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1 ISSN 0850 - 458X Numéro 0 Janvier 2012 UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel --------------------- BP 5004 Dakar Fann (Sénégal) Tél : (221) 821 76 69 Fax : (221) 821-70-51 Email : [email protected] ECHOS DU FORMATEUR Revue en Sciences de l’éducation

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ISSN 0850 - 458X

Numéro 0 Janvier 2012

UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR

Ecole Normale Supérieure d’ Enseignement Technique et Professionnel

--------------------- BP 5004 Dakar Fann (Sénégal)

Tél : (221) 821 76 69 Fax : (221) 821-70-51 Email : [email protected]

ECHOS DU FORMATEUR

Revue en Sciences de l’éducation

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Présentation de la revue Revue publiée par l’Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel (ENSETP) de l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar.

A vocation internationale, elle porte sur les Sciences de l’éducation. Sa parution est semestrielle et son objectif est de proposer une contribution à l’amélioration de la qualité de l’éducation.

Directeur de Publication

Ibrahima Wade, Directeur de l’ENSETP/UCAD

Comité de Patronage

Amadou- Mahtar Mbow, ancien Directeur Général de l’UNESCO

Jean -Marie De Ketele, Professeur Émérite Université Catholique Louvain Docteur Honoris Causa Université Cheikh Anta Diop de Dakar

Amadou Tidiane Bâ, Professeur Université Cheikh Anta DIOP de Dakar Ministre de l’Enseignement supérieur, des Universités et des Centres Universitaires Régionaux et de la Recherche Scientifique

Comité Scientifique

Jean-Marie DE KETELE, Professeur (UCL, Belgique) - Xavier ROEGIERS, Professeur (UCL, Belgique) - Didier JOURDAN, Professeur (UBPCF, France) - Abdou Karim NDOYE, Professeur (UCAD, Sénégal) - Mamadou ADJ, Professeur (UCAD, Sénégal) - Rodolphe TOUSSAINT, Professeur (UTR, Canada) - Jacques GINESTIE, Professeur (IUFM, France) - Oumar SANKHARE, Professeur (UCAD, Sénégal) – Boubacar DIOP, Professeur (UCAD, Sénégal) - Mor Talla DIALLO, Professeur (UCAD, Sénégal) - Jean-Emile CHARLIER, Professeur (UMONS, Belgique) - Mariane FRENAY, Professeur (UCL, Belgique) - Christian DEPOVER, Professeur (UMH, Belgique) - Oumar SOCK, Professeur (UCAD, Sénégal) - Claude LISHOU, Professeur (UCAD, Sénégal) - Babacar GUEYE, Professeur (UCAD, Sénégal) - Papa Goumba Lo, Professeur (UCAD, Sénégal) - Bernard HOSTEIN, Professeur (IPNETP, Côte d’Ivoire) - Marjolaine CHATONEY, Professeur (IUFM, France) - Michel BONAMI, Professeur (UCL, Belgique) – Etienne BOURGEOIS, Professeur (UCL, Belgique) Boubacar NIANE, Professeur (UCAD, Sénégal).

Comité de Lecture Belgique : Jean-Marie DE KETELE - Xavier ROEGIERS - Mariane FRENAY - Jean-Emile

CHARLIER - Christian DEPOVER - Léopold PAQUAY - Jacques GREGOIRE - Michèle GARANT

Canada : Rodolphe TOUSSAINT

France : Marjolaine CHATONEY - Didier JOURDAN - Marguerite ALTET - Jacques GINESTIE

Côte d’Ivoire : Bernard HOSTEIN - Kanvaly FADIGA

Sénégal : Mor Talla DIALLO - Harisoa Tiana RABIAZAMAHOLY - Oumar SANKHARE - Papa Goumba Lo - Boubacar DIOP - Babacar GUEYE - Hamidou Nacuson SALL - Abdou Karim NDOYE

Comité de Rédaction Maïmouna Thiam FADIGA - Youssoupha GUEYE - Sylvain Luc AGBANGLANON - Ndiogou NDIAYE

Mouhammadou Bamba NGOM, Yacine CISSE

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Sommaire

La pratique de l’évaluation et l’autoévaluation dans la formation des élèves professeurs d’espagnol au Gabon ...................................................................................................................................................... 5

Eugénie Eyeang ...................................................................................................................................... 5

Marketing de la formation des Inspecteurs de Spécialité à l’École Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel de Dakar ........................................................................ 16

Maïmouna Fadiga .................................................................................................................................. 16

Axes paradigmatiques des politiques et doctrines éducatives coloniales au Sénégal à travers l’analyse de l’école primaire de 1817 à 1945 ........................................................................................ 24

Ibrahima Wade ...................................................................................................................................... 24

La validation des épreuves de sélection et d’orientation des candidats aux écoles de formation d’enseignants : les dérivés de l’évaluation scolaire .............................................................................. 36

Ansumana SANE ................................................................................................................................... 36

Amélioration du processus d’enseignement apprentissage en Economie Familiale Sociale à travers l’utilisation des TIC ................................................................................................................................ 48

Aminata Ka ............................................................................................................................................ 48

Femmes africaines et accès a la formation: peut-on affirmer que l’accès a la formation peut améliorer la réussite professionnelle des femmes transformatrices des produits agroalimentaires ? .................. 55

Mme Maty Dia Diallo ............................................................................................................................. 55

11 ans après : Impacts des mesures relatives aux étudiants a la fst (ucad) dans le cadre de la reforme de 1994 .................................................................................................................................................. 61

Bamba Déthialaw Dieng ........................................................................................................................ 61

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Mot du Directeur de Publication

La Revue « Echos du Formateur », publication internationale, est une source d’informations dans le

domaine des Sciences de l’Education et un forum scientifique d’échanges entre acteurs, chercheurs

et praticiens du champ éducatif.

En tant qu’organe de diffusion, son objectif est de permettre à de nombreux enseignants, formateurs

et chercheurs, d’accéder à des travaux de recherche relevant des Sciences de l’Education, de la

didactique ou de la pédagogie et de profiter ainsi d’une expertise de qualité en matière d’information

scientifique et technique à visée éducationnelle et formationnelle.

La composition de son comité scientifique lui garantissant une assise et une caution internationales

est le gage fondamental de la rigueur avec laquelle les articles sont sélectionnés et expertisés.

Souhaitant plein succès et longue vie à la Revue « Echos du Formateur » j’invite toute la

communauté internationale en général, les chercheurs et formateurs africains francophones en

particulier à faire de la Revue un bel instrument de promotion et de développement de l’éducation et

de la formation en Afrique.

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La pratique de l’évaluation et l’autoévaluation dan s la formation des élèves professeurs d’espagnol au Gabon 1

Eugénie Eyeang

Ecole Normale Supérieure (ENS, CRAAL, Libreville-Gabon)

[email protected]

Résumé

La pratique de l’évaluation et l’autoévaluation modifie les comportements et renouvelle les habiletés de l’apprenant. Elle permet au sujet apprenant de connaitre son niveau global dans le module de formation en question. L’entraînement à (s’auto) évaluer développe la réflexivité et permet de mieux appréhender le contenu du cours et le rôle de l’évaluation dans le processus d’apprentissage. L’apprenant acquiert la capacité à interroger sa propre situation pour pouvoir changer de position en comblant lui-même (et avec les autres) ses carences. L’interrogation sur l’action enseignante, par la problématisation des situations pédagogiques et didactiques, favorise la construction d’une compétence de recherche. D’autant plus que l’élève-professeur apprend à questionner ses actes et les objets d’éducation. Une quête d’amélioration qui devient gratifiante et motivante pour la formation professionnelle.

Mots clés

Évaluation, autoévaluation, élève-professeur, formation, compétence de recherche.

Abstract

The practice of self-evaluation and change behaviors and renew the skills of the learner. It allows learners to know about its overall level in the training module in question. The drive (self) evaluate and develop reflexivity to better understand the course content and the role of evaluation in the learning process. The learner acquires the ability to question his own position to be able to change position by closing itself (and other) deficiencies. The questioning of the construction of a research competence. Especially as the student teacher learns to question his actions and objects of education. A quest for improvement that is rewarding and motivating for vocational training.

Key-words

Evaluation, self-evaluation, student teacher, training, research competence.

Introduction

La pratique de l’évaluation est aujourd’hui récurrente. Tous les domaines de la société posent des diagnostics, des bilans à mi-parcours, des suivis-évaluations de projets, etc. On entre inexorablement dans un système de valeurs praxéologiques, avec un primat de l’efficacité ou de l’efficience et une quête de l’optimisation sur le plan organisationnel (DANVERS, 2003). En éducation, plusieurs travaux sont publiés sur différents aspects de l’évaluation (DE KETELE, 1986 ; CARDINET, 1988; PERRENOUD, 1998 ; ROEGIERS, 2004; SCALLON, 2004 ; VIAL, 2005 ; TAGLIANTE, 2005). Dans ce domaine, il est question d’évaluation diagnostique, formative, sommative y compris l’autoévaluation qui encourage une attitude réflexive de l’élève sur ses apprentissages. La formation des enseignants exige d’aborder toutes les facettes de l’évaluation. Pour les enseignants de langue notamment, les différentes phases qui caractérisent un cours de langue sont ponctuées d’évaluations. L’évaluation est présente au début, au milieu et à la fin du cours d’espagnol, d’anglais ou d’allemand. C’est un processus qui participe à la formation des apprenants et qui affecte aussi bien les formés que le formateur.

L’évaluation est une partie intégrante du processus d’apprentissage (ABERNOT, 1988). On peut d’ailleurs l’envisager sous deux angles. L’angle behavioriste selon une approche par objectifs ou la perspective constructiviste dans laquelle l’enseignant opte pour une analyse approfondie des

1 Certains éléments de cette recherche ont été présentés au XVIIIe Congrès International de l’ASELE en 2007. Une version remaniée est publiée en espagnol dans AULA (Ediciones de la Universidad de Salamanca) et aussi dans la Revue Gabonaise de Recherche en Education.

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résultats des élèves avec le but d’adapter le cours à leurs besoins professionnels en les amenant à se questionner sur leurs productions ou interventions. L’aspect le plus important pour le travail de l’enseignant reste donc les intérêts des apprenants. Par conséquent, l’accent sera mis sur le degré de compétence ou de préparation des élèves professeurs ainsi que la compréhension des contenus prévus. Ainsi, dans le processus d’apprentissage, réaliser la tâche demandée et identifier ses forces et faiblesses est un élément de compétence. Autrement dit, les élèves-professeurs doivent acquérir la capacité de passer de la pratique (années d’enseignement au collège, application de certaines “recettes”2) à la théorie (concepts didactiques et épistémologiques) et revenir à la pratique (intégration de nouvelles techniques et stratégies d’enseignement), selon le triptyque : pratique → théorie → pratique. De cette manière, l’évaluation intègre l’apprentissage (SUSO LÓPEZ et al., 2001 ; NARCY COMBES, 2005). Elle valorise, par l’autoévaluation, le processus d’enseignement/ apprentissage (E/A).

Cette recherche est le résultat d’une réflexion initiée, il y a plus de quatre ans dans le module de Didactique et Méthodologie de l’enseignement de l’espagnol langue étrangère au Gabon (50 heures/semaine). Nous sommes partis du profil du public-cible qui est représenté par des professeurs adjoints3 ayant besoin d’un certain encadrement pour comprendre les exigences d’un programme théorique en didactique. Le présent article nous donne l’opportunité de montrer comment des élèves professeurs qui n’ont jamais pratiqué la méthodologie de la recherche développent leur capacité d’analyse des phénomènes pédagogiques et didactiques en intégrant l’autoévaluation (l’élève professeur lui-même), l’hétéro évaluation (par le groupe classe et l’enseignant) dans l’acte de formation4.

Eléments théoriques et conceptuels

Les considérations actuelles en matière d’enseignement/apprentissage mettent l’individu au centre de sa formation. Le rôle prééminent du professeur tend à s’estomper pour laisser plus d’autonomie à l’élève. C’est pourquoi, les domaines réservés autrefois à l’enseignant comme l’évaluation, requièrent aussi l’implication de l’apprenant.

La question de l’évaluation de nos jours

La pratique de l’évaluation est un processus complexe qui a considérablement fait évoluer la relation maître/élève ou enseignant/ apprenant. Evaluer ne se limite pas seulement à donner une valeur, une note, mesurer (CARDINET, 1988), juger un objet ou un sujet , c’est aussi considérer l’apprenant comme acteur dans sa propre évaluation.

Il s’agit d’abandonner l’idée selon laquelle le maître est le seul détenteur des savoirs, le vecteur des connaissances, le juge des résultats des élèves, en commençant à penser à un maître qui soit créateur de situations d’apprentissage, respectueux du processus d’apprentissage de chaque élève, critique avec sa propre façon d’agir (notre traduction) CASSANY, 1998: 77). Le but est de rechercher la façon optimale d’aider l’élève professeur à réfléchir sur ses pratiques. Le devoir du professeur réflexif est de rendre explicite ce savoir tacite ou implicite par la réflexion sur l’action, en générant des questions constamment et en vérifiant ses théories émergentes avec sa propre expérience passée et avec les réflexions que les autres font (notre traduction) (WILLIAMS, BURDEN, 1999: 63). C’est une réflexion permanente entre le savoir qu’un individu détient et les connaissances des autres. De cette façon, l’évaluation (et/ou autoévaluation + hetéroévaluation) pratiquée par les apprenants eux-mêmes, après une épreuve orale ou écrite, est un exercice indispensable qui permet à ceux qui sont en formation d’acquérir les règles du «dur métier d’enseignant». De tels actes posés régulièrement favorisent la germination d’une conscience de l’erreur, d’une compétence d’organisation et de construction des connaissances. Comme le dit si bien A. SANCHEZ PÉREZ (2004: 148), l’acquisition des connaissances ne dépend pas seulement de la volonté d’apprendre, ni de bien comprendre en

2 Il arrive que des enseignants appliquent des instructions officielles sans avoir des précisions sur l’origine de telle ou telle innovation. L’exemple de la centration sur l’apprenant qui est revendiquée même par les behavioristes traditionnels. 3 Ces élèves professeurs ont au moins cinq années d’expérience. Titulaires du CAPC (licence plus deux années de formation professionnelle à l’Ecole Normale Supérieure) ils reviennent à l’ENS compléter leur formation et être professeurs de Lycée (CAPES). A la fin de la formation, ils élaborent un mémoire professionnel. 4 L’évaluation implique non seulement les résultats, mais aussi les méthodes, les formateurs et tous les autres acteurs qui interviennent dans le déroulement de l’action.

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premier lieu ce que l’on désire apprendre. L’être humain apprend si ce qu’il capte une fois après arrive à se consolider et à s’intégrer dans l’ensemble des connaissances qu’il possède déjà. Ainsi nous reconnaissons, avec lui, que les corrections qui essaient de mettre en évidence, de façon brutale, les faiblesses de l’élève auront des effets négatifs parce qu’elles peuvent affecter son image et porter préjudice à l’apprentissage. C’est pourquoi, il convient de concevoir une autre forme d’évaluer pour stimuler l’apprentissage et la prise de décisions du propre apprenant. Avec l’ensemble du groupe-classe, l’apprenant peut parvenir à reconnaître son point de départ et le continuum qui le conduit jusqu’à l’appropriation des connaissances en jeu.

SUSO LÓPEZ y al. (2001 : 461) déclarent qu’en introduisant comme objet d’évaluation les propres processus cognitifs d’apprentissage (…), on modifie le concept d’évaluation. Il se transforme en une valorisation sur un processus d’enseignement/apprentissage; une telle valorisation ne peut plus s’effectuer depuis l’extérieur de l’individu qui apprend: il doit l’associer au jugement valorisant, pour que chaque apprenant découvre ses conditions de départ, ses progrès, ses lacunes, ses stratégies d’apprentissage: la participation du propre élève dans l’évaluation se transforme ainsi en une garantie. (Notre traduction)

Dans la cogestion de la classe (enseignants et apprenants), le respect des consignes est un préalable important. L’enseignant qui devient un «coach»5 aide l’apprenant à s’affirmer, à se mettre en confiance pour que ses erreurs soient des réussites (VIAL, 2002). Les interrogations conceptuelles du cours se réalisent en groupe et permettent de s’améliorer.6 Il est vrai qu’au début d’un module d’enseignement, l’adhésion du groupe entier semble difficile, à cause de la diversité des niveaux et parfois des parcours de formation7. Mais l’explication du fonctionnement général de la classe et des buts recherchés permet à chaque membre du groupe de s’approprier l’objet d’évaluation et son degré d’implication pour la réussite de l’activité. L’adéquation entre la consigne initiale et son exécution varie selon la personnalité de chaque apprenant et du matériel didactique mis à sa disposition.

La préparation de l’activité d’évaluation par l’enseignant est un préalable. En distinguant l’évaluation de la notation, il convient de connaître ce que l’on évalue et pourquoi on l’évalue, sans oublier ce qui est évalué et/ou qui évalue ? (NARCY-COMBES, 2005). Les apprenants ont besoin d’une évaluation de leurs progrès d’apprentissage. Pour les enseignants, l’évaluation est le compteur de l’input et le facilitateur de la qualité de l’enseignement. Le professeur réajuste son cours à partir des résultats de l’évaluation (faite par les apprenants). Généralement, les décisions de l’évaluation sont celles que le professeur prend après un cours. Il régule alors son enseignement avec des questions du type : Ça été un bon cours? Pourquoi oui ou pourquoi non? (RICHARDS, LOCKHART, 2002), Que faut-il faire pour les motiver ? Ce sont là des interrogations qui aident le formateur à optimiser son enseignement en donnant la possibilité au formé d’avoir plus d’autonomie à travers l’autoévaluation8.

A propos de l’autoévaluation

Pour nous, l’autoévaluation est une évaluation réflexive. Pour R. LEGENDRE (1993), l’autoévaluation est le processus par lequel un sujet est amené à porter un jugement sur la qualité de son cheminement, de son travail et de ses acquis en regard d’objectifs prédéfinis, et tout en s’inspirant de critères précis d’appréciation. Cette définition est partagée aujourd’hui par tous. Puisqu’on considère, communément, l’autoévaluation comme une imposition du formateur au formé afin que ce dernier dise qu’il a acquis, ce qui a été prévu par le formateur (VIAL, 2005). En réalité, c’est la valorisation d’une

5 Le “coaching” en éducation apparaît comme une pratique d’intégration pédagogique qui, alors qu’il est rigoureusement appliqué, permet à l’apprenti de se mettre en confiance et d’utiliser valablement son savoir tout en acquérant un savoir-faire et un savoir-être nouveaux (EYEANG, OVA, 2007). 6 Ici, nous allons graduer les types d’erreurs que commet l’apprenant en partant des erreurs grammaticales aux erreurs conceptuelles (et autres). Les erreurs linguistiques sont corrigées de façon plus ou moins traditionnelle (du type: “ça se dit ainsi ou ça ne se dit pas”. Mais, les élèves professeurs doivent développer la conscience linguistique en essayant de reconnaître les déviances linguistiques qu’ils commettent en espagnol pendant les exposés afin de minorer les problèmes liés à l’insécurité linguistique qui caractérise habituellement le locuteur non natif. 7 Le public cible ici est souvent composé d’élèves professeurs sans expérience d’enseignement et d’autres avec plus de 15 ans de pratique sur le terrain. Certains auront exercé uniquement à l’intérieur du pays (province), d’autres jamais. 8 C’est l’enseignant qui délivre l’évaluation mais l’apprenant doit y être associé par l’autoévaluation, le jugement de lui-même» (PORCHER, 2004: 14).

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personne par elle-même, de sa propre prestation en fonction d’une tâche, d’une activité ou d’un projet. Nous tentons de passer ici de l’évaluation d’un expert (enseignant/ formateur) à celle d’un novice (élève professeur) par lui-même.

La vision traditionnelle de l’enseignement ne prépare pas l’élève dans ce domaine, puisque le seul détenteur du savoir (savoir, savoir faire, savoir être) est, dit-on, l’enseignant. Actuellement, il y a une certaine évolution des pratiques de classe. La pratique de l’évaluation formative (récurrente en classe de langue, DABENE, 1984) est avantageuse car, elle décentre, d’une certaine manière, l’élève de la note/sanction pour le centrer sur les appréciations du professeur (Bien! Très bien! Pas mal! Encore un effort ! Etc.), ce qui offre à l’élève d’autres perspectives sur l’évaluation. En plus, la fonction formative de l’évaluation exige beaucoup plus qu’une simple gestion et un singulier contrôle de la progression de chaque élève. La régularisation des apprentissages peut favoriser une meilleure responsabilisation de l’élève (SCALLON, 2004: 23). On peut admettre que l’autoévaluation est un acte pédagogique qui incite l’apprenant à réfléchir sur ses performances et ses erreurs. Elle aide non seulement à construire son apprentissage (formation) mais aussi à forger son identité professionnelle9. C’est un acte de formation qui le met en mouvement qu’il soit en situation productive ou réceptive10. Cet exercice, difficile pour beaucoup d’apprenants au début, les oblige à se regarder dans le miroir et à dire ainsi ce que leurs yeux voient. Ils doivent s’exercer et apprendre à le faire (VIAL, 2005). Nous remarquons en outre que la pratique de l’autoévaluation peut être prometteuse en cas de concertation entre le formateur et les formés. Elle ne s’oppose pas à l’hétéro évaluation. L’autoévaluation doit être considérée comme une évaluation valorisée (JORRO, 2007). En réalité, l’autoévaluation s’organise à partir des règles établies par un sujet pour d’autres sujets. Elle tourne autour du sujet. Elle est avantageuse pour l’évaluateur. L’autoévaluation qui fait un va-et-vient entre l’autre et moi n’est pas du tout simple, ni naturelle ; elle s’apprend, se construit et c’est seulement de cette façon qu’elle favorise les apprentissages des savoirs en situation (VIAL 2005). Nous pourrons débattre encore sur les représentations en vigueur à propos de l’autoévaluation comme stratégie de formation qui facilite les performances dans l’apprentissage. Nous voulons tout simplement souligner que l’auto questionnement est un mode qui oblige l’apprenant à savoir s’interroger sur son rôle. Il s’agit de savoir formuler de bonnes questions pour son projet. L’auto questionnement est la faculté que possède un sujet de s’interroger de manière opportune sur ses actions. Nous pouvons penser à quelques questions du type :

Que dois-je faire de ce que je suis en train de réaliser ? A quoi me servira le thème que je suis en train de traiter?

Dans ma pratique de futur professeur, comment aborder quel thème, traiter tel concept, réaliser telle activité ?

Nous plaidons avec M. VIAL pour dire que c’est après de telles interrogations que peuvent apparaître chez l’apprenant ou le formé, des attitudes relatives de négociation de sens11, d’élaboration des objectifs et de perspectives d’action. L’autoévaluation est un processus actif pour le sujet durant toute l’activité. Elle est présente dans toute situation d’apprentissage, que nous soyons d’accord ou pas. L’autoévaluation ne s’improvise pas ni ne s’invente. Elle ne peut non plus se réduire à un bilan, ni à un autocontrôle de procédés. C’est une dimension de l’être humain qu’on stimule et éduque.

Nous notons en plus que l’autoévaluation, comme l’évaluation, se compose de trois étapes: la mesure (ou l’autocorrection), le jugement et la décision. L’autoévaluation prise séparément n’est pas suffisante pour aider l’élève à l’autorégulation ni pour atteindre l’objectif de l’autoévaluation. Apprendre aux élèves à s’auto évaluer consiste à «les entraîner» dans les trois activités à la fois. Concrètement, il s’agira de leur enseigner à utiliser et à appliquer les critères de l’évaluation retenus, à collecter et

9 Dans les pratiques enseignantes actuelles, il est recommandé à tout enseignant de faire dans ses classes l’évaluation diagnostique, formative et sommative. Les manuels récemment édités (France, Espagne, Afrique) invitent l’élève (par conséquent le professeur) à l’autonomie, à l’autoévaluation ; généralement, à la fin d’une unité didactique (fiches d’autoévaluation, exercices d’autocontrôle, …). 10 Pendant qu’un autre membre du groupe expose (le condisciple ou le professeur), les autres membres doivent être attentifs afin d’être capable d’intervenir en apportant des éléments complémentaires, contradictoires ou en posant tout simplement une question. 11 L’autoévaluation permet l’élaboration du sens: lui donner de la valeur, reconnaître que la construction de sens est la formation, parce que la formation est une durée, un changement, un travail de la régulation (VIAL, 2005 : 135).

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interpréter les résultats, à prendre une décision et à déterminer une action (GOUPIL, LUSIGNAN, 1993).

En classe, les interventions des autres membres du groupe permettent d’organiser l’évaluation collective et la négociation de sens (MARTÍNEZ, 2004) pour aider l’individu en apprentissage ou en formation à s’améliorer. Le but principal est d’amener l’apprenant à réfléchir sur sa propre compétence (compétence générale ou globale) et sur les critères d’évaluation. Cela augmentera sa motivation et l’amènera même à classifier ses propres objectifs (PICÓ, 1990).

En définitive, comme on peut le lire dans le Cadre Commun Européen de Référence pour les langues (2001: 192), le potentiel le plus important de l’autoévaluation est dans son utilisation comme outil pour la motivation et pour la prise de conscience, car il aide les élèves à apprécier leurs qualités, à reconnaître leurs insuffisances et à orienter leur apprentissage de façon plus efficace. Cet acte de formation exige de chaque acteur une compétence spécifique : le formateur (en relation avec sa discipline : transposition didactique) et le formé (besoins de formation : objectifs du cours, situation sur le terrain, etc.). Le groupe-classe doit également développer la réflexivité et certaines habiletés linguistiques comme la prise de parole en public, la maîtrise des concepts et de la langue espagnole, la compétence discursive, etc.

Contexte de l’étude et méthodologie de la recherche

Cette étude correspond à une réflexion initiée dans le cadre du cours de didactique et méthodologie dispensé aux élèves professeurs de l’ENS12 de Libreville de 2001 à 2005. Elle s’appuie sur trois supports : l’analyse des fiches d’identification distribuées au début de chaque cours aux apprenants, le déroulement des exposés et finalement les questionnaires d’évaluation avec des questions ouvertes du cours lui-même.

L’objectif initial est de mesurer d’une part la capacité d’appropriation des concepts en didactique et en méthodologie et d’autre part d’évaluer le processus d’acquisition de la compétence de recherche chez ces professeurs adjoints de collège (cf. note 3) qui ont au moins cinq années d’expérience d’enseignement. Ils ont, pour la plupart, passé deux années à l’Université et deux autres à l’ENS pour la formation professionnelle. Ils présentent des carences au niveau méthodologique et conceptuel que le cours doit leur permettre de combler. L’acquisition de cette compétence a exigé la mise en place d’un protocole provoquant chez l’élève professeur des questionnements sur ses pré-requis en matière d’enseignement de l’espagnol au premier cycle au Gabon.

Le module de formation est organisé comme un séminaire avec des exposés sur des thèmes comme: le schéma de la classe d’espagnol, le rôle du professeur en classe, la gestion de l’interaction en classe d’initiation à l’espagnol, le profil de l’élève gabonais d’espagnol, les représentations des élèves sur l’espagnol, les manuels scolaires, etc. L’objectif est d’éveiller, d’une certaine façon, chez l’élève professeur une conscience de chercheur à partir de ses propres pratiques, des informations empiriques et des théories étudiées.

Le corpus d’analyse est composé des données fournies par la fiche d’identification du début de l’année, à savoir : âge, expérience professionnelle, centre d’enseignement (intérieur du pays=province, capitale=Libreville), motivations liées au complément de formation, existence ou non d’un projet pédagogique13.

