Entretien avec michel cymes

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8 - ANEMF.org n°21 / Septembre 2009 Racontez-nous un peu qui vous êtes. Comment s’est passé votre PCEM1 ? J’ai fait mes études à Paris, à Necker. C’était à l’époque la faculté la plus difficile de France car tous les étudiants qui faisaient Maths Sup pour réussir en PCEM1 atterrissaient à Necker. J’ai redoublé mon bac D, mais j’ai eu P1 du premier coup ! Enfin mon histoire est très particulière, j’ai eu beaucoup de chance. Au début j’étais 11 ème recalé, mais pour des raisons légales, suite à une enquête d’un autre étudiant recalé dont le père était avocat, la ministre de la santé, qui était à l’époque Simon Veil, a accepté de rajouter 11 places aux nombres d’étudiants pris en médecine. Et ce genre de coup, ça ne vous arrive pas deux fois dans une vie. Quel souvenir vous gardez de vos études ? Je garde de ma PCEM1 le souvenir d’une année de bagne, assez douloureuse. Mes années supérieures se sont plutôt bien passées, je n’ai jamais été un étudiant doué donc je ramais un peu dans certaines matières. En fait ce qui m’a le plus nuit durant mes études, c’est que je perds tous mes moyens à l’oral. Les professeurs qui me connaissaient dans la pratique me validaient parce qu’ils savaient que je n’étais pas un mauvais élève, mais les oraux se passaient souvent mal, voire très mal. Vous avez réussi à surmonter ça pour faire de la télévision ? Mon premier passage à la télévision a été un grand moment. C’était à Télématin, et j’ai pris des bêta- bloquants parce que j’étais très très mal. J’ai pensé que j’allais perdre connaissance en direct, j’avais une tachycardie à 800, au moins ! Quand est-ce que vous est venue l’envie de faire du journalisme ? J’ai toujours adoré expliquer, mais je n’avais pas envie d’être journaliste au départ. La pratique m’a fait comprendre l’importance de la vulgarisation auprès des patients. J’ai commencé en ORL, quand les mamans venaient avec les enfants pour une otite séreuse, je leur faisais un schéma explicatif. Souvent elles repartaient avec le schéma pour le montrer au papa. Et puis un jour j’ai demandé à un dessinateur de reprendre mes dessins, et on en a fait une bande dessinée. C’était mes premiers pas dans la communication ! C’est fondamental dans mon métier de médecin que de pouvoir parler intelligiblement à un patient. J’ai juste décliné ma volonté d’expliquer en d’autres supports que la consultation. Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans la radio ? Quand j’étais interne à Chartres, je faisais l’aller-retour de Paris tous les jours, en écoutant la radio. Sur France Info, une fille faisait une chronique santé tous les jours, et je trouvais qu’elle n’était pas franchement passionnante. Alors je m’amusais à réécrire ses chroniques, juste pour moi. Durant mes études , pour gagner ma vie, je travaillais dans le rapatriement médical, par téléphone. Un jour j’ai fait l’assistance d’un rallye dans le Sahara, dans lequel il y avait des journalistes avec qui j’ai sympathisé. Une d’elle m’a rappelé, un jour, pour me dire qu’ils cherchaient quelqu’un pour rédiger une chronique scientifique par semaine, sur Europe 2. Votre carrière a commencé comme ça ? Oui, j’ai commencé en écrivant des chroniques pour les autres, et en répondant à l’antenne. Michel Cymes Animateur du Magazine de la Santé sur France 5, co-fondateur de l’assocation La Chaîne de l’Espoir, créateur du site bonjour-docteur.com, Michel Cymes est aussi médecin ORL et consulte à l’hopital Georges Pompidou à Paris. Il nous reçoit dans les bureau de sa boîte de production, 17 Juin Média. Rencontre avec « La pratique m’a fait comprendre l’importance de la vulgarisation auprès des patients.» APO21revu.indd 8 01/09/2009 17:54:16

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8 - ANEMF.org n°21 / Septembre 2009

