Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 :...

21
Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre et de ses milieux associés (Galice, Espagne) E. Martinez-Ansemil 1 Mots clés : Oligochètes, eaux courantes, répartition spatiale, populations, faunistique, Espagne. Cette étude porte sur les communautés d'oligochètes aquatiques vivant dans une petite rivière atlantique, le Tambre, et ses milieux associés (lagune, lac de barrage, ria). Elle concerne la répartition spatiale des différentes populations et l'analyse des principaux facteurs qui la déterminent. Des données de l'évolution saisonnière des principales populations et des périodes de reproduction complètent l'inven- taire faunistique des Oligochètes récoltés dans ces milieux. Biological and ecological study of the aquatic oligochaetes of (he River Tambre and its environment (Galicia, Spain). Keywords : Oligochaetes, running waters, spatial distribution, population studies, faunistic, Spain. This study describes communities of aquatic oligochaetes living in a small river flowing into the Atlantic, the River Tambre, and its environments (lagoon, reservoir, ria). It examines the spatial distributions of the different populations and analyses the chief factors responsible for these distributions. Data on seasonal changes of the principal populations and their reproductive periods complete the faunistic study of oligochaetes found in these localities. Parmi les différents aspects de l'étude des Oligo- chètes, ce sont la taxonomie, la faunistique, la repro- duction et l'écologie dans les milieux pollués qui sont généralement abordés par les spécialistes. Les tra- vaux sur leur biologie et leur écologie dans des milieux naturels non pollués sont assez rares. Une étude physico-chimique des eaux du Tambre, rivière atlantique de basse altitude, a montré l'ab- sence d'une véritable pollution (Lage-Yusty 1979). Ce cours d'eau peut être considéré comme oligotro- phe comme en témoigne également la grande diver- sité de sa faune de Plécoptères (Membiela-Iglesia & Martinez-Ansemil 1984). La présente étude sur les Oligochètes représente une contribution à la connais- sance de ce groupe dans des milieux non encore trop altérés : la rivière Tambre et ses milieux associés (lagune, lac de barrage, ria). 1. Dpto. Bioloxia Animal, Univ. A Coruiia, Campus da Zapa- teira s/n., 15071 A Coruna, Espagne. 1. Milieux et méthodes 1.1. Caractéristiques générales du milieu Le Tambre (Jig. 1) coule en direction est-ouest, en Galice au nord-ouest de la Péninsule Ibérique. Il prend sa source à Sobrado dos Monxes (lat N = 43°2'15" ; long W = 4°19'30") dans un petit lac artificiel situéà 510 m d'alti- tude et débouche dans la ria de Muros e Noia après un parcours d'environ 139 km. Peu avant son embouchure le cours d'eau est barré par une retenue hydroélectrique (barrage de Barrié de la Maza). Le bassin versant du Tambre, essentiellement graniti- que (fig. 1), a une superficie d'environ 1 500 km ! ; les mouvements tectoniques (failles, plissements, fractures) ont contribué à la formation d'un vaste réseau hydrographique. Les sols sont acides, riches en silice, en aluminium et en fer mais pauvres en calcium et en phosphore (cf. Estu- dio Agrobiologico de la Provincia de La Coruna 1967). Les diagrammes ombrothermiques de diverses locali- tés du bassin versant sont présentés sur les figures 2 et 3 établies à partir du travail de Carballeira et al. (1983). Article available at http://www.limnology-journal.org or http://dx.doi.org/10.1051/limn/1990013

Transcript of Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 :...

Page 1: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

Annls Limnol. 2 6 ( 2 - 3 ) 1 9 9 0 : 1 3 1 - 1 5 1

Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre et de ses milieux associés (Galice, Espagne)

E. Mart inez-Ansemil 1

Mots clés : Oligochètes, eaux courantes, répartition spatiale, populations, faunistique, Espagne.

Cette étude porte sur les communautés d'oligochètes aquatiques vivant dans une petite rivière atlantique, le Tambre, et ses milieux associés (lagune, lac de barrage, ria). Elle concerne la répartition spatiale des différentes populations et l'analyse des principaux facteurs qui la déterminent.

Des données de l'évolution saisonnière des principales populations et des périodes de reproduction complètent l'inven­taire faunistique des Oligochètes récoltés dans ces milieux.

Biological and ecological study of the aquatic oligochaetes of (he River Tambre and its environment (Galicia, Spain).

Keywords : Oligochaetes, running waters, spatial distribution, population studies, faunistic, Spain.

This study describes communities of aquatic oligochaetes living in a small river flowing into the Atlantic, the River Tambre, and its environments (lagoon, reservoir, ria). It examines the spatial distributions of the different populations and analyses the chief factors responsible for these distributions.

Data on seasonal changes of the principal populations and their reproductive periods complete the faunistic study of oligochaetes found in these localities.

Parmi les différents aspects de l 'étude des Oligo­chètes, ce sont la taxonomie, la faunistique, la repro­duction et l'écologie dans les milieux pollués qui sont généralement abordés par les spécialistes. Les tra­vaux sur leur biologie et leur écologie dans des milieux naturels non pollués sont assez rares .

Une étude physico-chimique des eaux du Tambre , rivière at lant ique de basse al t i tude, a mont ré l 'ab­sence d 'une véritable pollution (Lage-Yusty 1979). Ce cours d 'eau peut être considéré comme oligotro-phe comme en témoigne également la grande diver­sité de sa faune de Plécoptères (Membiela-Iglesia & Martinez-Ansemil 1984). La présente étude sur les Oligochètes représente une contribution à la connais­sance de ce groupe dans des milieux non encore t rop altérés : la rivière T a m b r e et ses milieux associés (lagune, lac de bar rage , ria).

1. Dpto. Bioloxia Animal, Univ. A Coruiia, Campus da Zapa-teira s/n. , 15071 A Coruna, Espagne.

1. Milieux et méthodes

1.1. Caractéristiques générales du milieu

Le Tambre (Jig. 1) coule en direction est-ouest, en Galice au nord-ouest de la Péninsule Ibérique. Il prend sa source à Sobrado dos Monxes (lat N = 43°2'15" ; long W = 4°19'30") dans un petit lac artificiel situéà 510 m d'alti­tude et débouche dans la ria de Muros e Noia après un parcours d'environ 139 km. Peu avant son embouchure le cours d'eau est barré par une retenue hydroélectrique (barrage de Barrié de la Maza).

Le bassin versant du Tambre, essentiellement graniti­que (fig. 1), a une superficie d'environ 1 500 km ! ; les mouvements tectoniques (failles, plissements, fractures) ont contribué à la formation d'un vaste réseau hydrographique.

Les sols sont acides, riches en silice, en aluminium et en fer mais pauvres en calcium et en phosphore (cf. Estu-dio Agrobiologico de la Provincia de La Coruna 1967).

Les diagrammes ombrothermiques de diverses locali­tés du bassin versant sont présentés sur les figures 2 et 3 établies à partir du travail de Carballeira et al. (1983).

Article available at http://www.limnology-journal.org or http://dx.doi.org/10.1051/limn/1990013

Page 2: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

132 E. MARTINEZ-ANSEMIL (2)

L e c l ima t est o c é a n i q u e avec des régimes t h e r m i q u e et p lu-

v i o m é t r i q u e régu l i e r s .

Les d é b i t s son t m a x i m a fin a u t o m n e - d é b u t p r i n t e m p s

et m i n i m a e n été ou a u d é b u t de l ' a u t o m n e . L ' a n n é e 1979

fut p a r t i c u l i è r e m e n t p luv ieuse avec une i m p o r t a n t e séche­

resse e n été (fig. 4 ) : la d i f férence en t re le débi t m a x i m u m

(févr ier ) et le débi t m i n i m u m ( sep tembre ) est très p r o n o n ­

c é e {fig, 4 ) .

1 . 2 . Stations et méthodes d'étude

1 . 2 . 1 . C h o i x et e m p l a c e m e n t d e s s t a t i o n s

13 s t a t i o n s d ' é c h a n t i l l o n n a g e , r ep ré sen t a t i ve s de l a

d i v e r s i t é d e s b i o t o p e s et d e s h a b i t a t s , on t é té chois ies

(fig. 1) :

S t . 1 : l a g u n e d e S o b r a d o d o s M o n x e s . A l t i t u d e =

510 m . T r o i s po in ts d ' é c h a n t i l l o n n a g e : 1 ( A ) ,

1 (B) et 1 (C) (fig. 6 ) .

S t . 2 : M o n t e d o M a z o , 3,9 k m en ava l de la st . 1.

Al t . - 4 8 0 m .

S t . 3 : G o s e n d e , 16,3 k m en aval d e la s t . 2 . A l t . =

3 2 0 m .

St . 4 P o n t e C a r r e i r a , 16,4 k m en aval d e la s t . 3 . A l t . = 280 m .

St . 5 S igùe i ro , 28 ,4 km en aval de la st . 4 . A l t . =

230 m .

St . 6 S igùe i ro , 1,7 k m en ava l de la s t . 5 . A l t . = 230 m .

St . 7 S igùe i ro , peu ap rè s la conf luence avec le Len-

gùelle, 2 k m e n aval de la s t . 6. Al t . = 220 m . St . 8 P o n t e A l b a r , 17,2 k m en aval de la st . 7 . A l t .

= 200 m .

S t . 9 P o n t e M a c e i r a , 24 k m en aval de la s t . 8 . A l t .

150 m.

S t . 10 lac de b a r r a g e de Bar r i é de la M a z a . A l t . =

100 m. D e u x po in t s d ' é c h a n t i l l o n n a g e :

- 10 (A) : 6,3 k m en aval de la st . 9 ;

- 10 (B) : 5,4 km en aval du point 10 ( A ) .

St . 11 : R ia de M u r o s e No ia , 700 m en aval de la cen­

t ra le hydroé lec t r ique et à 11,5 k m d u po in t 10

(B) . Al t . - 0 m.

St . 1 2 : Ria de M u r o s e N o i a , 1,1 km en aval de la s t .

11 . Alt . - 0 m .

S t . 1 3 : Ria de M u r o s e N o i a , 1,2 k m en aval de la st .

12. Al t . = 0 m .

Fig. 1. Bassin versant du Tambre : nature géologique, réseau hydrographique, profil longitudinal et emplacement des siations. 1 : Roches sédimentaires (précambrien-cambrien) ; 2 : Gneiss oeillé ; 3 : Roches métabasiques (gabbros) ; 4 : Granodiorite à biotite ; 5 : Injections magmatiques et migmatitiques ; 6 : Granite porphyroïde à deux micas ; 7 : Granite porphyroïde à biotite ; 8 : Gneiss granit ique mylonitique.

Page 3: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(3) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 133

Fig. 2. Diagrammes ombrothermiques de Gaussen pour la période 1944-1974. 2a : à Présaras (cours supérieur) ; 2b : à Laba-colla (cours moyen) ; 2c à Noia (cours inférieur).

S i

Fig. 3. Diagramme ombrothermique de Gaussen à LabacoIIa (cours moyen) pendant la période de récolte (année 1979).

Fig. 4. Variations du débit mensuel moyen du Tambre à proxi­mité du lac de barrage.( ) : année 1979 ; (—) : période 1943-1960.

