au cœur des mutations du monde rural

EspérErLEttrE pastoraLE

– FévriEr 2019 –

Diocèses de Clermont, Moulins, Le Puy-en-Velay et Saint-Flour

LEs évÊQUEs D’aUvErGNE

PlanIntroduction : pourquoi cette lettre pastorale ?•Donnersuiteautravaild’uneéquipeinterdiocésaine•Accueillirlesdéfisactuelsdesnouvellesruralitésdansnosdiocèses

•ConstruireuneÉglisetoujoursplusprochedetous•Rendrecomptedel’espérancequianimel’Églisedanslemonderural

Un monde rural en mutation•Lesruralités:ladiversificationdumonderural•Mondeagricoleetmonderural:desrelationsnouvellesenquêtedesens

•Leré-enchantementdumonderuraletlesaspirationsdu«retouràlacampagne»

•Unesituationsouventdifficilequiinterrogenospratiquespastorales

Des mutations qui sont un appel pour l’Église•Lemonderural:auxavant-postesdesquestionsécologiques

•Leszonesd’hyper-ruralité:uneinterpellationfortepourlaviedel’Église

•Denombreusesproximitésentrelaviedel’Égliseetlemonderural

•Lepatrimoine,témoind’unetraditionspirituelleetducheminementd’unpeuple

Annoncer l’Évangile dans une proximité renouvelée •Privilégierletempsplutôtquel’espace•Discernerlesenjeuxnouveauxpourlavieparoissiale•Releverledéfidelaproximité:unemêmemissionpourleslaïcsetlesministresordonnés

•Conjuguerfraternité,proximitéetcréativité

Conclusion : agir dans le monde rural en témoins d’espérance

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IntroDUCtIon :

poUrQUoi cEttE LEttrE pastoraLE ?

La vie de l’Église diocésaine s’enracine dans une terre, au cœur d’une histoire et

au sein d’un peuple. À chaque époque, il est nécessaire de prendre conscience des trans-formations qui traversent la société. dans les diocèses d’auvergne (correspondant aux départements de l’allier, du cantal, de la Haute-loire et du Puy-de-dôme) très majori-tairement ruraux, les mutations actuelles du monde rural modi-fient la vie des hommes, des communes et des paroisses. elles sont souvent l’objet d’un dialogue avec les élus locaux qui, au service des communes, font face avec courage à des situations souvent difficiles à vivre. ces transformations invitent également à adapter ou à repenser l’organisation locale de l’Église diocésaine. Pasteurs au service des communau-tés qui leur sont confiées, les évêques souhaitent contribuer à la réflexion menée, tant dans la vie de l’Église en France que dans la société civile, pour répondre aux défis posés par les mutations du monde rural aujourd’hui.

�donner suite au travail d’une équipe interdiocésaine

Les diocèses d’Auvergne ontmené en 2016-2017 une ré-flexion commune sur la placede l’Église catholique en milieurural. Ainsi, une équipe d’unequinzaine de personnes1 a tra-vaillé à l’analyse de la situationdans les quatre départements,et a formulé des constats etdes propositions utiles pourpenser laviede l’Églisedans lecontexte actuel d’une ruralitéporteused’angoissesmaisaussid’espoirs.

Forts de ce travail, les évêquesontdécidéderédigercettelettrepastorale. Invitant les commu-nautéschrétiennes,endialogueavec les acteurs de la société

1. Les évêques remercient vivementtoute l’équipe interdiocésaine, dontla réflexion inspire en grande par-tie cette lettre pastorale. Ils expri-ment aussi leur reconnaissance auP.Patricede laSalles.j.quiacoor-donné ce travail et rédigé les élé-ments importantsélaborésàchaquerencontre.

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ces territoires. Cependant,elle ne peut plus être pen-sée de manière univoque.Elle revêt aujourd’hui unecomplexité qui invite à par-ler de «ruralités» au pluriel:«Lanotionde"ruralité"nefaitplus sens et ne permet plusde décrire de façon opéranteles 80% du territoire nationalqui,pardéfaut,nepeuventpasêtre considérés comme deszones urbaines. D’une part, lecouple ville-campagne, loinde s’opposer, fait désormais"système", dans le vécu quo-tidien des individus, dans leshabitudes culturelles et deconsommation, dans la suc-cessiondes lieuxde vie,danslesfluxéconomiquesetlacir-culation des richesses, dansl’interdépendance des sys-tèmesterritoriaux.D’autrepart,iln’yapasunemaisdes rura-lités[…]Dorénavant, invoquer

civile,àmieuxprendreconsciencedes richesses et des difficultésvécuesdanslemonderural,cettelettreproposedespointsd’atten-tion et suggère des orientationsauservicede lavisibilitéetde laproximitédel’Égliseauservicedetous.

� accueillir les défis actuels des nouvelles ruralités dans nos diocèses

La dimension rurale constitueune large part de l’identité dela majorité des diocèses et desdépartements de France2. Cettedimension, à la fois géogra-phique, économique, sociale etculturelle, s’inscrit profondémentdans l’histoire et dans la vie de

2. Lapopulationrurale(20%delapopu-lationfrançaise)occupe80%duterri-toirenational.

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témoignage d’un adjoint au maire de l’allier

Je peux dire que si je continue dans ces fonc-tions, c’est parce que je pense qu’elles ont du sens et que c’est bon. Notre société de métro-poles urbaines, de grands centres commerciaux, de surinformation et d’ex-hortation permanente à la consommation propose un stéréotype de vie qui ne me paraît pas équilibré pour un développement harmonieux de la per-sonne. Je pense qu’une vie plus proche de la nature, sachant prendre du recul par rapport à cette sur-stimulation est constructive pour un être humain. Notre société a besoin d’une campagne vivante. Persuadé de cela, j’essaie par ma fonction de soutenir cette cause avec l’espoir qu’une prise de conscience collective stoppe l’hémorragie qui épuise nos campagnes depuis tant d’années.

