Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie – Bilan des données ...

860
Dyslexie Dysorthographie Dyscalculie Bilan des données scientifiques Expertise collective

Transcript of Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie – Bilan des données ...

  • DyslexieDysorthographieDyscalculieBilan des donnesscientifiques

    Expertise collective

  • DyslexieDysorthographieDyscalculieBilan des donnesscientifiques

  • Ce logo rappelle que le code de la proprit intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit la photocopie usage collectifsans autorisation des ayants-droits.Le non-respect de cette disposition met en danger ldition,notamment scientifique.

    Toute reproduction, partielle ou totale, du prsent ouvrage est interdite sans autorisation de lditeur ou du Centre franais dexploitation du droit de copie (CFC, 20 rue des Grands-Augustins, 75006 Paris).

    Dans la mme collection Obsit. Dpistage et prvention chez lenfant. 2000 Asthme et rhinites dorigine professionnelle. 2000 Lombalgies en milieu professionnel. Quels facteurs

    de risques et quelle prvention ? 2000 Dioxines dans lenvironnement. Quels risques pour

    la sant ? 2000 Hormone replacement therapy. Influence on

    cardiovascular risk ? 2000 Rythmes de lenfant. De lhorloge biologique aux

    rythmes scolaires. 2001 Susceptibilits gntiques et expositions

    professionnelles. 2001 ducation pour la sant des jeunes. Dmarches et

    mthodes. 2001 Alcool. Effets sur la sant. 2001 Cannabis. Quels effets sur le comportement et la

    sant ? 2001 Asthme. Dpistage et prvention chez lenfant. 2002 Dficits visuels. Dpistage et prise en charge chez le

    jeune enfant. 2002 Troubles mentaux. Dpistage et prvention chez

    lenfant et ladolescent. 2002 Alcool. Dommages sociaux, abus et

    dpendance. 2003 Hpatite C. Transmission nosocomiale. tat de sant

    et devenir des personnes atteintes. 2003 Sant des enfants et des adolescents, propositions

    pour la prserver. Expertise oprationnelle. 2003 Tabagisme. Prise en charge chez les tudiants. 2003 Tabac. Comprendre la dpendance pour agir. 2004 Psychothrapie. Trois approches values. 2004 Dficiences et handicaps dorigine prinatale.

    Dpistage et prise en charge. 2004 Tuberculose. Place de la vaccination

    dans la maladie. 2004 Suicide. Autopsie psychologique, outil de recherche

    en prvention. 2005 Cancer. Approche mthodologique du lien

    avec lenvironnement. 2005 Trouble des conduites chez lenfant

    et ladolescent. 2005 Cancers. Pronostics long terme. 2006 thers de glycol. Nouvelles donnes

    toxicologiques. 2006 Dficits auditifs. Recherches mergentes

    et applications chez lenfant. 2006 Obsit. Bilan et valuation des programmes

    de prvention et de prise en charge. 2006 La voix. Ses troubles chez les enseignants. 2006

    Dyslexie, dysorthographie, dyscalculieBilan des donnes scientifiques ISBN 978-2-85598-856-X

    Les ditions Inserm, 2007 101 rue de Tolbiac, 75013 Paris

    Co

    uve

    rtu

    re:

    con

    cep

    tio

    n g

    rap

    hiq

    ue

    a

    m b

    ou

    rgeo

    is

  • DyslexieDysorthographieDyscalculieBilan des donnesscientifiques

    Expertise collective

  • V

    Cet ouvrage prsente les travaux du groupe dexperts runis par lInserm dansle cadre de la procdure dexpertise collective, pour rpondre la demande duRgime social des indpendants, anciennement la Canam, concernant ladyslexie, la dysorthographie et la dyscalculie. Ce travail sappuie sur lesdonnes scientifiques disponibles en date du deuxime semestre 2006. Plus de2 000 articles ont constitu la base documentaire de cette expertise.

    Le Centre dexpertise collective de lInserm a assur la coordination scienti-fique et ditoriale de cette expertise collective. Dans le cadre de la missiondaccompagnement des expertises collectives mise en place par ChristianBrchot, Directeur gnral de lInserm, lexpertise a bnfici des conseils deJean-Marie Danion, professeur de psychiatrie reprsentant la Directiongnrale de lInserm, de Jean-Claude Ameisen, prsident du comit dthi-que de lInserm, et des membres du dpartement de linformation scientifi-que et de la communication sous la direction de Pascale Sillard et PatrickChanson.

  • VII

    Groupe dexperts et auteurs

    Pierre BARROUILLET, Facult de psychologie et de sciences de lducation,Universit de Genve, SuisseCatherine BILLARD, Centre de rfrence sur les troubles des apprentissages,neuropdiatrie, Hpital Bictre, Le Kremlin BictreMaria DE AGOSTINI, Recherche en pidmiologie et biostatistique, InsermU 780, CNRS, VillejuifJean-Franois DMONET, Service de neurologie, Inserm U455, Hpital dePurpan, ToulouseMichel FAYOL, Laboratoire de psychologie sociale et cognitive, UniversitBlaise Pascal et CNRS, Clermond-FerrandJean-mile GOMBERT, Centre de recherche en psychologie, cognition etcommunication, CRPPC, Universit Rennes 2, RennesMichel HABIB, Service de neurologie pdiatrique, Hpital des enfants de laTimone, MarseilleMarie-Thrse LE NORMAND, Physiologie et neurologie du dveloppement,Inserm E 9935, Hpital Robert Debr, ParisFranck RAMUS, Laboratoire de sciences cognitives et psycholinguistique,UMR 8554, EHESS, CNRS, ENS, ParisLiliane SPRENGER-CHAROLLES, Laboratoire de psychologie de la perception,Universit Ren Descartes et FRE 2929 CNRS, ParisSylviane VALDOIS, Laboratoire de psychologie et neurocognition,UMR 5105, Universit Pierre Mends France et CNRS, Grenoble

    Ont prsent une communicationCatherine BILLARD et coll., Centre de rfrence sur les troubles des appren-tissages, neuropdiatrie, Hpital Bictre, Le Kremlin BictreMichel HABIB, Service de neurologie pdiatrique, Hpital des enfants de laTimone, ParisMarie-Thrse LE NORMAND et coll., Physiologie et neurologie du dvelop-pement, Inserm E 9935, Hpital Robert Debr, ParisMonique TOUZIN, Unit de rducation neuropdiatrique, CHU Bictre

    Ont rdig une note de lectureMichel DELEAU, Psychologie du dveloppement, Universit de RennesNicolas GEORGIEFF, Institut des Sciences Cognitives, BronPhilippe MEIRIEU, Sciences de lducation, Universit Lumire-Lyon 2

    Remerciements

    LInserm et le groupe dexperts remercient Stanislas DEHAENE (Neuroimagerie cognitive, InsermU 562, Service Hospitalier Frdric Joliot, CEA, Orsay) et Jos MORAS (Facult des sciencespsychologiques et de lducation, Universit libre de Bruxelles) pour leur relecture de louvrageainsi que pour leurs conseils.

  • VIII

    Coordination scientifique, ditoriale et logistique

    Fabienne BONNIN, charge dexpertise, Centre dexpertise collective delInserm, Facult de mdecine Xavier-Bichat, ParisCatherine CHENU, attache scientifique, Centre dexpertise collective delInserm, Facult de mdecine Xavier-Bichat, ParisJeanne TIEMBLE, directrice, Centre dexpertise collective de lInserm,Facult de mdecine Xavier-Bichat, ParisCcile GOMIS, secrtaire, Centre dexpertise collective de lInserm, Facultde mdecine Xavier-Bichat, ParisAnne-Laure PELLIER, attache scientifique, Centre dexpertise collective delInserm, Facult de mdecine Xavier-Bichat, ParisChantal RONDET-GRELLIER, documentaliste, Centre dexpertise collective delInserm, Facult de mdecine Xavier-Bichat, Paris

  • IX

    Prface

    Je remercie le Rgime social des indpendants RSI (anciennement la Canam)davoir confi lInserm la ralisation dune expertise collective sur destroubles affectant les apprentissages scolaires tels que la dyslexie, dontlimportance en sant publique a justifi un plan national daction en 2001. Je tiens tout particulirement fliciter le groupe dexperts davoir trait unsujet particulirement difficile en faisant une analyse objective de la littraturedisponible dans les champs disciplinaires o les progrs ont t les plusmarqus ces dernires annes. Je souhaite que cet clairage scientifique soitutile aux professionnels du secteur de lEducation et de la Sant pour aider lesenfants surmonter leur handicap. Cette expertise ne prtend pas avoir abord tous les aspects concernant cestroubles composantes multiples ni avoir rpondu toutes les questions. Larecherche doit se poursuivre pour combler les nombreuses lacunes deconnaissance. Linterdisciplinarit est un facteur de succs de cette recherchecomme le soulignent les experts.La ralisation de cette expertise sest inscrite dans le cadre dune volution encours des expertises collectives lInserm visant mieux intgrer dans le dbatles diffrents points de vue et modes de pense. Les reprsentants des associations de patients et de parents, des professionnels duchamp ducatif, mdical et para-mdical (orthophonistes, neuropsychologues,psychologues) ont eu loccasion dchanger sur le travail ralis par lesexperts avant la publication de cette expertise et dapporter leur point de vue,leur exprience et leur savoir-faire. Leurs propos rapports dans cet ouvragecontribuent sa qualit. Je remercie chaleureusement mes collaborateurs qui ont prodigu leurs conseilsau cours de ce travail dans le cadre de leur mission daccompagnement desexpertises collectives que jai mise en place. Je remercie galement tous lesscientifiques et professionnels impliqus dans les apprentissages et leurstroubles qui, par une lecture critique de tout ou partie du document, selon leurchamp dintrt, ont permis den amliorer la rdaction. Je souligne lintrt que lInserm accorde au dbat qui doit se poursuivre aprsce travail consquent mais ncessairement limit des experts. Jinvite lelecteur prendre connaissance des trois notes de lecture confies despersonnalits choisies pour leurs approches diffrentes et complmentaires.

