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http://www.societesdelinformation.net 1 Les gendarmes et les voleurs… Le droit d’auteur, celui des auteurs à percevoir leur rémunération pour leurs créations bouscule les lignes. Les gendarmes n’ont plus d’uniforme, pas de casquette numérique vissée sur la tête : ils sont Autorité de régulation, mercenaires à la solde du privé, avocats d’ayant-droit ou d’artistes, opérateurs de télécommunication, hébergeurs. Plus ou moins assermentés, plus ou moins compétents, plus ou moins perdus dans les méandres des textes et des demandes techniques. En face, les voleurs sont légion eux aussi. Ils sont enfants qui cherchent une musique pour leur téléphone portable, professionnels qui mettent à disposition un film pas sorti en salles, mélomanes à la recherche d’une version inédite d’un opéra. Voleurs gentils, sortes de Robin des bois numériques qui considèrent que le prix d’un cd est prohibitif et que les Méchants sont ainsi punis de s’engraisser sur le dos des créateurs ou Bandits délinquants qui prennent aux artistes leur moyen d’existence ? Qui fera la Loi et construira un monde où règnera la création libre et le bonheur d’en bénéficier sans dégainer son colt ? Odile Ambry Édito Sommaire Dossier Internet, fossoyeur du droit d’auteur ? ............ Page 2 à 7 L’actualité de l’Isoc monde L’Internet Society rejoint le directoire de la Liberty Alliance ...................................................... Page 8 Émergences Entreprises : dépensez moins, mais dépensez mieux… ................................................. Page 9 Dossier Internet, fossoyeur du droit d’auteur ? Tout travail mérite salaire, prétend le proverbe. Pour les créateurs, l’affaire semblait entendue : pas de salaire, mais un revenu malgré tout – le droit d’auteur. La mesure a, en France du moins, quelque chose de symbolique. « Inventé » par Beaumarchais, le droit d’auteur est un des enfants de la révolution. Quand les hommes naissent libres et égaux, le revenu des artistes ne dépend plus du bon vouloir du souverain ou de quelque mécènes, mais d’un tribut payé par le public. En exécutant les supports de diffusion de la culture – le CD hier, le DVD aujourd’hui, le livre peut-être demain – Internet rend le paiement des redevances de plus en plus difficile. La numérisation des œuvres facilitant leur duplication et leur diffusion, les péages d’hier peuvent continuer d’exister, les autoroutes se vident. Ce numéro ne prétend pas trancher ce débat qui oppose de façon hystérique partisans du savoir libre et défenseurs de la juste rémunération, avec cette particularité propre à ce genre de discussion : quand deux principes justes s’opposent, les thuriféraires des deux camps ignorent les arguments d’en face. Le député Franck Diester et Philippe Aigrin y débattent de la loi Hadopi. Vous y découvrirez aussi comment deux auteurs de science-fiction envisagent l’avenir du droit d’auteur. À l’heure du web, la collecte de redevances est devenue un casse-tête. Nous vous disons pourquoi. Lire page 2 à 7 #57 mars 2009

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Les gendarmes et les voleurs… Le droit d’auteur, celui des auteurs à percevoir leur rémunération pour leurs créations bouscule les lignes. Les gendarmes n’ont plus d’uniforme, pas de casquette numérique vissée sur la tête : ils sont Autorité de régulation, mercenaires à la solde du privé, avocats d’ayant-droit ou d’artistes, opérateurs de télécommunication, hébergeurs. Plus ou moins assermentés, plus ou moins compétents, plus ou moins perdus dans les méandres des textes et des demandes techniques.En face, les voleurs sont légion eux aussi. Ils sont enfants qui cherchent une musique pour leur téléphone portable, professionnels qui mettent à disposition un film pas sorti en salles, mélomanes à la recherche d’une version inédite d’un opéra. Voleurs gentils, sortes de Robin des bois numériques qui considèrent que le prix d’un cd est prohibitif et que les Méchants sont ainsi punis de s’engraisser sur le dos des créateurs ou Bandits délinquants qui prennent aux artistes leur moyen d’existence ? Qui fera la Loi et construira un monde où règnera la création libre et le bonheur d’en bénéficier sans dégainer son colt ?