Ensuite, les exposés (habileté orale : expression orale) présentés par chaque élève professeur servent de prétexte au questionnement personnel qui doit favoriser le développement de la compétence de recherche. L’évaluation se divise en trois phases: autoévaluation (l’exposant)

12 L’évaluation des acquis des étudiants fait partie intégrante de l’activité d’enseignement. L’enseignant est appelé à évaluer ses étudiants, à porter un jugement sur leur performance. L’évaluation est donc une tâche que l’enseignant accomplit quotidiennement (…). Pour outiller les enseignants dans ce domaine de compétence, l’ENS organise des séminaires et ateliers pédagogiques. Les informations jugées importantes dans le cadre de ces rencontres tournent au tour de la définition des objectifs pédagogiques et leur importance dans l’évaluation, comment concevoir un devoir, élaborer les grilles d’évaluation et la pondération (EYEANG, OVA, Idem.) 13 Nous n’exploiterons pas toutes ces données ici, mais nous pouvons dire qu’il s’agit de trois promotions (2000-2001, 2002-2003 et 2003-2004), soit un total de 47 élèves professeurs (entre 29 et 43 ans).

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l’hétéro évaluation 1 (les pairs) et l’hétéro évaluation 2 (l’enseignant)14. Cette première phase orale est suivie de la production d’un document définitif qui intègre toutes les observations15.

Finalement, nous avons distribué un questionnaire avec des questions ouvertes qui donne la possibilité à l’apprenant d’évaluer le cours qu’il vient de suivre tant sur la forme que sur le fond16, sans oublier l’incidence de l’évaluation sur son travail. La combinaison de tous ces instruments d’analyse met en relief la création d’une certaine ambiance dans la classe née du rapport à l’évaluation des différents membres du groupe-classe.

Les formes d’évaluation dans le cours de Didactique et méthodologie: résultats d’un travail d’équipe

L’évaluation est efficace et productive quand elle sert d’auto questionnement à l’élève, de stimulant et de moteur à l’apprentissage, sans tension. Elle doit apparaître comme un élément clé dans le processus d’enseignement/apprentissage. Chaque membre de la classe est impliqué dans le contrôle des connaissances. Le partage de l’information est un des préalables : Qui évalue? (à quel moment?)/ Qui s’évalue? Qui est évalué? Qu’est ce qui est évalué? Ces questions méritent d’être clarifiées au début d’un cours afin d’éviter de créer la confusion dans l’esprit des apprenants, comme on peut le lire dans cette observation faite par un élève professeur.

Elève 1 Au début, je ne voyais pas où nous allions. Un véritable martyr. Mais à force de faire des recherches et s’auto évaluer, est né le désir de m’améliorer.

En effet, l’évaluation telle que nous la préconisons avec les élèves professeurs part du principe selon lequel : en évaluant on apprend 17 ou plus tôt on apprend à évaluer en évaluant. Nous nous sommes rendu compte que les résistances observées au début du cours sont modulables. Notre attitude positive a été déterminante face à une évaluation qui se veut démocratique puisque chacun dispose de la même information18. Quand le professeur accepte l’évaluation de ses étudiants et qu’il réajuste son enseignement en fonction des intérêts des élèves et des erreurs détectées par l’évaluation, les élèves apprécient mieux l’exercice.

La conception de l’évaluation chez les formés

Tout au long des quatre années d’observation systématique des élèves professeurs, les réponses obtenues varient selon leur conception de l’évaluation. Cela peut dépendre des comportements individuels ou institutionnels. Le tableau qui vient par la suite nous présente la synthèse de leurs représentations. On peut y voir aussi ce qu’ils ont vécu durant le module de formation.

14 Nous ne verrons pas tout le déroulement de ces étapes dans ce travail. 15 Cette conception qui intègre le concept de l’évaluation permet à l’élève professeur de travailler pour un même thème deux habiletés langagières : l’expression orale (exigences d’organisation du discours) et l’expression écrite (cohérence externe et interne). 16 Au début, plusieurs élèves professeurs hésitent à évaluer le cours réalisé par l’enseignant/formateur. 17 On apprend de plusieurs manières en intégrant différentes habiletés: écouter l’autre, prendre des notes et exploiter les erreurs observées. 18 Il y a eu des situations de tensions extrêmes entre les élèves, mais des changements notables ont été observés chez les plus réticents.

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Tableau nº1 : Conception de l’évaluation chez les é lèves professeurs

Conception conservatrice de l’évaluation Évaluer - mesurer -sanctionner

Evaluation dans le processus d’E/A Évaluer – juger – réguler - remédier

- Apprécier le niveau des performances des élèves pour pouvoir décider des certifications.

- -Sert à médire les connaissances des apprenants.

- -Vérifier le niveau de l’apprentissage d’une leçon.

- -Interroger et corriger les élèves en donnant une note ou non.

- -Corriger et se corriger.

- -Vérifier si l’input a été assimilé.

- -Le formateur est le maître qui évalue pendant que l’élève subit l’évaluation.

- C’est un processus qui consiste à mesurer, juger les habilités et les apprentissages des élèves avec l’objectif de prendre une décision.

- Sert de baromètre aussi bien au professeur qu’à l’apprenant.

- C’est un facteur clé au moment de garantir la cohésion du curriculum (relation entre curriculum et activités proposées).

- C’est vérifier si les carences qu’il avait ont disparu; apprécier si les stratégies utilisées par l’enseignant facilitent la compréhension du message.

- Sert à mesurer et juger ses élèves. Sert aussi à corriger et surtout à expliquer encore ce qu’ils n’ont pas maîtrisé; apporter des solutions à leurs difficultés.

- Pour le formateur, ça peut être synonyme de motivation ou de démotivation.

Concernant le rôle de l’évaluation, deux tendances se dessinent. Certains continuent de penser, à la fin du cours19, que l’évaluation est une sanction et que le professeur est le responsable de l’évaluation malgré la remédiation du travail de construction commun. D’autres, la majorité, reconnaissent la valeur réparatrice et motivationnelle de l’évaluation en reconnaissant son apport à l’apprentissage. A chaque observation personnelle réalisée sur le travail par l’apprenant lui-même, correspond un changement de comportement par rapport à l’erreur observée et l’effort supplémentaire à accomplir.

Élève 2 Au début, faute de pratique… C’est difficile. J’ai des difficultés linguistiques, j’ai eu un problème de traduction.

L’autoévaluation : l’élève professeur construit sa formation

Aborder la question de l’autoévaluation n’a pas été facile. Nous avons dû expliquer à plusieurs reprises la démarche de travail que nous voulions adopter pour le module et commencer réellement l’activité après quelques séquences. Pour beaucoup d’élèves, s’évaluer soi-même est un exercice irréalisable. Un avis extérieur sur « ma prestation est beaucoup valable que le mien », disent-ils. Le point de vue du formateur étant préférable à celui des condisciples.

Élève 3 Problème de la fluidité du langage. Absence de spontanéité…Champ lexical. En plus ce sont les autres qui voient. Ils peuvent m’aider à améliorer mon travail.

Après plusieurs hésitations (manque d’auto estime, complexe de supériorité ou d’infériorité), la majorité a accepté de jouer le jeu. Pour ce module, l’autoévaluation favorise la naissance d’une conscience linguistique (correction personnelle et automatique des erreurs) et une meilleure gestion des taches à réaliser.

Élève 4 Interférences français-espagnol. L’emploi du passé composé: no ha bien dicho en vez de ha dicho bien. L’emploi de a. Prendre soin de la prononciation. Gestion du temps: apprendre à dire l’essentiel en peu de temps. Faire attention à l’exploitation des documents.

Ce qui suppose des réajustements individuels de la part de l’élève et par conséquent l’auto évaluation se transforme en acte de formation.

19 Il ne faut pas oublier qu’ils remplissent le questionnaire à la fin du module.

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Tableau 2 : L’autoévaluation pour les élèves profes seurs

Qu’est ce que l’autoévaluation pour l’élève professeur de ELE au Gabon ?

Que représente l’autoévaluation pour l’élève professeur de ELE ?

- C’est le fait de s’interroger sur ce qui a été acquis.

- C’est la capacité ou le processus qui permet à une personne de juger la qualité de son propre travail, en tenant compte des objectifs fixés. Elle peut servir aussi bien au formé qu’au formateur comme moyen de rectification des erreurs.

- C’est s’évaluer, découvrir ses erreurs, se critiquer.

- C’est une autocritique suivie d’une auto correction.

- C’est se donner une note, une mention, une appréciation sur son travail.

- Pour le formateur, c’est se rendre compte de ses erreurs et accepter de se corriger (lui-même ou un tiers).

- - C’est une épreuve d’humilité aussi bien pour le formateur que pour le formé (donner une nouvelle direction à ses pratiques).

- Représente un moyen fondamental pour la réflexion que doit faire le professeur sur son travail.

- Apporte la capacité de jeter un regard introspectif sur nos stratégies avec pour finalité de nous améliorer.

- Permet de savoir sur quoi on doit s’améliorer.

- Donne la possibilité de se situer par rapport à ce que chacun faisait et ce qu’il va faire par la suite.

- Me permet de savoir reconnaître que j’ai des lacunes que je dois combler pour évoluer.

- Développe chez les élèves un sentiment d’honnêteté intellectuelle.

- - Permet de comprendre et corriger les faiblesses et les fautes qui nous éloignaient de la réalité de l’acte d’enseigner. Elle m’a sorti aussi des ténèbres de l’ignorance .

L’autoévaluation pousse à l’analyse des pratiques et crée une motivation chez l’apprenant et favorise l’apprentissage. On observe une meilleure prise de conscience des enjeux liés à la formation reçue. La clarification des buts, le partage de la charge de l’évaluation produit des effets profitables à l’activité de recherche car, le formé apprend progressivement à interroger les problèmes observés. Par ailleurs, la gestion coopérative de la pratique de l’autoévaluation consolide les relations entre les membres du groupe classe.

L’hétéro évaluation par le groupe classe contribue à l’acte de formation

Dans cette évaluation par les pairs (LAURIER, 2005), on commence d’abord par congratuler le pair, puis on aborde les aspects positifs et négatifs de l’intervention et on termine par les contributions et les demandes d’éclaircissements ou de questions. Cette tache est cruciale car beaucoup d’élèves au début refusent d’accorder aux pairs la légitimité pour les évaluer, tout en reconnaissant l’apport de ces échanges. Or, la pratique nous enseigne que cette évaluation par les pairs favorise l’autonomie, dégage l’enseignant et développe une habileté transférable hors de la classe (LAURIER, idem : 136). Ici, nous avons quelques exemples de leurs réponses.

Tableau nº3 : Les effets de l’hétéro évaluation par les pairs

Les effets de l’hétéro évaluation des pairs chez l’ élève professeur d’espagnol

- Je me rends compte qu’un esprit d’observation et d’analyse est en train de naître.

- Mes camarades sont ceux qui peuvent m’aider grâce à leurs conseils.

- -Ils le font avec l’objectif de m’apporter quelque chose.

- Certains ont plus d’expérience que moi.

- -Ils me donnent leurs apports en reconnaissant les efforts que j’ai faits.

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L’hétéro évaluation de l’enseignant formateur dans l’acte de formation

Le rôle de contrôleur de connaissances est une des fonctions cardinales de l’enseignant. De manière générale, les élèves souhaitent que l’enseignant continue à le jouer dans toute situation. Pour l’apprenant, malgré tout, l’enseignant reste le détenteur du savoir. Son appréciation (verbale ou non verbale) compte pour fixer les connaissances sur un aspect de la question traitée ou le thème dans sa globalité et pour rassurer le groupe. Aussi, le formateur, va-t-il combiner plusieurs fonctions : entraîneur (« coach »), régulateur du discours, médiateur du savoir, animateur de la classe (« manager » du groupe), contrôleur de connaissances (évaluateur ou contrôleur de la qualité). Des tâches qui permettront d’éviter les conflits et les tensions que pourront générer les interventions de certains membres du groupe classe et maintenir ainsi une ambiance positive dans la classe.

Tableau nº4 : Les taches de l’enseignant / formateu r

Rôle de contrôleur de connaissances du professeur s elon les apprenants

- Après deux ou trois exposés, le professeur doit faire un résumé.

- Avant chaque exposé, le professeur doit faire cours pour fixer les idées.

- Organiser des synthèses sur les thèmes exposés.

On note ainsi que l’évaluation collective aide l’élève à remettre en question ses connaissances et à construire ses compétences.

L’évaluation développe les capacités de conceptuali sation

Pour les apprenants, le cours annuel ainsi que chaque exposé, ont été le fruit d‘une construction commune que les élèves professeurs expriment dans le tableau suivant :

Tableau nº5 : Apprentissage réalisé et apport du co urs

Apprentissage réalisé Evaluer le contenu du cours

- J’ai appris comment on peut mener une recherche. Il y a des étapes à respecter.

- J’ai appris comment identifier une idéologie d’E/A dans un manuel scolaire.

- Je pense simplement que je suis prêt à faire mon devoir (d’enseignant de lycée).

- J’ai réalisé le non superficiel de l’investigation.

- Bien que j’aie déjà enseigné, il y a certains aspects que j’ai découverts.

- Au lieu d’être des apprenants passifs, nous avons pu participer de manière active en découvrant par nous même les choses inconnues.

- Puisque nous avons plus de théorie, il faudrait alors la mettre en relation avec les éléments pratiques.

- - Nous savons déjà citer plusieurs choses que nous faisons sur le terrain.

- Le cours m’a enrichi.

- Avant, j’avais une impression vague, un peu confuse. Maintenant, j’ai été édifié.

- J’espère enrichir mes lectures et la recherche.

- Le contenu du cours a été sans doute très instructif et profitable.

- La pertinence des thèmes.

- Cette année, elle nous a ouvert les yeux sur plusieurs choses.

Selon les buts fixés par l’enseignant, la pratique de l’évaluation et l’autoévaluation transforme le fonctionnement du groupe classe. Elle permet à chaque membre de connaitre son niveau global dans le module de formation. L’entraînement à l’autoévaluation stimule les élèves sur le contenu du cours et leur permet de comprendre les principes de l’évaluation. Les élèves professeurs prennent la position de chercheurs en éducation. Leurs discours montrent qu’ils sont capables de théoriser leurs

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pratiques. Les concepts manipulés sont questionnés à partir des pratiques de classe. L’autoévaluation a facilité la découverte des aspects didactiques et pédagogiques inconnus. En outre, l’interrogation sur l’action enseignante développe en eux une compétence de recherche et leur permet de problématiser sur des situations pédagogiques. Le professeur en formation apprend à formuler les bonnes questions sur lui-même et sur le thème étudié. Une quête de recherche qui devient motivante lorsqu’il trouve des réponses à ses questions. Le formé apprend à mettre en relation le nouveau et l’ancien (connu/inconnu), la pratique enseignante avec les discours théoriques, et finalement à solliciter l’aide du formateur de manière opportune. La réussite de l’activité est la combinaison harmonieuse entre l’organisation formelle du discours (objectifs, consignes de travail, répartition des tâches,…) et le contenu (thèmes traités, bibliographie).

En conclusion , nous dirons qu’évaluer c’est questionner l’objet d’analyse. C’est aussi juger avec l’objectif de remédier à une situation particulière. C’est finalement prendre la température d’une situation de formation. S’auto évaluer c’est questionner sa propre situation de formation pour pouvoir changer de position. Ces éléments n’ont de sens pour l’apprenant que s’il est accompagné dans le déroulement du processus d’apprentissage (le formateur↔le formé↔le matériel↔le contexte↔l’ambiance dans la classe↔la qualité des relations). Pour le formé, chaque acte doit avoir un objectif clairement identifié pour susciter en lui la motivation (schéma du cours, consignes claires, bibliographie, répartition des tâches, critères d’évaluation et d’autoévaluation, etc.) et développer la compétence qu’il doit acquérir.

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Marketing de la formation des Inspecteurs de Spécia lité à l’École Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel de Dakar

Maïmouna Fadiga

Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel/UCAD

[email protected]

Résumé

Encourager et promouvoir la formation des inspecteurs de spécialité (IS) constituent entre autres des voies et moyens notoires pour permettre à l’Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel (ENSETP) de Dakar de mieux remplir ses missions et de contribuer davantage à l’atteinte des objectifs de perfectionnement de l’enseignement-apprentissage déployé au niveau du pays. C’est ce que nous nous proposons de montrer dans cet article en relatant l’impact d’une telle activité sur l’amélioration de la qualité des ressources humaines du sous-secteur de la formation professionnelle et technique au Sénégal.

Mots-clés

Formation – inspecteurs de spécialité – formation des inspecteurs – formation professionnelle et technique – qualité enseignement-apprentissage

Abstract

Encouraging and promoting the training of specialty inspectors (IS) are among the various other ways known to allow the High Teacher Training School of Technical and vocational Education (ENSETP)20 of Dakar to better fulfill its mission and to further contribute to the achieving of its development purposes. We mean improving vocational teaching throughout the country. In this article we intend to show the impact of such an activity on vocational and technical education and how it improves the quality of human resources in Senegal.

Keywords

Training - specialty inspectors - inspectors' training - vocational and technical education - quality teaching and learning

Introduction

Traduisant une volonté politique nationale affirmée par plusieurs actes posés dont les assises nationales sur l’enseignement technique et la formation professionnelle (Avril 2001), le rapport élaboré en février 2002 par le Ministère de l’enseignement technique et de la formation professionnelle soutient et confirme le pari de la scolarisation universelle et de l’amélioration de la qualité de l’enseignement- apprentissage toujours prôné dans le système éducatif sénégalais.

A ce propos, il s’avère nécessaire non seulement de mettre en place un cadre institutionnel propice à une meilleure gestion du sous- secteur, mais également d’en augmenter les capacités de management par la relance du recrutement des inspecteurs de spécialité de la Formation Professionnelle et Technique (FPT).

Devant cette situation, il ne nous reste plus qu’à rappeler le rôle important de l’Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel (ENSETP).

L’ENSETP créée en 197921 a été rattachée à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar comme établissement public en 198922. Jusqu’à nos jours, elle est la seule institution publique de niveau supérieur dont la mission première parmi d’autres est de former des professeurs et des inspecteurs de spécialité. Il s’agit pour l’ENSETP :

20 Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel 21 Décret n°79-1002 du 24 Octobre 1979 modifié par le décret N°94 053 portant son organisation et son fonctionnement) 22 Loi n°89-03 du 06 janvier 1989

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• de former les professeurs d’enseignement moyen et secondaire dans l’enseignement technique et professionnel,, les psychologues- conseillers d’orientation scolaire et les inspecteurs de spécialité ;

• d’effectuer des actions d’animation, de recyclage et d’actualisation des connaissances contribuant à la formation permanente des enseignants et des agents du secteur privé ou public, formateurs au sein de leur entreprise ou de leur administration ;

• de rechercher et de diffuser les moyens, méthodes et supports pédagogiques propres à améliorer l’enseignement technique et la formation professionnelle.

Dans la poursuite des objectifs formulés ci–dessus, l’ENSETP est organisée en départements, eux-mêmes répartis en filières et sections, appuyés par un centre de recherche, de documentation et d’assistance pédagogique (CRDAP).

Toutefois, même si quasiment toutes les composantes du dispositif d’intervention de l’institution ont contribué à la formation de personnels enseignants efficaces (Fadiga & De Ketele, 2006), l’une d’entre elles, en l’occurrence la section D chargée de la formation des inspecteurs de spécialité, se trouve encore dans un état de balbutiement, ce qui constitue une faiblesse de l’établissement par rapport aux objectifs atteindre.

En notre qualité d’intervenant dans le dispositif institutionnel nous nous proposons de faire, à travers ces lignes, le marketing de la formation des inspecteurs de spécialité à l’ENSETP.

Méthodologie

En plus d’une approche empirique justifiée par notre longue pratique dans le sous- secteur de la formation professionnelle et technique au Sénégal, notre méthodologie comportera aussi un recueil de données tirées essentiellement de documents officiels et techniques portant sur ses divers aspects que nous chercherons à analyser.

Après avoir présenté les missions de l’ENSETP, nous allons faire état de son environnement tant interne qu’externe, et situer la structure dans le champ de ses interactions avec d’autres institutions.

Notre objectif est de définir le cadre institutionnel de pilotage de la formation et ses enjeux.

Nous préciserons les leviers qui portent la formation tout en n’oubliant pas d’être attentif à la cohérence entre les politiques visées et les pratiques à mettre en œuvre, d’autant plus qu’on a coutume de dire que l’environnement représente les diverses caractéristiques du contexte de l’organisation : les marchés, le climat politique, les conditions économiques, etc.

Cadre de la formation : ENSETP de Dakar

L’environnement interne de l’ENSETP En tant qu’institution de formation de formateurs du secteur technique, l’ENSETP constitue un lieu d’échanges qu’il faut gérer. Différents acteurs et entités interagissent au sein de l’ENSETP en vue de la formation des inspecteurs de spécialité. On peut citer :

• la Direction de l’ENSETP entourée du Centre de Recherche, de Documentation et d’Assistance Pédagogique et de la Direction des Etudes dont dépendent les départements :

o Economie familiale et sociale,

o Psychologues – Conseillers,

o Techniques administratives et secrétariat,

o Techniques économiques et de gestion,

o Sciences et techniques industrielles,

o Formation des inspecteurs de spécialité,

• les Services administratifs,

• les enseignants,

• les élèves – professeurs,

• les personnels administratifs, techniques et de service.

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Selon Mintzberg (1990) à l'extérieur de l'organisation, il existe des acteurs qui tentent également d'influencer ses processus de décision…Leurs moyens de pression sont multiples : ils peuvent être des bailleurs de fonds, imposer des normes idéologiques, exercer des contrôles directs ou indirects, etc.

C’est ainsi que l’ENSETP interagit avec son environnement externe dans l’exerce ses missions.

Pour la formation des inspecteurs, plusieurs échanges sont appelés à s’effectuer entre l’école et une multitude d’acteurs externes constituant une coalition externe parmi lesquels :

• le Ministère de l’Enseignement supérieur, des Universités et des Centres universitaires régionaux et de la Recherche scientifique (MESUCURRS),

• le Ministère de l'Economie et des Finances (MEF),

• le Ministère de la Fonction publique et de l'Emploi (MFPE),

• le Ministère de l’Enseignement Préscolaire, de l’Elémentaire, du Moyen Secondaire et des Langues Nationales (MEPEMSLN),

• le Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle (METFP),

• l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD),

• l’Association pour la Promotion de l’Education et de la Formation à l’Etranger (APEFE)

• les syndicats d’enseignants,

• les entreprises privées,

• les parents d’élèves,

• les professeurs diplômés de l’ENSETP,

• les proviseurs des lycées techniques,

• les bailleurs de fonds internationaux.

Si nous reconnaissons avec Mintzberg (1990) que la manière dont les acteurs de la coalition externe s'organisent entre eux pour tenter d'exercer leur pouvoir sur l'organisation détermine un système d'influence externe, nous pourrons en admettre les effets qui peuvent revêtir la forme de points forts et/ou de points faibles qui appellent respectivement des stratégies.

Des points forts et points faibles du secteur de la formation professionnelle et technique

Une étude précédente que nous avons menée sur le secteur de la formation professionnelle et technique (FPT) en Afrique francophone (Fadiga, idem) nous a permis de nous pencher sur le cas du Sénégal, et d’en examiner la situation actuelle, plutôt ambivalente, qui commande des orientations stratégiques à mettre en œuvre dans notre pays pour contribuer à son développement économique et social.

En effet, malgré des déclarations en faveur de ce sous-secteur au Sénégal classé comme deuxième priorité du système éducatif, il ne semble toujours pas être traité à sa juste valeur du fait de l’insuffisance des moyens qui lui sont accordés dans le budget de l’État ; à cela s’ajoutent de nombreux problèmes de gestion et d’organisation dont il fait l’objet.

Ainsi, comme illustré dans le graphique ci-dessous tiré de l’annuaire statistique 2009/2010 de la FPT, la part allouée à la FPT dans le budget du secteur de l’éducation reste très faible. En effet depuis 2005 la FPT n’a pas atteint le seuil de 10% du budget du secteur malgré son rang de deuxième priorité du PDEF. Cette situation constitue une contrainte réelle dans l’atteinte des objectifs du gouvernement en matière de formation professionnelle et technique.

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Graphique 1 : Evolution de la part du budget de la FPT sur celui du secteur de l'Education entre 2005 et 2010 (Annuaire statistique 2009 /2010 de la FPT)

Toutefois, dans le cadre de la coopération internationale, le Ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle (METFP) bénéficie des financements de partenaires au développement à travers la mise en œuvre de projets d’appui.

Le tableau ci-dessous donne quelques éléments sur les projets actuellement en cours de mise en œuvre au sein du METFP.

Tableau 1 : Financements extérieurs (Annuaire stati stique 2009 /2010 de la FPT)

Intitulé du projet Description Partenaire technique et financier

Coût de l’investissement en FCFA

Année de démarrage

Année de clôture

Projet Sen 24

Appui à la mise en œuvre de la réforme de la FPT (Apprentissage, APC, insertion, Construction, réhabilitation, équipements de structures, Renforcement de capacité.)

Luxembourg 11 807 226 000 2008 2012

Projet de Renforcement de la Qualification des Ressources Humaines par la Formation professionnelle (PQRH)

Construction et équipements de trois centres sectoriels de Formation Professionnelle en réponse aux besoins des secteurs prioritaires de l’économie

AFD 8 133 866 800 2008 2011

Projet PALAM Mise en place de formation par apprentissage en faveur des jeunes de 15 à 24 ans

BID 152 666 668 2009 2013

Formation Professionnelle Féminine FORPROFEM

Implantation de Programmes de formation selon l’APC et appui à l’insertion des formés.

Coopération Belge

1 311 914 000 2008 2010

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Projet SN101,102,103

Appui aux écoles de formation de formateurs dans l’implantation de programmes de formation selon l’APC

APEFE 295 640 476 2008 2011

Projet Education pour l’Emploi EPE

Appui au développement et à l’implantation de programmes selon l’APC de BTS dans 13 structures (7 lycée techniques, 4 centres publics de FPT, 2 établissements privés

Association des collèges Communautaires du Canada (ACCC)

3 200 000 000 2009 2012

Par ailleurs, sous l’effet de la mondialisation, une forte volonté politique se combine à l’engagement et à l’engouement de la population sénégalaise pour faire du développement de la FPT la deuxième priorité du système éducatif.

Face à ce constat, nous reformulons, après le Ministère de l’Éducation Nationale (MEN, 1986), qu’un des maillons forts parmi les stratégies possibles de renforcement du secteur de la FPT réside dans la qualité de ses ressources humaines en général, de ses corps d’encadrement et de contrôle en particulier. A ce propos, le Ministère de l’Education Nationale avait choisi parmi les professeurs d’enseignement secondaire certains qu’il avait délégués aux fonctions d’Inspecteurs Généraux de l’Education Nationale (IGEN)23 pour pallier à l’inexistence d’un corps d’inspecteurs de l’enseignement secondaire A côté d’un effectif très réduit d’inspecteurs généraux de l’Education (N = 50), des professeurs de l’enseignement secondaire technique répartis entre deux promotions (2005, N=13 puis 2007, N=10) ont été délégués aux fonctions d’inspecteurs de spécialité. Le nombre des corps d’encadrement et de contrôle (IGEN et Inspecteurs de spécialité délégués) est de loin inférieur aux besoins réels du sous- secteur si l’on tient compte d’une part des effectifs importants du personnel formateur de la Formation Professionnelle et Technique composé de 1415 hommes (soit 69,13%) et 632 femmes (soit 30,87%) en valeur relative, et d’autre part des 5435 apprenants des séries techniques.

Par ailleurs, dans les conclusions de ses travaux, la Commission Nationale de Réforme de l’Education et de la Formation (MEN, 1986) a évoqué, entre autres, la nécessité pour l’enseignement d’un encadrement effectif et régulier sur les plans pédagogique et administratif avec «rôle de contrôle des personnels et d’évaluation du système éducatif», et recommandé la création d’un corps d’inspecteurs chargés de l’enseignement secondaire.

Ces mêmes recommandations ont été réitérées par la commission «les Personnels – la formation continue» du séminaire national sur l’enseignement technique et la formation professionnelle de mars 1986.

