foyer

(tonnes/an)

6,8 6,8

Prélèvement de bois 2380 3455

Consommation globale 5835 tonnes/an Source : Fait à partir des plans d’aménagement des deux forêts

*en 2002, la population péri forestière était d’environ 1911 habitants. En retenant un taux

d’accroissement moyen annuel de 1,6% (plan d’aménagement de Senoual) , l’estimation de la

population 2009 serait de 2136 hab. le plan d’aménagement de Bekrit considère que la population péri

forestière de Bekit est stationnaire (taux d’accroissement nul)

**La taille moyenne des ménages à Senoual serait de 6,1 personnes par ménage ; à Bekrit cet

indicateur serait de5,7.

Ces prélèvements (légaux et/ou illicites) servent à satisfaire le besoin

énergétique de la population péri forestière .A Senoual, ces prélèvements sont

nettement supérieurs à la productivité annuelle de la forêt, estimée à 1623

tonnes/an (Plan d’aménagement de la forêt Senoual).

24

Cliché pris par nos soins (forêt Senoual):Dans des conditions climatiques difficiles, les populations péri forestières se rabattent sur la forêt en quête de bois pour satisfaire leur besoin énergétique.

Concomitamment, l’enclavement de la zone favorise, à son tour, la

déforestation. Il pèse notamment sur la valorisation des produits locaux et

renchérit les produits en provenance des autres régions (combustibles,

notamment). Cela contribue à faire baisser les revenus et à accroitre les prix des

combustibles ; d’où une pression accrue sur la forêt.

2.3- Surpâturage

Comme souligné précédemment, l’aire de l’étude se caractérise par un système

de production de type agro-sylvo-pastoral avec une forte dominante de

l’élevage. Les conditions socioéconomiques ainsi que l’évolution

démographique se traduisent par des phénomènes régressifs au niveau des

écosystèmes forestiers.

Les pâturages en forêts (Senoual et Bekrit) sont exploités selon des parcs de

parcours ; chaque parc étant composé par des parcelles désignées par le plan

d’aménagement et dominé par une fraction de tribu.

Le recours aux parcours forestiers s’étale sur une bonne partie de l’année. En

saison hivernale (novembre à mars), ainsi qu’en période de disette, celui-ci est

pratiqué simultanément avec la mobilisation des parcours de chaumes et la

complémentation (son, paille, orge, etc.). Etant donné les charges que la

complémentation impose à la trésorerie des éleveurs, l’ébranchage du cèdre et

du chêne vert est très souvent pratiqué afin de réduire le déficit fourrager.

25

Le déséquilibre pastoral qui apparait ainsi entraîne un surpâturage très marqué

au niveau des deux forêts et, en conséquence, un appauvrissement des parcours

et un essoufflement des dynamismes régénérateurs des forêts.

Certaines pratiques pastorales contribuent à alimenter le processus de

surpâturage. Parmi ces pratiques, l’on peut citer :

-un système d’élevage extensif, fortement dépendant de la forêt ;

-une exploitation des troupeaux en association entre ruraux et citadins5,

-une gestion des cheptels basée sur la recherche d’un nombre de têtes élevé au

détriment de la production.

2.4-Changement des modes d’utilisation de l’espace

Le surpâturage est aussi exacerbé par les mutations de la gestion des parcours.

Celle-ci a en effet connu des mutations profondes liées notamment à la rupture

de la pratique de l’Agdal, qui se basait sur la mise en défens des pâturages des

hauts sommets avant la transhumance d’été. Le dérèglement de ces mouvements

de transhumance par la mise en culture des zones basses a réduit l’espace

pastoral et entraîné, en conséquence, surpâturage et déforestation (Mohammed

Mahdi, 1999).

Comme le montre la figure ci-après, le système de transhumance permet de tirer

profit de la complémentarité liée aux déplacements réciproques des troupeaux

qui pâturent l’hiver dans l’Azaghar (plaine) et séjournent dans les forêts du

Moyen Atlas le reste de l’année, en passant par le Dir pendant le printemps et

l’automne.

5 Un tel détournement des droits d’usage à des fins commerciales et spéculatives est en fait interdit

par la législation forestière. L’article 22 du Dahir du 15 avril 1949 stipule en effet, « (…) Les

troupeaux en cheptel ou en association avec des non usagers sont exclus du bénéfice du droit de

parcours. ». Le phénomène prend de l’ampleur avec l’émergence de gros éleveurs « urbains

absentéistes », qui emploient la plupart du temps des bergers (Sogreah TToba, 2004).

26

Source: Le grand livre de la forêt marocaine, 1999,p.197

Dans ces différents milieux, des pratiques ancestrales de mise en défens et de

discipline commune permettent de régénérer les ressources pastorales (Agdal).

Autrement dit, la gestion des pâturages comme biens communs se faisaient selon

des règles bien définies d’accès et d’exploitation. Cela contredit le schéma

véhiculé par Hardin (1969) (The tragedy of the commons), selon lequel

l’exploitation des ressources communes conduit inéluctablement à leur

dégradation6.

Aujourd’hui, la tendance au rétrécissement du système de transhumance entraine

une dégradation des ressources pastorales et des terrains de parcours.

6 En fait c’est l’absence de propriété, et son corolaire l’inexistence de règles d’accès et d’exploitation,

qui entraine dégradation des ressources. La véritable tragédie est celle du libre accès. (Lazarev, 1993).

27

2.5-Délits forestiers

L’ampleur des délits témoigne de l’importance des pressions subies par la forêt.

Le tableau ci-après retrace les délits constatés au niveau des massifs forestiers de

la province d’Ifrane.

Tableau III.11: Situation des délits constatés entre 2005 et 2010

Année Coupe de bois Pâturage Labour en domaine

forestier

Divers

2005 828 255 27 150

2006 647 198 51 244

2007 795 235 64 275

2008 744 164 22 280

2009 530 100 09 183

2010 112 26 01 28 Source : DPEFLCD-IF

Ces données montrent qu’au niveau des massifs forestiers de la province

d’Ifrane les délits les plus répandus sont les délits de coupe du bois et les

parcours dans les mises en défens. Le tableau suivant rend compte de ces délits

dans les forêts Senoual et Bekrit.

Tableau III.12: Evolution du nombre de délits de coupe de cèdre sur la période 2005-

2009 dans les forêts Senoual et Bekrit

Année Nombre total des délits Volume abattu

2005 35 450

2006 96 895

2007 97 1365

2008 113 2810

2009 69 8470

Total 410 13990 Source : DREFLCD-MA

La lecture de ce tableau montre qu’après un pic enregistré en 2008 (113 délits),

le nombre de délits baisse à 69 en 2009 ; cependant, le volume abattu s’accroit

considérablement. Cela s’explique probablement par la variation du volume

abattu par délit constaté ainsi que par le caractère de plus en plus destructif des

abatages illicites du cèdre.

28

Délit de coupe de cèdre constaté à Senoual

Les délits de parcours dans les mises en défens, quant à eux, témoignent de

l’exercice abusif des droits d’usage dans les espaces forestiers. Ces délits

tendent à compromettre la restauration et la reconstitution des ressources

forestières.

On rappellera que la pratique de mise en défens7 désigne la mise en place de

clôtures permettant de restreindre l’usage d’une partie du domaine forestier afin

de favoriser la régénération naturelle.

En 2010, la superficie totale mise en défens dans le Moyen-Atlas est d’environ

37413 ha8. Le non respect des mises en défens impacte négativement le taux de

réussite des projets forestiers (régénération et reboisement).

Les délits prennent généralement la forme d’abattages illicites des arbres,

notamment le cèdre. Des « filières organisées » s’adonnent à ce type de

pratiques : des madriers squattés, issus des arbres abattus, sont transportés à dos

de mulets, puis embarqués à destination de certaines villes. Les personnes qui y

opèrent sont bien équipées (tronçonneuses, téléphones portables, moyens de 7 Selon la législation forestière, la mise en défens ne peut dépasser 20% de la surface d’une forêt. Elle

est appliquée dans les cas suivants :

-Les reboisements (exigeant une mise en défens de 10 ans) ;

-Les parcelles de régénération prévues dans les plans d’aménagement (nécessitant une mise en défens

de 20 ans) ;

-Les surfaces exploitées à blanc étoc (chêne-vert, arganier, thuya et eucalyptus).

-Les surfaces incendiées. 8 DREFLCD-MA.

29

transports, etc.) et procèdent souvent à une vraie surveillance des forestiers afin

de saisir le moment opportun d’organiser leurs assauts.

Pour contrer les délits forestiers, l’administration forestière mobilise les

amendes dont le niveau commence à partir de 200 DH et augmente en fonction

de la gravité de l’infraction. Bien que leur niveau soit jugé dissuasif, les

amendes butent, selon le HCEFLCD, sur la non exécution des jugements9.

Ce facteur est exacerbé par la faible probabilité, pour les contrevenants, de se

faire prendre, à cause notamment du faible taux d’encadrement de la forêt

(5000ha de forêts/agent).

3. Dispositif institutionnel

Depuis l’apparition du concept de développement durable, la forêt n’est plus

considérée comme un simple réservoir de ressources ligneuses, mais davantage

comme un écosystème offrant une multitude de services environnementaux et

assurant diverses fonctions socio-économiques. De là découle la multiplicité des

parties prenantes, aux intérêts différents et parfois opposés, impliquées dans la

gestion forestière.

L’examen du dispositif institutionnel dans l’aire de l’étude vise à identifier les

acteurs intervenant en forêt et analyser les rapports de force en vigueur et, ce

faisant, identifier les leviers d’action pouvant permettre d’évoluer vers une

gouvernance forestière à haute portée participative.

Le dispositif institutionnel se caractérise par l’intervention de plusieurs parties

prenantes, dont en particulier la population et les ONG, l’Administration

forestière et la commune rurale. Progressivement, ce cercle s’élargit à d’autres

acteurs qui revendiquent un rôle accru dans la gestion de la forêt (exploitants

forestiers, opérateurs touristiques, gestionnaire de l’eau, etc.).

3.1. Identification des intervenants en forêt

-Populations et ONG

La population péri forestière (Senoual et Bekrit) serait de 5030 hab (estimation

2009), soit 45,61% de la population totale (11028) de la commune rurale Oued

Ifrane.

9 Le 15-04-2010, les responsables de la DREFLCD-IF invitèrent un groupe de magistrats à une visite

des forêts Senoual et Bekrit ; l’objectif était de sensibiliser les magistrats aux immenses dommages

infligés par les délits forestiers.

30

Ces populations sont organisées en institutions traditionnelles, notamment les

fractions de tribus. Celles-ci, en dépit de la régression de leur rôle, continuent à

exercer un rôle majeur en matière d’exploitation des parcours collectifs et

forestiers. C’est pourquoi les Machyakhas (structures correspondant à un

découpage administratif en termes de fractions de tribus) servent généralement

d’unités de base pour la création des associations sylvo pastorales,

représentatives des populations et parties prenantes dans le processus de

partenariat avec l’Administration forestière.

Très souvent, les populations contestent encore la domanialité publique de la

forêt. Cette perception nuit à la relation avec les forestiers et entrave les actions

et projets réalisés. Elle est attisée par la perception qu’ont les populations du

mode d’affectation des recettes forestières.

Si elle est menée de façon appropriée, l’approche participative permettrait de

légitimer la domanialité publique et d’instaurer une gouvernance durable des

écosystèmes forestiers.

Par ailleurs, les populations locales prennent des initiatives collectives

spontanées formidables. Il en est ainsi, par exemple, de la construction des

conduites d’eau pour augmenter la capacité de stockage des « chaabas »,

véritables réservoirs d’eau.

Clichés pris par nos soins : des initiatives locales spontanées en matière hydraulique

Ces initiatives, et bien d’autres, méritent d’être encouragées et encadrées. C’est

ce que tentent certaines ONG de faire.

31

Le mouvement associatif et coopératif est relativement jeune et connaît un

développement remarquable. Il est composé des associations sylvo-pastorales

représentatives des populations péri forestières, des coopératives10

et des

associations de développement local.

D’après une enquête de recensement exhaustif des associations au niveau de la

province d’Ifrane, les ONG qui opèrent dans le domaine du développement local

seraient de 151, dont 14 au niveau de la C.R.Oued Ifrane. Le profil des

associations recensées peut être décrit comme suit11

:

-Plus de 50% des associations ont été créées au cours de la période 2002-2006 ;

- 92% des associations est de type ordinaire et 8% sont d’utilité publique

(AUEA) ;

-98% d’entre elles inscrivent leurs activités à une échelle locale, contre environ

8% au niveau régional et 4% au niveau national ;

-Environ 48% des présidents d’associations ont un niveau supérieur contre 33%

secondaire, 7% primaire et 13% analphabètes. Chez les trésoriers, les données

du recensement montrent qu’environ 35% ont un niveau d’instruction

secondaire contre 28% universitaire, 20% primaire et 18% analphabètes.

-La présence féminine dans les structures associatives est faible : seules 8

associations sont présidées et gérées par des femmes et 5 associations ont des

trésorières.

-Les associations expriment des besoins en formation, notamment en gestion et

montage de projets, développement durable, informatique, communication, etc.

-Les associations interviennent en général dans plusieurs champs d’activités

(action sociale, environnement, culture, sport, etc.).

-Le partenariat inter-associatif est peu développé puisque 14% seulement des

associations recensées sont affiliées à un ou plusieurs réseaux.

Certes, la dynamique associative est globalement spontanée et semble propulsée

par un environnement institutionnel et juridique propice à la création

d’associations (réforme de la loi réglementant le droit d’association en 2002,

10

Voir infra. 11

Association ADRAR, Agence Française de développement et HCEFLCD, Répertoire des

associations de la province d’Ifrane, 2007.

32

notamment), mais celles-ci sont loin de constituer des contrepoids locaux et des

groupes de pression ayant une force de propositions. Dans certains cas, cette

dynamique peut même répondre à des enjeux individuels (affirmation des

leaderships locaux) et politiques (renforcement des assises électorales).

-L’Administration forestière

La forêt de Senoual et Bekrit, délimitées et homologuées, sont gérées par le

CCDRF de Aïn Leuh relevant de la DPEFLCD-IF, et de la DREFLCD-MA

(Meknès).

L’administration forestière, dont les missions et attributions sont régies par le

décret n°2-04-503 du 1er février 2005, est incontestablement le principal acteur

en matière de gestion forestière.

Elle est reconnue pour être pionnière en matière d’expérimentation de montages

institutionnels participatifs, que ce soit en matière d’aménagement des bassins

versants ou de gestion forestière stricto sensu.

Ce choix a été réitéré par le Programme décennal (2005-2014). Celui-ci

constitue le cadre stratégique du développement durable des écosystèmes

forestiers. Visant à opérationnaliser les résultats du colloque national sur la forêt

d’Ifrane (Ifrane, 1996), ce programme se présente comme une synthèse et mise

en cohérence de plusieurs études sectorielles telles que:

-Le plan directeur de reboisement,

-Le plan national d’aménagement des bassins versants,

-Le plan directeur des aires protégées,

-Le plan directeur de lutte contre les incendies,

-Le plan d’action national de lutte contre la désertification.

Le programme décennal 2005-2014 est décliné en programmes d’action,

articulés autour des piliers suivants : la sécurisation du domaine forestier,

l’inversion des tendances actuelles de dégradation du couvert forestier, la

maîtrise de l’érosion hydrique et la contribution des forêts à l’amélioration des

conditions de vie des populations riveraines.

L’enjeu primordial de l’application de la politique et de la législation forestières

consiste à trouver un compromis entre la conservation et la mise en valeur du

domaine forestier.

33

- Le Parc national d’Ifrane

Le parc national d’Ifrane a été mis sur pied en 1994, sur une superficie de

53 800ha, et étendu en 2006 à une superficie de 127 000ha. Un plan

d’aménagement et de gestion du parc existe depuis 2007. Il fixe les axes

d’interventions, le zonage et l’organisation institutionnelle du parc.

Selon ce plan, le parc est habilité à intervenir selon quatre axes :

-Conservation de la biodiversité et gestion écologique des milieux ;

-Gestion-exploitation durable des ressources naturelles ;

-Valorisation des patrimoines et produits naturels locaux ;

-Education à l’environnement, information et communication.

Ces interventions seront déployées sur un territoire composé de deux zones :

Carte III.2 : Parc national d’Ifrane

Source: Plan d'aménagement et de gestion du Parc national d'Ifrane

34

-une zone « centrale », dont l’objet est de concentrer les interventions en matière

de conservation (biodiversité, écosystèmes forestiers, etc.) et de valorisation éco

touristique et éducative.

-une zone « périphérique », sur laquelle se déploie diverses stratégies

sectorielles (agriculture, élevage, tourisme, développement urbain, etc.).

Pour trouver un équilibre entre exploitation et préservation, le parc est appelé à

adapter et coordonner l’ensemble des politiques sectorielles déployées sur le

territoire de la province.

-La commune rurale Oued Ifrane

La commune rurale Oued Ifrane fut créée en 1992, dans le cadre du découpage

communal intervenu cette année. Elle est gérée par un conseil communal

composé de 15 membres, dont deux femmes. Hormis le président, titulaire d’un

diplôme supérieur, les autres membres ont un modeste niveau éducatif.

Les attributions des communes forestières en matière de gestion de la forêt sont

précisées dans le dahir du 20 septembre 1976 relatif à la participation de la

population au développement de l’économie forestière. Ces attributions

englobent (titre VI, art.10) :

-Demandes d’occupation temporaire du domaine public ;

-Demandes d’amodiation du droit de chasse et de pêche ;

-Demandes, formulées par les usagers, pour l’extraction de divers biens produits

par la forêt ;

-Organisation de l’exploitation des parcours en forêt ;

- Détermination des programmes de coupes et d’aliénation des produits

forestiers.

En outre, « les ressources provenant du domaine forestier compris dans les

limites territoriales de la commune sont versées au budget de ladite commune »

(TitreV, art.14). Les communes concernées sont cependant tenues de réinvestir

au moins le cinquième (20%) de ces recettes dans les actions suivantes (art .15):

-Reboisement des terrains collectifs ;

-Amélioration sylvo-pastorale ;

-Aménagement et plantations fruitières ;

-Captage de sources ou aménagement de points d’eau ;

-Aménagement d’abris collectifs ou de chemins ;

35

-Création d’espaces verts ou de protection des sites naturels.

La pratique montre cependant que ce minimum de 20% est loin d’être atteint :

pour la période 1977-1986, la part réinvestie en forêt était de 13%, tandis que

pour la période 1988-1992 elle ne représentait que 7,8%. Pis encore, les

montants réservés aux projets à caractère réellement forestier (reboisement et

amélioration sylvo-pastorale) ne représentent que 1,5% des recettes forestières

annuelles moyennes (Colloque national sur la forêt, 1996).

Afin de remédier à cette situation, la loi de finances 2009 vient d’introduire un

amendement selon lequel 80% des ressources provenant du domaine forestier

compris dans les limites territoriales d’une commune seront versés au budget de

celle-ci. Les 20% restants seront versés au compte d’affectation spéciale intitulé

« Fonds national forestier » créé en vertu de l’article 34 de la loi de finances

pour l’année 198612

.

Outre ce prélèvement de 20% des recettes forestières, la C.R.Oued Ifrane

continue à verser sa quote-part au groupement intercommunal créé dans le cadre

du projet d’aménagement et de protection des massifs forestiers d’Ifrane.

- Autres acteurs

D’autres acteurs sont concernés, à des degrés divers, par la gestion forestière : le

conseil provincial de la forêt, l’autorité locale, les entreprises forestières, les

acteurs de tourisme, etc.

S’agissant du conseil provincial de la forêt, conçu pour être un cadre de

concertation entre tous les acteurs au niveau provincial, il importe de noter que

l’existence de priorités et d’agendas différents chez les parties prenantes

membres de ce conseil limite la portée de son travail.