Odile Ambry

Édito SommaireDossier

Internet, fossoyeur du droit d’auteur ? ............ Page 2 à 7

L’actualité de l’Isoc mondeL’Internet Society rejoint le directoire de la Liberty Alliance ...................................................... Page 8

ÉmergencesEntreprises : dépensez moins, mais dépensez mieux… ................................................. Page 9

Dossier

Internet, fossoyeur du droit d’auteur ?Tout travail mérite salaire, prétend le proverbe. Pour les créateurs, l’affaire semblait entendue : pas de salaire, mais un revenu malgré tout – le droit d’auteur. La mesure a, en France du moins, quelque chose de symbolique. « Inventé » par Beaumarchais, le droit d’auteur est un des enfants de la révolution. Quand les hommes naissent libres et égaux, le revenu des artistes ne dépend plus du bon vouloir du souverain ou de quelque mécènes, mais d’un tribut payé par le public.En exécutant les supports de diffusion de la culture – le CD hier, le DVD aujourd’hui, le livre peut-être demain – Internet rend le paiement des redevances de plus en plus difficile. La numérisation des œuvres facilitant leur duplication et leur diffusion, les péages d’hier peuvent continuer d’exister, les autoroutes se vident.Ce numéro ne prétend pas trancher ce débat qui oppose de façon hystérique partisans du savoir libre et défenseurs de la juste rémunération, avec cette particularité propre à ce genre de discussion : quand deux principes justes s’opposent, les thuriféraires des deux camps ignorent les arguments d’en face.Le député Franck Diester et Philippe Aigrin y débattent de la loi Hadopi. Vous y découvrirez aussi comment deux auteurs de science-fiction envisagent l’avenir du droit d’auteur. À l’heure du web, la collecte de redevances est devenue un casse-tête. Nous vous disons pourquoi.

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du marché », commente P Astor. Une version high tech de l’arroseur arrosé : le système de protection est si efficace qu’il dissuade même de consommer !Ce que confirme David, compositeur, producteur et auditeur boulimique de musique : « Ce que n’ont pas compris les labels, c’est que les mélomanes ne sont ni dociles ni dupes, et qu’il faut les satisfaire avec un produit et un service de qualité, plutôt que de leur donner moins

à prix constant ». Et de regretter que l’investissement technologique dédié

à cette répression ne fût pas plutôt consacré à l’exploitation complète

des catalogues, des pans entiers de la musique produite par les majors n’étant toujours pas disponibles en ligne, voire au développement d’un nouveau format de compression, de qualité supérieure à celle du

MP3.Pour les deux spécialistes, la

chute des DRM a été précipitée par ce même principe anticopie

appliqué un temps au support CD, qui n’a fait qu’accélérer la baisse des ventes

et le mécontentement des consommateurs. « Non seulement je ne pouvais pas lire mon album de Radiohead dans un autoradio ou un vieux lecteur CD, mais j’arrivais en plus à le copier en deux minutes avec un soft enfantin comme Clone CD », se souvient David.Dès lors, il devenait intenable de promouvoir le MP3 protégé, avec dans les bacs des CD non protégés. Ne reste plus qu’à trouver le bon tarif, une chanson MP3 coûtant toujours au moins aussi cher que sur CD, avec une qualité et des prestations moindres, autre absurdité d’un business model qui vacille. « À l’époque de la reproductibilité technique, ce qui dépérit dans l’œuvre d’art, c’est son aura », écrivait Walter Benjamin. Un verrou, même technologique, ne participe pas à redorer le blason d’une profession assiégé, pont levis relevé et bouclier à la main.

Julien Monchanin

Après EMI il y a deux ans, Universal et Sony ont à leur tour annoncé, lors du dernier Midem, la fin des DRM sur leurs fichiers musicaux vendus en ligne en France, tandis qu’Apple enterrera le procédé partout dans le monde d’ici la fin du premier trimestre 2009. Tout un symbole, après des années de grogne des producteurs contre les technologies de recopie des œuvres, du duplicateur de cassettes au P2P en passant par la gravure CD. Les majors s’en remettront donc à la loi Hadopi pour les solutions répressives.Pour Philippe Astor, journaliste musical et spécialiste des technologies dédiées, les DRM nous viennent tout droit du siècle dernier : « la genèse des DRM intervient en 1999 avec le premier baladeur Rio, qui offrait déjà la possibilité de stocker 10 morceaux au format MP3, et la volonté des maisons de disques d’interdire la copie sous ce format ». Se constitue alors la SDMI (Secure Digital Music Initiative), en vue d’instaurer un système de DRM et de concurrencer le MP3. Une initiative tombée ensuite à l’eau, faute d’un verrouillage facilement contournable.Les producteurs reviendront ensuite à la charge avec l’apparition des plateformes de téléchargement, et notamment le lancement d’iTunes en 2003. Apple exploite ainsi les catalogues des majors via des licences, et un système de protection qui limite le nombre de périphériques où l’œuvre, sous format numérique, peut être copiée.