    Professeur Christian BrchotDirecteur gnral de lInserm

  • XI

    Sommaire

    Avant-propos...................................................................................... XIII

    Analyse

    I Acquisitions et apprentissages.................................................. 1De lacquisition du langage aux apprentissages scolaires................. 3

    1. Acquisition du langage oral : repres chronologiques ..................... 52. Apprentissage de la lecture .............................................................. 333. Apprentissage de la production crite et de lorthographe ............. 794. Apprentissage de larithmtique ...................................................... 1075. Apprentissage du langage crit chez les sourds................................ 137

    II Troubles spcifiques des apprentissages .............................. 149Des difficults dapprentissage aux troubles spcifiques .................. 151

    6. Dfinitions et classifications ............................................................ 1597. Donnes de prvalence .................................................................... 1758. Dyslexie : tudes de cas .................................................................... 1919. Dyslexie : tudes de groupes et de cas multiples .............................. 217

    10. Dysorthographie............................................................................... 27311. Dyscalculie et troubles de lapprentissage de larithmtique ........... 29112. Troubles des acquisitions associs la dyslexie................................ 34313. Troubles comportementaux ou motionnels associs la dyslexie ... 367

    III Thories explicatives de la dyslexie .................................... 379Des premires approches de la dyslexie aux hypothses actuelles... 381

    14. Thorie phonologique ..................................................................... 38915. Thorie visuelle ............................................................................... 41916. Thorie du dficit de la fonction crbelleuse ................................ 45117. Thorie du trouble du traitement temporel..................................... 45918. Apport de limagerie crbrale......................................................... 47919. Facteurs gntiques .......................................................................... 49720. Analyse critique des thories explicatives de la dyslexie ................ 513

  • XII

    IV Prvention et prise en charge................................................ 535Du reprage la prise en charge lcole et la pratique clinique... 537

    21. Reprage, dpistage et diagnostic .................................................... 54122. Bilan des tudes de prvention en milieu scolaire........................... 57123. Traitements et mthodes de rducation de la dyslexie .................. 59124. Stratgies de soins des troubles spcifiques et associs .................... 613

    Synthse, principaux constats, recommandations ................ 635

    Communications / Dbat................................................................ 719Rsultats prliminaires dune tude pidmiologique au CE1 ............... 721Trois mthodes compares de rducation ............................................ 743Exemple de remdiation neurodveloppementale ................................. 767Rducation orthophonique dans la dyslexie ........................................ 785

    Rencontre-dbat du 16 janvier 2007...................................................... 793

    Note de lecture de Michel Deleau.......................................................... 807Note de lecture de Nicolas Georgieff ..................................................... 811Note de lecture de Philippe Meirieu ...................................................... 819Rponse du groupe d'experts au propos de Philippe Meirieu................. 823

    Annexes ............................................................................................... 827Expertise collective Inserm .................................................................... 829

    Centres rfrents pour les troubles du langage ....................................... 835

  • XIII

    Avant-propos

    Depuis les annes 2000, la Caisse nationale des travailleurs indpendants(Canam), devenue en 2005 le Rgime social des indpendants (RSI) a sol-licit lInserm pour la ralisation de plusieurs expertises collectives relatives la sant des enfants. Elles portent, entre autres, sur lobsit, les troublesmentaux et les troubles spcifiques des apprentissages scolaires identifiscomme des priorits en sant publique au niveau national.

    La dyslexie, qui entrave lapprentissage de la lecture, est le trouble spcifiquele plus connu et le mieux tudi. La dyscalculie ou la dysorthographie ontfait lobjet de beaucoup moins de recherches. Les difficults scolaires lies ces troubles sils ne sont pas pris en charge peuvent conduire la marginali-sation voire la stigmatisation des enfants et les checs cumuls aboutir des difficults dinsertion sociale lge adulte.

    La Canam (RSI) a souhait que lInserm ralise, travers la procdure dexper-tise collective, un tat des connaissances scientifiques rcentes permettant demieux connatre et comprendre les troubles spcifiques des apprentissages sco-laires ainsi quun bilan des publications scientifiques concernant les outils etmthodes de reprage et de prise en charge.

    Pour rpondre cette demande, lInserm a runi un groupe de 11 expertsayant des comptences dans les domaines de la psychologie cognitive, la psy-chologie du dveloppement, la neuropsychologie de lenfant, la pdiatrie, lesneurosciences, la psycholinguistique, la linguistique et lpidmiologie.

    Limpact que peuvent avoir les progrs des connaissances scientifiques sur laprise en charge de la dyslexie et des autres troubles spcifiques des apprentis-sages est une des questions de lexpertise. De nombreux outils de remdia-tion de la dyslexie sont aujourdhui proposs sans pour autant que leurefficacit ait t value ni mme que leurs rfrences thoriques aient texplicites. Cette situation justifie un tat de lieux des connaissances sur ladyslexie, la dysorthographie et la dyscalculie ainsi que sur les mthodes deprise en charge.

    La dysphasie (trouble spcifique du langage oral) et la dyspraxie (trouble delacquisition de la coordination) nont pas t abordes dans le cadre decette expertise cible sur les troubles spcifiques des apprentissages scolaires.Ces troubles ont cependant un retentissement important sur les apprentissa-ges scolaires. Ils sont voqus dans le chapitre sur les troubles associs etmriteraient de faire lobjet dun bilan approfondi des connaissances aucours dune prochaine expertise collective Inserm.

  • XIV

    Le groupe a structur sa rflexion autour des questions suivantes :

    Que sait-on lheure actuelle de lacquisition normale du langage, delapprentissage de la lecture, de lorthographe et du calcul, pouvant clairerla comprhension des troubles spcifiques des apprentissages ?

    Quelles sont les dfinitions et classifications des troubles spcifiques desapprentissages utilises dans les diffrentes tudes pour en dterminer leurfrquence et leur dmographie ?

    Quest-ce que la dyslexie, quelles sont ses principales manifestations etleur frquence ?

    Quels sont les autres troubles spcifiques des apprentissages (dyscalculie,dysorthographie) et leurs relations avec la dyslexie ? Quels autres troublessont frquemment associs ?

    Quelles sont les principales thories explicatives de la dyslexie et quel at lapport dans ce domaine des nouvelles technologies scientifiques(neuro-imagerie, gntique, neurosciences cognitives) ayant permis lesavances rcentes ?

    Quelles sont les diffrentes mthodes de remdiation et comment sarti-culent-elles avec les thories actuelles ? Quel est ltat actuel des recherchesscientifiques en matire dindications de prises en charge et dvaluationdes mthodes proposes ?

    Quels sont les outils et stratgies disponibles en termes de reprage,dpistage, diagnostic et prise en charge ? Quelles sont les perspectives dontles enseignants, les familles et les enfants eux-mmes pourraient tirer bn-fice ?

    Louvrage est constitu de quatre parties. Pour comprendre la dyslexie, ladysorthographie et la dyscalculie, il est apparu indispensable de prsentertout dabord de manire synthtique lacquisition du langage oral, lappren-tissage de la lecture, de la production crite, de lorthographe et du calculchez lenfant ne prsentant pas de difficult particulire. Ceci constitue lapremire partie de louvrage.

    La deuxime partie est consacre la prsentation des troubles spcifiquesdes apprentissages scolaires (dfinition, prvalence). La diversit desformes de dyslexie est illustre travers lanalyse des tudes de cas alors queltude des populations denfants dyslexiques rvle une forte prvalencedun dficit cognitif spcifique (le dficit phonologique). Les donnes de lalittrature relatives la dysorthographie et dyscalculie dveloppementalessont encore peu dveloppes. Les frquentes associations entre troubles dys et dautres troubles psychiques ouvrent des pistes de rflexion surdes mcanismes physiopathologiques communs.

    Les diffrentes thories explicatives de la dyslexie (dficit phonologique,dficit du traitement auditif temporel, thories visuelles, dficit de la fonc-

  • XV

    tion crbelleuse, thorie magnocellulaire,) font lobjet dune troisimepartie. Le lien avec dautres troubles dveloppementaux contribue engen-drer de nouvelles hypothses. On voit donc l un chantier foisonnant derecherches. Les travaux en neurobiologie, neuro-imagerie, en gntiquemolculaire, loin dtre aboutis, ouvrent des pistes intressantes sur lesmcanismes possibles de ces dficits.

    La dernire partie de louvrage est centre sur le reprage, le dpistage, lediagnostic, la prvention et la prise en charge. Le bilan des connaissanceseffectu dans cette expertise conforte-t-il ou non les principes gnraux surlesquels sappuient les pratiques professionnelles et les modes dorganisationpour la prise en charge des enfants ? Selon la mthodologie de lexpertisecollective Inserm, cette partie ne dcrit pas lensemble des pratiques enFrance mais analyse les diffrentes mthodes de remdiation ayant faitlobjet de publications et leur valuation scientifique. Dune manire gn-rale, et en ce qui concerne lapproche diagnostique et la prise en chargemultidisciplinaire ces troubles ne doivent-ils pas tre conus comme rele-vant dun handicap ?

    Des rapports antrieurs cette expertise (rapport Ringard, 2000 ; rapportVber et Ringard, 2001) ont donn lieu un Plan national daction pour lesenfants atteints dun trouble spcifique du langage (Ministre de la sant,Ministre de lducation nationale, 2001)1. Ce plan traduit une volontdagir pour amliorer la situation de ces enfants et de leur famille. Dans lecadre de ce plan, des tudes pidmiologiques et des programmes de recher-che notamment dans le domaine de lvaluation des pratiques de soins demme que sur les stratgies pdagogiques et sur les contenus didactiquestaient prvus. Cinq ans aprs leur mise en uvre, les mesures entreprisesdans le cadre du plan national dans le champ de la sant font lobjet dunevaluation conduite par la Fdration nationale des observatoires rgionauxde sant sous lgide de la Direction gnrale de la sant. Toujours, dans lecadre de ce plan, une commission dexperts a travaill sur les outils de dpis-tage des troubles du langage, le rapport a t rendu public en 20062 aumoment de la finalisation des travaux de cette expertise collective et nadonc pu tre intgr lanalyse.

    1. http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/troubles_langage/plandysl.pdfftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/actu/2001/03_21_dp_troublelangage.pdf2. http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/troubles_langage/recommandations_tsl.pdf

  • IAcquisitionset apprentissages

  • 3

    Introduction : De lacquisition du langage aux apprentissages scolaires

    Les chapitres de cette premire partie visent dresser un bilan critique desdonnes actuellement disponibles relativement lacquisition du langage et lapprentissage de la lecture, de lcriture et du calcul. En effet, pour rpon-dre lobjectif de cette expertise concernant les troubles spcifiques desapprentissages scolaires, leur reprage, caractrisation et prise en charge, ilfaut au pralable disposer dinformations suffisantes sur le droulement normal des apprentissages concerns.

    Peu dapprentissages se ralisent spontanment sans que nous ayons yinvestir de lattention et du temps. Cest notamment le cas de tous lesapprentissages complexes : la lecture, larithmtique, mais aussi le piano,lbnisterie ou llectronique... De telles acquisitions impliquent la rencon-tre dobstacles plus ou moins nombreux et frquents qui doivent tresurmonts pour progresser : on peut alors parler de difficults dapprentis-sage. Tant que les individus peuvent dpasser ces difficults, seuls ou accom-pagns, ou bien les contourner , si par exemple lapprentissage nest pasimpos, le problme des troubles se pose peu : on en reste lexistence dedifficults.

    La situation est tout autre lorsquun savoir ou un savoir-faire est requis pourlinsertion dans la socit. Lire, compter, crire sont autant dacquisitionsconsidres comme indispensables dans les socits occidentales. Les prati-ques pdagogiques mises en place au cours de lhistoire ont conduit tablirdes programmes, des progressions et des tapes dcrivant et imposant plus oumoins selon les champs disciplinaires quand et comment ces acquisitionsdoivent se raliser pendant la scolarit.