3.2. Interactions entre acteurs : pour une nouvelle gouvernance forestière

La diversité des acteurs et des fonctions remplies par les écosystèmes forestiers

engendre des enjeux différents et, en conséquence, des conflits d’intérêts, réels

ou potentiels.

Parmi les enjeux de gouvernance se nouant autour de la forêt, le tableau suivant

en fournit un échantillon :

12

B.O.n°5695, 31-12-2008.

36

Tableau III.13 : Acteurs et enjeux de gouvernance

Acteur Enjeux

Administration forestière -Compromis entre conservation et valorisation

-Pouvoir de décision en matière forestière

Populations et ONG -Forêt, source de revenus et d’activité économique

-Tirer parti des compensations de mise en défens

Commune rurale -Développement local

-Recettes forestières

-Considérations politiques

Autorité locale -Souci de stabilité et de sécurité

De cette diversité d’enjeux découlent des conflits, dont certains méritent une

attention particulière en raison de leurs incidences sur les écosystèmes forestiers.

Il s’agit de :

Population vs. Population ;

Population vs. Administration forestière ;

Administration forestière vs. Commune et services déconcentrés.

Les populations forestières sont les plus concernées par la gestion des forêts car

elles y puisent leurs moyens d’existence. Des litiges et conflits d’intérêts

peuvent éclater entre différentes composantes de la population. Ces conflits, dus

à la tendance à la rupture de l’équilibre agro-sylvo-pastoral, concernent surtout

l’exploitation des parcours forestiers. Les principales zones litigieuses relevées à

cet égard sont généralement issues de (Sogreah-TToba, 2005) :

- De fausses inscriptions lors de la délimitation des forêts ;

- De finages de tribus qui ne comportent pas de parcours forestiers ;

- Des éleveurs de fractions étrangères à la province.

Ces divergences d’intérêts peuvent parfois entraver le processus de

contractualisation avec les associations sylvo pastorales (les ayant-droits vs le

reste de la population). La mise en œuvre de l’approche participative s’en trouve

donc affectée.

Par ailleurs, les relations populations/Administration forestière sont marquées

par un certain scepticisme, voire un manque de confiance : d’un côté,

l’administration se plaint de l’exercice abusif des droits d’usage par les

riverains, de l’autre côté, les populations entravent parfois les opérations de

37

martelage, en signe de protestation contre la faiblesse des retombées forestières

dont elles bénéficient.

Le processus de contractualisation, en essayant de faire des associations sylvo

pastorales non seulement des interlocuteurs mais aussi des agents de

développement, tend à rétablir la confiance entre les deux parties et jeter les

bases d’une gouvernance forestière participative.

D’autres zones de discorde peuvent être identifiées. Ainsi l’Administration

forestière se plaint-elle de la modestie du rôle de la commune en matière

d’organisation des usagers et la primauté des considérations politiques en

matière d’investissement des recettes forestières. La commune, quant à elle,

rétorque en faisant savoir qu’elle n’est pas associée au schéma de participation

et qu’elle ne peut se substituer à l’Etat en matière de mise en place

d’infrastructures et d’équipements socio-collectifs.

Il importe aussi de signaler que la faible convergence des actions et programmes

conduits par les différents services déconcentrés des ministères se traduit par un

déficit en termes de développement socio-économique des zones forestières, ce

qui accroit la pression sur les écosystèmes forestiers. Cette insuffisance est

imputable aux limites de la déconcentration administrative au Maroc, « (…) qui

ne recouvre pas un véritable transfert de pouvoirs de l’administration centrale

aux services extérieurs. Le rôle des services extérieurs demeure largement un

rôle d’exécution. La programmation des ministères au plan local souffre d’une

insuffisance(…) systématique » (Banque mondiale, 2006).

Au total, la différence d’enjeux engendre des conflits d’intérêts, dont la gestion

suppose un cadre de négociation adéquat permettant une implication effective

des différents acteurs. C’est dans le cadre de cette co-gestion que l’on peut

assurer une gouvernance participative et durable des écosystèmes forestiers.

38

IV. Déroulement de l’approche participative sur le terrain

Au Maroc, la gestion des ressources naturelles, forestières notamment, a

constitué un champ de prédilection de l’approche participative (Banque

mondiale, 2006).

Comme nous l’avons déjà signalé, ce choix est réitéré par le programme

décennal 2005-20014, qui insiste sur la nécessité d’établir des partenariats avec

les populations usagères.

Afin d’évaluer l’approche participative, nous tenterons d’appréhender, d’abord,

la façon dont elle a été pratiquée en matière de gestion des écosystèmes fragiles

puis dans les projets forestiers, et enfin son déroulement actuel dans l’aire de

l’étude.

1. L’approche participative en matière de gestion des écosystèmes fragiles

Au Maroc, plusieurs stratégies et plans de gestion de ressources naturelles ont

vu le jour au cours des années quatre-vingt-dix. Il s’agit notamment du Plan

national d’aménagement des bassins versants, du programme d’alimentation

groupé en eau potable (PAGER), du plan directeur de reboisement, du plan

directeur de gestion conservatoire des terres bour, du programme national

forestier, etc.

La mise en œuvre de ces plans se heurte cependant à une carence en matière

d’intégration et de synergie au niveau territorial, ainsi qu’à une faible

participation des populations à la définition des programmes.

Le Programme d’action national pour la lutte contre la désertification (PAN-

LCD) apporte des innovations majeures, tant par son caractère holistique et

intégré que par la place qu’il accorde à l’approche participative.

Conforme aux principes de la Convention internationale de la lutte contre la

désertification, le PAN-LCD insiste sur la nécessaire articulation entre la lutte

contre la désertification et la lutte contre la pauvreté en milieu rural.

Une telle articulation découle des liens, complexes et réciproques, qui

s’établissent entre la dégradation des ressources naturelles et la pauvreté. En

effet, la pauvreté tend à accentuer le dépérissement des ressources naturelles. A

la limite de la survie, les populations pauvres et vulnérables se livrent à une

exploitation destructrice des ressources naturelles (extension des cultures sur des

terres marginales et à pentes élevées, défrichement en quête de nouvelles terres,

etc.) susceptible d’enclencher un processus de désertification. Qui plus est, ces

39

populations sont aussi souvent incapables de réaliser les investissements

nécessaires à la protection de certaines ressources naturelles (protection du sol,

par exemple).

Réciproquement, la dégradation des ressources naturelles tend à précariser

davantage la situation des populations pauvres. Elle réduit, en effet, la

productivité des ressources naturelles dont ces populations tirent leur moyen

d’existence (sols fragiles, pâturages dégradés, etc.) et elle les oblige à consacrer

plus de temps à des tâches ménagères comme le ramassage du bois (sous l’effet

de la déforestation), ce qui ampute d’autant le temps consacré au travail agricole

et contribue par conséquent à faire chuter les revenus (Mink S. 1993).

En consacrant le lien entre la désertification et la pauvreté, le PAN-LCD adopte

une démarche intégrée, dans le cadre d’un processus itératif et participatif.

Cette démarche prône l’action territoriale, fondée sur la coordination

multisectorielle (Services extérieurs, collectivités locales, ONG, etc.) et

l’implication des populations dans le processus décisionnel. Selon cette vision,

le développement rural, ne pouvant être approché par de simples solutions

sectorielles et techniques, requiert une mise en réseau des acteurs locaux. Il

implique une articulation entre un mouvement descendant des pouvoirs publics

vers les populations et d’un mouvement ascendant de demande de participation

de la part des populations.

Le PAN-LCD, dont l’élaboration et la mise en œuvre ont été appuyées par le

PNUD et la GTZ, se veut comme opérationnalisation de la stratégie 2020 du

développement rural.

Le programme, lancé en 2001, s’adresse aux populations rurales des zones

menacées par la désertification au Maroc (K.Goldnick et H.Moumadi, 2004).

Cette dernière est définie par la Convention internationale de lutte contre la

désertification comme : « (…) la dégradation des terres dans les zones arides,

semi-arides sèches résultant de divers facteurs, parmi lesquels les variations

climatiques et les activités humaines ». Il ne s’agit donc pas, contrairement à une

idée largement répandue, d’une progression du désert saharien vers les régions

septentrionales, mais de « dégradation sur place, sans modification climatique,

de la steppe et de son remplacement par un paysage ressemblant à celui d’un

désert » (J-.F. Troin, 1985).

40

Sur le plan institutionnel, le PAN-LCD a mis en place un comité de pilotage au

niveau central et a retenu la région du Souss Massa Draa comme zone pilote du

projet. Sur le plan local, l’approche méthodologique retenue consiste en

l’élaboration des plans de développement des douars (PDD) et des plans de

développement communaux (PDC).

Le PDD, outil fondamental de mise en œuvre de l’approche participative,

est « (…) une approche du développement basée sur la responsabilisation des

acteurs locaux et axée sur une exploitation rationnelle et durable des ressources

naturelles ». (Cité par Aziki S., 2005) .C’est un document-cadre élaboré selon

un processus participatif et itératif, qui se déroule selon le cheminement suivant:

Tableau IV.1 : Phases d’élaboration d’un PDD

Phase préparatoire 1-Prise de décision d’élaboration d’un PDD

2-Concertation entre acteurs sur les

modalités d’élaboration du PDD

3-Elaboration d’un plan d’action

4-Choix de l’équipe d’animateurs,

animatrices

5-Formation, mise à niveau des équipes

d’animation

Phase diagnostic participatif 1-Lecture, analyse du finage douar

2-Restitution, échange, rajustement et

validation du diagnostic

Phase planification 1-Définition des objectifs stratégiques

2-Elaboration d’un plan d’action prioritaire

3-Elaboration du PDD

4-Validation du PDD

5-Programmation (triennale, quinquennale).

Phase mise en œuvre et suivi-évaluation 1-Programmation annuelle et budgétisation

2-Mise en œuvre du programme annuel

3-Suivi-évaluation

4-Reprogrammation Source : Aziki Slimane, Note méthodologique pour l’élaboration des PDD dans le cadre du PAN, 2005.

Ainsi défini, le PDD mobilise en fait deux approches complémentaires et

intimement liées :

-l’approche terroir fondée sur l’examen des composantes (physique et socio-

économique) du milieu et des activités qui s’y exercent.

-l’approche participative qui vise à associer les populations à toutes les phases

du processus décisionnel. Par son caractère intersectoriel, holistique et

participatif, l’objectif ultime de la démarche étant de promouvoir un auto-

41

développement des populations concernées, c’est-à dire à jeter les bases d’un

développement durable.

En dépit des résultats non négligeables des PDD réalisés (dans la région Souss

Massa Deraa) en matière de participation, le projet s’est heurté à certaines

difficultés, dont principalement (K.Goldnick et H.Moumadi, 2005) :

-L’absence d’un financement préalable des actions des PDD, ce qui a contribué

à décrédibiliser le programme PAN-LCD auprès des différents acteurs locaux.

-Le non-établissement de lien entre le diagnostic et la planification.

-Un manque de compétences au niveau des ONG, des services techniques et des

communes en matière de techniques de développement participatif.

-Un manque de patience de la part des populations et des élus qui, faute de

solutions immédiates à leurs problèmes, ne se mobilisent pas assez.

Ces difficultés, et bien d’autres, ne remettent cependant pas en cause la

pertinence de la méthodologie adoptée, qui articule l’approche terroir et

l’approche participative dans l’objectif de concilier l’amélioration des conditions

de vie des populations et la gestion durable des ressources naturelles.

2. L’approche participative dans les projets forestiers au Maroc

2.1. Le projet GEFRIF

Ce projet13

pilote a été réalisé conjointement par le Maroc et la Commission

européenne (1995-1998) dans le RIF.

Il vise à enrayer le processus de déforestation de la région Rifaine. Pour ce faire,

le projet a adopté une approche « massif », qui consiste en :

-constitution, au niveau de chaque massif forestier, d’un comité de massif en vue

de faire émerger progressivement une conscience collective sur la notion

d’interdépendance des actions et de solidarité entre les douars riverains autour

d’un même massif forestier. Un tel comité, qui regroupe l’ensemble des acteurs

sociaux, administratifs, techniques et institutionnels, est une instance de

concertation et de coordination pour la définition de modalités d’usages d’un

massif forestier homogène et géographiquement circonscrit.

13

Ce passage s’inspire largement d’Y.Melhaoui, « Protection et gestion participative des écosystèmes

forestiers du RIF, Maroc ». Communication présentée au deuxième atelier international sur la

foresterie participative en Afrique, 18-22 février 2002, Tanzanie.

42

-constitution des commissions locales des forêts, dont chacune regroupe des

usagers qui utilisent le même espace forestier (parcours, prélèvement de bois de

feu, agriculture, défrichement, etc.). Ces zones homogènes regroupent chacune

un certain nombre de douars.

Le massif forestier peut ainsi être découpé en plusieurs commissions locales des

forêts, qui peuvent plus ou moins se calquer sur le découpage des communes

rurales et/ou des fractions.

Ces instances informelles (commissions locales des forêts) ont été substituées

par des associations de développement local (44 associations de développement

local ont été constituées regroupant 92 douars).

Le projet GEFRIF a permis l’obtention d’importants acquis (Melhaoui, 2002)

tels que le rétablissement progressif de la confiance vis-à-vis de

l’Administration forestière, la réduction de la pression sur la forêt,

l’amélioration des conditions de vie des populations et l’évolution des pratiques

institutionnelles.

2.2. Projet de développement rural participatif dans le Moyen Atlas central

(Projet Khénifra)

Ce projet14

, qui s’inscrit dans le prolongement du projet Oued Srou (1987-2000),

concerne 12 communes rurales, couvrant une superficie totale de 235.000 ha et

une population d’environ 100.000 habitants répartie à travers 15.000 ménages et

282 douars.

Le montant global du projet s’élève à 210 millions de DH, avec une contribution

de 150 millions de l’Union Européenne, 47 millions du HCEFLC et de 13

millions de la population.

Le projet vise à contribuer à l’amélioration des conditions de vie de la

population tout en préservant les ressources naturelles de la zone concernée.

Afin de réaliser ses objectifs, le projet s’est basé sur une approche territoriale et

participative.

L’approche territoriale adoptée consiste à :

- découper la zone d’intervention en pôles de développement ayant des

vocations différentes (pôle cédraie, pôle pluvial, pôle chênaie vert) et exigeant

des actions de développement spécifiques.

14

Voir Travaux du séminaire de Meknès, le 20/10/2009.

43

Zonnage et lignes directrices pour le développement

Promotion des plantations

fruitières(rosacées) et

conservation des eaux et

des sols en irrigué ;

• Appui au développement

de l’élevage semi intensif

(fonds de roulement d’AB,

géniteurs…)

• Développement et

valorisation des PFNL/PAM

Pôle chênaie

verte

Promotion de plantations

peu exigeantes en eaux (olivier, amandier, cactus,

agave…); et conservation

des eaux et des sols

Réhabilitation des petits PI;

Appui au développement

de l’élevage ovin semi

intensif (fonds de roulement d’AB, ANOC,..).

Pôle pluvial

Appui à la Conservation et la

régénération de la Cédraie

( respect des mises en défens

et traitements sylvicoles)

Appui à l’organisation des

éleveurs et à l’amélioration de

la productivité des ovins

(implication de l’ANOC);

Valorisation des paysages

(initiation au développement de

l’éco tourisme);

Promotion de l’économie de

bois énergie (prototypes

économiques adaptés).

Pôle cédraie

Source : Séminaire de Meknès, op.cit.

Chaque pôle de développement fut découpé en terroirs. Un terroir regroupe

plusieurs douars ayant des liens historiques et des affinités communes, et

exploitant collectivement des ressources naturelles (forêts, parcours, eaux). Il

correspond grossièrement à une fraction (Mechyakha). On compte 37 terroirs

qui ont été délimités dans toute l’aire du projet.

L’approche participative adoptée repose, quant à elle, sur l’implication de la

population dans les processus décisionnels. L’organisation de la population,

rendue nécessaire par la mise en œuvre de l’approche participative, s’est faite à

deux échelles territoriales :

-Au niveau des terroirs, par la mise en place des A.G.A.T. (Association de

gestion et d’aménagement du terroir), dont chacune regroupe les membres des

comités villageois (formés par les douars pour les représenter), les représentants

des organisations professionnelles (ANOC, AUEA, etc.) et les représentants de

la société civile (O.N.G.).

44

-Au niveau des massifs, les structures de concertation deviennent les A.G.A.M

(Associations de gestion et d’aménagement du massif), dont chacune se

compose :

des représentants des AGAT ;

des représentants des professions concernées par la forêt (coopératives

forestières, exploitants forestiers, etc.) ;

des représentants des ONG à vocation transversale (ONG

environnementales, touristiques, etc.).

Au total, l’approche participative se déroule selon la séquence suivante :

Source : Union Européenne/HCEFLCD-DREF, En savoir plus sur le projet Khénifra, nd.

Le processus s’est révélé lent puisque la planification participative à elle seule

s’est étalée sur environ une année et demi, au cours de laquelle 300 ateliers ont

été organisés et auxquels 17.000 concernés ont pris part. (Document

UE/HCEFLCD- DREF, n.d).

Diagnostic participatif

Planification/Programmation (Élaboration des PDT et des contrats

programme)

Organisation de la population

Contractualisation et mise en

œuvre

Suivi évaluation participative

Replanification/Reprogrammation

45

Au-delà des réalisations physiques du projet (amélioration des systèmes de

production et d’élevage, amélioration des infrastructures, aménagements des

périmètres irrigués, mesures anti érosives, AGR, etc.)15

, l’approche participative

a été testée et promue.

En particulier, la population se rend compte de l’intérêt de l’organisation16

. Les

AGAT et les AGAM sont devenues de véritables interlocuteurs pour les

communes rurales et les comités locaux de développement humain, créés dans le

cadre de l’INDH. De plus, les plans de développement des terroirs (PDT)

élaborés et l’expérience accumulée au fil des années peuvent permettre aux

AGAT de solliciter d’autres partenariats et bailleurs de fonds.

Cependant, une évaluation plus fine du projet reste à faire pour comprendre les

raisons de la faible adhésion de certains acteurs au projet.

3. L’approche participative dans l’aire de l’étude

Dans l’aire de l’étude, l’approche participative a été conçue et menée, dans un

premier temps, dans le cadre du projet d’aménagement et de protection des

massifs forestiers d’Ifrane (projet Ifrane). Elle a été ensuite pratiquée dans le

cadre de l’élaboration des plans d’aménagement des massifs forestiers. Elle est

éventuellement prolongée au niveau de l’élaboration des Plans de

développement des douars (PDD) et des actions de contractualisation avec les

associations sylvo-pastorales représentatives des populations.

3.1. L’approche participative dans le cadre du projet d’aménagement et de

protection des massifs forestiers d’Ifrane

Ce projet, dont le coût global est de 214 millions de DH, concerne huit communes

rurales, dont Oued Ifrane.

L’objectif global du projet étant de « (…) gérer et d’exploiter le massif forestier

d’Ifrane d’une manière rationnelle et pérenne en concertation et au bénéfice de

la collectivité et des usagers, tout en préservant l’environnement et la

biodiversité » (DREFLCD-MA, 2009). Cet objectif global se décline comme

suit :

- Protection de la cédraie et de la biodiversité,

- Optimisation de la production forestière,

- Gestion participative d’espaces cohérents (forêt, parcours et terrains

agricoles)

15

Cf. à cet égard les travaux du séminaire de Meknès, op.cit. 16

Idem

46

L’approche participative, considérée par le projet comme objectif spécifique,

devrait se dérouler selon trois phases : d’abord, un diagnostic participatif

associant les populations, les collectivités locales et les administrations

concernées (Administration forestière, Intérieur et Agriculture) ; puis

l’élaboration des plans d’aménagement et de contrats de gestion, et enfin, la

réalisation des investissements.

