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Les fruitssont indispensables à notre santé. Dotés d'une teneur en eau de 75 à 95 %, très peu caloriques, pauvres en protéines et matières grasses, ils sont d'un grand intérêt nutritionnel. Consommés entiers, ilsse comportent comme un sucre lent car ils associent glucides et fibres, évitant une montée violente du taux desucre. C'est pour- quoi il est pluquilibrant et plus ras- sasiant decroquer prunes, nectarines ou pastèques que de se contenter de leur jus. De plus, riches en anti-oxy- dants, pourvus desucre naturel non transformé, ils sont une bonne sour- ce devitamines, d'oligo-éléments et minéraux. Ltude française Suvimax (SUppléments en VItamines et Miné- raux AntioXydants), menée sur 13 000 individus de 1995 à 2003, a ainsi éta- bli que leur consommation assidue prévient des maladies cardio-vascu- laires, de l'obésité, decancers. Si, de nos jours, les résultats de cette étude semblent exagérés quant à la préven- tion des cancers, la consommation de fruits demeure un plusen matière de santé. Leslogan du Plan National Nutri- tionSanté(PNNS) "Mangez 5 fruits et légumes parjour" le confirme àcha- que réclame publicitaire. À condition de favoriserdes produitssainssil'on ne veut pas obtenir le contraire de l'effet escompté. Des vergers intoxiqués Quand on entend que plus d'une ving- taine de traitements chimiques s'abat- tent,enmoyenne, sur une pomme pro- duite de manière intensive, ne doit-on pas s'inquiéter? Comme le rapporte le MDRGF (Mouvement pour le droit et le respect des générations futures), suite à uneenquête menée par PAN-Europe et Milieudefensie (Pays-Bas), en 2007, 8 fruits (fraises, abricots, oranges, pom- mes, poires et 3 sortes de raisins) de pro- venances diverses (Belgique, Espagne, Italie, France, Égypte) ont étéanalysés pour évaluer leur teneur en résidus de pesticides. Résultats : toutaient conta- minés ! 14 pesticides différents rien que pour les fraises! Parmi eux, on a retrou- Abricot • Brugnon • Cassis • Cerise • Figue • Fraise . ~E.\.O~ Framboise • Groseille • MeLon . • Mûre • Myrtille • Nectarine Pastèque • Pêche • Poire • Pomme • Prune Abricot • Cassis • Cerise • Figue • Fraise • Framboise • Groseille. MeLon • Mirabelle • Mûre • Myrtille • Nectarine • Pêche • Poire • Pomme • Prune • Pruneau Figue • Framboise • MeLon • Mirabelle • Mûre 1 Myrtille· Pêche· Poire • . Pomme. Prune· Pruneau • Raisin

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Les fruits sont indispensables à notresanté. Dotés d'une teneur en eau de 75à 95 %, très peu caloriques, pauvresen protéines et matières grasses, ilssont d'un grand intérêt nutritionnel.Consommés entiers, ils se comportentcomme un sucre lent car ils associentglucides et fibres, évitant une montéeviolente du taux de sucre. C'est pour-quoi il est plus équilibrant et plus ras-sasiant de croquer prunes, nectarinesou pastèques que de se contenter deleur jus. De plus, riches en anti-oxy-dants, pourvus de sucre naturel nontransformé, ils sont une bonne sour-ce de vitamines, d'oligo-éléments etminéraux. L'étude française Suvimax(SUppléments en VItamines et Miné-raux AntioXydants), menée sur 13 000individus de 1995 à 2003, a ainsi éta-bli que leur consommation assidueprévient des maladies cardio-vascu-laires, de l'obésité, de cancers. Si, denos jours, les résultats de cette étudesemblent exagérés quant à la préven-tion des cancers, la consommation defruits demeure un plus en matière de

santé. Le slogan du Plan National Nutri-tion Santé (PNNS) "Mangez 5 fruits etlégumes par jour" le confirme à cha-que réclame publicitaire. À conditionde favoriser des produits sains si l'on neveut pas obtenir le contraire de l'effetescompté.