    On peut considrer que cette stratgie programme constitue un moyendoptimiser ce que les individus peuvent acqurir dans un domaine de con-naissance donn, compte tenu de leur niveau de dveloppement, des savoirset savoir-faire dj acquis, du temps disponible (qui dpend de limportancedu domaine considr par rapport aux autres) et des objectifs poursuivis parlinstitution et, travers elle, la socit. Ds lors, les (invitables) difficultssont supposes adaptes, cest--dire surmontables par les apprenants, sousrserve que lintroduction des savoirs et savoir-faire soit prpare et quelaccs leur matrise soit guid de manire tenir compte des diffrencesinterindividuelles de niveau initial, de capacit, de rythme et de motivation.

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    4

    Pourtant, malgr toutes les adaptations des programmes et progressions, etmalgr les amnagements de dispositifs denseignement, les difficults normales , gnralement surmontes par la plupart des apprenants appa-raissent insurmontables pour une partie dentre eux, au moins un momentdonn du cursus et dans le cadre dune organisation dfinie de lapprentis-sage. Les difficults durablement non surmontes par certains font quilsscartent du niveau de russite attendu (ou prescrit) des apprenants relati-vement un ou plusieurs domaines une priode dfinie du cursus. Cetcart conduit sinterroger sur ce qui le dtermine. Plusieurs facteurs doi-vent tre envisags : carences ducatives, irrgularit de la scolarisation,qualit de lenseignement reu, existence de troubles sensoriels ou neurolo-giques, niveau de motivation, retard gnral de dveloppement. Lorsque cesdiverses ventualits ont pu tre cartes, on peut alors parler de trouble sp-cifique des apprentissages.

    Les cinq chapitres qui suivent visent prcisment dcrire ce qui est connudu droulement usuel des apprentissages de manire contribuer mieuxcaractriser les enfants qui scartent des trajectoires attendues et dont cer-tains peuvent ainsi tre considrs comme prsentant des troubles spcifi-ques des apprentissages.

  • 5

    AN

    ALY

    SE1Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    La capacit dun nouveau-n apprendre sa langue maternelle ne cessedtonner. En quelques annes, il va pouvoir matriser la grammaire de sapropre langue qui est un systme complexe de proprits phonologiques,lexicales et syntaxiques. Les tudes linguistiques et cognitives abordent laquestion de lacquisition de la parole et du langage en se rfrant ce sys-tme en trois composantes : la forme, le contenu et lusage. La forme com-prend la phonologie, le lexique, la morphologie et la syntaxe. Le contenucomprend la signification qui est la smantique du langage. Lusage est lapragmatique ou ltude de lensemble des codes qui rgissent les intentionsde communication des locuteurs. La figure 1.1 reprsente schmatiquementles composantes du langage.

    Figure 1.1 : Composantes du langage

    Smantique/Pragmatique(tude du sens et de lusage appropri dun mot

    ou dune phrase dans un contexte de communication)

    Syntaxe(principes sous-jacents toutes les langues du monde)

    Lexique/Morphologie(dictionnaire mental des mots et de leur formation)

    Phonologie/Phontique Classification des sons perus et articuls

    Rgles phonotactiques de la syllabe Prosodie de la phrase (ton, accent, longueur, rythme, intonation)

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    6

    Ds les premiers mois, une capacit perceptive des sons de la parole permetau bb de discriminer, de catgoriser les sons lmentaires puis de recon-natre certains mots de sa langue par la prosodie (lenveloppe musicale de la parole avec ses aspects de rythme, de tempo, de mlodie, daccent,dintonation). Vers 7-8 mois, les bbs sont capables de reconnatre et demmoriser des formes syllabiques de type mot avec des squences con-sonnes-voyelles bien dfinies appartenant aux particularits de sa langue.Vers 9-10 mois, cest la priode de la production du babillage et des pre-miers mots avant lexplosion lexicale vers 18 mois, lmergence des assem-blages de mots vers 24 mois, et enfin la construction des catgoriesmorphosyntaxiques partir de 30 mois. Mme si la variabilit inter-indivi-duelle est trs importante, la priode 0-3 ans est dcisive dans le droule-ment du processus dacquisition de la parole et du langage chez lenfantcomme lillustre la figure 1.2.

    Figure 1.2 : Chronologie des acquisitions du langage chez lenfant de 0 3 ans

    Perception de la parole : premires tapes

    Les caractristiques de la perception de la parole ont t mises en videncede faon trs prcoce chez le bb.

    Attention slective et perception catgorielle

    La perception catgorielle des sons de parole a t observe au coursdpreuves dhabituation. Chez le bb expos un stimulus acoustique, le

    PhonologieTraitement de la parole

    Identification de la forme et de la

    catgorie des mots

    Traitement syntaxique

    Catgorisation des phonmes

    Sensibilisation au rythme et la prosodie

    Traitement lexical

    Identification des catgories syntaxico-

    smantiques

    2 mois 5-9 mois 12-14 mois 24-36 mois

    Perception

    Babillage, premiers mots, premires phrases

    Production

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    7

    AN

    ALY

    SErythme de succion tend diminuer (habituation) si le stimulus ne variepas ; il sacclre en revanche, lorsquon prsente un stimulus que le nour-risson peroit comme diffrent du premier. Des expriences fondes sur ceparadigme dhabituation avec succion non nutritive montrent qu la nais-sance, lenfant peroit de faon catgorielle des contrastes sonores de parolereposant sur le trait de voisement (sourdes versus sonores). Eimas et coll.(1971) et Mehler et coll. (1988) ont montr quentre la naissance et4 mois, les bbs taient capables de discriminer mme les contrastes qui nesont pas prsents dans leur environnement (Jusczyk, 1997). partir decette capacit perceptive initiale, le nourrisson dveloppe et organise saperception des sons de la langue environnante (Kuhl, 1992) pendant queles contrastes non reprsents dans sa langue finissent par ne plus tredetects vers 10-13 mois (Werker et Tees, 1984). Linfluence spcifiquedune langue apparat plus tt sur les voyelles que sur les consonnes (Polkaet Werker, 1994). Lespace vocalique serait constitu vers lge de 10 mois.Puis, les rpertoires consonantiques denfants appartenant des commu-nauts linguistiques diverses se diffrencieraient progressivement entre11 et 13 mois.

    Segmentation prcoce et perception des indices prosodiques (rythme et mlodie)

    Bien avant de pouvoir comprendre le sens des mots, le bb en privilgie laforme sonore (Saffran et coll., 1996 ; Nazzi et coll., 1998 ; Nazzi et coll,2000 ; Ramus et coll., 2000a et b ; Bertoncini et Nazzi, 2004 ; Kuhl, 2004 ;Nazzi et coll., 2005). Le bb est sensible aux diverses rgularits rythmiqueset mlodiques de sa langue (mots fortement accentus, terminaisons de phra-ses). Cela suggre que la reconnaissance prcoce de la langue maternelle dansles deux premiers mois de vie serait en fait une reconnaissance du type derythme de la langue maternelle. Des discriminations plus fines entre lalangue maternelle et des langues de la mme famille rythmique mergentvers 5 mois.

    Les tudes portant sur le dveloppement de la segmentation de la parole lais-sent apparatre le rle fondamendal des indices prosodiques (rythme et mlo-die) dans linitialisation des processus de traitement, en particulier pour lasegmentation permettant dextraire les mots et de reprer les rgularits syn-taxiques qui organisent les phrases en units linguistiques hirarchises. La composante prosodique est ncessaire pour mettre en relation la phonolo-gie et la syntaxe (Morgan, 1986 ; Jusczyk, 1992 ; Morgan et Demuth, 1996 ;Gout et coll., 2004).

    La langue environnante module la perception de la parole du trs jeuneenfant (Werker et Lalonde, 1988 ; de Boysson-Bardies, 2004). Chaquelangue possde un matriel prosodique, phonologique et phontique spcifi-que, ainsi que des rgles particulires de mise en relation des diffrentes cat-

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    8

    gories syntaxiques. En russe, par exemple, le sens dune phrase comme maman embrasse bb sera diffrent selon la dsinence ou la terminaisondes mots bb et maman ; on comprendra soit que maman estembrasse, soit au contraire que bb est embrass : mama tseluyetmalyutkU veut dire maman embrasse bb mais mamU tseluyetmalyutka veut dire bb embrasse maman . Un bb russe de 12 moisdoit donc tre attentif la terminaison des mots alors quun bb franais demme ge doit focaliser son attention sur lordre des mots.

    Production de la parole : premires tapes

    Du babillage au rcit, plusieurs tapes jalonnent le dveloppement linguisti-que de lenfant.

    Babillage

    Les premiers travaux portant sur le babillage remontent Jakobson (1969)qui dcrivait le babillage comme une suite de sons, alatoires et extrme-ment varis, nentretenant aucune relation ni avec les premiers mots desenfants, ni avec ceux des adultes. Depuis, un grand nombre de travaux ontmontr une continuit entre les sons prsents dans les premires vocalisa-tions prlinguistiques et ceux prsents dans les premires formes langagiressignifiantes.

    Son mergence est mme considre comme un moment cl du dveloppe-ment langagier et sa description en stades comme un lment crucial de lacomprhension du dveloppement linguistique chez le jeune enfant. Unretard de lapparition du babillage serait mme un prdicteur des troubles desapprentissages ultrieurs (Oller et coll., 1999).

    Principales tapes du babillage

    1 mois et mme avant, des mouvements phonatoires quasi rflexes de type[eu] ont t observs.

    De 1 4 mois, des squences phoniques, constitues de syllabes primitivesnettement perceptibles par lentourage, formes de sons quasi vocaliques etde sons quasi consonantiques articuls larrire de la gorge apparaissent.

    De 4 8 mois, on observe des brusques changements de la frquencefondamentale, des productions de voix bitonales et des tremblements de lavoix. Le rpertoire phonique slargit avec lapparition de sons conso-nantiques longuement tenus. Vers lge de 6 mois, le babillage rudimen-taire (marginal babble) se compose dassemblages consonne-voyelledifficilement segmentables en raison dune articulation assez lche et de

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    9

    AN

    ALY

    SEtransitions trs lentes entre les mouvements de fermeture et douverture dutractus vocal.

    Vers 8-10 mois, les enfants commencent produire le babillage canoniquecest--dire des syllabes bien formes de type CV (consonne-voyelle). Lebabillage canonique est un assemblage articulatoire qui se compose dun noyau dnergie , le son vocalique, et dau moins une marge , le sonconsonantique qui possde les caractristiques temporelles de la langue-cible.

    MacNeilage et Davis (1993 et 2000) ont dvelopp une thorie biomcani-que explicative de ces tendances communes appele thorie du cadre et ducontenu (frame-content theory). Selon ces auteurs, le babillage est ralis pardes cycles simples ou rpts doscillation mandibulaire (le cadre) provo-quant la production de structures simples ou redupliques de type CV.Ainsi, observe-t-on une tendance forte de la part des enfants commencerleurs noncs par une consonne et lachever par une voyelle.