Le diagnostic participatif a été réalisé en trois étapes (Séminaire de Meknès,

op.cit.) :

Etape 1 : Information et communication. Cette étape s’est déroulée de façon

« top down » allant de la province, aux communes, aux fractions et puis aux

douars.

Etape 2 : Ateliers de concertation. Cette étape s’est déroulée selon une

trajectoire « bottom up », allant des douars modèles (douars représentatifs des

différentes fractions) aux fractions, puis aux communes, et enfin la Province.

Etape 3 : Finalisation/Priorités. Des ateliers ont été organisés à différents

niveaux pour hiérarchiser les attentes et les doléances des populations.

Un essai d’évaluation de l’approche participative dans le projet Ifrane a été tenté

par M.Allaoui (2008); il en ressort ce qui suit :

-des zones d’ombre concernant les modalités de mise en œuvre, notamment

« (…) la manière d’associer les populations bénéficiaires, les collectivités

locales et les administrations concernées, la façon dont on pourra élaborer des

plans d’aménagement et des contrats de gestion et de quelle manière tout cela

peut se matérialiser sur le terrain ».

-Inexistence d’un manuel de référence codifiant la mise en œuvre de l’approche

participative.

-Il ne semble pas opportun que des techniciens forestiers, par ailleurs chargés de

la répression des délits forestiers, fassent partie des équipes chargées de mettre

en œuvre l’approche participative.

-Le travail d’animation a été assuré par des techniciens et ingénieurs, alors qu’il

était plus opportun de le confier à des animateurs et animatrices préalablement

formés à l’approche participative.

-L’approche adoptée n’a pas été adaptée aux structures locales, afin de mieux

intégrer les fractions, dont le rôle est pourtant primordial en matière de gestion

des parcours collectifs.

-Le projet s’est heurté à des problèmes de gouvernance, dont en particulier les

insuffisances inhérentes aux processus de décentralisation et de déconcentration.

47

Au total, l’approche participative s’est heurtée à un « (…) double handicap : une

élaboration insuffisante dans le document du projet et une mise en œuvre

insuffisamment maitrisée » (Allaoui M., 2008)

3.2. L’initiation à la participation dans les plans d’aménagement des forêts

En sa qualité de maître d’ouvrage, la DREFLCD-MA confie l’élaboration des

plans d’aménagement à des bureaux d’études privés. Ces plans sont appliqués

pour une période de 24 ans.

Outre le contexte administratif, les caractéristiques climatiques, les données

d’inventaire et l’évaluation des potentialités de production d’un massif, un plan

d’aménagement présente une étude assez fouillée des paramètres socio-

économiques de la zone. De même, deux ateliers participatifs sont organisés : un

atelier de diagnostic participatif et un autre de validation17

.

De ces ateliers participatifs sont déduits des plans de gestion d’une durée de 24

ans. Un plan de gestion identifie les actions à mener chaque année, pendant

toute la durée du plan d’aménagement.

3.3. Le PDD : une démarche participative structurante

Récemment, une démarche novatrice et structurante a vu le jour : il s’agit de

l’élaboration des Plans de Développement des Douars (P.D.D.).

Les PDD s’apparentent à des agendas 21 locaux au niveau des douars, dont

l’objectif est d’aboutir à des plans de gestion concertée qui feront l’objet de

contrats entre l’administration et la population.

A titre d’illustration, l’examen du mode d’élaboration du PDD du Douar d’Aït

Bouziane nous aidera à évaluer la portée participative de la démarche.

La démarche participative réalisée dans le cadre de ce plan s’est déroulée en

quatre étapes (PDD d’Aït Bouziane) 18

:

-Etape 1 : C’est une étape préparatoire qui correspond au ciblage territorial et à la

collecte de données de base. Le choix de la zone d’intervention a, semble-t-il,

été dicté par le caractère litigieux de cette zone19

. Les données de base ont été 17

En sus du bureau d’étude chargé d’élaborer le plan d’aménagement, d’autres parties prenantes

prennent part à ce diagnostic : l’Administration forestière, les communes rurales concernées et

l’autorité locale. 18

Les informations contenues dans ce paragraphe sont reprises de : Plan de développement participatif

du douar d’Aït Bouziane, ainsi que des discussions avec les forestiers. 19 De l’aveu des forestiers ayant participé à l’élaboration du PDD d’Aït Bouziane, les populations

étaient très sceptiques au départ, les personnes verbalisées se tenaient loin du lieu de la rencontre par

crainte d’être arrêtées pour des délits forestiers qu’elles ont commis auparavant. La présence de

48

puisées dans le plan d’aménagement de la forêt Senoual, le RGPH 2004 et

l’étude PAGER 2002. Ces données concernent les aspects socioéconomiques et

les ressources naturelles (forêts, parcours, SAU) du terroir Aït Bouziane.

-Etape 2 : elle correspond à un premier passage qui a tenté de réaliser les taches

suivantes :

Informer les populations de la nécessité d’agir en partenariat.

Présenter l’approche participative rénovée par la démarche de

concertation- contractualisation.

Connaitre le milieu humain et les systèmes d’exploitation des ressources

naturelles au sein du douar.

Engager des discussions internes au sein du douar sur les problèmes posés

et les propositions pour les résoudre.

Incitation à l’organisation de la population à travers la création d’une

association.

A l’issue de cette étape, un listing des problèmes vécus par la population a été

établi, moyennant la technique de brainstorming. Ceux-ci comprennent des

problèmes forestiers (stricto sensu) (insuffisance des pistes forestières, besoins

en bois de feu, conflit avec les forestiers), pastoraux (sédentarisation dans la

montagne, insuffisances des chaumes et maladies du cheptel), agricoles

(limitation des terres agricoles, déficit d’eaux d’irrigation) et un déficit

d’infrastructures (école non équipée, dispensaire lointain, etc.).

-Etape 3 : elle correspond au deuxième passage, au cours duquel les équipes en

charge de l’élaboration du PDD ont tenté de réaliser les actions suivantes :

Identifier les besoins exprimés.

Inciter les populations à discuter et à choisir leurs priorités.

Désignation des membres de l’association du Douar.

femmes forestières animatrices dans l’équipe d’élaboration du PDD a contribué à rassurer les

populations qui, progressivement, se sont mises à rejoindre les discussions (témoignage d’un forestier

membre de l’équipe PDD d’Aït Bouziane).

49

Photo prise lors de l'élaboration du PDD d'Aït Bouziane

Afin d’organiser la participation de la population, une association fut créée

durant le deuxième passage de la commission de la DREFLCD-MA. Dirigée par

un bureau composé de 11 membres choisis parmi la population du Douar20

,

l’association créée (baptisée Association d’Aït Bouziane pour la protection et le

développement des ressources naturelles) se fixe les objectifs suivants :

-Jouer un rôle d’interface entre la population et l’administration ;

-Gérer et assurer le suivi des actions qui seront réalisées ;

-Collaborer avec les autres partenaires ;

-Défendre les intérêts du Douar ;

-Bénéficier de la compensation sur les périmètres forestiers mis en défens et des

produits de dépressage ;

-Porter des projets générateurs de revenus pour la population du Douar.

-Etape 4 : durant cette étape, un atelier est organisé afin de valider le programme

d’interventions retenues sur la base des propositions de la population et des

possibilités budgétaires.

20

Sur une liste de 11 personnes formant le bureau de l’association, le Président a été choisi

directement par les habitants du Douar, la répartition des taches entre les 10 membres restants s’est

faite par un tirage au sort.

50

La démarche PDD a été couronnée par l’adoption et la validation d’un

programme d’interventions hiérarchisé, composé de projets d’infrastructures et

équipements collectifs ainsi que de revendications socioéconomiques21

.

De l’avis des forestiers , le diagnostic participatif réalisé dans le douar d’Aït

Bouziane a surtout permis de réduire la méfiance, voire l’hostilité, des

populations à l’égard de l’administration forestière.

L’examen du processus d’élaboration du PDD d’Aït Bouziane permet de relever

les remarques suivantes :

-La démarche est intéressante et se compare, à bien des égards, à un agenda 21

local du douar : le document produit est un véritable programme d’actions, qui

peut être mobilisé pour tisser des liens avec d’autres partenaires (commune,

INDH, etc.).

-La démarche est de type « verticale », reliant l’Administration forestière et la

population et n’impliquant pas les autres parties prenantes concernées (services

techniques de l’Etat, commune rurale, autorité locale, etc.). Cela est d’autant

plus problématique que les problèmes inventoriés touchent des domaines variés,

étroitement liés à la gestion forestière22

.

-La démarche semble inachevée, dès lors qu’un système de suivi-évaluation des

actions programmées manque au processus.

- On note aussi une prédominance des actions d’infrastructures et d’équipements

collectifs par rapport aux AGR et la gestion des ressources naturelles.

En dépit de son caractère structurant, la démarche PDD semble « mise en

veilleuse », au profit de la contractualisation avec les associations sylvo-

pastorales.

21

Les actions validées sont :

-Aménagement de la piste Taaricht-Fallat sur 12 km ;

-Demande d’amnistie des poursuites judiciaires suite aux différents procès verbaux des délits de

coupes de bois de cèdre dressés par les agents forestiers à l’encontre des contrevenants ;

-Aménagement hydro-agricole par revêtement de la séguia Anzar Oufounass sur 2 km ;

-Intégration de davantage d’adhérents du douar d’Aït Bouziane à la coopérative des madrieurs ;

- Creusement de deux forages. 22

Pour pallier cette déficience, les forestiers transmettent aux autres acteurs les doléances, exprimées

par la population, qui n’ont pas un caractère forestier stricto sensu.

51

3.4. Contractualisation avec les associations sylvo-pastorales

L’approche participative est de plus en plus pratiquée à travers la

contractualisation avec les associations sylvo-pastorales représentatives des

populations.

Dans le cadre du projet Ifrane, 6 associations sylvo-pastorales furent créées. Les

responsables de certaines associations interviewés ont affirmé qu’au début, les

populations étaient sceptiques à l’idée de création d’associations. Pour dissiper

la méfiance des populations à l’égard des forestiers, ces derniers ont entrepris un

véritable travail d’ingénierie sociale (cas du secteur Senoual relevant du CCDRF

d’Aïn Leuh23

) pour initier le processus et amener les riverains à adhérer à la

démarche.

Fort vraisemblablement, l’octroi des compensations de mise en défens24

a

contribué à crédibiliser la démarche de contractualisation entre l’Administration

forestière et les populations. Les données recueillies sur terrain montrent, à cet

égard, que, désormais, ce sont les populations elles mêmes qui sollicitent les

Eaux et Forêts pour la création des associations sylvo pastorales.

C’est ainsi que dans l’aire de l’étude, cinq associations sylvo-pastorales furent

créées. Le tableau ci-après permet d’en décrire le profil.

23

L’on note ici surtout la tenue de plusieurs réunions informelles avec des personnes influentes des

douars ainsi que l’organisation des rencontres avec les populations. L’accumulation des délits, et des

amendes qui en découlent, peut aussi amener les populations à dialoguer et adhérer à la démarche. 24

Arrêté n°1855 du 21 mars 2002, B.O.5000 du 2-5-2002. Cet arrêté, entré en vigueur en 2005, fixe

les limites, conditions et modalités de demande et d’octroi de la compensation pour mises en défens du

domaine forestier à exploiter ou à régénérer. Cet arrêté fixe la valeur de la compensation annuelle à

250/DH/an pour un minimum de 300ha. Pour les forêts d’arganier, la compensation est fixée à 350

DH/an pour un minimum de 100 ha (arrêté du 1er juillet 2004, B.O. n°5248 du 16-9-2004).

52

Tableau IV.2: Profil des associations sylvo-pastorales dans l’aire de l’étude

Source : Entretiens avec les présidents des associations Asaa, Dada Moussa, Ichouaouen , Zaouia d’Ifrane et Aït Bouziane.

Association Date de

création

Machyakha Nbre

d’adhérents à la

date de création

Nbre

d’adhérents

aujourd’hui

Nbre de

femmes

adhérentes

Nbre d’élus

membres de

l’association

Association ASAA pour la

protection et la gestion des

ressources naturelles

22-12-2009 Aït Sidi

Moussa

40 102 - 1

Association Dada Moussa pour la

protection et la gestion des RN

13-12-2009 Aït Lias 60 100 25 -

Association Ichouaouen pour

l’environnement et l’agriculture

18 -01 2010 Ichouaouen 42 50 - 1

Association Zaouia Ifrane pour

la protection et la gestion des

ressources naturelles

28-02-2007 Zaouia

d’Ifrane

- - - 1

Association Aït Bouziane pour

la protection et le

développement des ressources

naturelles

- - - - - -

53

Ce tableau montre que le mouvement d’associations sylvo pastorales est jeune.

Les rangs de ces associations s’élargissent en un laps de temps réduit. C’est dire

que les populations commencent à prendre conscience des avantages que peut

leur procurer la gestion contractualisée.

Il importe ici de souligner la structuration novatrice de l’association Zaouia

d’Ifrane. Celle-ci est, en effet, gérée par un bureau issu d’un conseil

d’administration réunissant les quatre douars composant le terroir (à raison de

cinq personnes par douar) en plus des « nouabs » des terres collectives. Cette

structuration offre le mérite d’intégrer deux objectifs indissociables, à savoir la

sauvegarde du domaine forestier et la gestion des terres collectives.

Le bilan du processus de contractualisation peut être établi à l’aide du tableau ci-

après :

Tableau IV.3: Bilan du processus de contractualisation dans l’aire de l’étude

Associations et terroirs Contractualisation

Zaouia d’Ifrane Contrat signé (2007-2011)

Association Asaa Contacts avec le Parc en vue de la finalisation d’un

contrat

Association Dada Moussa Contrat en cours de finalisation. L’association a déposé

son dossier pour la perception de la compensation de

mise en défens.

Association Ichouaouen Créée pour être une association sylvo-pastorale, mais,

de par son statut, Ichouaouen est une association de

développement local ordinaire. Elle a été conseillée, au

niveau du Parc, d’amender son statut pour le rendre

compatible avec les missions d’une association sylvo-

pastorale.

Association Aït Bouziane Contrat en cours de finalisation Source : fait à partir des données issues des entretiens réalisés avec les responsables des associations et

au niveau du Parc national d’Ifrane.

Au niveau de toute la province, le nombre d’associations sylvo-

pastorales ayant signé des contrats avec l’Administration forestière est

de 6, correspondant à 1200 bénéficiaires.

Pour crédibiliser et rendre transparente la démarche de contractualisation, un

canevas-type de contrat a été élaboré.

54

Ce contrat a pour objectifs (art.1) de définir les rôles, les droits et devoirs de

chaque partie contractante pour :

-la gestion des ressources sylvo-pastorales et pastorales (droits d’accès, droits

d’usage, etc.) ;

-les actions concomitantes de développement agricole, humain ou économique

sur le terroir.

Les actions contenues dans le contrat du terroir de Zaouia d’Ifrane peuvent être

synthétisées à l’aide du tableau suivant (cf. Tableau).

Dans ses relations avec les associations sylvo-pastorales,

l’Administration forestière tente de mettre en place certaines pratiques

telles que :

-Compensation pour la mise en défens. Manifestement, la pratique de

mise en défens impose des manques à gagner aux populations péri

forestières puisqu’elle les prive d’une partie du massif forestier, sur

lequel elles ont des droits d’usage. L’Administration forestière rachète

ce droit d’usage aux ayant-droits, en contrepartie de 250 DH/ha, pour

une superficie minimale de 300ha, soit 75000 DH.

Au niveau de toute la province, les mises en défens couvrent une

superficie de 4751 ha25

, soit 1 187 750 DH versé à titre de compensation

de mise en défens.

Les mises en défens sont établies selon une double démarche : d’abord, en se

basant sur des critères techniques arrêtés par le plan d’aménagement, et puis, sur

la base de visites de terrains évaluant, en concertation avec la population

concernée, la faisabilité de délimitation des parcelles indiquées dans ledit plan.

L’objectif étant de tenir compte des exigences de mouvance des populations

dans le terroir (itinéraire du troupeau, accès aux points d’eau, etc.).

-Réalisation des opérations de dépressage (Nekkousse) : « C’est une

opération qui consiste à enlever les sujets surabondants, malades, mal

conformés dans un boisement trop dense. Il s’agit également de

diminuer les concurrences entre individus appartenant à l’espèce

25

DPEFLCD-IF.

55

dominante afin de favoriser la croissance des meilleurs sujets »26

. Au

lieu de lancer un marché de dépressage, c’est la population elle-même

qui réalise cette opération (préalablement préparée par les forestiers, et

encadrée par les associations des populations), en contrepartie de la

récolte du bois de chauffage et des ébranchages utilisés comme aliments

de bétails.

-Réalisation de certaines infrastructures collectives (pistes, points

d’eau, PMH, fertilisation des parcours collectifs, etc.), le soutien à

l’arboriculture ainsi que des actions de renforcement de capacités à

destination des associations27

.

L’approche contractuelle se caractérise donc par son aspect

intersectoriel et holistique : les actions retenues concernent le terroir

dans ses différentes dimensions (forestière, pastorale, agricole, etc.).

26

Benoît BERNARD, Quand des gestionnaires se mesurent, les indicateurs au centre de la gestion

forestière, L’Harmattan, 2006, p.214. 27 En dehors des contrats, on note aussi le lancement (et externalisation) des marchés de

gardiennage, à travers une mobilisation des riverains de la forêt moyennant une contrepartie

de 50 dh/jour. Un système de turn over est utilisé pour faire bénéficier le maximum de gens

de l’opération.

56

Tableau IV.4: Actions contenues dans le contrat de Zaouia d’Ifrane

Années Mises en défens Dépressage/

parcelles Fertilisation

des

parcours

collectifs

(ha)

Pistes

(km) PMH

(km) Am. sources

Puits

(nb) Arbres

fruitiers (Plants)

Renforcement

des capacités (jours/an)

Ha Subv. dhs

2007 373 93 250 60-61 200 4 1 _ 20

2008 373 93 250 53-54 400 3 1 1 2000 20

2009 373 93 250 63-68 400 3 4 1 2000 20

2010 373 93 250 56-57 400 3 1 2000 20

2011 373 93 250 64-66 400 10 1 2000 20

Source : fait à partir du contrat de Zaouia d’Ifrane. La présentation est inspirée de Mohammed Qarro, « Contractualisation dans le cadre de la

gestion et du développement durable des ressources naturelles », document inédit.

57

En plus des associations sylvo pastorales, les coopératives forestières sont des

structures d’encadrement et de participation de la population.

3.5. La contractualisation avec les coopératives forestières

A. Ibrahimi (1991) considère que si la coopération forestière puise ses racines

dans des traditions assez ancestrales et millénaires, la naissance du mouvement

coopératif remonte à la promulgation du dahir du 8 juin 1938.

Ces structures ont été consacrées par le dahir du 20 septembre 1976 relatif à

l’organisation de la participation de la population au développement de

l’économie forestière.

Aujourd’hui, les coopératives sont régies par la loi 24-83 fixant le statut général

des coopératives et les missions de l’Office de Développement de la

Coopération (ODECO). Ce texte définit la coopérative comme « un groupement

de personnes physiques qui conviennent de se réunir pour créer une entreprise

chargée de fournir, pour leur satisfaction exclusive, le produit ou le service dont

elles ont besoin… ». Aussi les coopératives sont-elles placées sous la tutelle de

l’ODECO et considérées comme « (…) des personnes morales jouissant de la

pleine capacité juridique et de l’autonomie financière ».

Le tableau suivant identifie les coopératives opérant dans l’aire de l’étude.