1 .1 .2 . C a r a c t é r i s t i q u e s p h y s i q u e s et c h i m i q u e s d e s s t a t i o n s

A u c o u r s de l ' a n n é e 1979, n o u s a v o n s d é t e r m i n é cha ­

q u e m o i s les p r i n c i p a u x p a r a m è t r e s m o r p h o m é t r i q u e s ,

p h y s i q u e s et c h i m i q u e s de c h a q u e s t a t i o n :

— l a rgeu r et p r o f o n d e u r d u lit ;

— vitesse d u c o u r a n t en su r face (V m a x à la s t a t ion

et V à l ' end ro i t d u p r é l è v e m e n t ;

— végé ta t ion et g r a n u l o m é t r i e du s u b s t r a t ;

— t empéra tu re de l ' eau , t r anspa rence a u d i sque d e Sec-

chi d a n s les mi l i eux l én i t i ques , oxygène d i s s o u s (pa r la

m é t h o d e W i n k l e r ) , p H et c o n d u c t i v i t é ;

— d e façon p lus p o n c t u e l l e , la t e n e u r de l ' e au e n C a ,

M g , N a et K a été a n a l y s é e p a r s p e c t r o p h o t o m é t r i e d ' a b ­

s o r p t i o n a t o m i q u e ; la t e n e u r en m a t i è r e o r g a n i q u e des

s é d i m e n t s a é té e s t i m é e p a r ign i t ion (2 h à 550-600° C ) .

E n faciès l o t i que la t e m p é r a t u r e et les d i f fé ren t s p a r a ­

mèt res ch imiques o n t é t é mesurés à 10 c m sous la surface ;

d a n s les mi l ieux l én i t i ques ces m e s u r e s o n t é g a l e m e n t é t é

ef fectuées près du f o n d . Les p r i n c i p a u x résu l t a t s , r e g r o u ­

pés d a n s le t a b l e a u I, p e r m e t t e n t de d i s t inguer 5 g r a n d s

t ypes d e mil ieu :

— St . 2 , 3 , 4 , 5 , 6 , 8 , 9 : ce son t des mi l i eux lo t iques

avec , s u r t o u t d a n s les t ro i s p r e m i è r e s s t a t ions , u n e g r a n d e

d ive r s i t é d e b i o t o p e s . Les e a u x son t peu miné ra l i s ée s : la

c o n d u c t i v i t é n e d é p a s s e 75 ^ S / c m q u ' e n p é r i o d e d e

séche resse d a n s le cou r s s u p é r i e u r ( d é c o m p o s i t i o n d e s

m a c r o p h y t e s ) et en p é r i o d e de c rues d a n s le c o u r s infé­

r ieur ( lavage de miné raux d ' u n chan t i e r ) . L e p H est ac ide ,

l ' a m p l i t u d e t h e r m i q u e faible. Les eaux sont t o u j o u r s sa tu ­

rées o u p r e s q u e en 0 2 -

— St . 7 : s i tuée j u s t e en aval de la con f luence a v e c le

L e n g ù e l l e , c 'es t u n e z o n e p r o f o n d e à c o u r a n t f a ib le d o n t

le f ond est r ecouver t d ' a r g i l e et de vase riche e n m a t i è r e

o r g a n i q u e (22,5 % en d é c e m b r e ) . L ' exp lo i t a t ion d e m i n é ­

r a u x d a n s le bass in du Lengi ie l le p r o v o q u e une fo r t e t u r ­

b id i t é et u n e a u g m e n t a t i o n d e la conduc t iv i t é e n p é r i o d e

de c r u e .

— L a g u n e (st . 1) : p l u s d e 75 % de l a superf ic ie son t

r e c o u v e r t s p a r la végé t a t i on (fig. 6) ; le fond est f o r m é

d ' u n e épa i s se c o u c h e d e vase r iche en mat iè re o r g a n i q u e

(29 °/o d a n s le sec teur C) qui dégage u n e fo r t e o d e u r

d ' H 2 S en été a u n iveau du secteur C . E n pé r iode es t iva le

il exis te u n e s t ra t i f ica t ion t h e r m i q u e p l u s m a r q u é e d a n s

le sec teur C à végé ta t ion d e n s e (p lus de 8° C d e d i f f é r ence

e n t r e la su r face et le f ond en a o û t ) . L a teneur e n 0 2 des

e a u x d u fond varie peu en été : e n v i r o n 2,5 m g / l (25 %

d e s a t u r a t i o n ) . La c o n d u c t i v i t é et s u r t o u t le p H f luc tuen t

d e f açon i m p o r t a n t e ( p H = 3,8 à 9 ,4 en surface d a n s le

secteur B). La t r a n s p a r e n c e a u d i s q u e de Secchi va r i e en t re

1,4 m en été et 4 ,6 m en h iver ( p r o f o n d e u r m a x i m a d e la

l a g u n e ) .

Page 4: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

134 E. MARTINEZ-ANSEMIL (4)

Fig.

5.

Prin

cipa

les

cara

ctér

istiq

ues

phys

ique

s et

chi

miq

ues

des

stat

ions

d'e

aux

douc

es e

t co

uran

tes

du T

ambr

e (s

t. 2,

3,

4, 5

, 6,

7,

8, 9

)

Page 5: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

( 5 ) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 135

Fig

. 6.

P

rin

cip

ales

car

acté

rist

iques

phy

siqu

es e

t ch

imiq

ues

de l

a la

gu

ne

(st.

1)

, d

u la

c de

bar

rag

e (s

t.

10)

et d

e la

ria

(st

. I

l,

12, 1

3).

s

: su

rfac

e ;

p :

pro

fon

deu

r.

Page 6: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

136 E. MARTINEZ-ANSEMIL (6)

Tableau I. Principales caractéristiques morphométriques, physiques et chimiques des stations d'échantillonnage, s : surface ; f : fond ; *, **, *** : abondance par ordre croissant.

Stations

Paramètres s A f S E f s C f

2 3 4 5 6 7 8 9

s A

10

f s B f 11 12 13 |

(mesures fond)|

Largeur moy. (m) (su face tot.= 117.405 m2) 5,5 15 19 32 24 22 26 33 50 150 90 105 1201 Prof. moy. (m): min. (prof . moy.= 1, 53) 0,2 0,3 0,4 0,3 0,6 1,2 0,9 0,9 0, 7 1,2 1,5 1,5|

max. (prof . ma> .= 4,60) 0,6 1,1 1,3 1,1 1,5 2,7 1.7 2,0 8 16 3,5 3,8 4,0| boue *.. * * • *** *** vase-argi le * " *

S sable * * » • * . . . . . . »*. ...i

u gravier * * ** ** •

b galets ** . . . . . . . . . s cailloux * * * * t blocs • * * r macroph. palust. *** . . . a S Sun ** • * * t Ranunculus ... ** * •

Myriophyllun * • * * debris végétaux *

V. max.surf.<cm/s): min. 50 40 80 130 45 10 130 40 max. 190 185 200 235 185 80 280 190 40

T. eau (oC): min. 7,8 5,5 6,0 5,8 5,4 6,0 5,6 5,8 6,1 6,0 7,4 6,3 6,5 6,5 8,0 8,9 6,6 9,0 9,0 9,0| max. 19,9 16,2 22,4 17,6 25,2 8,0 14,6 16,2 17,2 18,0 19,1 20,0 20,3 20,6 22,2 23,4 21,0 20,7 20,4 20,4|

Oxygène (X sat . ) : min. 42 25 58 24 40 24 83 80 90 85 88 83 86 89 85 88 90 90 87 90 961 max. 96 91 108 90 115 97 100 104 103 105 109 110 98 96 97 114 100 136 125 115 120j moy. 74 64 84 54 83 60 88 91 93 93 93 91 92 93 90 97 94 l ia 101 103 106]

Conductiv. (ftS/cm) min. 32 32 27 27 32 11 32 39 38 34 42 43 43 43 45 46 45 44 (0) (0) (0) | ou (Salinité") ( X . ) : max. 350 364 431 583 256 166 109 325 270 260 212 209 121 218 286 241 338 732 (5,5) (6)(7,5)|

moy. 82 126 110 146 82 69 55 105 74 71 74 71 62 68 103 96 102 171 p H : min. 4,4 3,5 3,8 4,1 3,8 4,1 4,9 5,0 5,1 5,1 5,0 5,1 4,8 4,7 4,2 3,6 2,7 3,4 6,1 6,4 6,4j

max. 7,2 7,3 9,4 8,9 7,4 7,2 7,1 7,3 7,4 7,5 7,5 7,5 7,8 8,1 7,6 9,1 7,3 7,1 7,8 8,0 8,4| moy. 6,0 5,7 6,0 6,0 5,9 6,2 6.3 6,5 6,5 6,4 6,4 6,6 6,5 5,9 6,1 6,2 5,9

6,9 7,1 7,2] X mat.org.secl. (décemb.)

27,5 22 29 1,4 1 , ' 6,9 11,4 11,5 22,5 5,8 29,8 0,6 2,5 1,9| Transp. Secchi (m): min. 1,4 1,5

max. 4,6 (fond) 4,3

— L a c d e b a r r a g e (st . 10). Il n ' y a pas de vér i tab le s t ra ­

t i f i ca t i on t h e r m i q u e . Le p H est f o r t e m e n t ac ide en é t é :

j u s q u ' à 2 ,7 en s u r f a c e d a n s la z o n e B . L a c o n d u c t i v i t é ,

faible en hiver (50 ^ S / c m ) , a u g m e n t e de façon i m p o r t a n t e

en é t é ( j u s q u ' à 732 ^ S / c m ) . L e séd imen t est r i che e n

m a t i è r e o r g a n i q u e (29 ,8 mais le brassage de la c o l o n n e

d ' e a u et le f o n c t i o n n e m e n t du b a r r a g e (prise d ' e a u en p r o ­

f o n d e u r ) a s s u r e n t u n e i m p o r t a n t e o x y g é n a t i o n des e a u x

d u f o n d . L a t r a n s p a r e n c e varie en t r e 4 ,3 m e n hiver et

1,5 m en é t é . Le m a r n a g e i m p o r t a n t e m p ê c h e l ' i n s t a l l a ­

t i o n d e m a c r o p h y t e s su r les b o r d s .

— Ria (s t . I I , 12, 13) : en p é r i o d e de c r u e o u à m a r é e

b a s s e les e a u x d e la s ta t ion 13 sont d o u c e s ( j u s q u ' à

44 ^ S / c m d e c o n d u c t i v i t é ) a lo r s q u ' e n é té ou à m a r é e

h a u t e elles a t t e i g n e n t 7,5 %o d e sa l in i té ; les éclusées d u

b a r r a g e a c c e n t u e n t ces f luc tua t ions et c o n t r i b u e n t à l ' ins ­

t ab i l i t é d u f o n d . Les e a u x son t t o u j o u r s s a tu r ée s o u

p re sque en 0 2 . Le p H est p r o c h e d e la neu t r a l i t é et les

va r i a t ions les plus i m p o r t a n t e s on t é té no tées à la s ta t ion

13 ( p H - 5,7 à 84I) . L ' a m p l i t u d e t h e r m i q u e ne dépas se

guère 12° C . La t eneur en ma t i è r e o r g a n i q u e du séd iment

est fa ib le , n o t a m m e n t à la s t a t ion 11 qui est s o u m i s e à

l ' ex t rac t ion f réquente de sab le .

