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Dix ans après Alain Krizanot

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Dix ans après

Alain Krizanot

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----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 148 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 12.36 ----------------------------------------------------------------------------

Dix ans après

Alain Krizanot

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Je ne suis pas retourné à Gilhoc depuis plus de

cinquante ans. La première fois c’était en 1943…

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I Et puis… dix ans plus tard

(juillet 1953)

Belle et bonne année ! Je viens d’être reçu au BEPC, donc mon passage en seconde est assuré. Aussi, il a été décidé, puisque ces vacances estivales se dérouleront à Gilhoc, que nous partirions avant la fin de l’année scolaire qui devrait se terminer au 13 juillet. Ma sœur travaille dans un labo d’analyses médicales à Aix. Elle, est en congé. Elle pourra donc être du voyage jusqu’à la fin du mois.

Dix ans que nous ne sommes pas retournés en Ardèche. J’étais bien petit à l’époque, pourtant, certains évènements sont restés gravés dans mon inconscient et refont surface. Il m’arrivait d’en évoquer le souvenir, mais ces moments étaient rares. Et puis, comme si j’y étais, brusquement, resurgissent des situations, des personnages, des visages que je croyais oubliés et qui n’attendaient que ce signal : les

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vacances à Gilhoc, pour se projeter au premier plan. Et parmi ces visages, celui d’une petite fille à la bouille ronde, aux cheveux noirs qui m’avait profondément troublé sans, qu’à l’époque, je sache pourquoi !

* * *

Quelques nuages épars avaient peine à tacher le bleu du ciel. Le village, accroché au coteau granitique surplombant l’Ormèze, n’a pas beaucoup changé depuis ma tendre enfance. Toujours tel que je le revoyais les rares fois où il refaisait surface. Mais que de souvenirs, enfouis depuis 10 ans, dont je n’imaginais pas l’importance, éclatent tout à coup !

Peut-être vais-je la revoir ! Cette pensée, simple, s’impose en moi comme une

certitude et me replonge dans cette période tourmentée de la guerre, les années 43-44, que j’ai traversées avec l’insouciance d’un enfant de cinq ans qui n’a vraiment pas eu conscience des horreurs de l’époque.

En ce début juillet 53, le train nous a débarqués, ma mère, ma sœur et moi à la gare de Tain l’Hermitage pour des vacances campagnardes. Mon père ne nous accompagne pas ; ses maigres congés ne le lui permettent pas. Au milieu d’une foule bigarrée, nombreuse et bruyante, certains voyageurs pressés se hâtent vers la sortie, courant presque, bousculant sans vergogne ceux qui, imprudents, se trouvent sur leur

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passage. Des porteurs, reconnaissables à l’inscription portée sur la visière de cuir de leur casquette, collée bas sur le front, interpellent les passagers. Nous n’avons pas les moyens d’utiliser leurs services. Insensible à ce tohu-bohu, la locomotive pansue vomit des panaches de fumée blanche comme un monstre au repos, attendant le coup de sifflet qui lui permettra de se ruer à nouveau vers de vastes horizons.

Portant chacun un lourd bagage, nous partons à pieds pour rejoindre la rive droite du Rhône. Il faut franchir le pont suspendu, provisoire, enjambant le fleuve tumultueux. Les véhicules qui l’empruntent sont rares. Bousculé par un vent du nord assez puissant, il se balance légèrement. Je ne suis pas des plus rassurés. Les piétons sont plus nombreux. La plupart pressent le pas comme pour en finir avec cette traversée. Nous aussi, nous suivons ce flot, essayant de garder le rythme. Enfin nous atteignons Tournon.