"la ruralité" en général ne suffitplusàfonderunequelconquepoli-tiqued’aménagement oud’égalitédesterritoires…»3.

Dans notre réflexion sur cettecomplexité nouvelle du monderural, s’ajoute la diversité desquatrediocèses,avecleurhistoire,leurs activités économiques etsociales,leurrapportentrel’urbainet le rural4, etc.Cesderniers élé-mentsnepeuventêtredéveloppésdanscette lettrepastoraledont lepropos demeure modeste. Nousvoulonscependant traitercertainsgrands défis actuels de la rura-lité–desruralités–quirejoignentdiversaspectspastorauxde laviedesdiocèses.

�construire une Église toujours plus proche de tous

Le termede«proximité»estsansdouteceluiquirésonneleplusfor-tementdanscettelettrepastorale,car il est source de nombreuses

3. Cf. Sénateur Alain BERTRAND, Rapportsurl’hyper-ruralité,remisauMinistreduLogementetde l’Égalitédes territoires,le30juillet2014;pp.7-9.

4. Parexemple,lediocèsedeClermontet,pourunemoindrepart,celuideMoulins,possèdentdesagglomérationsurbainesimportantes, sans équivalent dans leCantal et la Haute-Loire. Ainsi, danschaquediocèse,l’articulationentrel’ur-bain et le rural se présente demanièredifférente.

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interrogations:commentl’Églisepeut-elleresterprochedetous?Comment, dans des situationsde désertification et de criseagricole, retrouver du sens, del’énergie,delajoiedevivredansl’espace rural, déserté en biendes endroits? Quelle contri-bution les communautés chré-tiennespeuvent-ellesapporteràcegrandmouvementactuelpourpenser et vivre la ruralité d’unemanière nouvelle? Comment,dansuncontextedediminutiondes vocations et du nombrede prêtres, de religieux et dereligieuses, les communautéschrétiennes peuvent-elles res-ter proches de tous? La vie del’Église ne se situe pas hors dumondemais au cœurmême delasociété.Pourleschrétiens,lacité de Dieu se construit dans

la cité des hommes. Parmi lessignes des temps que l’EspritSaintnousdonneaujourd’hui,lemonderuralestunappeletunechance pour une Église procheet à l’écoute des citoyens denotrepays.

�rendre compte de l’espérance qui anime l’Église dans le monde rural

Ilexistedefortesconvergencesentrelapropositionspirituelleetcaritativedelaviechrétienneetles énergies politiques, écono-miquesetassociativesmisesenœuvre aujourd’hui pour redon-ner à la ruralité toute sa valeuretsadignité.Lesdifficultésren-contréespourcréerplusdeliensocial,desolidaritéetd’entraide

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théâtre - débat : rompre la solitude en milieu rural

À l’initiative du CMR (Chrétiens en Monde Rural) en Côte-d’Or, 150 personnes ont participé à un après-midi d’échanges autour d’une animation théâtrale : « le stress est dans le pré. » Le public a exprimé son accord et son exaspération devant les 12 saynètes proposées. Elles évoquaient :

> l’incompréhension du voisinage sur le traitement de nuit ou le chant du coq ou les odeurs.

> la solitude des agriculteurs célibataires.> le sentiment d’être suspect face aux banques et aux organismes

de contrôle.> l’impuissance devant les aléas climatiques et le cours des mar-

chés.> ladifficultédesjeunesàs’installer.

Par cette action, l’équipe a voulu entretenir des liens, créer des échanges, développer des réseaux et replacer la question agricole et alimentaire au centre des débats.

Agir en rural, revue du C.M.R., déc. 2017, n°111 p. 8

danslesterritoiresrurauxet,enparticulier,danslesespaceslesplus défavorisés ou abandon-nés,peuventdevenirunesourced’initiatives nouvelles et decollaborations mutuelles pourlesmembresdescommunautéschrétiennes rurales. Ainsi «surle terrain de l’évangélisation,lesespacesrurauxméritentuneattention particulière. Ne sont-ilspas,pournos sociétés,por-teursd’enjeuxliésàlanatureetàlavie:diversitédespaysages,

alimentation et santé, place dela faune et de la flore dans lerapportàl’espace,modesdevieliés aux rythmes naturels, héri-tages culturels divers selon lesterroirs, formesparticulièresderelations sociales, développe-ment de l’insertion et de l’éco-nomiesolidaire?»5.

5. Cf.G.GRACINEAUetJ.-J.BARRERE,L’avenir des territoires ruraux.Des chrétiens s’interrogent. RapportinterneàlafamilleduPrado,p.96.

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UN MoNDE rUraL

EN MUtatioN

Des changements ma jeurs affectent le monde au-jourd’hui, tels le réchauf-

fement climatique, la pollution de la terre par les déchets et les pesticides, la perte de la biodi-versité, l’épuisement des sols… autant de facteurs de l’activité humaine qui agissent sur la vie ordinaire de chacun et touchent très concrètement le monde rural en France. avec ces phénomènes à la fois planétaires et locaux, celui-ci connaît depuis plusieurs décennies des mutations impor-tantes : diversité des modes de productions agricoles, chan-gement de la physionomie de l’espace rural et liens nouveaux entre urbain et rural, transfor-mation des rapports humains et de l’anthropologie culturelle, etc. au-delà des regrets ou des enthousiasmes, cette situation nouvelle nous est donnée à vivre. il s’agit d’accueillir ces transfor-mations de la ruralité comme une réalité où le royaume de dieu, déjà semé, peut croître et grandir pour le bien de tous.