Peu fiables, trop coûteux et impopulairesLes effets négatifs des DRM ne tarderont pas à se faire sentir, à commencer par le manque d’interopérabilité. Alors que les plateformes se développent, la multiplication des initiatives a un coût élevé pour le distributeur. Vient ensuite « l’incapacité d’adapter la protection aux nouveaux modes de consommation de musique, l’ajout de barrières ayant finalement été perçu par les majors comme un frein à l’achat et à la libération

Saga

Grandeur et décadence du verrouillage audionumérique

La courte histoire des DRM, systèmes de protection des œuvres numériques, ne dépassera pas la décennie. Rattrapé par ses limites et son image désastreuse, le procédé est désormais totalement abandonné par les majors dans l’Hexagone. Retour sur un échec prévisible.

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Quels objectifs poursuit la loi Création et Internet ?Franck Riester : elle a pour objectif de lutter contre le téléchargement illégal en instaurant une réponse plus adaptée que la répression pénale. Cette loi est avant tout pédagogique et préventive. En cas de téléchargement non autorisé,

l’internaute recevra un e-mail, puis un second message sous la forme d’une lettre recommandée avec accusé de réception, avant d’envisager des sanctions, qui vont de la suspension à la réduction du débit ou l’injonction de sécuriser son accès Internet. Ce texte a été voté à l’unanimité par le Sénat. Il fait suite aux accords de l’Élysée où les professionnels de la culture des télécoms et de l’Internet se sont mis d’accord.

Des associations se plaignent de l’aspect intentatoire aux libertés publiques de ce texte. Le droit à un procès équitable, ça compte non ?La Haute Autorité qui peut sanctionner pourra transiger avec l’internaute pour réduire la sanction. Encore une fois, notre but est pédagogique et nous voulons sortir de la répression pénale. En tant que député, j’ai proposé des amendements qui ont été acceptés en commission pour informer les internautes sur l’existence d’offres légales et des moyens de sécuriser l’accès à Internet. En outre, l’internaute qui sera sanctionné pourra former un recours devant le juge des référés. La procédure est contradictoire. Les droits sont respectés.

Pourquoi n’avez-vous pas entendu les promoteurs de licence globale ?Au cours de mes auditions de rapporteur, j’ai pu débattre avec les partisans de la licence globale, notamment les associations de consommateurs et d’internautes. Je ne suis cependant pas favorable à cette solution, c’est une forme de vente forcée. Qu’il télécharge ou non, l’internaute devrait payer le même forfait. Cela ne me semble pas adapté. Avec la loi Hadopi, nous proposons une solution gagnante pour l’internaute, les entreprises du numérique, les industries culturelles. Nous soutenons les offres légales qui ne peuvent exister que si les entrepreneurs créateurs de nouveaux services peuvent bénéficier d’un retour sur investissement.

Propos recueillis par Christophe Bys

Pour quelles raisons vous opposez-vous à la loi Création et Internet ?Philippe Aigrain : pour empêcher l’échange de fichiers entre internautes en pratiquant une intimidation de masse, on en arrive, après de multiples essais infructueux, à des dispositions attentatoires aux

libertés publiques, au droit à une procédure équitable, à la protection des données personnelles. En effet, la riposte graduée repose nécessairement sur une omni-surveillance comme le contrôleur européen de la protection des données l’a rappelé. Les autres pays européens et les institutions européennes refusent ce type d’approche. Le pire, c’est que le gouvernement est tellement obnubilé par l’idée d’éradiquer le partage de fichiers, qu’il ne réfléchit plus aux liens positifs entre Internet et la création.

Les industries culturelles sont pourtant en danger. Ne faut-il pas les aider ?Avec ces lois répressives, elles ont surtout décidé d’accentuer la guerre avec leurs consommateurs. Je ne crois pas que ce soit un modèle commercial qui sera à terme payant, au contraire. Les majors refusent d’explorer d’autres formes de rémunération. L’aveuglement de certains professionnels et du gouvernement est dommageable : plus on attend, moins les gens adhèreront aux solutions alternatives quand elles émergeront enfin - car elles émergeront !

En quoi consiste la « contribution créative » que vous proposez ?Je ne l’ai pas appelé licence globale car ma proposition est différente de celle de 2005.Ainsi, elle n’est pas optionnelle : tout abonné au haut débit devrait la payer. Une telle proposition a un avantage : on sait d’avance combien elle rapportera aux créateurs et au soutien à la production. Les mesures répressives contenues dans la loi Internet et création menacent les libertés sans rapporter un centime aux artistes. C’est un comble, alors qu’on est prétend les défendre. Je comprends que les majors soutiennent la loi car elle leur évite - pour l’instant - de revoir leurs modèles commerciaux. Les artistes n’ont rien à craindre d’une contribution créative. Ce qui est menacé chez les industries culturelles, c’est la seule vente de copies d’œuvres. Mais d’autres modèles émergeront.

Face à face

La bataille d’Hadopi

Alors qu’il revient au Parlement, le texte « Internet et création » est de plus en plus discuté. D’un côté, Franck Riester, député rapporteur du projet de loi ; de l’autre, Philippe Aigrain de la Quadrature du net qui promeut un système alternatif.