Tableau IV.5: Coopératives forestières dans l’aire de l’étude

Nom Capital en DH Adhérents Unité

territoriale

Activité Contrat-

programme

Bucherons-

charbonniers

2 200,00 50 Province

d’Ifrane

Exploitation

de bois de feu

9/2005

Bucherons-

madrieurs

6 400,00 68 Province

d’Ifrane

Exploitation

de bois

d’œuvre

8/2005

Dayet Aoua pour le

développement et

l’environnement de

la province d’Ifrane

--- 11 Province

d’Ifrane

Exploitation

de produits

secondaires

(lichens)

22/2007

AL Azhar 30 000,00 C.R.Oued

Ifrane

Apiculture

Aït Lyass* Capital projeté :

500 DH par

coopérateur,

soit 139 000,00

DH.

278 C.R.Oued

Ifrane

Exploitation

du bois de

cèdre, chêne

vert et

produits

secondaires

* : coopérative en cours de création.

Source : Fait à partir des données de l’Office de Développement de la Coopération, Meknès

58

L’aire de l’étude compte cinq coopératives, dont une en cours de création. Au

niveau de toute la province, le secteur coopératif forestier souffre de divers

dysfonctionnements, limitant amplement sa contribution au développement

local. La réforme engagée en 2004 n’a eu que des résultats mitigés. Afin de

dépasser ses écueils, le secteur entame une phase de restructuration.

-Diagnostic

Selon un rapport de l’ODECO28

, issu d’une mission de terrain effectuée en avril

2009, les principaux maux qui caractérisent les coopératives forestières dans la

province d’Ifrane peuvent être résumés comme suit :

-La plupart des coopératives ne tiennent pas leur assemblée générale dans les

délais réglementaires ;

-Le dépôt obligatoire des documents de fin d’année (rapports financier et moral,

rapport du commissaire aux comptes, procès verbal de l’assemblée générale

annuelle) auprès du greffier du tribunal de première instance et du fisc n’est pas

effectué ;

-Les registres réglementaires tels que les procès verbaux des assemblées

générales annuelles, registre des réunions du conseil d’administration, registre

du patrimoine, etc. ne sont pas tenus ;

-Les gestionnaires des coopératives sont handicapés par leur bas niveau de

formation et la non maîtrise des outils de gestion ;

-La plupart des coopératives souffre de difficultés de financement ;

-La plupart des coopératives n’élabore pas de projets de budgets au cours des

assemblées générales annuelles ;

-La plupart des coopératives ne dispose pas de plan d’action écrit ;

-Chaque coopérative exerce une seule activité, sans aucune diversification de la

production ;

28

ODECO, Rapport concernant l’opération de mise à niveau des coopératives forestières dans la

province d’Ifrane, document inédit, ODECO-Meknès-Tafilalet, 2009. Nous nous inspirons largement

ici de ce document.

59

En outre, des informations collectées par nos soins mettent en évidence d’autres

dysfonctionnements tels que :

- La non constitution des fonds de réserves, une obligation légale que les

coopératives doivent respecter ; les réserves cumulées sont même parfois

distribuées sous forme de revenus.

-La faiblesse, sinon l’absence, d’investissements en matière d’acquisitions des

équipements d’exploitation forestière.

-Le recours, parfois, à une main d’œuvre n’appartenant pas à la coopérative

concernée.

-Le recours, parfois, aux exploitants forestiers pour la sous-traitance d’une partie

des travaux et/ou pour lever la part du prix de marché acquittée en espèces.

Ces dysfonctionnements, et bien d’autres, ont paralysé le secteur. L’exemple de

la coopérative des bucherons de la province d’Ifrane est éloquent à cet égard. En

effet, cette coopérative, qui date de 1958, a connu une période glorieuse jusqu’à

2007, date à partir de laquelle elle est entrée en léthargie.

Jadis ladite coopérative bénéficiait, en moyenne, d’un marché par 12 ou 18

mois. Le revenu moyen par adhérent était d’environ 1500Dhs par mois29

.

Aujourd’hui, la coopérative est endettée (presque 1.000.000Dhs) et les

responsables interviewés estiment qu’il faut au moins trois marchés de coupe

pour lui permettre de financer ses arriérés.

-Réforme

La DREFLCD-MA engagea, en 2004, une réforme des coopératives forestières.

Dans ce cadre, 24 contrats-programmes, couvrant la période 2005-2008, ont été

signés avec les coopératives forestières de la région pour un montant de 29,8

millions de Dhs.

L’objectif spécifique affiché par les contrats est la professionnalisation

progressive des coopératives. Cet objectif est sous-tendu par une stratégie

29

Ce chiffre, avancé par le directeur de la coopérative des madrieurs d’Ifrane, concorde parfaitement avec celui

donné par Abderahim HOUMY, « Le développement durable, du concept aux projets opérationnels »,

Conférence présentée au Salon international de l’agriculture de Meknès, 1er mai 2010. Selon ce

dernier, le revenu moyen serait de 1500 Dh/ménage/mois dans le cas des coopératives des madrieurs

du cèdre au Moyen Atlas.

60

d’intervention consistant à faire des coopératives des structures de participation

de la population au développement forestier.

Le principal outil de réforme étant la suppression de la situation de rente, dont

bénéficiaient les coopératives, à travers des prix de cession des coupes de bois

déterminés par adjudication publique et reflétant le fonctionnement du marché.

De plus, la structure du prix est scindée en deux composantes : 25% en espèces

et 75% en prestations telles que gardiennage, entretien des pistes, aménagement

de points d’eau, travaux d’élagage, etc.

Au-delà de l’aspect réglementaire de cette structuration30

, le procédé a contribué

à atténuer les plaintes des différents partenaires (entreprises d’exploitation

forestière, notamment).

L’évaluation, par la DREFLCD-MA, du dispositif contractuel a permis de

mettre en évidence les forces/faiblesses ainsi que les opportunités/menaces de la

réforme31

. L’objectif étant de capitaliser les acquis et de recadrer la vision du

HCEFLCD-MA en matière de développement forestier participatif.

Sur le plan méthodologique, l’exercice d’évaluation s’est basé sur l’examen de

douze contrats programmes, moyennant dix critères d’évaluation (pertinence,

efficacité, efficience, impact, participation et satisfaction, durabilité, technicité

et professionnalisme, coordination et complémentarité, cohérence) déclinés en

dix questions d’évaluation32

.

-Restructuration

La restructuration du mouvement coopératif dans l’aire de l’étude revêt deux

formes : la création, en cours, de la coopérative d’Aït Lyass et la fusion des

coopératives des madrieurs/charbonniers.

La création de la coopérative d’Aït Lyass est surtout conçue comme un moyen

de prévenir la délinquance en forêt. La non adhésion des ayants-droits

30

Selon certaines communes rurales concernées, cette structuration bat en brèche une des dispositions

du dahir du 20 septembre 1976, amendée par la loi des finances 2009, selon laquelle 80% des recettes

forestières doivent revenir aux communes rurales concernées et les 20% restants au FNF. Afin de

dissiper au moins partiellement cette critique, le prix du marché est, actuellement, scindé en deux

composantes : 60% en espèces et 40% sous forme de prestations. 31

Voir CODEFOR, Rapport d’évaluation de l’impact des contrats programmes en partenariat entre

les coopératives forestières et la DREFLCD-MA, Rapport final 2009. Nous y reviendrons

ultérieurement. 32

CODEFOR, op.cit

61

originaires d’Aït Lyass à la coopérative des madrieurs ainsi que l’aggravation

des délits dans la forêt Senoual sont, semble-t-il, les causes directes de cette

initiative.

Cette coopérative comptera, selon une liste remise à la DPEFLCD-IF, 278

adhérents, appartenant à toutes les fractions de tribus riveraines de la forêt

Senoual. Son domaine d’activité est l’exploitation du bois de cèdre, chêne vert et

autres produits secondaires. La phase pré-création de cette coopérative s’est

caractérisée par d’intenses agitations, comme en témoigne la délicate opération

d’arrêter la liste des adhérents. Au-delà de l’aspect réglementaire, cette

opération traduit les enjeux liés à la nouvelle structure en gestation.

Par ailleurs, les coopératives des madrieurs/charbonniers envisagent de

fusionner en une seule structure, comptant 70 adhérents. Cela permettra

vraisemblablement de faire sortir le mouvement coopératif de sa léthargie et de

lui insuffler une nouvelle dynamique. Cela est d’autant plus probable que

l’instauration d’une nouvelle règle d’attribution des marchés (60% espèces et

40% prestations) motivera davantage la commune pour œuvrer dans ce sens.

En dépit des problèmes auxquels elles se heurtent, les coopératives peuvent

s’ériger en composante majeure de l’économie forestière et contribuer

considérablement à la promotion de la participation de la population.

Au total, l’examen du système de partenariat engagé avec les associations

sylvo-pastorales selon un processus de contractualisation permet de mettre en

évidence les résultats suivants :

-Même si le concept est jeune et son ampleur est encore modeste, le partenariat

prend son chemin, grâce notamment à aux efforts consentis par les forestiers

pour initier le processus de contractualisation.

- L’approche est de type « vertical », reliant les associations sylvo-pastorales et

les coopératives d’un côté, et l’administration forestière de l’autre côté. Une

nouvelle gouvernance forestière requiert la mise en place d’un cadre de

négociation adéquat permettant une implication de toutes les parties prenantes à

la gestion forestière (collectivités locales, services extérieurs, etc.). Une meilleure

articulation entre les pratiques participatives, la décentralisation et la

déconcentration reste à créer.

- La démarche s’apparente à un arrangement coopératif, cristallisé par les

compensations de mise en défens (associations pastorales) et motivé par la

62

volonté de contenir la délinquance forestière (coopératives) .Son renforcement

requiert des ajustements pour faire face à certaines insuffisances telles

que l’inexistence d’un manuel de procédures codifiant la démarche, la

standardisation des contrats, et l’absence de mécanismes de suivi-évaluation et

d’arbitrage.

63

V. Evaluation de l’approche participative dans le domaine forestier

1. Grille d’évaluation

Un des défis majeurs de l’approche participative est de concevoir et mettre en

place un système de suivi-évaluation permettant de mettre en évidence l’impact

de la démarche. Un tel système servirait de référentiel pour une amélioration

continue du processus participatif.

L’approche méthodologique d’évaluation du processus décisionnel participatif

requiert d’examiner la nature de ce processus, ses impacts à proprement parler

ainsi que les interactions avec le contexte institutionnel dans lequel il s’insère.

Comme le souligne S.van den Hove (2002), les approches participatives

engendrent trois types d’effets potentiels: des effets substantifs, des effets

procéduraux et des effets contextuels.

Types d’effets Dimensions décisionnelles

Effets substantifs Résultat de la prise de décision et qualité de celle-ci

Effets procéduraux Procédure décisionnelle, indépendamment de

l’incidence sur le résultat

Effets contextuels Contexte social dans lequel s’inscrit le processus

décisionnel Source : fait à partir de S.van den Hove (2002)

Les approches participatives peuvent être évaluées à la une de critères

spécifiques, adaptés à chaque type d’effets. En matière d’évaluation des projets

de développement forestier, les objectifs affichés servent également à fournir

des critères d’évaluation. Dans le cas du projet Khénifra, par exemple, les

critères d’évaluation retenus sont au nombre de sept : pertinence, efficacité,

efficience, impact, durabilité, cohérence/complémentarité, valeur ajoutée

communautaire. De même, l’évaluation de l’impact des contrats programmes

liant les coopératives forestières et la DREFLCD-MA (2005-2008) s’est basée

sur la mobilisation des critères suivants : pertinence, efficacité, efficience,

impact, participation et satisfaction, durabilité, et technicité et

professionnalisme.

En retenant l’architecture d’ensemble proposée par S.van den Hove, une grille

d’évaluation des approches participatives forestières a été élaborée par un va-et-

vient entre les enseignements de la littérature en la matière et les résultats des

entretiens réalisés dans l’aire de l’étude. L’exercice d’évaluation a consisté à

décliner les douze critères retenus par des questions d’évaluation.

64

Tableau V.1 : Grille d’évaluation des approches participatives forestières

Types d’effets Critères et indicateurs Mesure et appréciation

Eff

ets

pro

céd

ura

ux

- Degré d’implication et pouvoir d’influence des différentes

parties prenantes dans le processus décisionnel

-Implication des stakeholders aux différentes étapes du processus décisionnel. Le processus

décisionnel permet-il de réduire l’asymétrie concernant le pouvoir d’influence et de décision ?

-Degré d’interactivité Qualité des débats, négociation et concertation

- Supports et méthodes de communication et d’animation utilisés Langue, brainstorming, cartes, diapo-langage, tableau-image, MARP, etc.

Eff

ets

sub

sta

nti

fs

-Coûts des interventions La démarche permet-t-elle de réaliser des économies (gardiennage, exploitation, etc.) ?

-Degré d’intégration des décisions Qualité des décisions prises (sectorielles, transversales, etc.)

-Degré d’atteinte des objectifs prévus par les contrats conclus avec

les associations sylvo-pastorales et les coopératives forestières

Dépressage+ Fertilisation des parcours+Pistes+points d’eau+Arbres fruitiers+Aménagement des

PMH+Renforcement des capacités

--Conditions de vie des populations - Revenus supplémentaires générés par les actions contenues dans les contrats (compensation,

notamment).

-Adéquation, qualité et entretien des infrastructures et équipements socioéconomiques produits

(pistes, points d’eau, PMH, etc.).

-Création d’AGR et des opportunités d’emploi

-Intégration de l’approche genre La démarche permet-t-elle d’améliorer l’intensité de la participation féminine et les conditions des

femmes ?

-Niveau de préservation des écosystèmes forestiers Préservation des parcelles mises en défens +autres parcelles des massifs

Eff

ets

con

tex

tuel

s

-Capacités d’auto-planification des populations -Le processus participatif permet-il de renforcer les compétences des populations et les capacités

d’action collective ?

-Gouvernance au niveau local Confiance des acteurs dans les institutions, mobilisation d’autres partenaires, récupération du

processus

-Durabilité des résultats -Les conditions institutionnelles, réglementaires et socioéconomiques sont elles réunies pour inscrire

la démarche dans la durée ?

Source : Elaboré par les membres de l’équipe.

65

2. Test de la grille

L’ambition de cet exercice est de mesurer, ou du moins d’apprécier le plus

objectivement possible, les effets de l’approche participative en matière de

gestion forestière dans le cas de la commune rurale Oued Ifrane. Le contexte de

l’étude impose, toutefois, des contraintes non négligeables à la démarche

d’évaluation. Sans renoncer aux exigences méthodologiques de l’évaluation, le

test de la grille tente de prendre en considération de telles contraintes. A cet

égard, cinq précisions sont au préalable nécessaires :

- L’absence d’un système d’information fiable, évolutif et intégré, permettant de

rendre compte du processus participatif dans toutes ses étapes. La grille, aussi

importante soit-elle, reste un outil largement perfectible en fonction de

l’information disponible. Ses critères et indicateurs seront mis à l’épreuve, à

travers notamment des informations qualitatives, issues de la documentation

disponible, des témoignages des différents acteurs et des observations de terrain.

-L’évaluation qu’il est possible de faire, au regard des critères proposés, diffère

selon que l’on se situe du côté de l’un ou de l’autre des acteurs gravitant autour

de la forêt. Ainsi, par exemple, pour les forestiers, les associations et les

coopératives auront atteint leur objectif si la délinquance forestière baisse et,

par conséquent, le niveau de préservation des écosystèmes forestiers s’améliore.

Dans l’optique de ces structures, en revanche, le critère fondamental

d’appréciation du processus participatif est, incontestablement, les revenus

additifs qui y sont générés. Eu regard à la logique de la grille, les critères

retenus renvoient aux objectifs du développement humain et durable, qui

insistent tout aussi sur le développement humain des espaces forestiers et péri

forestiers, que sur la préservation des écosystèmes forestiers. Pour s’inscrire

dans la logique de la grille, nous avons procédé à un croisement des données,

tant quantitatives que qualitatives, fournies par les différents acteurs.

-Le processus à évaluer est encore jeune, et l’on ne dispose pas du recul

nécessaire pour tester tous les paliers de la grille, bien que les prémisses de

certaines dynamiques puissent d’ores et déjà être décelées. Bien des aspects

méritent, pour être finement appréciés, des enquêtes qualitatives « panels »

s’étalant sur une durée assez longue.

-La stratification de la grille en trois paliers ne doit pas occulter les interactions

existant entre eux. Ainsi, par exemple, le degré d’implication des différentes

66

parties prenantes influence-il l’acceptabilité des actions engagées et, par

conséquent, le coût des interventions.

-La période de référence par rapport à laquelle les évolutions sont constatées et

évaluées se situe globalement en 2005, date d’entrée en vigueur de la

contractualisation entre l’administration forestière d’une part et les coopératives

forestières et les associations pastorales d’autre part. Pour le palier procédural,

cependant, l’évaluation prend appui sur des formes plus récentes de

participation (PDD d’Aït Bouziane élaboré en 2009, notamment).

Ces précisions étant faites, il importe à présent de tester la grille d’évaluation au

niveau de l’aire de l’étude. Ce test se fera selon trois paliers, dont chacun

renvoie à une dimension du processus participatif : effets procéduraux, effets

substantifs et effets contextuels. Et, à l’intérieur de chaque palier, l’évaluation

s’appuiera sur les critères identifiés.

2.1- Effets procéduraux

Degré d’implication et pouvoir d’influence des différentes parties prenantes

dans le processus décisionnel

Ce critère peut être saisi à travers l’examen des rôles des différents stakeholders

dans les différentes phases du processus participatif. Le tableau ci-après tente de

rendre compte de cet aspect.

Tableau V.2: Rôle des stakeholders dans les différentes phases du processus

participatif

Phases du processus participatif

Parties

prenantes

Phase

préparatoire

Diagnostic

participatif

Planification Mise en

œuvre

Suivi et

évaluation

Administration

forestière

Déterminant Déterminant

Déterminant Déterminant Moyenne

Population Moyenne Déterminant Déterminant Moyenne Marginal

Associations

pastorales

et coopératives

Moyenne

Marginal

Marginal

Déterminant

Marginal

Commune

rurale

Marginal Marginal Marginal Marginal Marginal

Services

extérieurs

Marginal Marginal Marginal Marginal Marginal

Source : Inspiré de Les approches participatives au Maroc, op.cit.

67

Il apparaît à la lecture de ce tableau, qu’hormis l’Administration forestière,

aucune partie prenante n’est impliquée dans toutes les phases du processus

décisionnel. Son rôle est tel qu’elle décide du timing, des modalités et des

acteurs devant prendre part à ce processus. En outre, la participation des seules

populations, se limite aux phases de diagnostic, planification et, au mieux, mise

en œuvre. La non participation des populations au suivi-évaluation risque de

décrédibiliser le processus et de lui ôter son caractère itératif et cumulatif.

Par ailleurs, les associations et coopératives n’interviennent très souvent de

façon déterminante que dans la phase de mise en œuvre, dès lors que le

processus de contractualisation demeure marqué par une forte asymétrie au

profit de l’Administration forestière33

.

Il importe ici de souligner que le PDD, correctement mené, pourrait permettre de

faire coïncider le rôle et le statut de chaque acteur en matière de gouvernance

forestière. Comme nous l’avons montré pour le cas d’Aït Bouziane, ce processus

revêt, en effet, un contenu fortement participatif ; d’où la nécessité impérieuse

de le réhabiliter et le pratiquer à une échelle plus large, selon des normes de

standards reconnus en la matière.

Degré d’interactivité

Le degré d’interactivité renvoie à l’échange d’informations durant le processus.