�les ruralités : la diversification du monde rural6

Dorénavant, invoquer «la ru-ralité»engénéralnesuffitplusàdéfinirl’espacerural.Malgréson aspect rassembleur,une telle approche conduità assimiler des situations etdes problématiques trop di-versesetàquitter rapidementla complexité de la réalité.Cependant il est possible dedistinguer trois catégories de«campagnes»:

� les campagnes des villes,desvalléesetdulittoral(26%de la population sur 26% duterritoire), qui connaissentune forte influence et crois-sance des villes. Elles sedensifient, enregistrent unecroissance résidentiellemarquée ou modérée, avec

6. Cf.A.BERTRAND,Rapportsurl’hy-per-ruralité,p.12ss.

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l’arrivée de populations plutôtjeunes, diplômées et actives,etconnaissentunedynamiquetiréepar le développementdel’économielocale;� les campagnes agricoles etindustrielles (9% de la popu-lation sur 26% du territoire),peudenses,dontladynamiquedémographique est fortementliée à celle des villes, parfoiséloignées;� les campagnes à très faibledensité(8%delapopulationsur42% du territoire) longtempsmarquéesparl’exoderural,quiconnaissent depuis quelquesannées un brassage et, pourcertaines,unregaindémogra-phique, mais n’échappent pasàunfortvieillissementetàunetendance à la paupérisationdes populations qui y vivent.L’économie de ces territoiresrestedominéeparlesactivitésagricolesetagro-alimentaires,avec dans certaines zones,notamment en montagne, unepart importante de l’économieliée au tourisme. Cependant,l’augmentation forte de lapopulation âgée suscite desbesoins d’accompagnementsocio-médicalisé, et crée desemplois, en particulier dansl’aide à domicile et dans lesEHPAD. L’hyper-ruralité cor-respond, dans cette troisièmecatégorie, à la fraction la plusrurale,laplusenclavée,laplus

distante des services et lamoinspourvueenpôlesdevieéconomiqueetdedécision7.

Une part importante de nosquatre diocèses se situe danscette dernière catégorie descampagnes à faible densité.Les transformations actuelles

7. Le reste de la population française(57%)vitsur6%duterritoireentantqu’urbains.

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–vouluesousubies–danscesterritoires modifient profondé-ment les relations humaines,les modes de vie, la culture etla pratique religieuse de leurshabitants. Dans la propositiondelafoietdansl’élaborationdeprojets pastoraux, la réflexionet l’action des communautéschrétiennesdoivent intégrer cessituations difficiles et souventdouloureuses.

�monde agricole et monde rural : des relations nouvelles en quête de sens

Depuis longtemps déjà, lemonde rural n’est plus assimiléaumonde agricole,même si cedernier en fait partie et contri-bue largement à son identité.Pour une part, l’agriculture esten crise avec des situations

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Un méthaniseur collectif à saint-Jean-Lachalm (43)

Le projet de création d’une unité de méthanisation est né en 2010 lorsque le groupe d’agriculteurs du bourg qui faisaient des fromages, s’est posé la question du traite-ment du lactosérum qui était issu de la transformation du lait en fromage, et qui était souvent rejeté dans le réseau d’eaux pluviales ou dans les fossés avec des mauvaises odeurs.

Les cinq jeunes agriculteurs dubourgontalorsréfléchiàmonter un projet d’ensemble pour valoriser ce déchet ainsi que les autres déjec-tions agricoles (fumier et lisier). Il a été constitué une société (SIL énergies) entre les cinq exploitations et la commune pour réaliser ce projet. Après quelques re-tards, le projet a pu devenir réalité avec la construction de l’unité en 2016 et la mise en service en mars 2017.

Bulletin paroissial, Saint-Jean-en-Velay (43)

difficiles et parfois même dé-sespérantes.Ladiminutionfortedu nombre des exploitationsagricoles, et donc de la popu-lation agricole, a profondémentmodifié la ruralité8. La criseéconomique, les changementstechnologiques et la mise enquestiondu travail des agricul-teurs (surendettement, per-ception négative des activitésagricoles, isolement, etc.) ontconduit bon nombre de ceux-ci dans une situation oscillantentre le désespoir et la remiseen cause de leur métier. Cettesituation affecte très fortementle monde rural: quels modesde viepossiblesen rural quandles agriculteurs disparaissentet que la campagne se déser-tifie? Comment lutter contre ladésertification en conciliant lesattentesdes habitants et cellesdesnouveauxarrivants?

Au-delà des divers modèlesd’agriculture – conventionnelleou biologique – présents enAuvergne, se font jour, un peupartout, des initiatives pourpenser l’agriculture de manièrenouvelleetmettreenœuvreune

8. Quelques chiffres: la populationagricolereprésente2,8%delapopu-lation totale en 2014, contre 8% en1980.Lenombred’exploitationsagri-colesenFranceestpasséde1,1mil-lionen1980à437000exploitationsen2016.

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cohabitationnécessaireetsoli-daire entre les divers modèlesd’agriculture, respectueux dela nature et soucieuxde nourrirla planète. L’Église catholique,qui, après la dernière guerremondiale, a été à l’origine dudéveloppementdusyndicalismeagricole et des mouvementsde jeunesse agricole – commela J.A.C. (Jeunesse AgricoleCatholique) – peut aujourd’huiapporter sa contribution ensoutenant les réflexions et lesinitiatives nouvelles des agri-culteurs en faveur du dévelop-pementdurable,auservicedelasantéetde laviede tous.Sanslaprésencede l’agriculture,quinourrit l’humanité, façonne nospaysagesetconjuguelesforcesvitales de la nature à la créati-vité de l’homme, l’espace ruraldevientunmondedéshumanisé.