Face à une telle situation où la plupart des professeurs ne sont pas encadrés, un problème se pose : cette insuffisance dans l’encadrement des enseignants pourrait se faire sentir sur la qualité de l’apprentissage. Ce qui est souvent ressenti dans les résultats des évaluations nationales annuelles. C’est pourquoi nous saluons vivement le soutien du METFP qui a bien voulu faire appel à la coopération internationale belge et luxembourgeoise pour la redynamisation du sous-secteur de la FPT :

d’une part, le projet SN-101 (APEFE/Belgique) appuie le Sénégal en vue d’améliorer la formation initiale et continue des professeurs de la Formation professionnelle et technique, et de renforcer le dispositif de contrôle et d’encadrement des enseignants dans le contexte de la réforme de l’enseignement technique et de la mise en place de l’Approche Par Compétences (APC) ;

d’autre part, le Projet Sen 24 appuie également notre pays dans la mise en œuvre de la réforme de la FPT à travers différentes activités d’apprentissage en APC, de renforcement de capacités, d’insertion, de construction et de réhabilitation d’infrastructures.

Grâce à l’appui de l’APEFE à travers le projet SN 101, l’ENSETP vient de démarrer, depuis octobre 2009, la formation de sa première promotion d’inspecteurs de spécialité ; celle-ci est composée d’une quinzaine d’auditeurs sélectionnés parmi des professeurs chevronnés de différentes spécialités de la

23 Décret 77-1102 du 09/12/1977 portant création des fonctions d’Inspecteur général de l’Éducation nationale

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FPT, pour une formation de deux ans ; cette formule se répétera chaque année durant toute la durée du projet SN101 dont l’échéance est pour le moment fixée à octobre 2014. Nous souhaitons que même au lendemain du projet SN 101, la formation d’inspecteurs de spécialité puisse continuer à l’ENSETP afin de faire face au déficit notoire en personnels d’encadrement et de contrôle dont souffre le sous-secteur de la FPT au Sénégal. En effet il a été souligné lors du séminaire sur le rôle des écoles de formation de formateurs et autres acteurs dans l’implantation de l’Approche Par Compétences (APC) que la plupart des Inspections d’Académie (IA) du pays étaient caractérisées par leur déficit en personnels d’encadrement de la FPT ; par conséquent une augmentation de l’effectif des inspecteurs de spécialité voués à la cause de la FPT et leur affectation au niveau des différentes structures du système y compris les IA ne ferait que contribuer à faire prendre davantage conscience aux autorités de la place importante de l’enseignement technique dans le système éducatif global, en vue du développement national.

Le choix des moyens d’action pour promouvoir la for mation des inspecteurs de spécialité

Il s’agit d’analyser en profondeur, à travers la gestion et le pilotage de l’ENSETP, les différentes actions concrètes à déployer en vue d’assurer une formation de qualité dont les produits contribueront à une meilleure couverture du sous-secteur de la formation professionnelle et technique. Cela nécessite l’entrée en action de tout l’environnement de l’ENSETP, tant au niveau interne qu’externe.

Au niveau interne mettre en œuvre tout le dispositif institutionnel (curricula, formateurs, logistique, recrutement, budget,…) contribuant à l’organisation d’une activité de formation performante.

Au niveau externe, parmi les différents partenaires de la coalition externe, nous porterons notre attention principalement sur le projet SN 101 /APEFE, le Projet SEN 024, le MESUCURRS, et le METFP qui constituent les principaux mobilisateurs de ressources nécessaires à la formation de inspecteurs de spécialité entre autres.

C’est grâce aux importants moyens mis en œuvre par le projet SN 101/APEFE dans le cadre du programme pluriannuel d’appui de l’APEFE au secteur de la formation professionnelle et technique au Sénégal que cette formation entre autres a pu démarrer pour la première fois au Sénégal en avril 2010, depuis l’ouverture de l’ENSETP.

Le déploiement du projet SN101 s’appuie sur la levée d’un ensemble de conditions préalables dont la réalisation profiterait à toutes les activités du projet en général, et particulièrement à la formation des inspecteurs. Parmi ces conditions préalables certaines incombent au MESUCURRS qui assure la tutelle de l’ENSETP (notamment l’augmentation et la facilitation d’exécution du budget de fonctionnement de l’ENSETP, la prise en charge des bourses des élèves-inspecteurs, la rémunération des personnels assurant la formation des inspecteurs ), et d’autres (notamment la prise en charge des déplacements et des indemnités de stage des élèves-inspecteurs) reviennent au METFP, premier utilisateur des produits (diplômés) de l’ENSETP.

Par ailleurs, dans le cadre d’un accord de partenariat entre le Sénégal et le Luxembourg, le Projet SEN 024 assure la construction des infrastructures de l’ENSETP, contribuant à appuyer l’établissement dans l’atteinte de ses résultats. De plus, pour permettre à l’ENSETP d’accomplir pleinement sa mission, il a été recommandé lors du comité de pilotage des projets APEFE tenu récemment sous l’égide du METFP et du MESUCURRS, d’établir une convention interministérielle entre le MESUCURRS et le METFP.

Ensuite, dans le choix des moyens d’action, on ne peut pas négliger la contribution importante de l’ENSETP dans la formation des cadres d’animation et de contrôle ; à travers la qualité et la disponibilité de ses ressources humaines, une bonne ambiance de communication interne se dégage au sein de l’institution qu’il faut considérer comme passage obligé.

Enfin, il revient à l’ENSETP d’intervenir dans une large mesure dans l’activité de marketing de la formation des inspecteurs à travers la gestion des échanges entre les « 5 p» que sont le produit, le prix, la place, les personnes et la publicité au sein de ladite formation (Bonaventure, A. 1993).

Le produit

La formation des inspecteurs de spécialité est, comme tout produit (service) immatériel lié aux relations humaines, caractérisée par sa complexité (Bonaventure, A. 1993) ; on ne saurait donc l’essayer, la tester avant de la mettre en œuvre. Sa réalisation nécessitera différentes ressources humaines : des formateurs et des apprenants.

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La qualité d’une telle entreprise est fortement liée au profil d’entrée des candidats d’une part, et d’autre part à la nature de la formation (contenu, qualité des prestations, investissement en temps, en matériel…).Or la mobilisation des acteurs cités ci-dessus semble tout à fait disponible :

Le prix

C’est l’ensemble de l’’énergie dépensée, l’ensemble des moyens investis dans la formation des inspecteurs (rémunération du personnel enseignant, administratif, technique et de service, frais de déplacements divers, dépenses d’aménagement et d’entretien des bâtiments, etc.). Dans le cas d’une organisation non marchande, le prix porte sur un produit implicite. Les moyens consentis à la formation des inspecteurs de spécialité doit faire l’objet d’un état des ressources disponibles (aides et contributions d’organismes partenaires, subventions locales, ressources propres, droits d’inscription…) et des dépenses engagées.

La place

Bonaventure 1993) soutient que la place est le lieu ou le moment auquel le service est disponible. L’ENSETP constitue au Sénégal, le lieu par essence de la formation des inspecteurs du sous-secteur technique. Cette activité fait partie des missions de l’ENSETP qui a la tâche de veiller à l’adéquation entre les finalités, les objectifs…, et d’assumer la conduite pédagogique et scientifique des travaux de la formation. Ainsi il est évident que pour mener à bien la formation des inspecteurs, il faudra tenir compte de ‘’l’organisateur’’, de ses orientations, de ses règles administratives, de son approche pédagogique et de ses relations avec certains de ses partenaires membres de son environnement externe.

Les personnes

La formation se concrétisera par un certain nombre de tâches à accomplir par des personnes physiques agissant non pas à titre personnel, mais au nom et pour le compte de leur organisation, en l’occurrence l’ENSETP.C’est à travers eux que l’on juge l’établissement dont ils constituent les ambassadeurs vis-à-vis de l’extérieur. Donc comme le déclare Bonaventure (1993), il est souhaitable que l’attitude des personnels soit cohérente avec l’image que l’on souhaite communiquer de l’organisation.

La publicité

C’est l’ensemble de l’information portant sur la formation des inspecteurs et /ou sur l’organisation (ENSETP) que l’on va communiquer d’abord à la ‘’cible privilégiée’’, en l’occurrence les structures de tutelle ou de soutien (MESUCURRS, METFP, Université, etc.) et ensuite `’une cible plus vaste ‘’, les candidats à la formation. Un descriptif pourrait en quelque sorte servir de document d’information sur la formation ; il reprendrait ce que nous avons écrit sous la rubrique ‘’produit’’ précédé du nom de l’organisation, complété des dates, des lieux des méthodes pédagogiques, des indications sur l’équipe d’encadrement.

Conclusion

Après cette réflexion, nous nous appuyons sur Bonaventure (1993) pour affirmer que pendant plusieurs années, un écart s’était fait sentir entre le service proposé par l’ENSETP et les attentes de l’environnement en ce qui concerne la formation des inspecteurs de spécialité (IS). Face à une telle situation, plusieurs solutions pourraient être envisagées en vue de la régulation de cet écart ; parmi elles nous avons pensé, à travers ces lignes, au marketing de la formation des IS.

Grâce à cette étude, nous avons pris conscience de l’importance des liens qui relient l’ENSETP avec ce qui l’entoure et avons mis en relief l’impact que la formation des IS représente pour l’établissement de formation en lui permettant de mieux remplir ses missions.

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Bibliographie

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Fadiga, M., (2003). Etude longitudinale rétrospective de l’efficacité externe et de l’équité d’accomplissement des diplômés sénégalais de l’ENSETP de 1981 à 1994. Thèse de doctorat, UCL, Belgique

Fadiga, M., & De Ketele, J.M., (2006). L’Efficacité et l’équité des diplômés sénégalais, JHEA/RESA Vol. 4, No. 1, 2006, pp. 87–123.

Sénégal, Ministère de l’Education Nationale, (1977). Décret 77-1102 de la 09/12/1977 portant création des fonctions d’inspecteur général de l’Éducation nationale.

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Sénégal, Ministère de l’Education Nationale, (1986). L’Ecole nouvelle.

Sénégal, Ministère de l’Education Nationale, (1986). Rapport du Séminaire national sur l’enseignement technique et la formation professionnelle.

Sénégal, Ministère de l’Education Nationale, (1994). DECRET N°94 053 portant organisation et fonctionnement de l’Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel.

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Sénégal, Ministère de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, (2010). Annuaire statistique de la formation professionnelle et technique,

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Mintzberg, H., (1990). Le management, voyage au centre des organisations, Paris, France : Editions d’organisation, p. 154."

Organisation de Nations Unies. (2000). Déclaration du Millénaire, Résolution adoptée par l’Assemblée générale, New York.

http://www.cepodsn.org/cepod/pub/tmp/BTP_centre_de_formation_rapport%20final.pdf

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Axes paradigmatiques des politiques et doctrines éd ucatives coloniales au Sénégal à travers l’analyse de l’école primaire de 1817 à 1 945

Ibrahima Wade

Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel/UCAD

[email protected]

Résumé

La mise en place d’un système d’enseignement unifié au niveau de la colonie du Sénégal est le résultat de plusieurs compromis entre des projets éducatifs successifs poursuivant différents objectifs au travers de différents modèles, le tout soutenu selon les époques par différents discours de légitimation.

C’est à l’explicitation de ces compromis et des différents soubassements idéologiques que voudrait s’attacher ce texte.

Mots clefs : Modèle ; Assimilation ; Association ; Ecole ; Politique.

Abstract

The setting of a unified educational system concerning the colony of Senegal is the ontesme of several compromises between successive educational projects striving towards different objectives through different models, the whole lot being supported by different legitimation speeches, according to eras.

It is about the explanations of those compromises and the different ideological bases that this is intended to aim at.

Keywords: Model; Assimilation; Association; School; Policy.

Problématique

Jusqu’à l’arrivée en 1816 du Colonel Schmaltz nommé « Commandant pour le Roi et Administrateur du Sénégal et dépendances », la petite société sénégalaise était sans école. Certes, il demeurait encore ici ou là quelque père de famille français ou assimilé qui confiait son petit garçon à quelque militaire de passage; mais, c’était toujours « moyennant un prix convenu ».

Pareille situation ne pouvait perdurer à partir du moment où la France décida avec la reprise de possession de la colonie aux Anglais, d’étendre son établissement.

Il fallut en effet concevoir et mettre en place l’embryon d’une éducation formelle qui d’emblée, devait se percevoir comme une réponse à une double exigence.

• apporter une solution définitive aux problèmes éducatifs grandissants d’une société coloniale blanche et métisse constituée en bourgeoisie d’administration et d’affaires et dont l’extension allait s’affirmant ;

• définir et promouvoir le soubassement culturel et « civilisateur » d’une entreprise de colonisation qui débordera largement au fil des ans, les frontières de l’établissement primitif circonscrit autour des deux principales villes de l’époque : Saint-Louis et Gorée, et toucher progressivement les pays « indigènes » c’est-à-dire le Sénégal des profondeurs.

Les réponses à ces deux séries de préoccupations majeures étaient-elles compatibles, et surtout, pouvaient-elles se matérialiser par l’entremise d’un même et unique appareil : l’Ecole?

Comment et sous quelles limites, ce double discours (« moral » et « civilisateur » à la fois) concrétisé par la pratique adjacente des maîtres d’école allait-il contribuer à créer et promouvoir l’Institution-Ecole, dans le cadre d’une situation coloniale?

Telle nous semble être toute la problématique d’une étude que la trame de notre développement s’attachera à décrire et à analyser.

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Hypothèse de travail et orientations méthodologique s

L’étude historique des politiques et doctrines éducatives au Sénégal dans la dynamique socio-éducative coloniale permet de poser l’hypothèse centrale suivante:

« L’évolution du premier embryon d’école vers la création d’un système d’enseignement unifié à l’échelle de la colonie, est le résultat de plusieurs projets éducatifs successifs dont les objectifs poursuivis, (culturels, sociaux, économiques) les modèles véhiculés (Ecole d’élites, Ecole de masse) et les discours de légitimation répandus (assimilation, association, participation) sont souvent modulés sous l’influence des facteurs religieux, culturels ou politiques ».

La vérification d’une telle hypothèse requiert:

• que l’on s’intéresse par-delà la description de l’organisation scolaire, à l’analyse du contenu didactique de chaque structure d’enseignement. Rien en effet ne manifeste mieux la finalité objective de chaque structure que les programmes et / ou les matières qui y sont effectivement dispensés ;

• que l’on mesure souvent les décalages temporels entre le « faire et le dire », c’est-à-dire entre la proclamation de certains discours et corrélativement de certains objectifs et la mise en œuvre concrète des moyens nécessaires pour les réaliser ;

• que l’on situe chaque projet éducatif ou chaque réforme dans son espace-temps et que l’on évalue le poids des événements externes et internes sur les décisions en matière d’éducation.

Aussi, le développement qui suit est-elle articulée autour des trois parties suivantes :

(i) Les pionniers de l’enseignement

(ii) L’appel aux Frères de Ploërmel

(iii) Le développement de l’enseignement.

Les pionniers de l’Enseignement : mise en place d’u n embryon d’éducation à partir de 1817

La mise en place de la première école au Sénégal dont l’ouverture eut lieu le 7 mars 1817 avec Jean Dard comme premier instituteur, a déjà fait l’objet d’études nombreuses, variées et souvent poussées, avec les travaux successifs de Georges Hardy (1921, 122 p.) Joseph Gaucher (1968,199 p.) Denise Bouche (1975,941 p.) Roland Colin 1981, 1008 p.) Ibrahima Wade (1986, 320 p.). Amadou Fall (2002, 363 p.)

Nous nous garderons donc de retracer l’histoire de Jean Dard et de son école; plutôt, nous rechercherons à travers l’abondante information assemblée par tous ces « historiens de la colonisation », quelques situations privilégiées qui participent des points de repères essentiels pour une histoire de l’enseignement primaire au Sénégal.

Arrivé au port de Gorée le 9 octobre 1816 à bord de la « Félicité », Jean Dard ne prendra la route de Saint-Louis capitale de la colonie, qu’un mois plus tard ; il lui faudra cependant attendre jusqu’au 7 mars 1817 pour ouvrir l’école.

Quel était le fondement culturel et idéologique de cette nouvelle filière éducative?

Officiellement, rien dans ce sens n’était précisé; en effet, les instructions reçues par le Colonel Schmaltz nouveau « Commandant pour le Roi du Sénégal et dépendances » à son départ de la France, étaient « muettes sur l’Instruction Publique » (Bouche, id. p. 54). Toutefois, dans les instructions complémentaires en date du 31 décembre 1818, il est possible de traduire la pensée du Ministre des colonies quant aux raisons de l’action éducative : celle-ci chercherait à faire accéder les élèves et par leur intermédiaire, leur milieu d’appartenance à un niveau de civilisation plus élevé.

Pareille action de civilisation devait se distiller à travers deux entrées principales selon le mot de Roland Colin: (id. p. 58) : (i) la religion chrétienne au moyen des églises ; (ii) l’éducation au moyen des écoles.

La première entrée en restera cependant au stade de projet et l’on ne se polarisera que sur la seconde qui espérait-on, entraînerait par sa propre dynamique une sensibilisation à la religion de l’occident.

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Méthodes et organisation pédagogiques :

Dès le début des cours qui se faisaient dans la plus pure tradition de l’orthodoxie mutuelle24 en matière d’organisation pédagogique, l’instituteur Jean Dard fut confronté bien vite à ce qui allait apparaître comme le talon d’Achille de l’enseignement français en Afrique : la langue maternelle des élèves n’était pas le français ; deux solutions s’offrirent alors à lui :

• entreprendre d’abord et avant tout un enseignement méthodique du français au moyen de leçons de langage répétées remettant ainsi à plus tard l’enseignement des disciplines scolaires traditionnelles comme la lecture, l’écriture et le calcul ;

• renoncer au français comme médium, se mettre à apprendre les langues indigènes pour en faire la langue véhiculaire, et procéder par traduction en français pour atteindre son objectif primitif.

C’est cette deuxième solution que choisit Dard qui le fait aujourd’hui apparaître aux yeux de certains auteurs, comme le premier linguiste africaniste du Sénégal à qui on doit les tous premiers outils didactiques bilingues « français-ouolof » (parler du pays), tels un lexique, des cahiers d’exercices, une grammaire et un dictionnaire bilingue.

Avec l’arrivée de Jubelin nommé Gouverneur pour le Sénégal et Dépendances en 1827, la « méthode de Dard » sera abandonnée ; le Gouverneur appuyait sa décision de revenir à la « méthode directe » d’enseignement sur le rapport du contrôleur colonial Roussin25. Celui-ci s’érigeait en véritable pourfendeur de l’enseignement par le « ouolof, source, dira t-il de tous les maux dont souffre l’école mutuelle ». Aussi, préconisera t-il la création d’un espace « francophone » protégé le plus solidement contre les influences du milieu, préparant ainsi la voie à la création d’une élite moyenne auxiliaire de choix de l’autorité coloniale. Les bases de la première stratification culturelle et sociale venaient là d’être posées : désormais le pouvoir devait rimer avec le savoir.

Cette stratification au demeurant allait trouver son point d’orgue avec l’ère des Frères de Ploërmel qui se feront les artisans les plus vigoureux et les plus tenaces d’une telle politique à partir de 1841. Jusqu’à cette date, l’école mutuelle de Saint-Louis valsera entre plusieurs mains26.

Telle qu’elle avait toujours fonctionné, l’Ecole mutuelle de Saint-Louis aura malgré tout rendu quelques services puisqu’il en sortira des employés d’administration et de commerce. Au demeurant, elle n’eut point l’influence civilisatrice qu’on lui avait primitivement assignée ; on comprend dès lors le souci de l’administration d’améliorer l’école en la réglementant et en faisant appel à une nouvelle catégorie de maîtres.

L’appel aux Frères de Ploërmel (1841-1903) : premiè re organisation de l’Instruction Publique.

On avait lié l’idée de la réforme de l’enseignement au Sénégal au projet de confier les écoles existantes et à créer aux Frères de Ploërmel ; ceux-ci dès que la convention fut passée entre le Ministre des Colonies et leur Supérieur l’Abbé de La Mennais, prendront possession de l’école de Saint-Louis en septembre 1841 et celle de Gorée, deux ans plus tard en mars 1843.

Après l’installation des « Frères », deux arrêtés qui préfiguraient déjà l’embryon de la première charte de l’enseignement dans le pays seront pris; le premier en 1842 sur l’organisation des écoles, le second cinq ans plus tard (1847) statuait sur le régime intérieur des différents établissements d’enseignement de la colonie.

24 L’enseignement mutuel interpose, entre l’instituteur et les élèves, un certain nombre de moniteurs pris parmi les élèves les plus avancés. Ces derniers, relaient les ordres reçus, dispensent les leçons auprès d’élèves constitués en groupes disciplinaires homogènes et surtout surveillent la bonne exécution des consignes de l’instituteur. Le principe de cette méthode, qui prit en France le nom d’enseignement mutuel, consistait dans la réciprocité de l’enseignement entre les écoliers. 25 Lettre N° 337 du 16 décembre 1845 de l'Amiral Duper ret au Capitaine de Couvette Bouet. . Gouverneur par intérim du Sénégal. Archives du Sénégal 1 B35 (cité p.'lr Bouche. D. op cil. p.11l4 26 Daspres (1820-1827), Briquelier pendant les congés de Daspres, Bauyn de Perreuse (1827-1829). Ballin (1829-1830), Jean-Baptiste Epinat (1830-1832), Jean Dard (deuxième séjour jusqu’à sa mort : 1832-1833),. L’école échut successivement alors aux mains de Paulinier (1833-1834), de l’Abbé Savelli (Avril 1834 à octobre 1834), Paulinier de nouveau (d’octobre 1834 à 1841), date de fermeture de l’école mutuelle

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L’espace de formation mis en place par les Frères d e PloërmeI.

Dès qu’ils se furent installés, les « Frères » allaient opérer une rupture brutale avec ce qui restait de la méthode mutuelle ; en lieu et place ils proposèrent l’enseignement simultané avec son corollaire : le découpage de l’école en divisions qui deviendront au fur et à mesure des classes à part entière si les effectifs d’enseignement venaient à le permettre.

Le point de focalisation fondamentale de cet espace culturel ainsi mis en place demeure l’éradication totale des parlers africains aussi bien en classe que hors de celle-ci. Toute langue non française faisait désormais l’objet d’une véritable croisade et l’on imaginait des trésors d’ingéniosité pour susciter et amener la population scolaire à faire usage uniquement et partout du français, proscrivant jusque dans leur milieu d’appartenance leur parler vernaculaire.

La tradition du « symbole »27, connu de toutes les générations d’élèves jusque bien après les indépendances des pays africains, trouve ici son fondement28.

Cette profonde rupture d’avec le modèle de Jean Dard devait marquer pour plus d’un siècle, l’enseignement dans toutes les colonies d’Afrique française.

Mais n’était-ce pas là la traduction concrète de la « mission civilisatrice » telle qu’elle pouvait se décrypter à travers les textes?

Plus que par le passé en tout cas, l’on avait clairement indiqué le substrat idéologique sur lequel bâtir les fondements de la nouvelle école : l’assimilation.

Au demeurant, cette visée assimilationniste allait soulever nombre de difficultés dans la pratique.

Pour mieux assimiler les élèves au modèle socioculturel français et les extraire de « leur

barbarie », il n’y avait pas de meilleur moyen que de les couper de leur milieu et de concevoir un espace vivant et protégé à l’intérieur duquel seraient diffusés en leur sein, les ensembles d’images, de représentations, d’opinions et d’illusions capables de modeler durablement leurs comportements dans le sens le plus conforme aux intérêts des colonisateurs.

L’assimilation revêtait ainsi une visée franco-centrique et préludait déjà la francophonie des langues et de la culture.

Au plan sémantique cependant, l’assimilation du point de vue des colonisateurs revêtait une certaine « volonté de gommer les particularités culturelles du colonisé » ; alors que les colonisés la percevaient plutôt comme un « point d’appui pour l’amélioration de leur condition de vie et partant, comme cadre de référence de toute revendication égalitaire ».

C’est de ce point de vue que les habitants mulâtres surtout réclamèrent un collège pour servir d’instrument de promotion sociale permettant d’élever le niveau de leur privilège ; il y aurait ainsi une double filière comme en France à la même époque : une filière primaire et une secondaire.

Le Ministre de la Marine répondit favorablement à une telle requête, donnant au Gouverneur Bouet des instructions pour créer « une sorte d’école secondaire. Au demeurant, si les colonisés voyaient dans cette nouvelle création un moyen privilégié de promotion sociale, pour les « Frères » et la haute administration au contraire, l’institution ne saurait être que le bassin d’une « future pépinière des

27 Pour distinguer le délinquant commettait la faute de parler une langue autre que le français, on lui donnait un objet connu de toute la classe appelé symbole que les élève se passaient entre eux chaque fois que l’occasion s’ne présentait. .. (Bouche D.. pp.174-175) 28 En atteste le témoignage ci-dessous, retrouvé par Denise Bouche dans les archives des Frères et qui montre leur acharnement à extirper les parlers locaux de l’espace scolaire, voire de la vie quotidienne, et qui permet d’éclairer d’un sens profond, leur visée assimilationniste :

"La rigueur avec laquelle [les frères] poursuivaient les élèves qui se dérobaient à l’obligation de parler français contrastait avec leur habituelle indulgence. Un frère qui a enseigné à Gorée de 1877 à 1882 raconte dans ses souvenirs qu’il a vu punir les enfants parlant wolof en les faisant mettre à genoux sur une dalle quelques minutes avant la rentrée ; et pour distinguer le délinquant, on donnait un objet connu de toute la classe, « le symbole »qui se passait entre eux chaque fois que l’occasion s’en présentait. On en a vu se cacher sous le lit d’un camarade pour lui passer le symbole, lorsque celui-ci en rentrant parlerait à sa mère. (Bouche, 1975, pp. 174-175).

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vocations sacerdotales pour constituer les prêtres noirs, pionniers civilisateurs d’une Afrique difficilement accessible aux blancs ... (R. Colin op cit. p. 249).

Le collège allait donc ouvrir ses portes en 1842 sous la direction du petit noyau des premiers prêtres africains avec l’Abbé Boilat comme directeur.

Cependant, les difficultés financières et les résultats bien en deçà des exigences de formation et de débouchés, accélérèrent le déclin du collège qui en 1847 fut transformé en école secondaire, elle -même supprimée deux années plus tard.

Les velléités de création d’un enseignement promotionnel d’élites se seront donc butées finalement aux exigences de politique réaliste d’une administration centrale qui redoutait au plus haut point les risques de contestation de son pouvoir par effet de retournement et ce, bien malgré l’idéologie de l’assimilation dont elle avait fait son credo.

L’école des « Frères fonctionnera sur ce modèle jusqu’en 1903 et touchera globalement près de vingt mille enfants (Bouche, op cit. p. 147). La seule tentative de remise en cause d’un tel ordre fut opérée par le Général Faidherbe nommé Gouverneur du Sénégal en 1854.

Mesurant en effet tout l’intérêt politique à faire accéder le plus grand nombre à l’école pour seconder son ambitieux dessein colonisateur, Faidherbe allait pousser à l’ouverture de petits échelons scolaires légers dans le Sénégal des profondeurs, couplés cette fois avec la progression militaire afin de pouvoir disposer des auxiliaires indispensables à l’extension de son appareil de contrôle et de conquête.

Si son effort pour créer un enseignement primaire laïc fut sans succès, il n’en démordra pas pour autant et concentrera plutôt le reste de ses efforts sur la mise en place des instruments de sa politique indigène c’est-à-dire sur une autre branche du développement éducatif, celle-là même qui commande le contrôle « des sujets noirs de la France », par la création de « l’école des otages » et par une prise en main vigoureuse des écoles coraniques.

En 1902, la colonie comptait cinq grandes écoles dont une dans chacun des grands centres urbains de l’époque: Saint-Louis, Gorée, Dakar, Rufisque et Ziguinchor. L’implantation des écoles de « comptoirs », légers espaces d’instruction mettra près de six années, de 1892 à 1898, pour couvrir l’ensemble du territoire (Bouche op. cit. p. 138).

L’enseignement des filles

Mises en place bien avant les écoles des Frères de Ploërmel par les Soeurs de Saint-Joseph de Cluny de la mère Javouhey (1819), les écoles des filles (une à Saint-Louis et une à Gorée) étaient tenues par des Sœurs que rien ne prédisposait à l’enseignement. La première institutrice en effet comme d’ailleurs les autres! fut détachée du service de l’hôpital pour tenir la première classe.