    Selon MacNeillage et Davis (2000), les langues du monde ont galementtendance conforter le type syllabique CV, seul type considr comme uni-versel. La premire priode de production enfantine serait ainsi dominepar le cadre dans lequel les inventaires et structures de sons particuliers peu-vent tre raliss grce la seule oscillation mandibulaire avec une contri-bution minimale des articulateurs. La deuxime tape reprsente une phasede complexification avec introduction du contenu dans le cadre. Linven-taire des sons connat une augmentation significative puis, partir dunetaille dinventaire donne, apparat la capacit moduler ces sons de faoninter- et intra-syllabique. Ces mouvements de complexification sont pr-sents la fois dans les langues du monde et chez les enfants. Des analyses defrquence de mots ont rvl la prsence de ces formes dans dix languesactuelles : en anglais, estonien, franais, allemand, hbreu, japonais, maori,quechua, espagnol et swahili (MacNeilage et Davis, 2000).

    Dautres chercheurs estiment que la langue environnante serait lorigine decertaines productions prfrentielles la fin de la priode de babillage et aucours de la priode des premiers mots. De Boysson-Bardies et coll. (1984)ont fait couter des adultes nafs des squences de babillage en franais,arabe et cantonais. Les participants avaient pour tche didentifier lebabillage des enfants franais gs de 8-10 mois. Le rsultat obtenu 70 %didentifications correctes suggre que le babillage de la priode pr-linguistique prsente des caractristiques intonatives dpendantes de lalangue environnante. De Boysson-Bardies et coll. (1989) ont galementcompar des voyelles produites par des enfants franais, anglais, cantonais etalgriens. Ces auteurs aboutissent la conclusion suivante : la qualit acous-tique des voyelles produites dans le babillage diffre dune langue lautre.

    Le babillage serait tout dabord redupliqu, form dune chane de syllabesidentiques du type mamama , papapapa . Il se diversifierait ensuite, les

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    10

    syllabes successives diffrant les unes des autres soit par la consonne, soit parla voyelle, soit par les deux, patata , tokaba , badata . Dans cessries, le jeune enfant favorise les syllabes ouvertes de type CV au dtrimentde celles de type syllabique ferm : CVC (Oller et Eilers, 1982 ; Locke,1983 ; Kent et Bauer, 1985 ; Stoel-Gammon, 1985 ; Vihman, 1992).

    Premiers mots

    La production du lexique chez lenfant est lun des phnomnes les plusspectaculaires dans toutes les langues du monde. Ce phnomne est marqupar un brusque accroissement du vocabulaire entre 12 et 30 mois. Enmoyenne, un enfant produit 10 mots 12 mois, 50 mots 18 mois, plus de300 mots 24 mois et 500 mots 30 mois. Les tudes grande chelle sur39 langues3 ont montr non seulement une rgularit dans le rythme desacquisitions mais aussi des variations interindividuelles et interculturellesconsidrables. Les facteurs qui sous-tendent les rgularits et les variationsde cette explosion lexicale sont multiples et ne semblent pas rpondreaux mmes lois dveloppementales.

    Les premiers mots sont souvent constitus dune ou de deux syllabes identi-ques formes dune consonne et dune voyelle. Lenfant les utilise pour dsi-gner toute une gamme dobjets (surgnralisation). Il est dailleurs ncessairede connatre le contexte pour interprter ces premiers mots. Ces surgnrali-sations se rduisent mesure que saffine la discrimination.

    Les premiers mots que prononce lenfant sont loin davoir la valeur de prci-sion de nos concepts adultes. Un mme mot peut tre utilis dans des situa-tions trs diffrentes. Le mot manteau par exemple peut dsigner levtement, le chapeau blanc ou la poussette utilise pour la promenade. Il estfacile de comprendre comment lenfant associe les divers lments dunesituation telle que lhabillage en vue dune sortie par exemple, et les dsignepar le mme terme.

    Eve Clark (1974) a tudi la gnralisation des premiers mots. Elle montrepar exemple que la classe ouf-ouf [ufuf] peut dsigner les animaux depetite taille comme le chien, le mouton, le chat tandis que les mots meuh-meuh [m|m|] sont employs pour les animaux de grande taille. Cela sup-

    3. http://www.sci.sdsu.edu/cdi/adaptations_ol.htmAnglais (Grande-Bretagne), anglais (Nouvelle-Zlande), allemand (Autriche), allemand(Allemagne), bantou (kiswahili et kigiriama, Afrique), bengali, basque, catalan, cantonais (Hong-Kong), chinois, croate, coren, danois, espagnol (Cuba), espagnol (Mexique), espagnol (Europe),finlandais, franais (Canada), franais (Europe), galicien, grec, hongrois, hbreu, islandais, italien,japonais, langue des signes (USA), malaisien, mandarin (Beijing), nerlandais, polonais, portugais(Brsil), roumain, russe, tamoul (Ceylan), tha, turc, sudois

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    11

    AN

    ALY

    SEpose une reprsentation mentale par laquelle le sens des premiers mots devrasaffiner mesure que lenfant acquiert dautres mots et quil peroit les diff-rences entre les objets et les situations. Tout nouvel lment dinformationsur son univers semble amener lenfant restructurer le sens initial de sespremiers mots.

    Ds lge de 10-13 mois, lenfant met des noncs ne comportant quunseul mot (priode dite un mot la fois ).

    Laccs aux premiers mots suppose chez lenfant une certaine connaissancedes objets et des vnements de son environnement. Avant de pouvoir asso-cier une squence sonore particulire une classe particulire dobjets, ildoit : disposer du concept de lobjet, cest--dire distinguer entre objet etcontexte ; apprendre que les sons mis par ladulte sont lis un objet particulier, etque lobjet est toujours associ ce son ; avoir la notion quun item lexical dsigne le mme objet mme si ce der-nier apparat diffrents moments, en diffrents endroits, diffrentes dis-tances et dans diffrentes positions. Les attributs sont indpendants descontextes auxquels ils sappliquent et rciproquement : la mre, ou le pre,peut changer de vtements ou de coiffure, mais reste la mme personne ; organiser la coordination de lespace, des objets et des vnements appr-hends dans ses diffrentes modalits sensorielles.

    La base smantique des premiers mots chez le jeune enfant est donc consti-tue par un systme initialement limit mais ouvert, qui encode les objetsfamiliers concrets, les principales personnes de son entourage, de mme que,progressivement, les tats et les changements dtat de ces objets et person-nes, les actions que les personnes effectuent sur les objets et les sentimentsimmdiats de ces personnes.

    valuation des premiers mots

    Gnralement, les premiers mots de lenfant se rfrent aux personnes et auxobjets avec lesquels ils sont le plus souvent en contact, les objets et les per-sonnes qui font partie de son univers, les membres de sa famille, les ani-maux, la nourriture, les boissons et les jouets (Nelson, 1973). Ladaptationfranaise de linventaire du dveloppement communicatif de Bates-Mac-Arthur (Communicative Development Inventories, CDI) pour valuer lespremiers mots de lenfant 12 mois (Kern, 2003 ; Bovet et coll., 2005a et b)est prsente dans le tableau 1.I. On demande aux parents de cocher la pre-mire colonne (C) pour les mots que lenfant comprend mais ne dit pasencore (on considre que lenfant comprend un mot mme sil ne le com-prend que dans une seule situation) ou bien de cocher la deuxime colonne(CD) pour les mots que lenfant comprend et quil utilise de manire sponta-ne. Si sa prononciation est diffrente de celle des adultes, on coche tout demme le mot.

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    12

    Tableau 1.I : Adaptation du CDI : Inventaire franais du dveloppementcommunicatif (IFDC)

    La croissance du vocabulaire est trs rapide entre 16 et 20 mois, priode delexplosion lexicale des 50 premiers mots qui stend sur une priode de 4 5 mois.

    Base phonologique des premiers mots

    Les enfants mettent plus de deux ans partir de leurs premiers mots pourproduire linventaire complet des consonnes et des voyelles (Fikkert, 1998).Lacquisition est relativement lente parce que larticulation motrice est trscomplexe, qui requiert la coordination fine de plusieurs dizaines de musclespour programmer et raliser plus dune dizaine de cibles phontiques parseconde. Il y aurait un encodeur phontique qui prvoit deux voies pourtablir un plan articulatoire, celle de lassemblage et celle de la rcuprationde plans stocks pour des patterns frquents (Levelt et coll., 1999).

    Les prfrences phontiques au cours de la production des premiers mots etdans certaines langues du monde semblent indiquer lexistence de propritsfondamentales du systme de production.

    C CD C CD C CD C CD

    abeille ae ainsi font font all

    arrte/r attends/attendre attention au revoir

    a/avoir soif balle ballon bb

    biberon/bibi bois/boire bonjour bonne nuit

    caillou camion de pompier chat chaud/e

    chaussette chien/toutou chut clef

    collier couche/lange coucou cuillre

    cuisine danse/r donne/r dors/dormir/faire dodo

    eau encore tre fatigu fais/faire un bisou

    fentre figure/visage fleur frigo

    gteau/biscuit glace (aliment) jour l

    lapin lit livre main

    maison maman mange/r marche/r

    merci miam-miam miaou montre/r

    musique nez prnom de lenfant

    nombril/bourrillon

    non nounours ouaf-ouaf oui

    pain papa (petit) djeuner pied

    poubelle prends/prendre pure regarde/r

    sil te plat sucette/tutte tante/tata/tatie tee-shirt

    tlphone tombe/r tortue vite

    voiture/auto

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    13

    AN

    ALY

    SEExplosion lexicale

    La priode dsigne sous le terme d explosion lexicale a t rapporte parun grand nombre dauteurs tels Mac Carthy (1954), Bloom (1973), Benedict(1979) ou plus rcemment Goldfield et Reznik (1996). Elle se caractrisepar un apprentissage trs rapide mais galement par une utilisation coh-rente, catgorielle et conventionnelle des mots. Nanmoins, il existe ungrand nombre de divergences entre les auteurs concernant la dfinition dece phnomne dexplosion lexicale. En effet, bien que la majorit des tudessaccordent sur le fait que tout enfant connaissant un dveloppement normalpasse par cette pousse lexicale (lexical spurt), quelques unes avancent le casdenfants ayant un dveloppement plus progressif de leur rpertoire lexical.Cest le cas de Nelson (1973) qui note un apprentissage plus progressif chezdes enfants anglophones possdant un lexique plus vari. Il en va de mmepour Goldfield et Reznik (1996) qui observent que sur 18 enfants anglopho-nes de 14 24 mois, seulement 13 manifestent une explosion lexicale.