� le ré-enchantement du monde rural et les aspirations au « retour à la campagne »

Depuis les années 1970, le«retour à la campagne» estune aspiration forte chez cer-tainsdenoscontemporains,quiveulent quitter la vie urbaine etretrouver –avecplusoumoinsde succès – une plus grandeauthenticité de vie, au plus

proche de la «nature». Sousce «retour à la campagne», secherche quelque chose d’unevie plus humanisante: unmodede vie personnel plus pacifié,des relations aux autres plusenrichissantes, des conditionsd’existence simplifiées, un rap-port à la nature de qualité, etc.Sans doute, peut-on percevoiriciunequêtedu«spirituel»qui,pour paraître vague au premierabord,n’enestpasmoinssignede la recherche de profondeur,desensetd’unitépersonnelle.

Pluslargement,auseindelaso-ciétéglobale,les«campagnes»offrentdenouveauxatoutspourle «vivre ensemble»: qualitédelavieetdel’environnement,qualité des productions, nou-veau rapport au «vivant» et àla terre, accueil de nouvellespopulations, beauté des pay-sages, richesse du patrimoine,transition écologique, écono-mie sociale et solidaire, lieu demixité et d’expérimentation dela démocratie dans l’intercom-munalité. Le rapport ville-cam-pagnes’avèrealorsunechancepourtous.

Aussi, est-il facile et heureuxaujourd’hui de constater, dansnos quatre départements, lesnombreuses initiatives, tantpubliques qu’associatives oupersonnelles,pourdynamiserleterritoire, pourmettre en valeur

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lemonde rural. Bon nombre dechrétiens,engagésdiversementdansleurcommunerurale,dansle syndicalisme agricole, dansdes projets associatifs, parti-cipentàcettemiseenvaleur.Demême, lesparoissesou lesen-sembles paroissiaux cherchentà créer de nouvelles manièresde vivre en Église: création deréseauxentrelescommunautéset les personnes (souci d’unevie pastorale locale, mutua-lisation des moyens humainset matériels dans la vie des

communautés, rassemblementsinterparoissiaux, co-voiturage,etc.).Aveclaréorganisationdesparoisses, le nouveau maillagepastoralmisenœuvredans lesdiocèsestémoignedusouciquel’Église porte aux populationset manifeste sa volonté d’être«avec»,etnonpasdesubsisteren réseau fermé. Par exemple,laprésencede«veilleurs»dansles hameaux les plus reculéstraduitlavolontédeproximitéetdecommunicationavectous.

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Habitat partagé à la chaise-Dieu (43)

Nous sommes deux familles, (non originaires de Haute-Loire), quatre adultes et cinq enfants, et nous avons choisi de partager un peu de notre habitat. En 2008, nous avons acheté un terrain sur lequel se trouvait une ferme dont le logement était habi-table. Notre souhait était de pouvoir installer nos habitations sur ce ter-rain à proximité les unes des autres et ainsi de pouvoir partager du maté-riel et des moments de vie. […]

Quand nous le pouvons, nous par-tageons le matériel pour éviter que chacun achète un camion, une per-ceuse, un trampoline, une tondeuse… (Cela reste très compliqué pour les voitures, aujourd’hui nos activités professionnels et les déplacements liés aux enfants nous obligent à avoir une voiture par adulte présent sur le terrain).

Tout cela nous paraît nécessaire pour prendre soin du monde dans lequel nous vivons, mais tout cela n’est pas simple à mettre en œuvre, ça demande une attention perma-nente à soi, aux autres et aux besoins de chacun. C’est un travail quotidien avec ses hauts et ses bas.

�une situation souvent difficile qui interroge nos pratiques pastorales

Le «rural», qui souffreet même désespère, etquiarécemmentexprimésa colère, souhaite quel’Église ne l’abandonnepas.Encertainsendroitsdenosdiocèses, la«vieà la campagne»est trèsrude en ses solitudes etses détresses écono-miques. Soulignons ladifficulté de mettre enœuvre des moyens faceà certaines évolutionsimposéesparlecontexteactuel.L’Églisedoitalorssefaireproche,modeste,pour écouter, créerdes liens, sans donnerde leçons. L’Église n’apas de solutions toutesfaites pour résoudre cessituations douloureuses,mais elle cherche, dansun dialogue respec-tueux, avec les hommeset les femmes de bonnevolonté, à construire ouà soutenir les actions etles initiatives pour uneviemeilleureetplusjusteen rural, dans l’exerciced’une fraternité active etproposéeàtous.

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DEs MUtatioNs QUi soNt UN appEL

poUr L’éGLisE

nous percevons – modes-tement mais sûrement – combien et comment

l’Église, déjà présente au cœur du monde rural, est attendue face aux mutations actuelles. souvent, dans de petites com-munes, la communauté parois-siale constitue un des rares groupes repérables. les liens avec les collectivités territo-riales et les associations sont nombreux et, ensemble, se cherche la meilleure manière de travailler au bien commun, en particulier dans les domaines caritatif et culturel. Par leur di-mension spirituelle, les commu-nautés chrétiennes apportent une proposition de sens et une vie en proximité avec tous. elles offrent un « supplément d’âme » aux lieux désertés par les acteurs ordinaires de la vie sociale et économique. ainsi le caractère rural de nos diocèses, dans leur diversité, constitue un appel adressé à l’Église pour un engagement plus fort et plus créatif au service de nos concitoyens.