Des vergersintoxiqués

Quand on entend que plus d'une ving-taine de traitements chimiques s'abat-tent, en moyenne, sur une pomme pro-duite de manière intensive, ne doit-onpas s'inquiéter? Comme le rapporte leMDRGF (Mouvement pour le droit etle respect des générations futures), suiteà une enquête menée par PAN-Europeet Milieudefensie (Pays-Bas), en 2007,8 fruits (fraises, abricots, oranges, pom-mes, poires et 3 sortes de raisins) de pro-venances diverses (Belgique, Espagne,Italie, France, Égypte) ont été analyséspour évaluer leur teneur en résidus depesticides. Résultats : tous étaient conta-minés ! 14 pesticides différents rien quepour les fraises! Parmi eux, on a retrou-

Abricot • Brugnon • Cassis• Cerise • Figue • Fraise • . ~E.\.O~Framboise • Groseille • MeLon .• Mûre • Myrtille • Nectarine •Pastèque • Pêche • Poire •Pomme • Prune

Abricot • Cassis • Cerise• Figue • Fraise • Framboise• Groseille. MeLon• Mirabelle • Mûre • Myrtille• Nectarine • Pêche • Poire• Pomme • Prune • Pruneau

Figue • Framboise • MeLon• Mirabelle • Mûre •

1 Myrtille· Pêche· Poire • .Pomme. Prune·Pruneau • Raisin

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"C'est une aberration de voir

que des variétés de pommes,

comme la Star Fruit,sont plan-

tées partout dans le monde".

Raphaël Colicci, arboricul-teur bio dans l'Hérault

vé 10 cancérigènes connus, 3 neurotoxi-ques, 3 toxiques pour le développementou le système reproducteur et 8 pertur-bateurs endocriniens suspectés. Abri-cots, raisins et oranges contenaient destraces au-delà de la Limite Maximaleen Résidus (LMR), seuil légal à ne pasdépasser. Ces analyses corroborent lesenquêtes annuelles menées au niveaude l'Union Européenne affirmant qu'enFrance 48 % des aliments contiennentdes pesticides dont 4 % dépassent lesLMR. Course au rendement, visionde la fertilité à court terme, lobbyingde l'agrochimie expliquent, en partie,la main-mise des intrants de synthèsesur l'arboricul-ture convention-nelle. Mais aussila sélection desvariétés. Com-me s'en émeutRaphaël Colicci,oléiculteur bioà Saint-Privat,dans l'Hérault,"c'est une aber-

ration de voir que des variétés de pom-

mes, comme la Star Fruit, sont plantées

partout dans le monde". Aucune variéténe résiste à la fois à la sécheresse, augel ou encore à l'ensemble des insectesparasites. Pesticides et engrais chimj-ques servent de béquille à un systèmevicié dès le départ. Or, pour résister auxpathogènes propres à une zone, rien detel que des variétés spécifiques. C'esttoute la difficulté de la conversion desvergers à la bio, comme le fait remar-quer Fatima Jamjama, secrétarre généralde Pro-Natura, expéditeur de fruits bio :"Bien qu'ils modifient leurs pratiques,

les producteurs de pommes continuent

à travailler avec les variétés du conven-

tionnel, parfois peu adaptées aux limi-

tes techniques de la bio. On risque alors

de se retrouver avec uniquement des

pommes jaunes comme les Golden, bio

certes, mais au détriment d'une certaine

diversité".

Qu'est-ce quel'arboriculture bio ?

Comment ces nouveaux producteurs sedéfendent-ils contre le puceron, la che-nille ou le champignon de la tavelure?Réponse avec les Coteaux nantais deve-nus une référence au niveau européen.Sur 90 hectares cohabitent 37 variétés

de pommes, 7 depoires ainsi quedes kiwis, pru-nes, fraises ...Pour fertiliser lesol, du compostréalisé à base derésidus de pom-mes est apportétandis que lesvers de terre se

chargent d'aérer le sol. "Les racinesdes arbres vont alors pouvoir descen-

dre plus en profondeur pour chercher

les minéraux nécessaires", expliqueRobert Dugast, chef de culture. Afin derenforcer la vitalité des plantes, des pré-parations biodynamiques (1) à base desilice, quartz et humus sont déposées ensurface. En outre, les coccinelles régu-lent naturellement la présence de puce-rons. Enfin, des doses de soufre et decuivre sont appliquées pour prévenir latavelure, un champignon qui s'attaqueà certaines variétés de pommes trop peurésistantes, occasionnant des tâches noi-res. Autant de stratégies

Pro Natura : relocaliser et désemballer

qui, progressivement, font montre deleur efficacité. À l'heure où le gouver-nement s'est donné comme objectifde réduire de moitié, d'ici 2018, laquantité de pesticides répandus dansles champs, les techniques de l'arbo-riculture bio sont regardées de plusen plus près.

(1) la biodynamie est une méthoded'agriculture biologique visant àrestaurer la fertilité des sols en s'ap-puyant sur les forces cosmiques etdes préparations à base de plantes.