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du « Whuffie », une nouvelle unité de mesure basée exclusivement sur la reconnaissance symbolique. « J’aime ce que tu fais, je t’attribue un bon point ! Il se cumule avec les bons et mauvais points que d’autres t’ont attribués et on arrive ainsi à un classement social ».

Des récompenses inspirées du monde (du) libreUn système de réputation qui n’est pas sans rappeler le mouvement autour du « libre » : logiciels à la Linux, encyclopédies à la Wikipedia, etc. Ce n’est pas un hasard : Cory Doctorow a été un temps coordinateur pour l’Europe de l’Electronic Frontier Foundation (EFF), une association américaine qui a pour objectif de défendre les libertés individuelles dans le nouvel environnement numérique et qui, en pratique, est très fortement impliquée dans le monde du « libre ». Et, comme Jeter, Doctorow ne recule pas devant le prosélytisme : sa nouvelle est parue en même temps sur papier en librairie et en téléchargement sur Internet, sous licence Creative Commons donc gratuite, libre de droit et redistribuable.

Où la réalité rejoint la fiction : cette opposition de vues n’est pas sans rappeler certains débats bien réels sur la création et Internet avec les ayant-droit et leurs bâtons et les internautes avec leur sous-culture émergente.

Charles Simon

« Il existe une solution radicale au vol de propriété intellectuelle. On l’appelle un 357 magnum. » K. W. Jeter, auteur de romans « cyberpunk » – dont 3 suites à la nouvelle de Philip K. Dick plus connue pour son adaptation au cinéma (Blade Runner) – n’y va pas par quatre chemins quand il imagine l’avenir du droit d’auteur. C’est simple, dans son roman Noir, paru en France en 2003, les auteurs sont en guerre contre les pirates. Et ils ne prennent pas de gant : leur bras armé, « l’Agence de Recouvrement » (sic !), emploie des nervis dont la mission est de traquer ceux qui profitent sans payer des créations. Une fois attrapés, les contrevenants sont littéralement mis en boîte, avant de finir en petits morceaux !

Le copyright, c’est le bienDans la préface de son roman, l’auteur ne fait pas mystère qu’il n’est pas loin de souhaiter voir appliquer dans la réalité ce qu’il imagine : « en écrivant Noir, je n’ai pas fait que somnoler la tête penchée sur mon clavier. J’avais conscience que la bataille était d’ores et déjà entamée, entre ceux qui créent et ceux qui dénigrent l’acte créatif ou, pour dire les choses de manière plus abrupte, entre ceux qui suent et ceux qui volent – ou, pis encore, se font les chantres du vol. Mon camp a depuis gagné assez de batailles et écarté suffisamment d’ennemis pour que j’aie à cœur de nouveau à croire en la nature humaine. Et le concept de copyright, en tant que principe du bien, n’aurait pas un tel impact en notre monde si les hommes y adhéraient de tout cœur. »

Cory Doctorow ne partage pas du tout la croisade de son frère de plume. Parce que, dans la société d’abondance qu’il imagine dans sa nouvelle Dans la dèche au royaume enchanté, parue en 2008, le droit d’auteur n’a plus lieu d’être. L’argent a disparu, tous les besoins basiques de l’homme étant couverts. Plus besoin donc de vendre son art pour vivre. Ce qui ne veut pas dire que l’art et les auteurs ont disparu. Bien au contraire : le héros de la nouvelle a composé trois symphonies. Mais la création n’est plus récompensée par un gain financier, mais par

Vues d’ailleurs

Droit d’auteur : No future ?

La science-fiction, ce n’est pas que des voyages intersidéraux et des petits hommes verts. Aussi quand deux auteurs de science-fiction se mettent à imaginer le futur du droit d’auteur, on plonge vite en pleine politique-fiction.