Ce sera à partir de 1842 qu’il y eut en permanence des « Sœurs » spécialement formées pour tenir les classes. L’objectif étant de former des maîtresses de maison accomplies et des mères de famille vertueuses.

A ce titre, l’enseignement donné était un enseignement élémentaire avec un accent marqué pour les travaux de couture et les travaux manuels. Le programme ne se modèlera sur celui de la métropole qu’à partir de 1881 et comprendra en outre l’enseignement de la grammaire française, l’histoire Sainte, l’histoire ecclésiastique, l’histoire de France et quelques éléments simples d’arithmétique.

Malgré leur fonctionnement très irrégulier, ces écoles reçurent à proportions presque égales, autant d’européennes et d’assimilées que d’indigènes, toutes chrétiennes au demeurant.(Bouche, op.cit. p. 390).

Le développement de l’enseignement 1904-1945

Deux importants événements historiques participent de l’évolution positive de l’enseignement primaire au Sénégal et constituent les points repères de l’amorce de son développement: la création de l’A.O.F. et la laïcisation.

La création de l’A.O.F allait permettre la mise en place d’un service fédéral de l’enseignement créé en 1904 ; le Lieutenant-gouverneur Camille Guy nommé à la tête de la colonie à partir de 1902, s’appuiera sur ce service à la tête duquel il mit un inspecteur primaire de métier, venu de la métropole ; l’inspecteur Mairot pour le nommer, promulguera une série d’arrêtés publiés le 24

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novembre 1904, dotant ainsi l’enseignement dans la colonie d’une véritable charte.

La laïcisation quant à elle, malgré les nombreux problèmes d’application qu’elle soulevait, sera l’occasion pour la colonie de tirer un trait définitif sur ce qui pouvait rester d’une époque et d’une idéologie, celles des « Frères » faites d’élitisme et d’exclusion.

En lieu et place seront désormais employés des instituteurs laïcs formés à l’idéologie de Jules Ferry, et qui s’installeront avec leurs moyens et savoir-faire importés de la métropole. .

Les arrêtés organiques de 1903

La nouvelle école élémentaire se répartit désormais autour de trois instances constituant structurellement des niveaux et des paliers entre lesquels un enchaînement très sélectif est possible.

i. Le premier niveau est celui des écoles de village, « cellule de base d’une éducation des masses généralisée à partir d’un apprentissage sommaire du français qui servira à communiquer avec les agents de l’appareil d’état et apporter un certain perfectionnement mental, moral et « civilisateur ». (Colin, op. cit. p. 307).

ii. Le second niveau, les écoles régionales installées dans les chefs lieux de cercles (actuellement nommés départements), s’adresse à la population enfantine des agglomérations de moyenne importance; elles recrutent parmi les meilleurs élèves des écoles de village et conduisent au « Certificat d’Etudes Primaires Pratiques » qui lui-même, ouvre les perspectives à un emploi subalterne immédiat que ce soit dans l’agriculture le commerce l’artisanat ou l’administration.

iii. Le troisième niveau enfin celui des écoles urbaines, ne prend qu’exceptionnellement les recrues des écoles régionales, l’élément dut-il être assez doué. Ces écoles en effet, installées en ville s’adressent exclusivement à la population urbaine avec un égard particulier aux européens dont elles réservaient une ou des classes29) spéciale(s). Seules ces écoles pouvaient mener aux carrières normales de la fonction publique après l’obtention du Certificat d’Etudes Primaires Elémentaires en tout point égal à celui délivré à la métropole puisque les programmes étaient identiques.

Ce système, malgré quelques fluctuations restera en vigueur jusqu’après la seconde guerre mondiale. La charpente éducative ainsi mise en place était la réponse concrète, le plaidoyer pour une conquête morale des indigènes dont l’éducation devait en être l’instrument privilégié.

Au demeurant, pour des raisons d’ordre budgétaire liées au recrutement du nouveau personnel laïc et en raison de l’attachement des notables à l’ancienne école des « Frères » qui était essentiellement la leur, les arrêtés d’organisation de l’enseignement ne trouveront leur application concrète qu’une dizaine d’années plus tard avec la nomination d’un Inspecteur Général de l’instruction publique, Georges Hardy en l’occurrence. Entre temps, le système connaîtra au moins deux vagues qui se traduisirent par une réorganisation en 1909 et une réorientation en 1912.

A cet égard, les seuls changements opérés furent le remplacement des « Frères » et des « Sœurs » par des instituteurs laïcs qui débarqueront avec les manuels en usage en France.

Dès son installation, Georges Hardy rédigera un plan d’études30 qui reçut l’approbation entière du Gouverneur Général William Ponty en mai 1914. Ce plan précisera les grandes lignes de la politique éducative comme arme essentielle de la conquête morale des indigènes qui doit suivre et pérenniser la conquête militaire.

Quels sont les modèles pédagogiques proposés et sur quels principes reposent-ils ?

Le modèle pédagogique : (Hardy: 1914, p. 125).

« L’école sera préparatoire à toutes sortes d’apprentissage; agricole, industriel, commercial; elle s’efforcera donc d’ouvrir les yeux et l’esprit des enfants sur l’économie du pays, de combattre leurs préjugés et leur méfiance par une réhabilitation constante et convaincante des métiers manuels. Les

29 Distribution des prix aux élèves de Saint-Louis. 17 juillet 1904 - .journal occident du Sénégal. 1904 pp. 796-

1100 30 Hardy (G) line conquête morale ... id. p. 156

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travaux manuels, les jardins, constitueront une grande partie des programmes mais ne les absorberont pas; et surtout ils demeureront apparentés aux autres enseignements parce qu’ils seront comme eux de simples moyens d’éducation »

Les principes : (Hardy, id. p. 159)

Il s’agit en l’occurrence de :

• « Mesurer l’extension de l’enseignement aux aptitudes actuelles et réelles de l’indigène ».

• « S’adapter aux besoins du pays et seconder pas à pas l’œuvre de civilisation entreprise par l’administration » [ ].

[ ... ] « Confions à l’école le soin de justifier notre action et de semer dans le cœur de nos sujets une affection raisonnée ».

• « Eviter que l’enseignement des indigènes ne devienne un instrument de perturbation sociale »

[ ... ] « Il est nécessaire que tous les enfants indigènes sans exception aient accès à un enseignement composé de lecture et d’écriture, de calcul élémentaire, de leçons de choses ... d’hygiène, d’agriculture et de menus travaux manuels. Mais le recrutement de l’enseignement primaire supérieur doit faire l’objet d’un triage attentif; il s’agit en effet de faciliter l’accès des carrières administratives à ceux dont la famille a toujours secondé avec honneur notre œuvre civilisatrice et mis son prestige au service de nos intentions » [.. .].

Ce montage sommaire de texte montre comment Georges Hardy entend assurer la reproduction des classes (catégories sociales) dans la stabilité sociale exigée par le fonctionnement des institutions coloniales. Cette vision s’exprime d’ailleurs avec un relief particulièrement manifeste quand on examine le rôle qu’il assigne à l’enseignement des filles: « quand nous amenons un garçon à l’école, c’est une unité que nous gagnons ; quand nous y amenons une fille, c’est une unité multipliée par le nombre d’enfants qu’elle aura ».

[ .. .]. « Quand les mères parleront le français, les enfants l’apprendront sans effort et nous arriverons dégrossis; le français deviendra alors pour eux au sens exact du terme, une langue maternelle » (p. 75).

Tout cet édifice reposera sur le ciment d’une idéologie qui, plus que par le passé, s’exprimera clairement au niveau du discours officiel.

Le plan d’études du 1er mai 1914 en donnait le ton en ces termes: « en admettant même que l’enfant rendu à la vie familiale perde l’usage de la langue française, on ne prétendra pas qu’il puisse effacer de sa mémoire les notions bienfaisantes que, par l’intermédiaire de cette langue on aura fait pénétrer en lui ; les mots passeront peut-être, les idées resteront ; et ces idées qui sont les nôtres et dont l’usage constitue notre supériorité morale, sociale, économique, transformeront peu à peu « les barbares d’hier en disciple et auxiliaire ». Hardy, comme on peut s’en rendre compte, s’écarte de la ligne assimilationniste de ces prédécesseurs mais reste fondamentalement convaincu de la vertu civilisatrice de la langue française.

La « Francisation », arme essentielle de la conquête morale des indigènes trouvait son théoricien le plus ardent cependant en la personne du lieutenant-gouverneur Guy qui disait déjà en 1902 : « parler français, c’est avoir cette langue dans le sang, ne jamais l’oublier quel que soit l’isolement dans lequel on vit ; penser en français, qu’on me permette de le dire avec orgueil, c’est être quelque chose de plus qu’un homme ordinaire, c’est s’associer à la noblesse de la destinée de notre pays, c’est vivre de notre vie nationale » 31

Pareils discours laissent présumer que le niveau de connaissance et de maîtrise du français, serait l’indicateur de la répartition en classes sociales des locuteurs qui constituent l’ensemble de la colonie. Cette ligne persistera jusqu’en 1930, non sans remous venant surtout de la part de la classe politique avec comme tête de file le député noir Blaise Diagne, élu en 1914. On reprochera à Hardy de n’être pas assimilationniste et donc de vouloir cantonner l’indigène à une sorte de sous culture pour pauvre. L’inspecteur général sera emporté par une vague de protestation et s’en ira de la Colonie en 1919.

31 Discours de Guy à la distribution des prix. Saint Louis juillet 1902. AR.S.

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Après son départ, les programmes d’enseignement métropolitain furent introduits dans les écoles de commune en commençant par les quatre communes de plein exercice: Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar. Ce renversement doit surtout à l’initiative et à la volonté du Ministre Henry Simon qui s’est fait l’écho des récriminations de la classe politique sénégalaise: « après les sacrifices héroïques consentis par les populations de l’Afrique pour la défense de la France, le moment est venu de répondre au désir exprimé par ces populations et, en ces derniers temps avec une insistance particulière, d’être égalées au point de vue de l’instruction publique à nos colonies les plus favorisées [ ... ) » 32.

La politique de l’association 1930-1936

La politique de l’assimilation inaugurée par les « Frères » et légèrement réorientée avec l’arrivée des instituteurs laïcs qui avaient comme mission de « franciser » plutôt les bénéficiaires de l’enseignement, sera abandonnée au sortir de la grande crise de 1929 qui n’avait pas épargné le Sénégal. Non seulement elle commençait à être décriée par la classe politique qui se faisait l’écho de son électorat urbain33, mais en plus, la généralisation d’un modèle dérivé de la métropole se heurtait à de très lourdes charges budgétaires au regard du recrutement en masse de personnel européen qui seul, pouvait correctement « franciser ».

Une autre politique, celle de l’association, s’imposera dès lors qui permette d’opérer une correction de trajectoire. Avec cette politique il était possible de maintenir la structure formelle (Ecole de village, régionale et urbaine), en modifiant seulement le contenu de l’enseignement et donc les contraintes d’encadrement.

Si Georges Hardy mettait en avant « la promotion culturelle » en opérant une ouverture sur le système pédagogique, les tenants de la nouvelle politique scolaire, en l’occurrence Brevié et A. Charton, respectivement Gouverneur Général et Inspecteur Général de l’enseignement, opéraient plutôt une ouverture sur le système politique. Les nécessités de politique économique consécutives à la grande crise, dicteront en effet une autre conception de l’Ecole Coloniale qui la distinguera de celle des années précédentes par les objectifs qu’elle poursuit, (économiques et non culturels) par les modèles qu’elle véhicule (école de masse et non école de cadres et d’auxiliaires) et par les nécessaires modulations du discours de légitimation qu’elle répand (l’association en lieu et place de l’assimilation.

Désormais, la grande affaire est de former le plus grand nombre de paysans et d’éleveurs pour augmenter la production; on espérait ainsi rejoindre les objectifs de recentrage imposés par la grande crise économique à l’empire français.

Dans ce contexte, on restitua véritablement sa valeur à l’école rurale baptisée école de masse, et qui avait mission de former le plus possible d’agents économiques, sujets français. Bien sûr on ne rompra pas avec la formation de fonctionnaires indispensables aux rouages de l’administration; mais plus que par le passé, cette formation devait être conceptualisée au moyen de programmes repensés et non plus rivés sur le modèle métropolitain.

Charton, l’Inspecteur Général qui partageait avec Brévié le Gouverneur Général une complicité souveraine, fera un rapport quelques mois après sa prise de service pour dessiner sa nouvelle vision de l’enseignement: [...] « Si le rôle de l’enseignement devait se borner à pourvoir des cadres subalternes pour les services et les entreprises, on pourrait dire si peu serré que demeure encore notre réseau scolaire, qu’une partie de nos efforts sont gaspillés ». [ ... ] « On accuse notre enseignement d’être, en faisant des déracinés et des dépaysés, un instrument de désagrégation sociale, alors qu’un enseignement véritablement indigène vise à faire évoluer l’indigène dans sa mentalité, dans le cadre de ses institutions et de ses croyances en vue d’un rendement immédiat » ... [ ... ]

« Il est certain que tout nouvel effort doit conduire à rechercher une formule d’école indigène adaptée; [ ... ] si nous voulons faire un enseignement plus massif, c’est à ce problème de l’école indigène qu’il 32 Rapport au Ministre des Colonie: Journal ofiicic1.

1919. p.470. 10 Les électeurs; se recrutaient uniquement parmi i les ressortissants des quatre communes. 32 Charton rapport à Monsieur le Gouverneur Général octobre 1930. A.R.S. 0258.

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faut s’atteler; mais alors pas de programmes trop scolaires, pas de leçons doctorales, pas d’instruction civique, nous restons dans la brousse, dans notre village, l’horizon s’arrête là. C’est l’enseignement pratique, concret, collectif. C’est l’école-jardin, l’école-verger, l’école-mutuelle, l’école-dispensaire, l’école-atelier. Nous gardons les élèves cinq ou six ans, à l’âge des habitudes. C’est l’école de la vie indigène, l’école d’un « nouveau genre de vie »34.

Cette citation pour longue qu’elle soit, nous semblait d’importance puisqu’elle permet de saisir en même temps, autant les principes, la structure que les programmes de la nouvelle école.

Le Gouverneur Général donnera sa sanction positive au rapport de Charton. Le caractère pratique de l’enseignement tel que le percevait l’Inspecteur Général est désormais marqué par les institutions obligatoires qui entourent l’école: jardins, vergers, plantations, champs de démonstration, ateliers d’artisans, cours d’adultes, villages scolaires ... plus que par le passé, avec Hardy qui voyait dans ces institutions de simples moyens d’éducation, il s’agit aujourd’hui de préparer les conditions sociales et psychologiques de la mise en valeur de la colonie par l’indigène lui-même.

Cette politique suscitera elle aussi une levée de boucliers cette fois de la part des enseignants indigènes35 qui y voyaient les relents d’une stratification insoutenable: l’école de masse pour assurer une certaine promotion du monde paysan condamné à voir la perpétuation de leur sort par leurs fils et l’école des petites et moyennes élites c’est-à-dire l’école régionale qui, mieux articulée sur les problèmes du cercle, contribuera à former les petits cadres.

Quand on sait que la majeure partie des instituteurs indigènes se recrutait dans la première strate, l’on comprend mieux alors leur refus de l’orientation qu’on leur imposait.

Quelques années plus tard, il fallut constater l’échec d’une telle politique; et c’est le Gouverneur Général qui l’exprimera en ces termes:

« L’école populaire rurale n’a pas atteint le but qu’elle visait à savoir, un enseignement massif adapté au milieu indigène »; [...] « je ne crois pas exagéré de dire que l’école populaire a fait faillite et s’est même retournée contre son but »36. [... ]

Au demeurant, force est de constater que les ouvertures pratiques dessinées par l’école populaire auront marqué d’une empreinte indélébile toute la génération d’instituteurs d’après les indépendances, puisqu’on retrouve encore aujourd’hui ces pratiques dans nos écoles37

35 Autobiographie des enseignants « Mamadou Dia »in Colin. p. 316. 36 37 Circulaire C.D.; 6 juin 1936. A.R.S. 179168 (28)

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Vers une politique de participation: 1936-1938

Une nouvelle ère allait s’ouvrir pour les masses et travailleurs indigènes sénégalais avec l’avènement de Léon Blum en France. Dans l’optique de ce socialiste, la politique coloniale rimait avec une politique de libération progressive qui extrairait du « fait colonial », le maximum de justice sociale et de possibilité humaine; l’association comme idéologie dominante devait dès lors céder le pas à l’idéologie de la participation entendue dans le sens d’une collaboration franche et entière entre les protagonistes.

L’africain prendra désormais en charge sa propre destinée aidé en cela par l’aîné métropolitain pour lui baliser le chemin, ce que le Ministre des colonies Marius Moutet traduira en d’autres termes: « j’estime qu’un système colonial n’est pas viable quand il ne peut être animé du dedans par les indigènes qui doivent en bénéficier », et le nouveau Gouverneur Général De Coppet de traduire cela par l’appel à la tête de l’enseignement, d’un fils du pays Léopold Sédar Senghor qui déclinera l’offre38 .

En 1940, la défaite française allait engendrer une autre tournure concrétisée par la reprise en main autoritaire de l’appareil administratif par le Gouverneur Général Boisson qui demandera à son Inspecteur Général Paul Mus de lui proposer une nouvelle politique scolaire.

La réforme scolaire de 1942

L’Inspecteur Général proposera un redressement sur deux plans: celui de l’appareil et celui de la définition des objectifs de l’éducation.

• Concernant l’appareil, Paul Mus mettra l’accent sur « le secteur scolaire », Il s’agit de déployer les effectifs d’enseignants et de réaligner les écoles.

Désormais, le secteur comprend : l’école régionale avec un directeur européen enseignant de la classe du C.E.P. et les écoles rurales qui gravitent autour du cercle confiées à des maîtres indigènes; le tout chapeauté par le directeur du secteur qui devient un conseiller pédagogique itinérant. La démarche pédagogique change ainsi de pôle et se centre d’avantage sur la classe. Le directeur du secteur devient donc l’instituteur de ses instituteurs.

• Quant aux objectifs, Paul Mus dès le début optera pour une « évolution tempérée » des programmes, avec le modèle français comme idéal à atteindre à court ou moyen terme. Il prône donc incidemment le retour aux « objectifs culturels »; cependant, il s’écarte de la ligne de Hardy en bannissant le langage de la domination et de l’exploitation pour proposer une théorie de l’éducation africaine fondée sur une pédagogie de l’influence. Il s’agit d’injecter dans le vécu du sujet indigène, le modèle de la civilisation française dans ce qu’elle a de plus parfait pour qu’il en assimile la substance; c’est l’assimilation active.

En 1945, au double rapport de cette politique et de cette nouvelle théorie éducationnelle, l’école coloniale n’aura subi que très peu de variations au plan structurel. Sa charpente, fixée depuis l’avènement de Hardy sera la même avec seulement quelques légères modifications. Cependant, l’on commençait à généraliser petit à petit le programme métropolitain que nombre de maîtres déjà appliquaient officieusement.

En suivant la courbe d’évolution de l’école coloniale sénégalaise, nous avons pu identifier quatre grands projets d’école: l’école des pionniers, l’école des élites, l’école des masses et enfin l’école unique; mais en situant chaque projet dans son espace-temps et en évaluant le poids des événements sur les décisions en matière éducative, une constante est souvent revenue: Les décisions sont toujours le résultat de conflits permanents ou temporaires, qu’il s’agisse des affrontements politico-culturels entre colonisés et colonisateurs, ou des oppositions entre le pouvoir civil et le pouvoir militaire ou encore des tensions entre l’administration et le clergé; de tels constats sont de nature à conforter notre hypothèse.

En définitive, le bilan que nous pouvons tirer de l’étude du dossier sénégalais à travers cinq générations d’éducation fait apparaître quatre grandes phases dans le développement de l’enseignement:

• La première phase (1817-1841) peut être considérée comme celle de la mise en place de la

38 Wade : thèse de doctoral id. p. 161

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colonie; la préoccupation majeure fut le développement centré surtout sur Saint-Louis et Gorée, donc sur le petit monde des blancs et assimilés assortis de leurs serviteurs.

« L’école se pensait alors comme un espace social où devaient s’opérer l’intériorisation puis la cristallisation en dispositions permanentes des modèles de comportements européens et des codes de la civilisation occidentale. » (Colin, ibid, p. 249)

La seule « fausse note » fut introduite par Jean Dard mais la brèche sera rapidement colmatée.

• La deuxième phase (1841-1903) fut celle de la naissance de la « politique indigène ». La nouvelle administration coloniale soucieuse d’étendre ses frontières, imaginera un autre développement pour le monde noir pénétré et conquis. L’école y apparaîtra comme un appareil de fixation et fonctionnera comme opérateur de stratification.

• La troisième phase (1903-1930) peut être répartie en deux sous périodes: (i) La première qu’on pourrait appeler « d’ajustement » (1903-1913) au cours de laquelle l’école devenue laïque demeure quasi rivée au modèle métropolitain ; (ii) La seconde sans doute la plus significative, serait celle du « développement mesuré » (1913-1930); le but principal du système éducatif étant ici la propagation de la langue française autant comme vertu civilisatrice que comme vecteur pour le développement économique.

• La quatrième phase (1930-1945) attestera quant à elle une plus grande volonté de rompre avec les stéréotypes de la pensée coloniale et une orientation plus marquée vers l’avenir. A ce titre, d’autres concepts (l’association, la participation) jugés plus neutres ou en tous cas moins marqués, seront mis en avant dans le contexte d’une nouvelle politique de collaboration franche et entière.

Conclusion

En définitive, s’il fallait hiérarchiser les différents facteurs qui interviennent dans la détermination des objectifs et des moyens éducatifs, l’analyse historique conduirait à privilégier le poids des évènements, des motivations et des décisions politiques. Une telle hiérarchisation n’exclut pas cependant l’intervention d’autres facteurs ni l’importance des effets économiques, sociaux, culturels et linguistiques imputables aux pratiques scolaires. Nous avons pu le montrer à propos des idées d’assimilation, de francisation, d’association et de participation qui toutes tendaient plus ou moins à imposer l’image d’une société harmonieuse et équilibrée où se trouveraient conciliés les intérêts des indigènes et ceux des européens.

Bibliographie

Ouvrages

Bouche, D., (1975). L’enseignement dans les territoires français de l’Afrique Occidentale de 1817 à 1920, Paris, France : librairie Honoré Champion

Colin. R. (1977). Système d’éducation et mutations sociales: continuité et discontinuité dans les dynamiques socio-éducatives, Le cas du Sénégal, A.N.R.T., Université de Lille, III, 2t

Fall, A., (2002). L’école au Sénégal : la question de l’adaptation.. Histoire d’une problématique récurrente de 1817 à nos jours. Thèse de doctorat en Histoire, Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal.

Gaucher, J., (l968). Les débuts de l’enseignement en Afrique francophone, Jean Dard et l’école mutuelle de Saint-Louis : le livre africain. Paris, France.

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Articles

1 - Hardy, G., (1919). Un essai d’enseignement, l’enseignement en AOF. Bulletin de la société d’encouragement pour l’industrie nationale, tome 131, N°4 novembre-décembre.

2 – Vincent, G., (1972). Histoire et structure du système français, l’enseignement primaire, Revue française de sociologie, XIII.

Archives et documents

B.AR.S : Bibliothèque des archives de la République du Sénégal.

Archives : ne seront citées ici que les archives que nous avons effectivement dépouillées. Les autres sont des citations prises chez les auteurs que nous avons déjà signalés; et les précisions apparaissent dans nos notes de bas de pages. Nos dépouillements concernent uniquement le fonds du Sénégal, notamment la « série (0) : enseignement à partir de 1920 »

— Organisation de l’enseignement :

• Ecoles populaires [0.258-432]

• Ecoles rurales [0.258-270]

• Enseignement primaire 1931-1939 [43 bis]

• Enseignement primaire 1934-1936 [53.0148]

— Organisation et réorganisation, orientations et réformes de J’enseignement:

• 1917-1939 [143-0.312-0325-0.326]

• 1931-1924 [53]

D’autres rapports sur l’organisation de l’enseignement se trouvent sur des documents isolés; par exemple 1925 - 1945: [138. 152. ISO. 2(0l). ]

Sources imprimées

A. Publications Officielles

• Journal officiel du Sénégal et dépendances du 5 janvier 1901

• Journal officiel du Sénégal du 2 février 1905 au 1er janvier 1959

B. Publications Périodiques sur l’enseignement

Brochures officielles diverses: Organisation du service de l’enseignement, rapport du Gouverneur C. Guy, Saint-Louis, imprimerie du gouvernement, 1903, in go. B.A.R S. po III. 8°.. Plan d’études et programmes des écoles primaires de l’AO.F. 1914 BARS. po. go. 476 AOF (1931) B.A.R.S. po 1. 8°

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La validation des épreuves de sélection et d’orient ation des candidats aux écoles de formation d’enseignants : les dérivés de l’évaluation scolaire

Ansumana SANE

Coordination Nationale des Blocs Scientifiques et Technologiques (CNBST)

[email protected]

Résumé

Au cours de leur pratique professionnelle les enseignants évaluent très fréquemment les élèves. Il peut s’agir d’une évaluation implicite qui consiste à manifester par des remarques une appréciation sur la manière d’être de leurs élèves ou sur les productions. Il peut aussi s’agir d’une évaluation explicitée qui prend la forme d’une note. C’est le cas notamment lorsqu’ils veulent vérifier les acquis de leurs élèves ou leur aptitude à poursuivre les études supérieures. Dans cet article, nous avons mené une étude des instruments d’évaluation généralement utilisés dans le cadre d’évaluation prédictive des candidats à la formation supérieure pour identifier ceux dont les caractéristiques paraissent inadéquates ou qui présentent des défauts et des faiblesses techniques exigeant des modifications plus ou moins importantes. Les problèmes portent aussi bien sur le fond que sur la forme ; ils ont été repérés à partir de l’analyse de deux modèles d’épreuves utilisées pour le recrutement de candidats à la formation d’enseignants du secondaire.

Pour ce qui est du fond, les problèmes qui se posent ont trait principalement à la validité de contenu (adéquation du contenu de l'item par rapport aux objectifs de la démarche). Concernant la forme, en revanche, les problèmes ont trait tout particulièrement à la construction même des items (clarté, précision, univocité de l'énoncé; pertinence ou plausibilité des distracteurs, etc.). Ce qui a permis de noter la faiblesse de validité des épreuves jusqu’ici utilisées. L’identification de ces problèmes a été rendue possible grâce à l’utilisation de procédés statistiques qui ont permis de calculer des indices de difficulté, de facilité et de discrimination (degré de difficulté de chaque item, pouvoir de discrimination de chaque item…). Les résultats obtenus montrent que les épreuves d’évaluation, telles qu’elles sont actuellement pratiquées, ne permettent pas de statuer avec efficacité les probabilités de réussite des intéressés.

Mots clés : Evaluation prédictive, évaluation certificative, validité, fidélité, pertinence, indice de difficulté, indice de facilité, indice de différenciation, indice de discrimination, puissance discriminative, distracteur

Abstract

In the course of their professional practice, teachers evaluate their students very often. It may be an implicit assessment which consists in showing through observations a valuation on how their students behave or on the productions. It can also be a clarified assessment which takes the form of a note. It is notably the case when they want to check their students’ achievements or capacity to further higher education studies. In this article, we have conducted a study of assessment tools generally used in the framework of predictive assessment of candidates for higher education training to identify those whose typical features seem inadequate or who show flaws or technical weaknesses requiring more or less important changes. The problems deal with the matter as well as the manner; they have been identified from the analysis of two model tests used for the recruitment of applicants to the training of secondary school teachers.

As for the substance, the issues that are raised are essentially related to the validity of the content (adequacy of the item content in relation to the objective of the approach). Concerning the form however, the problems are especially related to the very construction of the items (clarity, accuracy, unambiquity of the statement, relevance or plausibility of the distractors, etc.), which has allowed to note the weakness of the validity of the tests used so far. The identification of these problems has been made possible through the use of statistical methods which have permitted to calculate the indices of difficulty, easiness, and discrimination (degree of difficulty of each item, power of discrimination...). The

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gotten results show that the tests of assessment, as they are practiced currently, don't permit to enact with efficiency the probabilities of success of the concerned persons.