À lireEchobio n019 "Coteaux Nantais, les

fruits de la passion".

Pour encourager les arboriculteurs qui décident de

convertir leur verger, il faut leur assurer des débouchés.Pro Natura, qui vend environ 20 % de ses fruits en gran-des et moyennes surfaces bute sur un fonctionnement

qui éloigne des valeurs de la bio. "La règle, c'est à 99 %l'emballage des fruits bio pour éviter la confusion. C'est

vraiment absurde. En 7992, nous avions nous-mêmes

géré le rayon fruits bio et en vrac d'un magasin Car-

refour. Nous avions beaucoup de succès mois, à /'is-sue d'un on, l'enseigne ne s'est pas donné les moyens

pour poursuivre cette forme de commercialisation et

l'emballage est devenu la règle", rapporte-t-elle. Un

argument de plus en faveur des marchés, magasins

spécialisés ou de la vente à la ferme.

Les fervents défenseurs de l'alimentation bio souhai-

tent aujourd'hui voir plus loin et s'efforcent de relo-caliser l'approvisionnement quand c'est possible. Lo-comotive dans le secteur des fruits et légumes bio, le

grossiste Pro Natura collecte entre 13000 et 15000 ton-nes de fruits et légumes bio en France par an, sur untotal de 49000 tonnes. "Si l'on met de côté les agrumes

et les fruits exotiques, la Fronce est notre vivier majori-

taire, assure Fatima Jamjama. L'Espagne et l'Italie sont

sollicitées afin de compléter l'achalandage en abri-

cots, pommes, poires, pêches à certaines saisons. En

effet, la Fronce ne fournit des pommes bio que d'août

à novembre." La secrétaire générale de Pro-Naturaconstate cependant une hausse des volumes français

en pêche, melon, cerise de Provence ... et donc une

meilleure disponibilité à ce jour.

EchoBio / Juillet Août 2010 ~

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3CD

>CD-1-

C

Secrets de beauté

Au cœurdu verger !I!I

Partenaires de notre plaisir, de notre santé, les fruits sont aussi de précieux alliés au

service de notre beauté, Pour retrouver un teint de pêche, la cosmétique fruitière

met les petits plats dans les grands, Fanny Marouani, conceptrice de la marque

Pomarium, nous emmène à la découverte de vertus insoupçonnées.

Pourquoi vous êtes-vousconcentrée sur la pomme?

Pendant mes études de biologie cellulaire, j'ai été amenée àétudier les polyphénols comme molécules d'intérêts et c'est làque j'ai découvert ceux de pomme, à partir desquels j'ai élaborémon sérum à visée anti-âge. Rappelons que les Romaines fai-saient cuire des pommes dans la graisse animale et employaientce baume pour entretenir leur peau, d'où l'origine du termepommade. Peau, pépins, pulpe, jus ... tout est bon dans lapomme. Les polyphénols ont une action contre le vieillisse-ment et un effet lissant; l'huile de pépins nourrit et hydrate;l'eau de constitution affine le grain de peau en stimulant l'ex-

foliation naturelle del'épiderme; les fibresentrent dans la compo-sition des gommages,la pectine dispose devertus filmogènes ettexturantes qui peuventêtre utilisées dans unecrème hydratante.

BeaatéatA~. la peau on peut profiter

pour donner de l'éclat et rafferbrr:O,rfra',s fait 'maison. Obtenezd, . s de pomme , .

des vertus un JU nt à la centrifugeuse. Appil-le J'usd'une pomme en la passa .

r t nique sur le visage.quez comme une 10 l,on 0 ou s de soleil ou de froid, vousContre les ro.ugeurs i1eesaux ~d: maison, simplement en fai-pouvez fabriquer une pomm . mêlée à un peu d'huilesant cuire une pomme dans son JUs

d'olive. " . ns un peu de lait une pommeAvant une soiree, fOites cU~:~I~ en purée puis ajoutez un peu

coupée en morceaux, me t de farine pour la rendre homo-, '1 d' mande douce ed hUI e a ue 15 minutes et rincez.gène. Laissez poser ce masq t . l'eau du bain une tassePour un effet belle peau, ajou e~ a omme qui adoucissentde vinaigre de cidre ou de JUs e P

l'épiderme,

Source pomarium (www.pomarium.fr)

~ EchoBio / Juillet Août 2010

Où VOUS fournissez-vous?J'ai commencé à travailler avec Normandie Val de Vire quiréalise du cidre à partir de vergers bio. Quand je me suisprésentée à eux, ils étaient dans une réflexion de valorisa-tion des pommes écartées avant transformation et de tousles co-produits résultant du jus. Chez eux, j'ai trouvé despépins pour en extraire l'huile, du marc de pomme séchépour recueillir les polyphénols. Pour le reste, j'ai sollicitéd'autres fournisseurs français assez surpris de ma deman-de. C'est dommage que, possédant de vrais trésors de viesur notre territoire, on porte plus d'intérêt aux végétauxd'origines lointaines.