Devant un bistrot, dont j’ai oublié le nom, un autobus attend à l’ombre des platanes. Sa carrosserie rouillée par endroit, les éraflures sur la peinture, quelques bosses ou plutôt quelques creux dans la tôle, attestent des longs services qu’il a rendus. Le moteur, longue masse proéminente, laissera, tout à l’heure, échapper de formidables soupirs accompagnés de quelques jets de vapeur. Son conducteur, le père Rougéas, un brave homme plus tout jeune, qui assurait déjà le service pendant les années terribles, sirote, à la terrasse, une boisson rafraîchissante, peut

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être un apéritif, en attendant les derniers passagers qu’il doit convoyer, là-haut, dans la montagne…

Sur l’impériale, s’entassent en un pêle-mêle apparent, nos valises, quelques cages à poules, des sacs et des ballots de toutes sortes. Nous sommes les seuls « touristes ». Parmi les habitués, il y a là plusieurs vieux paysans, pantalon épais de velours noir, veste sombre, chapeau amidonné de vieille poussière collée par la transpiration, vissé sur le crâne. Ils se connaissent tous, mais le bruit terrible du moteur empêchant toute conversation trop longue, ils parlent peu, par bribes, semblant économiser les mots. Quelques-uns fument la pipe. La fumée s’envole par les fenêtres aux vitres à demi baissées, qui, vibrant aux cahots de la route, ajoutent au bruit de la machine des tintements n’ayant rien de cristallins. De temps en temps, l’un d’eux se penche dans l’allée et éjecte un long jet de salive jaunâtre, puis s’essuie machinalement le coin de la moustache dont il tord la pointe entre le pouce et l’index. Deux ou trois femmes, un panier d’osier sur les genoux complètent l’équipage. Assises bien droites dans leur fauteuil, elles regardent devant elles sans laisser paraître la moindre réaction. Leurs blouses à carreaux noirs et blancs, toutes semblables, leurs chapeaux de paille de même couleur, agrémentés d’un ruban foncé, font d’elles des êtres sans âge, vieilles avant d’être vieilles. Seules touches de couleur dans cet univers terne, la robe à fleurs de ma mère et la jupe jaune de ma sœur.

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À travers la ville, le car s’est élancé. Il klaxonne à chaque carrefour et même au long des rues. Moins pour signaler sa présence que pour saluer les riverains et riveraines qui savent l’heure rien qu’en le voyant passer. Les dernières maisons s’effacent dans la vitre arrière. La route, telle une interminable couleuvre grise, s’étire au soleil au flan de la montagne et s’élève inexorablement, ignorant le profond ravin la jouxtant. Aucune descente, aucun faux plat pour laisser souffler le moteur qui peine de plus en plus. Même le pont qui enjambe la rivière après le croisement de la route d’Annonay est incliné. Le précipice a changé de côté. Nous ne voyons toujours pas le fond de la gorge. Nous n’entendons pas l’eau gronder. Le torrent doit être presque à sec. Quelques maigres végétations s’accrochent à la paroi quand, dans un creux du rocher, un peu de terre s’est accumulée. Rien ne bouge. Rien ne bruit, sinon les ronrons du moteur et les vitres qui claquent. Sur le versant escarpé de la route, parfois un maigre herbage s’étire entre quelques châtaigniers et des bouquets de genêts. Deux ou trois biques, taches sombres sur fond plus clair, y broutent une herbe sèche, tirant du col comme pour allonger la chaîne qui les entrave. Elles aimeraient se diriger vers les fougères croquantes qu’elles ne peuvent atteindre.

Enfin on parvient à Saint Barthélemy le Plain. Le car se vide à moitié. Et tandis que le père Rougéas, grimpé sur l’impériale par l’échelle fixée à l’arrière de son véhicule, décharge quelques colis, plusieurs

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« moustachus » descendent se dégourdir les jambes, un mégot de cigarette roulé dans du papier maïs collé au coin des lèvres. L’arrêt n’est que de courte durée. Toujours grimpant, toujours soufflant, le véhicule continue son escalade et après avoir traversé, sans s’arrêter, Colombier, entame les derniers kilomètres.

Déjà nous apercevons les maisons de Gilhoc. Une fois encore, il faut changer de rive et laisser la rivière sur notre gauche. Le parc du domaine Armand et son moulin à farine, mu par l’eau du torrent, est à présent derrière nous. Voici l’ultime virage avant les premières constructions. Les noyers du bas-côté, surplombant le ravin, apportent pour un bref moment, quelque fraîcheur sur la chaussée et dans l’autobus.