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La révolution française abolira ces privilèges comme les autres le 4 août 1789. Deux ans plus tard, c’est le promoteur de la liberté du commerce, le fameux Le Chapelier qui introduira la notion de propriété littéraire mais pour tout de suite y voir un quasi bien public. Ce n’est qu’au XIXe Siècle que le droit d’auteur tel que nous le connaissons actuellement, prendra son essor. D’abord en jurisprudence, puis codifié par la loi du 11 Mars 1957.Le droit d’auteur n’est donc pas un droit naturel. Son absence n’a pas empêché l’humanité de progresser, pas plus qu’il n’a été une entrave à la création. Le droit d’auteur, tel que nous le connaissons, est intimement lié à des techniques de reproduction, en réaction à une législation économique qui tendait à happer le travail de l’auteur en accordant des privilèges à des commerçants.Incontestablement, ce contexte a changé. L’interconnexion des uns avec les autres au moyen d’Internet, le développement du numérique en ligne et hors ligne qui l’accompagne, la capacité toujours plus grande des équipements qui stockent et transfèrent des contenus, est une réalité que les défenseurs d’Hadopi ne veulent pas voir.Face à ces évolutions des paradigmes, la société s’organise autour et sur les réseaux numériques tout entière, devenant ainsi une société de l’information. Le besoin d’un partage de l’intelligence devient une nécessité. Si on veut sauver le droit d’auteur, il faut sortir du dogme qui fait de tout utilisateur un contrefacteur. Il faut aussi réorganiser le lien social et économique tissé autour de cette technique juridique, afin de donner aux auteurs le moyen de rentrer de plain-pied dans la société de l’informationLe droit d’auteur doit réserver les fruits d’une exploitation commerciale ou économique à son auteur en abandonnant l’idée de criminaliser les utilisateurs à qui on a donné les moyens techniques d’utiliser, d’échanger comme on avait donné aux libraires et imprimeurs les moyens techniques de reproduire.

Olivier ItéanuAvocat à la Cour

Le droit d’auteur est la création par la Loi d’un monopole légal décerné à celui qui fait acte de création. Le monopole se trouve ensuite dans le commerce juridique et peut être concédé ou cédé à des tiers. Il peut aussi être donné mandat à des ayants droits, de type Sacem, pour gérer ce monopole ou son démembrement, et notamment les défendre en Justice contre les tiers violateurs. Ce dispositif bénéfice d’une protection par la Loi : elle sanctionne les personnes qui ne respectent pas ces droits à des peines maximales de trois ans de prison et 300 000 euros d’amende. Dans ce cadre, la loi Hadopi tend à créer hors des tribunaux un régime de sanctions administré et contrôlé par ceux qui ont un intérêt direct à la sanction : les ayants droits. De surcroît, ce texte suscite une légitime inquiétude sur le fichage généralisé de la population. En réponse, les promoteurs du texte prétendent que le droit d’auteur favorise l’innovation. Qu’en est-il vraiment ?

Le tournant de l’imprimerieLe droit d’auteur n’a pas toujours existé. Tout historien sérieux reconnaît qu’on n’en trouve trace ni dans l’Antiquité ni au Moyen-âge. Les partisans de la thèse opposée font simplement valoir qu’on a repéré dans tel texte ancien que tel parchemin, peau de bête travaillée par l’homme, avait été vendue plus que le prix du support et qu’ils y voyaient là, la preuve de l’existence d’un droit d’auteur. Plus encore, on remarque à ces époques, un très grand nombre de textes anonymes qui démontrent que pour les auteurs de cette époque, l’existence d’un droit exclusif et de son respect n’a pas grand sens.L’apparition de l’imprimerie au XVIe siècle provoque un enchaînement de réactions juridiques. Rois et princes accordent alors de manière arbitraire aux libraires des « privilèges » afin de protéger leur investissement, leur outil de production. Autrement dit, c’est l’activité économique et non l’acte de création qui était ici protégé dans ce qui semble bien être l’ancêtre du droit d’auteur. La défense de l’auteur apparaît très explicitement dans un arrêt du conseil du roi du 30 août 1777.

À la barre

Le droit d’auteur, de l’imprimerie au numérique

Loin d’être un droit naturel, le droit d’auteur a été inventé pour faire face au développement de l’imprimerie. Il doit s’adapter aux évolutions techniques et sociales, pour que l’auteur puisse entrer pleinement dans la société de l’information.

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résultat bien inférieur à celui des supports physiques. La somme est modeste et est rarement encaissée en raison de la faiblesse de l’enveloppe globale.En dehors du droit d’auteur, les artistes touchent en moyenne 5 centimes par MP3 vendu, contre 60 centimes pour les maisons de disques. Toutefois, toutes les plateformes de téléchargement payant ne jouent pas le jeu… Sans parler de celles qui sont hébergées à l’étranger ou de nature plus « sauvage ».D’où provient un tel écart ? L’inadéquation grandissante entre les modes de collecte de la Sacem et les nouveaux modes de distribution sont patents. « Je ne parlerais pas de répartition juste, mais de rémunération inexistante dans le cadre du web », analyse ainsi Jeremy Govciyan, cofondateur du microlabel Internet Elektrotribe et compositeur. « Les moyens ne sont pas débloqués pour la mise en place d’une structure informatisée regroupant les ensembles de données relatives aux titres diffusés. Pourtant, ces données pourraient être remontées par les diffuseurs web, afin de calculer au plus près les droits de chacun ». Et de pointer la principale incohérence du système : « la mécanique de diffusion actuelle consacre un petit nombre de titres dans les médias classiques (radio, TV, concerts), et n’ouvre pas le champ à une rétribution au plus grand nombre de sociétaires et de dépositaires d’œuvres, à la Sacem comme ailleurs ».Mais Internet suscite aussi l’espoir. Le web pourrait en effet faciliter l’élargissement du panel de titres diffusés, à travers des plateformes communautaires comme Myspace, LastFM, ou encore Youtube.Pour l’heure, le système actuel se maintient néanmoins. « Des solutions alternatives à la Sacem existent sur le web, mais elles ne garantissent rien en matière de protection des droits. La Sacem reste la meilleure solution à défaut de mieux », résume Ramsa, du groupe de rap lyonnais Bhundao.Pour J Govciyan, l’avenir du droit d’auteur numérique se situe plutôt du côté « d’un tracking des diffusions sur les sites d’écoute gratuits financés par la pub, voire des modèles d’abonnement pour l’écoute illimitée, avec protocole de paiement automatique sur les comptes dédiés des artistes ». En agrandissant le gâteau, tout le monde aura peut-être une part plus… juste.