Comment peut-o() incites .la pOQulation a redecouvru

les bienfaits des fruits?Pour que ni l'histoire du verger, ni la connaissance desarbres ne se perde, je mûris un projet de vergers pédago-giques dans lesquels Pomarium parrainera des variétésanciennes.

Justement, quel ~st l'intérêtde ces varietés anciennes?

Si je prends l'exemple de la cerise, deux espèces sontcultivées, Prunus avium L., ou cerisier des oiseaux, quidonne les cerises douces (bigarreau, guigne ... ), et Prunuscerasus L., qui donne des fruits aigres (cerise de Montmo-rency, Balaton ... ). Ceux-ci sont particulièrement riches enantioxydants. C'est donc principalement ces espèces quisont employées en diététique Uus, extraits concentrés) eten cosmétique. Par ailleurs, les amandes de cerise donnentune huile fine aux propriétés cosmétiques intéressantes(Prunus cerasus seed ad).

Pour mettre en évidence les avantages de certaines varié-tés hélas écartées, je travaille sur la caractérisation et lavalorisation en prunes et kakis avec le Centre français del'innovation qui m'apporte son soutien financier; dansle même temps, je suis en quête d'une université pour unappui scientifique. Je souhaite trouver des solutions detransformation qui permettent de valoriser économique-ment le travail des producteurs.

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Variétés anciennes ou rares

Grenade, nèfle mais aussi kaki, asimine, kiwaï"" l'exotisme est au pied de nos

vergers. Nombre de fruits méconnus ou rares se plaisent en effet dans nos sols

et sous nos climats. S'agit-il de simples curiosités ou d'un véritable patrimoine

végétal à préserver?

Qi mange fréquemment des nèflessans pépins? Des pommes d'un kilo?Des framboises noires? Nombre deces fruits complètement inconnusprospèrent cependant sous nos yeux.Vers Montpellier, on rencontre des aze-roliers à petits fruits; plus au nord, ilest aisé de cheminer en compagnie denéfliers germaniques sauvages. Airelle,myrtille, cynorrhodon, physalis ... laliste est, a posteriori, plus longue sil'on s'intéresse également aux varié-tés anciennes et à des fruits dès lorspeu courants.Bien sûr, on ne passe pas sa vie à courirles bois et les bosquets. Certains pépi-niéristes, adeptes de fruitiers rares, dis-posent d'un catalogue original. Grâce àeux, le feijoa, originaire du Brésil, estmaintenant bien connu des jardiniers.Bien qu'une tentative de plantation àgrande échelle ait eu lieu en Provenceil y a une trentaine d'années ainsi qu'en

Corse, il reste cependant assez rare. Deson côté, Jean-François Burri, pépinié-riste bio depuis1980, chercheà faire décou-vrir certainsarbres délaissés,notamment lesmûriers blancet noir, cultivésautrefois pour lever à soie. Avecson confrère Fré-déric Cochet, ilparticipe active-ment à la multiplication de la collectionnationale française de mûriers, totali-sant à eux deux plus de 50 variétés. Sile premier (Morus nigra) porte toujoursdes fruits violets foncés ou noirs, selonles variétés, son acolyte blanc donne desfruits blancs mais aussi jaunes, rosés,violets ou noirs. Autre différence que

nous rapporte la Confrérie des planteursde fruitiers rares: la baie du mûrier

blanc est douceâ-tre avant maturitétandis qu'il fautattendre, pour lenoir, la complètematurité afind'apprécier unesaveur sucrée etlégèrement aci-dulée. Produitdans le Sud-Ouest, le kiwaïou kiwi de Sibé-

rie revêt une peau lisse, verte, tirantsur le jaune, et se présente en grappe.Depuis près de 15 ans, Max Fournierest quasiment le seul à le cultiver surune dizaine d'hectares, et en bio. "Ilest autant sucré qu'une prune d'En-

te, et dégage des arômes exotiques",

confie le producteur lot-et-garonnais.Très riche en sucre et en vitamine C(jusqu'à 400 mg par 100 g), le kiwaïapporte également de nombreux oligo-éléments tels que le potassium, le cal-cium, le magnésium, le fer, etc. Il seconsomme souple, même un peu flétri,tel quel ou en dessert, beignets, tarteset a la réputation de prévenir le coupde pompe.

