Développement participatif d’un plan de gestion durable de … · 4.1 La compréhension commune...

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GUIDE 2 Dveloppement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise Guide pratique et exemples d’application en Afrique centrale

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G u i d e 2

developpement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoiseGuide pratique et exemples d’application en Afrique centrale

Developpement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoiseGuide pratique et exemples d’application en Afrique centrale

Nathalie van VlietCIFOR

Daniel CornelisCIRAD

Sandra RatiarisonFAO

Abdon BivigouFAO

Alain AmpoloFAO

Faustin TokateFAO

François SandrinCIFOR

Sébastien Le BelCIRAD

Jean-Claude Nguinguiri FAO

Publié parOrganisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)etCentre de recherche forestière internationale (CIFOR)etCentre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD)

FAO/CIFOR/CIRAD. 2017. Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise: Guide pratique et exemples d’application en Afrique centrale. Libreville – Bogor – Montpellier.

© FAO, 2017

ISBN: 978-92-5-209863-8

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Cette publication résulte du projet «Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale», mis en œuvre par la FAO, en collaboration avec les Etats bénéficiaires (Congo, Gabon, RDC et RCA), la COMIFAC, le RAPAC et les partenaires techniques CIRAD, CIFOR, et UICN. La participation du CIFOR à l’ouvrage s’est faite dans le cadre de l’initiative de recherche sur la viande de brousse du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie (FTA).

Nous tenons à remercier ici le Fonds pour l’Environnement Mondial pour son appui financier, ainsi que tous les bailleurs ayant contribué au cofinancement de l’ouvrage: le Fonds du CGIAR, l’USAID, le CIRAD.

Crédit photo couverture: CIFOR/Nathalie van Vliet

Table des matières

Remerciements vAcronymes et sigles viPréface vii

1 Prérequis pour une gestion locale durable de la chasse villageoise 11.1 Un contexte réglementaire favorable 11.2 Une gouvernance locale et nationale mûre pour soutenir et promouvoir la gestion locale 21.3 La démarche adaptative comme principe fondateur de la gestion de la chasse 2

2 Pourquoi un plan de gestion durable de la chasse villageoise? 42.1 Qu’est-ce qu’un plan de gestion durable de la chasse villageoise? 42.2 L’équipe idéale pour la facilitation d’un processus de planification de gestion 42.3 Étapes pour le développement d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 52.4 Les outils pour l’accompagnement à la prise de décision 6

3 Quelle micro-gouvernance pour la prise de décision sur le plan de gestion durable de la chasse? 73.1 Quel type de participation rechercher? 73.2 Qui participe à la gestion durable de la faune? 83.3 Quelle est la structure appropriée pour la prise de décision? 93.4 Comment assurer un processus participatif? 9

4 Concertation et prise de décision pour le développement du plan de gestion durable de la chasse villageoise 134.1 La compréhension commune de la structure et des limites du système de chasse:

territoire, acteurs, et interrelations 134.2 Concertation sur le système de chasse souhaité: définition de l’objectif de gestion et

des critères et indicateurs 144.3 L’identification des problèmes et des contraintes pour une gestion durable de la chasse 164.4 Théorie du changement et plan d’action 17

5 Eléments clés d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 205.1 Canevas pour un plan de gestion durable de la chasse villageoise 205.2 Le plan de chasse 225.3 Gestion de l’utilisation du gibier 235.4 Atténuation des conflits homme-faune 255.5 Restauration des habitats pour la faune 255.6 Le suivi: un outil indispensable à la gestion adaptative de la chasse villageoise 265.7 Mécanismes de résolution de conflits, contrôle et sanctions 315.8 Financement 32

6 Conclusion 33

7 Bibliographie 34

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Figures, tableaux et encadres