Plus l’échange est bidirectionnel, plus l’interaction est fructueuse. A cet égard, il

est frappant de constater l’homogénéité des contrats conclus avec les

associations pastorales au niveau de toute la province. Ils sont rédigés selon le

même canevas et ne comportent que très peu de différences (surface mise en

défens, par exemple). Cela dénote de l’absence des débats et négociations lors

de la conclusion de ces contrats.

S’agissant des coopératives, « leur adhésion dans la programmation des actions

des contrats (signés entre 2005 et 2008) semble n’a pas été concertée »

(CODEFOR, p.32) .En particulier, les actions de prestations de services (travaux

forestiers) contenues dans les contrats programmes ne semblent pas pertinentes

au regard des besoins des coopératives dont la logique reste cantonnée à

l’exploitation forestière. D’une certaine façon, les coopératives « se sont vues

astreintes à accepter ce type de contrat pour en pouvoir accéder aux lots

d’exploitation » (CODEFOR, p.53).

33

Cf. Critère suivant, degré d’interactivité.

68

Plus qu’une véritable approche participative, le processus se réduit à une

consultation ponctuelle avec les associations pastorales et les coopératives

forestières.

Supports et méthodes de communication et d’animation utilisés

Sans réduire le processus participatif à son aspect technique, les supports et

méthodes de communication et d’animation constituent des outils fondamentaux

pour la réussite de la démarche. De tous les outils connus en la matière, le

brainstorming est le plus utilisé (animation des AGR et élaboration du PDD).

En outre, l’Amazigh est la langue essentielle utilisée pour communiquer avec la

population et animer le processus participatif. Une diversification et adaptation

des outils s’avèrent donc nécessaire pour promouvoir la démarche participative.

2.2-Effets substantifs

Coûts des interventions

En principe, l’approche participative favorise l’acceptabilité des actions et

projets retenus. Dans le domaine forestier, les propos recueillis sur terrain

montrent que la démarche permet de réaliser des économies non négligeables. Il

en est ainsi, par exemple, du coût inhérent aux clôtures délimitant les superficies

mises en défens : ces clôtures34

pourraient être délaissées si la relation qui

s’établit entre les forestiers et la population est marquée par la confiance

mutuelle. De même, les oppositions des populations aux opérations de martelage

entravent les opérations d’exploitation forestière et, en conséquence, toutes les

retombées sur le développement local (recettes forestières, opportunités

d’emploi, etc.).

Degré d’intégration des décisions

La décision prise dans le cadre du processus participatif prend, certes, en compte

la dimension sociale des espaces forestiers et péri forestiers. Elle tend, en cela, à

verser dans les objectifs du plan décennal 2005-2014, visant, entre autres, à

améliorer la situation socioéconomique de ces espaces. L’approche, cependant,

loin d’être territoriale et intégrée, demeure foncièrement sectorielle. Trois

raisons permettent d’appuyer ce propos :

34

1 km de fer barbelés utilisés pour établir des clôtures coûte environ 35.000DH.

69

-Comme nous l’avons déjà constaté, la démarche est de type « verticale »,

associant uniquement les populations et le HCEFLCD ; la commune rurale et les

services déconcentrés n’y sont pas associés35

. Il est évident que l’intégration

requiert une « transversalité » de la démarche.

-Les contrats conclus, ainsi que le PDD d’Aït Bouziane, ne contiennent que des

« mesures facilitatrices », qui ne couvrent pas l’ensemble des composantes des

terroirs, conçus comme espaces de vie des communautés forestières. Les actions

déterminantes pour la réduction de la pauvreté et l’amélioration du

développement humain (AGR, santé, éducation) n’y figurent pas.

-La fin du projet Ifrane a entrainé un repli sur la logique sectorielle. En effet, ce

projet, comme tous les projets intégrés de développement forestier, se

caractérise par une autonomie financière (compte hors budget), lui permettant de

s’affranchir des règles de finances publiques. C’est précisément cette autonomie

qui entrave l’application, à grande échelle, de l’approche développée par le

projet.

Degré d’atteinte des objectifs prévus par les contrats.

Les contrats conclus entre les associations pastorales et la DPEFLCD-IF fixent

des objectifs précis pour les différentes actions qui y sont prévues

(compensation de mise en défens, dépressage, fertilisation des parcours, pistes,

PMH, sources d’eau et puits, arbres fruitiers et formation).

D’une manière générale, hormis la compensation de mise en défens, la mise en

œuvre des autres actions a connu un certain « relâchement » à partir de la fin du

projet Ifrane en 2008. Le caractère épars des informations dont nous disposons

n’a permis d’évaluer que certaines actions :

-Compensation de mise en défens. Une compensation annuelle de 93.250 DH,

calculée sur la base de 250 DH/an pour 373 ha mis en défens, a été versée à

ladite association pour les années 2007 et 2008. Pour l’année 2009, la

compensation n’a pas été versée en raison du non achèvement du reboisement :

la superficie à mettre en défens tombe en dessous de l’assiette minimale exigée

(300 ha). La DPEFLCD, à travers le programme d’emploi qui lui est

préalablement soumis avec la demande de compensation, fait en sorte que les

35 Lors de l’élaboration du PDD d’Aït Bouziane, et afin de pallier cette déficience, les forestiers ont

transmis aux autres acteurs (services déconcentrés, commune rurale) les doléances, exprimées par la

population, qui n’ont pas un caractère forestier stricto sensu.

70

fonds versés soient surtout utilisés pour le financement des projets collectifs

(achat d’aliments de bétail, aménagement des points d’eau, etc.), susceptibles de

créer une dynamique de développement local. Par ailleurs, certaines

communautés, dominant des aires d’usages forestières inférieures à l’assiette

forestière minimale exigée (300 ha), ne peuvent accéder à la compensation. En

outre, et comme le remarque A. Herzenni, « (…) même lorsque ces aires sont

contiguës, il n’et pas tenu compte du poids des coûts de transaction nécessaires

aux communautés pour qu’elles arrivent à constituer entre elles l’assiette

minimale exigée, si tant est qu’elles y réussissent. » (A. Herzenni, 2008).

-Dépressage. Après l’absence de ce type d’actions en 2009, une opération est en

cours pour l’année 2010. L’opération se déroule avec l’encadrement technique

des forestiers et la mobilisation active des associations.

Nous ne disposons pas de données sur le prélèvement de bois de chauffage et de

feuillage pour le batail résultant des opérations de dépressage. Mais ces

prélèvements ont été estimés, dans le cadre du projet Ifrane, à 3,33

tonnes/ménage/an36

.

Il importe ici de faire remarquer que les ayants-droits citadins, mieux équipés

en moyens logistiques et de transports, s’accaparent l’essentiel du bois prélevé,

au détriment des populations forestières et péri forestières. Pour ces populations,

le coût du dépressage tend parfois à dépasser ses gains !

-Arbres fruitiers et PMH. La fin du projet Ifrane marque aussi la fin de

l’intervention de la DPA en matière de boisement des terres privées et

d’aménagement de la PMH. En effet, le projet Ifrane, comme tous les projets

intégrés de développement forestier, se caractérise par une autonomie financière

(compte hors budget), lui permettant de s’affranchir des règles de finances

publiques. C’est précisément cette autonomie qui entrave l’application de

l’approche développée par le projet à grande échelle.

Cela montre, encore une fois, que la forêt ne peut pas être l’affaire d’un seul

acteur institutionnel ; comme dans les projets intégrés, toutes les parties

prenantes doivent trouver une place dans le dispositif de gestion.

-Renforcement de capacités. Le Parc national d’Ifrane organise annuellement

des sessions de formation (20 jours par an) au profit des associations en vue de

renforcer leurs compétences entrepreneuriales. Dans ce cadre, quatre modules de

36

FFEM, Synthèse de l’évaluation finale du projet Ifrane, avril 2010, p.10.

71

formation sont dispensés : techniques de gestion associative, identification et

montage des projets, gestion et développement des AGR par filière, et

élaboration des business plan.

Ce sont les associations elles-mêmes qui désignent les personnes bénéficiaires

de ces formations, ce qui se traduit par un problème de « roulement » : le

changement incessant des formés ne favorise pas l’accumulation des savoir-faire

et compétences nécessaires à la professionnalisation des associations.

Par ailleurs, « la mise en œuvre des contrats programmes (conclus avec les

coopératives) suscite beaucoup de discussion vu que les structures d’exécution

ont fait de sorte que les contrats ont été réalisés malgré les difficultés

rencontrées sur le terrain. Certaines tâches concernant une activité précise dans

le contrat (ex : gardiennage) ont été transformées à une autre activité dont les

unités forestières ont trouvé un besoin sans se rendre compte ou parce qu’elles

n’ont pas pu le définir catégoriquement dans le contrat (ex : l’opération de

martelage) » (CODEFOR, 2009, p.38). Parmi les problèmes rencontrés lors de

la réalisation des contrats, l’on note en particulier les retards dans l’exécution de

certaines actions et les difficultés éprouvées par les coopérateurs pour

l’exécution de certaines actions (ouverture des pistes, par exemple).

D’ailleurs, « le suivi des actions du contrat programme ne répond pas à des

normes (cahiers des charges et spécifications des travaux) », et « aucun

programme de monitoring des résultats n’a été mis en place.. » (CODEFOR,

2009, p.39). C’est dire que l’atteinte globale des objectifs des contrats ne doit

pas occulter l’aspect qualitatif des réalisations37

.

Impact sur les conditions de vie des populations

-Revenus additifs générés. Il s’agit des revenus générés par la compensation de

mise en défens, ainsi que de ceux liés à l’activité coopérative.

S’agissant du premier type de revenus, les données disponibles montrent que la

compensation génère une valeur annuelle moyenne proche de 20 millions de

dirhams, permettant un revenu additif de 2000 DH/an et par ménage

(HCEFLCD, 2007). A cette valeur vient s’ajouter un revenu non-monétaire issu

du prélèvement des produits de dépressage (bois de chauffage et aliments de

bétail). Les revenus issus de l’activité des coopératives, quant à eux, varient au

gré de l’activité de ces dernières. Comme nous l’avons précédemment indiqué,

37

Voir Infra, adéquation et qualité des infrastructures et équipements socioéconomiques réalisés.

72

en période d’activité normale, le revenu moyen par adhérent est d’environ 1500

DH par mois.

-Adéquation et qualité des infrastructures et équipements socio-économiques

produits.

Les actions relatives à la réalisation des pistes et des points d’eau permettent de

donner un éclairage sur ce critère :

- Pistes. Leur réalisation se fait dans le cadre du programme annuel régional, qui

représente une déclinaison territoriale du plan décennal 2005-2010. Elles sont

aménagées pour être multi usages (usages forestiers et désenclavement des

populations). En dépit de leur entretien qui se fait chaque quatre ans, leur qualité

laisse souvent à désirer.

-Points d’eau. L’expérience menée dans le cadre du projet Ifrane (avec la

participation de la DPA, notamment) montre que l’aménagement des points

d’eau s’est traduit par l’intensification du surpâturage autour de ces points ; d’où

la nécessité d’aménager ces points à l’extérieur de la forêt et de tenir compte de

l’équilibre entre capacité fourragère et ressources en eau.

Les tâches confiées aux coopératives, quant à elles, touchent à bon nombre

d’aspects de développement forestier (gardiennage, réalisation et entretien des

tranchées par feu, reboisement, ouverture des pistes, etc.). Certaines de ces

tâches, ne demandant aucune qualification (guetteurs d’incendie, par exemple)

ont été réalisées aisément ; en revanche, les tâches qualifiantes, exigeant un

certain professionnalisme et des investissements (ouvertures des pistes, par

exemple) laissaient beaucoup à désirer. Les contrats ne spécifiaient d’ailleurs

pas de normes techniques à respecter et il n’y a pas eu de renforcement de

capacités des coopérateurs pour la réalisation de telles actions (CODEFOR,

2009).

Les propos recueillis sur terrain montrent que, devant l’incapacité de réaliser

certaines taches qualifiantes, certaines coopératives tendent à les sous-traiter à

des entrepreneurs privés (exploitations forestiers, entres autres), ce qui se traduit

par un manque à gagner voire des pertes non négligeables pour ces coopératives.

73

-Création d’AGR et des opportunités d’emploi.

Selon la définition proposée par l’INDH, « une AGR est une activité qui consiste

à produire des biens ou des services et/ou à transformer des produits en vue de

les vendre »38

.

Les associations sylvo-pastorales et les coopératives forestières peuvent

présenter des projets AGR finançables dans le cadre de la convergence INDH-

HCEFLCD. Le tableau ci-après présente un inventaire des projets sélectionnés

en 2010 dans la commune rurale Oued Ifrane.

Tableau V.3: Les AGR sélectionnées dans le cadre de l’INDH, C.R.Oued Ifrane

(2010)

Source : La DAS, Province d’Ifrane.

Il est à signaler que la création des AGR suit le même circuit que celui

en vigueur dans l’INDH : le même manuel de procédures est utilisé pour

codifier le processus.

Les données collectées auprès de la DAS d’Ifrane montrent que, pour

l’année 2010, aucun projet n’a bénéficié du financement. Cela tient à

diverses raisons : les projets d’élevage des ovins ont été déclinés en 38

INDH, Manuel de procédures des activités génératrices de revenus, p.14.

Association ou

coopérative

Nature de

l’activité

Nombre des

bénéficiaires

Montant

Global Remarques

Jeunes

promoteurs (2

licenciés+un

technicien en

électricité

Atelier

d’électricité

automobile et

de bâtiment

3 65 000 Les bénéficiaires n’ont pas

présenté leur contribution (30%

du montant global)

Coopérative Al

Azhar

Apiculture 8 65 000 Les bénéficiaires n’ont pas

présenté leur contribution (30%

du montant global) Association

Zaouiat Ifrane

pour le

développement et

l’environnement

Apiculture 4 65 000 Les bénéficiaires n’ont pas

présenté leur contribution (30%

du montant global)

Association

Dadda Moussa

Elevage ovins 20 50 000 Non retenu : (la pression sur la

foret, difficulté de gestion

collective du projet…) Association

Assaa

Elevage des

ovins

10 65 000 Non retenu : (la pression sur la

foret, difficulté de gestion

collective du projet…)

74

raison de leurs effets potentiels néfastes en termes de surpâturage. Les

autres projets, quant à eux, ont été jugés pertinents et validés, mais les

porteurs des projets n’étaient en mesure de mobiliser leur contribution,

fixée par le manuel de procédures à 30% du coût global de l’AGR39

.

Même si cette disposition est de nature à responsabiliser davantage les

porteurs des projets, elle risque, néanmoins, d’handicaper sérieusement

la mise en œuvre des AGR car nombreux sont ceux qui sont dans des

situations précaires.

Il faut aussi faire remarquer que cette démarche n’est pas appropriée

pour les projets portés par les individus. Un dispositif

d’accompagnement et de financement, dédié à la promotion de

l’entrepreneuriat rural, s’avère nécessaire pour favoriser la création

d’emploi et, par là-même, délester la pression qui s’exerce sur les

ressources naturelles.

Intégration de l’approche genre.

Le terme « genre » renvoie aux « rôles et aux comportements sociaux

associés aux femmes et aux hommes ainsi qu’aux attentes de la société

envers eux ». (Banque mondiale, 2003).

L’intégration de l’approche genre dans le processus participatif renvoie,

quant à elle, à deux aspects : celui de l’intensité de l’intervention des

femmes et celui des retombées du développement participatif sur la

promotion de la condition féminine. L’objectif étant « (…) de faire se

rejoindre le rôle et la place des femmes dans les sociétés concernées »

(G.Lazarev, 1993).

S’agissant du premier aspect, force est de constater l’absence des

femmes des instances dirigeantes des structures d’encadrement de la

population (associations et coopératives)40

. Aussi, leur adhésion

demeure-t-elle très réduite. Les contraintes sociales et les pesanteurs

culturelles sont assurément pour beaucoup dans cette situation41

. Qui

plus est, cette iniquité est exacerbée par les différentes initiatives de

développement participatif (élaboration des plans d’aménagement des

39

On rappellera ici que « l’éligibilité est tributaire de la mobilisation de la part du porteur du projet

de 30% du coût global de l’AGR sous forme d’un apport personnel d’au moins 10% du coût total du

projet en numéraire ». Manuel de procédures des AGR, p.14. 40

Exception cependant faite de la coopérative El Azhaar dont la présidente est une femme. 41

A titre d’anecdote, un président d’une association pastorale interrogé sur l’adhésion des femmes à

son association a répondu : « nous n’avons pas de veuves chez nous », laissant entendre que les

mariées n’ont aucune raison d’adhérer aux associations !

75

forêts, projet Ifrane, contractualisation, PDD, AGR), qui ne tiennent pas

compte de la spécificité de la condition féminine.

Par ailleurs, le développement participatif tel qu’il est pratiqué ne

débouche que sur très peu d’actions et de projets destinés à cette

catégorie de la population. Il en est ainsi, par exemple, de

l’aménagement des points d’eau, qui allège les charges de travail des

femmes, et de la présentation pour financement, par les associations

Dada Moussa et Assaa, de deux projets d’élevage destinés

essentiellement aux femmes.

En conséquence, le processus participatif ne contribue que de façon

marginale à la réduction des inégalités fondées sur le genre, assez

marquées dans l’aire de l’étude.

En effet, la situation de la femme dans cette zone, à l’instar de celle de

la femme rurale en générale, reste assez précaire et se heurte à

l’exclusion due notamment à :

-la dégradation de la forêt qu’elle exploite pour répondre aux besoins

domestiques de la famille. Certes, la collecte de bois de feu est

généralement assurée par les hommes, mais les femmes veuves se

trouvent obligées de s’y exercer.

-l’analphabétisme et le faible niveau d’éducation des jeunes filles, se

limitant généralement au primaire, en raison de l’éloignement des

collèges (jusqu’à 60 km à Bekrit !).

-un faible accès aux soins de santé et aux services de base.

-l’exercice d’activités agricoles (élevage, notamment) et artisanales

(tissage, notamment) très peu rémunératrices et sans horaires fixes de

travail. De plus, le revenu généré, au demeurant modeste, est souvent

capté par le mari ou un autre membre de la famille.

Ces inégalités fondées sur le genre semblent plus prononcées parmi les

catégories sociales les plus défavorisées. Elles privent les femmes

d’opportunités économiques et de ressources, et leur confèrent un piètre

statut socio-économique, limitant ainsi leur capacité à influer sur les

décisions locales42

.

Niveau de préservation des écosystèmes forestiers.

Les propos recueillis sur terrain mettent en évidence l’impact salutaire des mises

en défens en termes de régénération des écosystèmes forestiers. En outre, le

42

On rappellera ici qu’il n’y a que deux femmes membres du Conseil communal de la C.R.Oued

Ifrane.

76

dispositif est loin d’être figé, puisqu’il peut être allégé pour permettre à la

population de procéder à un « désherbage contrôlé » et contenir la propagation

du feu en cas d’incendie.

Par ailleurs, la pression du pâturage risque de se porter sur les parcelles non

mises en défens. Le constat a été fait dans le projet Ifrane : « Le risque

d’augmentation de la pression sur ce qu’il reste de surface disponible est très

grand. Cette problématique n’a été vue que dans le cadre d’une amélioration

des conditions de parcours à cheptel constant et en aucun cas ne mettant en

avant le risque de l’intensification de la pression du pâturage sur les espaces

disponibles »43

.