1.2.3. Prélèvements de faune.

C h a q u e 2 m o i s , 2 à 6 p ré l èvemen t s de faune selon la

divers i té des b i o t o p e s , ont été ef fec tués à c h a q u e s t a t ion

d u r a n t l ' a n n é e 1979. E n fonc t ion de la vitesse du c o u r a n t

et de la p r o f o n d e u r n o u s a v o n s uti l isé soit u n filet Su rbe r

(500 c m 2 ) , soit une b e n n e E k m a n , soit des ca ro t t i e r s en

altuglass de 4 ou 8 cm de d iamèt re ; les Oligochètes vivant

sur la végé ta t ion de la l agune ont é té récoltés à l ' a ide d ' u n

filet t r o u b l e a u . Le vide de mai l le des d i f férents filets u t i ­

lisés étai t de 250 ̂ m .

Page 7: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(7) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 137

2. Inventaire faunistique et évolution sai­sonnière des populations

Il existe une grande diversité spécifique (Tableau II), liée à l 'hétérogénéité des milieux prospectés ; la majorité des 68 espèces recensées sont des formes cosmopolites ou à large répartition géographique. La richesse spécifique est élevée dans les stations d 'eau courante (41 espèces à la st. 4) et, à un degré moindre (26 sp.), dans le barrage alors que la lagune (14 sp.) et la ria (11 sp.) hébergent un peuplement assez pauvre.

Lumbriculidae

La plupart des 16 spécimens matures de S. brachystylus ont été collectés en automne et en hiver (4 le 2 8 / 0 1 , 2 le 31 /07 , 1 le 30/09 et 9 le 28/11) ; dans le Centre et l 'Est de l 'Europe des individus matures ont été souvent signalés au printemps ou en été (Kasprzak 1973, Timm 1979). Giani (comm. or.) a observé des individus matures tout au long de l 'année dans le Laudot (S-O Massif Central , France).

Des S. hehngianus matures ont été récoltés lors de chaque prélèvement mais presque la moitié des 432 spécimens ont été capturés en octobre et novem­bre. Une période de matur i té étalée sur toute l 'an­née, avec des maximums d ' abondance à différentes périodes selon les condit ions du milieu, a été sou­vent signalée pour cette espèce (Juget 1967, Timm 1967, 1979, Thomas et al. 1979).

Nous avons récolté des S. parvus matures tout le long de l 'année excepté en août ; plus de 70 % des 132 individus ont été collectés en novembre et février. Les données sur la reproduction de cette espèce sont rares : Cernosvitov (1928) et Giani & Martinez-Ansemil (1981) trouvent des individus sexuellement développés en plein été.

Naididae

1 seul individu mature de C. crystallinus a été cap­turé à la station 12 le 10/06. Plus de 80 % des C. diastrophus ont été récoltés en octobre et l 'abon­dance de cette espèce était minimale en été. Près de 70 °Io des C. langi ont été récoltés en avril. La plu­par t des C. langi ont été collectés dans le lac de bar­rage et les C. diastrophus uniquement en eau courante ;

A. leidigii est uniquement présent dans le lac de barrage. Sur 170 individus, 163 ont été récoltés au mois d 'avri l , seulement 3 en octobre et 4 en février. Ces résultats sont en accord avec les observations de Kasprzak & Szczesny (1976), Frenzel (1981) et Loden (1981) alors que Pfannkuche (1981) a égale­ment observé un maximun d 'abondance au début de l ' au tomne. Près de 40 % des individus récoltés étaient matures (3 en février et 63 en avril). Loden (op. cit.) constate également l 'apparition d' indivi­dus matures lors du pic d 'abondance précédant l 'ar­rêt de la reproduction asexuée.

A. sannio n 'a été récoltée qu 'à l 'automne (34 indi­vidus en octobre et 1 en novembre). S. josinae a été collectée tout le long de l 'année mais elle est plus abondante au printemps. 1 seul individu mature de V. uncinata a été observé le 06 /10 ; cette espèce est souvent mature en éié (Piguet & Bretscher 1913, Timm 1970).

A/, alpina représente près du tiers du total des Oli­gochètes récoltés ; elle est surtout abondante en au tomne : 60 % des individus ont été capturés en octobre aux stations 4, 5, 6, 8 et 9. Les 35 spécimens matures prélevés début juin ne représentent que 4 % des effectifs récoltés à cette période qui précède le minimum d'abondance (été). Dans la rivière Cynon (Angleterre), la période de maturité (été) coïncide avec le pic d 'abondance maximale (Learner et al. 1978) alors qu'elle lui fait suite dans des ruisseaux des Carpathes (Dumnicka 1982).

N. communis est abondante tout le long de l 'an­née ; cependant, ses effectifs augmentent légèrement en hiver et diminuent fortement en été. Cette espèce cosmopolite et ubiquiste a une grande capaci té d 'adapta t ion de son cycle de développement aux conditions du milieu : sa période d'abondance maxi­male est variable (Wachs 1967, Learner et al. 1978, Loden 1981, Smith 1985a).

A/, eiinguis est abondan te au printemps et faible­ment représentée le reste de l 'année dans les trois stations de la ria (fig. 7). Nous avons récolté 6 indi­vidus matures (1 à la st. Il et 5 à la st. 13) le 10/06 lors du pic d ' abondance mais ils ne représentaient qu 'un faible pourcentage de l'effectif total. A la sta­tion 13 où les fluctuations de salinité sont impor­tantes la population disparaît après le pic d ' a b o n ­dance. Une dynamique de population tout à fait comparable , bien que décalée dans le temps (pic d 'abondance en mars) a été observée dans une rivière

Page 8: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

138 E. MARTINEZ-ANSEMIL (8)

médi ter ranéenne ( l 'Argens, France) par Giani & Mart inez-Ansemil (1981). Les périodes de recrute­ment de N. elinguis sont généralement bien définies mais varient selon les milieux (Eyres et a l . 1978).

N. pardalts semble être surtout abondante à la fin de l 'hiver ; sur 176 individus aucun n ' a été récolté en juin et août . Wachs (1967), Learner et al. (1978, 1982) signalent des maximums d 'abondance pendant la période chaude et Loden (1981) à l ' au tomne .

Les popula t ions de N. variabilis ne varient pas numér iquement au cours de l 'année ce qui est en accord avec les observations de Piguet (1906). Cependan t , des variations annuelles avec des maxi­m u m s d ' abondance ont été observés (Loden 1981, P fannkuche 1981).

Plus de 50 °/o des 244 S. appendiculata ont été récoltés fin novembre et une forte diminution des effectifs semble avoir lieu en été où le nombre de spécimens recensés représente moins de 10 % du to t a l .

En eau couran te , V. comata présente un maxi­m u m d ' a b o n d a n c e à l ' au tomne alors que la popu­lat ion de la lagune (st. 1) est stable tout le long de l ' année .

L 'eutrophisat ion de la lagune pourrait être à l'ori­gine de la b rusque diminution des effectifs de 5. lacustris pendant la période chaude : seulement 0,5 % des 2 065 individus ont été récoltés à la fin du pr in temps et en été contrairement aux observa­t ions de Berg (1938), T imm (1967) et Smith (1986).

Plus de 80 % des 245 P. osborni ont été capturés fin novembre ; aucun spécimen n'était présent dans les prélèvements du mois d ' aoû t .

Remarques sur P. osborni :

Loden & H a r m a n (1980) suggèrent une éventuelle synonymie entre P. rosea et P. sima alors que Smith (1985b) pense plutôt à une synonymie entre cette der­nière espèce et P. osborni. Les soies aciculaires des P. osborni et des P. sima que nous avons récoltées diffèrent fortement (cf Martinez-Ansemil & Giani 1982, figs 6 et 7) ; les dents intermédiaires des soies aciculaires de P. sima sont bien visibles au micros­cope opt ique aussi bien pour les spécimens d'eau douce (st. 4) que pour celui d 'eau saumâtre (st. 12). Aucun individu de P. rosea n ' a été identifié.

Tubificidae

Parmi les 732 T. ignotus récoltés, 60 étaient à l'état mature (8 en juin, 50 en août et 2 en novem­bre). Un maximum d 'abondance a eu lieu en été lors de la période de maturi té . Des individus matures de cette espèce ont été observés en été (Berg 1948, Laakso 1969a, Brinkhurst 1964). Giani (1984) trouve des individus sexuellement développés en juin et décembre lors des maximums d 'abondance ; Ladle (1971) constate des pics de maturité et d 'abondance en hiver.

Seulement 30 individus matures de T. tubifex ont été récoltés ; la reproduction de cette espèce s'étale sur toute l'année avec une baisse d'intensité pendant la période chaude (aucun individu en juin). Une période de maturité étalée sur toute l 'année a déjà été signalée pour cette espèce (Brinkhurst & Kennedy 1965, Timm 1967, Pfannkuche 1981, Giani 1984) ainsi qu 'une reproduction moins intense en été (Ladle 1971, Young 1974).

La plupart des 200 individus matures de L. hoff-meisteri ont été récoltés dans la zone profonde du lac de barrage (st. 10), tout au long de l 'année avec un pic en été (fig. 7). Le cycle de vie de L. hoffmeis-teri est très variable (Kennedy 1966, Poddubnaya 1980, McMurray et al. 1982), des individus matu­res sont généralement trouvés tout le long de l 'an­née avec des pics d 'abondance plus ou moins mar­quées à différentes périodes.

Nous avons récolté 1 seul spécimen mature de L. udekemianus (le 10/10), de P. albicola (st. 1 le 28/01), de B. vejdovskyanum (st. 10 le 05/04), de R. subterraneus (st. 6 le 05/06) et de R. coccmeus (st. 2 le 27/01).

La période d 'abondance maximale de S. veluti-nus s'étale de la fin du printemps à la fin de l 'au­tomne ; parmi les 707 individus récoltés 13 étaient matures (4 en février, 1 en août , 1 en octobre et 7 en décembre).

32 R. falciformis matures ont été récoltés (15 le 27 /01 , 15 le 31/03 et 2 le 03/06) . 65 P. tourenqui matures ont été observés tout le long de l 'année : 5 en février, 19 en juin, 13 en août , 10 en octobre et 18 en décembre.

A. monospermathecus n'est bien représentée qu 'à la station 12 où elle est abondante de la fin du prin­temps au début de l ' au tomne lorsque la tempéra­ture et la salinité sont élevées ; elle disparaît

Page 9: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(9) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 139

Nb/Pr J^.^o^f mejsterj Nb/Pr A ^ono ipç^mst hscus

Fig. 7. Evolution numérique des populations de plusieurs espè­ces à différentes stations pendant la période de récolte. N b / P r : nombre d'individus par prélèvement.

pra t iquement du milieu pendant la période où les eaux sont froides et peu minéraïisées {fig. 7). Cette dispari t ion pourrait s 'expliquer par une migrat ion compor tementa le identique à celle observée par P fannkuche (1980). En juin et août 25 % environ des individus étaient matures . Selon P fannkuche (op. cit.) cette espèce présente un cycle de dévelop­pement biannuel avec une période de reproduct ion bien définie.