� le monde rural : aux avant-postes des questions écologiques

Répondant aux appels du papeFrançois, dans son exhortationsurLasauvegardedelamaisoncommune (Laudato Sí), l’Égliseen rural se trouve aux avant-postes du débat écologique.Eneffet, l’ancragede l’écologieintégrale, développée par lepape,setientd’aborddansl’es-pace rural. La terre comme lieude production de nourriture estle lieu d’enjeux considérables,sociaux, économiques, poli-tiques,religieux.Leschoixpourlaqualitédevieetlasurviedelaplanète regardent directementlesespacesruraux.Ainsi,lepapeFrançois souligne le lien étroit

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entre questions environnemen-tales et questions sociales ethumaines: «Aujourd’hui l’ana-lyse des problèmes environ-nementaux est inséparable del’analysedescontexteshumains,familiaux,de travail, urbains,etde la relation de chaque per-sonneavecelle-même»(§141).«Par conséquent, il est «fon-damentaldechercherdessolu-tions intégralesquiprennentencomptelesinteractionsdessys-tèmesnaturelsentreeuxetaveclessystèmessociaux.Iln’yapasdeuxcrisesséparées,l’uneenvi-ronnementale et l’autre sociale,

mais une seule et complexecrise socio-environnementale»(§139).

Les questions posées par l’hy-per-ruralité s’inscrivent danscetteperspective.Ellesnousin-vitentàentrerdansuneréflexionqui ne simplifie pas la réalitémaisconduitàdesactions res-pectueuses de l’homme et dela nature.C’est la terre vivante,avec les humains, les animauxet les plantes, qui donne unaccent particulier au débat sur«le vivant». Ce débat ne peutlaisser l’Église sans voix quandlerapportau«vivant»s’appelle

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réconciliation, justice, allianceavec la nature connue comme«création», avec les frères etsœursenhumanité.

� les zones d’hyper-ruralité : une interpellation forte pour la vie de l’Église

Malgréuneprisedeconsciencecroissantedanslasociétéfran-çaise, la gravité de la situationdes territoires hyper-rurauxsemble encore sous-estimée,voiremasquée,parlanaturedesindicateurs et critères couram-mentemployés,ainsiqueparlamanière dont ils sont interpré-tés.On constate, cependant, laplacedelaruralitédanslesdé-batspolitiquesactuelsauniveaunational,maisaussil’importancequ’attachent nos élus locaux,en Auvergne, à cette question.Relever lesdéfisde l’hyper-ru-ralité demande la mobilisationde mécanismes de solida-rité interne à tous les niveaux:entre acteurs locaux de toutessensibilités, entre territoiresde l’hyper-ruralité proches oulointains, mais aussi au niveaurégionaletnational.

Leszonesd’hyper-ruralitédenosdiocèses sont des zones priori-tairespourmanifesterquel’Églisesefaitprochedespopulationsquisouffrent. La responsabilité de

l’Égliseestimportantedansl’ac-compagnement des personnes,mais aussi des processus deréhabilitation de ces territoires.Les regroupements paroissiauxet lamiseenplaced’équipesdelaïcs et de ministres ordonnésau service de tous les clochers,y compris les plus modestes,cherchent à traduire ce soucid’uneprésenceecclésialeactivedans ces espaces menacés dedésertification.

�de nombreuses proximités entre la vie de l’Église et le monde rural

Enbiendesendroits, la sociétérurale présente des aspirationsqui rejoignent les ressourcestraditionnelles de la vie chré-tienne: authenticité, engage-ment, intériorité, stabilité, goûtde la terre, solidarité, partici-pation,simplicitédevie,qualitéderelations,etaujourd’huisansdoute plus qu’hier, respect dela Création, à la suite du papeFrançois. Tout cela dénote uneformedelibertéparrapportàlatechnique,unrythmedevieplusprochedelanature,leprimatdel’humain, une recherche de so-cialisation, et même une quêted’absoluqui,sansêtreconnotéetrop vite religieusement, peutouvrirdesvoiesd’évangélisationnouvelles.

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cœurd’entreteniretd’ouvrirceslieux de culte, offrant à la foisle témoignage d’une Église ac-cueillanteet lapossibilité, pourtous,deprier,deseressourcer,de trouver la paix et le silenceau contact de la beauté desmonuments. Dans une même

� le patrimoine, témoin d’une tradition spirituelle et du cheminement d’un peuple

Outre les grands édificesreligieux connus et visités parbeaucoup, les campagnes denos diocèses recèlent de trèsnombreuses églises, chapellesetoratoires,signesd’unetradi-tion chrétienne forte et consti-tutive de leur identité. Une desépreuves de la désertificationde certains de nos territoiresruraux est la perte de repèreset de sens pour les habitants:l’abandonet lapauvretédecesespaceslesconduisentàoublierqu’ilspossèdentunehistoire,unpatrimoine, une tradition spiri-tuelle.Defait, ilsn’habitentpasun désert mais un lieu marquépardeshommesetdesfemmesqui y ont vécu, travaillé, prié,aimé…Lepatrimoinereligieux–entreautres–révèlelaprésenced’un passé riche dans lequel ilest possible de retrouver desracinesafind’acquérirunsenti-ment renouvelé d’appartenanceàune terreetàunehistoirequicontinueaujourd’hui.

Participant à la lutte contrecette désertification, maisaussi au mouvement du retourà la campagne, bon nombre decommunautéschrétiennesontà

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perspective, des municipalités,des organismes publics ou desassociations cherchent à re-mettreenétatcesédifices reli-gieux.Celademandebeaucoupd’efforts et de persévérance,maisonperçoitcombien,à tra-vers la conservation matérielle

de ce patrimoine, sans nostal-gie, c’est tout un sens profondde l’humain qui est recherché.Dans la pierre et le bois deséglises de nos campagnes, estposéediscrètementetconstam-mentlaquestiondu«pourquoi»del’êtrehumain.