    On note aussi des divergences quant au moment de lapparition de cetteexplosion lexicale. Dans la plupart des cas, elle surviendrait lorsque lenfantpossde environ 50 mots diffrents dans son rpertoire, savoir au coursdune priode stendant de 16 19 mois (Poulin-Dubois et Graham, 1994).Dautres auteurs la situent vers 20-24 mois, juste quelques semaines avantlmergence de la syntaxe (Dromi, 1987 ; Mervis et Bertrand, 1995). Uneraison possible de ces divergences pourrait tre que la variabilit interindivi-duelle reste importante au dbut de la production du lexique. Les variationsde la priode de lexplosion lexicale seraient aussi associes la diversit etla complexit des langues (Bloom, 1970 ; Vihman, 1986 ; De Boysson-Bardies et Vihman, 1991 ; Vihman et De Boysson-Bardies, 1994).La recherche des facteurs qui seraient lorigine des variations interindivi-duelles dans le dveloppement du vocabulaire donne des rsultats encore trscontroverss. Si lon a traditionnellement tendance associer une prcocitdu vocabulaire aux filles plutt quaux garons, et aux milieux socioculturelsles plus favoriss (Le Normand, 1999 et 2006), certains travaux suggrent queles facteurs cognitifs lis au traitement du langage et particulirement lammoire phonologique sont aussi dterminants (Adams et Gathercole,1996). Les auteurs de cette tude ont test un groupe denfants entre 2 et3 ans sur trois critres de mmoire phonologique (squence de chiffres, rp-tition de mots et de non-mots) et sur des preuves faisant intervenir dautresaptitudes cognitives. Les rsultats montrent que laptitude la rptition estassocie la fois la connaissance du vocabulaire et la matrise des capaci-ts articulatoires, indiquant ainsi que les capacits de mmoire phonologiquepeuvent tre values de manire fiable chez les trs jeunes enfants.Lexistence de variations interindividuelles observes dans les premires pro-ductions de mots est trs lie lmergence des premires catgories mor-phosyntaxiques chez les jeunes enfants. Un tel constat a conduit les auteurs postuler deux mcanismes dapprentissage :

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    14

    un mcanisme analytique qui permettrait aux enfants de dcomposer laparole entendue (linput) en units pertinentes pour construire des reprsen-tations adquates ; un mcanisme holistique qui permettrait lenfant de stocker et de repro-duire de larges segments (chunks) bien avant que ceux-ci ne soient analyss.Ce sont par exemple, des marques de remplissage comme les fillers telsque a ou simples voyelles centrales indiffrencies devant le nomou le verbe, trs frquentes 20 mois (Peters et Strmquist, 1996 ;Veneziano et Sinclair, 2000 ; Demuth, 2001).

    Ces premires formes paragrammaticales coexisteraient aussi souvent avecdautres expressions verbales comme les expressions oui-non , les onoma-topes, les interjections, les formes syncrtiques prtes lemploi comme a+y+est , il+est+l , cest+beau+a , bonne+nuit , bonjour , au+revoir , autant de formes mmorises, figes, qui sont restitues bonescient. Lorigine de ces variations individuelles reste encore mconnue maisrelance le dbat sur le rle des facteurs de maturation linguistique et/oucognitive et des facteurs spcifiques la langue.

    Assemblages de mots

    partir de 20 mois, ce qui correspond au stade moyen des 50 mots, lesassemblages de mots se mettent en place trs rapidement. La question ici estcelle des relations formes-fonctions et particulirement de lorganisation desmots selon leur fonction. Comment lenfant matrise-t-il les contraintessmantiques et syntaxiques qui prsident lorganisation squentielle desnoncs ? Selon Braine (1963, 1971 et 1976), tout se passerait comme silenfant slectionnait, dans le langage entendu, un petit nombre de mots etsen servait en leur attribuant une position fixe. Lenfant mettrait en appli-cation un nombre limit de formules positionnelles qui seraient directementapprises et drives du langage adulte selon un principe dit de gnralisa-tion contextuelle . Ce principe de la grammaire pivot stipule quelenfant repre la position dun mot ou dun groupe de mots dans les noncsde ladulte et tend ensuite utiliser le mot ou le groupe de mots en formules la mme place, cest--dire dans le mme contexte. Lagence-ment des premiers mots ne semble donc pas tre laiss au hasard. Trs vitelenfant repre un petit nombre de formes verbales dans le langage deladulte et les utilise dans ses propres productions.

    Caractristiques des assemblages de mots : omissions des catgories syntaxiques

    Ce qui caractrise la priode dassemblage de mots, cest la frquence trsleve de lomission des catgories syntaxiques dans le systme nominal(dterminants, prposition, adjectifs possessifs ou dmonstratifs) et dans lesystme verbal (pronoms, auxiliaires, copules).

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    15

    AN

    ALY

    SEParisse et Le Normand (2000a) ont tudi les assemblages de mots en cons-tatant une bonne correspondance entre les productions de lenfant de24 mois et celles de ladulte. Les rsultats du tableau 1.II montrent, en effet,que les bi-catgories utilises le plus frquemment par les enfants sont desfragments dnoncs dadulte.

    Tableau 1.II : Assemblages de mots dfinis comme tant des bi-catgories(daprs Parisse et Le Normand, 2000a)

    Ces productions ont t recueillies en situation de jeu avec un matrielaudiovisuel et analyses selon le codage du Childes (Child Language DataExchange System : Systme dchanges des donnes du langage chez lenfant).Elles ont rvolutionn depuis 1981 les oprations de transcription, decodage, de stockage, danalyse automatique, et de transfert et partage desdonnes (McWhinney, 2000 ; Parisse et Le Normand, 2000b ; Rose, 2003).

    Quelle est la nature de ces omissions ?

    Radford (1990) avance lhypothse quau dbut, la grammaire de lenfant estlimite aux catgories lexicales, le systme grammatical/fonctionnel tant

    Enfants 24 mois Adulte

    Rang*Nombre

    de bi-catgoriesBi-catgories Exemples Rang

    Nombre de mots

    1 197 pro+v|tre c+est 3 4 949

    2 168 det+n le +bb 1 6 866

    3 46 v|tre+adv (place) est+ l 131 122

    4 46 v|tre+adj est+ petit 29 727

    5 44 pro rel+pro o+lest 4 3 292

    6 40 v|avoir+adv (neg) a+pas 39 530

    7 39 prep: art+n du+pain 8 2 340

    8 39 v|tre+v (pp) est+parti 30 706

    9 35 pro+v moi+veux 2 5 200

    10 31 pro| y+v|avoir y+a 23 877

    11 29 adv: neg+adv (place) pas+ l 207 56

    12 29 adj+n petit bb 16 1 224

    13 25 Co act+pro oh+moi 118 146

    14 24 Co act+v (pp) oh+parti 548 1

    15 20 v|tre+adv (neg) est+pas 36 627

    Total 812 27 663

    pro : pronom ; v : verbe ; det : dterminant ; n : nom ; adv : adverbe ; adj : adjectif ; rel : relatif ; neg : ngation ;prep : prposition ; art : article ; pp : participe pass ; co act : co-actant* Le rang est li la frquence dutilisation des bi-catgories

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    16

    soumis une maturation plus tardive. Wexler (1994) montre aussi quilexiste un stade dans le dveloppement linguistique du jeune enfant, au coursduquel celui-ci nutilise pas forcment les marques de temps dans des phrasesprincipales bien quil connaisse les proprits de la flexion des verbes. Il rap-porte galement que dans dautres langues, en franais (Pierce, 1992) et enallemand (Poeppel et Wexler, 1993), mais aussi en danois, en norvgien, ensudois notamment, le jeune enfant de 2 ans utilise parfois les formes infini-tives des verbes alors que des formes flchies sont attendues. En outre, dansces contextes grammaticaux et pour une mme phrase, des infinitifs peuventtre, selon lui, prsents ou absents, donc optionnels.

    Ces infinitifs ont t nomms infinitifs racines (root infinitives) par Rizzi(1994) et infinitifs facultatifs (optional infinitives) par Wexler (1994). Cettepriode dacquisition caractrise par la possibilit de produire des noncsdclaratifs linfinitif se retrouve aussi dans un grand nombre de languescomme langlais, lallemand, le nerlandais, le sudois, le danois et le norv-gien. Le phnomne est apparemment quasi inexistant dans les langues per-mettant lomission libre du sujet, comme litalien, lespagnol et le catalan(Guasti, 1994 ; Sano et Hyams, 1994) ou le japonais (Sano, 1996). Chez lesenfants francophones, il est difficile de reprer clairement cette priode delinfinitif racine et facultatif cause de lhomophonie / er que lonretrouve dans ces verbes du premier groupe qui sont trs frquemment utili-ss par lenfant francophone au dbut de la construction de la formation desmots. De plus, les enfants francophones produisent de manire co-occurentedes noncs dclaratifs temps conjugu en ralisant des surgnralisations.

    Caractristiques des premires formes morpholexicales : principe de surgnralisation (exemple du suffixe pour les verbes irrguliers)

    Lenfant ayant appris, par exemple, lemploi du suffixe pour indiquer leparticipe pass, applique ce principe en le gnralisant aux verbes des autresgroupes. Il produit alors des structures comme il a mett pour il a mis , il a batt pour il a battu , il a ri pour il a ri , il a rpond pour il a rpondu , il a boiv ou il a buv pour il a bu . Tou-jours, en raison dun principe de gnralisation, il fera aussi des erreurscomme il a prendu pour il a pris , il a teindu pour il a teint , il a couri pour il a couru Dans tous ces cas, lenfant applique unprincipe des lments linguistiques de faon inapproprie.

    Inversement, il se produit des cas o lenfant applique un principe excep-tionnel des structures linguistiques stables. Il est donc possible de lenten-dre dire : il a envoi pour il a envoy , erreur sans doute forme paranalogie des structures irrgulires comme il a crit ou il a conduit ou encore il pourra dire il dormra pour il dormira .

    La surgnralisation peut stendre aussi au domaine lexical. Lorsquelenfant cre des mots nouveaux, il a tendance les concevoir partir des

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    17

    AN

    ALY

    SEstructures dj existantes. Par exemple, il pourra dire la chambre de nuit par analogie avec la chemise de nuit .

    Indice de maturit syntaxique : longueur moyenne de lnonc

    Daprs plusieurs auteurs (Brown, 1973 ; Miller et Chapman, 1981 ; Rondalet coll., 1985 ; Wells, 1985), la longueur moyenne de lnonc (LME)value la maturit et la complexit syntaxique de lenfant. Cette chelle seprsente en six phases de dveloppement (tableau 1.III).

    Tableau 1.III : Six stades de lchelle LME (Longueur moyenne de lnonc)

    Selon Brown (1973), la LME est un bon indice de la maturit du langage desjeunes enfants. Sa validit chez le jeune enfant est fiable lorsquon obtient50 noncs ou plus.

    Lnonc se dfinit soit : comme une production verbale marque son dbut et sa fin par unepause ; comme une production verbale marque son dbut et sa fin par unemodification de lintonation ; par son caractre grammatical : des phrases compltes dfinies comme desproductions verbales contenant au minimum un nom ou un pronom dansune relation sujet-verbe, des phrases incompltes (pas de sujet, verbes limpratif).