"Le musée du Louvre sou-

haite percer à jour le secretde fabrication japonaise

d'un enduit, à base de jus dekaki, qui assure une meilleure

conservation des toiles... et àmoindre coût !" Raphaël Co-licci, arboriculteur bio.

Début de~ d'Ufte lIariité de kiwi !Me.

@ EchoBio / Juillet Août 2010

Portés disparus"On est passé de 7000 variétés de

pommes échangées au début du siècle à

aujourd'hui une petite centaine", estimeChristian Sunt, co-fondateur de la revueFruits oubliés dont l'association épony-me œuvre pour la valorisation des fruitsméditerranéens. Des variétés de cerises,comme celle à bouquet, ont complète-ment disparu alors qu'elles disposaientd'avantages précieux. La Belle Agathe

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de Novembre, d'origine belge, pouvaitse manger jusque tard dans l'automnedans la région du Limbourg. Devenuerare en France, la corme, apparentée àla pomme et à la poire, reste cultivée enItalie. "On peut avoir 100 kg de fruitssur un cormier, poursuit le spécialiste; traditionnellement, on en faisait une

boisson légèrement alcoolisée, le cor-

mé." Comme la nèfle, c'est un concen-tré de minéraux, vitamines et de sucre.Pourquoi ces fruits ont-ils déserté noscampagnes? Frédéric Cochet, pépinié-riste et paysagiste, nous donne quelquesexplications: "Depuis les années 1970,

la sélection des arbres s'est faite sur

deux critères principaux: un parfùm très

sucré et une bonne conservation mais

d'un point de vue industriel. Cependant,

ces critères ne sont pas toujours perti-

nents au regard de l'attente de l'amateur;

du particulier'. La notion de rendementet le calibre a aussi discrédité certainsd'entre eux comme ces abricots succu-

lents à manger directement sur les arbresou d'autres variétés qui ne se conser-vaient guère plus de 2 heures!D'autres fruits sont tombés dans l'oublicar la manière de les cuisiner ne s'estpas transmise. D'où l'intérêt de valori-ser autant leur usage que leur culture."On pourrait mettre en valeur certains

fruits pour le sucre qu'ils contiennent,

propose Christian Sunt. Cela permet-trait de remplacer le sucre de canne

qui intervient dans quasiment toutes

les recettes bio. D'autant plus que le

fructose est plus assimilable que le sac-

charose ". La caroube présente, danscette optique, un grand intérêt. Sa pulpedonne de la mélasse, à l'effet sucrant,tandis que la graine rentre dans l'élabo-ration d'adjuvants qui servent à épaissirsauces ou sorbets.

Sauvetage réussiFruit très courant au Japon, le kaki estencore peu connu en France. Pourtant,

il prend ses aises sous notre climat.Pour preuve, dans l'Hérault, RaphaëlCollici dispose du plus importantconservatoire de kakis d'Europe. Cefruit, qui se mange blet quoique cer-taines variétés nouvelles se dégustentdès la récolte automnale, comme lekaki-pomme, peut peser jusqu'à 500 g(variété Hana Fuyu). Réintroduit depuisune quinzaine d'années, l'asimine ne setrouve hélas pas dans le commerce ... àmoins d'habiter à la frontière italienne.Originaire des États-Unis, l'asimine estarrivé au XIXc siècle dans les jardinsdes grands collectionneurs de la Côted'Azur avant de disparaître. "Cette

banane-mangue qui tient naturellement

aufroid, - moins 25 degrés -, mon père

l'a découverte chez des amis, rapporteRémi Colicci de la pépinière Du Bosc.On en a planté, on l'a goûté et beau-

coup aimé".

Lancer degrenade française!