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aNNoNcEr L’évaNGiLE DaNs UNE

proxiMité rENoUvELéE

� Privilégier le temps plutôt que l’espace

Le pape François rappellesouvent que le tempsest supérieur à l’espace.

Ce principe signifie que don-ner la priorité au temps, c’estconstruire des projets, accom-pagnerdesprocessusplutôtquedeposséderdesespaces.Danslarechercheactuellepourtrou-ver des solutions au mal-êtreet à l’abandon du monde rural,la tentation, tant dans l’Égliseque dans la société civile, estde regrouper systématique-ment les paroisses (ensemblesparoissiaux) ou les communes(communautés de communes)en pensant mieux maîtriser,mieuxquadrillerl’espaceetainsimettre fin à l’isolement. Sansdoute risquons-nous d’oublieralorsquelquechosed’essentiel.En privilégiant le temps, plu-tôt que l’espace, le pape nousindiqueunedirection:

«Ce principe permet de tra-vailler à long terme, sans êtreobsédépar les résultats immé-diats.Ilaideàsupporterpatiem-ment les situations difficiles etadverses, ou les changementsde plans imposés par le dyna-mismede la réalité. […]Donnerla priorité à l’espace conduit àseprécipitercommeunfoupourtout résoudre dans le momentprésent,pour tenterdeprendrepossessiondetous lesespacesde pouvoir et d’auto-affirma-tion. […] Il s’agit de privilégierles actions qui engendrent lesdynamismes nouveaux dans lasociété et impliquent d’autrespersonnes et d’autres groupesqui les développeront, jusqu’àce qu’ils fructifient en évène-mentshistoriquesimportants»9.

9. Cf.PapeFrançois,LaJoiedel’Évan-gile,§223.

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Certes, les regroupements ter-ritoriaux permettent de tisserdes liens entre des commu-nautéshumainesquisesententdélaissées,mais ils ne peuventêtre fécondss’ilsdemeurentdesimples projets de réaménage-ment de l’espace. Il est néces-saire,commelesuggèrelepape,que ces processus s’inscriventdansdesdynamismesnouveauxoùleshabitantsdeviennentdesacteurs qui participent pleine-ment aux changements. Cesrapprochementsgéographiquespeuvent alors être source derelation, d’entraide, de créati-vité entre les personnes et lesgroupes. Mais il faut accepterdeprendre le tempsnécessairepour que les relations s’éta-blissent,pourquelespersonnesseparlent,pourquedesprojetsnaissent…

Les paroisses, tout comme lesmouvements et associations defidèles, ont ici un rôle à jouer,pour articuler un «je» et un«nous», afin que chacun soitrespecté(parl’accueil,l’écoute,laconsidérationpersonnelle)eten même temps que grandisseledialogueentrelespersonnes,afin que le bien commun s’ex-prime.Bienarticuléavecletout,lecollectiflocalpeutêtreégale-mentun lieude ressourcement,d’enseignement, de formation,quirayonnesurleterritoire.

�discerner les enjeux nouveaux pour la vie paroissiale

Bienque toute laviede l’Égliseneseréduisepasà laparoisse,celle-ci en est une réalitéimportante, actuellement enpleine évolution dans lemonderural. De plus en plus, elle sedéploie sur un territoire «inter-communal». L’Église a vécul’intercommunalité, dans beau-coup de diocèses, bien avantla société civile. C’est un nou-vel espace où lesmodalités decélébration, de catéchisation,d’évangélisationchangent,avecle souci d’une pastorale «mis-sionnaire»,c’est-à-diretournéeverslaproximitéet larencontredesgens.

Pour vivre, dans la mesuredu possible, cette proximitésur l’ensemble des territoiresruraux, nos Églises diocésainesdoivent éviter la tentation detout penser à partir des villes,de toutconcentrer sur lesprin-cipales communes, de toutorganiser autour de quelquesdispositifs diocésains (maisonsdiocésaines, communautésnouvellesoucentresspirituels).À ladésertificationéconomiqueet démographique ne doit pass’ajouterunedésertificationec-clésiale,quiseraitvécuecommeun abandon par l’Église des

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populations rurales les plus endifficulté. Au contraire, les pa-roisses peuvent créer et main-tenirdulienentrelespersonnes,en particulier celles qui sontisolées.Nourrissantespourceuxqui les fréquentent, mission-naires pour ceux qui sont loin,les communautés paroissialesdoivent chercher à exprimer laproximitéde l’Églisediocésaineetsonattentionauxjoiesetauxpeinesdetous.Si levisagedesparoisses se modifie, c’est quecelles-ci deviennent des lieuxd’expérimentation,derecherchemissionnaire suscitant des ini-tiatives nouvelles. Malgré levieillissement de ses membresendenombreuxendroits, lavieparoissiale,parsasimplicité,sadimensioncommunautaire,l’ac-cueil de tous et l’attention auxplus marginaux, manifeste lerôle important que l’Église peutjouerdansletissurural10.

10.CitonsencorelepapeFrançois,dansLa Joiede l’Évangile, § 28: «Lapa-roisseestprésenceecclésiale sur leterritoire,lieudel’écoutedelaParole,delacroissancedelaviechrétienne,du dialogue, de l’annonce, de lacharité généreuse, de l’adoration etde la célébration. À travers toutesses activités, la paroisse encourageet forme ses membres pour qu’ilssoientdesagentsdel’évangélisation.Elle est communauté de commu-nautés, sanctuaire où les assoiffésviennentboirepourcontinueràmar-cher, et centre d’un constant envoimissionnaire».