Keywords :

Predictive assessment, certifying assessment, validity, accuracy, relevance, difficulty index, easiness index, differentiation index, discrimination index, discriminative power, distractor

Introduction

L’évaluation des acquis des élèves dans nos écoles fait, depuis de nombreuses années, l’objet de critiques de la part de scientifiques qui dénoncent l’incertitude des mesures auxquelles elle permet d’aboutir lors de la correction des copies (Agulhon, C. 2006 ; De Ketèle, J.-M., Gérard, F.-M., 2005 ; De Ketèle, J.-M., 1996 ; Hadji, C., 1992). Pourtant, elle est un des critères principaux – si ce n’est le principal – en cours dans les institutions de formation d’enseignants des pays francophones d’Afrique subsaharienne pour la sélection et l’orientation, en amont, des candidats. Dans ces institutions, cette évaluation s’appuie généralement sur des épreuves constituées d’une série d’items de vérification des acquis dont la sommation des réponses donne des notes sur lesquelles les autorités prennent des décisions quant à l’acceptation ou non d’un candidat. Pourtant, ces mêmes autorités clament rechercher des critères de sélection et d’orientation vérifiant les prédispositions des candidats à réussir la formation à suivre.

Dans ces institutions de formation des enseignants, les décisions de sélection à l’entrée et d’orientation sont prises, pour une large part, à partir de la notation, fruit de cette évaluation. Tout se passe comme si cette évaluation se réalise et se vit de la même façon à l’école, même lorsqu’elle poursuit des objectifs distincts (évaluer en vue de mesurer les acquis et évaluer en vue de sélectionner et d’orienter) bien qu’intrinsèquement liés dans la mesure où l’un s’appuie, in fine, sur l’autre. La tendance à ne travailler que pour les notes est la règle, délaissant la motivation pour la profession future au profit d’une stratégie de recherche de « bonnes notes » (Vinokur, A., 2006 ; Demunter, P., 2000 ; Normand, R., 2005). Cela est vérifiable, aussi, lors des examens de sortie où la question des notes est omniprésente, voire même centrale, à tel point que les conseillers d’orientation et les psychopédagogues n’ont pas le poids que l’on pourrait attendre d’eux quant aux décisions d’orientation.

Ainsi, la trop grande place accordée à la notation dans le quotidien des pratiques institutionnelles participe à ce que les candidats investissent toujours plus les notes comme la seule clé de leur avenir. Cette situation explique, pour une large part, le fait que nombreux sont les candidats qui vivent avec anxiété ce type d’évaluation, encore appelée « concours ». (Jacobsen, M., 1997 ; Taylor, C. S., 1997) Il suffit de voir le succès croissant des cours préparatoires à ces concours proposés par certaines structures ou personnes ressources pour se rendre compte de la place importante accordée à la notation. Compte tenu de cette angoisse des candidats et des critiques qu’elle ne cesse de soulever auprès des scientifiques, il nous a paru important d’interroger cette évaluation, notamment ses épreuves qui président à la détermination des notes, dans le but de clarifier les logiques mises en œuvre dans nos systèmes éducatifs africains.

Le présent article essaie d’apporter des éléments de réponse à partir d’un ensemble de témoignages et de l’analyse de quelques exemples d’épreuves d’évaluation. L’article examine successivement le système de recrutement des futurs enseignants tel qu’il est encore pratiqué jusqu’ici, l’évaluation traditionnelle des acquis scolaires, la pratique évaluative dans les concours d’entrée aux écoles de formation d’enseignants dans les systèmes éducatifs de bon nombre de pays d’Afrique francophone au sud du Sahara, à partir de la revue de la littérature, d’interviews et d’analyse d’exemples d’épreuves élaborées à cet effet. Une conclusion générale boucle l’article.

L’évaluation à l’entrée des institutions de formation d’enseignants cherche à trouver des informations qui éclairent la prise de décisions de sélection et d’orientation des candidats. Il semble nécessaire de s’assurer que les épreuves élaborées à cet effet soient réellement au service de cet objectif, d’où les questions suivantes (Gray, J. & Wilcox, B., 1995 ; Saint-Antonin, 2004) : les épreuves d’évaluation, telles qu’elles sont jusqu’ici conçues dans le processus de sélection des candidats à la formation d’enseignants, produisent-elles effectivement les informations que l’on est en droit d’attendre d’elles ? Quelle confiance peut-on accorder aux notes issues de ces épreuves pour prédire la réussite future des candidats à la formation d’enseignants ?

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Dans la plupart des pays francophones d’Afrique au Sud du Sahara, leurs systèmes de formation initiale des enseignants n'ont cessé d'évoluer depuis leur accession à la souveraineté nationale. C'est ainsi que différents modèles d’écoles de formation ont vu le jour : écoles normales supérieures, écoles de formation des instituteurs, etc., sans parler des divers types de centres de formation pédagogique (comme les instituts pédagogiques nationaux ou IPN). Ce qui est intéressant, c’est que tous ces différents modèles d’écoles utilisent à peu près les mêmes modalités de recrutement, à savoir un concours d’entrée. Ce type de recrutement pose de nombreuses questions dont celles relatives à l’articulation entre le contenu des épreuves et les critères de sélection et d’orientation des candidats. Or, tous les acteurs contactés sont unanimes à dire que le concours est considéré comme une première phase de recrutement qui, en principe, permet de juger l’aptitude du candidat à pouvoir suivre la formation au métier d’enseignants.

Aujourd’hui encore, dans ces pays, le débat sur les concours d’entrée dans les écoles de formation d’enseignants est consternant. Ces concours sont jugés comme suffisamment durs pour beaucoup de personnes au point que celui qui y réussit mérite le respect. Dans le discours de la plupart des formateurs d’enseignants, « un concours c'est un concours et il faut en accepter la première règle : ce sont les meilleurs qui le réussissent ». Et nous ajoutons : souvent sur des critères malheureusement pas toujours objectifs. Si tel est le cas, il parait important, de s’assurer que les épreuves de ces concours, telles qu’elles sont jusqu’ici conçues, permettent effectivement l’identification des « meilleurs », pour favoriser la démocratisation de l’accès au métier d’enseignant.

Dans bon nombre de pays africains francophones au sud du Sahara39, l’exercice du métier d’enseignant était jusqu’ici assujetti à une formation professionnelle initiale dans des écoles dites normales. C’est ainsi que les personnes destinées à enseigner dans les écoles élémentaires étaient formées dans les Institutions de formation de maîtres40 tandis que pour enseigner au collège et au lycée, la formation se faisait dans des Institutions spécialisées d’enseignement supérieur41.

L’entrée en formation dans ces institutions se fait généralement par voie dite « concours d’entrée ». Le principe est le suivant : sur la base d’un appel d’offre, les personnes intéressées et remplissant certaines conditions (par exemple avoir le Brevet de fin d’études secondaires pour pouvoir s’inscrire au concours d’entrée dans une école de formation d’instituteurs ou le Baccalauréat pour le concours d’entrée dans une structure de formation d’enseignants de collège ou de lycée) passent un concours à partir d’épreuves d’évaluation proposées par les chargés de la formation dans ces structures. La conception de ces épreuves, même si elle varie d’une institution à une autre en fonction de sa spécialisation (enseignement élémentaire, enseignement général ou enseignement technique professionnel), comporte généralement soit des épreuves de langues (langues d’enseignement), soit des épreuves plus spécialisées comme les mathématiques, les sciences ou les disciplines technologiques, soit les deux… (Saint-Antonin, 2004 ; Taylor, C. S., 1997 ; Zuniga, R. (1994). L’évaluation est devenue, ainsi, l’instrument privilégié pour l’entrée dans ces institutions et pour orienter les admis dans des filières précises.

Traditionnellement, l’évaluation scolaire est essentiellement centrée sur le groupe d’apprenants comme cible et la référence : une série d’items juxtaposés les uns après les autres. Son ambition est de situer la performance de chaque apprenant par rapport à celles de ses camarades de groupe, en la plaçant sur un continuum de variation. La moyenne des notes reste souvent la norme et une performance est appréciée par rapport à cette valeur moyenne (Goasrelec, G., 2003) ; Gray, J. & Wilcox, B., 1995 ; Zuniga, R., 1994). Cette évaluation, qui privilégie l’indice de tendance centrale qu’est la moyenne, se soucie peu de la mesure de la dispersion des valeurs autour de cette valeur centrale ; ce qui entraîne la caducité des comparaisons qui sont souvent faites entre les réussites respectives de différentes classes, sur la base seule de la moyenne. En effet, la comparaison de deux distributions n’est fondée qu’à la condition qu’elle s’effectue sur l’analyse conjointe de la moyenne et de la variance, si tant est que ces deux distributions s’apparentent à la distribution normale (Saint-Antonin, 2004 ; Gervais, R. Nadeau, G., 1997 ; ZUNIGA, R., 1994).

39 Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, République Centrafricaine, Congo, République Démocratique du Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Madagascar, Mali, Niger, Rwanda, Sénégal, Tchad, Togo. 40 L’appellation de ces institutions peut être variable d’un pays à un autre : école normale d’instituteurs (ENI), institut pédagogique national (IPN), école de formation des instituteurs (EFI) au Sénégal… 41 On rencontre ici aussi des appellations variables d’un pays à un autre : Ecole Normale Supérieure (ENS) en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Gabon ; récemment, Faculté des Sciences et Technologies de l’Education et de la Formation (FASTEF) au Sénégal…

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Le paramètre de dispersion est rarement pris en compte, ce qui revient à sommer des notes obtenues sur des items issus de distributions aux variances hétérogènes. C’est comme si on additionnait des mangues, des carottes et des oranges. L’opération se solde par des injustices au niveau des résultats, une situation dénoncée depuis des lustres (Ehrlich et Flament, 1966). Pourquoi les institutions scolaires restent-elles encore impavides ? Pourquoi ne remédie-t-on pas à ces anomalies du fonctionnement de nos systèmes d’évaluation ?

Selon de nombreux chercheurs, dans ce type d’évaluation, la note est considérée implicitement comme une donnée absolue qui définit la performance d’un apprenant à un moment donné. Pour sa validité, cette donnée doit être aussi objective que possible. Pourtant, cette donnée dépend, non seulement du niveau de la performance recherchée, mais également par un ensemble de facteurs techniques et psychologiques dont l’influence est loin d’être négligeable. L’évaluation scolaire aboutit ainsi à classer les apprenants et ce classement paraît matérialiser l’essentiel de son souci. L’évidente signification arithmétique de la note ne masque-t-elle pas son absence de signification pédagogique ? Peut-on inférer que l’identité arithmétique de deux notes décernées à deux apprenants ayant subi la même épreuve correspond à l’identité des niveaux de connaissance de ces deux mêmes apprenants ? A une même épreuve, n’y a-t-il pas plusieurs possibilités d’obtenir le même nombre de points ? Seule une réflexion de caractère technique - à l’image de celle qui va être engagée ici sur des types d’épreuves de facture nouvelle - permet d’élaborer des épreuves qui autorisent des comparaisons fondées entre différentes performances.

Pour vérifier ce discours des formateurs d’enseignants selon lequel ce sont les meilleurs qui réussissent un concours, nous avons discuté avec plusieurs personnes (enseignants, enseignés, chercheurs) et analysé plusieurs épreuves et résultats de concours d’entrée dans une dizaine d’écoles de formation d’enseignants. Nous présentons ci-après l’analyse de deux exemples d’épreuves qui ont retenu notre attention42. Il s’agit d’une épreuve technologique et d’une épreuve de Français pour la sélection des candidats à l’entrée dans une Ecole Normale Supérieure de formation de professeurs. L’épreuve technologique vise à apprécier l’aptitude technologique chez les candidats d’une population tout-venant, c’est-à-dire quelque soit le type de baccalauréat obtenu. L’épreuve de Français vise à apprécier l’aptitude des candidats à la compréhension du Français, langue d’enseignement. Le niveau, ainsi déterminé au seuil de l’entrée en 1ère année de formation, servirait de référence pour évaluer ultérieurement, en regard de lui, les éventuels progrès des apprenants professeurs au cours de leur formation. Tels sont les objectifs annoncés par les concepteurs de ces deux épreuves.

Ce qu’en pensent les acteurs

22 formateurs en activité dans des institutions de formation d’enseignants, dont 14 sénégalais et 8 non sénégalais, ont été sollicités pour répondre à un certain nombre de questions relatives à la conception et à la passation d’épreuves de recrutement de candidats dans leurs structures respectives. Parmi les 14 formateurs sénégalais, 5 sont dans des institutions de formation d’enseignants de l’élémentaire et du préscolaire, tandis que les 9 autres forment des professeurs de collège et de lycée. Les 8 formateurs non sénégalais (2 burkinabé, 2 gabonais, 2 ivoiriens, 1 béninois et 1 malien) exercent dans des structures de formation d’enseignants de collège et de lycée. Voici le résumé de leurs réponses. Tous déclarent que les épreuves d’évaluation à l’entrée dans leur Institution de formation d’enseignants cherchent à sélectionner et orienter les candidats les plus aptes à suivre la formation. Ils justifient cela par le fait qu’ils cherchent à identifier des candidats qui ont le niveau et qui sont motivés pour l’enseignement. Sur la conception des épreuves d’évaluation à l’entrée dans leurs institutions, ils s’accordent tous à reconnaître que celles-ci mesurent davantage les

42 Plus d’une soixantaine d’épreuves de différentes disciplines (de l’enseignement général et de l’enseignement technique)

des dix dernières années ont été examinées. Bien que les établissements supérieurs de formation pédagogique, les EFI ou

IPN ne fonctionnent ni recrutent de la même manière (différence de curriculum, différence de procédure de recrutement),

le constat est que toutes ces épreuves ont la même démarche : soit restituer fidèlement des connaissances validées par la

communauté scientifique, soit appliquer une démarche, une règle, un algorithme… (l’énoncé n’est pas « habillé » mais dit

ce qu’il faut appliquer), soit appliquer une démarche, une règle, un algorithme… (l’énoncé est « habillé » mais dit ce qu’il

faut appliquer). Rarement ces épreuves ne proposent une démarche de résolution d’une (ou de plusieurs) famille(s) de

situations problèmes où l’énoncé ne dit pas ce qu’il faut mobiliser.

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acquis des candidats que leurs aptitudes à suivre la formation et cela, pour les raisons suivantes : i) ils sont plus à l’aise pour vérifier leurs connaissances ; ii) ils ne prêtent pas beaucoup attention aux autres critères ; iii) ils déclarent avoir de réelles difficultés pour concevoir des épreuves d’évaluation mesurant effectivement les aptitudes des candidats à suivre la formation. On s’appuie donc sur les niveaux de connaissances dans la matière pour espérer que les candidats retenus réussiront leur parcours professionnel. Sur la question relative au prétest des épreuves, tous disent n’y avoir presque jamais pensé par habitude. Toutefois, ils reconnaissent que c’est une erreur de leur part et que, pour éviter des erreurs préjudiciables aux candidats, le prétest doit être systématisé.

Analyse de l’épreuve d’aptitude technologique

Rappel des objectifs de l’épreuve

Il s’agit d’une épreuve qui vise à apprécier l’aptitude technologique des candidats d’une population tout-venant au concours de recrutement pour la formation de professeurs technologues. L’épreuve comporte une série de 64 items numérotés de 1 à 64. Fréquemment - tel est le cas de cette épreuve – les items sont suivis par un éventail de réponses (4 ou 5 en général) offertes au candidat et entre lesquelles il choisira celle qui lui paraît correcte. Ces propositions comportent des réponses fausses appelées des distracteurs.

Coup d’œil des résultats globaux

Tableau 1

Notes Effectifs Pourcentag

e (%)

Notes Effectifs Pourcentag

e (%)

Note inférieure à 50% des points

7 1 0,93 30 4 3,70

12 2 1,85 31 1 0,93

13 1 0,93 32 2 1,85 Note supérieure à 50% des points

61 : ont une note < 32 47 : ont une note ≥ 32

61 + 47 = 108

14 1 0,93 33 3 2,78

15 1 0,93 34 4 3,70

16 2 1,85 35 4 3,70

17 2 1,85 36 3 2,78

18 3 2,78 37 4 3,70

19 4 3,70 38 5 4,63

20 8 7,41 40 5 4,63

21 2 1,85 41 4 3,70

22 2 1,85 42 4 3,70

23 5 4,63 43 2 1,85

24 4 3,70 44 1 0,93

25 5 4,63 45 1 0,93

26 5 4,63 47 1 0,93

27 4 3,70 48 2 1,85

28 2 1,85 50 1 0,93

29 2 1,85 51 1 0,93

Total 108 100,00

108 candidats ont composé. On se gardera d’émettre tout jugement sur les qualités de cette épreuve avant de s’être livré à une analyse objective des items qui, seule, permettra de proposer un avis fondé. C’est ce travail que nous nous proposons de conduire, après avoir présenté les résultats en fonction des séries de baccalauréat des candidats et compte tenu des niveaux de réussite. Le tableau

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des notes brutes montre que la distribution est d’un type incertain, plus rectangulaire que gaussien. La note maximale possible est 70 et l’étendue des scores est de 44.

Résultats par série de baccalauréat et par niveau d e réussite

Les candidats ont été répartis sur la base des scores bruts en 3 groupes :

- Groupe 1 (quart inférieur : 25%), soit un effectif de 27 candidats (108/4) ; la limite supérieure de cette classe est 21.

- Groupe 2 (zone interquartile : 50%), soit un effectif de 54 apprenants ; elle est délimitée par les valeurs des bornes inférieure et supérieure qui sont respectivement 22 et 37.

- Groupe 3 (quart supérieur : 25%), soit un effectif de 27 candidats ; la limite inférieure de cette classe est 38.

Pour chacun des 3 groupes de séries (littéraires, scientifiques, techniques) les pourcentages attendus et les pourcentages observés de la zone médiane coïncident (tableau n°1). Par contre, en ce qui concerne la distribution dans le quart supérieur, on y rencontre : i) 2 fois plus de candidats des séries F (techniciens) en pourcentages observés qu’en pourcentages attendus ; ii) 2 fois moins d’apprenants des séries C, D et E (scientifiques) en pourcentages observés qu’en pourcentages attendus ; iii) aucun élève en pourcentage observé dans les séries A et B.

Arithmétiquement, on était en droit d’attendre cette distribution de chacun de ces deux groupes. Les candidats des séries F confirment leur supériorité manifeste par leur éclatante absence du quart inférieur de la distribution. Ainsi donc, telle qu’elle est présentement conçue, cette épreuve discrimine beaucoup plus sur la base des connaissances acquises que de « l’aptitude technologique » alléguée.

Analyse des items de l’épreuve

L’analyse à laquelle nous allons maintenant nous livrer va permettre d’établir, pour chaque item, ce que l’on pourrait appeler sa « carte d’identité pédagogique ». La fiche métrologique de chaque item sera constituée par l’énoncé des caractéristiques suivantes : i) la distribution des réponses fournies dans chaque groupe entre les différentes réponses proposées (la bonne et les distracteurs) ; ii) l’indice de difficulté ; iii) l’indice de différenciation.

Nous avons établi l’indice de difficulté pour chacun des items en nous référant au nombre de 27 apprenants par groupe (108 x 0,25 = 27), c’est-à-dire au nombre total de 54 apprenants comme échantillon de référence. Nous avons procédé de la sorte, même quand le nombre observé de réponses correctes et incorrectes était inférieur à ce dernier nombre. Nous avons, en effet, estimé légitime d’assimiler les omissions à des réponses fausses et de les comptabiliser comme telles dans le calcul de l’indice de difficulté. Cet indice de difficulté doit tourner autour de 50%, si l’on veut maximiser la variance inter-sujet (généralement 30-70). L’indice de différenciation (encore appelé indice de discrimination) exprime la différence43 entre le nombre d’apprenants des groupes supérieur et inférieur qui ont trouvé la réponse correcte, rapportée à la différence maximale possible que l’on puisse rencontrer entre ces deux groupes.

Soit l’exemple de l’item 39 de notre épreuve (où D est la réponse correcte). La quasi-totalité des apprenants « forts » a trouvé la réponse correcte D, alors que les réponses des apprenants « faibles » se dispersent de façon aléatoire sur l’ensemble des distracteurs. Le pouvoir discriminatif de cet item est donc fort et il va trouver une expression numérique dans l’indice de différenciation qui s’établit ainsi : Différence observée/Différence maxi. = (24 – 8)/27 = .59. La valeur 27 est, en effet, la différence la plus grande que l’on puisse enregistrer entre les deux groupes quand tous les apprenants « forts » ont trouvé la bonne réponse et aucun des apprenants « faibles ».

Considérons maintenant le cas de l’item 35. La réponse correcte étant ici aussi D, on constate qu’un nombre quasi égal - et d’ailleurs très faible - d’apprenants des deux groupes ont trouvé la réponse correcte ; cet item a donc un pouvoir discriminateur quasi-nul qui va s’exprimer dans un indice de différenciation voisin de 0 ; cet indice est ici de 1/27 = .037. Un item peut être rejeté pour l’une des trois raisons suivantes, celles-ci pouvant d’ailleurs se conjuguer : (a) il est soit trop facile soit trop

43 Faire la distinction entre Différence observée entre le groupe des forts et le groupe des faibles (a) ou entre le groupe des sujets qui ont atteint A et le groupe des sujets qui n’ont pas atteint NA (b), d’une part, Indice de discrimination selon différence observée de type (a) ou (b).

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difficile ; (b) il ne différencie pas les « forts » des « faibles » ; (c) il présente un vice de construction : par exemple l’un des distracteurs n’est jamais choisi ou encore (cas plus grave), les forts choisissent majoritairement le même distracteur. L’examen des résultats de l’épreuve technologique montre que, par rapport :

- à l’indice de difficulté (a) : 18 items peuvent être considérés comme des items difficiles (indice supérieure à .60) ;

- au pouvoir discriminatif (b) D1 : 11 items semblent avoir un pouvoir discriminatif élevé (indice supérieur à .60), tandis que 2 items présenteraient des anomalies dans leur construction (indice discriminatif à valeur négative) ;

- au pouvoir discriminatif (b) D2 : 4 items semblent présenter un pouvoir discriminatif élevé (indice supérieur à .60) et 50 items contiendraient des anomalies dans leur construction (indice discriminatif à valeur négative) ;

- aux anomalies de construction, 14 items présentent des défauts de construction car comportant des distracteurs choisis majoritairement par les apprenants forts.

Conclusion de l’analyse de l’épreuve technologique

Ainsi donc, l’épreuve technologique comporte des items qui paraissent devoir se faufiler entre les mailles serrées de la critique. Certains items pourraient vraisemblablement être améliorés (ceux pour lesquels n’existe aucune réserve à faire sur la valeur des indices ou du mode de construction de l’item) ; pour d’autres, on doit formuler des réserves sérieuses ; quelques rares autres peuvent être jugés acceptables. Sur la base de ces résultats, on peut estimer très faible la validité de l’épreuve technologique. Si elle est censée apprécier l’aptitude technologique chez les candidats d’une population tout-venant - tel est son objectif déclaré et la raison d’être de sa place parmi les épreuves de recrutement - elle semble manquer son objectif. De fait, elle « trie » les candidats essentiellement en fonction des connaissances scolaires acquises. Le seul examen des livrets scolaires ne présenterait-il pas sur elle l’avantage décisif de permettre de faire l’économie de sa passation ?

Analyse de l’épreuve de Français, langue d’enseigne ment

Rappel des objectifs de l’épreuve

L’examen critique auquel nous avons soumis l’épreuve de Français, figurant, aux côtés de l’épreuve technologique, au concours d’entrée en 1ère année de l’Ecole normale supérieure de formation de professeurs technologues, a pour but de permettre de statuer avec objectivité et rigueur sur la qualité métrologique, c’est-à-dire la signification de la notation établie à partir de cette épreuve. L’épreuve est composée de deux sujets de vocabulaire (sujet n°1A et sujet n°1B), d’un sujet de texte lacunaire (suje t n°2) et d’un sujet de compréhension de texte de fac ture classique44 (sujet n°3). La notation de l’épreuve devait donc donner lieu, ici aussi, à une cotation à la fois objective et impartiale ; pour satisfaire cette première exigence, les formateurs ont privilégié la notation dichotomique. Le texte lacunaire paraissait répondre au mieux à cette seconde exigence45 : le niveau déterminé au seuil de l’entrée en formation servirait de référence pour évaluer ultérieurement les éventuels progrès des apprenants professeurs au cours de leur formation. En effet, il est possible, en deçà et au-delà de la « bande de compréhension » des 45%-55% de mots correctement restitués, de ventiler les candidats en trois familles distinctes : la famille des candidats qui n’accèdent pas au sens du texte et dont le niveau de compréhension se révèle insuffisant46 ; ce sont les candidats dont le score est inférieur à 45% de mots restitués (Groupe A) ; la famille des candidats qui dominent nettement le texte : tous ceux dont le score est supérieur à 55% (Groupe B) ; la famille, enfin, de tous les candidats dont le score tombe entre 45% et 55% de bonnes réponses ; ce sont des candidats dont on peut dire que le texte est compréhensible pour eux (Groupe C).

44 Ce texte est extrait de l’ouvrage « Afrique mon Afrique », livre de français pour le Cours Moyen Elémentaire, 1ère année (Les Nouvelles Editions Africaines et Edicef, 1975, Dakar & Paris). 45 A cette condition près, toutefois, que son niveau de difficulté devait être adapté à notre population de candidats ; nous reviendrons plus bas sur le respect de cette condition. 46 Encore une fois, dans l’hypothèse où le niveau de difficulté du texte est bien ajusté à notre population, c’est-à-dire dans l’hypothèse où il se révèle de difficulté moyenne pour elle.

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De la sorte, les concepteurs de l’épreuve de Français pensent pouvoir sérier des niveaux de compréhension de la langue dont la connaissance permettrait aux formateurs de se prononcer, au mieux des intérêts de l’Institution et des intérêts de chacun des candidats, sur les chances qu’aurait chaque candidat de tirer parti d’une formation délivrée en langue française. Tel était l’objectif stratégique majeur et celui qui, selon ses auteurs, doit inspirer les épreuves de langue française figurant dans un concours d’entrée à un établissement de formation.

Distribution des notes de l’épreuve composite de Fr ançais (Vocabulaire + Lacunes + Compréhension texte)

Tableau 2

Notes (x) Effectifs

(y) Notes (x) Effectifs

(y)

47 1 77 5

48 1 80 2

50 1 81 2

55 1 82 1

56 1 83 2

57 2 84 1

58 1 85 3

59 1 87 3

60 1 90 1

61 1 91 1

63 1 92 1

65 1 96 1

67 1 98 1

68 2 104 3

72 1 107 1

73 1 112 1

75 2 Total 49

De fait, cette épreuve, si l’on s’en tient à l’allure de la distribution, paraît parfaitement adaptée à notre population de candidats (Ehich, S. et Flament, C., 1966 ; Blais, J.-G., 2006), : i) la moyenne observée des notes (mo = 76) coïncide presque avec la moyenne théorique47 (mt = 75) ; ii) les données se dispersent de façon suffisamment importante autour du paramètre de tendance centrale (étendue = 65).

47 Avec une distribution normale au seuil de 50% des points.

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Cette épreuve, si l’on s’en tient là, paraît à la fois bien adaptée à la population cible du point de vue des difficultés et susceptible de donner lieu à une discrimination fine des candidats tout au long du champ de variation. Mais « l’habit ne faisant pas le moine », pas plus que la qualité de la distribution d’une épreuve composite, il nous faut délaisser ce niveau global et en revenir à l’examen des sous-distributions dont la distribution ci-dessus n’est que la résultante. Ce n’est qu’alors que nous pourrons émettre un avis fondé sur sa valeur et sa signification réelles.