5 individus matures de P. riparius ont été récol­tés à différentes périodes de l 'année (1 le 3 1 / 0 3 , 3 le 10/06 et 1 le 06/10) .

Enchytraeidae

Nous avons récolté 1 seul spécimen mature de F. callosa (st. 2 le 31/07) , de F. magna (st. 4 le 31 / 07 ) , de F. striata (stat. 8 le 27/11) et de E. buchholzi (st. 10 le 05 /04) .

L ' a bonda nc e de C. atrata présente peu de varia­t ions stationnelles. Cette espèce se reproduit tout au long de l 'année ; 55 °7o des 346 individus capturés étaient matures . 10 individus matures de F. perrieri ont été récoltés le 2 5 / 0 1 , 1 le 03 /06 et 1 le 30 /09 ; dans un torrent froid des Pyrénées, la pér iode de matur i té de cette espèce et de C. atrata est limitée à l ' au tomne (Giani & Lavandier 1977).

C. cognettii présente un max imum d ' abondance à la fin de l ' au tomne. Parmi les 177 individus récol­tés , 13 étaient sexuellement développés (3 en octo­bre et 10 en décembre) .

Près de 50 % des 94 F. bisetosa échanti l lonnées étaient matures ; la période de maturi té s 'étale sur tou te l ' année.

Dans la ria, L. brunoi est absente de la stat ion 11 où la salinité est faible ; elle présente des pics d ' a b o n d a n c e {fig. 7) en août aux stations 12 et 13 où la salinité atteint des taux de 6 %o et 7,5 %o res­pectivement ; les 62 individus matures récoltés ont été trouvés uniquement en été : 50 en août (49 à la st. 12) et 12 en juin (8 à las t . 13). Pendant la période, froide lorsque la salinité de la ria diminue fortement, L. brunoi semble disparaître complètement du milieu. Ces résultats, et la capture d'individus à tous les stades de développement — y compris des spéci­mens matures — suggèrent que dans la ria de Muros e Noia la période de développement de cette espèce serait extrêmement courte et qu 'e l le passerait la pér iode hivernale sous la forme de cocons.

Page 10: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

140 E. M A R T I N E Z - A N S E M I L (10)

Sur les 162 individus de M. argentea récoltés 25 étaient matures (1 le 2 7 / 0 1 , 1 le 31 /07 , 2 le 30 /09 , 1 le 0 6 / 1 0 et 20 le 27/11) . Le plus grand nombre de spécimens a été récolté à la fin de l ' au tomne lors de la pér iode de matur i té .

Nous avons récolté 4 spécimens matures de M. riparia le 30 /09 dans plusieurs stations d 'eau cou­ran te et 21 de M. southerni au printemps et en été (1 le 0 1 / 0 4 , 19 le 10/06 et 1 le 04/08) .

3 . Densité , structure et diversité des peuplements

P o u r le traitement statistique des données, les Oli­gochètes non identifiables à l 'état immature ont été répart is entre les diverses espèces du genre en fonc­t ion des pourcentages d'individus matures capturés. Bien q u e les résultats de nos récoltes dans les diffé­rentes zones de la lagune soient exprimés séparé­ment , dans l 'analyse nous les avons considérés g loba lement .

L ' a b o n d a n c e relative de chaque espèce aux dif­férentes s tat ions est reportée dans le tableau IL Les figures 8 et 9 visualisent graphiquement, et de façon comparée , la densi té , la structure et la diversité des peup lement s .

Dans le secteur d ' eau courante , la densité du peu­plement est comparab le à celle d 'autres petites riviè­res non polluées (Armitage 1976, Dumnicka 1978, 1982). Elle augmente progressivement de l 'amont vers l 'aval (de 1350 i n d / m 2 à la st. 2 à 9 308 i n d / m 2

à la st . 9). Seules les stations 7 (9617 i n d / m 2 ) et 8 (2866 i n d / m 2 ) s ' individualisent : la première pré­sente un fond stable car elle est située en plaine juste après la confluence avec un impor tant affluent ; la deuxième se t rouve 50 m en aval d 'une cascadelle, dans une zone à forte pente où le courant empêche l ' ins ta l la t ion de macrophytes et p rovoque une g rande instabilité du milieu. La densité moyenne de peup lement du lac de bar rage est d 'environ 9000 i n d / m 2 et elle est comparable à celles obser­vées dans d ' au t res réservoirs ol igotrophes d 'Espa­gne (Mart inez-Ansemil & Pra t 1984). A u niveau de la ria, la densité de peuplement est faible à la sta­t ion 11 du fait de fréquentes extractions de sable. La m é t h o d e d 'échant i l lonnage utilisée ne nous per­met p a s de conna î t re la densité du peuplement de la l agune .

L 'abondance de substrats minéraux grossiers et de macrophytes en courant rapide (st 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9) entraîne la dominance de deux espèces oxyphi-les, S. heringianus e t / ou N. alpina. A ces espèces se joignent S. lacustris dans les zones à courant modéré (st. 2, 3, 5) recouvertes par des macrophy­tes, S. parvus à la station 8 dont le lit est formé exclusivement par un substrat grossier et T. igno-tus à la station 6 où l 'on trouve d ' importants dépôts de sable fin sur les berges.

S. lacustris est également dominante dans la lagune (st. 1) du fait de l ' abondance de végétation palustre avec, à un degré moindre , N. communis et N. variabilis. Le fond argileux de la station 7 per­met le développement d 'une importante population de S. velutinus et L. hoffmeisteri. Cette dernière espèce domine également les peuplements des fonds vaseux, riches en matière organique, du barrage.

Le peuplement de la ria, très nettement différen­cié, est dominé par des espèces capables de suppor­ter d'importantes fluctuations dans le degré de miné­ralisation des eaux : L. brunoi, N. elinguis et A. monospermathecus. L. brunoi est même absent de la station située le plus en amont alors qu ' i l repré­sente environ 35 °7o du peuplement des deux stations aux eaux les plus minéralisées. Ces trois espèces ainsi que P. litoralis, A. sannio et M. southerni typique­ment euryhalines, n 'on t été trouvées que dans la ria dont elles forment la quasi-totalité de la faune d'Oligochètes.

Dans les stations d 'eau courante situées le plus en amont (st. 2, 3, 4), la grande diversité d 'habitats per­met le développement d 'une communau té riche en espèces et assez équilibrée : 35 à 41 espèces par sta­tion dont aucune ne représente plus de 26 % du peu­plement (a compris entre 4 et 6,3).

Les biotopes lotiques des cours moyen et inférieur (st. 5, 6, 8, 9) ont une diversité spécifique encore élevée (21 à 36 espèces par station) mais avec des peuplements hétérogènes : l'espèce dominante repré­sente toujours plus de 40 % du peuplement et l 'écart-type des pourcentages est remarquable ( a

compris entre 8 et 12,9). La diversité est faible à la station 7 où nous avons trouvé uniquement 12 espè­ces et où S. velutinus et L. hoffmeisteri forment environ 60 % du peuplement. Dans le lac de bar­rage (st. 10) le nombre d'espèces est assez élevé (23) mais une seule, L. hoffmeisteri, forme les trois quarts du peuplement.

Page 11: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

O L I G O C H È T E S DE LA RIVIÈRE T A M B R E

N-8 <r.11,1

N-12

C7.10.3 N.10 7.12.8

N =10 (7.18.0

N . 3 5 N .36

V 6.3 N=41

17.4.0

N 2 8 <7 8,8

L f l o ,

N.36 <r8,0

N.12 17.12,2

I 11 . . n n • L t L .

N .21

CR-11,5 N . 3 1 0-12.9

N.17 C7=19.3

N'16 tr .15.8

^ 4 - 4 . - "l~n .

N . 8

17 = 20.1

N. 9 (7.18,7

N - 5 1 7 ' 26,9

t h .

Fig. 8. Structure et diversité du peuplement. N : nombre d'espèces, Ar : abondance relative, <j : écart type.

Page 12: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

142 E. MARTINEZ-ANSEMIL (12)

La diversité spécifique des trois stat ions de la ria est très faible (5 à 9 espèces) ; N. elinguis forme plus de 60 % des effectifs à la station 11 ( a = 20,1), A. monospermathecus avec L. brunoi près de 90 % à la s ta t ion 12 ( a = 18,7) et N. elinguis avec L. bru­noi at teignent 95 °7o à la station 13 (<j - 26,9) .

4. Répartition spatiale

4.1 . Répartition longitudinale

C o m p t e tenu des différences de taux de reproduc­tion des espèces d'Oligochètes nous n 'avons pas uti­lisé directement les données brutes (abondance de l 'espèce à la s ta t ion) . Nous avons accordé la même impor tance à toutes les espèces en répartissant leurs effectifs en 6 classes d ' abondance (classes 0 à 5) ; la limite supérieure de la classe 5 correspond à l ' a b o n d a n c e opt imale c'est-à-dire au n o m b r e d'in­dividus récoltés dans la station où l'espèce a le plus fort effectif (A. max . ) . Les différentes limites de classes ont été établies d 'après la méthode de Ver-neaux (1973) qui considère par exemple la limite supér ieure de la classe moyenne (classe 3) comme le rappor t entre le nombre total d'individus capturés

et le nombre de stations où l'espèce est présente (Ai /N) .

Dans une première analyse incluant les 13 stations (/7g. 10a) l'axe 1 explique 30,2 °/o de la variance et l'axe 2 uniquement 13,6 °7o. La position relative sur l'axe 1 des stations de la ria traduit leur forte singu­larité faunistique par rapport à l 'ensemble des sta­tions d'eau douce. La projection du nuage de points sur l'axe 2 montre une séparation nette entre le milieu saumatre, le milieu d'eau courante et le milieu d'eau stagnante ou à renouvellement lent et permet d'opposer la faune des milieux lotiques d 'eau douce à celle qui se développe davantage ou exclusivement dans les milieux lénitiques. N. elinguis est abondante dans la ria alors qu'elle est totalement absente dans les stations d 'eau douce. Bien que cette espèce ait été trouvée dans des eaux où la salinité atteint des valeurs de 25 %o (Lasserre 1966) elle est fréquem­ment signalée en eau douce ; malheureusement la plupart de ces citations ne mentionnent pas le degré de minéralisation de l 'eau. L 'abondance de cette espèce dans une rivière méditerranéenne fortement minéralisée (Giani & Martinez-Ansemil 1981) et dans

Page 13: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE

AC - A. cammrani AL - A. leydigii AH - A. monospormathecu

AP - A. pluriseta. AS - A. sannio BV - a. vejdovskyanum

CA - c. strata ce - c. cognatii CD - c. diastrophus CG - c. glandulosa CHC- c. crystallinus CHL- c. langi CL - c. limnaei es - c. sphagnetorun DD - a. dorsalia

E8 - E. buchholxi ET - E. tetraedra FB - F. bisecosa

FC - F. caîlosa

FM - F. magna

FP - F. perrieri

FS - F. striata HC - H. gordioidea

HSP- Henlea sp.

LB = L. brunoi LH - L. hoffmeisteri

LU - L. udelcemianus LV - L. variegatus MA - M. argentea

KR - H. riparia MS «• M. southerni MSP- tlesanchytraeus sp.