Julien Monchanin

756 millions d’euros en 2008 : c’est le montant des droits encaissés par la Sacem, l’organisme chargé de percevoir et gérer les droits des auteurs et compositeurs en France. Le multimédia, qui comprend Internet mais aussi la téléphonie mobile, représente 10 millions seulement, soit à peine plus de 1 % de ce pactole. On est loin, très loin de la valeur réelle de la musique échangée sur le web.Sollicitée, la Sacem s’en tient à son communiqué de presse publié à l’occasion du Midem : « l’écart entre l’usage massif de la musique dématérialisée sur ces réseaux et le montant des revenus perçus par les auteurs est devenu intenable ». Voies du salut envisagées : l’adoption du projet de loi Création et Internet, la contribution des FAI et « une réévaluation de la redevance pour copie privée », qui devient « indispensable, dans la mesure où la baisse des ressources échappe à toute logique et donc à toute justice ».

La vie de bohème à l’heure des réseauxPour les artistes, le pactole est donc loin d’être mirobolant. S’il est difficile de savoir combien touche un auteur ou un compositeur chaque fois qu’un titre est vendu sur le web, certaines estimations circulent. Par exemple, la Sacem perçoit 7 centimes d’euro pour chaque titre vendu sur iTunes, généralement au tarif de 99 centimes TTC. Par le jeu de la répartition des droits numériques, statistiquement obscure pour le moment, certains retrouvent une partie de ces 7 centimes dans leur porte-monnaie, 2 en moyenne, un

Décryptage

La musique endurcit les mœurs

Le nombre de créations sonores diffusées sur le net explose et pourtant les revenus issus de la gestion des droits restent modestes. Un paradoxe qui met en évidence des lacunes dans leur collecte et leur redistribution.

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Portrait

Les libertaires sèment leur Zone

Les éditions Zone combinent de façon originale web et livre. Une version brute en ligne et de beaux livres pour les amateurs de textes, c’est la martingale d’un éditeur pas comme les autres.

Hugues Jallon est le directeur éditorial des toutes jeunes Éditions Zone. Pas du genre à s’inquiéter de la numérisation du livre, au contraire. Pour lui, l’époque actuelle est excitante : nous ne sommes pas encore sorti du papier et de l’encre, ni encore vraiment entré dans le tout numérique. Rien de tel qu’une période de transition pour prendre des risques et tenter de créer un nouveau rapport entre le texte, son lecteur et son auteur.H. Jallon prévient d’emblée : « les éditions Zone sont avant tout un projet éditorial, né de l’envie que j’avais de publier des textes plus littéraires, plus libertaires aussi ». Un travail classique d’édition qu’il a confié à Grégoire Chamayou, un jeune agrégé de philosophie.

Un modèle éditorial et commercialPublier des livres anarchistes par les temps qui courent, une utopie ? Pas pour le directeur éditorial : « je sentais un renouveau militant, de nouvelles formes d’action, qui passaient par un rapport particulier avec Internet. Alors l’idée s’est imposée assez vite : nous publions simultanément les livres sur notre site et sur du papier ». Si on trouve bien la même suite de caractères quelle que soit la forme, l’éditeur a réfléchi aux spécificités des deux. Sur le net, le texte est gratuit ; du coup, il faut en donner pour son argentà l’acheteur qui ira en librairie - à commencer par les couvertures réalisées par des graphistes talentueux. Une fois que vous aurez vu un de leurs livres, vous le reconnaitrez tout de suite. Un choix affirmé, puisque les éditions n’entendent pas faire d’exception. Publier chez Zones, c’est adhérer à ce modèle.Parallèlement, la version gratuite disponible sur Internet n’est pas idéale. Pas question d’offrir un PDF. C’est sur le site qu’il faut faire défiler le texte en HTML pour pouvoir le lire sans bourse délier. Les plus fanatiques pourront toujours l’imprimer, mais il leur faudra du temps et beaucoup d’encre.Un peu plus d’un an après son lancement, le succès

est au rendez-vous. À ceux qui imaginent que le web cannibalise les ventes en librairie, le démenti est formel : « les deux livres que nous avons le plus vendu – Propaganda et Lettres de non motivation –

sont aussi les deux textes les plus consultés en ligne. Plus il circule sur Internet, plus il a de chance de se vendre ensuite », précise le directeur éditorial. Comme si le lecteur venait d’abord vérifier en ligne que le livre qu’il lira l’intéresse vraiment.