Analyse des résultats relatifs aux niveaux de diffi culté de l’épreuve de Français

En ce qui concerne les niveaux de difficulté, comme on le constate à partir des moyennes et des dispersions, et sous réserves d’investigations complémentaires :

i) le sujet n°1A (Vocabulaire) est bien adapté à no tre population de candidats (m = 19) et, semble-t-il, suffisamment discriminatoire (étendue = 29 sur 40, soit 72,5% de l’échelle et dispersion assez homogène des données autour de la moyenne) ;

ii) le sujet n°1B (Vocabulaire) est trop facile (mo yenne théorique = 15 et moyenne observée = 19) et peu discriminative (étendue = 13 sur 30, soit 42,5%) ;

iii) le sujet n°2 (Lacunes) est trop facile (moyenn e calculée supérieure à moyenne théorique), mais légèrement plus discriminative que la précédente (étendue = 19 sur 43, soit 44%) ;

iv) le sujet n°3 (Compréhension de texte) est trop difficile (moyenne calculée - 11,99 - très inférieure à la moyenne théorique m = 18,5) ; l’étendue de la distribution (29 sur 37, soit 74%) recouvre presque exclusivement la partie inférieure à la moyenne théorique du continuum de variation.

Ainsi donc, la distribution des notes de l’épreuve composite (Sujet n°1A + Sujet n°1B + Sujet n°2 + Sujet n°3), qui avait si belle allure, est la résul tante de différentes épreuves disparates à la fois quant à leurs niveaux de difficulté et leurs dispersions. En conclusion de cette analyse, nous pouvons dire que sa cohérence s’en trouve fortement altérée48. Ainsi faite de bric et de broc, elle devra être recomposée.

Analyse des résultats relatifs au champ de compréhe nsion de la langue : étendue et bornes

La comparaison des scores aux sujets 2 et 3 est intéressante car, à eux deux, ils paraissent borner, la première, la limite inférieure et la seconde, la limite supérieure du champ de compréhension du français de nos candidats : i) Le sujet lacunaire (sujet n°2), très correctement réussi par l’ensemble des sujets (rappelons qu’un score compris entre 45 et 55% de réussites à une épreuve lacunaire est considéré comme témoignant d’une compréhension satisfaisante du texte), se révèle d’un niveau accessible même aux plus faibles ; mais tout juste accessible aux tout derniers, il constitue bien une borne inférieure ; ii) Le sujet de compréhension (sujet n°3) n’est, lui, accessible qu’aux tout meille urs. Ce résultat est intéressant car il montre combien sont hétérogènes les niveaux de compréhension de la langue française dans notre population de candidats.

Analyse des résultats relatifs au degré de corrélat ion des sujets n°1A et n°3

Etant donné l’étendue réduite des distributions des sujets n°1B et n°2, il serait sans grande signification de les corréler avec les autres données. Par contre, il peut être intéressant d’apprécier la corrélation entre la richesse du vocabulaire et la qualité de la compréhension d’un texte, ce que l’on peut faire en corrélant la distribution des résultats du sujet n°1A à la distribution des résultats du sujet n°3 (même si, redisons-le, ce dernier sujet est peu satisfaisant du fait de son excessive difficulté).

La valeur calculée du coefficient de corrélation (r = 0,59) dépasse la valeur tabulaire critique pour le risque 1% et ddl49 = 45. Il y a donc une liaison très significative entre les résultats aux deux sujets (Tricot., J.-M., Mesbah, M., 2000).

48 A ce niveau d’analyse formelle, on ne peut toutefois pas dire qu’elle en est pour autant ruinée car, nous le montrons plus, loin les épreuves 1A et 3 sont corrélées positivement, et les épreuves 1B et 2, de dispersion voisine, on a à peu près le même poids dans la note finale. Mais encore faudrait-il que ces deux dernières épreuves soient corrélées positivement avec les autres, calcul qu’il était inutile d’entreprendre du fait de leur excessive facilité qui les condamne, de toutes façons, à quitter la batterie de recrutement. 49 Degré de liberté.

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Analyse des résultats relatifs à la détermination d es items discriminatifs du sujet n°1A

Le sujet n°1A paraissant à la fois bien adapté à no tre population de candidats et suffisamment discriminatif, mérite une investigation plus fine. Pour cela, nous l’avons soumise à la « radiographie » que constitue l’application d’une méthode d’analyse des items, par la procédure de détermination de l’intervalle de confiance autour de 50%. Nous avons obtenu la différenciation suivante de nos familles d’items : i) Items d’enquête inférieure : < 18 ; ii) Items d’enquête supérieure : > 31 ; iii) Items centraux : ≥ 18 ≤ 31. Rappelons que seuls les items affectés d’un IDS égal ou supérieur à 0,50 peuvent être considérés comme ayant un pouvoir discriminatif pour différencier les apprenants « forts » des apprenants « faibles ». Les résultats du calcul des IDS montrent que seulement 5 items de différenciation sur 40 ont un IDS égal ou supérieur à 0,50 ; il s’agit de items suivants : i) IDS item 7 = 0,61 ; ii) IDS item 9 = 0,53 ; iii) IDS item 19 = 0,50 ; iv) IDS item 31 = 0,51 ; iv) IDS item 36 = 0,56

Conclusion de l’analyse des items

En définitive, nous sommes en mesure de constater, grâce à l’application de la méthode d’évaluation des items, que :

- 13 items sont difficiles à l’excès (items repérés sous la catégorie des items d’enquête inférieure) : tous les candidats, ou presque, y échouent.

- 11 items sont faciles à l’excès (items repérés sous la catégorie des items d’enquête supérieure) : tous les candidats, ou presque, y réussissent.

- 11 items sont des items chargés d’interaction, c’est-à-dire que les distributions de notes entraînées par ces items ne peuvent donner lieu à un jugement pédagogique cohérent ; en effet, pour chacun d’eux, il y a à peu près autant d’apprenants « forts » qui échouent que d’apprenants « faibles » qui réussissent. Le pouvoir différenciatif de ces items est donc nul et l’on ne peut tirer aucune information pédagogique.

- 5 items seulement présentent la caractéristique essentielle que l’on est en droit d’exiger des items d’une épreuve figurant dans un concours de recrutement de ce niveau : le pouvoir discriminatif. Seuls ces 5 items se révèlent aptes à répartir les candidats en un lot de « forts » et un lot de « faibles ». Ce sont les 5 items dont l’IDS est égal ou supérieur à 0,50.

Etant donné que les autres sujets se sont révélés inadaptés à notre population de candidats, il est inutile de les soumettre à des investigations complémentaires.

Conclusion de l’examen de l’épreuve de Français

Plusieurs informations se dégagent de cette étude. En dépit de sa nouveauté pour les candidats, l’épreuve lacunaire (sujet n°2) est très facilement acceptée. Les niveaux de compréhension du Français (sujet n°3) se révèlent très hétérogènes ; cette hétérogénéité ne facilitera pas le choix d’une épreuve permettant de les sérier aisément : sans doute devra-t-on s’orienter vers une « échelle de textes » de difficultés croissantes balayant le champ qui va du CM2 (fin des études élémentaires) à la Terminale (fin des études secondaires) ?

Conclusion générale

Au départ de l’étude, nous nous sommes posé une série de questions relatives à l’évaluation des acquis des candidats à l’entrée dans les écoles de formation des enseignants (notamment aux épreuves utilisées). Nous avions émis l’hypothèse que ces épreuves – telles qu’elles sont actuellement conçues - ne sont pas en phase avec les objectifs de cette évaluation. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons analysé, à la lumière de la littérature actuelle sur l’évaluation, deux modèles d’épreuves proposées dans une institution de formation d’enseignants, pour repérer les difficultés que pose la construction de ces dites épreuves par rapport aux objectifs poursuivis et tirer des indications pédagogiques susceptibles de les rendre plus adéquates. L’objectif visé par les auteurs de ces modèles d’épreuves était de prédire les probabilités de réussite des candidats dans la formation dispensée dans cette institution. Cette évaluation revêt donc une importance particulière dans la mesure où les résultats de cette évaluation sont une source d’informations devant orienter la prise de décision : il s’agit de fournir une évaluation pédagogiquement et socialement objective sur les candidats les plus aptes à suivre la formation d’enseignants de collège et de lycée technique. Les résultats de cette évaluation, sur lesquels se fonde le jugement d’acceptation ou de rejet du candidat, doivent, pour cela, être fiables, valides et pertinents.

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De l’examen ci-dessus des ces deux épreuves, on est fondé à répondre que les épreuves d’évaluation, telles qu’elles sont actuellement pratiquées, bien qu’elles constituent un des éléments fondamentaux d’aide à la sélection des candidats à la formation de professeur de collège et de lycée technique, confirme notre hypothèse selon laquelle elles ne permettent pas de statuer avec efficacité les probabilités de réussite des intéressés. Parmi les causes de cette situation il y a que ces épreuves – comme toutes les autres – souffrent d’un très important préjudice : l’absence d’un dispositif expérimental soigneusement élaboré qui aurait permis de déterminer les éventuelles corrélations entre les différentes variables. En effet, pour valider le pouvoir prédictif de ces épreuves, le problème est de trouver le seuil (la note) de score global de chaque épreuve qui optimise les conditions suivantes : i) la proportion d’apprenants ayant une note supérieure au seuil et obéissant au critère de prédiction tend vers 1 ; ii) la proportion d’apprenants n’ayant pas une note supérieure au seuil et obéissant au critère de prédiction tend vers 0.

La résolution de ce problème impliquera plusieurs décisions importantes à prendre comme : i) l’identification du critère de prédiction sur lequel on est en mesure de valider l’épreuve de prédiction ; ii) l’identification des items qui seront de bons prédicteurs ; iii) la détermination du seuil choisi, avec chaque épreuve, pour garantir que les candidats retenus seraient ceux qui obéissent au critère de prédiction.

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Amélioration du processus d’enseignement apprentiss age en Economie Familiale Sociale à travers l’utilisation des TIC

Aminata Ka

Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel/UCAD

[email protected]

Résumé :

L’étude a consisté à recueillir les opinions des professeurs afin de mesurer l’effet de l’utilisation de l’internet dans le processus d’Enseignement/Apprentissage(E/A) en Economie Familiale Sociale. Nous avons en l’occurrence, porté un intérêt particulier au milieu d’insertion de ces technologies d’information et de communication en milieu urbain et sub urbain. Un questionnaire destiné aux professeurs d’Economie Familiale et Sociale(EFS) a permis de mesurer l’impact de l’internet sur les apprentissages.

Il s’agit pour nous de vérifier l’hypothèse selon laquelle l’utilisation de l’internet grâce aux TIC est effective dans le processus d’E/A et d’évaluation formative. Elle augmente par ailleurs la qualité et le confort au cours du processus d’appropriation des savoirs et de l’élaboration du matériel didactique nécessaire à la pratique de classe.

Mots clés : TIC; internet ; processus d’E/A; évaluation.

Summary: The aim of our study was to gather input from teachers in order to measure the impact of Internet use in the process of e / a, of Social Family Economics.In our research, we have emphasized on how these information and communication technologies fit in urban and peri-urban areas. A questionnaire designed for teachers of social and family economy (SFE) was used to measure the impact of the Internet on learning.

We want to verify the impact of the use of the Internet through the ICT is effective in the process of e /a ; formative evaluation and final evaluation. We will also see if the ICT increases the quality and comfort during the process of knowledge ownership; development activities and worksheets for SFE teachers.

Keywords: ICT, internet, process e/a; evaluationIntroduction/objet

Introduction

Les Technologies de l'information et de la communication (Tic) sont devenues à l'heure de la mondialisation un des moyens au service de l'apprentissage et de l’enseignement dans le monde éducatif en général et au Sénégal en particulier. Elles définissent un cadre pédagogique rigoureux, susceptible de permettre leur intégration significative dans les établissements scolaires. Son adaptation dans le système éducatif est une action qui nécessite une ingénierie de formation appropriée de l'ensemble des acteurs pouvant contribuer à cette opération. C'est dans ce cadre que l'entreprise d'informatique Microsoft vient d'initier un programme de recherche pour mieux cerner l'utilisation des Tics dans le système éducatif sénégalais afin de faciliter son intégration. Cette initiative, communément appelée Projet de recherche sur l'enseignement et l'apprentissage innovants va s'étaler sur trois ans de (2009 à 2012). Inscrire l'usage des TIC dans une perspective d’amélioration de la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage justifie une telle étude dont l’objet est de recueillir les opinions des professeurs en Economie familiale sociale (EFS) assurant les cours d’Education environnementale (EE), de Santé de la reproduction (SR) et de Nutrition alimentation (N/A). Les stratégies mises en place pour l’atteinte des objectifs demandent des investigations pédagogiques et didactiques appropriées de la part des professeurs et de leurs élèves.

Dans l'optique de progresser aujourd’hui dans un monde compétitif, le système éducatif sénégalais s'est engagé ces dernières années dans une transformation majeure de son organisation et de ses programmes d'étude. A ce titre, beaucoup d'écoles bénéficient d'un espace scolaire pour les TIC.

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L’introduction des TIC dans l’éducation répondrait ainsi á un défi que tente de relever l’état sénégalais. Aussi, il s’avère nécessaire d’identifier les pratiques de terrain et d’analyser leurs impacts sur l’enseignement, et plus particulièrement sur l’EE notre terrain de recherche.

Problématique

L’introduction des TIC dans l’enseignement (de l’élémentaire au supérieur) ne semble reposer sur aucune politique globale, cohérente et préconçue, et encore moins sur une stratégie clairement définie pour leur utilisation judicieuse dans l’optique d’une amélioration de la formation des enseignants, des apprenants et d’une élaboration de contenus et de curricula plus adaptés aux réalités socio-économiques actuelles..

Par ailleurs, dans le cadre du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement économique de l’Afrique), les Tics constituent l’une des priorités confiées au Sénégal ; Ainsi l’Etat du Sénégal dans sa lutte contre la fracture numérique a mis en place des projets numériques dans les établissements scolaires avec comme objectif : la mise à niveau des citoyens à temps réel en ce qui concerne l’acquisition de l’information et du savoir.

Toutefois, nous avons constaté que les professeurs d’EFS utilisent de plus en plus les TIC en particulier l’Internet dans la préparation des fiches pédagogiques en éducation environnementale (EE), en sante de la reproduction (SR) et en Alimentation Nutrition (A/L), pour améliorer non seulement le processus d’apprentissage des élèves, mais également pour inciter les élèves à faire des travaux de recherche sur le Net.

Grâce à cet outil les enseignants enrichissent eux mêmes leur recherche et améliorent ainsi leurs enseignements. L’évaluation formative en est améliorée.

Dans cette présente étude, nous nous sommes intéressées aux professeurs d’EFS pour évaluer l’effet des TIC sur leurs enseignements et leurs opinions sur l’apprentissage des élèves. Les TIC améliorent –ils l’enseignement ? L’amélioration des enseignements facilite-il les processus d’enseignement des professeurs et l’apprentissage des élèves ?

L’éducation environnementale (EE) est une action qui vise non seulement à donner des connaissances dans une perspective environnementale d’améliorer le cadre de vie de l’élève mais aussi à faire changer de comportement et à adopter des attitudes responsables et citoyennes (A Ka.2008).Le contrôle de la validité dans un programme d’EE par rapport aux objectifs d’EE de TBILISSI prend en compte : 1) La prise de conscience ,2) Les connaissances ,3) Les attitudes, 4) Les compétence et enfin, 5) La participation (Tbilissi 1997).

La sante de la reproduction a pour objectif de susciter une prise de conscience des adolescents et de les amener à être responsable de leur vie sexuelle, d’accroître leurs connaissances non seulement dans le domaine de la physiologie, des organes génitaux.

La Nutrition et l’Alimentation (N/A) ont pour objectif de faire prendre conscience à l’adolescent l’importance des aliments pour la sante des individus à tout âge de la vie.

Le professeur doit donner aux élèves les moyens d’acquérir les aptitudes nécessaires à l’investigation, l’évaluation et la prise de décision par rapport aux problèmes environnementaux, sanitaires et alimentaires

L’EE est donc une discipline d’enseignement qui permet d’acquérir une qualité de vie et par delà, une qualité de l’environnement. L’EFS quant à elle, vise le bien être individuel familial et social à travers plusieurs besoins à satisfaire

Ainsi, nous devons faire des élèves, des citoyens préparés aux résolutions des problèmes environnementaux, capables de transférer ces acquis dans des décisions à prendre immédiatement et tout le long de la vie pour un développement durable.

L’évaluation formative et diagnostique devient donc dans le processus d’E/A en EE une phase didactique primordiale pour faire acquérir aux élèves des compétences réelles et durables en EE.

Le processus d’évaluation en EE proposera des activités de résolution de problèmes, de prise de décisions qui mettront en place des stratégies pédagogiques réfléchies, des interactions entre le professeur et ses élèves pour les amener au même niveau de compréhension de la démarche pédagogique. Ce travail préparatoire sera une source de motivation qui permettra aux élèves de visiter les sites web via internet, de travailler en groupe de réflexions .procurant à la classe une

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animation riche en connaissances et en innovations. Ainsi, la résolution de problèmes environnementaux vécus par l’élève dans son contexte et aussi étudiés dans d’autres cadres (hors du contexte.) deviendra une activité enrichissante.

Nos préoccupations de recherche nous amènent à nous poser des questions-problèmes auxquelles nous tenterons de répondre par des investigations au niveau des enseignants de la discipline :

Le programme d’EFS au Sénégal comprenant trois volets : - la santé de la reproduction, l’environnement et la nutrition humaine, parmi ces trois matières enseignées, quelle est celle qui nécessite le plus l’utilisation des Tics pour la recherche par l’internet, au niveau des professeurs ?

Les professeurs emmènent t-ils leurs élèves à consulter les sites internet (web) pour améliorer leurs connaissances? Quel est l’impact de l’utilisation des tics/internet au niveau des acquis des professeurs et de leurs élèves ?

Qui sont ces professeurs qui assurent ces cours en EFS ? Ces professeurs améliorent-ils leurs enseignements par la recherche sur les sites web appropries ? Le processus d’E/A en est-il amélioré ? De l’utilisation des Tics, quels effets l’introduction des tics apportent-ils dans le processus d’E/A et au niveau des élèves? L’estimation du travail des élèves est-elle plus productive?

Ces questions nous tà mettre en place un instrument de recueil d’informations (questionnaire) pour collecter les opinions d’une trentaine de professeurs.

Matériels et méthodes

- Nous avons donc préparé un questionnaire d’enquête pour trente( 30) professeurs (hommes et femmes) exerçant dans les Cem du milieu urbain(15) et suburbain (15) de la ville de Dakar - (CEM de Dakar ville et deux CEM de la banlieue) qui disposent d’une salle d’informatique réservée aux élèves.

L’analyse du questionnaire a donné les résultats suivants ; nous avons pris en compte un certain nombre de variables dont :

-L’âge, le sexe, le milieu d’insertion (urbain et suburbain),le nombre d’années dans la profession, l’utilisation des tics dans le cadre du travail (oui /non),l’existence des Tics (dans l’établissement, à la maison ),faire travailler les élèves par les Tics(oui :non),Amélioration de cours en EE (1 énormément…à..5 pas du tout,), Amélioration des scores des élèves (1 énormément à…5 pas du tout), les thèmes les plus consultés -(Environnement-Sante de la reproduction-Alimentation/Nutrition)

Les logiciels sphinx 2000 et SPSS10.5, ont été utilisés pour le recueil et le calcul des données . Ayant décrit notre échantillon de référence et traité les recherches qui sous tendent nos hypothèses nous pouvons affirmer que l’utilisation des TIC pour la recherche par les professeurs et par les élèves en EE augmente significativement la collaboration entre le professeur et l’élève et relève la qualité de l’enseignement.

Analyse des résultats

Nous présentons dans ce chapitre les résultats de notre enquête sur les opinions des professeurs utilisant l’Internet ; ces résultats recueillis sur le terrain seront ensuite analysés, comparés et discutés..

Caractéristiques générales de l’échantillon

Fig. 1 : Age moyen de la population de référence

40/45 ans 7

45/50 ans 7

21/30 ans 5

30/35 ans 5

35/40ans 4

50ans/et plus 2

Fig. 2 : Milieu d’insertion des enseignants de la population de référence

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51

urbain 10

sub urbain 20

L’âge moyen de notre échantillon est de 40 à 50 ans (46.6%). Le milieu suburbain recueille les 66.7 % contre 33.3 % pour le milieu urbain. Les femmes enseignantes représentent 56.7 %, contre 43.3% d’hommes.

Utilisation des TIC dans le processus d’E/A

Fig. 3 : Utilisation de l’internet /tics dans le processus d’éducation/apprentissage

urbain

sub urbain

au sein de l'etablissement

chez moi(a la maison)

dans un cyber cafe

oui

L’analyse factorielle multiple donne ici une carte avec les 6 modalités, et nous constatons que les enseignants utilisent à 93.3% l’internet pour la recherche sur la toile et pour le processus d’E/A en EFS au sein de l’établissement quelque soit le milieu d’insertion. Donc, l’établissement représente le lieu le plus important pour l’utilisation des tics/ internet pour les enseignants en EFS. Pour le milieu urbain comme pour le milieu sub urbain, 44.8% utilisent les tics au sein de l’établissement (fréquence= 92.9%) et 29.3% chez eux (fréquence = 60.7%). Le cyber est le moins utilise (fréquence =53.6%). Les thèmes les plus visites sont pour 50.9 l’environnement (fréquence de 100%) et pour 29.1 la nutrition et l’alimentation (fréquence de53.6%). Et pour la santé de la reproduction (fréquence de 39.3%).

Fig. 4 : Utilisation des tics par les élèves pour la recherche

2 Non réponse

28 oui

0 nonNon réponse oui non

Les élèves utilisent l’internet pour le travail de recherche et d’information (28 réponses positives).

Fig. 5 : Les thèmes les plus recherchés par les enseignants utilisant les TIC

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52

oui

28

11

16

non2

Non réponse l'environnement

la sante de la reproduction la nutrition/l'alimentation

0

55

La fréquence d’utilisation de l’internet pour les thèmes de l’EFS revient à 55% pour la totalité des enseignants. Les fréquences des thèmes les plus visités sont de 28 fois pour l’environnement, 11 fois pour le thème de la santé de la reproduction et 11 fois pour le thème de l’alimentation et la nutrition.

TICS/Amélioration de l’enseignement en EFS

Fig. 6 : Amélioration de l’enseignement par les enseignants

Nonréponse

2

1 oui1

13

12

2

2 non

Non réponse 1 enormement

2 beaucoup 3 moyennement

4 un peu 5 pas du tout

0

28

Les enseignants qui utilisent l’internet pour leurs recherches pensent qu’une amélioration des enseignements /apprentissage est réelle pour tous les thèmes d’enseignement (énormément pour le thème de l’environnement) et (beaucoup pour le thème de l’alimentation/ nutrition)

Fig. 7 Amélioration des scores /utilisation de l’internet

2 Non réponse

14 oui

14 nonNon réponse enormement beaucoup moyennement un peu pas du tout

Les élèves qui utilisent les TIC pour la recherche améliorent-ils leurs scores en EFS ?

Leurs scores sont bien relevés : – énormément = 43% et beaucoup = 40 %.Nous retenons aussi pour ceux qui ne font point de recherche par l’internet une amélioration relative des scores en EFS.

Fig. 8 : Corrélation entre utilisation de l’internet par les élèves et amélioration des scores

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53

Amelioration des scores des eleves

Numéro de décalage

16

15

14

13

12

11

10

9

8

7

6

5

4

3

2

1

AC

F p

artie

l1,0

,5

0,0

-,5

-1,0

Limites de confiance

Coefficient

utilisez-vous les tics/internet dans le cadre de votre travail d'enseign

Numéro de décalage

16

15

14

13

12

11

10

9

8

7

6

5

4

3

2

1

AC

F p

artie

l

1,0

,5

0,0

-,5

-1,0

Limites de confiance

Coefficient

• L’indice de Pearson, la corrélation de Pearson =0.867, au niveau de 0.001 (test unilatéral)

** La corrélation est significative au niveau 0.01 (unilatéral)

• Le test de corrélation de Wilcoxon nous donne une valeur de 0.204, un indice significatif de Z= - 1,430 ; le croisement entre l’amélioration des scores des élèves grâce à l’utilisation de l’internet par les élèves pour les recherches ayant trait aux thèmes précités. Critère de regroupement : milieu d'insertion atteste de liens significatifs entre les variables précitées

Discussions

Les enseignants que nous avons enquêtés sont environ âgés de 40 à 50 ans. Ils sont issus du milieu suburbain et du milieu urbain. Nous avons recueilli les opinions auprès de 17 femmes et 13 hommes qui s’intéressent à la recherche pédagogique par l’internet, certains, grâce à l’installation des tics dans leur établissement respectif. Quelque soit le milieu d’insertion, l’intérêt est effectif (93.3%) et certains possèdent l’outil informatique à domicile (28.3%). Le cybercafé reste le dernier recours (25%). Le milieu d’insertion des TIC : urbain comme suburbain, n’est pas un facteur qui empêche les enseignants à utiliser l’informatique.

Nous constatons que l’utilisation des TIC (96.6 %), est un fait réel dans l’enseignement quelque soit la discipline d’enseignement en EFS (éducation environnementale, nutrition / alimentation ou santé de la reproduction). Les thèmes les plus visités sont : l’environnement pour 49.1%, la nutrition et l’alimentation pour 28.1% et enfin la santé de la reproduction pour 19.32%.

Les enseignants déclarent augmenter que len niveau de performances en matière d’enseignement et surtout de recherche ont augmenté (93.3% de réponses positives).

L’enseignement des différentes matières apportent beaucoup de satisfactions aussi bien aux enseignants qu’aux élèves. (43,03% pour la modalité –énormément- et 40% pour – beaucoup-)

L’internet devient de nos jours, un outil incontournable pour l’enseignement, surtout face au manque de supports didactiques dans les établissements du Sénégal.

Cependant, le quota horaire semble insuffisant relativement (deux heures par semaine) pour l’EFS. Face aux effectifs pléthoriques (plus de 52 élèves par classe), l’internet devient un outil indispensable d’aide pédagogique non seulement pour le professeur, mais aussi pour l’élève en cours d’apprentissage.

Conclusion

L’étude que nous avons menée dans le système éducatif Sénégalais auprès des enseignants d’EFS (Economie Familiale Sociale) des milieux urbain et suburbain de la région de Dakar, nous a démontré, sans nul doute que l’utilisation de l’internet par les enseignants dans le processus d’E/A apporte des réponses significatives (indice de Pearson = 0,867(**) ; la corrélation reste significative au niveau 0.01 (unilatéral) dans le cadre de l’enseignement des différents thèmes de l’EFS.

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Notre échantillon, s’il est reporté à toute la population d’enseignants en EFS, donnerait des satisfactions dans le processus d’E/A en EFS, car, les 93.3 % des professeurs ont répondu « oui »concernant l’amélioration de leur travail d’enseignement

L’utilisation des TIC améliore en effet le processus d’apprentissage en EFS (46.7%)

Nous pensons que l’utilisation des tics doit faire partie des activités pédagogiques voire didactiques non seulement des élèves mais aussi des enseignants. Ainsi, la qualité de l’enseignement de l’EFS en serait améliorée, la motivation des élèves grandirait, de même que l’intérêt des élèves et des enseignants pour les différents thèmes.

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Femmes africaines et accès a la formation: peut-on affirmer que l’accès a la formation peut améliorer la réussite professionnelle des femm es transformatrices des produits

agroalimentaires ?

Mme Maty Dia Diallo

Ecole Normale Supérieure d’Enseignement Technique et Professionnel/UCAD

[email protected]

Résumé

L’article traduit les résultats d’une enquête sur la problématique de l’accès à la formation et au système moderne de communication (Internet, téléphone portable…) des femmes transformatrices de produits agroalimentaires (fruits et légumes, produits halieutiques…). L’objectif principal de cette étude est de vérifier si l’accès à la formation et au système moderne de communication peut améliorer la réussite professionnelle des femmes transformatrices de produits agroalimentaires. Pour vérifier cette hypothèse, l’étude a été menée auprès de femmes de la sous-région (Burkina Faso, Mali, Sénégal) évoluant dans le secteur de l’agroalimentaire.