NA - W. alpina

HB - N. bretdcheri

NC = N. communis

NE - N. alinguis

NV = N. variabilis

PA - P. amphibiotica

PAE» P. aequiseta

PAL- P. albicola

PB - P. bilobata PJ " P. jenkinaa

PL = P. litoralis

PM - P. menoni

PN - P. notopora

PO = P. osborni

PR = P. riparius

PS - P. sima

PT = P. tourenqui

PV = P. volki

BC - R. coccineus

RF = fi. falciformis

RS = R. subterraneus

SA - S. appendiculata

SB - S. brachystilua

SH - s. heringianus

SJ - s. josinae

SL - s. lacustris

SP • s. parvus

sv =• s. velutinus

TGS- Tubificidae g. sp.

Tl - T. ignotus

TSP» Trichocrilus sp.

TT - T. tubifex

OU - V. uncinata

vc - V. comata

Fig. 10. Groupement des stations en fonction des peuplements d 'ol igochètes. Analyse portant sur les 13 stations.

Page 14: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

144 E. MARTINEZ-AN SEMI L (14)

les stations de la ria, son absence des stations d 'eaux douces du T a m b r e et quelques données de la litté­ra ture (Korn 1963, Ladle 1971, Lafont & Juget 1976, Lafont 1977, Rodriguez 1984) prouvent l'affinité de cette espèce pour les eaux fortement minéralisées. N. elinguis se développe aussi davantage à la faveur d ' u n enrichissement des eaux en matière organique (Lafont & Juget 1976, Lafont 1977, Giani 1984).

Les trois ensembles de stations séparés dans cette première analyse masquent totalement l 'évolut ion du peuplement d 'Oligochètes le long du cours axial du T a m b r e . Une deuxième analyse (Fig. 10b) por ­tant uniquement sur les stat ions typiques du cours d ' eau (st. 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9) a été effectuée.

Les deux premiers axes expliquent 59,8 °7b de la variance (43,8 °?a et 16 % ) . Le premier facteur n ' a pas de signification écologique véritable : la projec­tion des points-espèces sur l'axe 1 reflète uniquement un gradient d 'occupat ion des classes d ' a b o n d a n c e . L ' axe 2 traduit la distribution des espèces entre les différentes stations qui se succèdent en fonction de leur localisation sur le cours d 'eau selon un axe amont -ava l .

La majorité des espèces d 'Enchytraeidae semblent t rouver les condit ions les plus favorables pour leur développement dans le cours supérieur (st. 2, 3, 4) ; seules C. atrata et M. argentea sont également bien représentées dans les cours moyen et inférieur (st. 5, 6, 8, 9).

H. gordioides et la majorité des Tubif icidae se développent davantage dans les cours moyen et infé­rieur mais la plupart des Rhyacodri l inae (R. falci-Jormis, R. coccineus et P. tourenquï) sont confinés dans le cours supérieur où ils forment des popula­tions relativement impor tantes .

Les Lumbricul idae sont bien représentés tout le long du cours d ' eau sauf S. brachystilus qui se can­tonne dans le cours supérieur.

Les Naididae , considérés dans leur ensemble, ne mont ren t pas de distribution bien définie le long du cours d ' eau ; la plupart des espèces ont une large répar t i t ion longitudinale.

La distr ibution des Oligochètes le long du Tam­bre ne présente pas une véritable zonat ion au sens d'Illies & Botosaneanu (1963). Il existe cependant une différence entre le cours supérieur (st. 2, 3, 4) et les cours moyen et inférieur ; cette différence résulte du plus grand développement de la plupart

des espèces d 'Enchytraeidae et de certaines espèces de Lumbriculidae (5. brachystylus) et de Rhyaco­drilinae (R. falciformis, R. coccineus et P. touren­quï) dans le cours supérieur.

Ces observations combinées avec celles de Wachs (1967), Kasprzak & Szczesny (1976), Giani & Lavan-dier (1977), Learner et al (1978), Giani & Martinez-Ansemil (1981), Dumnicka (1982) et Schwank (1982a) montrent que les Enchytraeidae, les Naidi­dae et les Lumbriculidae sont les familles d 'Oligo­chètes les mieux représentées dans le r i thron (les Enchytraeidae dominant dans le cours supérieur et les Naididae dans le cours moyen) alors que les Tubi­ficidae se développent davantage dans le cours infé­rieur (potamon) . L ' abondance de Rhyacodrilinae dans le cours supérieur du Tambre ne va pas à r en ­contre de ces observations car le terme Tubificidae fait ici référence aux formes pélophiles (essentielle­ment Tubifex et Limnodhlus). La présence du bar­rage de Barrié de la Maza sur le cours inférieur du Tambre exclue l'existence d 'un véritable po tamon.

4.2. Répartition horizontale

Au niveau d 'une station donnée , la composition chimique et la température de l 'eau sont pratique­ment homogènes. Le substrat (au sens large : sup­port, abri , nourriture) et le courant sont les princi­paux facteurs responsables de la distribution des dif­férentes populations au sein d 'une même station (répartition horizontale).

Nous avons analysé l 'influence du courant et du substrat au moyen d 'une analyse factorielle du même type que la précédente mais portant uniquement sur les espèces représentées par un nombre d'individus ^ 100 (Tableau III) ; les données ont été regrou­pées en quatre classes d ' abondance (classes 0, 1,2, 3).

Les axes 1 et 2 (fig. 11) expliquent 61 °7o de la variance (espèces et biotopes) et l 'axe 3 seulement 8 °7o.

Bien que la vitesse du courant et le substrat soient deux facteurs fortement liés, c'est le courant qui pré­side à la distribution des variables-espèces et des variables-biotopes en rapport avec l 'axe 1 (37,3 % d'inertie). En effet, les biotopes où la vitesse du cou­rant est importante (très rapide à modérée) se situent, à quelques rares exceptions près, du côté négatif de cet axe alors que ceux dont le courant est très lent ou nul se placent du côté positif. La position

Page 15: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(15) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 145

NTL

NTL

Gr*S

TRa

A,

A 2

Fig. 11. Répartition longitudinale des Oligochètes dans le cours d'eau. Analyse factorielle des correspondances restreinte aux stations du milieu lotique.

intermédiaire des fonds de macrophytes en courant rapide ou même très rapide peut être expliquée par l 'abri que cette végétation offre aux Oligochètes.

Le deuxième facteur de répartition au niveau sta­tionne! (23,7 % d'inertie) marque la différence entre les substrats minéraux (côté positif et début du côté négatif de l 'axe 2) et ceux recouverts par des macrophytes ou des débris végétaux (extrême négatif).

Dans le plan défini par ces deux facteurs on peut

délimiter trois ensembles de biotopes :

— Ensemble A : fonds de galets accompagnés ou non par des éléments plus fins (gravier, sable) en courant modéré, rapide ou très rapide. Dans cet ensemble nous pouvons délimiter deux sous-ensembles ; le premier ( A l ) est constitué par des

éléments de granulométrie variée alors que le second (A2) regroupe uniquement des substrats minéraux grossiers (galets).

— Ensembre B : substrats sablonneux ou vaseux en courant lent, très lent ou nul avec un certain dépôt de matière organique.

— Ensemble C : biotopes caractérisés par la pré­sence de macrophytes vivantes ou de débris végétaux.

S. heringianus et S. parvus sont les espèces qui contr ibuent le plus à l 'isolement de l 'ensemble A ; S. heringianus est très souvent l'espèce dominan te dans les substrats minéraux en faciès lotique avec des densités de populat ion qui peuvent a t t e indre 7 800 i n d / m ' . Le caractère pétricole et réophile de cette espèce a déjà été signalé (Wachs 1967, T i m m 1970, Ladle 1971, Giani 1976, Giani & Lavandier

Page 16: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

146 E. MARTINEZ-ANSEMIL

1977, Rodriguez 1984) ; les références relatives à l 'habi ta t de S. parvus sont beaucoup plus rares mais co r robo ren t nos données (Juget 1959, 1979, Giani & Martinez-Ansemil 1981, Rodriguez 1984). S. velu-tinus cont r ibue aussi à la différenciation de cet ensemble et plus particulièrement du sous-ensemble A l car elle nécessite la présence d 'éléments miné­raux fins pour son développement. Cette espèce sem­ble confinée aux lacs profonds et aux petites riviè­res bien oxygénées avec des substrats minéraux com­p o r t a n t des éléments fins (Juget 1958, Brinkhurst 1964, Giani 1976, Juget & Lafont 1979).

Les espèces qui part icipent de façon décisive à la différenciation de l 'ensemble B sont : A. monosper-mathecus, L. brunoi, A/, eiinguis, T. ignotus, T. tubifex, L. hoffmeisteri, U. uncinata, B. vej-dovskyanum et A. ieydigii. Le caractère p s a m m o -phile çYA. monospermathecus, L. brunoi et N. eiin­guis résulte de leur seule présence dans la ria. N. eiin­guis est cependant c o m m u n e dans les eaux douces .

T. ignotus n ' a été trouvée que dans les fonds sab lonneux du secteur d 'eau courante no t ammen t dans le sable fin ; A. Ieydigii n ' a pra t iquement été récoltée que dans la vase de la zone profonde du bar­rage ; les qua t re autres espèces de cet ensemble peu­plent les fonds sablonneux ou vaseux du secteur d ' e a u couran te en faciès lénitique e t / o u des bioto­pes d ' eau s tagnante . Ces résultats sont en accord avec les données de la l i t térature.

Les espèces les plus représentatives de l 'ensemble C sont : S. lacustris, V. comata et N. alpina, S. lacusris est un habitant typique des milieux stagnants où sa présence est généralement associée au déve­loppement des macrophytes ; bien que dans le Tam­bre cette espèce se développe davantage parmi la végétation palustre de la lagune, elle forme aussi des popu la t ions denses parmi les macrophytes en cou­rant . Le caractère phytophile de cette espèce est bien connu (Berg 1938, 1948, Laakso 1969b, Timm 1970, Schwank 1982b).

V. comata est une espèce caractéristique des tour­bières (Piguet & Bretscher 1913, T imm 1970, Juget & Giani 1974) ; nous l 'avons récoltée surtout parmi la végétat ion palust re de la lagune et dans les amas de débris végétaux en état avancé de décomposit ion sur les berges des stations d 'eau courante ; elle est également a b o n d a n t e parmi les macrophytes en c o u r a n t .

Contrairement aux deux espèces précédentes, N. alpina est caractéristique des milieux lotiques (Wachs 1967, Giani 1976, Lafont 1977, Giani & Martinez-Ansemil 1981, Dumnicka 1982, Schwank 1982b). Elle est absente de la lagune mais forme des popu­lations très denses parmi les macrophytes en cou­rant où elle est souvent l 'espèce dominante ; un nombre important d' individus a été récolté sur les substrats minéraux grossiers en courant et parmi les débris végétaux retenus sur les berges des stations à forte circulation d 'eau. Selon Wachs (1967) et Schwank (1982b) N. alpina colonise de préférence les substrats minéraux en courant . Plus que le subs­trat , le caractère réophile de cette espèce à la recher­che d 'eaux bien oxygénées semble être le critère essentiel qui régit sa distribution dans les cours d 'eau.