Des bonus pour enrichir l’expérience du lecteurSi l’exemple est encourageant, il serait prématuré d’en tirer des conclusions définitives, valables pour le livre en général. Le catalogue des éditions Zone est militant et on peut parier que certains lecteurs ont à cœur de soutenir un éditeur qui fait un travail singulier. Hugues Jallon lui-même tient à garder le caractère expérimental de ce qu’il fait. « Le jour où tout le monde aura un reader, ce pourrait être un problème, car si on ne vend plus rien, on ne produit plus rien », rappelle-t-il.Étonnamment, quand on lui demande s’il pourrait vendre de l’espace publicitaire pour compenser le manque à gager, les causes du refus ne sont pas tant idéologiques que stratégiques : commercialiser de

l’espace est un métier que le monde de l’édition ne maîtrise pas aujourd’hui.Autre piste pour continuer à attirer les lecteurs : mettre en ligne les textes accompagnés de bonus comme on dit dans les DVD. C’est ce que font les éditions Zone, qui, par exemple, publient à côté de l’ouvrage Les bandits, de l’historien britannique Éric Hobsbwan, le film de deux conférences qu’il donna il y a quelques années. Si, pour certains titres, la rubrique bonus n’est pas toujours développé, c’est par manque de moyens. Ce n’est pas par manque d’idées. Le directeur éditorial n’en manque pas. Ni d’enthousiasme !

Christophe Bys

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groupes industriels, mais aussi les groupes oeuvrant à la création de standard et toutes les associations qui, à un titre ou à un autre, s’occupent des questions d’identité. L’internet Society sera chargée plus spécifiquement de la mise en place de protocoles et de spécifications interopérables et harmonisées.

Développer Internet de demain en respectant l’identité de chacunPour Lucy Lynch, directrice des initiatives Identité et Confiance à l’Isoc, ce rapprochement ne doit rien au hasard. « L’Internet Society est heureuse de rejoindre la Liberty Alliance. Notre but commun est de faire valoir et de développer les bases techniques de la confiance et de l’identité numériques, lesquelles seront cruciales pour soutenir les applications et les services Internet interopérables, sûrs, tout en respectant la vie privée. L’Isoc se réjouit de prendre part aux divers processus collaboratifs, qui sont solidement établis au sein de Liberty Alliance. Par cette participation active, nous nous assurerons que les spécifications sur lesquelles reposent ces technologies permettent de nombreuses innovations et qu’elles seront au service des utilisateurs d’Internet dans le monde entier. La discipline et l’expérience qui sous-tendent les processus au sein de la Liberty Alliance - notamment ceux reliés au développement des spécifications fondées sur des demandes provenant du marché constituent une excellente plateforme. Elles auront un impact positif sur le travail à mener autour de la question de la gestion des identités ».

Odile Ambry

À mesure qu’Internet se développe, les problématiques liées à l’identité se multiplient. La Liberty Alliance est une instance globale regroupant la communauté de l’identité. Elle travaille à construire un Internet plus sûr pour les entreprises, les pouvoirs publics et les citoyens. Rien d’étonnant si l’Internet Society vient de rejoindre le directoire de cette structure.Celui-ci est responsable des choix stratégiques de l’Alliance, le tout en adoptant un point de vue global. D’autres organisations sont devenues membres en 2009, parmi lesquels on peut citer : AOL, BT, CA, Fidelity Investments, Intel, NTT, Oracle et Sun Microsystems.Organisation internationale indépendante fondée en 1992, l’Internet Society travaille à élaborer des propositions dans les domaines des standards Internet, de l’éducation et des politiques. En tant que membre du directoire de la Liberty Alliance, l’Isoc suivra de près les collaborations avec les différentes structures publiques ou privées intéressées par ces questions. Parmi celles-ci figurent en bonne place les

L’actualité de l’Isoc Monde

L’Internet Society rejoint le directoire de la Liberty Alliance

Pas d’internet pour tous, si l’identité de chacun n’est pas respectée. Pour œuvrer à une meilleure prise en compte de cette variable, l’Isoc monde a rejoint la Liberty Alliance. Elle y travaillera notamment à la mise au point de standards rendant compatible le développement du réseau et le respect des identités.