    Des donnes francophones (Le Normand, 1991 et 2006) portant sur desenfants gs de 24 36 mois ont dcrit lvolution de cet indice avec lge.Tous les auteurs saccordent pour estimer, quau-del dune longueurmoyenne de 4 mots par nonc, ce que dit lenfant est davantage fonctiondu contexte dans lequel est recueilli le langage que de sa maturit syntaxi-que. Il ny a plus de corrlation entre la LME et lge. Il convient donc delimiter lutilisation du LME une priode bien dtermine (24-36 mois). Cefait a t confirm par dautres donnes, soit francophones portant sur60 enfants gs respectivement de 20, 30 et 39 mois (Bassano et coll., 1998 ;Bassano, 2005), soit collectes dans dautres langues, dgageant ainsi un cer-

    Phases LME (en morphmes par noncs) ge (mois) Caractristiques

    I 1 2 12 26 noncs 1 ou 2 mots

    II 2 2,5 27 30 noncs 2 mots et +

    III 2,5 3 31 34 Phrases simples

    IV 3 3,75 35 40 Phrases complexes

    V 3,75 4,5 41 46 Coordination de phrases

    > V+ > 4,5 > 47 Construction de rcits

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    18

    tain nombre de variations et de rgularits. Au-del de cet ge, dautres cat-gories syntaxiques doivent tre dfinies pour apprcier le dveloppementsyntaxique. Ce qui importe ici est le processus trs rapide mis en uvre parlenfant pour apprendre utiliser de manire approprie ces catgories : lesystme nominal avec lmergence des dterminants (article dfini et ind-fini) et des prpositions, les flexions du nom avec les marques de laccord dugenre et du pluriel, mais aussi le systme verbal (auxiliaires, copules) aveclmergence des pronoms, le dveloppement des flexions du verbe (conjugai-sons) et la subordination des noncs.

    Certaines langues comme les langues latines et le russe utilisent beaucoupde dsinences. Les enfants qui se familiarisent avec de telles langues acqui-rent trs vite ces mots grammaticaux qui se refltent dans les noncsbinaires avec des complments dobjet direct et indirect. La dsinence ducomplment dobjet direct est parmi celle que lenfant acquiert le plus vitelorsquil apprend le russe, le serbo-croate, le latvien, le hongrois, le finnoiset le turc.

    En franais, lordre des mots dtermine le sens de la phrase. Un nonc secompose gnralement sur le modle sujet-verbe-complment dobjet (SVO). Ds que lenfant a compris lordre des mots, il peut attribuer un sensdiffrent aux noncs tels que : le garon pousse la fille ; la fille poussele garon .

    Construction de rcits

    Les recherches propos du rcit oral chez lenfant ont conduit distinguer,dune part, entre une dimension que lon peut considrer comme concep-tuelle qui a trait la reprsentation des squences dvnements et une autreplus spcifiquement linguistique et, dautre part, relativement cette der-nire, entre une dimension rhtorique concernant la structure des textesnarratifs et une autre ayant trait aux aspects lexico-syntaxiques intervenantdans la mise en texte (Fayol, 1985 et 2000). Lintrt de ces distinctionsrepose sur le fait que les connaissances mobilises et leurs modalits dacqui-sition ne se recouvrent pas et que leur acquisition pose des problmes spci-fiques.

    Reprsentation mentale des squences dvnements

    La dimension conceptuelle concerne la reprsentation mentale des tats etvnements du monde rel ou fictif ainsi que les relations temporelles oucausales quils entretiennent et qui font intervenir des objets, lieux et per-sonnages. Elle correspond approximativement ce qui est dnomm dans lalittrature modle mental (Johnson-Laird, 1983) ou modle de situation

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    19

    AN

    ALY

    SE(van Dijk et Kintsch, 1983). Elle vaut aussi bien pour les rcits oraux oucrits que pour les films ou les bandes dessines. Elle relve de la reprsenta-tion du monde indpendamment de la manire dont celle-ci est (re)code(Gernsbacher, 1990). Elle a donn lieu plusieurs approches thoriques,dont la plus importante pour ce qui a trait au rcit a t labore par Schanket Abelson (1977). Cette conception postule que la comprhension ou laproduction de rcit est sous-tendue par une trame mentale o les actionssorganisent en fonction de buts poursuivis par des agents, lesquels dvelop-pent ces actions pour djouer les obstacles qui sopposent latteinte de cesbuts. Ces squences vnementielles ne sont ni verbalises, ni dessines.Cette trame est formalisable sous forme de rseaux causaux : chanes dv-nements lis entre eux par des relations dordre temporel, causales ou autres.Ltude du dveloppement de la comprhension et de la production deschanes chronologico-causales met en vidence deux faits paradoxaux.Dune part, lacquisition et la mise en uvre de ces chanes se rvlent trsprcoces puisquelles sont disponibles ds lge de 5 ans et mme avant(Sperry et Sperry, 1996). Dautre part, ltude de la comprhension en lec-ture et de la composition crite rvle que la construction de modles men-taux correspondant ces chanes volue nouveau entre 6 et 10 ans. Toutse passe comme si le passage lcrit, en raison des situations nonciativesqui le caractrisent par rapport loral et des contraintes nouvelles quil faitpeser sur les traitements, induisait une diminution ou une stagnation descapacits de mobilisation des connaissances relatives aux chanes causales etaux infrences quelles supportent.

    Structure textuelle des rcits

    La dimension rhtorique tient au fait que la mise en forme langagire durcit ne se limite pas noncer les personnages, lieux, objets et vnements.Pour une culture donne, il existe une ou plusieurs formes canoniquesdorganisation des noncs (et non seulement des contenus quils voquent)(Gutteriez-Clellen et coll., 1995). Les travaux des annes soixante-dix ontmis en vidence leffet de ces organisations gnralement dnommessuperstructures narratives. Pour Mandler et Jonhson (1977) comme pourStein et Glenn (1979), tout rcit comporte un cadre (frame) dans lequelse trouvent prciss les lieux, moments et personnages. Ce cadre se placeen dbut des rcits, ce qui correspond des contraintes pragmatiques lies lefficacit de la communication, mais non aux ncessits du droulementdes faits (de la trame). Vient ensuite un dclencheur , lequel introduit unobstacle qui soppose en gnral latteinte du but poursuivi par le person-nage principal. Cet obstacle induit une raction motionnelle ainsi quellaboration dun sous-but visant lever ou contourner lobstacle. Ilsensuit une ou plusieurs tentatives , actions plus ou moins couronnes desuccs, jusquau rsultat final.

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    20

    Les recherches portant sur les adultes attestent que les rcits comportanttous les constituants dans lordre conventionnel sont mieux rappels queceux qui ne respectent pas ces contraintes (Yussen et coll., 1991). Cet effet at observ chez les enfants ds lge de 4-5 ans et dans diffrentes cultures.Toutefois, les plus jeunes tendent rappeler moins bien certaines catgoriesnarratives que les adultes : les ractions et les buts notamment (Mandleret coll., 1980). Cette caractristique des patrons de rappel des plus jeunes estprobablement imputable au dveloppement des chanes causales : les enfantsde 4-5 ans rencontrent des difficults dans la prise en compte de ce quimotive les squences dactions. En revanche, Poulsen et coll. (1979) mon-trent que la fin des histoires se trouve privilgie lorsquelle sinsre dansun rcit (en images) par rapport la condition o elle se situe dans une suitealatoire dimages.

    Les premiers rcits respectent rarement lorganisation cadre-dclencheur/complication-tentative/action(s)-rsolution. Il faut attendre environ 7-8 anspour que cette superstructure devienne dominante. Notamment, le place-ment en dbut de rcit des lments du cadre se rvle relativement tardif(Fayol, 1991). Cette apparition dun cadre formellement identifiable estcontemporaine de lutilisation norme de limparfait et du plus-que-parfaitainsi que dexpressions telles que la veille , le lendemain . Ces formesrelvent en franais des conventions narratives. Auparavant, les enfantstendent plutt produire un rsum de lvnement caractristique du dis-cours en situation qui sera ultrieurement dvelopp, au moins lorsquils la-borent un rcit prsentant une unit thmatique. Ce passage dun modedorganisation prcoce dominante discursive un autre correspondantmieux aux conventions du rcit crit pose le problme des raisons qui sous-tendent cette volution.

    Il parat plausible que lacquisition du schma narratif soit lie lexposition un corpus de rcits crits. Seuls, ces rcits prsentent les rgularits dorga-nisation correspondantes. Varnhagen et coll. (1994) ont montr chez desenfants de premire et deuxime annes primaires (CP CE1) que la lectureet laudition rptes et prolonges de textes narratifs induisent chez cesenfants lacquisition des rgularits caractristiques de la superstructure nar-rative. Cette hypothse souligne que ceux qui ne bnficient pas dune telleexposition ne dvelopperont pas ce schma. Les donnes de Cain (1996)confirment que les enfants qui ont une comprhension faible sont aussi ceuxdont les productions narratives scartent le plus de la superstructure du rcitet quils ont t moins que les autres en contact avec des rcits crits, queceux-ci leur aient t lus ou quils les aient lus eux-mmes. La simple exposi-tion passive aux textes narratifs ne suffit dailleurs pas entraner lextrac-tion des rgularits. Fitzgerald et Spiegel (1983) ont conu un programmedentranement la dcouverte et lutilisation de la superstructurenarrative en production. Les enfants ainsi instruits ont manifest une am-lioration significative de performances en production, mais aussi en compr-

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    21

    AN

    ALY

    SEhension, confirmant ainsi lexistence des corrlations observes par Cain(1996).

    En rsum, le schma narratif facilite lintgration des informations en com-prhension et la compltude et le respect du caractre conventionnel desrcits en production. Son intervention ne se confond pas avec celle des rela-tions chronologico-causales. Il constitue une organisation rhtorique con-ventionnelle qui ne peut sacqurir que par exposition un corpus de textesprsentant les rgularits correspondantes. Son acquisition est trs prcoceet dpend fortement du contact avec les rcits crits. Toutefois, un appren-tissage explicite par instruction savre efficace, mme un ge relativementlev.

    Dimension linguistique dans la construction du rcit : mise en texte

    La dimension linguistique concerne tous les phnomnes lis la mise entexte. Elle a surtout t analyse relativement au dveloppement du rcit.

    Tout rcit met en scne un ou plusieurs personnage(s) qui doive(nt) treintroduit(s) dans la narration puis r-voqu(s) au fur et mesure des besoins.Les langues disposent de marques spcifiques pour assurer ces diffrentes fonc-tions. Par exemple, les personnages ou objets nouveaux apparaissent dabordprcds dun article indfini ( un homme entra ). Les mentions ultrieuresutilisent des dterminants dfinis : articles ( lhomme ), pronoms ( il ),adjectifs dmonstratifs ( cet homme ). Globalement, lemploi, trs stro-typ, de ces marques ne soulve plus de problme chez ladulte. Il fait toute-fois appel des rgularits subtiles qui donnent parfois lieu des erreurs(Reichler-Bguelin, 1994), notamment lorsque plusieurs personnages sontconcerns et que leurs poids respectifs dans les actions successives varient(Fayol, 1997a).