Chaque année, les Français consommentprès de 6 000 tonnes de grenades fraî-ches. Le jus est également commerciali-sé mais rarement sous l'appellation gre-nadine qui renferme la plupart du tempsun mélange de fruits rouges (cassis, gro-seille, sureau, framboise ... ). Considérécomme exotique, ce fruit rougeâtre auxnombreuses graines enveloppées d'unepulpe juteuse, provient, pour l'essentiel,de Chine et d'Inde mais aussi d'Espa-gne, du Maghreb et de Californie. Or,au XIXc siècle, la grenade était cultivéedans l'Hexagone. Fort de ce constat,Jean-Claude Peretto en a planté la haen 2007 dans le Gard. Une récolte toutesymbolique et certifiée bio est attendued'ici quelques mois car il faut compter5 à 8 ans avant d'obtenir une produc-tion conséquente. Ce super-fruit richeen anti-oxydants intéresse nombre deconfrères car il n'est pas sujet à la shar-

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ka, un virus qui affecte pêchers, nectariniers et abricotiers."Chaque semaine, je reçois environ 3 arboriculteurs motivés

par le grenadier. J'aimerais vraimentformerdes profession-

nels à cette culture", confie Jean-Claude Peretto.

l, 2, 3 plantez!Comment ces fruitiers anciens ou rares pourraient-il échapperà l'oubli? "Plantez un arbre dans votre jardin, multipliez des

variétés anciennes, opérez une d(ffusion, encourage FrédéricCochet qui met lui-même en place un verger conservatoire.Quand je vends un arbre, je propose au client une forme de

contrat d'adoption. C'est-à-dire que la personne bichonne

son arbre et si, un jour, cette variété semble perdue, l'ama-teur s'engage à fournir du greffon afin que, grâce à lui, on

retrouve la dite variété". Le pépiniériste rêve ainsi d'éta-blir une carte de France des plantations fruitières rares ouanciennes, sorte de "conservatoire éclaté". Pour s'informer,les foires aux plants sont des lieux où grouillent les offres.Celle de Saint-Jean du Gard, organisée par l'association desDimanches verts, réunit, tous les ans, nombre de connaisseursen novembre.

À la maison,quelles précautions?

Prenez soin de toujours garder le calice du fruit en le récoltant- dans le jardin, préférez le sécateur plutôt que de l'arracher àla main - car les fruits sans pédoncule pourrissent plus rapi-dement. Ensuite, ne les mélangez pas avec des pommes dontl'éthylène dégagé accélère le mûrissement de l'ensemble dela corbeille. Et évitez de les laver à l'avance. En général, lesfruits s'épanouissent à l'air ambiant et exposés au jour. Saufles kakis qui réagissent à la lumière d'une manière pour lemoins inhabituelle; ils mûrissent en effet plus lentement dansun local clair que dans une pièce sombre.

L~ fruit) dM 1/i/iM .

Le Passionné de fruitiers rares, abandonne en

" . u'elle pUisse sem-pleine viile, .aUSSIbetonnee q er sa subsistance

bler, pourrOit (presque''')bassU~rbustes buissons,par \0 cueillette sur les ar res, ' é-lianes et vivaces rencontrés ~u cours d~;~;s Pderi le Quelie surprise de cueillir des no • '

~~z:n~l~n~~i~i~a~eU~:ij~~~n~~~~ d:e~~~~~~~i

dons un jardin public bdu~~u~eo:e~~r~;~:mental.Landes, ce dons un l'ana-L goût du feijoa osciile entre la goyave,e et même ia fraise. À tester 1Esperant un en~

ng~~ement similaire à celui provoqué par le klW~• 1970 des producteurs se son

dons les annees ' . dons \e Sud des. '1 a quelques annees

essayes, 1Y f "00 Sons résultat satisfaisant. DeLandes ou el] . l '

, b' n de Parisiens parcourent e Jar-même com le S·, 'xembourg d'un œil gourmand? I~ndin dUp~~rtant. le céièbre jardin abrite une trespeu,.. • d 'sbeile coilection de variétes e pOire '

Trbr Cf)Uf'M!.t au Japon) te kAki W111f.OYteder vtuiét6r 1tU r6ru-tfflt à. der températu,re5 né3ativ-&r 'de 40°C!

Ramener sa fraise...en cuisine"Il faut utiliser les fruits dans les mets, recommande Fré-déric Cochet; la poire Curé, passée en lamelles à la poêleavec du beurre, c'estfabuleux! Et que dire de la Bourseyre,

une poire ardéchoise formidable, cultivée en altitude. Sans

même l'éplucher, je la glisse au four avec juste un fond

· Jeûne hydrique pour se détoxiner

et régénérer les cellules,

· Mono-diète pour se revitaliser,

· Alimentation méthode Dr Kousmine

avec diète quotidienne.

Escapades dans le ParcNananal des Cévennes : :Causse Méjean, Mant·.Aigual, Garges du Tarn etde la Jante, ...