2.3-Effets contextuels

Capacités d’auto-planification des populations

L’objectif ultime de l’approche participative est de permettre aux populations

concernées elles-mêmes de concevoir et mettre en œuvre des actions de

développement au niveau de leur terroir. Pour cela, le renforcement des

compétences et des capacités d’action collective s’avèrent nécessaires. Même si

le processus est récent et n’est pas encore approprié par les populations, comme

le montre le cas de l’association Ichouaouen44

, certains indices donnent à croire

que de telles capacités se sont accrues :

-La création des structures de participation ainsi que les actions contenues dans

les contrats appellent une certaine organisation collective. A cet égard, on note

une certaine intensification et diversification de l’action collective des

populations, organisées dans le cadre des associations et coopératives. Ainsi,

l’association Dada Moussa, par exemple, a-t-elle adressé des lettres à destination

de différentes institutions concernées par les problèmes soulevés45

. Il en est de

même de la commission préparatoire pour la création de la nouvelle coopérative

des madrieurs d’Aït Lyass46

. Par ailleurs, certaines actions contenues dans les

contrats (perception et réaffectation de la compensation de mise en défens, 43

FFEM, Synthèse de l’évaluation finale du projet Ifrane, avril 2010, p.10. 44

Voir p.50. 45

En date du 8/9/2010, ladite association adressa une plainte à MM. Le Gouverneur de la Province

d’Ifrane, le Directeur régional des EFLCD du Moyen Atlas, le Haut Commissaire des EFLCD, afin de

dénoncer les abattages du cèdre dans une des forêts de la C.R.Oued Ifrane et « (…) la complicité

d’autres parties (non citées dans la plainte) » et « (…) l’imputation arbitraire de délits par les

forestiers ». La même association envoya, le 10/8/2010 une demande à M. le Directeur Provincial de

l’Agriculture d’Ifrane en vue de réhabiliter certaines seguias. Une autre demande fut adressée à M. le

Directeur Provincial des EFLCD d’Ifrane en vue de doter l’association de plants fruitiers. 46

En date du 11/8/2010, la commission préparatoire pour la création de la nouvelle coopérative

adressa une pétition à M. le Haut Commissaire aux EFLCD, lui demandant d’enquêter sur « (…) le

changement de la liste (des adhérents) déposée auprès de la DPEFLCD ».

77

dépressage, PMH, etc.) requièrent, pour être menées, une mobilisation

collective.

-En dépit de leur jeune âge, trois des associations pastorales de l’aire de l’étude

(Assa, Dada Moussa et Ichouaouen) ont d’ores et déjà entrepris une action

commune : il s’agit d’une doléance adressée au délégué provincial du ministère

de la santé pour équiper le dispensaire rural d’Agdal.

Ces actions, et bien d’autres, montrent que les structures participatives recèlent

un formidable potentiel de renforcement d’actions collectives et de

« réseautage ».

Gouvernance au niveau local

Même si le processus participatif a contribué à réduire l’adversité qui a

caractérisé les relations entre les services forestiers et les populations locales47

,

force est de constater que ces relations demeurent marquées par la méfiance,

comme en témoignent les oppositions de ces populations aux opérations de

martelage ainsi que la gravité des délits à Senoual. De plus, la commune rurale

ne semble pas prendre part à ce processus, qui demeure fondamentalement

vertical.

Dans le cas des coopératives, « les communes rurales (au niveau de toute la

province) ont montré leur entière participation dans cette vision (contrats-

programmes avec les coopératives) en cédant 75% des recettes forestières qui

habituellement ne sont pas réinvesties dans le secteur forestier en totalité ». De

même, « certains partenaires ont trouvé dans ce programme (de

contractualisation) un champ d’intervention pour participer au développement

des coopératives forestières (ADS) » (CODEFOR, p.35).

Par ailleurs, de par leur caractère représentatif des populations, les associations

pastorales tendent à devenir des enjeux de pouvoir et une composante

47 L’élaboration du PDD d’Aït Bouziane, de par son caractère fortement participatif, a, semble-il, eu

l’impact le plus retentissant à cet égard. De l’aveu des forestiers ayant participé à l’élaboration du

PDD d’Aït Bouziane, les populations étaient très sceptiques au départ, les personnes verbalisées se

tenaient loin du lieu de la rencontre par crainte d’être arrêtées pour des délits forestiers qu’elles ont

commis auparavant. La présence de femmes forestières animatrices dans l’équipe d’élaboration du

PDD a contribué à rassurer les populations qui, progressivement, se sont mises à rejoindre les

discussions (témoignage d’un forestier membre de l’équipe PDD d’Aït Bouziane).

78

incontournable de la vie politique locale48

.

De même, les coopératives, en raison de l’importance de leurs poids

socioéconomiques, tendent à devenir un facteur essentiel de structuration de la

vie politique locale, comme en témoignent les luttes intestines autour de

l’établissement de la liste des adhérents de la coopérative, en cours de création,

d’Aït Lyass.

Il importe aussi de faire remarquer que le dynamisme associatif et coopératif a

permis l’émergence d’individualités et de leaderships au niveau des terroirs

caractérisés par des statuts sociaux plus ou moins figés.

Durabilité des résultats.

Le fait que la contractualisation soit cristallisée par la compensation de mise en

défens limite sérieusement la durabilité de la formule. Comme le constate

brillamment A.Herzenni « La compensation a lieu durant la période de mise en

défens. Mais qu’en sera-t-il à nouveau après l’ouverture aux usagers ? Le

patrimoine domanial ne sera-t-il pas de nouveau voué à une surexploitation

appelant à la longue à de nouvelles mises en défens et à des compensations ? »

(A.Herzenni, 2008, p.12).Une négociation et une reformulation des contrats,

autour de tous les problèmes et potentialités des terroirs, s’avèrent nécessaires

pour inscrire la démarche dans la durabilité. Toutefois, cela ne peut se faire,

encore une fois, sans participation et engagement des autres partenaires

(commune rurale, notamment).

Dans le même esprit, une mise à niveau des coopératives ainsi qu’une

négociation des contrats, dans un cadre multi-acteurs, sont des conditions

indispensables pour assurer la durabilité du processus de contractualisation.

Le test de la grille au niveau de l’aire de l’étude a montré que, d’une manière

générale, l’approche participative telle qu’elle est conçue et mise en œuvre a eu

des impacts positifs. Toutefois, ces résultats demeurent mitigés et sont encore

loin de correspondre à l’immense potentiel que recèle l’approche. Une véritable

négociation des contrats, aussi bien avec les associations sylvo-pastorales

qu’avec les coopératives, dans un cadre multi-acteurs est à même d’améliorer

amplement la performance de la démarche et de l’inscrire dans la durée.

48

Certains élus tentent de les rallier afin de renforcer leurs assises électorales. De même, dans

certaines fractions, on assiste parfois à des tentatives, de la part de personnes influentes, pour créer

plus d’une association.

79

3. Les enjeux de la participation

En date du 26 mars 2011, un atelier multi-acteurs, réunissant toutes les parties

prenantes à la gestion forestière identifiées et interviewées lors des phases

précédentes de l’étude, fut organisé à Ifrane. Ont pris part à cet atelier, toutes les

parties prenantes à la gestion forestière (services déconcentrés, notamment

l’administration forestière, les collectivités locales et les ONG). Le taux de

présence (95%) témoigne de l’intérêt majeur que porte les différents

stakeholders à la problématique, objet de l’atelier. La qualité du débat et sa

vigueur ont permis des échanges fructueux.

Les attentes par rapport aux travaux dudit atelier ont été globalement atteintes.

Par ailleurs, au-delà de la restitution des résultats de l’étude, l’atelier est venu

confirmer la pertinence de la démarche participative en matière de gestion des

espaces forestiers.

3.1 Objectifs vs résultats

Les objectifs de l’atelier peuvent être mis en parallèle avec ses résultats.

Objectifs Résultats

Restituer les résultats de l’étude Un exposé introductif, en langue

Arabe, a été présenté pour restituer les

principaux résultats de l’étude et servir

de plate-forme au débat

Préciser et affirmer davantage les

recommandations

Les débats ainsi que les échanges entre

les membres de l’équipe et les invités

ont permis d’actualiser et d’enrichir

certains passages du rapport.

Consolider et renforcer le réseau

d’acteurs qui s’est constitué autour du

projet

-l’atelier a permis de « visibiliser » et

de faire connaitre l’étude

-les contacts noués permettent de

baliser le terrain pour d’autres études

similaires

Développer le partenariat autour des

outils d’évaluation

-l’atelier a contribué à sensibiliser à

l’importance et aux enjeux de

l’approche participative,

-il a aussi contribué à démystifier la

notion d’évaluation

-les échanges autour de la grille ont

permis de l’étoffer et d’envisager des

voies d’amélioration.

80

Au-delà de ces résultats, les travaux de l’atelier ont permis de mettre en

évidence l’étroite articulation qui devrait exister entre les travaux de recherche

et le développement participatif : les deux peuvent s’alimenter et se renforcer

mutuellement. Comme l’écrit Rémy Prud’homme, « l’analyse sans débat est une

illusion technocratique, mais le débat sans analyse est une illusion

populiste »49

.Dès lors, une véritable intégration de ces deux aspects doit être au

cœur du processus de décision.

3.2. Analyse de la participation

Ont pris part à l’atelier d’Ifrane, les parties prenantes suivantes :

Services déconcentrés Collectivités locales ONGs

HCEFLCD

-DREFLCD-MA

-DPEFLCD-IF (2)*

-Parc national d’Ifrane (1)

-DAS, Province d’Ifrane (2)

Direction provinciale de

l’Agriculture

Autorité locale

Procureur du Roi à Ifrane (1)

ODECO (1)

Conseil provincial d’Ifrane (1)

C.R Oued Ifrane (2)

Associations sylvo

pastorales

-Dada Moussa (1)

-Assa (1)

-Ichouaouen (1)

-Zaouiya d’Ifrane (1)

-Adrar (1)

Coopératives forestières

-Madrieurs (1)

-Charbonniers (1)

-Commission préparatoire

de la nouvelle coopérative

d’Aït Liyass (2)

-Coop.Dayet Aoua (1)

-El Azhar

* les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de personnes présentes

Il convient de signaler aussi que sur une trentaine de personnes présentes à

l’atelier, cinq femmes ont pris part aux travaux de ce dernier.

Les débats qui ont eu lieu au sein de l’atelier laissent apparaitre, encore une fois,

des représentations, attitudes et stratégies diverses chez les acteurs. En

particulier, les clivages et les conflits se polarisent globalement de la façon

suivante :

-Populations vs administration forestière,

49

R. Prud’homme, « Quelle convergence entre aménagement du territoire et environnement ? » in

J.P.-de Gaudmar (collectif), Environnement et aménagement du territoire, La documentation

française, Paris, 1996.

81

-Collectivités locales vs administration forestière,

-Populations vs Collectivités locales,

-Populations vs populations.

Au-delà de la gestion forestière à proprement parler, le débat a porté, de façon

holistique et transversale, sur tous les problèmes des terroirs concernés (forêts,

parcours et terrains agricoles). C’est sans doute là un aspect fort intéressant à

souligner : la gestion forestière participative ne peut s’envisager que dans le

cadre des tels espaces cohérents et étroitement articulés. Très souvent, les

acteurs raisonnent en termes d’espaces cohérents de vie et de convergence

(économique, sociale, culturelle, etc.) plutôt qu’en termes sectoriels.

Cette dimension territoriale permet de mettre en lumière l’absence d’une

structure institutionnelle à même de fédérer l’ensemble des parties prenantes

présentes à l’atelier. Pour ancrer la démarche, il est donc primordial de

l’institutionnaliser.

Un autre aspect ressort des discussions : la demande de certaines parties

prenantes d’être considérées comme des acteurs à part entière, et non comme de

simples « bénéficiaires », ainsi que la nécessaire participation à toutes les phases

du processus décisionnel (identification du problème, analyse et recherche de

solutions possibles, mise en œuvre de la solution retenue et suivi-évaluation).

Un processus tronqué et incomplet risque d’amplifier les suspicions et les

frustrations, et, par là même, de remettre en doute la crédibilité de toute la

démarche.

Par ailleurs, l’articulation du développement participatif, de la décentralisation

et de la déconcentration est un autre enjeu majeur du débat. Seule une telle

démarche transversale permet de responsabiliser les acteurs et d’accroitre leur

réactivité par rapport aux problèmes locaux.

D’autres défis de l’approche participative ont été également débattus :

-la promotion des AGR et la nécessité d’accompagner l’initiative privée rurale,

-le renforcement des capacités, notamment des structures d’encadrement de la

population (coopératives, notamment).

Enfin, plus qu’une question « managériale », une gouvernance forestière

participative et inclusive requiert, en fait, un climat de confiance entre acteurs et

82

un rééquilibrage des pouvoirs de décisions. L’enjeu est moins un partage des

bénéfices qu’un partage des pouvoirs. Les avantages de la co-gestion

participative vont donc au-delà de la sauvegarde des forêts et de l’amélioration

des conditions de vie de la population, pour englober des questions plus

inclusives renvoyant à la démocratisation des processus décisionnels.

VI. Conclusions, recommandations et ouvertures

1 .En guise de conclusion

Dans un contexte où la forêt est au centre d’enjeux environnementaux,

économiques, sociaux et institutionnels considérables, la mise en œuvre de

l’approche participative est une tache ardue. Pourtant, il est indéniable que

d’importantes avancées ont été réalisées en matière de mise en œuvre de cette

démarche.

Dans l’aire de l’étude, l’approche participative été pratiquée selon des formes

diverses (projet Ifrane, élaboration des plans d’aménagement des massifs

forestiers, élaboration des PDD). Actuellement, elle se déroule à travers la

contractualisation entre l’Administration forestière d’une part, et les associations

sylvo pastorales et les coopératives forestières d’autre part.

L’examen du déroulement de l’approche sur terrain nous a permis de mettre en

évidence les résultats suivants :

-Le processus de création des associations sylvo pastorales, initié par les

forestiers, suscite de plus en plus l’intérêt et l’adhésion des populations. Mieux

encore, ce sont les populations elles-mêmes qui, désormais, demandent appui

pour créer ce type d’associations et monter les dossiers de compensation de mise

en défens.

-Bien que les contrats signés consacrent une vision holiste du terroir, articulant

différentes dimensions (forêt, espaces pastoraux, agriculture, infrastructures,

PMH, etc.), la démarche est cristallisée autour de la compensation de mise en

défens.

- La convergence INDH-HCEFLCD contribue considérablement au

renforcement des associations et coopératives en matière de montage et de

financement des AGR. Un des défis majeurs de l’approche participative serait

aussi d’en faire un outil de promotion de l’entrepreneuriat rural.

-Bien que jeunes, les associations sylvo pastorales commencent à développer

des actions de « réseautage » (cas Dada Moussa, Assa et Ichouaouen).

83

-Il semble que les associations sylvo pastorales, de par leur caractère

représentatif et les rôles qu’elles sont appelées à jouer, tendent à devenir des

enjeux de pouvoir et des composantes incontournables de la vie politique locale.

- L’approche est de type « vertical », reliant les associations sylvo-pastorales et

l’administration forestière. Une nouvelle gouvernance forestière requiert la mise

en place d’un cadre de négociation adéquat permettant une implication de toutes

les parties prenantes à la gestion forestière (collectivités locales, services

extérieurs, etc.). Une meilleure articulation entre les pratiques participatives, la

décentralisation et la déconcentration reste à créer.

En ce qui concerne la contractualisation avec les coopératives, force est de

constater que « les résultats de la réforme engagée en 2004 demeurent très

mitigés » (CODEFOR, 2009). Le mouvement coopératif forestier reste marqué

par des faiblesses et insuffisances devenues récurrentes (déficit de respect de la

réglementation, faible professionnalisme, latence, non diversification des

activités, etc.). Pour sortir de sa crise, le mouvement coopératif tente de se

restructurer, comme en témoignent la création, en cours, de la coopérative d’Aït

Lyass et la fusion des coopératives des madrieurs et des charbonniers.

En principe, les coopératives sont appelées à jouer un rôle d’encadrement et

participation de la population au développement forestier. Cependant, les

dysfonctionnements qui handicapent durablement ces structures ainsi que les

enjeux qui les entourent amenuisent sérieusement ce rôle ; souvent, elles sont

même incapables de contenir la délinquance forestière.

De plus, la non implication des coopératives dans la programmation des actions

des contrats réduit l’acceptabilité et la faisabilité d’une bonne partie de ces

actions.

- Enfin, en se référant à l’échelle de participation élaborée par Sherry Arnestein,

on peut considérer que la démarche s’apparente à un arrangement coopératif,

permettant d’associer les populations aux processus décisionnels et de les faire

bénéficier de certains avantages. Son évolution vers des paliers supérieurs de

l’échelle requiert une réforme globale, dont nous indiquons ici quelques voies et

moyens.

2. Recommandations

Les actions que nous recommandons s’articulent autour de cinq axes :

-Agir sur la gouvernance ;

-Renforcer les structures d’encadrement et de participation de la population ;

84

-Réformer la législation forestière et renforcer la dimension territoriale de la

politique forestière ;

-Réunir les conditions d’un développement durable des zones forestières et péri

forestières ;

-S’approprier les outils de l’approche participative.

2.1. Agir sur la gouvernance

Renforcer l’institutionnalisation de l’approche participative

- Un schéma institutionnel adapté à la gouvernance participative des forêts.

Cela requiert un engagement et une mise à niveau de l’ensemble des

stakeholders (HCEFLCD, communautés et collectivités locales, services

extérieurs, etc.). Dans ce cadre, il importe d’ériger le conseil provincial de la

forêt comme un véritable organe de délibération autour de la forêt. Le

HCEFLCD conservera, bien évidemment, un rôle pivot pour la prise de décision

forestière. De même, un rééquilibrage des pouvoirs de négociation au profit des

associations pastorales et des coopératives s’avère nécessaire pour crédibiliser

davantage le processus. De par les rôles qu’elles sont appelées à jouer en matière

de développement rural, les communes rurales et les services déconcentrés

devraient prendre part à cette gouvernance. Bien évidemment, la décision

forestière doit être impérativement cadrée dans une stratégie globale, et

converger avec les opportunités qu’offre l’environnement institutionnel (INDH,

ADS, ODECO, etc.) (CODEFOR, 2009).

- Ajustements de certaines insuffisances institutionnelles. Parmi les ajustements

à apporter, l’on peut citer : l’élaboration d’un manuel de procédures pour

codifier la démarche, la formation (des forestiers, notamment) aux principes de

l’approche participative et la mise en place de mécanismes de suivi-évaluation et

d’arbitrage des contrats.

-Renforcement de l’encadrement forestier. Un tel renforcement, notamment dans

le secteur Senoual, joint à l’appropriation des outils participatifs, permettra de

limiter les délits qui y sont commis. A cet égard, la création, en cours, d’un

CCDRF à Bekrite est salutaire. De même, la création d’un service « partenariat

et communication, actuellement en cours au niveau de la DREFLCD-MA,

permettra d’améliorer davantage la démarche et de promouvoir sa pratique à

grande échelle.

Promouvoir la décentralisation et la déconcentration.

85

L’approche participative mérite d’être moins « verticale » et plus

« transversale » ; d’où la nécessité de consacrer davantage de place à

l’implication de la commune rurale et des services déconcentrés.

Plus qu’une simple entité administrative, la commune doit être érigée en cadre

de développement. A cet égard, l’élaboration du plan communal de

développement, devenue désormais une obligation légale, permettra d’identifier

des projets de partenariat et de situer la place de la forêt dans le développement

local. Le renforcement de la capacité de la commune à ce niveau est donc

primordial.

Par ailleurs, une déconcentration de planification permettra d’améliorer la

réactivité des services extérieurs à la réalité du terrain et, ce faisant, de

promouvoir leur implication dans des approches participatives et territoriales.

2.2. Renforcer les structures d’encadrement et de participation de la population

Cela peut se faire à travers des actions en direction des associations sylvo

pastorales et des coopératives.