    Une autre dimension linguistique a trait au marquage de la continuit et dela discontinuit vnementielles. Les rcits dcrivent des vnements suc-cessifs dont les liaisons peuvent tre de force et de nature diverses, par exem-ple, du simple droulement parallle de deux activits ( lhomme marchait/une automobile passait ) une relation causale troite ( le coup partit/lhomme tomba ). Des marques indiquent les degrs et natures des liaisons :connecteurs (et, mais, alors) (Bestgen et Costermans, 1997 ; Fayol etMouchon, 1997), signes de ponctuation (Fayol, 1997b ; Heurley, 1997),formes verbales permettant de distinguer entre des actions de premier planet des faits ou tats relevant du second plan ( lhomme marchait/un bruitattira son attention ) (Hickmann, 1997).

    La chronologie de lacquisition sur les aspects morphologiques et syntaxiquesdu rcit chez lenfant suggre que le statut morphologique des catgories syn-taxiques et leur construction se matrisent progressivement.

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    22

    Statut morphologique de larticle

    La chronologie approximative de lacquisition de larticle dans le systme dunom chez lenfant se ralise en moyenne dans le sens de la matrise delaccord (masculin et fminin) et du nombre (singulier et pluriel) sur les arti-cles indfinis vers 3 ans avant de porter sur celui des articles dfinis vers3 ans et demi.Peu dtudes ont analys systmatiquement le statut morphologique desarticles dfinis dans le langage enfantin. Celles qui existent soulignent quaudbut, lunit [dt+nom] semble difficilement dcomposable. Selon certainsauteurs, larticle a le statut dun prfixe, pour dautres, il sagit dune partienon segmente de la reprsentation phonologique du nom dpourvue destatut morphologique indpendant (Sourdot, 1977 ; Peters, 1983 ; Carroll,1989). Cest seulement dans un deuxime temps que les articles sont(r)analyss en tant que morphmes indpendants. De mme, Heinen etKadow (1990) mentionnent que les enfants commencent avec larticledfini et quon le trouve mme pendant cette priode dans des contextes olon sattend un article indfini. Clark et coll. (1985) puis Clark (1998)affirment que les enfants francophones ont tendance jusqu lge de 6 ans sur-employer larticle dfini, comme si les rferents de lunit [dt+nom]taient connus des auditeurs alors quils ne le sont pas. La relation entre laconnaissance mutuelle et lemploi des articles nest pas facile matriser.Une perspective similaire est dfendue par Karmiloff-Smith (1979) pour quilarticle dfini est dabord utilis dans une fonction dictique cest--dire ensituation hic and nunc . Cest dans un deuxime temps que lenfant prenden considration la situation extralinguistique.Du point de vue des phonologues, larticle est considr comme un lmentinaccentu qui dpend de llment lexical qui suit (ladjectif/le nom).Larticle na pas daccent individuel (Selkirk, 1984). En franais, cettedpendance de larticle est explicite, dans le contexte dun mot lexical quicommence par une voyelle ou un h dit muet . Le franais connat unallomorphe lid de larticle dfini dans ce contexte : lorange peut devenir la norange ou la orange ; lhistoire peut devenir la histoire .Lorsque larticle dfini masculin est slectionn par les prpositions , ou de , deux autres allomorphes apparaissent comme le rsultat de la con-traction de larticle dfini et la prposition. tant donn que seuls les l-ments ayant le statut de ttes syntaxiques peuvent samalgamer, il estattendu que cette opration ne stende pas aux dmonstratifs qui sont descatgories maximales : + le devient au ; de + le devient du .La capacit qua larticle dfini de slider et de se contracter avec les prpo-sitions ( et de ) relve dune proprit plus gnrale dlmentsnomms clitiques .

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    23

    AN

    ALY

    SEStatut morphologique du pronom

    La chronologie approximative gnralement admise dans la plupart des tudessur les pronoms est la suivante : moi au cours des premiers mots partir de18 mois, je , tu , il , elle partir de 30 mois (Pierce, 1992 ;Kaiser, 1994 ; Meisel, 1995 ; Ferdinand, 1996 ; Jakubowicz et Faussart, 1998 ;Granfeldt et Schlyter, 2001 et 2003). Entre 3 ans et 3 ans et demi, apparais-sent les acquisitions des pronoms objets comme le et la (Hamannet coll., 1996 ; Jakubowicz et Faussart, 1998 ; Granfeldt et Schlyter, 2003), etdes pronoms rflchis comme se (Barrire et coll., 2000).

    Dautres tudes ont montr que la restructuration prosodique (comme lli-sion, lamalgame, et le phnomne de liaison) sont des processus transitoiresfrquents entre 2 et 4 ans qui apparaissent frquemment dans les pronomspeu accentus (Chevrot et Fayol, 2001 ; Wauquier-Graveline, 2004 ;Chevrot et coll., 2005).

    Karmiloff-Smith (1986) dfinit trois tapes qui prsident lutilisation ad-quate des pronoms dans le rcit. Entre 3 et 5 ans, les enfants ne mettent pasencore en relation le pronom et le nom auquel il rfre. Entre 5 et 8 ans, lesenfants utilisent les pronoms en rfrence au sujet principal de lhistoire raconter. Enfin, ce nest quentre 8 et 12 ans que les enfants matrisent lastratgie dite anaphorique complte consistant utiliser les pronomspour tous les personnages de lhistoire raconte. Le traitement des anaphoresreste longtemps problmatique.

    Flexions verbales

    La fonction temporelle spcifique des flexions verbales nest pas encore ta-blie aprs 6 ans. De 3 6 ans, elles ne servent qu exprimer les caractristi-ques de laction. cet ge, lenfant utilise plus frquemment les adverbes etles conjonctions de temps que les flexions verbales pour exprimer les rela-tions temporelles entre les vnements.

    Connecteurs entre les propositions

    Les tudes sur la construction du rcit des enfants montrent que les connec-teurs entre les propositions ne sont pas acquis avant 10-11 ans (pour unerevue, voir Fayol, 1983 et 1997a ; Jisa, 1985 ; de Weck, 1991 ; Jisa et Kern,1998 ; Hickman, 2000).

    Entre 3 et 4 ans, les enfants nutilisent pas encore de manire convention-nelle les connecteurs du langage qui relient les propositions. Ils emploientbeaucoup de dictiques temporels comme ici , l , maintenant oude simples coordinateurs comme et , mais . Au cours de cette priode,il sagit de marquer lajout dun vnement plutt quune relation particu-lire entre les diffrents vnements. Cette stratgie souligne deux aspects dela production des enfants : dune part, ils ont des difficults construire unrcit dcontextualis et dautre part, ils ralisent plus une sorte dnumra-

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    24

    tion des diffrents tats de choses quune entit textuelle cohrente. Les con-traintes communicationnelles sont encore peu respectes.

    5 ans, les enfants commencent tablir des liens plus clairs et plus varisentre les vnements qui se droulent dans un rcit. Ce sont surtout des rela-tions de la simultanit (conjonction de coordination : et ; conjonction decoordination et adverbe de temps : et puis ; conjonction de subordinationet de squentialit : quand ; adverbes temporels : aprs , puis ). Lacoordination domine la subordination. Elle est reprsente principalement pardes locutions adverbiales et des propositions relatives. Pour les enfants de 5 ans,lauditeur a encore besoin de fournir des efforts dinterprtation des formes.

    7 ans, ils utilisent surtout des coordinateurs temporels exprimant la squen-tialit. Le regroupement en blocs informationnels est introduit par quelquesexpressions temporelles au dbut de lhistoire. La simultanit est exprimepar des subordonnes temporelles qui restent nanmoins trs rares. Rare estgalement la hirarchisation des vnements, qui sont en rgle gnraleintroduits les uns aprs les autres. Dans le domaine des connecteurs, lesenfants de 7 ans respectent les principes de dcontextualisation, mais leurcomptence narrative nest pas encore matrise. En effet, certains connec-teurs sont utiliss pour la constitution dune cohrence un niveau suprieur,celui de lpisode narratif.

    Les connecteurs les plus utiliss chez les enfants de 10-11 ans sont des con-necteurs temporels encodant la relation de simultanit et de squentialit.Toutefois, les enfants de 10-11 ans disposent aussi dautres outils pour expri-mer ces relations, comme les subordinateurs temporels. Bien que les enfantsde 10-11 ans utilisent encore la coordination la place de la subordination,cette dernire prend une place non ngligeable dans leurs productions, signedune certaine mise en relief dvnements particuliers, voire dpisodes nar-ratifs. Les enfants de 10-11 ans, bien que ne possdant pas encore une com-ptence narrative similaire celle des adultes, respectent les contraintes quivont de pair avec la constitution dune narration en franais. Les connecteursquils utilisent permettent de produire des histoires cohrentes tous lesniveaux danalyse. Ils ont leur disposition un ventail vari de formes dontils matrisent les diffrentes fonctions.

    En conclusion, lensemble de ces donnes sur la chronologie des acquisitionsde la parole du langage et de la construction du rcit devrait permettre auxpraticiens (pdagogues et cliniciens) de dfinir des objectifs mais aussi dereprer les asynchronies de dveloppement. Lvaluation prcoce des capaci-ts de segmentation, de lmergence du babillage, de lapparition des pre-miers mots et de la mise en texte partir des rcits dans sa dimensionconceptuelle et linguistique se justifie en raison de la valeur prdictive queces capacits prsentent par rapport lapprentissage de la lecture et delcriture.

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    25

    AN

    ALY

    SEBIBLIOGRAPHIE

    ADAMS AM, GATHERCOLE SE. Phonological working memory and spoken languagedevelopment in young children. Quarterly Journal of Experimental Psychology 1996,49A : 216-233

    BARRIRE I, LORCH M, LE NORMAND MT. La cliticisation en SE dans le langage delenfant : surgnralisation des affixations et des omissions. In : La cliticisation.MULLER C (ed). Centre National de la Recherche Scientifique, Bordeaux, 2000

    BASSANO D, MAILLOCHON I, EME E. Developmental changes and variability in theearly lexicon: a study of French childrens naturalistic productions. J Child Lang1998, 25 : 493-531

    BASSANO D. A naturalistic study of early lexical development: general processes andinter-individual variations in french children. First Language 2005, 25 : 67-101

    BENEDICT H. Early lexical development: Comprehension and production. J ChildLang 1979, 6 : 183-200

    BERTONCINI J, NAZZI T. Dveloppement prcoce de la perception de la parole. In :Dveloppement psychologique du nourrisson. LCUYER R (ed). Editions Dunod,Paris, 2004 : 387-424

    BESTGEN Y, COSTERMANS J. Temporal markers of narrative structure: Studies in pro-duction. In : Processing interclausal relationships. COSTERMANS J, FAYOL M (eds).Erlbaum, Mahwah, NJ, 1997

    BLOOM L. Language Development: Form and function in emerging grammars. MITPress, Cambridge, MA, 1970

    BLOOM L. One word at a time: The use of single word utterances before syntax.Mouton, The Hague, The Netherlands, 1973

    BOVET F, DANJOU G, LANGUE J, MORELLO M, TOCKERT E, KERN S. Les inventairesfranais du dveloppement communicatif (IFDC) du nourrisson. Mdecine etEnfance 2005a, 25 : 327-332