Racontez­nous un peu qui vous êtes. Comment s’est passé votre PCEM1 ? J’ai  fait mes études à Paris, à Necker. C’était à l’époque la  faculté  la plus diffi  cile de France car  tous  les étudiants qui  faisaient Maths  Sup  pour  réussir  en  PCEM1 atterrissaient à Necker. J’ai redoublé mon bac D, mais j’ai eu P1 du premier coup  !  Enfi n mon  histoire  est  très particulière,  j’ai  eu  beaucoup  de chance. Au début j’étais 11ème recalé, mais pour des raisons légales, suite à  une  enquête  d’un  autre  étudiant recalé  dont  le  père  était  avocat, la  ministre  de  la  santé,  qui  était à  l’époque  Simon  Veil,  a  accepté de  rajouter  11  places  aux  nombres d’étudiants pris en médecine. Et ce genre de coup, ça ne vous arrive pas deux fois dans une vie.

Quel souvenir vous gardez de vos études ? Je  garde  de  ma PCEM1  le  souvenir  d’une  année de  bagne,  assez  douloureuse.  Mes années  supérieures  se  sont  plutôt bien  passées,  je  n’ai  jamais  été  un étudiant  doué  donc  je  ramais  un peu dans certaines matières. En fait ce qui m’a  le plus nuit durant mes études, c’est que  je perds  tous mes moyens à l’oral. Les professeurs qui me  connaissaient  dans  la  pratique me  validaient  parce  qu’ils  savaient que je n’étais pas un mauvais élève, 

mais les oraux se passaient souvent mal, voire très mal.

Vous avez réussi à surmonter ça pour faire de la télévision ?Mon premier passage à la télévision a  été  un  grand  moment.  C’était à  Télématin,  et  j’ai  pris  des  bêta­bloquants parce que j’étais très très mal.  J’ai  pensé  que  j’allais  perdre connaissance  en  direct,  j’avais  une tachycardie à 800, au moins !

Quand est­ce que vous est venue l’envie de faire du journalisme ?J’ai  toujours  adoré expliquer,  mais  je n’avais  pas  envie d’être  journaliste au départ.  La  pratique m’a fait comprendre l’importance de la vulgarisation auprès des patients. J’ai  commencé  en  ORL,  quand  les mamans  venaient  avec  les  enfants pour une otite séreuse, je leur faisais un schéma explicatif. Souvent elles repartaient  avec  le  schéma  pour le  montrer  au  papa.  Et  puis  un jour  j’ai demandé à un dessinateur de  reprendre  mes  dessins,  et  on en  a  fait  une  bande  dessinée. C’était  mes  premiers  pas  dans  la communication ! C’est fondamental dans mon métier de médecin que de 

pouvoir parler intelligiblement à un patient. J’ai juste décliné ma volonté d’expliquer en d’autres supports que la consultation.

Qu’est­ce qui vous a donné envie de vous lancer dans la radio ?  Quand  j’étais  interne  à Chartres,  je  faisais  l’aller­retour de Paris  tous  les  jours,  en  écoutant la  radio.  Sur  France  Info,  une  fi lle faisait une chronique santé tous les jours,  et  je  trouvais  qu’elle  n’était 

pas  franchement p a s s i o n n a n t e . Alors  je  m’amusais à  réécrire  ses chroniques,  juste pour  moi.  Durant mes  études  ,  pour gagner  ma  vie,  je travaillais  dans le  rapatriement 

médical,  par  téléphone.  Un  jour j’ai  fait  l’assistance d’un rallye dans le Sahara, dans lequel il y avait des journalistes avec qui j’ai sympathisé. Une  d’elle  m’a  rappelé,  un  jour, pour  me  dire  qu’ils  cherchaient quelqu’un  pour  rédiger  une chronique scientifi que par semaine, sur Europe 2. 

Votre carrière a commencé comme ça ?  Oui,  j’ai  commencé en écrivant des chroniques pour les autres, et en répondant à l’antenne. 

Michel Cymes

Animateur du Magazine de la Santé sur France  5,  co­fondateur  de  l’assocation La  Chaîne  de  l’Espoir,  créateur  du  site bonjour­docteur.com,  Michel  Cymes  est aussi médecin ORL et consulte à l’hopital Georges Pompidou à Paris. 

Il nous reçoit dans les bureau de sa boîte de production, 17 Juin Média.

Rencontre avec

« La pratique m’a

fait comprendre

l’importance de la

vulgarisation auprès des

patients.»