Toutes les autres espèces considérées dans cette analyse présentent une ampli tude d 'habi ta t supé­rieure vis-à-vis du substrat e t / o u du courant et de ce fait participent de façon négative à la differen­tiation des ensembles de biotopes.

4 .3 . Répartition dans le lac de barrage

La répartition bathymétrique de la faune d'OIi-gochètes du lac de barrage de Barrié de la Maza (st. 10) ne présente pas le profil classique des milieux stagnants profonds (Tableau II ;figs 8 et 9). L 'ab­sence d 'une véritable stratification thermique, la sur­saturation en O 2 des eaux du fond, l ' instabilité de la zone littorale, conséquence du marnage et l 'ab­sence de végétation, sont à l 'origine d ' une certaine inversion des résultats. Ainsi, la richesse spécifique globale et la diversité de Naididae atteignent des valeurs aussi importantes dans la zone profonde que dans la zone littorale et la densité de l 'ensemble du peuplement et l ' abondance de Naididae sont même nettement plus élevées dans la première. L 'abon­dance de débris végétaux allochtones dans la zone littorale et la présence dans la zone profonde de sédi­ments fins au niveau du secteur B et grossiers dans le secteur A semblent jouer un rôle impor tant dans la distribution de la faune.

5. Discussion Parmi les différents aspects abordés dans cette

étude les facteurs de répartition retiennent plus par­ticulièrement l 'attention car les données concernant des cours d 'eau non pollués sont rares et souvent fragmentaires. Lorsqu 'un cours d 'eau est soumis à

Page 17: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(17) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 147

Tableau II. Abondance relative des diverses espèces d'Oligochètes et nombre total d'Oligochètes récoltés à chacune des stations, s : surface ; p : zone profonde ; 1 : zone littorale ; i : individus immatures.

Espèces \ Stations IB 1C 1s 2 3 4 5 6 7 8 9 10A 10Bp lOSt 11 12 13

Lunbriculus variegatus (Mull.) 0,1 0,1 0,6 0,5 0,4 Stylodrilus braehystylus Hr. 0,9 2,4 1,0 Stylodrilus heringianus Clap. 10,8 22,4 9,8 26,2 14,2 39,8 7,0 0,7 0,1 1,8 Stylodrilus parvus (Hr. S Cern.) 2,7 0,3 8,2 0,6 2,0 40,5 1,0 Trichodrilus sp. - i . Haplotaxis gordioides {Hart.) 0,9 0,03 0,2 0,2 0,3 0,1 Chaetogaster crystallinus Vej. 0,3 0,1 0,3 - 0.4 12,4 0,1 Chaetogaster diastrophus (Gruit.) 0,2 1,2 0,2 0,9 0,3 0,1 0,4 Chaetogaster Langi Bret. 0.2 0.7 0,3 0,2 0,1 0,5 5,9 Chaetogaster limnaei v. Baer Amphichaeta Leydigii Taub. 0,2 11,3 0.2 Amphiehaeta sannio Kallst. 2,1 0,4 Parana is litoralis (Hull.) 1,5 0,3 0, Specaria josinae (Vej.) 1.2 0,3 0,8 3,0 0,1 1,2 2,4 4,9 Uncinais uncinate (Orst.) Nais alpina Sperb. 25,7 23,7 21,8 42,2 46,4 9,7 73,5 0,2 0,2 Nais bretscheri Hïch. Nais confnunis Pig. 13,1 36,5 41,8 22.9 3.0 1,0 1,4 1.9 0,7 4,0 0,5 0,3 0,9 7,8 Nais elinguis Hull. 60,5 6,0 60, Nais pardalis Pig. 2,0 2,3 0,4 Nais variabiLis Pïg. 5,1 16,7 20,\ 12,3 1,0 8,3 1,2 1,1 0,1 0,5 1,6 2,4 Slavina appendicutata td'Ud.) 3,5 1,2 1,6 0,8 1.3 1,1 3,0 1,0 9,0 0,3 0,1 2,0 Vejdovsftyella cerna ta (Vej.) 16,1 9,8 5,a 4,8 7,5 0,9 5,5 1,9 4,0 8,0 0,9 0,1 0,9 Stylaria lacustris (Linn.) 1,7 5,9 5,8 56,6 11,6 25,7 0,6 12,9 0,3 0,4 Dero dorsalîs Ferr. 18,2 1,2 1,3 Pristina aequiseta Bourne 5,2 4.5 0,4 0.3 0,1 0,2 0,04 0,1 0,1 0,1 0,2 0,6 0,4 Pristinella amphibiotica Last. 3,0 0,8 1,0 0,1 0,02 Pristinella bilobata (Bret.) Pristinella jenkinae (Steph.) 0,04 0,03 0,1 0,02 Pristinella menoni (Aiy.) 0,8 0,5 0,03 0,3 0,1 0,3 Pristinella notopora Cern. Pristinella osborni (Ualt.) 0,4 6,9 2,0 0,3 0,5 0,1 Pristinella sima (Marc.) Tubifex îgnotus (Stole) 1,4 3,4 1,0 14,2 0,5 0,3 rubifex tubifex (Mûll.} 6,6 7,4 1,0 3,3 1,4 0,5 2.3 1.2 0,5 4,8 3,4 0,9 Linnodrilus hoffmeisteri Clap. 35,3 K,B 15,1 8.4 29,0 5,2 82,8 66,2 61,4 Lîitnodrîlus udekemi anus Clap. 0,1 0,1 0,1 Psanmoryetides albicola (Mich.) Spirosperma velutinus (Grube) 4,2 7,3 3, ' 0,8 38,0 4,6 0,1 0,1 Aulodrilus pluriseta (Pig.) Bothrioneurum vejdovskyanum stole 2,0 0,1 4.2 1,9 2,0 Rhyacodrilus coccineus (Vejd.) 0,1 1,9 0,6 Rhyacodrilus falciformis Bret. Rhyacodrilus subterrancus Hr. Protuberodrilus tourenqui Giani &H.-An 2,2 0,3 0,5 Aktedrilus monospermathecus KnoLL. Phallodrilus riparius Giani & M.-An. - 0,03 0,1 0,1 Tubificidae gen, sp. Tufaificidae - i . 0,4 0,2 0,1 - 0,03 0,1 3,0 0,2 Propappus volki Mich. 0,04 Hesenchytraetis sp. 0,5 - 0,2 0,04 Cernosvitoviella atrata (Bret.) 0,5 2.9 0,1 4,5 0,7 3,8 1.6 0,8 2,0 1,6 0,7 0,2 0,2 Cognettia cognettîi (Issel) 0,2 0,2 4,8 0,2 0,2 1.Û 0,8 0,03 Cognettia glandulosa (Hich.) 2,0 - 0.5 0,1 0,1 0,02 1,1 Cognettia sphagnetorum (Vejd.) 3.3 1,3 1,8 0,5 0,8 0,1 0,03 Cognettia -i . 0,5 0,5 0,7 Achaeta camerani (Cogn.) 0,4

0,2 0,1 0,3 0,3 Achaeta - i .

0,4 0,2

0,1 0,3 0,3 0,2 0,2 0,3

Henlea sp. • i. Fridericia bisetosa (Levin.) 1,7 1,3 0,8 1,2 Fridericia callosa (Eisen) Frîdericis magna Friend Fridericîa perrieri (Vejd.) 0,3 0,1 0,2 0,03 Fridericia striata (Levin.) Fridericis - i . 0,7 0,3 0,1 1,0 0,1 0.8 0,3 Enchytraeus buchholii Vejd. Enchytraeus - i . 0,2 0,2 1,4 0,1 0,6 0,1 11,4 Lunbricillus brunoi M.-An. 35,6 34, Harionira argentea Mieh.) 1,5 0,3 0,8 0,3 0,2 0,2 1,0 Harîonina riparia Bret. 0,1 0,3 0,2 0,1 0,03 Harionina southerni (Cern.) 13,3 2,0

Harîonina - i . 0,3 0,1 0,3 0,9 0,2 0,1 0,3 Enchytraeidae - i . 2,8 0,2 • 1,6 0,1 Eisemella tetraedra (Savig.) 0,1 0,03 0,1 0,03 0,1 0,02 Dendrobaena sp. 0,1 - 0,03 0,1 lumbricidae gen. sp. - i . 0,1 - 0,1 1.0 Glossoscolecidae gen. sp. - i . 0,1 0,2 -

N. individus 473 419 311 2007 1380 1503 2948 2339 3894 100 1728 6075 1542 1464 445 332 1580 5tt

Page 18: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

148 E. MARTINEZ-ANSEMIL (18)

Tableau I II . Préférendums des Oligochètes vis-à-vis du substrat et de la vitesse du courant, o : présence pour les espèces à faible effectif ( ~? 100 individus) ; *, **, *** : abondance des espèces à fort effectif ( ̂ 100 individus). A : argile ; Bo : vase limoneuse ; G : galet s-cailloux ; Gr : gravier ; M : Myriophyllum ; N : Nymphaea ; P : Potamogeton ; R : Ranun­culus ; S : sable ; Si : Sium ; V : vase riche en matière organique ; Vdl et Vd2 : débris végétaux dans un état de décomposition peu ou très avancé.

Courant Nul-Très lent Lent Hode're Rapide Très rapide

Substrat Bo, G+Gr G+G r

G+Gr G+Gr H. Espèces V,A S Vd2 P+N S +S G Vdl +S G Si R +S G si R N +S G R M indiv.

LumbricuLus variegatus 0 0 0 46 Stylodri lus brachystylus 0 0 78 stylodri tus heringianus * *** * • * * * * • * • *** * * *** " * * 3071 StyLodrilus parvus • * * • * * *** * * ... ••• 1136 Haplotaxis gordioides 0 o 0 0 0 0 • 56 Chaetogaster crystallinus 0 0 o o 71 Chaetogaster diastrophus 0 o X o o 85 Chaetogaster langi *** * • * 123 Chaetogaster l imrtaei o 22 Amphichaete leydigi i *** 170 Ampfiichaeta sannio 0 V Paranais l i to ra l i s 0 Specaria josinae *** * • * * * * * * * 130 Uncinais uncinata ** 110 Nais alpina * * * *# m* 8780 Nais bretscheri 0 1 Nais communis * * • * ** *** * * *» * • * 1062 Nais el inguis *** 605 Nais pardalis * ** 176 Nais var iab i l i s *** * * *** * • • ** 754 Slavina appendiculBta ** * • • • * * 244 Vejdovskyelta comata ** * *** *** • * ** * * • * * 780 Stytari a lacustrïs ** **« * * • * • * * 2065 Dero dorsal is 0 95 Prist ina aequiseta X 0 0 0 0 0 73 Pr is t ine l la amphïbiotica X 0 0 67 Pr is t ine l la bilobata 0 2 Pr is t ine l la jenkinae 0 0 0 0 4 Pr is t ine l la menoni O X 0 0 0 0 41 Pr is t ine l la notopor-B 0 1 Pr is t ine l la osborni * ** * *** * 245 Pr is t ine l la sima o o 4 Tubifex ignotus •a* ** 732 Tubifex tubifex *** ** * 431 limnodrîlus hoffmeisteri *•* • 3491 Limnodrilus udekemîanus X 0 M Psanmoryctides albicola 0 1 Spirosperma velutinus * *** *** *** * ** * 707 Aulodrilus plurîseta 0 0 3 Bothrîoneurun vejdovskyanun *•* • 108 Rhyacodrilus coccineus 0 0 0 49 (thyacodri lus falciformis x o 0 80 Rhyacodrilus subterraneus 0 1 Protuberodrilus tourenqui • ** * * 148 Aktedrilus monospermathecus »** 893 Phallodri lus r iparius 0 o 7 Tubificidae gen. sp. 0 6 Propappus volki 0 1 Mesenchytraeus sp. 0 0 0 0 o 15 Cernosvitoviella atrata * * *• * » * • 346 Cognettia cognettii * ** * * 177 Cognettia glandulosa 0 0 0 0 0 o 53 Cognettia sphagnetorum * * * * * * ** * * * 168 Achaeta camerBni 0 6 Hen lea sp. 0 t Fr ider ic ia bisetosa o 0 0 0 94 Frider ic ia catlosa 0 1 Frider ic ia magna 0 X 1 Frider ic ia perr ier i 0 0 0 12 Frider ic ia str iata 0 1 Enchytraeus buchholzï 0 1 Lumbricïllus brunoi • * • 739 Harionina argentea **« * ** » * 129 Harionina r ipar ia 0 o o 13 Harionina southern! 0 76 Eîsenïel la tetraedra 0 0 0 0 9 Dendrobaena sp. 0 o 4