Une vaste bâtisse, bien entretenue apparaît derrière un haut mur. C’est l’école dite « libre », celle où sont scolarisés les enfants de « bonnes familles catholiques ». Dans ces années 50, rien n’a encore changé depuis mon bref passage à l’école communale publique du village en 43-44. Quand on est de condition aisée, on ne mélange pas ses enfants avec ceux de l’Assistance Publique (nombreux en ce temps-là dans la région), ceux des Parpaillots et des Athées. Les deux écoles ne sont pas loin l’une de l’autre. Seul un virage les sépare ; l’École Publique dominant l’autre seulement par le relief des lieux : elle est située un virage plus haut !

Le car avance au pas. J’ai tout loisir de revoir ce que j’avais connu. Le village a certainement subi bien des

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mutations. Comme partout, les vieux murs du temps menaçant ruines, ont été relevés. Les rues et ruelles, alors mal pavées, répercutant de maison en maison le claquement des galoches des gamins, sont presque toutes bitumées. Juste en face de l’école, la vraie, l’École de la République, où j’ai connu mes premières leçons, celle qui m’a appris tout ce que je sais, qui m’a donné l’habitude d’accepter les différences et de penser que peut-être l’Autre à raison, se dresse toujours le mur du cimetière. Là aussi, les êtres disparus étaient séparés ! Catholiques d’un côté, Protestants de l’autre. Un mur, à mi-hauteur d’homme, percé d’une porte, cloisonnait cet état de fait. Qu’en est-il aujourd’hui ? Nous y allions, parfois, courir entre les sépultures. Je suivais, comme toujours, les garnements plus âgés que moi. Les allées sablées étaient propices aux galopades. Mais jamais, ou tout au moins, il ne m’en souvient pas, nous n’avons fait la moindre sottise sur les tombes. N’empêche que le garde champêtre nous surveillait de près et nous chassait en grondant d’une colère feinte, quand il nous apercevait…

Nous remontons la rue au pas, comme si le père Rougéas voulait me laisser retrouver ce qui fut le décor de mes premiers souvenirs. Nous a-t-il reconnus ? Ma sœur et moi peut-être pas, mais ma mère ? Les adultes ne changent pas vraiment, ils vieillissent ! La poste est toujours là, derrière sa porte grillagée. Le même panneau d’affichage, au bois gris, est cloué à gauche de la porte. Adossée à la poste, la

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boulangerie offre à la vue sa minuscule vitrine, enfermant d’énormes miches de pain dont je suppose que la croûte appétissante, recouvre une mie souple mais brune, à l’odeur un peu acidulée. Je n’avais que cinq ans, mais cette odeur de pain bis, je la reconnaîtrai toute ma vie ! Pour couper de longues tranches, il fallait appuyer cette boule enfarinée sur son ventre et le travail accompli, une traînée blanche restait « affichée » sur le vêtement de l’opérateur !

J’ai l’impression d’être immobile devant un écran où défileraient de vieilles images. Deux maisons passent derrière la fenêtre du car. Et voilà l’antre du forgeron. Elle était mystérieuse, un peu obscure. Seules les flammes rouges et bleues de la forge éclairaient la formidable enclume sur laquelle se façonnaient les fers à bœufs. Un épais tablier de cuir protégeait des étincelles le maître des lieux. Une énorme pince-tenaille dans une main, je revois le forgeron abattre sa grosse masse sur le fer rouge sortant du brasier de charbons ardents. La barre s’aplatissait à chaque coup, et pendant que le maître de forge contemplait son ouvrage, le marteau continuait à tapoter l’enclume, impatient de poursuivre son œuvre. Aujourd’hui, les lieux semblent déserts. Il est vrai qu’il est un peu plus de midi. De l’autre côté de la rue, habitait le charron et ses seaux d’eau magiques. L’atelier est toujours là ; tout y paraît tranquille. Deux portes plus haut, la maison des parents d’Odette n’a pas changé. La porte cloutée, sans lucarne vitrée, protège les habitants des lieux des regards indiscrets.