    BOVET F, DANJOU G, LANGUE J, MORELLO M, TOCKERT E, KERN S. Un nouvel outildvaluation du dveloppement communicatif du nourrisson. Mdecine et Enfance2005b, 25 : 67-74

    BRAINE MDS. The ontogeny of English phrase structure: The first phase. Language1963, 39 : 3-13

    BRAINE MDS. On two types of models of the internalization of grammar. In : Theontogenesis of grammar. SLOBIN DI (ed). Academic Press, New York, 1971

    BRAINE MDS. Childrens first word combinations. With Commentary by MelissaBowerman. 41 in Monographs of the Society for Research in Child Development,University of Chicago Press, Chicago, 1976

    BROWN R. A first language : the early stages. George Allen and Uwin, London, 1973

    CAIN K. Story knowledge and comprehension skill. In : Reading comprehension dif-ficulties. CORNOLDI C, OAKHILL J (eds). Erlbaum, Mahwah, NJ, 1996 : 167-192

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    26

    CARROLL S. Language acquisition studies and a feasible theory of grammar.The Canadian Journal of Linguistics 1989, 34 : 399-418

    CHEVROT JP, FAYOL M. Acquisition of French liaison and related child errors. In :Research on Child Language Acquisition. ALMGREN M, BARREA A, EZEIZABARRENAMJ, IDIAZABAL I, MACWHINNEY B (eds). Vol. 2, Cascadilla Press, 2001 : 760-774

    CHEVROT JP, DUGUA C, FAYOL M. Liaison et formation des mots en franais : unscnario dveloppemental. Langages 2005, 158 : 38-52

    CLARK EV. Some aspects of the conceptual basis for first language acquisition. In :Language perspectives: acquisition, retardation and intervention. University ParkPress, Baltimore, MD, 1974

    CLARK EV. Lexical creativity in French-speaking children. Cahiers de PsychologieCognitive/Current Psychology of Cognition 1998, 17 : 513-530

    CLARK EV, GELMAN SA, LANE NM. Compound nouns and category structure inyoung children. Child Development 1985, 56 : 84-94

    DE BOYSSON-BARDIES B. Comment la parole vient aux enfants ? ditions OdileJacob, Paris, 2004

    DE BOYSSON-BARDIES B, VIHMAN MM. Adaptation to language : Evidence from bab-bling and first words in four language. Language 1991, 67 : 297-319

    DE BOYSSON-BARDIES B, SAGART L, DURAND C. Discernible differences in the bab-bling of infants. according to target language. Journal of Child Language 1984, 11 :1-15

    DE BOYSSON-BARDIES B, HALLE P, SAGART L, DURAND C. A crosslinguistic investi-gation of vowel formants in babbling. Journal of Child Language 1989, 16 : 1-17

    DE WECK G. La cohsion dans les narrations denfants. tude du dveloppement desprocessus anaphoriques. Delachaux-Niestl, Neuchtel, 1991

    DEMUTH K. A prosodic approach to filler syllables. J Child Lang 2001, 28 : 246-249

    DROMI E. Early lexical development. Cambridge University Press, New YorK, 1987

    EIMAS PD, SIQUELAND ER, JUSCZYK PW, VIGORITO J. Speech perception in infants.Science 1971, 171 : 303-306

    FAYOL M. Lacquisition du rcit : un bilan des recherches. Revue Franaise de Pdagogie1983, 62 : 65-82

    FAYOL M. Le rcit et sa construction. Delachaux et Niestl, Neuchtel, Paris, 1985

    FAYOL M. Stories: A psycholinguistic and ontogenetic approach to the acquisitionof narrative abilities. In : From basic language to discourse basis. PIERAUTLE BONNIEC G, DOLITSKY M (eds). Amsterdam, Benjamin, 1991

    FAYOL M. Des ides au texte, psychologie cognitive de la production verbale. PressesUniversitaires de France, Paris, 1997a : 145177

    FAYOL M. On acquiring and using punctuation: A study in written French. In :Processing interclausal relationships. COSTERMANS J, FAYOL M (eds). Erlbaum,Mahwah, NJ, 1997b : 157-178

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    27

    AN

    ALY

    SEFAYOL M. Comprendre et produire des textes crits. Lexemple du rcit. In : Lacqui-sition du langage. KAIL M, FAYOL M (eds). Vol. 2, Paris, Presses Universitaires deFrance, 2000

    FAYOL M, MOUCHON S. Production and comprehension of connectives in the writ-ten modality. A study of written french. In : Writing development: An interdiscipli-nary view. PONTECORVO C (ed). John Benjamins, Amsterdam, 1997 : 193-204

    FERDINAND A. The development of functional categories. The acquisition of thesubject in French. Holland Academic Graphics, The Hague, 1996

    FIKKERT P. The acquisition of Dutch phonology. In : The acquisition of Dutch.GILLIS S, DE HOUWER A (eds). Benjamins, Amsterdam, 1998 : 163-222

    FITZGERALD J, SPIEGEL DL. Enhancing childrens reading comprehension throughinstruction in narrative structure. Journal of Reading Behavior 1983, 15 : 1-17

    GERNSBACHER MA. Language comprehension as structure building. Erlbaum, Hills-dale, NJ, 1990

    GOLDFIELD BA, REZNICK JS. Why does vocabulary spurt? In : Proceedings of the 20thannual Boston University Conference on Language Development. STRINGFELLOW A,CAHAMA-AMITAY D, HUGHES E, ZUKOWSKI A (eds). Vol 1, Cascadilla Press, Somerville,MA, 1996 : 249-260

    GOUT A, CHRISTOPHE A, MORGAN J. Phonological phrase boundaries constrain lexi-cal access: II.Infant data. Journal of Memory and Language 2004, 51 : 548-567

    GRANFELDT J, SCHLYTER S. Acquisition of French subject pronouns in child andadult learners. In : Proceedings from the colloquium on Structure, Acquisition andChange of Grammars: Phonological and Syntactic Aspects [Working papers in Mul-tilingualism, 26]. CANTONE KF, HINZELIN MO (eds). Universitt Hamburg, 2001 :89-105

    GRANFELDT J, SCHLYTER S. Cliticisation in the acquisition of French as L1 and L2.In : The acquisition of French: Focus on functional categories. PRVOST P, PARADIS J(eds). John Benjamins, Amsterdam /Philadelphia, 2003 : 442-493

    GUASTI MT. Verb syntax in Italian child grammar: Finite and nonfinite verbs.Language Acquisition: A Journal of Developmental Linguistics 1994, 3 : 1-40

    GUTIERREZ-CLELLEN VF, PENA E, QUINN R. Accommodating cultural differences innarrative style: A multicultural perspective. Topics on Language Disorders 1995, 15 :54-67

    HAMANN C, RIZZI L, FRAUENFELDER U. On the acquisition of subject and object cli-tics of French. In : Generative perspectives on language acquisition. CLAHSEN H(ed). John Benjamins, Amsterdam/Philadelphia, 1996 : 309-334

    HEINEN S, KADOW H. The acquisition of French by monolingual children : A reviewof the literature. In : Two first languages: Early grammatical development in bilin-gual children. MEISEL JM (ed). Dordrecht, Foris, 1990 : 47-72

    HEURLEY L. Processing units in written texts: Paragraphs or information blocks? In :Processing interclausal relationships. COSTERMANS J, FAYOL M (eds). Erlbaum,Mahwah, NJ, 1997 : 179-200

  • Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie Bilan des donnes scientifiques

    28

    HICKMANN M. Information status and grounding in childrens narratives: A cross-linguistic perspective. In : Processing interclausal relationships. COSTERMANS J,FAYOL M (eds). Erlbaum, Mahwah, NJ, 1997 : 221-243

    HICKMANN M. Le dveloppement de lorganisation discursive. In : Acquisition dulangage. Le langage en dveloppement. Volume 2. KAIL M, FAYOL M (eds). Collec-tion Psychologie et Sciences de la pense. PUF, Paris, 2000 : 83-115

    JAKOBSON R, FANT CGM, HALLE M. Preliminaries to speech analysis: The distinctivefeatures and their correlates. MIT Press, Cambridge, MA, 1969

    JAKUBOWICZ C, FAUSSART C. Gender agreement in the processing of spoken lan-guage. Journal of Psycholinguistic Research 1998, 27 : 587-617

    JISA H. French preschoolers use of et pis (and then). First Language 1985, 5 :169-184

    JISA H, KERN S. Relative clauses in French childrens narrative text. Journal of ChildLanguage 1998, 25 : 623-652

    JOHNSON-LAIRD PN. Mental models. Cambridge University Press, Cambridge, MA,1983

    JUSCZYK PW. Developing phonological categories from the speech signal. In :Phonological development: models, research, implications. FERGUSON CA, MENN L,STOEL-GAMMON C (eds). Timonium, Maryland, York Press, Monkton, MD, 1992

    JUSCZYK PW. The discovery of spoken language. MIT Press, Cambridge, 1997

    KAISER G. More about INFL-ection and Agreement: The acquisition of clitic pro-nouns in French. In : Bilingual first language acquisition: French and German gram-matical development. MEISEL JM (ed). John Benjamins, Amsterdam, 1994 : 131-159

    KARMILOFF-SMITH A. A functional approach to child language: A study of deter-miners and reference. Cambridge University Press, New York, 1979

    KARMILOFF-SMITH A. Language development after five. In : Language acquisition.FLETCHER P, GARMAN M (eds). Cambridge University Press, New York, 1986

    KENT RD, BAUER HR. Vocalizations of one-year olds. J Child Lang 1985, 12 : 491-526

    KERN S. Le compte rendu parental au service de lvaluation de la production lexi-cale des enfants franais entre 16 et 30 mois. Glossa 2003, 85 : 48-62

    KUHL PK. Speech prototypes: Studies on the nature, functions, ontogeny and phyl-ogeny of the centers of speech categories. In : Speech perception, production andlinguistic structure. TOHKURA Y, VATIKIOTIS-BATESON E, SAGISAKA Y (eds). Ohm-sha, Tokyo, 1992 : 239-264

    KUHL PK. Early language acquisition: cracking the speech code. Nature ReviewsNeuroscience 2004, 5 : 831-843

    LE NORMAND MT. La dmarche de lvaluation psycholinguistique chez lenfant demoins de trois ans. Glossa 1991, 26 : 14-21

    LE NORMAND MT. Modles psycholinguistiques du dveloppement du langage. In :Le langage de lenfant, aspects normaux et pathologiques. CHEVRIE-MLLER C,NARBONA J (eds). Masson, Paris, 1999 : 27-42

  • Acquisition du langage oral : repres chronologiques

    29

    AN

    ALY

    SELE NORMAND MT. Premiers mots et mergence des catgories syntaxiques chezlenfant. In : Neurophysiologie du langage. GOUSSE M (ed). Elsevier, SAS, Paris,2006 : 31-46

    LEVELT WJM, ROELOFO A, MEYER A. A theory of lexical access in speech production.Behavioral and Brain Science 1999, 22 : 1-75

    LOCKE J. Phonological