Associations sylvo pastorales. Il convient de faire bénéficier les

associations pastorales du statut d’utilité publique. Il n’est pas nécessaire de

démontrer le caractère collectif et patrimonial du rôle que ces associations sont

appelées à jouer, notamment en matière de protection de la forêt. Ce statut, on

le sait, confère des avantages non négligeables aux structures concernées. Il

permettra, en particulier, de renforcer le rôle et la place de ces associations dans

l’échiquier institutionnel local et d’en faire un cadre privilégié de dialogue et de

participation effective de la population à la gestion de la forêt. Bien

évidemment, ce statut implique des obligations (tenue de la comptabilité,

notamment) dont le respect requiert un renforcement des capacités des

associations concernées.

Coopératives. Plusieurs leviers peuvent être mobilisés pour promouvoir

les coopératives, parmi lesquels on peut citer :

-Au niveau commercial et financier. Les actions suivantes seraient salutaires :

-L’encouragement des coopératives à constituer des fonds de réserves ;

-La tenue d’une comptabilité conforme au Plan comptable des coopératives ;

-La création d’un fonds de solidarité, qui peut être financé conjointement par les

coopératives et les collectivités locales ;

86

-La vente des produits des coopératives doit se faire par adjudication.

-Diversification et intégration des actions. Afin de délester la pression sur la

forêt et de créer des sources de revenus stables, il est primordial d’encourager

les coopératives à diversifier leurs activités à travers la valorisation du bois, la

collecte et la commercialisation des plantes aromatiques et médicinales,

l’apiculture, etc.

Dans ce cadre, il serait intéressant de favoriser la création d’un pôle de

développement de la coopération forestière couvrant toute la filière bois

(création d’une scierie coopérative, par exemple) et de brancher les coopératives

sur les marchés d’envergure régionale et nationale. Cela permettrait de renforcer

la contribution des coopératives à la création d’emplois et à l’amélioration des

revenus en zones de montagne.

Ces coopératives peuvent également être mises à contribution pour protéger la

forêt et faire participer les populations péri forestières, à travers la fourniture de

certaines prestations telles que la lutte contre les incendies, l’entretien des pistes,

le gardiennage, etc.)

-Renforcement des capacités. Trois actions majeures contribueraient à ce

renforcement :

-Mise en place des projets d’information et d’alphabétisation des coopérateurs

pendant les périodes creuses d’inactivité.

-Co-organisation, par l’ODECO et l’administration forestière, des sessions de

formation régulières au profit des dirigeants, portant, entre autres, sur : la

comptabilité, la législation forestière, l’organisation et la gestion coopératives,

les techniques de vente, etc.

-Renforcement des capacités techniques des coopératives pour la réalisation des

travaux d’infrastructures forestières, exigeant des qualifications spéciales.

Ces éléments de réforme permettraient vraisemblablement de renforcer les

capacités des coopératives et les aider à se transformer en PME.

87

2.3. Réformer la législation forestière et renforcer la dimension territoriale de la

politique forestière

Réformer la législation forestière.

-L’arsenal juridique marocain est marqué par une pléthore de mesures

répressives par rapport aux mesures incitatives. Ces dernières s’avèrent pourtant

primordiales pour la mise en œuvre et la réussite de l’approche participative,

fondée sur l’implication et l’intéressement économique des différentes parties

prenantes.

A cet égard, la compensation de mise en défens est un dispositif dont la portée

incitative peut être accrue en modulant l’application selon les réalités forestières

régionales. On rappellera que « (…) la compensation est calculée sur la base du

manque à gagner pour les usagers, engendré par la soustraction d’un espace

forestier au parcours auquel ils ont droit en vertu de la loi » (HCEFLCD, 2010).

En fait, de par sa nature, la compensation devrait être rattachée aux coûts de

dégradation des espaces forestiers inhérents à l’exercice des droits d’usages

reconnus aux riverains. Bien évidemment, le calcul de ces coûts, ou des

bénéfices résultant de la renonciation à l’exercice des droits d’usage, est un

exercice ardu pour lequel l’économie de l’environnement et des ressources

naturelles ne fournit pour le moment que des réponses imparfaites ; mais leur

prise en compte aboutirait fort vraisemblablement à une territorialisation du

montant de la compensation50

. Dans cet esprit, les entrevues réalisées dans l’aire

de l’étude mettent en évidence la nécessité de revaloriser la compensation pour

tenir compte de la « valeur de la forêt» de l’aire de l’étude, notamment la

cédraie.

Concomitamment, l’assiette forestière minimale (300 ha) mérite d’être revue à

la baisse afin de permettre aux communautés locales, dominant une superficie

inférieure à ce plancher, d’accéder à la compensation sans être obligées de

s’associer avec d’autres communautés avoisinantes, en raison des problèmes et

des coûts de transaction inhérents à de tels regroupements.

Toujours sur le volet réglementaire, il convient aussi de promulguer la loi sur la

montagne et un texte législatif spécifique à la cédraie.

Renforcer la dimension territoriale de la politique forestière.

50 D’ailleurs cette territorialisation est déjà partiellement appliquée, comme en témoigne le montant de

la compensation dans le cas de l’arganier : 300 DH/an pour un minimum de 100 ha.

88

Cela requiert de tenir compte du caractère multifonctionnel de la forêt

(production de la matière ligneuse, biodiversité, écotourisme, etc.) et de mettre

en place des mécanismes permettant à d’autres parties prenantes gravitant autour

de la forêt de faire valoir leur point de vue et intérêts.

Afin de mieux articuler les dimensions sectorielles et territoriales de la gestion

forestière, il serait judicieux de faire des normes nationales forestières des garde-

fous et un cadre au sein duquel l’action collective transversale, des acteurs

locaux provenant de secteurs différents, peut librement se déployer (Guy

Chiasson, Caroline Andrew et Joanne Perron, 2006).

2.4. Réunir les conditions d’un développement durable des zones forestières et

péri forestières.

Promulgation de la loi sur la montagne. Cette loi, une fois promulguée,

contribuerait à améliorer le niveau de vie dans les zones de montagnes

handicapées par les conditions géographiques et climatiques. Dans le même

esprit, il convient de concevoir et mettre en place une politique « d’intégration

des espaces » (Naciri, 1988) à travers des mécanismes de solidarité amont-aval,

visant à récompenser l’amont pour ses services de préservation des ressources

naturelles.

Une politique énergétique adaptée. Des actions méritent d’être engagées

pour améliorer les conditions de substitution du bois par les bouteilles de gaz

butane, en combinant la promotion des centres d’emplissage mobiles et des

incitations financières. De même, la disponibilité des ressources en eau

permettrait de valoriser l’utilisation des énergies renouvelables à travers les

microcentrales.

Une météorologie spéciale. Les conditions météorologiques rudes de

l’aire de l’étude requièrent de mettre en place une météorologie de proximité

répondant aux besoins spécifiques de la région, notamment en saison hivernale.

Cela faciliterait l’alerte et les interventions destinées à désenclaver la

population.

Un développement agricole et pastoral durable. Il s’agit d’engager des

actions permettant de satisfaire des besoins immédiats de la population

(infrastructures de base, PMH, parcours, etc.). Aussi des actions durables

méritent-elles d’être engagées ; il s’agit en particulier de l’immatriculation

foncière pour sécuriser les titres fonciers et, ce faisant, encourager

l’investissement en matière de protection des ressources naturelles (terres

agricoles, notamment).

89

Promotion des AGR et de l’entrepreneuriat rural .Afin de soulager la

forêt des fortes pressions qu’elle subit, la promotion des AGR et de

l’entrepreneuriat rural constitue une alternative viable. Celle-ci est aussi à même

de renforcer les structures de participation de la population (associations et

coopératives) porteuses des projets AGR.

Une telle promotion pourrait se faire à travers l’exploitation de certaines niches

telles que la valorisation des produits du terroir (romarin, lichens, caroubes, etc.),

le développement de tourisme rural (avec ses effets d’entrainement positifs sur

l’artisanat local) et la valorisation des plantes aromatiques et médicinales.

L’appui aux études de faisabilité, la formation et le financement sont les

principales formes de soutien aux AGR. La convergence des actions de la

DREFLCD-MA et d’autres programmes (INDH, plan Maroc vert) contribuera

incontestablement à réaliser cet objectif.

De plus, comme nous l’avons souligné auparavant, le dispositif d’appui et

d’encadrement mis en place par le Parc national d’Ifrane n’est pas adapté à la

promotion des projets portés par les individus. De tels projets requièrent, en fait,

des dispositifs d’accompagnement spéciaux, comportant des prestations adaptées

allant de l’idée à l’accompagnement post-création des projets. Qui plus est,

l’octroi de microcrédits (prêts individuels) pourrait contribuer à la création des

activités rurales.

Promotion de la condition féminine. Des interventions judicieuses peuvent

contribuer à réaliser des progrès notables sur cette voie. C’est ainsi, par

exemple, que l’amélioration de l’accessibilité et de la qualité des services

publics, les écoles notamment, réduirait les coûts scolaires pour les familles et

contribuerait à surmonter les obstacles à l’éducation des filles.

Dans le même esprit, le développement des infrastructures (routes, eau potable,

etc.) contribue à réduire le temps consacré aux tâches ménagères, ce qui se

répercute positivement sur la santé des femmes et leur participation à la vie

communautaire, et permet aux jeunes filles un plus grand accès à l’école.

Ces actions, jointes à l’appui à la création des AGR sont les instruments les plus

décisifs à la promotion de l’accès des femmes aux ressources et aux opportunités

économiques.

1.5. S’approprier les outils de l’approche participative.

Renforcement de capacités. Des besoins en termes de formation dans le

cadre du processus participatif peuvent être identifiés chez les différents acteurs

concernés par la forêt51

, notamment les forestiers. Pour ces derniers, en effet, les

compétences techniques méritent d’être constamment actualisées et complétées 51

Voir Supra pour les communes, les associations et les coopératives.

90

par d’autres compétences en sociologie, anthropologie et économie rurale,

disciplines d’une portée scientifique incontestable pour le décryptage du rural.

Les actions de renforcement des capacités doivent toucher tous les aspects de la

démarche : diagnostic, planification et suivi-évaluation. Pour cela,

l’appropriation de certains outils tels que les techniques d’animation et de

négociation, la méthode MARP, etc. pourrait contribuer à améliorer la pratique

de la démarche. Mais aussi importants soient-ils, ces outils ne doivent pas être

surestimés. Comme le souligne Bara Guèye « Ils (les outils et les techniques) ne

peuvent pas induire de changements durables si leur application ne se fait pas

dans un contexte institutionnel favorable à la participation » (Bara Guèye,

2000,)

Réhabiliter la démarche PDD et en fixer des standards de qualité.

Comme nous l’avons souligné lors de l’analyse du cas d’Aït Bouziane, le PDD

revoie à un processus participatif et itératif couronné par l’élaboration d’un

document de référence. En effet, le déroulement de ce processus incarne les

différentes phases de l’approche participative (phase préparatoire, diagnostic

participatif, planification, mise en œuvre et suivi-évaluation).

Correctement élaboré, le PDD responsabilise les populations, et favorise

l’apprentissage et la capacité d’action collective. En outre, le document produit

est un levier de développement durable du terroir.

Il importe donc de réhabiliter cet outil, actuellement mis en veilleuse dans l’aire

de l’étude, en capitalisant l’expérience accumulée par le HCEFLCD en matière

d’élaboration des PDD axés sur la lutte contre la désertification.

Afin de valoriser pleinement le potentiel de la démarche PDD, il est aussi

nécessaire d’en fixer des standards de qualité (outils et supports

méthodologiques, codification des étapes, canevas de rédaction, etc.).

Développer le système d’information forestier.

Un tel système mériterait d’être organisé autour de deux composantes : un

système de production d’informations forestières et un autre de collecte et de

suivi de l’information socioéconomique et démographique concernant les zones

forestières et péri forestières.

En réponse à une recommandation de la Cour des Comptes demandant au

HCEFLCD de « mettre en place un système d’information fiable lui permettant

d’avoir des informations actualisées sur l’état et le rythme de dégradation de

chaque écosystème forestier afin de mieux cibler et piloter les programmes

91

d’action » (Rapport de la Cour des Comptes, 2010, p.110), ce dernier a répliqué

avoir « (…) engagé en 2008 un partenariat avec le Centre Royal de

Télédétection Spatiale (CRTS) en vue de développer une nouvelle approche

d’inventaire basée sur l’utilisation des images satellitaires à haute résolution ».

Outre cette composante, la promotion de l’approche participative requiert la

mise en place d’un système de collecte des informations socioéconomiques et

démographiques produites par d’autres partenaires (ADS, HCP, Régions,

ODECO, etc.). Ce système permettrait d’enrichir et d’actualiser les données

socioéconomiques et démographiques contenues dans les plans d’aménagement

des forêts. Il aidera à évaluer la nature du processus participatif et son impact

socioéconomique et institutionnel.

3. Approfondissements et ouvertures

Les résultats mis en évidence par la présente étude ainsi que son déroulement

permettent d’identifier, entre autres, trois pistes d’approfondissement et

d’ouverture : étude de la convergence dans le cadre d’une commune forestière,

étude sur les coopératives forestières dans la province d’Ifrane/Khénifra et une

proposition d’une méthodologie de prise de décision dans le domaine forestier.

-Etude sur la convergence dans le cadre d’une commune forestière ciblée par

l’INDH. L’objet d’une telle étude serait d’examiner les mécanismes et les outils

de cette convergence, dans le cadre d’une commune rurale forestière ciblée par

l’INDH, en l’occurrence la commune Dayat Aoua (province d’Ifrane). On

rappellera, à cet égard, que le programme décennal 2005-2014 pose le

développement humain des espaces forestiers et péri forestiers comme un de ses

objectifs. Par ailleurs, l’INDH vise, à moyen et long terme, à jeter les bases

d’une nouvelle gouvernance axée sur la participation accrue des acteurs et la

convergence de leurs actions. Il serait, dès lors, intéressant, d’examiner les

forces et les faiblesses de ce type de convergence, et d’explorer les voies et les

moyens de le renforcer.

Afin d’esquisser quelques pistes de réflexion en la matière, nous nous sommes

entretenus avec les responsables de ladite commune et ceux de la DAS.

Les données collectées auprès de cette dernière permettent d’établir un bilan des

réalisations INDH entre 2005 et 2010.

92

Tableau V.4: Bilan INDH , C.R.Dayet Aoua (2005-2010)

Nombre total de projets 20

Montant global 5 876 931,00

Part INDH 4 394 700,00

Participation CL 776 000,00

Participation partenaires 706 231,00

Fonds générés 1 482 231,00 soit un taux de 26%

Total de la population cible 92 410

Nombre d’emplois créés 96 Source : La DAS, Province d’Ifrane

Les actions réalisées, visant à réduire la pauvreté et l’exclusion, concordent avec

la typologie des activités INDH en milieu rural, laquelle regroupe quatre volets :

-Appui à l’accès aux infrastructures et aux équipements sociaux de base ;

-Dynamisation du tissu économique local par des AGR ;

- Soutien à l’animation sociale, culturelle et sportive ;

-Renforcement de la gouvernance et des capacités locales.

Le fonctionnement de l’INDH repose essentiellement sur la mise en cohérence

de ses programmes avec ceux des autres partenaires (collectivités locales,

services extérieurs, ONG). Cette question de convergence peut être appréhendée

à deux niveaux, communal et provincial.

Le niveau communal renvoie à l’élaboration de l’ILDH et à sa mise en

cohérence avec le plan de développement économique et social (PDES). Il

semble ici que, pour les différents segments de la procédure décisionnelle, les

pratiques soient en décalage par rapport aux dispositions du manuel de

procédures. Ainsi, l’équipe d’animation communale (EAR), censée être un outil

d’animation et de diagnostic territorial, bute essentiellement sur l’indisponibilité

de ses membres52

. Cela n’est pas sans conséquences sur le déroulement des

diagnostics participatifs et, par là même, la pertinence des ILDH.

De même, les mécanismes institutionnels mis en place par l’INDH ne sont pas

encore appropriées par certains acteurs qui s’adressent directement à la DAS,

dépassant par là le CLDH qui constitue, en principe, leur interlocuteur au niveau

52

Il s’agit de deux fonctionnaires de la commune et d’un acteur associatif.

93

local. Ce comité vit une situation de latence, partiellement compensée par le

dynamisme du président de la commune.

Par ailleurs, la commune est en cours d’élaboration d’un PDES qui doit, selon

les termes du manuel de procédures, être mise en convergence avec l’ILDH. Il

faut d’ailleurs faire remarquer à ce niveau que cette mise en convergence

(PDES/ILDH) n’est abordée que de façon lapidaire dans le manuel de

procédures, alors que c’est un point crucial qui mérite d’amples

développements, voire des actions de renforcement des capacités des acteurs

concernés.

Enfin et surtout, il semble qu’un des maillons faibles de la convergence au

niveau communal est la programmation des projets INDH : les services

extérieurs ainsi que le tissu associatif ne disposent pas des compétences requises

pour participer efficacement à cette programmation.

Au niveau provincial la convergence INDH- programmes sectoriels affiche des

différenciations notables. Elle est jugée bonne dans le cas de la santé53

, assez

bonne dans le secteur de l’éducation54

, mais reste nettement en deçà du niveau

souhaité dans certains secteurs tels que l’agriculture. Dans le cas des eaux et

forêts, la collaboration est jugée fructueuse en matière d’AGR et d’actions de

renforcement de capacités des associations. Elle reste, cependant, nettement en

deçà du potentiel réalisable en la matière. De façon générale, les services

extérieurs focalisent leurs attentions sur les programmes sectoriels plutôt que sur

les actions INDH. La détermination du Gouverneur permet, cependant, de

pallier, au moins partiellement ce déficit de convergence.

Un tel déficit est lié aux insuffisances du processus de déconcentration, qui reste

fondamentalement une déconcentration d’exécution et non de planification,

seule à même d’améliorer la réactivité des services extérieurs.

Mais en dépit de ce déficit de convergence, il semble que l’INDH ait favorisé

une formation sur le tas au profit des services extérieurs, élus et ONG en les

acculant à un minimum de coordination dans le cadre des organes de

gouvernance. Il serait intéressant à ce niveau d’examiner l’impact de l’INDH sur

le mode opératoire des acteurs territoriaux. 53 En témoignent les projets réalisés (acquisition d’une ambulance médicalisée, module

d’accouchement, acquisition de 8 échographes gynécologiques, etc.)

54 Les projets réalisés dans ce secteur concernent notamment la pose de 12 citernes d’eau dans les

écoles rurales pour prévention contre la grippe A et l’acquisition de mini bus pour le transport scolaire.

94

Par ailleurs, les propos recueillis tendent à mettre en évidence le rôle

prépondérant du CPDH, chargé notamment de consolider et d’assurer la mise en

convergence et la complémentarité entre les ILDH et les programmes sectoriels.

Afin de conserver la cohérence des ILDH, le niveau provincial ne doit, en

principe, avoir aucun droit de regard sur l’opportunité des actions retenues,

même si les biais inhérents à la programmation des projets INDH –évoqués en

haut- poussent dans ce sens.

De façon générale, pour renforcer le processus de convergence, ne faut-il pas

que les départements ministériels donnent des orientations claires à leurs

services extérieurs pour l’implication dans l’INDH ? Dans le même esprit, une

meilleure articulation de la dimension territoriale et de la programmation

sectorielle ne passerait-elle pas par une institutionnalisation des mécanismes

INDH ?

C’est là un ensemble de constats et de questionnements qui contribuent à

identifier des pistes qui méritent d’être explorées par une étude en profondeur.

-Etude sur les coopératives forestières dans la province d’Ifrane/Khénifra. Cette

piste ambitionne d’évaluer la contribution des coopératives forestières au

développement humain et durable au niveau local. Les coopératives sont, en

effet, des structures d’encadrement de la population, qui recèlent un immense

potentiel de développement. Des obstacles et des dysfonctionnements divers

empêchent, cependant, le mouvement coopératif de valoriser un tel potentiel.