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Quelques dizaines de mètres plus haut, c’est la cour de l’hôtel Michel. Cette cour rectangulaire au sable fin et régulier, est fermée sur trois côtés. La façade du bâtiment en occupe un entièrement. Des hortensias bleus en agrémentent toujours le devant de la terrasse. Une voiture de luxe se repose juste devant la porte des garages qui occupent tout le fond de cet espace. Le troisième côté est délimité par le haut mur aveugle d’une habitation bourgeoise.

Cette belle maison est devenue la boucherie ; c’est là que nous allons passer nos vacances. Finie l’ancienne boutique ombragée par une treille, au bout de la ruelle qui conduit à l’église. Le magasin, qui est nouveau pour nous, semble coquet. On y accède par une porte de verre martelé ; une vaste vitrine s’ouvre sur la rue. À droite, une porte en fer forgé, sans doute l’entrée du logement ; à gauche une porte en bois, toute simple, ouvre sur un couloir. Je n’ai pas le temps d’en distinguer plus. C’est déjà la quincaillerie-bazar, et je revois les vieilles dames deux sœurs, qui tenaient cette boutique. Un souvenir peu glorieux me remonte aussitôt en mémoire. Nous approchons de la place, terminus du voyage. Sur la gauche, au coin de la rue, le Casino est toujours là. Le commerce s’ouvre sur les deux rues à la fois. Que de farces nous avons pu faire à Delphine, l’épicière !

Dans un dernier sursaut, le car se propulse au milieu de la place du village et s’arrête, enfin, fier de nous avoir amenés jusque là. Avant de descendre, je

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jette un regard circulaire pour me rendre compte si mes souvenirs correspondent à la réalité. La place me paraît beaucoup plus petite que dans ma mémoire. Ce n’est en fait qu’une excroissance des rues qui la constituent. Mais tout est à la bonne place : à gauche, le café-tabac Chevrier. En face, la maison Rougéas avec son banc de bois appuyé au mur, à gauche de la porte. Par la lunette arrière, je peux constater que le café Bastier accueille toujours ses clients.

Presque tout le monde est descendu. Ma mère insiste pour que je me dépêche. Alors mon regard revient très vite se poser sur la porte vitrée de la boutique-tabac. J’ai le temps d’apercevoir un visage un peu rond d’adolescente à la chevelure très brune. Ce ne peut-être qu’elle ! (Elle ? Une image, un sentiment… un souvenir. Quelque chose de confus, comme une fleur qu’on aurait enfermée dans une serre de peur qu’elle ne s’échappe et que l’on viendrait regarder de temps en temps derrière la vitre ; et puis un jour, aujourd’hui, que l’on accepterait de dévoiler.)

Traînant plus que je ne porte la valise que je dois convoyer, je me dirige vers la portière et avant de descendre, je jette un dernier coup d’œil sur la gauche. Il n’y a plus personne derrière le carreau. Ai-je rêvé ? Y avait-il vraiment quelqu’un ? Si oui, était-ce par simple habitude, comme tous les mardis et samedis à l’arrivée du car ?

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II Juillet 1943

Je n’étais qu’un petit garçon de cinq ans. Je ne sais plus si tous mes souvenirs sont des souvenirs directs ou s’ils émergent de ma mémoire comme les réminiscences de récits que l’on a faits en ma présence. Mais, personnels ou appris, je les ai tous vécus…

La gare de Tain l’Hermitage regorgeait de monde en ce début juillet 1943. Les passagers ferroviaires de toutes les époques et de tous les pays ont le même comportement : ils se dépêchent, ils se pressent, ils se bousculent. Peur de manquer leur correspondance ou simplement hâte de quitter cet endroit qui n’est qu’un lieu de passage pas toujours accueillant. Sans doute s’ajoutait à ces habitudes, l’angoisse de voir l’occupant se ruer sur eux. Les soldats allemands, par groupes de quatre ou cinq surveillaient d’un œil soupçonneux chacun et tout le monde. Plus inquiétants, des