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Et  puis  un  jour,  pour  faire  plaisir à  des  copains  qui  me  poussaient à  aller  à  France  Info,  j’ai  déposé au  directeur  de  France  info  deux papiers  que  j’avais  écrit.  Mais pour  moi  travailler  à  France  info c’était comme présenter  le  journal sur  CNN,  c’était  impossible  !  J’ai déposé  ça  sans  y  croire.  Ils  m’ont appelé 2 jours plus tard, et j’ai finit par remplacer la fille que j’écoutais dans  la  voiture.  Après  c’est  facile quand vous travaillez à France Info, c’est  une  vitrine  extraordinaire, parce  que  tous  les  responsables médiatiques écoutent. Je suis restée 12  ans  là­bas,  et  j’ai  commencé  la télé  parce  que William  Leymergie (le producteur et présentateur de Télématin, ndrl)  écoutait  France Info. Après, Jean­Marie Cavada m’a appellé quand il a crée la cinquième chaine, et puis après ça s’enchaîne. 

Vous menez beaucoup de projet en même temps, comment arrivez­vous à concilier tout ça ?  Il  y  a  deux  raisons  qui  font  que j’arrive  à  travailler  sur  plusieurs choses différentes en même temps.

La première est que tout ce que  je fais  est  rempli  de  médecine,  j’ai ingurgité tout ce savoir pendant mes études, et je le décline simplement en « produits dérivés ». La deuxième est que je suis très bien entouré, j’ai une  équipe  qui  peut  travailler  sur l’émission  pendant  que  je  mène mes  consultations  à  l’hôpital.  Ce qui était compliqué c’était au début quand j’étais tout seul, que je faisais travaillais à l’hôpital et  à  France  info  en même  temps,  mais progressivement  je me  suis  entouré  de gens  vraiment  très bien.

Est­ce qu’il arrive que les patients vous reconnaissent à l’hôpital ? Oui, et de plus en plus souvent.  Le  problème  est  les  gens qui  me  voient  en  consultation et  qui  disent  «  Ah  ben  dis  donc, si  je  m’attendais  à  ça  !  »,  mais  je coupe  très  rapidement court  à  ces discussions, je veux que les patients viennent voir un médecin, et pas le 

mec de la télé. C’est pour ça que je refuse  systématiquement  tous  les reportages,  toutes  les  interviews à  l’hôpital.  Il  y  a  aussi  des  gens qui  viennent  me  voir  en  dernier recours,  avec  un  discours  du  style « Vous  qui  savez  tout,  docteur…». Or  je  suis  ORL,  et  il  faut  que  les patients  comprennent  qu’il  ne faut pas me parler d’autre chose en consultation.

Votre discours volontiers carabin plait beaucoup aux étudiants en médecine, vous avez gardé ça de vos études ?Quand j’étais interne à  Chartre  j’étais 

économe de la salle de garde, c’est­à­dire  que  j’organisais  les  soirées. On a  fait des fêtes dignes des plus grands  moments  de  l’internat  ! L’ambiance était hallucinante. Avec mes  amis,  j’ai  gardé  cet  esprit.  Il me semble que les gens apprécient l’émission  aussi  pour  ça,  certains me disent « On voit de la santé, on 

« Il faut aussi que

je fasse attention à

respecter les limites.

Si Marina n’était pas la

je pourrais déraper...»

Michel Cymes

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apprend des choses, mais on ne ressort pas    malades  de  votre  émission,  parce qu’on s’est marrés ». Mais il faut aussi que je fasse attention à respecter les limites, et en ça Marina est très importante, elle me voit arriver à des kilomètres ! Si elle n’était pas la je pourrais déraper. Je ne veux pas devenir humoriste de la médecine. 

Les étudiants vous apprécient parce que vous êtes un médecin qui arrive à tout connaître sans se prendre trop au sérieux. Comment avez­vous vécu la rencontre avec les étudiants aux JEA de Lyon, cet été? J’ai été sidéré par  l’acceuil,  je ne savais pas que  j’avais une telle cote auprès d’eux ! Déjà, rentrer dans un amphi m’a rappelé mes études, et être accueilli comme ça par ce qui va être la  future génération de médecin,  c’était vraiment très touchant. Je ne m’attendais pas à un tel enthousiasme!