A dispasinan matériel derelaxananet bien-êtTe: sauna,salle de massage, mandala,wi-fit yoga, appareil élec1To-snmulanan, et la rivière duTarnanpour la natanan.~

Légumes et fruits biologiquesculnvés par les producteurs duterroir desnnés à la préparonandes jus de fruits, bouillons, mono-diète et alimentanan méthodeDocteurKousmine.

EchoBio / Juillet Août 2010 ~

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d'eau, ni beurre ni sucre, son parfum

est incomparable", assure-t-il. Toujoursà la recherche de saveurs et arômes sub-tils, certains chefs se sont emparés defruits rares, agrémentant leurs créations.La pépinière Baches, située au pied dumont Canigou, dans les Pyrénées-Orien-tales, travaille avec 18 d'entre eux, lesapprovisionnant en agrumes: "On suit

toutes les modes du jour, comme celle

du combava dont l'écorce grumeleuse

et verte rappelle très nettement la citron-

nelle. On en impulse aussi des nouvel-

les en proposant du citron caviar, une

lime australienne dont la forme évoque

la banane, du calamensi ou encore du

yuzu", explique Michel Baches. AntoineHeerah, chef cuisinier du restaurant pari-sien le Chamarré Montmartre, appréciela contribution de ce spécialiste en citron,cédrat, mandarine ... : "Cela permet untravail très intéressant sur l'acide et

l'amer", confie-t-on aux cuisines. Poursatisfaire les papilles quand la saison nes'y prête plus, certains transformateursne manquent pas d'imagination.

Sevessence propose ainsi toute une gam-me d'huiles essentielles bio dont certai-nes 100 % fruitières. Quelques gouttesd'huile essentielle de citron zeste oud'orange douce rehaussent cocktails,pâtisseries, mousses, sorbets ... hivercomme été.

Des usages insolitesLa nature n'a pas fini de nous sur-prendre ... ni de nous rendre service.Grâce à Raphaël Colicci, le kaki sus-cite un vif intérêt: "Je fais partie d'ungroupe de travail qui met au jour ses

propriétés d'insecticide naturel dans le

traitement du bois. J'ai aussi reçu une

restauratrice du musée du Louvre qui

avait repéré, dans mon conservatoire,

certaines variétés. Elle souhaite depuis

percer à jour le secret de fabrication

japonaise d'un enduit, à base de jus de

kaki spécifique, qui assure une meilleure

conse rvation des toiles ... et à moindre

coût 1"

Jus de grenadeà la source

Comment déguster le jus des gre-nades sans l'extraire préalable-ment? Choisissez une grenadebien mûre, malaxez-la longue-ment entre ses mains. Percez unpetit trou dans la peau coriace etglissez-y une paille. Savourez enaspirant longuement.

@ EchoBio j Juillet Août 2010

Qui n'a pas maudit, après coup, uneaprès-midi cueillette de mûres en consta-tant les dégâts sur ses habits? Un défautqui peut se transformer en avantage. "Lemûrier noir (Morus Nigra) est un arbre- ilfaut le distinguer de son homologue

roncier - qui pousse très bien partout,

ses petits fruits sont très intéressants sur

le plan gustatif, explique Christian Suntde Fruits Oubliés. Auparavant mis de

côté car ses fruits tâchaient beaucoup, il

est aujourd'hui recherché comme colo-

rant naturel". Comme il est très difficileà multiplier, l'association Fruits Oubliéss'est chargée de cette étape in vitro ouen culture sous serre avant de diffuserles boutures chez les pépiniéristes duSud de la France et auprès des adhé-rents de son réseau. D'autres fruitierssatisfont plusieurs fonctions. RaphaëlColicci rapporte que la pêche surnom-mée le Baron Rouge "avait jadis deuxusages. Au moment de la taille, quand le

bourgeon floral était gros, on enfaisait,

à Paris, des bouquets de fleurs".

En Corse, la châtaigne s'est maintenuecar elle intervient à tous les moments,du petit-déjeuner, avec la bouillie sur-nommée Badjab, au souper. "Au paysbasque espagnol, on trouve toujours de

la polent à base de châtaigne, on en

fait même des crêpes, rappelle Chris-tian Sunt. Notre rôle, au sein de l'as-sociation, c'est de maintenir certains

usages et de travailler à la naissance

de nouveaux. Comme l'arrivée de La

Pietra, une bière corse à la châtaigne."