� relever le défi de la proximité : une même mission pour les laïcs et les ministres ordonnés

Les transformations du monderural font bouger fortement lamanière dont les laïcs et lesprêtres vivent aujourd’hui leursengagements et leurs respon-sabilitésdanslavied’undiocèserural, tant au niveau local quediocésain. Le défi principal estcelui d’une Église qui demeureproche de tous, et le contextede l’hyper-ruralité rend lasituation d’autant plus difficileet ledéfiplusfort.Lesprêtres,moins nombreux aujourd’hui,jouent un rôle important dansla réponse à ce défi pastoral.Parce qu’ils sont les pasteursde tous, à la suite du ChristBon Pasteur, jeunes ou moinsjeunes, ils s’interrogent sur lamanière de vivre leurministèredansuncontextedepénuriedevocationstantsacerdotalesquebaptismales.Ilssetrouvent,eneffet,faceauparadoxededis-tances géographiques de plusenplus importantesetà lané-cessité d’être prochesde tous,etplusparticulièrementdeceuxetcellesquin’ontpaslachanced’avoir une vie paroissialeactivedansleursvillages.Dansplusieurs diocèses en France,se cherchent de nouvelles

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modalités d’exercice duminis-tèrepresbytéral,pourrépondreaux urgences missionnairesrurales,maisaussipourtrouverunrythmeetunéquilibredevie,humainement tenable et spiri-tuellement vivifiant. La vie enéquipe sacerdotale, un minis-tère itinérant, des formations

spécifiques, des associationssacerdotales,des lieuxderes-sourcementspiritueletdes re-lecturesrégulières,sontautantdemoyensquipeuventêtremisen œuvre pour répondre, per-sonnellement et avec d’autres,auxdéfisnouveauxdelapasto-ralerurale.

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Cependant, c’est toute la com-munauté chrétienne qui doitportercesoucidelaproximité,àlasuitedesespasteurs11.Insérésdans la société par la vie fami-liale, professionnelle, associa-tive,leslaïcsviventcetteproxi-mité de façon plus naturelle,prenant le temps d’accueillir,d’écouteretainsid’incarneruneÉgliseprochedelaviedesgens.Aujourd’hui,lamiseenplacedestructurespastoralesauservicede la vie des communautés etde l’annonce de l’Évangile sedéploiedemanièreheureuseetféconde lorsqu’elle est le fruitd’unecollaborationétroiteentretous les fidèles: laïcs, prêtreset diacres, communautés reli-gieuses.Ainsi lesprioritésmis-sionnaires sont-elles portéespar l’ensemble des membresdu Corps du Christ: la visibilité

11.Cf. Concile Vatican II, Décret surl’apostolat des laïcs, 1965, n°10:«Participant à la fonction du ChristPrêtre,ProphèteetRoi, les laïcsontleurpartactivedanslavieetl’actionde l’Église. Dans les communautésecclésiales, leuractionestsinéces-saire que sans elle l’apostolat despasteursnepeut,laplupartdutemps,obtenirsonpleineffet.Àl’imagedeshommeset des femmesqui aidaientPaul dans l’annonce de l’Évangile(cf.Ac18,18-26;Rm16,3),leslaïcsqui ont vraiment l’esprit apostoliqueviennent, en effet, en aide à leursfrères,et réconfortentaussibien lespasteursque lesautresmembresdupeuplefidèle(cf.1Co16,17-18).»

et la proximité de l’Église sontl’affaire de tous les baptisés.C’est là que réside l’espéranced’une Église proche de tous etd’une présence effective dansle monde rural, même le plusdéserté. Sans doute, une prisede conscience de cette réalitéest-elleencorenécessairechezcertains. Cette lettre pastoralevoudraitycontribuer.

�conjuguer fraternité, proximité et créativité

Dans lemondeagricolecommedans lemonde rural–qu’il fautdistinguer,sanslesséparer–laconscience des menaces quipèsent sur l’environnement na-turel, socio-économiqueet hu-main, stimule la réflexionet lesrencontres. Ainsi, bien souventdansnoscampagnes,desinitia-tives fleurissent pour répondreaux défis du respect de l’envi-ronnement, de la solidarité, dela juste répartitiondes fruitsdutravail.Ces initiatives sontpor-teuses d’avenir pour un vivre-ensemble renouvelé. Osonsaller plus loin! Ce mouvement,perceptible dans nos quatredépartements, comme en biend’autres endroits, n’est-il pasuneexpressiondelafraternité?Lafraternitén’estjamaisdonnée,elleestsanscesseàconstruire,elle émerge progressivement.

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Ellepeutêtremotricederenou-veauet d’espérancedansnotresociété. Elle est inscrite danssa devise républicaine.Mise enœuvre par des hommes et desfemmesdebonnevolonté,cettefraternité trace l’horizon ultimed’unesociétéréconciliéeoùtousles hommes apprennent à sereconnaître frères, que ce soitenhumanité,commeenChrist12.

Dans nos diocèses, proximité,fraternité et créativité disent larequêtedenepasêtre isolé,etplus fortementdedonnercorpsà un «vivre ensemble» pour

12.Cf.G.GRACINEAUetJ.-J.BARRERE,L’avenir des territoires ruraux.Des chrétiens s’interrogent, 2016,https://www.ruralite-terrenouvelle.com

former des «communautéslocales», sous quelque aspectqu’elles puissent se présen-ter.Cela vaut autantentre laïcsassociés aux tâches d’Églisequ’entreprêtresetentrediacres,mais aussi avec les personnesmoinsengagéesdanslesactivi-tés ecclésiales, mais cherchantavec bienveillance un sensspirituel à leur existence. Lemonderural, loind’être réduitàunparentpauvrepourlasociétéfrançaise, offre des ressourceset des dynamismes qui ré-pondent auxaspirationsdenoscontemporains en quête d’unvivreensembleouvert,solidaire,respectueux de notre «maisoncommune», et soucieux d’unefraternitévécueavectous.