Page 19: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

(19) O L I G O C H È T E S DE LA RIVIÈRE T A M B R E 149

une pollution organique intense celle-ci devient un des facteurs qui déterminent la composit ion et la répart i t ion de sa faune d'OIigochètes (Dumnicka 1978, Lafont 1977, Uzunov 1982). Cependant, selon Wachs (1967) et Kasprzak & Szczesny (1976), en l 'absence d 'une véritable pollution les principaux facteurs responsables de la répartit ion des popula­tions d 'OIigochètes le long d ' u n cours d 'eau sont le substrat et le cou ran t . Dans de telles condit ions, Wachs (op. cit.) no te l ' indépendance des Oligochè­tes vis-à-vis de la composi t ion chimique des eaux alors que Kasprzak & Szczesny (op. cit.) soulignent leur quasi-totale indépendance vis-à-vis de la tem­péra ture . Seules de fortes modifications de ces fac­teurs peuvent casser le profil longitudinal de la réparti t ion de la faune d'OIigochètes comme nous Pavons déjà consta té : brusque augmenta t ion de la minéralisation des eaux dans la rivière Argens après sa confluence avec un affluent salé (Giani & Mart inez-Ansemil 1981). Le rôle prédominant du substrat et du couran t dans la réparti t ion des Oli­gochètes ont été soulignés aussi par Korn (1963), Learner et al. (1978), Dumnicka (1978, 1982), Giani & Mart inez-Ansemil (op. cit.), Schwank (1982a), Munoz et al. (1986).

La composi t ion chimique des eaux du Tambre , qui varie peu le long du cours, ne semble pas influen­cer la réparti t ion longitudinale des Oligochètes. On pourra i t supposer que la température joue un rôle en raison de la forte ampl i tude thermique des eaux du T a m b r e entre l ' amont et l 'aval mais, même des espèces souvent considérées comme sténothermes d 'eau froide tels N. alpina (Wachs 1967, Giani 1976, Learner et al. 1978, Schwank 1982a) ou S. veluti-nus (Brinkhurst 1964, Giani 1976, Juget & Lafont 1979) sont bien représentées dans la station d 'eau courante la plus aval (st. 9) où la température de l 'eau varie entre 6,5 et 20,6° C en cours d ' année .

Dans les milieux naturels , comme le Tambre , ce serait l 'a l ternance de mosaïques de biotopes déter­minées par des différences dans la na ture et la com­position du substrat et la vitesse du courant — bio­topes de 3 e ordre d 'Albrecht (1953) — qui seraient responsables des changements longitudinaux de la composit ion et de la structure du peuplement d'OIi­gochètes. C o m m e nous Pavons vu, une grande par­tie des espèces sont eurytopes ce qui entraîne un impor tant chevauchement des populat ions ; les ten­dances observées dans la distribution résultent du

fait que les espèces les plus abondantes (S. herin­gianus, S. parvus, N. alpina, S. lacustrïs et T. igno­tus) ont un préférendum assez défini vis-à-vis du substrat et de la vitesse du couran t .

En ce qui concerne la période de maturité des dif­férentes espèces et l 'évolution saisonnière des popu­lat ions, quatre aspects essentiels ressortent de cette é tude :

1 ) Dans le T a m b r e la plupart des espèces de Nai­didae n 'on t été trouvées q u ' à l 'état immature : les récoltes d ' individus sexuellement développés ne représentent qu ' un faible pourcentage du peuple­ment à la période considérée. A. Ieydigii const i tue la seule exception ; cette espèce récoltée uniquement dans le lac de barrage, semble se reproduire massi­vement par voie sexuée juste avant l 'arrivée d ' une période défavorable à son développement dans ce milieu. L 'appar i t ion de naididés matures dans le T a m b r e coïncide généralement avec l 'augmentat ion appréciable de la température de l 'eau à la fin du pr in temps et au début de l 'été.

2) Dans le secteur d 'eau douce du Tambre la plu­part des espèces abondantes de Lumbricul idae, Tubificidae et Enchytraeidae sont matures tout le long de l ' année.

3) Toutes les espèces présentes uniquement dans la ria (N. elinguis, A. monospermathecus, L. bru­noi et M. southerni) ont une période de matu r i t é limitée à la saison chaude (fin du printemps-été) .

4) D 'une manière générale, les périodes les plus favorables pour la reproduct ion asexuée des Oligo­chètes du Tambre sont le début du pr in temps, l 'hi­ver et surtout le début de l ' automne. L'été est la sai­son la plus défavorable pour la scissiparité ; C. lïm-naei, espèce capturée uniquement à la lagune, cons­titue à cet égard la seule exception mais son cycle de développement pourrai t être directement en rela­tion avec le cycle de développement des mollusques hôtes (Gruffydd 1956, Streit 1974).

Nos résultats confirment ou élargissent la g a m m e des divers cycles de développement des Oligochètes en milieu naturel . De véritables progrès dans la connaissance de ce cycle ne pourront guère prove­nir que de t ravaux expérimentaux approfondis ou d 'é tudes minutieuses sur le terrain ; seul un échan­ti l lonnage intensif permettra d'enregistrer les véri­tables explosions de populations qui peuvent se pro­duire en l 'espace de quelques jours (Lochhead & Learner, 1983), d 'appréhender des passages rapides

Page 20: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

150 E. MARTINEZ-ANSEMIL (20)

à l 'é tat de matur i té d ' une partie impor tan te des

effectifs (Loden 1981) et de suivre l 'évolution d ' u n

g rand n o m b r e de facteurs abiotiques (ex. var iat ion

ponctuel le du gradient thermique) mais aussi bioti­

ques (ex. explosions dans la product ion pr imaire ,

b rusque augmenta t ion de la pression de prédat ion) .

D ' u n e manière générale les cycles de développe­

ment des Oligochètes qui peuplent le secteur d ' eau

c o u r a n t e du T a m b r e sont caractéristiques d ' u n

milieu plutôt s table et assez productif ( impor tan ts

appor t s de matière allochtone provenant de l ' abon­

dante végétation riveraine) ; les principaux traits dif­

férentiels sont le faible nombre de Naididae ma tu ­

res, une pér iode de matur i té étalée sur toute ou la

plus g r ande part ie de l 'année pour les autres famil­

les et une dis t r ibut ion assez homogène des effectifs

des popu la t ions pendant l ' année. Au contra i re , le

milieu s aumâ t r e de la ria se caractérise par son ins­

tabilité qui induit des cycles de développement mieux

définis et plus tranchés. Le lac de barrage représente,

à cet égard , une si tuation intermédiaire .

Remerciements

Je remercie N. Giani et J .N. Tourenq du Laboratoire d 'Hydro-biologie de l'Université Paul Sabatier de Toulouse pour leur appui scientifique et leurs encouragements lors de la réalisation de ce travail.

Une partie de cette étude a été réalisée dans le cadre d 'un pro­g ramme financé par la C.A.I .C.Y.T. (P.B. 86-0406).

Travaux cités

Albrecht (M.L.) . 1953. — Die Plane und andere Flëmingbache (Ein Beitrag zur Kenntniss der Flieflgewâsser der Norddeuts-chen Tiefebene). Z. Fish Hilfswis, 1 : 390-473.

Armitage (P .D.) . 1976. — A quantitative study of the inverte­brate fauna of the River Tees below Cow Green Resen oir. Freshwat. Biol., 6 : 229-240.

Berg (K.). 1938. — Studies on the bottom animals of Esrom Lake. K. danske Vidensk. Selsk. Skr., 9 (8) : 1-255.

Berg (K.). 1948. — Biological studies on the River Susaa. Folia Limnol. Scand., 4 : 1-318.

Brinkhurst (R.O.) . 1964. — Observations on the biology of lake-dwelling Tubificidae. Arch. Hydrobiol., 60 (4) : 385-418.

Brinkhurst (R.O.) & Kennedy (C.R.) . 1965. — Studies on the biology of the Tubificidae (Annelida, Oligochaeta) in a pol­luted stream. J. Anim. Ecoi, 34 : 429-443.

Carballeira (A.) , Devesa ( C ) , Retuerto (R.), Santillan (E.) & Ucieda(F . ) . 1983. —Bioclimatologia deGalicia. Fundaciôn Barrié de la Maza, A Coruiia : 391 p.

Cernosvitov (L.). 1928. — Die Oligochaeten fauna der Karpa-then. Zool. Jb. Syst., 55 : 1-28.

Dumnicka (E.). 1978. — Communities of Oligochaetes (Oligo­chaeta) of the River Nida and its tributaries. Acta Hydro­biol., 20 (2) : 117-141.

Dumnicka (E.). 1982. — Stream ecosystems in mountain grass­land (West Carpathians). 9. Oligochaeta. Acta Hydrobiol., 24 (4) : 391-398.

Eyres (J .P . ) , Williams (N.V.) & Pugh-Thomas <M.>. 1978. — Ecological studies on Oligochaeta inhabiting depositing subs­trata in the Irwell, a polluted English river. Freswat. Biol., 8 : 25-32.

Frenzel (P.). 1981. — Untersuchungen zur Ôkologie der Naidi­dae des Bodensees. Die Nische von Chaetogaster und Amphi-chaeta. Arch. Hydrobiol., 91 (I) : 45-55.

Giani (N.). 1976. — Les Oligochètes aquatiques du Sud-Ouest de la France. Annls LimnoL, 12 (2) : 107-125.

Giani (N.). 1984. — Le Riou Mort, affluent du Lot, pollué par métaux lourds. IV. Etude des Oligochètes. Annls LimnoL, 20 (3) : 167-181.

Giani (N.) & Lavandier (P.) . 1977. — Les Oligochètes du tor­rent d'Estaragne (Pyrénées Centrales). Bull. Soc. Hist. Nat. Toulouse. 113 (1-2) : 234-243.