"Il y a une richesse incroyable dans

toutes ces variétés anciennes, martèleRaphaël Coll ici qui, depuis 40, défendsans relâche une agriculture paysanneet bio. J'essaie de convaincre que réha-biliter certaines variétés contribue à

dynamiser nos territoires ", conclut-il.Quand on connaît l'intérêt du profes-seur Henri Pujol, président de la Liguenationale contre le cancer, pour le jusde grenade, on saisit mieux l'utilité depréserver cette biodiversité fruitière.

À lireEchobio n018 "Un été à pleine gorgée,

les boissons créent la surprise" ; Les

Fruits,Jean-Marie Delecroix, ÉditionsMedicis, juin 2009.

Plus d'infos

Contrérie des Planteurs de FruitiersRares:http://www.copltr.org/http://www.fruitsoublies.tr/

Page 8: echobio 24 2010 p18-28 - abiodoc.docressources.fr

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Raoul Reichrath, chef cuisinierau Grand Pré (Vaucluse)

Une corte des menus•

par saison"D'origine hollandaise, Raoul Reichrath célèbre, avec son épouse Flora,

sommelière, la figue et bien d'autres fruits au restaurant du Grand Pré, à Roaix,dans le Vaucluse. Son art culinaire tient en deux mots: bio et simple.

DeRyis quanq vous êtes-vousinteressé a l'alimentation bio ?Dans mon pays, il existe des chaînes de distribution biodepuis 20 ans. L'agriculture biologique m'a toujours inté-ressé pour ma propre santé et celle de la planète. Et puis,dans le cadre de ma profession, j'observe que les fruits bioont moins d'eau, plus de goût et se gardent mieux que ceuxen conventionnel.

Comment votre établissement vit-ilau rythme de la nature?

Le menu du Grand Pré change tous les mois et il existe unecarte par saison. Il faut savoir et accepter des périodes defruits parfois très courtes: les abricots Orange-Red éclosentet dépérissent en l'espace de 3 semaines! De même pourcertaines variétés de fraises, six semaines après la 1ère, onn'en trouve plus une seule!

Pourquoi les fruitsattirent-ils votre attention?

Manger des fruits,cela implique que l'onconsomme moins de des-serts fabriqués de toutespièces. Or, notre alimen-tation "préfabriquée"est chargée en graisse etsucre, qui cause d'énor-mes dégâts sur la santé.

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®' EchoBio / Juillet Août 2010

Faites l'essai: dégustez un melon, un abricot ou une pêchesavoureuse à souhait et aussitôt après, une sorte de pud-ding. Vous ressentirez un certain dégoût.

Quels sont vos conseilspour conserver les fruits?

Les mettre au réfrigérateur, c'est l'erreur la plus grande.Le froid tue les parfums. Un fruit, il faut l'acheter et leconsommer vite. Les fraises par exemple ne se conserventguère plus que deux-trois jours, de même que les melons.Parfois, je sèche moi-même certaines variétés de figues.

Décrivez-nous votrecorbeille de fruits?

J'ai une prédilection pour les figues car j'ai la chance d'avoir,tout près, à Vaison-la-Romaine, un producteur unique defigues: il en cultive plus de 300 variétés suivant les principesde l'arboriculture bio !En saison, le menu 'Tout figue" com-prend, par exemple, un carpaccio aigre-doux de figues auxcrevettes. Coupées en fines lamelles, ces dernières marinentavec des tomates et de l'huile d'olive. J'apprécie de cuisinerles pêches dont j' obtiens une gelée, d'une très jolie couleur.Pour ce faire, je les poche tout en gardant la peau. J'ai unpetit truc aussi avec les abricots; pour réaliser une compoteou un sorbet, j'éclate le noyau afin d'intégrer l'amande, cequi procure un léger goût amer à l'ensemble.J'aime aussi beaucoup certains fruits anciens de Provence,comme les azéroles que je compote avant de les serviragrémentés de vinaigre balsamique blanc et d'une glacede vanille. Le sorbet de nèfle, je l'intègre dans un vacherinqui comprend aussi une partie sorbet de fraise. l'ai éga-lement découvert le jujube dont la forme rappelle celled'une grande figue jaune-marron: elle se croque commeune pomme. J'utilise aussi des grenades et des kakis maissans les modifier. Transformer, cela ne veut pas toujoursdire améliorer. Prenez cette purée crue aux tons rouge, noiret crème: des fraises coupées à la minute, trois gouttes decrème de cassis, du poivre noir du moulin et une bonneglace à la vanille et rien de plus! En règle générale, j'évited'ajouter trop d'ingrédients, conservant une démarcheculinaire assez simple. Je préfère consacrer plus de tempsà dénicher des produits de qualité.