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Des hommes et des femmes au service de la proximité de l’église

Sur la grande paroisse qui compte 27 clochers répartis sur 24 communes, une vingtaine de personnes – les « veilleurs » - assurent une présence chrétienne de proximité. Ils témoignent :

Notre rôle est de garder une continuité de proximité avec la grande paroisse. Nous nous réunissons une fois par trimestre pour partager ce que nous vivons.

Nous essayons de faire le lien avec le vécu local, d’être une oreille attentive à ce qui s’échange, de prendre en compte les demandes des gens de la commune, d’être des correspondants.

C’est aussi une visite à des personnes isolées, une rencontre, un bavardagetoutsimplement,c’estprendreencomptedesdifficultés.

Des initiatives locales s’instaurent à l’exemple de la prière du cha-pelet à date fixe, du regroupement pour lemois de Marie chaquesemaine, de l’organisation de la Nuit des églises, du souci de garder au mieux l’ouverture de nos églises en essayant de les faire vivre un tant soit peu. Nous continuons à faire sonner les cloches à chaque évènement, manifestant notre présence locale.

Pour la préparation de Noël, cette année, les enfants du caté à partir de la maison paroissiale « centrale » ont allumé la lumière (une bou-gie) qu’ils ont portée chacun dans leur clocher, placée vers la crèche où le veilleur local les a accueillis.

C’est une présence qui donne sens à notre mission de chrétien.

Deux veilleurs de la paroisse Saint-Jacques des Monts et des Mines (43 et 63)

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aGir DaNs LE MoNDE rUraL

EN téMoiNs D’EspéraNcE

ConCLUSIon :

Faceauxtransformationsetauxdéfisdenotre sociétéactuelle, et plus particu-

lièrementdumonderural,évo-qués dans cette lettre pasto-rale,ilestbonderappelerque,pournouschrétiens,laprimautérevienttoujoursàDieuquinousappelle à collaborer avec Luiet nous donne la force de sonEsprit,pourtravailleràl’avène-ment d’un monde plus juste etplusfraternel.Lavéritablenou-veauté est celle que Dieu lui-mêmeproduitdefaçongratuiteet mystérieuse, celle qu’il ins-pire, cellequ’il provoque, cellequ’il orienteet accompagnedemillemanières. «Dans toute lavie de l’Église, il faut toujoursmontrerque l’initiative vientdeDieu, que c’est "lui qui nous aaiméslepremier"(1Jn4,19)etque "c’est Dieu seul qui donnela croissance" (1 Co 3, 7).Cette conviction nous permetdeconserver la joie faceàunemissionaussiexigeante,quiestun tel défi qu’elle prend notrevie dans sa totalité. Elle nousdemande tout, mais en mêmetemps elle nous offre tout»13.Cette assurance dans la foinous permet d’avancer sans

13.Cf.PapeFrançois,La joiede l’Évan-gile,§12.

crainte,danslajoied’êtreéclai-rés, appelés et envoyés pourporterdans lemonde ruraluneespérance renouvelée et uneconfiance en tous les acteursquiœuvrentàsonservice.

Cette lettre pastorale nedonnepasdespistesoudessolutionstoutes faites pour relever lesdéfis ainsi posés par le monderural. Dans le travail prépara-toireàcetécrit,certainsauraientaimé que les évêques disentclairement ce que les commu-nautés doivent concrètementmettreenœuvre,oucequidoitchangerdans l’Églisepourvivrelafraternitéetlaproximité.Maisceseraitoublierquelacréativiténesecommandepaset,surtout,que l’Esprit souffle où il veut etquand il veut. Il s’agit de faireconfiance à tous les baptisésprésents dans le monde rural,quiontàcœur,endenombreuxendroits dans nos diocèses,de regarder, de discerner, deprendredes initiativesetd’oserde nouvelles pratiques pasto-ralesquirépondentauxattentesd’aujourd’hui.

Aprèsl’analysedessituationsetletempsdudiscernement,ilim-porte deproposer des actions,aussi modestes soient-elles,

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pourquel’Évangilesoitannon-céàtousetqu’aucunecommu-nauténesesenteabandonnée.Nousinvitonsleséquipesd’ani-mation pastorale, les conseilspastoraux de paroisse, lesmouvements et associationsde fidèles, et tous ceux etcelles qui le souhaitent, à lireensemblecettelettrepastoraleetàtracer,ensemble,desche-minsnouveauxquimanifestentque l’espérance est vivante au

+ Luc CrEPY EvêqueduPuy-en-Velay

+ Bruno GrUA EvêquedeSaint-Flour

+ François KALISt ArchevêquedeClermont

+ Laurent PErCEroU EvêquedeMoulins

cœur desmutations dumonderural!

Puisse cette lettre pastoralerenouveler notre regard sur laviedenosquatrediocèsesd’Au-vergne.Puisseaussicettelettresusciteruneréflexionapprofon-die, un dialogue bienveillant etune collaboration féconde avectous nos concitoyens soucieuxde construire dans notre paysdes ruralités heureuses et por-teusesd’avenir.34

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Provinced’AuvergneImpression:ImprimerieCoopérativedesSucs

ZALaGuide-43200Yssingeaux

Photos:Jules,couverture-Sygal,p.4,6-Monia,p.8

PhilippeMaton,p.10-Jean-LouisZimmermann,p.13Jean-MariePrival,p.16-NicolasVogt,p.18-JamesStringer,p.20

LaurentMataillet,p.24-HervéM.,p.28

Les évêques d’auvergne

LEttrE pastoraLEEspéreraucœurdesmutations

dumonderural