Au Sénégal, les femmes se sont progressivement constituées en diverses formes associatives, notamment des Groupements de promotion féminine (GPF), groupements d'Intérêt Économique (GIE)…L`objectif de ces organisations est de bénéficier des programmes de renforcement de capacité et de subvention provenant de l`Etat, des ONG et des partenaires au développement. Ce qui fait que la transformation agroalimentaire est devenue un secteur privilégié d’activités des femmes : elle occupe un rôle central en tant que pourvoyeur d’emplois, de revenus et de sécurité alimentaire.

L’étude s’appuie sur deux approches complémentaires : une approche conceptuelle et une approche qualitative. L`enquête qualitative a été réalisée lors de la Foire Internationale de l’Agriculture et des Ressources Animales (FIARA) organisée à Dakar et qui a enregistré la présence de femmes venant de différents pays de la sous région (Burkina Faso, Mali, Sénégal). Les résultats montrent que les femmes transformatrices rencontrent des difficultés majeures en ce qui concerne l’entreprenariat. Cela s’explique par le manque de formation adéquate et d’accès à un système fiable de communication comme le téléphone ou Internet. Pour s’informer, les femmes utilisent le plus souvent comme système de communication le « bouche à oreille », car, disent-elles, celui-ci n’est pas coûteux et est plus rapide. Il se pose tout de même le problème de la fiabilité des informations collectées suivant cette voie et sa limitation aux seules femmes présentes aux rencontres.

Selon l’étude, si la ressource monétaire est encore considérée comme un levier indispensable pour la diminution de la pauvreté, la majorité des personnes interrogées ne semblent pas comprendre que la formation et la communication soient des éléments importants dans le combat contre la pauvreté. Une enquête sur une échelle plus large en cours permettra de vérifier s’il existe des relations significatives entre la formation, les systèmes de communication utilisés et la réussite de ces femmes.

Mots clés

Femmes transformatrices, formation, système de communication, réussite.

Abstract

This article chronicles the findings of a study on women working in the agricultural and fish products processing business and their access to formal training and modern communication tools, such as the Internet, cellular phones, etc. The purpose of this study is to look at how formal training and access to modern communication tools can translate into more professional success for these women. The study focused specifically on women working in the agribusiness sector in the West African subregion, i.e. in countries like Burkina Faso, Mali and Senegal. In Senegal, women have found over the years various ways to join forces, through associations such as the “Groupements de promotion feminine” (GPF), women's advancement and development groups, and “Groupements d'intérêt économique” (GIE), co-operatives. These associations and groups heavily rely on government subsidies and funding from NGOs and other development partners. As a result, food and agricultural product processing has become a top economic sector for women, a real job creator, revenue generator and provider of food security.

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This study draws on two complementary approaches, i.e. conceptual and qualitative. The qualitative aspect of the study was conducted during the International Agriculture and Livestock Fair (FIARA, in french) that took place in Dakar in 2008 and saw the participation of women from various West African countries, such as Burkina Faso, Mali and Senegal. The findings show that women in food and agricultural processing face major difficulties when it comes to entrepreneurship. This is due to their lack of formal training and access to reliable communication tools such as the phone and the Internet. These women currently use "word of mouth" as their communication system, especially because they believe it is not costly and is faster. The problem with that type of communication is that the information collected may not always be reliable. Only those directly involved, or present at meetings, are well informed. The study found that having monetary resources is still considered the only way out of poverty. Most of the people interviewed for the study did not seem to understand how crucial formal training and communication are in the fight against poverty. A more comprehensive study is being conducted to ascertain the relationships between formal training, the communication systems used by these women and how successful they are.

Keywords

Women, food and agricultural processing, formal training, communication, success

Introduction

En Afrique de l’Ouest, les femmes, aussi bien du milieu rural que du milieu urbain, font face aux impacts de la restructuration économique et politique internationale en développant des stratégies associatives de type économique pour aider à la survie de leurs familles et améliorer leurs conditions de vie. En milieu urbain, ce phénomène entraîne des changements sociaux, notamment en ce qui a trait aux hiérarchies sociales et familiales, aux rôles sociaux du genre et aux pratiques associatives (Vimard, 1997 ; Leloup et Ryckmans, 1997 ; Sarr, 1998).

Fatou Sarr (1998), dans son ouvrage « L'entrepreneuriat féminin au Sénégal : la transformation des rapports de pouvoir », montre que les femmes du milieu urbain sont au cœur d'une dynamique de changement social : d'une part, la structure familiale est en mutation (les femmes négocient de nouveaux espaces de pouvoir et de liberté par rapport à leur rôle traditionnel), d'autre part, elles se retrouvent dans des situations de plus grande précarité économique, notamment à cause des politiques macro-économiques défavorables tels que les Programmes d'Ajustements Structurels (PAS). Cette situation a amené les femmes à trouver des moyens novateurs pour assurer leur subsistance et celle de leurs familles ; elles investissent des secteurs de l'économie informelle, notamment avec l'aide de microsystèmes d'épargne et de crédit. Pour cela, elles s’appuient sur les réseaux traditionnels de solidarité pour répondre à leurs nouveaux besoins sociaux et monétaires.

Dans les pays de la sous région (Burkina Faso, Mali, Sénégal), l’implication des femmes dans le développement économique, en milieu rural comme urbain, existe depuis longtemps et se fait essentiellement de deux manières: individuellement et collectivement. Depuis des dizaines d’années, les femmes de ces pays se sont progressivement constituées en diverses formes associatives, notamment des Groupements de promotion féminine (GPF), groupements d'Intérêt Économique (GIE)…L`objectif de ces organisations est de bénéficier des programmes de renforcement de capacité, de subvention et d`encadrement provenant de l`Etat, des ONG et des partenaires au développement.

La transformation agroalimentaire constitue un secteur privilégié d’activités de ces femmes. Elle occupe un rôle central en termes d’emplois, de revenus et de sécurité alimentaire. Selon une étude de Enda, quatre vingt dix pour cent (90%) des produits transformés vendus sur les marchés urbains proviendraient de ce secteur (Enda graf, 2004). Malgré ces efforts, on constate encore que la femme africaine en général peine toujours à réussir dans l’entreprenariat. Diverses raisons sont avancées par ces femmes pour expliquer l’absence de réussite dans leur entreprise. Parmi celles-ci, il y a le manque de formation et le déficit de communication sur les possibilités d`accès aux sources de financement…

Dès lors, nous nous sommes posé plusieurs questions :

- Les femmes souffrent-elles d'un manque de formation adaptée à leurs besoins?

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- S`agit-il d'un déficit de système de communication leur permettant d`accéder à des informations utiles ?

- Quels liens entre les trois facteurs (Formation, Système de communication utilisé et réussite professionnelle) qui expliqueraient cette situation dans laquelle pataugent encore ces femmes ?

- Quelles actions sont susceptibles de les tirer d’affaire ?....

Autant de questions qui méritent d’être élucidées. C’est dans cette perspective que nous inscrivons la présente étude.

Hypothèses

Pour répondre à ces interrogations, nous émettons les hypothèses suivantes :

1) Les femmes souffrent d'un manque de formation appropriée à leurs besoins.

2) Le système de communication utilisé par les femmes transformatrices de produits agroalimentaires ne leur permet pas d`accéder à des informations utiles.

3) Il existe un lien entre les trois facteurs (la formation reçue, le système de communication utilisé et la réussite) qui explique la situation des femmes transformatrices de produits agroalimentaires.

Méthodologie

Pour vérifier ces hypothèses, nous avons privilégié deux approches complémentaires : une approche conceptuelle qui permet de saisir le sens des différents concepts utilisés et une approche qualitative qui nous permettra de donner un aperçu du comportement et des perceptions des femmes transformatrices interrogées et d'étudier leurs opinions sur le sujet. Une enquête a été réalisée lors de la Foire Internationale de l’Agriculture et des Ressources Animales (FIARA) organisée à Dakar en 2008 et qui a enregistré la présence de femmes venant de nombreux pays de la sous région. Nous présentons ci-dessous une synthèse des résultats de cette enquête qui a combiné les deux approches.

Résultats et Discussion

L’enquête concerne 30 femmes présentes à la FIARA ainsi réparties du point de vue du type d’organisation qu’elles représentent (Tableau n°1).

Tableau n°1 : Type d’organisation des femmes enquêt ées

Type d’organisation Effectif

Familial 7

GIE 8

Associatif 15

Total 30

Nous nous sommes intéressés à la provenance des femmes enquêtées (tableau n°2).

Tableau n°2 : Pays de provenance des femmes enquêté es

Pays de provenance Effectif

Mali 6

Burkina Faso 4

Sénégal 20

Total 30

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Le croisement des deux tableaux nous ont permis d`identifier les types d`organisations par rapport aux pays de provenance (Tableau n° 3

Tableau n° 3 : Type d'organisation * Pays de proven ance

Pays de provenance Total

Mali Burkina Faso Sénégal

Type d'organisation

Familial 6 0 1 7

GIE 0 4 4 8

Associatif 0 0 15 15

Total 6 4 20 30

L’exploitation des réponses à la question sur les systèmes de communication les plus utilisés pour accéder aux informations concernant leurs activités montre que la majorité des femmes enquêtées (90%) déclarent qu’elles communiquent le plus souvent entre elles, à l’intérieur d’une même structure, grâce au « bouche à oreille ». Le téléphone et les SMS sont utilisés mais très rarement. Pourtant certaines de ces femmes reconnaissent que d’autres moyens comme le téléphone ou Internet pourraient faciliter l’accès à un éventail plus large d’informations que le « bouche à oreille », notamment sur le marché de l’agroalimentaire ou sur les opportunités de commerce…

Lorsqu’il s’agit d’échanges d’informations entre structures membres d’une même fédération, outre le « bouche à oreille » utilisé par 60% des femmes, les convocations écrites et le téléphone sont aussi privilégiées. Avec les partenaires au développement, c’est le téléphone qui constitue le moyen le plus privilégié 70% des cas ; il y a aussi le courrier électronique par 10% des enquêtées et les radios locales prisées par les femmes provenant des régions de l`intérieur des pays comme, Lamp fall FM au Sénégal, radio Ségou, radio Kaïra au Mali, etc.

Ce qui est corroboré par l`étude de la Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED, 1999). Selon cette étude les principaux obstacles au développement des activités agroalimentaires dans la sous région concernent, entre autres, l’accès à l'information sur les opportunités commerciales et sur les réseaux de commerce. Le rapport 2008 de la CNUCED sur l'économie de l'information démontre comment les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) peuvent faire émerger des innovations pour l'amélioration des conditions de vie des populations à bas revenus et pour la compétitivité des entreprises.

Le recours de plus en plus fréquent aux TIC a fait naître et se développer de nouveaux concepts comme celui de l’économie du savoir. L’enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS, 2005/2006), menée par l’Agence Nationale des Statistiques et de la Démographie (ANSD), a mesuré l’accès aux TIC à travers les services accessibles par le biais d’un cybercafé (lieu dans lequel on propose aux personnes l'accés à Internet), en particulier le téléphone et l’Internet. Selon les résultats de cette enquête, peu de résidents ont facilement accès à un cybercafé : seuls 38,8% des ménages peuvent utiliser les services d’un cybercafé à moins d’une demi-heure de leur domicile, dont 27,5% font moins d’un quart d’heure. La situation est très différente d’un milieu à l’autre : près de neuf ménages dakarois sur dix (89,8%) peuvent accéder à un cybercafé en moins d’une demi-heure de son domicile. Selon les mêmes sources cette proportion tombe de façon drastique à 58% dans les autres villes et à 5,6% en milieu rural où neuf ménages sur dix ne peuvent utiliser les services d’un cybercafé qu’après une marche d’une heure ou plus. Ces défavorisés dans l’accès aux TIC sont rares en ville (2,6% à Dakar et 14,5% dans les autres villes). Ces résultats peuvent mettre à l’ordre du jour la question du développement des femmes entrepreneurs du milieu rural.

Les femmes interrogées ont en général un niveau d’alphabétisation très faible : seulement le tiers avait dépassé le niveau élémentaire. Les rares femmes qui s`expriment en français sont celles qui représentent régulièrement leurs organisations dans les formations. Les autres femmes analphabètes bénéficient des compétences acquises par leurs représentantes à ces formations grâce à des dispositifs de démultiplication. En effet des séances de restitution des formations reçues animées par les représentantes sont organisées

Les femmes enquêtées jugent les formations reçues très faibles du fait de la courte durée des actions de formation dont elles ont bénéficiées (2 à 5 jours) ; ce qui ne les offre pas le temps nécessaire pour

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l’assimilation des savoirs (qualités exigées pour les produits…) et savoir faire (Techniques de transformation des produits…) enseignés. Ces femmes déplorent aussi l’utilisation de la langue française étant donné qu’elles sont majoritairement analphabètes (70% des femmes enquêtées) et l’absence de dispositif de suivi, c’est-à-dire d’accompagnement dont elles souhaitent bénéficier après les formations….

Les femmes ayant répondu à notre enquête déplorent également l’absence dans les formations reçues jusqu’ici, de modules importants pour elles comme les règles de gestion et les exigences de la conduite d'une entreprise. Selon ces femmes, ce déficit de formation se traduit, par exemple, dans l'établissement de dossiers de crédits souvent rejetés car peu bancables. Les idées de projet ne manquent pas, elles sont mêmes porteuses de créativité mais la difficulté majeure semble résider dans leur incapacité à les traduire dans un langage économique fiable et compréhensible de tous.

Toutes les femmes enquêtées reconnaissent aussi que l’accès aux savoir-faire techniques permettant d’exercer les métiers de la transformation alimentaire aurait été facilité si elles bénéficiaient toutes de formation aux savoirs de base (lire, écrire, compter), c’est-à-dire d’un programme d’alphabétisation fonctionnelle. D’après ces femmes, l’accès à ces savoirs de base serait un atout déterminant pour le développement et la diversification de leurs activités et compétences.

Selon Broutin et Rouyat (2004), le secteur de la transformation des produits alimentaires se caractérise par le nombre important d’analphabètes travaillant à titre individuel ou dans les unités de transformation où l’on note un nombre élevé de femmes. En effet, d’après les chiffres de la Direction de la Statistique et de la Prévision, le taux d’analphabètes au Sénégal était, à la date du recensement de la population de 1988, de 68,5% dont 51,1% chez les hommes et 77,1% chez les femmes (Sarr, 2007). D’après le « Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté » du Sénégal (2001), la supériorité de l'analphabétisme est plus marquée chez les femmes que chez les hommes. En effet, s'il concerne globalement plus de 50% de la population sénégalaise, les femmes affichent un taux de 70% contre 48% pour les hommes. Cette quasi-absence de formation handicape doublement les femmes dans l'accès au crédit et dans la conduite de leurs entreprises.

Par ailleurs, sur l’ensemble des ménages enquêtés lors du Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS, 2005/2006) réalisé par l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie, près de 35,3% estiment que le meilleur moyen de combattre la pauvreté c’est de « promouvoir les activités génératrices de revenus ». Cela veut dire en clair, que la ressource monétaire ou l’argent tout court, préoccupe plus les populations qui la considèrent, par dessus tout, comme le levier indispensable à actionner pour réduire la pauvreté. Aucune personne enquêtée n’a fait cas de la facilité d’accès à la formation de la femme dans le processus du combat contre la pauvreté.

Il semble ainsi exister, pour ces femmes enquêtées, un lien significatif entre la formation reçue et la réussite professionnelle des femmes transformatrices. Même si l’échantillon ne permet pas de faire une vérification statistique de cette hypothèse, on note que la première tendance, qui découle du croisement des données recueillies, indique que 68,5% des femmes qui ont bénéficié de formation déclarent réussir leurs entreprises (contre 31,5%). Les femmes qui disent connaître des difficultés dans le développement de leur entreprise l’impute toutes à l’absence (ou à l’insuffisance) de formation qui leur aurait permis de renforcer leurs capacités techniques et managériales.

Il est aussi ressorti des résultats que des femmes n’ayant pas bénéficié de formation estiment aussi avoir réussi dans leurs activités professionnelles. Ces femmes expliquent cette réussite essentiellement par le fait qu’elles arrivent à faire face à certains besoins primaires comme payer la nourriture quotidienne et les habits pour leurs familles. C’est plus une question de survie, rectifient ces femmes qu’une véritable réussite qui aurait favorisé le développement de leur entreprise. Ce qui est loin d’être le cas.

Ces deux tendances nous ont fait pousser notre recherche sur ce qu’est la réussite pour les femmes transformatrices. La majorité des femmes (65%) qui ont répondu à notre enquête pensent avoir réussi professionnellement dès lors qu’elles arrivent à subvenir aux besoins de leur famille. Voici quelques témoignages :

- Femme n°1 : « Nous avons réussi parce que pour les fêtes notre responsable nous distribue de l’argent pour payer les habits des membres de la famille et améliorer les repas».

- Femme n°2 : « J’ai réussi parce que j’arrive à sub venir aux besoins de ma famille ».

- Femmes n°3 : « J’ai réussi car j’arrive à régler me s problèmes familiaux ».

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- Femmes n°4 Nous pouvons dire que nous avons réussi car notre famille a de moins en moins de difficultés pour vivre, après tout nous arrivons à améliorer le budget familial. Si nous nous décarcassons c’est pour notre famille. Nous pouvons habiller les enfants en période de fête ou à la rentrée des classes et même souvent nos maris peuvent bénéficier de cadeaux.

C’est donc dire que pour les femmes transformatrices enquêtées, la réussite professionnelle se réduit à une « réussite de subsistance » alors qu’il devrait en être autrement.

Ces réponses nous montrent à quel point les femmes se préoccupent de leur famille, aussi bien des enfants que du mari. Lorsqu’elles disent «Si nous nous décarcassons c’est pour notre famille. » cela signifie, en fait que ce qu’elles gagnent est d’abord orienté vers la satisfaction des besoins quotidiens immédiats de leur progéniture comme disait (LECARME 1992). Une partie des réponses rejoint ce que disaient C. Rondeau et H. Bouchard dans leur étude sur « Commerçantes et épouses à Dakar et Bamako ». Il est inconcevable pour les femmes de laisser les enfants dans le besoin, la priorité de la femme vise avant tout à satisfaire les besoins alimentaires de ces derniers ensuite il faut aussi les habiller.

Conclusion

Au regard des hypothèses que nous avons formulées au départ de l’étude, les résultats révèlent que :

i) le temps accordé (3 à 5 jours) à la formation des femmes est insuffisante ;

ii) la langue utilisée durant la formation et le manque de suivi ne permettent aux femmes de prétendre à une réussite professionnelle ;

iii) le système de communication le plus utilisé par les femmes transformatrices de produits agroalimentaires reste le « bouche à oreille ». Ce mode de communication ne saurait leur permettre un accès plus facile et plus large à des informations utiles au développement de leur entreprise.

Bibliographie

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11 ans après : Impacts des mesures relatives aux ét udiants a la fst (ucad) dans le cadre de la reforme de 1994

Bamba Déthialaw Dieng

Faculté des Sciences et Technologies de l’Education et de la Formation (ex E N S)

[email protected]

Résumé

La fin du deuxième millénaire voit grandir l’intérêt pour les questions relatives à l’éducation et à la formation en général et celles portant sur l’université en particulier, même au sein d’institutions fortement marquées par leurs conceptions économico-financières du développement (Banque Mondiale, FMI, et autres bailleurs de fonds). Cette situation découle de la crise que connaît l’université aussi bien dans les pays riches que dans les pays pauvres, bien qu’elle reste plus marquée dans ces derniers. Entre autres mesures correctives, la sélection à l’entrée a été retenue dans beaucoup d’universités dont l’UCAD. Nous nous sommes intéressé dans cette recherche au modèle de sélection adopté pour la Faculté des Sciences et Techniques (FST). Une étude-bilan couvrant 18 années à été menée dans une perspective comparative. L’évolution des indicateurs macroscopiques relatifs aux objectifs visés par la réforme avant et après son instauration a été observée. L’analyse de la croissance des effectifs, les fluctuations des taux de réussite, l’évaluation des budgets et la durée des temps de transit des étudiants sur une cohorte de 892 sujets ayant été suivie sur quatre années nous a permis de faire un principal constat : la réforme de 1994 n’a pas permis d’améliorer la situation.

Ce constat entrouvre des pistes de recherche à partir d’un large questionnement.

Mots clés

Evaluation – Orientation – Prédiction –Sélection – Université.

Abstract

The end of the second millennium sees interest on question about education and training in general and university in particular grows even within institutions strongly marked by their financial and economic conceptions of development (World Bank, IMF, and others Backers). This situation follows from the crisis that university knows as well in rich countries as in poor countries although it remains more marked in the latters. In fact, it results from transformations of missions of university, scarcity of their means, increase of their expenses bay way of the massification (quantitative and qualitative) of its numbers, weakness of its efficiency in internal as external level. Among other corrective measures, the selection at the entrance has been adopted by a lot of universities among them the UCAD is. The author is interested in this research in the model of selection adopted for the Faculty of Science and Techniques (FST). A study-balance sheet covering 18 years through the study, in a comparative perspective, evolutions of the macroscopic indicators relative to the objectives aimed by the reform before and after its institution was made: workforce, rates of success, the budgets and time of transit of the students by the follow-up, over 4 years, of a troop of 892 subjects. The main report is that the reform of 1994 did not allow improving the situation.

This report half-opens research tracks which the author formulates in an large questioning.

Key words

Assessment - Guidance - Prediction-Selection - University

Introduction et problématique

Au début des années 1960, nombre d’Etats africains, nouvellement indépendants, ont fait de l’éducation des masses et la formation des ressources humaines (cadres) nécessaires à l’édification de la Nation une de leurs priorités. Dès 1963, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) formulait des recommandations allant dans ce sens lors de son premier sommet tenu à Addis-Abeba (25 mai 1963). Cette préoccupation a été opérationnalisée de différentes manières et, pour les anciennes colonies françaises d’Afrique, elle a fait l’objet de Lois d’Orientation de l’Éducation.

Fortement inspiré du modèle français (fondé, entre autres, sur les Lois Jules Ferry), les systèmes éducatifs des anciennes colonies françaises se voulaient gratuits et ouverts à tous, sans distinction.

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L’Etat prenait en charge les élèves issus de milieux défavorisés par souci d’équité sociale (Dieng, Sall & De Ketele, 2002 ; Dieng, 2000 ; Sall & De Ketele, 1997 ; Sall, 1996). Cette conception a, naturellement, concerné l’universitéi. Elle était (et le reste dans nombre de cas) le principal débouché des jeunes qui ont fini (avec succès) leurs études secondairesii.

Les options politiques d’alors étaient influencées à divers degrés par le modèle socialiste (régime du Parti – État, collectivisation des ressources nationales, État – providence, planification de l’économie, etc.). L’université dépendait totalement de l’État. Elle n’était pas à l’abri des crises et soubresauts affectant l’État qui en était (et continue d’être) le pouvoir organisateur (Dieng, 2007).

Les années 1970 entraînent un nouveau contexte économique et sociopolitique. Les déséquilibres économiques croissants débouchent sur l’adoption, au début des années 80, des politiques d’ajustement structurel qui ont eu pour conséquences, entre autres, une diminution, pour l'université, des ressources effectives ramenées par étudiant dans les « pays les moins développés », particulièrement en Afrique sub-saharienne (UNESCO, 1998-a ; Banque Mondiale, 1994). Cependant, dans le contexte général de rareté des ressources, les Etats consentent d’importants efforts (Rasera, Jarousse & Noumon, 2005 ; Niane, 2000 ; MEN, 1997).

La crise économique a de lourdes conséquences sur les Universités francophones d’Afrique sub-saharienne qui font face à des crises dont les manifestations peuvent être appréhendées à travers plusieurs axes (Dieng, Sall & De Ketele, 2002 ; Dieng, 2000 ; Niane, 2000 ; ADEA 1999 ; Assie-Lumumba, 1995 ; Sall, 1981).

Trois axes semblent être particulièrement mis en exergue : la massificationiii des effectifs au fil des années notamment dans les premiers cycles (UNESCO, 1998-b), les taux élevés d'échec aux examens (Dieng, 2007 et 2000 ; Sall, 1996 ; Assie-Lumumba, 1995) et, ce qui pourrait-être un corolaire, l’instabilité du climat social marqué, entre autres mais principalement, par des grèves et révoltes estudiantines souvent violentes (Dieng, 2007 et 2000, Dieng, Sall & De Ketele, 2002). Dans le cas particulier de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), le mode d’accès à l’université a été alors indexé comme une des causes des dysfonctionnements : certains étudiants ne seraient pas à leur place (Niang, 1994).

L’idée de l’instauration de procédures systématiques de sélection à l’entrée à l’université a alors refait jour (Dieng, 2007 et 2000 ; Romainville, 1997). Plusieurs expériences ont ainsi été tentées depuis le début des années 1990. Toutefois, le constat, fait aussi par la Banque Mondiale (1992), est qu’il n’y a pas d'études scientifiques pouvant les justifier objectivement, encore moins de dispositif de suivi/évaluation.

Une Concertation sur l'Enseignement Supérieur au Sénégal (tenue en 1993) recommandait, entre autres, la réduction des effectifs par un ensemble de mesures (Dieng 2007 et 2000 ; Dieng, Sall & De Ketele, 2002) dont :

♦ la diminution des flux entrants par la fixation de sortes de numerus clausus ;

♦ l'augmentation des flux sortants par la limitation du nombre de redoublements possibles ;

♦ la sélection à l'entrée pour ne retenir que "les postulants ayant le plus de chance de réussite".

La sélection à l'entrée pourrait être justifiée par les résultats sensiblement meilleurs dans les filières professionnelles, écoles, instituts et facultés qui procèdent à une sélection soit par tests soit sur dossier. Cependant, la part d'autres facteurs (structurels comme processuels) susceptibles d’intervenir dans les performances n’est pas pris en compte (Parmentier, 1996, 1994-a et b)iv. Dans ces conditions, il nous semble utile d’étudier l’impact du système de sélection mis en place à la Faculté des Sciences et Techniques (FST) à partir de 1994.

L’objectif général du présent article est de rendre compte des premiers résultats d’une étude-bilan sur le système de sélection mis en œuvre à la FST de l’UCAD. Nous avons voulu faire le point sur le degré d’atteinte ou non des objectifs visés par la réforme de 1994.

Méthodologie

Au plan méthodologique, nous avons étudié, dans une perspective comparative, l’évolution des indicateurs macroscopiques relatifs aux objectifs visés par la réforme avant et après son instauration : les effectifs, les taux de réussite, les budgets et les temps de transit des étudiants. Notre recherche porte sur des données couvrant 18 années académiques : de 1986/1987 à 2004/2005 et sur les trois

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sections de la FST : Mathématiques et Physique (MP), Physique et Chimie (PC) et Sciences Naturelles (SN). Pour les besoins de l’étude des temps de transit, une cohorte, composée de 892 étudiants dont 128 en 1ère année de Mathématiques et Physique (MP1), 450 en 1ère année de Physique et Chimie (PC1) et 314 en 1ère année de Sciences Naturelles (SN1), a été suivie pour la période allant des années académiques 2001/2002 à 2004/2005, soit pour la durée maximale théorique autorisée dans le 1er Cycle. Ces temps de transit ont été comparés à ceux concernant la cohorte 1986/1987.

Présentation des résultats

A la lecture des analyses faites par les autorités rectorales de la crise qui a été à l’origine de l’instauration de la sélection à l’entrée à la FST de l’UCAD, nous constatons qu’un accent particulier est mis sur la massification des effectifs et la raréfaction des ressources pour expliquer cette situation de crise. Les autres dimensions (dégradation de la qualité de l’enseignement et des apprentissages, la baisse de la qualité et du nombre d’activités de recherche menées, etc.) ne semblent être que des corolaires (Niang, 1994). Ainsi, l’essentiel de la stratégie de la réforme a été bâti autour de la maîtrise des effectifs qui doivent être conformes à la capacité (physique) d’accueil de l’UCAD. Cette maîtrise des effectifs devait passer par une diminution des temps de transit et une limitation des entrées. Avec ces mesures, il était attendu une amélioration sensible des résultats des étudiants aux examens et une allocation plus optimale des ressources. Nous avons donc retenu, pour faire le bilan de la réforme de 1994, d’étudier l’évolution des indicateurs que sont les effectifs, les pourcentages de réussite, les budgets et dépenses par étudiant et les temps de transit.