Un mot pour conclure ?  Je  trouve que le métier de médecin est un métier absolument  fabuleux,  quil  faut  avoir conscience  de  la  chance  que  l’on  a  de pouvoir un jour exercer ce métier, et des responsabilités que cela nous donne. Je me suis retrouvé de l’autre côté de la barrière, je ne le souhaite pas aux étudiants, mais ça vous montre l’importance du contact avec le médecin, de son écoute et de son intérêt  pour  le  patient.  Il  faut  toujours garder  à  l’esprit  qu’on a  un  pouvoir  sur le patient qui est hallucinant, et qu’il ne faut pas en profi ter.

Propos receuillis par Victoria LanvinVP Publication de l’ANEMF 09­10

Portrait chinois

Si vous étiez...Un Animal ? Un taureau . C’est mon signe  astrologique,  et  puis  c’est  la puissance,  c’est  hm…  j’aime  bien  le taureau.

Un pays ?  Je  ne  dirais  pas  un  en particulier, mais un au bord de l’eau.

Une Pathologie ? L’hyperactivité

Une œuvre (tableau, livre, fi lm) ?

Un tableau orientaliste, école de ceux qui peignaient des caravanes, tout ce qui est oriental. J’adore le désert.

Une œuvre (tableau, livre, fi lm) ?

Un tableau orientaliste, école de ceux qui peignaient des caravanes, tout ce qui est oriental. J’adore le désert.

Vous êtes plutôt...

Matin midi ou soir ? Le matin, tôt…. ...Enfi n, ce n’est pas par rapport au cul, si?

Thé, café, whisky ?  Café,  mais  un par jour seulement. Jamais d’excitant dans la journée.

Brune, blonde ou rousse ? Brune… c’est ma femme qui va être contente, elle est brune.

Anxioloytiques ou amphétamines ? Je ne prend rien d’artifi ciel, le sport est ma seule drogue.

Un livre pour les malades... d’inquiétude ! 

«Vous  êtes  hypocondriaque  ?  Je vous plains avec sincérité, car votre vie est gâchée de peur de la perdre. Je  ne  peux  pas  vous  rassurer,  c’est impossible. Mais je vous ai compris. Je  voudrais  vous  dire  que  vous avez  raison  de  vous  inquiéter,  car un mal de tête peut eff ectivement être  le  premier  symptôme  d’une tumeur  au  cerveau.  Mais  une  fois que  nous  aurons  ensemble  évacué ce  diagnostic  gravissime,  nous pourrons en envisager d’autres, plus bénins et largement plus fréquents.»

Site d’information médicale, crée en 2009 par Michel Cymes et Marina Carrère d’Encausse, bonjour­docteur.com a pour vocation d’être une plateforme d’information médicale simple d’utilisation, et compréhensible par  tous  les internautes. Les thèmes abordés sont regroupés en plusieurs rubriques ( ex ) et les sujets expliqués à l’aide d’animations vidéos et de textes clairs. Ce site est destiné aux personnes soucieuses de comprendre le fonctionenment du corps humains, de certaines maladies, ou de  traitement.  Les étudiants en médecine peuvent également  s’y  référer pour réviser des mécanismes étudiés en cours, ou y chercher des explications afi n de mieux saisir certaines notions.

Bonjour­docteur s’incrit dans la directe lignée des émissions de Michel Cymes et Marina Carrère d’Encausse, dont l’objectif est de permettre aux patients, ou aux proches de patients, d’avoir une information claire et intelligible, en évitant le jargon médical qui a tendance à les laisser dans le fl ou et l’incompréhension. Ce site est aussi un moyen de lutter contre la désinformation causée par certains sites internet, qui ne sont pas régulés par des professionnels et où les internautes peuvent s’échanger des informations érronnées, voire dangeureuses.

Bonjour­docteur c’est aussi un forum, où les internautes peuvent venir poser leurs questions à des spécialistes, ou partager leurs expériences, tout en étant modérés par des étudiants en médecine. L’équipe de Bonjour­docteur a fait appel à l’ANEMF pour communiquer auprès des étudiants en médecine sur les possibilités de prendre part à ce forum. Si vous avez envie de répondre aux questions d’internautes dans le domaine médical, et que vous êtes avez validé votre DCEM2, vous pouvez devenir modérateur.

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