Liberty Alliance une vigie pour le respect des identitésLiberty Alliance est la seule communauté traitant de l’identité globale. Elle regroupe en son sein aussi bien des entreprises de logiciels, des fournisseurs de ser-vices aux consommateurs ou des organismes publics et d’enseignement… Tous travaillent de concert pour construire un Internet plus fiable en s’attaquant aux questions d’identité numérique, aussi bien dans ses aspects techniques, que politique ou liés au respect de la vie privée.

Liberty Alliance offre à ses membres, qu’ils soient in-dividus, pouvoirs publics ou secteur associatif, la pos-sibilité de participer pour un coût réduit (voire gratui-tement) à des groupes de travail spécifiques (Special Interest Groups – SIG). Certains ont été créés par des dirigeants de l’industrie, comme celui sur le gouverne-ment électronique ou la santé. Les groupes peuvent ainsi s’assurer que leurs besoins et leur gestion spéci-fique de l’identité sont bien pris en compte dans les ca-dres de travail technologiques et politiques qui traitent des technologies émergentes.

OA

Page 9: Édito Sommairemanuscritdepot.com/edition/documents-pdf/SDLI_57_mars09.pdfCe qui est menacé chez les industries culturelles, c’est la seule vente de copies d’œuvres. Mais d’autres

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Dans le prochain numéro de Sociétés de l’information s’interroge :

La cybercriminalité, entre menaces réelles et paranoïa

Avec le soutien de l’Internet Society

Sociétés de l’information est une lettre professionnelle mensuelle éditée par Tocsin, SARL au capital de 380 euros, immatriculée au RCS de Paris B 432 735 264.Siège social : 82, boulevard de Ménilmontant 75020 PARIS - Tél. 01 43 66 77 07 - Fax 01 43 66 74 33.

Directrice de la publication Odile Ambry Rédacteur en chef Christophe Bys.Journalistes Christophe Bys, Sylvain Icause, Olivier Itéanu, Joaquim Lachaise, Julien Monchanin Conseillers de la rédaction Sébastien Bachollet, Éric Brousseau, Didier Kasolé Conception graphique et illustrations Régis Bodinier.

La rédaction n’est pas responsable des textes, illustrations et photos qui lui sont communiqués par leurs auteurs. La reproduction partielle ou totale des articles publiés est interdite sans accord écrit de la société Tocsin.

de mettre entre les mains de ses collaborateurs des ordinateurs toujours plus puissants avec des écrans toujours plus plats, il serait temps de leur apprendre à les utiliser efficacement… et ce d’autant que les auteurs de l’étude suggèrent que l’avenir est aux usages collectifs, de type wiki. Il n’est pas certain que ce soit une bonne nouvelle pour les comptes de résultats des fabricants d’ordinateurs. Pour ceux qui croient qu’on peut faire mieux avec moins… Les temps changent décidément.

Christophe Bys

Il semble bien loin ce temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître : celui des pionniers de l’informatique professionnel. Pas question d’imaginer à l’époque d’avoir un ordinateur à la maison. La machine était réservée à l’entreprise. L’utiliser était un privilège, le signe que son possesseur était moderne.Quelques années plus tard, le changement est complet, comme le montre l’étude Référence des usages des technologies de l’information au travail en France. Fini le temps où l’entreprise était à la pointe de l’innovation. Pour les plus jeunes, le monde du travail est même devenu ringard, et certains préfèrent rentrer chez eux pour pouvoir travailler correctement. Imaginez : utiliser un mail, quand on a passé sa jeune vie à communiquer grâce à la messagerie instantanée ou aux réseaux sociaux… Ces deux usages mixtes attirent la méfiance notamment des directions informatiques, chargées de la sécurité. Qui dit usage mixte, dit aussi contrôle moins aisé. Que fait le salarié sur facebook ? Travaille-t-il ou discute-t-il avec ses amis ? Où l’on voit que les caractéristiques du web 2.0 entrent en conflit avec la logique des entreprises.

Des salariés mal formés aux TicUn chiffre résume ce décalage, toutes générations confondues : 72 % des actifs utilisent un ordinateur dans leur loisir ; ils ne sont que 46 % dans leur travail. Pourtant, la formation des salariés laisse encore à désirer. La lecture de l’étude apprend ainsi que les salariés recourent au courriel… pour trouver de l’information, qu’ils pourraient trouver sur le net ou dans l’intranet !De grands gisements de productivité existent donc là où on ne les attendait pas forcément. Il ne suffit pas

Émergences

Entreprises : dépensez moins, mais dépensez mieux…

Une étude sur les usages des Tic dans le cadre professionnel montre le retard pris par les entreprises. Et si avant d’acheter du matériel plus puissant, on apprenait enfin aux salariés à mieux utiliser ce qu’ils ont sous la main.

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