L’identification de ceux-ci permettrait de déterminer les leviers d’action pouvant

aider le mouvement coopératif à jouer pleinement son rôle en matière de

participation et de développement humain et durable.

-Proposition d’une méthodologie de prise de décision dans le domaine

forestier. Partant des résultats mis en évidence par la présente étude, et compte

tenu des caractéristiques institutionnelles et socioéconomiques marocaines, il

s’agit de proposer un mécanisme de délibération pour la prise de décision en

forêt, qui permettrait une implication effective de tous les acteurs gravitant

autour de la forêt. L’objectif étant de définir un mode de gouvernance qui

permettrait de synchroniser et d’articuler la gestion durable des écosystèmes

forestiers, d’une part, et les impératifs de développement humain, d’autre part.

95

Annexe 1

Guides d’entretiens

Trois catégories d’acteurs ont été interviewées : l’administration forestière

(DPEFLCD-IF, DREFLCD-MA, Parc national d’Ifrane) et certains services

extérieurs des ministères, les populations (ONG et individus) et la C.R.Oued

Ifrane.

Chaque entretien débute par une présentation de l’objet de l’étude et des

objectifs de l’entretien.

DPEFLCD -IF et DREFLCD-MA

- Apport du projet Ifrane en matière de promotion d’approches participatives.

- Constitution des associations sylvo pastorales : démarche et problèmes

rencontrés.

-Elaboration des PDD : procédures et démarche.

-Les services extérieurs des départements ministériels et les communes

prennent-ils part aux consultations avec les populations ?

- Conseil provincial de la forêt : périodicité des réunions, principales décisions

prises lors de la dernière réunion.

-Les mises en défens font-elles l’objet de concertation avec la population (taille,

durée, répartition spatiale des parcelles) ?

-Impacts des mises en défens sur les écosystèmes forestiers (parcelles mises en

défens et autres parcelles).

-Evaluation du contrat liant l’association Zaouia d’Ifrane et la DPEFLCD-IF

(2007-2011).

-Etat des lieux des coopératives au niveau de la province.

-La création, en cours, de la coopérative d’Aït Lyass. Conditions de création et

problèmes de démarrage. Dans quelle mesure la nouvelle entité permettra-t-elle

d’endiguer le problème des délits à Senoual ?

-La formule d’octroi des marchés de coupes (25% espèces et 75% prestations) a-

t-elle donné les résultats escomptés ?

-Les voies et les moyens susceptibles de promouvoir le mouvement coopératif

forestier.

Rencontre avec la direction du Parc national d’Ifrane (et l’association

Adrar)

-Fiche technique sur le Parc national d’Ifrane (organisation, attributions, etc.).

-Rapports avec les services extérieurs des autres départements ministériels et les

communes rurales, intervenant sur le territoire du Parc (coordination des actions

sectorielles).

96

- Déroulement de l’approche participative dans le cadre du projet Ifrane.

-Quelles sont les difficultés rencontrées en matière de constitution des

associations sylvo pastorales ?

-Elaboration des PDD : procédures et démarches.

-Accompagnement des associations en matière de création d’AGR.

-Renforcement des capacités. Qui bénéficie des formations dispensées ?

Membres des bureaux, trésoriers, etc. ?

-A votre avis, comment faire pour promouvoir l’approche participative ?

Les ONG : des entretiens approfondis seront menés avec les associations sylvo

pastorales et les coopératives forestières

Associations sylvo pastorales Ass. Dada Moussa ; ASSAA ; Ichouaouen

-Organisation : règlement intérieur+statut.

-Processus de création des associations sylvo pastorales.

-Y-a-t-il des élus parmi les membres de l’association ?

-Domaine d’intervention et objectifs de l’ONG.

-Actions de « réseautage ».

-Rapports avec l’Administration forestière (problèmes de délits et amnistie) et

les autres parties prenantes.

-Gestion des compensations de mises en défens, attribuées dans le cadre de la

contractualisation avec l’Administration forestière.

-Mobilisation de l’association pour réaliser d’autres fins (AGR, liens avec

d’autres partenaires, etc.)

- Que proposez-vous pour améliorer l’approche participative ?

Association Zaouiya d’Ifrane

-Gestion forestière dans l’aire de l’étude

-Evaluation du contrat liant l’association à la DPEFLCD-IF.

-Propositions pour promouvoir le développement humain et durable dans l’aire

de l’étude. Coopératives forestières Entretien avec la commission préparatoire pour la création de la coopérative d’Aït

Lyass

- Fiche technique sur le projet.

-Les raisons de la création de la nouvelle coopérative.

-Douars concernés et mode de choix des adhérents.

-Attitude des autres parties prenantes (DPEFLCD-IF, C.R.Oued Ifrane) vis-à-vis

de cette création. Entretien avec les directeurs des coopératives de madrieurs et des charbonniers

d’Ifrane

-Fiche technique sur la coopérative

-Situation de la coopérative (réunion des instances, marchés, fonds de réserve,

sécurité sociale, etc.)

97

-Résultats des contrats programmes liant la DREFLCD-MA et les coopératives.

-Attitude vis-à-vis de la création de la nouvelle coopérative d’Aït Lyass.

Entretiens avec les femmes

-Places des femmes dans les associations (instances, adhésion).

-Dans les projets AGR, contribuent-elles aux diagnostics participatifs, aux

planifications etc.

-Modalités de l’implication des femmes lors de la mise en œuvre du projet

Ifrane.

-Temps consacré à des taches telles que le ramassage du bois,

l’approvisionnement en eau, etc.

- Accès aux services sociaux (alphabétisation, services de santé, etc.)

-Impact des projets AGR sur la situation des femmes.

C.R.Oued Ifrane

-Les grands problèmes auxquels se heurte la commune. Vision, stratégie et plan

de développement communal.

-Contribution de la forêt aux finances de la commune.

-Rapports avec l’Administration forestière.

-Place des zones péri forestières dans les interventions de la commune.

- Evolution de la situation, du projet Ifrane jusqu’à maintenant.

-Etes-vous associé à la concertation concernant la forêt (contractualisation avec

les associations sylvo pastorales et les coopératives)?

-Rapports avec les ONG opérant dans le domaine forestier (associations et

coopératives).

- Point de vue de la commune concernant les compensations à la mise en défens

et la formule d’octroi des marchés de coupes aux coopératives (25% espèces ,

75% prestations)

Autorité locale

-Verbalisation des délits et rôle d’arbitrage entre les acteurs impliqués dans la

gestion forestière.

- Contribution en matière de protection de la forêt.

-Etes-vous associé à la concertation concernant la forêt (contractualisation avec

les associations sylvo pastorales et les coopératives)?

-Que proposez-vous pour améliorer l’approche participative dans le domaine

forestier ?

D.P.A Ifrane

-Données sur l’agriculture et l’élevage dans l’aire de l’étude.

-Projets concernant l’aire de l’étude (élevage, PMH, etc.)

- Faiblesse des filières économiques aval (viande, lait, laine, etc.). Y-a-t-il des

programmes pour remédier à cette situation?

- Participation au projet de développement intégré Bekrit-Agdal.

98

Annexe 2

Rencontres effectuées

Institutions Personnes interviewées date

Commune rurale

-Conseil provincial d’Ifrane

-C.R.Oued Ifrane

-M.Ouhadda Abdellah (président du Conseil

provincial d’Ifrane)

-Trois membres du conseil communal

15 avril 2010

21/07/2010

HCEFLCF

-DREFLCD-MA

-DPEFLCD-IF

-Parc national d’Ifrane

-M. Le directeur régional

- M. L’ex-directeur régional

-M. Kamal Moufaddal (chef de service des

Etudes d’aménagement des forêts et des bassins

versants)

-M. Kamal Moukhtari (ingénieur forestier)

-M. Bahlouli (service contentieux)

-M.Sadik (Directeur provincial du HCEFLCD-

Ifrane)

-M. Oufkir Mohammed (agent forestier, secteur

Bekrit)

-M.Zouhir Amhaouche (directeur du parc)

-Mlle Yettou Ouhetta (animatrice)

11/05/2010

01/10/2010

Plusieurs

séances de

travail

15 avril 2010

Plusieurs

séances de

travail

Associations sylvo pastorales et

coopératives

-Ass. ASAA pour la protection

et la gestion des ressources

naturelles (RN)

-Ass. Dada Moussa pour la

protection et la gestion des RN

-Ass. Ichouaouen pour

l’environnement et l’agriculture

-Ass.Zouiya d’Ifrane

-Coopératives des madrieurs

d’Ifrane

-Coopératives des bucherons

d’Ifrane

-Coopérative des madrieurs

d’Aït Lyass (en cours de

création)

-M.Belkassem El Mekki (président)

-M. Hassnaoui Massoud (président)

-M. Saïd Aggouri (président)

-M. Fadili Mohammed (président)

-MM. Le président et le directeur

-Le directeur de la coopérative

-Le président de la commission préparatoire

11/05/2010

11/05/2010

11/05/2010

20/10/2010

21/09/2010

21/09/2010

21/09/2010

Services déconcentrés

99

Province d’Ifrane

-La DAS

-La DAR

-La DCL

Autorité locale (Oued Ifrane)

Direction Provinciale

d’Agriculture d’Ifrane

-M.Lamgaouech Khalid

-M.Cheggar Abdellah

-M.Garissi L’Haj

-Agent d’autorité

-M. Le directeur provincial

15/04/2010

15/04/2010

15/04/2010

21/07/2010

11/05/2010

ODECO-Meknès -Mme la Directrice 14/10/2010

100

Annexe3

Atelier multi-acteurs

-Programme de l’atelier,

-Objectifs de l’atelier,

- Liste des participants,

- Compte-rendu.

1-Programme

L’atelier multi-acteurs, tenu le 26 mars 2011 à Ifrane en présence du

représentant de l’ONDH, s’est déroulé selon le programme suivant :

-09h30mn : Ouverture des travaux par la restitution des résultats de l’étude ;

-10h15mn : pause café ;

-10h30mn : interventions des participants ;

-12h30mn : Conclusion et clôture ;

-12h45mn : Déjeuner.

2-Objectifs de l’atelier

L’atelier vient couronner l’étude et se fixe les objectifs suivants :

-Restituer et valider les résultats de l’étude,

-Préciser les données et affiner davantage les recommandations,

-Mettre en contact les parties prenantes à la gestion forestière afin de les amener

à initier un débat autour de la gouvernance forestière,

-Consolider et renforcer un réseau d’acteurs qui s’est constitué autour du projet,

-Développer le partenariat autour des outils d’évaluation.

3- Liste des participants

101

102

103

3-Compte-rendu

Dans le cadre du partenariat entre l’université My Ismaïl et l’Observatoire

National de Développement Humain, le Centre des Etudes et de Développement

Régional organisa, le 26 mars 2011, un atelier à Ifrane sous le

thème « Evaluation de l’approche participative dans le domaine forestier ».

A l’ouverture des travaux de cet atelier, M. Abdelrhani Bouayad, membre de

l’équipe en charge du projet, après avoir rappelé le cadre d’organisation de

l’atelier, a présenté le programme de celui-ci.

M. Alhassan EL Mansouri, coordinateur national du partenariat ONDH-

Universités, a prononcé une allocution dans laquelle il a rappelé les missions de

l’ONDH et les objectifs du partenariat avec les universités.

M. Abdelilah Baguare, coordonnateur du projet « évaluation de l’approche

participative en matière de gestion forestière : cas de la commune rurale Oued

Ifrane », a restitué les principaux résultats mis en œuvre par l’étude. La

présentation a porté sur trois points :

-Rappel des objectifs et méthodologie de l’étude ;

-Principaux résultats mis en évidence ;

-Proposition de quelques axes pour le débat.

Les travaux de l’atelier ont été modérés par M.M.Abdouh, membre de l’équipe

du projet, et rapportés par M. Abdelkader Charba (membre de l’équipe) ainsi

que deux doctorantes.

Selon M. le Président du conseil provincial, le dialogue entre l’Administration

forestière et la population est presque inexistant. Il a ajouté que la commune

d’Oued Ifrane se caractérise par des spécificités qui lui sont propres, et la plupart

des adhérents aux coopératives ne sont pas des ayants-droits. Il a, en outre, fait

remarquer que le rôle du conseil communal aurait mérité de plus amples

développements dans l’étude. Par ailleurs, la compensation de mise en défens,

au demeurant modeste et ne reflétant nullement la valeur de la forêt, n’est

généralement pas versé en numéraire à la population, a-t-il précisé.

Le représentant de la DPEFLCD-IF a fait savoir que les ressources de la

direction sont limitées et ne répondent pas aux besoins de l’établissement. Il a

104

aussi soulevé les atouts et les contraintes du procédé de mise en défens,

notamment son impact sur les parcelles non mises en défens.

Les présidents des associations ainsi qu’une conseillère à la commune rurale

d’Oued Ifrane ont soulevé un certain nombre de problèmes rencontrés par la

population de la commune et surtout la femme rurale. On peut, en particulier,

citer le manque d’’accès à l’électricité, à l’eau et au réseau routier. Vu que

l’habitat est dispersé, les femmes ne sont pas motivées à s’inscrire dans les

programmes de lutte contre l’analphabétisme, les filles ne poursuivent pas leurs

études parce que les écoles sont éloignées de leur lieu de résidence. La présence

des femmes dans les associations est faible, voire inexistante. Les propos

exprimés, à ce niveau, réclament une adhésion de la commune rurale et de la

société civile au processus décisionnel afférent à la forêt.

Le directeur du Parc National d’Ifrane a précisé que l’administration essaye de

s’approcher de la population et de l’intégrer aux projets, à la prise de décision et

à l’exécution. Il a ajouté que les forestiers manquent, souvent, de marge de

manœuvre nécessaire pour être réactifs aux besoins et attentes des populations.

Une telle réactivité est pourtant nécessaire pour la mise en œuvre de l’approche

participative.

La représentante de l’ODECO a insisté sur le fait qu’une gouvernance

participative requiert un diagnostic « fouillé » des parties prenantes. De plus,

pour qu’une coopérative arrive à maturité, des opérations de renforcement de

capacités sont nécessaires, a-t-elle déclaré. Le respect des dispositions

réglementaires régissant les coopératives, notamment la constitution des fonds

de réserve, est aussi primordiale.

M. EL Fadili a, entres autres, recommandé des actions phares pour relancer

l’approche participative sur de nouvelles bases. Parmi ces actions, l’on peut

citer :

-la promulgation de la loi sur la montagne,

-la mise en place de mécanismes de solidarité amont-aval, en faveur des

populations de la montagne,

-l’amélioration des conditions de vie des forestiers et la réhabilitation des

maisons forestières.

105

M. EL Mansouri a tenu à préciser que l’approche participative ne peut se

concevoir et s’appliquer que de façon intégrée et dans le cadre d’une

gouvernance locale. L’intervenant a aussi soulevé des insuffisances de l’étude

telles que :

-la méthodologie d’évaluation, notamment la période de référence par rapport à

laquelle les changements sont constatés et évalués.

-l’évaluation institutionnelle, qui renvoie aux jeux d’acteurs.

-l’articulation de l’approche participative et des AGR.

Un membre de la commission préparatoire de la coopérative d’Aît Lyass a

soulevé les problèmes auxquels se heurte la création de ladite coopérative.

A la clôture de l’atelier, les membres de l’équipe ont tenté d’apporter quelques

précisions concernant les remarques et observations de l’assistance.

106

Bibliographie

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provinces de Chefchaouen et d’Ifrane. Document disponible à l’adresse :

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107

marocaine : Droit, économie, écologie. Actes des journées d’étude organisées

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108

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-ODECO (2009), Rapport concernant l’opération de mise à niveau des

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Meknès-Tafilalet

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développement durable des ressources naturelles, document inédit.

-SOGREAH-TTOBA (2007), Plan d’aménagement de la forêt Senoual,

septembre 2007.

-SOGREAH-TTOBA (2004), Etudes d’aménagement concerté des forêts et des

parcours collectifs de la province d’Ifrane, Forêt de Senoual, composante III

(études forestières).

-SOGREAH-TTOBA (2007), Plan d’aménagement de la forêt Bekrit, septembre

2007.

- SOGREAH-TTOBA (2004), Etudes d’aménagement concerté des forêts et des

parcours collectifs de la province d’Ifrane, Forêt de Bekrit, composante III

(études forestières).

-SOGREAH-TTOBA (2004), Etudes d’aménagement concerté des forêts et des

parcours collectifs de la province d’Ifrane, composante I (études socio-

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109

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-Bertrand ZUINDEAU et al. (2007), « Le développement durable face au

territoire : éléments pour une recherche pluridisciplinaire ». L’article est

disponible à l’adresse : www.developpementdurable.revues.org/

110

Table des matières

Introduction…………………………………………………………….. 4

I. Objectifs et méthodologie de l’étude………………………………….

5

II. Fondements et principes de l’approche participative…………………

8

III. Profil de l’aire de l’étude…………………………………….............

11

1-Profil socioéconomique……………………………………………….. 11

1.1-Démographie………………………………………………………... 12

1.2-Caractéristiques socioéconomiques…………………………………. 14

1.3-Contraintes et atouts de l’aire de l’étude…………………………… 16

2-Profil environnemental……………………………………………….. 19

2.1-Vulnérabilité écologique…………………………………………… 22

2.2-Pauvreté, démographie et enclavement……………………………... 22

2.3-Surpâturage………………………………………………………….. 24

2.4-Changement des modes d’utilisation de l’espace…………………… 25

2.5-Délits forestiers……………………………………………………… 27

3-Dispositif institutionnel………………………………………………. 29

3.1- Identification des intervenants en forêts…………………………… 29

3.2-Interactions entre acteurs : pour une nouvelle gouvernance forestière 35

IV. Déroulement de l’approche participative sur le terrain……………

38

1-L’approche participative en matière de gestion des écosystèmes

fragiles……………………………………………………………….

2-L’approche participative dans les projets forestiers au Maroc………..

38

41

2.1-Le projet GEFRIF…………………………………………………… 41

2.2-Projet Khénifra……………………………………………………… 42

3-L’approche participative dans l’aire de l’étude………………………. 45

3.1-L’approche participative dans le cadre du projet Ifrane…………… 45

3.2-L’initiation à la participation dans le cadre d’élaboration des plans

d’aménagement des massifs forestiers…………………………………..

47

3.3-Le PDD : une démarche participative structurante…………………. 47

3.4-La contractualisation avec les associations sylvo pastorales………..

3.5-La contractualisation avec les coopératives forestières……………...

51

57

V. Evaluation de l’approche participative dans le domaine forestier……

63

1. Grille d’évaluation……………………………………………………. 63

2 .Test de la grille………………………………………………………... 65

2.1-Effets procéduraux…………………………………………………..

2.2-Effets substantifs……………………………………………………..

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2.3-Effets contextuels…………………………………………………….

3. Les enjeux de la participation…………………………………………

3.1-Résultats vs attentes……………………………………………….....

3.2-Analyse de la participation………………………………………......

VI. Conclusions, recommandations et ouvertures……………………….

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1. En guise de conclusion…………………............................................... 82

2. Recommandations………………………………………………..........

2.1- Agir sur la gouvernance……………………………………………..

2.2-Renforcer les structures d’encadrement et de participation de la

population………………………………………………………………...

2.3-Réformer la législation forestière et renforcer la dimension

territoriale de la politique forestière……………………………………...

2.4-Réunir les conditions d’un développement durable des zones

forestières et péri forestières……………………………………………..

2.5-S’approprier les outils de l’approche participative…………………..

3. Approfondissements et ouvertures…………………………………….

Annexe 1…………………………………………………………………

Annexe 2…………………………………………………………………

Annexe 3…………………………………………………………………

Bibliographie…………………………………………………………….

Table des matières………………………………………………………..

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