Giani (N.) & Martinez-Ansemil (E.). 1981. — Contribution à la connaissance des Oligochètes aquatiques du bassin de l'Ar-gens (Var, France). Annls LimnoL, 17 (2) : 121-141.

Gruffydd (L.D.) . 1956. — The population biology of Chaeto­gaster limnaei limnaei and Chaetogaster limnaei vaghini (Oli­gochaeta). / . Anim. EcoL, 34 : 667-690.

lilies (J.) & Botosaneanu (L.) . 1963. — Problèmes et méthodes de la classification et la zonation écologique des eaux cou­rantes, considérées surtout du point de vue faunistique. Mitt. Int. Verein. Theor. Angew. LimnoL, 12 : 1-57.

Inst. Invest. Geol. Edaf. y Agrobiol. de Galicia. 1967. — Estu-dio agrobiolàgico de laprovincia de La Coruna. Pub. Dipu-tac. Provinc. La Coruna : 349 p .

Juget (J.). 1958. — Recherches sur la faune de fond du Léman et du lac d'Annecy. Ann. Stat, centr. Hydrobiol. appt., 7 : 7-95.

Juget (J.). 1959. — Recherches sur la faune aquatique de deux grottes du Jura méridional français : la grotte de la Balme (Isère) et la grotte de Corveissiat (Ain). Ann. Spéléol., 14 : 391-401.

Juget (J.). 1967. — Quelques données nouvelles sur les Oligo­chètes du Léman : composition et origine du peuplement. Annls LimnoL, 3 (2) : 217-229.

Juget (J.). 1979. — La texture granulométrique des sédiments et le régime alimentaire des Oligochètes limicoles. Hydrobio-logia, 65 (2) : 145-154.

Juget (J.) & Giani (N.). 1974. — Répartition des Oligochètes lacus­tres dans le Massif de Néouvielle <Hautes-Pyrénées) avec la description de Peloscolex pyrenaicus n. sp. Annls LimnoL, 10 (1) : 33-53.

Juget (J.) & Lafont (M.). 1979. — Description de Peloscolex fur-quini, n. sp. et redescription de Peloscolex moszynskii, Kaspr­zak, 1971 (Tubificidae, Oligochaeta), avec quelques remar­ques sur la répartition du genre Peloscolex dans les eaux dou­ces françaises. Bull. mens. Soc. linn. Lyon, 2 : 75-80 et 113-118.

Kasprzak (K.). 1973. — Notatki o faunie skaposzczetow (Oligo­chaeta) Polski, I. Fragmenta faun., 18 (21) : 405-434.

Kasprzak (K.) & Szczesny (B.). 1976. — Oligochaetes (Oligo­chaeta) of the River Raba. Acta Hydrobiol., 18 ( 1 ) : 75-87.

Kennedy (C.R.) . 1966. — The life history of Limnodriius hoff-meisteh Clap. (Oligochaeta : Tubificidae) and its adaptative significance. Oikos, 17 : 158-168.

Page 21: Etude biologique et écologique ... - limnology-journal.org · Annls Limnol. 26 (2-3) 1990 : 131-151 Etude biologique et écologique des Oligochètes aquatiques de la rivière Tambre

( 2 1 ) OLIGOCHÈTES DE LA RIVIÈRE TAMBRE 151

Kom (H. ) . 1963. — Studien zur Ôkologie der Oligochaeten in der oberen Donau unler Berticksichtigung der Abwasserein-wirkungen. Arch. Hydrobiol., 27 (2) : 131-182.

Laakso (M.). 1969a. — New records of aquatic Oligochaeta from Finland. Ann. Zooi. Fenn., 6 : 348-352.

Laakso (M.). 1969b. — Oligochaeta from brackish water near Tvarminne, southwest Finland. Ann. Zool. Fenn., 6 : 98111.

Ladle (M.) . 1971. — The biology of Oligochaeta from Dorset chalk streams. Freshwat. Biol., 1 : 83-97.

Lafont (M.). 1977. — Les Oligochètes d'un cours d'eau monta­gnard pollué : le Bief Rouge. Annls Limnol., 13 (2) : 157-167.

Lafont (M.) & Juget (J . ) . 1976. — Les Oligochètes du Rhône. I. Relevés faunistiques généraux. Annls Limnol., 12 (3) : 253-268.

Lage-Yusty (M.A.) . 1979. — Estudio de las aguas del rio Tam­bre. Thèse Univ. Santiago : 175 p .

Lasserre (P.). 1966. — Oligochètes marins des côtes de France. I. Bassin d 'Arcachon : systématique. Cah. Biol. Marine, 1 : 295-317.

Learner (M.A.), Lochhead (G.) & Hughes (B.D.). 1978. — A review of the biology of British Naididae (Oligochaeta) with emphasis on the lotie environment. Freshwat. Biol., 8 : 357-375.

Loden (M.S.) . 1981. — Reproductive ecology of Naididae (Oli­gochaeta). Hydrobiologia, 83 : 115-123.

Loden (M.S.) & Harman (W.J . ) . 1980. — Ecophenotipic varia­tion in setae of Naididae (Oligochaeta). In Aquatic Otigo-chaete Biology. R .O . Brinkhurst & D.G. Cook (eds.), Ple­num Press, New York : 33-39.

Martinez-Ansemil (E.) & Giani (N.). 1982. — Contr ibut ion al conocimiento del género Pristina (Oligochaeta, Naididae) en la Peninsula Ibérica. Bol. R. Soc. esp. Hist. nat. (Biol.), 80 (3-4) : 249-260.

Martinez-Ansemil (E.) & Prat (N.) . 1984. — Oligochaeta from profunda! zones of Spanish reservoirs. Hydrobiologia, 115 : 223-230.

McMurray (S.), Vincent (B.)& Vaillancourt (G.). 1982. — Varia­tions saisonnières de la température de l'eau et cycle de déve­loppement de Limnodrilus hoffmeisteri Claparède (Oligo­chaeta : Tubificidae). Naturaliste can., 109 : 223-228.

Membiela-Iglesia (P.) & Martinez-Ansemil (E.). 1984. — Lar-vas de Plecôpteros del rio Tambre (Galicia) : estudio ecolô-gico. Bol. Asoc. esp. Entom., 8 : 101-109.

Munoz (I.), Prat (N.) , Millet (X.) & Martinez-Ansemil (E.). 1986. — Heterogeneidad espacial en la distribution de los macroin-vertebrados a lo largo de un transecto en el rio Llobregai (Bar­celona, Espana). Limnetica, 2 : 135-145.

Pfannkuche (O.). 1980. — Distribution, abundance and life cycles of Oligochaeta from the marine hygropsamma) with special reference to the Phallodrilinae (Tubificidae). Int. Rev. ges. Hydrobiol., 65 (6) : 835-848.

Pfannkuche (O.). 1981. — Distribution, abundance and life cycles of aquatic Oligochaeta (Annelida) in a freshwater tidal flat of the Elbe Estuary. Arch. Hydrobiol., 43 (4) : 506-524.

Piguet (E.>. 1906. — Observations sur les Naididées et révision systématique de quelques espèces de cette famille. Revue Suisse Zool., 14 : 185-315.

Piguet (E.) & Bretscher (K.). 1913. — Oligochètes. Catalogue des invertébrés de la Suisse. Mus. Hist. nat. Genève, 7 : 1-214.

Poddubnaya (T.L.). 1980. — Life cycles of mass species of Tubi­ficidae (Oligochaeta). In Aquatic Oligochaete Biology. R .O . Brinkhurst & D.G. Cook (eds.). Plenum Press, New York : 175-184.

Rodriguez (P.) . 1984. — Los Oligoquetos acuàticos del rio Ner-viôn (Vizcaya Espana) : resultados faunisticos générales. Lim­netica, 1 : 169-178.

Schwank (P.). 1982a. — Turbellarien, Oligochaeten und Archian-neliden des Breitenbachs und anderer oberhessischer Mittel-gebirgsbache. IV. Allgemeine Grundlager der Verbreitung von Turbellarien und Oligochaeten in Fliessgewàssern. Arch. Hydrobiol., 62 ( 2) : 254-290.

Schwank (P.). 1982b. — Turbellarien, Oligochaeten und Archian-neliden des Breitenbachs und anderer oberhessischer Mittel-gebirgsbâche. III. Die Taxozônosen der Turbellarien und Oli­gochaeten in Fliessgewàssern eine synokologische Gliederung. Arch. Hydrobiol., 62 (2) : 191-253.

Smith (N.E.) . 1985a. — Population and reproductive dynamics of Nais communis (Oligochaeta : Naididae) from a Wiscon­sin limnocrene. Am. Midi. Nat., 114 (1) : 152-158.

Smith (N.E.) . 1985b. — Setat morphology and is intraspecific variation in Dero digitata and Dero nivea (Oligochaeta : Nai­didae). Trans. Am. Microsc. Soc, 104 (1) : 45-51.

Smith (N.E.) . 1986. — Ecology of Naididae (Oligochaeta) from an alkaline bog stream : life history patterns and community structure. Hydrobiologia, 133 : 79-90.

Streit (B.) . 1974. — Populationsdynamik von Chaetogaster lim­naei limnaei in einer Population von Ancylus fluviatilis. Arch. Hydrobiol., 47 (1) : 106-118.

Thomas (A.G.B.) , Giani (N.) & Thomas (N.) . 1979. — Actions humaines sur la faune benthique torrenticole dans le Sud-Ouest de la France. I. La Rigole de la Montagne Noire. Bull. Soc. Hist. nat. Toulouse, 115 : 30-52.

Timm (T.). 1967. — The life cycle of some Oligochaeta. Trudy Karel'skogo Ordeleniya Gosniorkh, 5 (1) : 202-204. (Traduc­tion du russe).

Timm (T.). 1970. — On the fauna of the Estonian Oligochaeta. Pedobiologia, 10 (1) : 52-78.

Timm (T.). 1979. — The Estonian Lumbriculidae. EestiNsv Tea-duste Akad. Toimitised, 28 (3) : 158-171.

Uzunov (J . ) . 1982. — Statistical assessment of the significance of both bottom substrata and saprobity for the distribucion of aquatic Oligochaeta in rivers. Limnologica (Bert.), 14 (2) : 353-361.

Varela-Allègue (R.) . 1978. — Aportaciones at estudio floristico y ecolôgico de la laguna de Sobrado de los Monjes (La Coruna) . Tesis de îicenc. Univ. Santiago : 142 p .

Verneaux (J.) . 1973. — Cours d'eau de France-Comté (Massif du Jura) . Recherches écologiques sur le réseau hydrographi­que du Doubs — Essai de biotypologie. Annls Scient. Univ. Besançon, Zool. Physiol. Biol, anim., 3 (9) : 260 p .

Wachs (B.). 1967. — Die Oligochaeten-Fauna der Fliessgewàs-ser unter besonderer Berùcksichtigung der Beziehungen zwis-chen der Tubificiden-Besiedlung und dem Substrat. Arch. Hydrobiol, 63 (3) : 310-386.

Young ( J .O. ) . 1974. — Life-cycles of some Invertebrate taxa in a small pond with changes in their numbers over a period of three years. Hydrobiologia, 45 (1) : 63-90.