Les effectifs

L’analyse de l’évolution des effectifs avant et après la réforme montre que si ces derniers ont connu une baisse dans les premières années d’application de la réforme, ils ont recommencé à croître en FST. Au niveau global de l’UCAD, ils seraient à un niveau trois fois plus important que celui visé par la réforme. Le tableau 1 résume l’essentiel de ces évolutions.

Tableau 1 : Évolution des effectifs de l’UCAD de 19 86/87 à 2004/05

Période

Évolution des effectifs

Effectif initial Effectif final Variation globale Moyenne

annuelle de variation

1986/87-1993/94 14 136 23 046 +8 910 +1 114

1993/94-1995/96 23 046 20 828 -2 218 -1 109

1996/97-1999/00 23 660 23 664 Stabilité Stabilité

1999/00-2004/05 23 664 48 066 +24 402 +4 881

Les pourcentages de réussite

Les pourcentages de réussite connaissent dans l’ensemble une amélioration mais restent encore faibles. Au niveau de la FST, les pourcentages globaux de réussite en première année n’atteignent pas 40% sauf en 2000/2001. Trois grandes périodes peuvent être dégagées :

o de 1990/91 à 1993/94, où on observe une diminution des pourcentages de réussite ;

o de 1994/95 à 2001/02, période pendant laquelle on observe une hausse par rapport à la période précédente, sans toutefois qu’une tendance générale ne se maintienne ;

o de 2001/02 à 2003/04, période durant laquelle une tendance monotone croissante est notée, avec un accroissement plus important du pourcentage netv.

Le tableau 2 résume les évolutions des pourcentages nets et bruts de réussite en première année à la FST, toutes générations confondues, de 1990/91 à 2003/04.

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Tableau 2 : Évolution des pourcentages nets et brut s de réussite vi en première année à la FST de 1990/1991 à 2003/2004

Année Pourcentage net de réussite Pourcentage brut de réussite

1990/91 26.31% 12.07%

1991/92 18.04% 8.48%

1992/93 19.41% 8.46%

1993/94vii - -

1994/95 21.35% 10.97%

1995/96 33.93% 17.46%

1996/97 28.97% 13.08%

1997/98 31.56% 14.63%

1998/99 33.17% 14.31%

1999/00 27.89% 11.85%

2000/01 42.70% 15.42%

2001/02 36.62% 12.21%

2002/03 38.83% 14.50%

2003/04 45.61% 17.76%

Une analyse selon les filières montre quelques disparités, même si dans les différentes sections les tendances épousent celles observées au niveau global. Les différences observées portent sur les aspects qualitatifs.

En MP1, les mêmes trois grandes périodes peuvent être dégagées. Toutefois, sur la période 1994/95 à 1999/00, les pourcentages de réussite bruts comme nets observés restent inférieurs à ceux observés avant la réforme, excepté pour l’année 1992/93. Depuis l’année académique 2000/01, les valeurs des pourcentages nets de réussite restent proches de la barre des 50% et la dépasse même parfois (cf. Figure 1).

Figure 1 : Évolution des pourcentages bruts et nets de réussite en MP1 de 1990/91 à 2003/04

En PC1, les tendances observées au niveau global se retrouvent ici aussi. De plus, toutes les valeurs observées après la réforme sont supérieures à celles observées avant. Mais, aucune d’elles n’atteint 40% (cf. Figure 2).

Figure 2 : Évolution des pourcentages bruts et nets de réussite en PC1 de 1990/91 à 2003/04

En SN1, les mêmes tendances globales sont notées. A deux exceptions, on note une amélioration des résultats après la réforme. Depuis l’année académique 1999/00, la tendance reste

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globalement monotone croissante avec un léger fléchissement en 2002/03. En 2001/02 et 2002/03, les pourcentages nets de réussite ont été très proches de 50% et cette valeur a été dépassée en 2003/04 (cf. Figure 3).

Figure 3 : Évolution des pourcentages bruts et nets de réussite en SN1 de 1990/91 à 2003/04

Les budgets

A première vue, l’analyse de l’évolution des budgets montre que leurs montants augmentent chaque année avec des temps de quasi-stagnation. Toutefois, les montants bruts ne permettent pas de comparer, en toute rigueur, deux budgets. Il y a lieu de tenir compte des nécessaires réajustements économiques pour pouvoir faire des comparaisons valides des budgets d'une année à l'autre. En effet, il est difficile de comparer les dépenses sans tenir compte de l'évolution des prix et de la monnaie ; en d'autres termes de l'évolution du coût de la vie. Si nous prenons l'exemple des années 1993 et 1995, il faudrait pouvoir apprécier l'effet de la dévaluation de la monnaie sénégalaise (le Franc CFA) survenue au courant du mois de janvier de l'année 1994, surtout si l’on considère la forte dépendance de l’université vis-à-vis de l’extérieur (produits, matériels et équipements de laboratoire, revues spécialisées, etc. sont importés et ne sont pas considérés comme des produits de consommation courante). Il aurait fallu pouvoir disposer des montants des budgets en "francs constants"viii d'une année qui serait prise comme année de référence.

En outre, le problème de la nature des dépenses se pose aussi (Banque Mondiale, 1994). Le montant du budget de l'université peut augmenter sans que cela ne se traduise par une amélioration directe des conditions d'étude et de vie des étudiants. C'est le cas des augmentations de certaines rubriques budgétaires comme les « dépenses du personnel ». Il conviendrait alors de revoir la base de calcul des dépenses par étudiant en ne tenant compte que des dépenses qui le concernent directement.

En fait, les ressources de l’UCAD, comparativement à ses besoins, diminuent du fait de l’augmentation des effectifs, du renchérissement des coûts des intrants pédagogiques et de la complexité croissante de ces derniers.

En définitive, l’on pourrait retenir que, au plan budgétaire en valeurs absolues, les ressources de l’UCAD varient en dents de scie avec une tendance à la baisse depuis la réforme de 1994 (cf. Figure 4). La diminution des dépenses par étudiantix ne traduit pas une meilleure allocation des ressources ou une meilleure efficience du fait que les arbitrages budgétaires ne tiennent pas toujours compte des actions les plus « coûts-efficaces » mais sont "rendus en fonction du caractère plus ou moins incompressible [et/ou sensible] des dépenses (items prioritaires des budgets, les salaires par exemple)" (Rasera J.B., Jarousse J.P. & Noumon C.R., 2005 : 128) et des rapports des forces syndicales et corporatistes.

Figure 4 : Evolution des dépenses par étudiant (FCF A)

Par exemple, "l'Université Cheikh Anta Diop consacre chaque année cinq fois plus à l'achat de médicaments pour les étudiants et leur famille [étudiants mariés] qu'à l'achat de livres ou de revues pour sa bibliothèque." (Banque Mondiale, 1994 : 20). La bibliothèque ne "reçoit que 0,6% du budget total de l'université, alors que la norme internationale est de 5%" (Banque Mondiale, 1992 : iii). Pour l'année académique 1999-2000, un tiers (1/3) du budget de l’UCAD était destiné aux œuvres universitaires et deux tiers (2/3) aux aspects pédagogiques et administratifs dont 85% pour les salaires (Diagne, 2000).

Les temps de transit

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Concernant les temps de transit, pour ce qui est du Diplôme Universitaire d’Etudes Scientifiques (DUES)x, la réforme ne semble pas avoir entraîné d’améliorations sensibles. Comparée à celle de la cohorte de 1986/1987 (Sall, 1996), la situation semble même s’être détériorée dans les sections MP et PC comme le montre le tableau 3.

Tableau 3 : Évolution des temps de transit entre le s cohortes 2001/2002 et 1986/1987

Cohorte 2001/2002 Cohorte 1986/1987

FST : 10,83 années-étudiant 12,49 années-étudiant

MP : 4,88 années-étudiant 4,74 années-étudiant

PC : 16,69 années-étudiant 11,11 années-étudiant

SN : 11,06 années-étudiant 11,96 années-étudiant

En résumé, nous notons les quatre enseignements suivants :

1. L’analyse de l’évolution des effectifs avant et après la réforme montre que si ces derniers ont connu une baisse dans les premières années d’application de la réforme, ils ont recommencé à croître en FST. A l’échelle globale de l’UCAD, ils seraient, en 2006-2007, à un niveau trois fois plus important que celui visé par la réforme.

2. Sur la période étudiée, les taux de réussite connaissent dans l’ensemble une amélioration mais restent encore faibles. Au niveau de la FST, les taux globaux de réussite n’atteignent qu’une seule fois 40%. Une analyse selon les filières montre quelques disparités.

3. L’analyse de l’évolution des budgets montre que même si leurs montants augmentent chaque année avec des temps de quasi-stagnation, les ressources de l’UCAD, comparativement à ses besoins, diminuent du fait de l’augmentation des effectifs, du renchérissement des coûts des intrants pédagogiques et de la complexité croissante de ces derniers.

4. Concernant les temps de transit, pour ce qui est du DUES, la réforme ne semble pas avoir entraîné d’amélioration. La situation semble même s’être détériorée pour la section PC.

Discussions des résultats, implications et perspect ives

Discussion des résultats

La principale raison avancée pour expliquer la non atteinte des objectifs de la réforme de 1994 est la non application effective des mesures qui la sous-tendent, notamment la sélection à l’entrée, depuis l’année académique 2000-2001. En effet, en dehors de la FMPOS, les autres facultés admettent systématiquement tous les postulants, pour peu qu’ils aient le baccalauréat dans une série d’étude « compatible » avec les enseignements dispensés dans la faculté choisie. Ainsi, on peut comprendre la brusque augmentation des effectifs depuis cette période, avec comme corolaire, une diminution relative des ressources de l’UCAD. Seulement, c’est aussi sur cette période que l’on enregistre les meilleurs pourcentages de réussite tant bruts que nets. De plus, les temps de transit sur cette période ne diffèrent guère de ceux d’avant la réforme : à la limite, il y a même une dégradation pour la section PC.

Les résultats précédents pourraient se justifier pour au moins six raisons qui tiennent, pour les trois premières, à la pertinence (Dieng, Sall & De Ketele, 2002 ; Dieng, 2000 ; Sall, 1996) des critères retenus, la quatrième à leur validité (Dieng, Sall & De Ketele, 2002 ; Dieng, 2000), la cinquième à la non-prise en compte des dynamiques et processus propres aux études universitaires (Dieng, 2007) et la sixième à l’acceptabilité sociale de cette procédure (Romainville, 1997 ; Sall & De Ketele, 1997 ; Sall, 1996).

Plusieurs études montrent que bien qu'il y ait un lien entre la « maîtrise des prérequis dans les dominantes » et la « réussite à l'université », les corrélations sont très faibles (Romainville, 1997). Or, en ne considérant que deux disciplines – pour Mathématiques et Physiques (MP) et Physique et Chimie (PC) – ou trois – pour Sciences Naturelles (SN) –, les responsables de la Faculté des

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Sciences et Techniques partent de l'idée que la « maîtrise des prérequis dans les dominantes est un facteur déterminant de la réussite à l'universit é »." Implicitement, c’est comme si l’étudiant devrait, pour réussir dans les études supérieures, disposer d’un capital culturel suffisant.

Tableau 4 : Récapitulation de quelques résultats ma rquants

Auteurs Mesures effectuées Résultats obtenus

Lindblom-Ylänne & al. (1996)

Prédicteurs de la réussite d'un premier cycle d'études médicales.

Le meilleur prédicteur de la réussite d'un premier cycle d'études médicales consiste, non pas en des tests de préacquis spécifiques sur des matières (physique, chimie et biologie), mais en une épreuve de compréhension à la lecture et d'élaboration d'une synthèse d'un texte d'intérêt général.

Boxus (1993)

Résultats des étudiants à un test sur des prérequis vus dans l'enseignement secondaire et réussite en première année ingénieur agronome.

Corrélation de 0,47

R² = 0,22

Soit 22% de variance commune.

Chadran (1987) Capacité des étudiants en raisonnement formel et réussite en Faculté des Sciences.

Corrélation de 0,40

R² = 0,16

Soit 16% de variance commune.

De Ketele (1995, 1990 et 1983)

Capacités cognitives de base et réussite à l’université

Les capacités cognitives de base ne participent que pour 25% dans l'explication de la réussite à l'université.

Source : Romainville, 1997 (pour les trois premiers auteurs).

Ces résultats peuvent se comprendre du fait que les exigences du travail universitaire (cours magistraux, travaux pratiques et dirigés, prise de notes, recherche bibliographique, synthèse, annotations, etc.) exigent une bonne maîtrise de la langue de travail et des compétences que les matières de base et les méthodes utilisées pour leur enseignement dans le secondaire n'installent pas toujours.

Les scores considérées dans le modèle actuel de sélection proviennent d'évaluations faites dans des situations très différentes tant au plan matériel, environnemental qu'humain. Or, toute évaluation comporte des biais entraînant des variations de notes qui peuvent se situer dans des écarts pas toujours soupçonnés (Pelpel, 1986 cité par Ndoye, 1997 ; Bonniol, 1972 cité par Ndoye, 1997 ; Laugier & Weinberg, 1936 cité par Ndoye, 1997). De plus, en situation réelle, les épreuves aussi ne sont pas les mêmes et les enseignants ne "conjuguent pas l'évaluation en paradigmes" (De Ketele, 1993) tous de la même manière, c’est à dire qu’ils ont des conceptions assez différentes de l’évaluation pour entraîner des attitudes différentes face à elle. 150 enseignants, de qualifications équivalentes, exerçant tous au même niveau (troisième) ayant corrigé trois copies de mathématiques d’élèves de ce niveau traitant toutes du même sujet aboutissent à des notes présentées dans le tableau 5.

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Tableau 5 : Moyennes obtenues par trois devoirs de mathématiques de niveau troisième et notés par 150 évaluateurs et les marges de variatio n des notes.

Devoir Moyenne Marge de variation

Élève I (très bon) 16,00 11,50 – 20

Élève II (médiocre) 8,00 3,50 – 11,50

Élève III (faible) 5,70 0,50 – 11,50

Source : Pelpel, 1986 in Ndoye, 1997 : 11.

Les trois élèves peuvent se retrouver avec la même note (11,50/20) – ce qui, au passage, rejoint le problème de la sensibilité – du simple fait que les copies auraient été corrigées par des correcteurs différents, alors que le premier est « très bon », le deuxième « médiocre » et le troisième « faible ».

En adoptant le système de sélection actuellement en cours, la FST décide de travailler avec des données sur la constitution desquelles elle n’a aucune maîtrise ; une relative exception pouvant être faite pour celles issues du baccalauréat. En effet, la tentation pourrait être grande, pour de multiples raisons (par exemple la renommée de son établissement, le fait de savoir que ces notes seront utilisées pour évaluer ses diplômés, etc.), de voir un enseignant (ou son administration lui demander de) donner des notes de complaisance à ses élèves. Ce qui rend encore plus complexe et délicat l'utilisation de ces notes pour la sélection. En tant que variables, ces notes seraient dans la catégorie des variables invoquées (Van Der Maren, 1996).

Les notes sont contestées en tant que mesures exactes des compétences et comme outils prédictifs (Cardinet, 1992 ; Leclercq, Hubert & Denis, 1997). En fait, l'existence de multiples formes d'évaluation tant dans leurs fonctions que dans les modes d'organisation entraîne des conceptions divergentes et l'attribution de valeurs différentes à l’évaluation. De plus, les notes restent des indicateurs fortement agrégés et ne permettent pas de savoir, avec assez d’exactitude ce sur quoi l’évaluation a porté ni les "compétences" réellement actualisées (Dieng, 2007).

En général, l'évaluation d’un apprentissage, ne prend en compte qu’une partie souvent très infime de l’ensemble des possibilités de la personne. De ce fait, ses potentialités d’évolution sont ignorées si les notes sont utilisées comme prédicteurs. « Tout se passerait donc avant », dénotant ainsi une conception behavioriste de l’apprentissage qui est très commode pour rejeter la responsabilité sur les cycles d’enseignement antérieurs. D’une autre manière, c’est aussi une forme de référence à la théorie du capital culturel. Le constructivisme met en défaut cette vision en ce sens qu’il postule le principe de la construction de la connaissance et qu’il tient compte aussi des processus mentaux qui sont mis en jeu dans l’apprentissage. En outre, il faut aussi tenir compte de l’absence de consensus sur le contenu du concept de compétence (Lô, 1999 ; Romainville, 1996) et ses modalités d’actualisation et d’évaluation.

En accord avec Romainville (1997), nous relèverons la nécessité, pour toute caractéristique retenue comme critère de sélection d’être socialement acceptable. Les nombreuses tentatives de remise en cause du système de sélection et sa non-application effective depuis l’année académique 2000-2001 pourraient présager d’un phénomène de rejet social de la sélection à l’entrée à l’université au Sénégalxi. Quelle que soit sa philosophie (Dieng, 2000), la sélection doit être fondée sur l’égalité des chances de réussite entre les candidats. C'est-à-dire qu'il ne doit pas y avoir de différenciations autre que les compétences qui sont censées être mesurées. Or, dans la procédure de sélection mise en œuvre à la FST de l'UCAD, les indicateurs pris en compte (les notes) peuvent être souvent fortement déterminées par des facteurs liés à des dysfonctionnements du système lui même : différences de réussite scolaire selon l’origine sociale (Molinari, 1992 ; Boxus, 1993 cité par Romainville 1997 ; Sall, 1996 et 1997, Leclercq & al., 1998), l’expérience scolaire subiexii (effets maîtres, effets classes, effets écoles, etc.), l'âge, le genre, etc. (Romainville, 1997). S’il en était ainsi, l’université ne risque-t-elle pas d’exacerber la « fonction de reproduction sociale » (Bourdieu & Passeron, 1983 et 1964) que jouerait l’école et qui est en contradiction avec sa vocation ? En effet, si la mission première de l’école est la sociabilisation de l’individu, elle doit aussi contribuer à l’égalisation des chancesxiii en permettant la

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promotion sociale de tous et de chacun. En cela, elle doit contribuer à asseoir l’équité sociale (Sall & De Ketele, 1997 ; Sall, 1996).

Implications et perspectives

Pour conclure cette étude-bilan, nous pouvons retenir que la sélection à l’entrée n’a pas permis d’améliorer de manière sensible les indicateurs relatifs aux étudiants. Il conviendrait donc de voir si le modèle de sélection permet une bonne prédiction de la réussite des étudiants en première génération.

Au plan empirique et méthodologique, il conviendrait, tenant compte des difficultés rencontrées pour constituer les bases de données sur lesquelles nous avons fondé nos analyses et du caractère lacunaire des archives aussi bien à la FST qu’au niveau plus général de l’UCAD, de relativiser la portée des valeurs numériques trouvées. Toutefois, les disparités observées entre les différentes sections ainsi que les fluctuations notées dans l’évolution des taux de réussite laissent penser qu’il faudrait accorder plus d’attention à cette question.

Ainsi, même si la sélection à l’entrée à l’université est remise en cause, la nécessité d’une maîtrise suffisante des déterminants de la réussite dans les Universités, notamment pour les étudiants primants, doit faire l’objet d’une attention particulière. Dans le cas spécifique de l’admission à l’université, elle devrait se faire sur la base "d'une vision claire du profil d'entrée" (De Ketele, 1997 : 17) qui ne saurait être "le simple fruit d'une spéculation" (De Ketele, 1997 : 17) mais devrait être fondée sur une série d'observations et "validée par une analyse statistique régulièrement mise à jour" (De Ketele, 1997 : 17). En effet, il n’est pas possible d’envisager de laisser « aller vers l’échec » des nombres de plus en plus importants d’étudiants du fait des coûts (psychologiques, humains, sociaux, économiques, etc.) énormes et des séquelles de l’échec scolaire (Delors, 1996) même si une année universitaire non couronnée de succès pourrait ne pas être nécessairement une année perdue (De Kerchove & Lambert, 1996 ; Legendre, 1993).

Dans cette perspective, plusieurs pistes peuvent-être explorées : Quelle est la validité du système de sélection en cours ? Faut-il envisager la modification de l’assiette de critères retenus ? Dans ce cas, faut-il l’élargir à d’autres caractéristiques d’entrée ? Faut-il envisager une autre logique de sélection ? Faut-il sélectionner, orienter et/ou guider ? Etc.

Poser la question de la validité d’un système de sélection revient, entre autres, à étudier les erreurs de prédiction commises du fait de critères trop ou pas assez sélectifs (Henry, 1990). Deux sortes d'erreurs semblent être consubstantiellement liées à tout processus de sélection à l’entrée à l’université. En effet, il est possible de refuser l'accès à l'université à des étudiants qui pourtant auraient réussi – erreur de type 1 – ou accepter des étudiants qui vont échouer – erreur de type 2 – (Debry, Leclercq & Boxus, 1998 : 58), chacune d’elle étant néfaste pour le système. Il convient donc de chercher à neutraliser ces deux types d’erreurs. Seulement, il apparaît un lien très étroit entre eux du fait que les deux ne peuvent être réduits autant que l'on veut simultanément. L’on pourrait donc avancer que « la fonction faisant intervenir ces deux types d’err eurs serait supérieure à une constante. Si l’une des erreurs diminue, l’autre au gmente dans des proportions précises pour compenser la diminution de la première. La constant e dépendrait des facteurs prédictifs retenus et du groupe sur lequel porte la sélection. »xiv (Dieng, 2007). L’enjeu majeur ne pourrait-il pas alors consister à identifier la (les) combinaison(s) de critères qui optimise(nt) la « constante » ? En ce sens, la prise en charge de cet enjeu (majeur) ne va-t-il pas entrainer la modification de l’assiette de critères retenus. La réponse à ces questions serait très certainement affirmative.

Par suite, et tenant compte de certaines des six (06) observations faites ci-avant, ne serait-il pas logique d’opter pour : i) une révision de la pondération des différents critères retenus actuellement ? ii) une réduction de l’assiette aux résultats au baccalauréat du fait des multiples incertitudes sur les notes issues des évaluations faites au lycéexv ? iii) une intégration dans l’assiette d’autres notes relatives à des matières autres que les dominantes ? iv) la prise en compte d’autres caractéristiques liées au vécu scolaire et/ou pré-universitaire ? Seulement, plusieurs travaux (Dieng, 2007)xvi présagent des limites de ces options. En d’autres termes, se pose la question de la pertinence d’un système de sélection à l’entrée. En fait, il semblerait qu’il ne suffise pas de :

• prendre en considération comme prédicteurs uniquement des variables liées au vécu scolaire et/ou pré-universitaire. Ne faudrait-il pas, alors, prendre en considération des variables liées au vécu universitaire qui, au-delà des considérations académiques, engloberaient des dimensions sociologique, économique, psychologique, etc. (Sall, 1997 ; Parmentier, 1994-a) ?

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• rechercher une causalité directe et univoque entre les caractéristiques des étudiants et leurs performances universitaires. Ne faudrait-il pas envisager une approche moins linéaire et plus systémique, contextuelle et conditionnelle pour avoir des modèles présentant une cohérence interne suffisante et expliquant, avec le moins d'erreurs possible, les évolutions (Dieng, 2007).

En définitive, la question centrale se ramenait à : faut-il sélectionner, orienter et/ou guider ?

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i Au Sénégal, la dernière loi d’orientation votée est la Loi 91-22 du 16 février 1991. Elle définit les finalités de

l’Éducation Nationale, ses principes généraux, ainsi que ses niveaux, structures et objectifs généraux. Elle

assigne à l’Enseignement Supérieur Sénégalais une mission première d’enseignement et de formation. Il doit, à

l’instar de l’école dans son ensemble, contribuer aussi à égaliser les chances de réussite sociale et à former les

cadres dont le pays a besoin pour son développement.

ii Dans toutes les anciennes colonies françaises, il s’agit des élèves qui ont réussi à l’examen final de fin du

secondaire : le baccalauréat. C’est un examen national organisé par une structure officielle spécialisée (l’Office

du Baccalauréat au Sénégal).

iii L’idée de massification renvoie tantôt à l’augmentation des effectifs qui ne s’accompagne pas d’une

augmentation des capacités d’accueil, tantôt à la diversification des origines sociales des étudiants. Dans le

premier cas, nous parlerons de massification quantitative et dans le second cas de massification qualitative.

iv C'est un cas typique d’attributions causales erronées (Leyens & Yzerbyt, 1997).

v Cette situation serait révélatrice d’un taux élevé d’absence aux examens, voir d’abandon des études.

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vi Les pourcentages nets de réussite sont calculés en rapportant le nombre d’étudiants ayant été déclarés admis

au nombre d’étudiants présents à l’examen tandis que les pourcentages bruts sont calculés en rapportant le

nombre d’étudiants ayant été déclarés admis à celui des inscrits.

vii L’année académique 1993/94 avait été invalidée. Une année invalidée est comptabilisée comme un

redoublement suite à une année normale. Seulement, lors d'une année invalidée, il n'y a pas d'évaluation des

étudiants. Il convient de la différencier d’une année blanche qui correspond à un redoublement général mais

non comptabilisé dans le cursus académique de l'étudiant.

viii Le fait de rapporter les montants des budgets de différentes années à une année de référence permet de voir

ce que chaque budget aurait permis de faire si il avait était utilisé en l'année de référence. On parle alors de

Parité de Pouvoir d’Achat (PPA).

ix Le choix de mettre la lette « P » dans la désignation des périodes budgétaires est motivé par des commodités

d’utilisation des logiciels de traitements. Ce choix permet aussi de traduire la nature exacte de la variable

« période budgétaire ».

x Le DUES, diplôme de fin de premier cycle, sanctionne les deux premières années d’études universitaires

scientifiques.

xi En réalité, toutes les universités publiques sénégalaises déclarent procéder à une sélection à l’entrée sur la

base des performances réalisées dans études secondaires et à l’examen du baccalauréat. Pour certaines

filières, des tests ou concours d’entrée sont organisés.

xii Nous avons choisi ici l’expression « expérience scolaire subie » pour montrer que l’apprenant n’est en rien

responsable et n’aurait que très peu de moyen d’intervenir sur les difficultés et/ou opportunités liées à

l’enseignant, la classe, l’école, etc. qui sont quasiment toujours choisis à son insu.

xiii L'Article 5 de la Loi d'Orientation de l'Education Nationale (Loi 91-22 du 16 février 1991) dit que :

"L'Education nationale est démocratique : elle donne à tous des chances égales de réussite. Elle s'inspire du

droit reconnu à tout être humain de recevoir l'instruction et la formation correspondant à ses aptitudes, sans

discrimination de sexe, d'origine sociale, de race, d'ethnie, de religion ou de nationalité."

xiv Dans cette formulation, nous nous sommes inspiré du « principe d'incertitude de Heisenberg », très connu

des physiciens et chimistes. Il établit l'impossibilité de déterminer, simultanément et avec autant de précision

que l'on veut, la vitesse et la position d'une particule en mouvement dans l'espace. En termes mathématiques,

il établit que, pour une particule en mouvement, le produit de la variation de sa position par celle de sa

quantité de mouvement est toujours supérieur à la constante de Planck.

xv Comme c’est le cas actuellement à la Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odonto-Stomatologie (FMPSO)

de l’UCAD.

xvi Plusieurs études, partant du fait que les prédictions à l’entrée à l’université concernent des processus

complexes (Frenay, Noel, Parmentier & Romainville, 1998 ; Leclercq & al., 1998 ; Romainville, 1997 ; Rosenthal

& Jacobson, 1997 ; Van Der Marren, 1996 ; Windorf, 1995 ; Duru-Bellat, 1994 et 1989 ; De Peretti, 1993 ;

Lerbet, 1993 ; De Ketele, 1990 ; Henry, 1990 ; Dupont & Ossandon, 1986 ; Albertini, 1985) et des variabilités

contextuelles des déterminants de l'efficacité d’une action éducative (Dieng, 2000 ; Sall, 1997 ; Banque

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laissent sceptique sur la faisabilité, de manière satisfaisante, d’une sélection à l’entrée à l’Université.