Figures1 Schéma qui démontre les étapes de la gestion adaptative des ressources naturelles (Berkes 2004) 22 Étapes pour le développement d’un plan de gestion de la chasse villageoise 53 Schématisation du système de chasse par les acteurs de Phalanga, République démocratique

du Congo 144 Définition de la durabilité économique, sociale et écologique telle qu’établie par les

chasseurs et membres de la coopérative de Ngokoéla à Ovan, Gabon (van Vliet et Tiani 2016) 155 Taux de charge et objectifs de gestion des populations chassées 236 Quotas et traçabilité des prélèvements comme instruments de régulation de la chasse et

du commerce (Cornelis et al. 2017) 257 Indicateurs de suivi d’un plan de chasse 29

Tableaux1 Typologie de la participation (Roe et al. 2009) 82 Exemple de contraintes et actions à mener pour les résoudre telles qu’identifiées par les

chasseurs des villages de la zone de Baego, République démocratique du Congo (van Vliet et Tiani 2016) 18

3 Proposition de calendrier d’exécution des activités proposées par les chasseurs dans le plan d’action d’Ovan, Gabon (van Vliet et Tiani 2016) 19

4 Caractérisation des approches du suivi local (Adapté de Danielsen et al. 2009) 29

Encadres1 La coopérative: structure d’organisation adoptée par le regroupement de Ngokoéla

(Ovan, Gabon) pour mettre en œuvre une gestion participative et durable des multiples ressources de son terroir (Abdon Bivigou) 10

2 Processus de coconstruction et validation des accords de gestion de l’Aire Communautaire de Chasse de Liouesso, République du Congo (Alain Ampolo) 11

3 Identification des contraintes à la réalisation d’une chasse durable telles que perçues par les membres de la coopérative de Ngokoéla à Ovan (van Vliet et Tiani, 2016) 16

4 Proposition de canevas pour un plan de gestion de la chasse 215 La gestion des Conflits Homme-Faune en Afrique centrale (Sébastien le Bel) 276 La gestion des habitats pour la faune à Phalanga, République démocratique du Congo

(Faustin Tokaté) 287 Suivi des prélèvements avec KoBoCollect à Ovan, Phalanga et Baego (François Sandrin) 318 Organisme de suivi et de contrôle de la réalisation du plan de gestion à Phalanga,

République démocratique du Congo (Faustin Tokaté) 32

v

Remerciements

Nous remercions chaleureusement les chefs de village, les habitants, les chasseurs, les enfants de Baego, Phalanga, Ovan, Djoutou, Liouesso, Ogoue et Ingolo, pour leur chaleureux accueil chez eux et leur motivation pour mener à bien cette expérience extraordinaire de coapprentissage.

Nous remercions les autorités nationales du Gabon, de la République du Congo et de la République Démocratique du Congo, Messieurs les Ministres en charge de l’environnement, Gouverneurs, Préfets, Sous-Préfets, pour avoir facilité notre travail sur le terrain et assuré la sécurité de nos équipes.

Un grand merci à l’équipe d’appui du projet FAO, coordinateurs régionaux, assistants techniques nationaux et facilitateurs qui ont participé, enrichi nos travaux de terrain sur les sites et assuré une bonne coordination entre tous les acteurs impliqués. La mise en œuvre de ce projet a également été facilitée par l’appui de nombreux stagiaires nationaux et internationaux, que nous remercions vivement.

Ce travail a été réalisé grâce aux financements du FEM, à travers le projet mis en œuvre par la FAO: «Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale» (GCP/RAF/455/GFF).

vi

Acronymes et sigles

FAO Food and Agriculture Organization of the United Nations (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture)

FEM Fonds pour l’Environnement MondialCOMIFAC Commission des Forêts d’Afrique CentraleRDC République démocratique du CongoACC Aire Communautaire de ChasseARDI Acteurs, Ressources, Dynamiques et InteractionsK Capacité de chargeCPUE Catch Per Unit Effort (anglais); quantité chassée par unité d’effort (Kg/heure)CHF Conflits Homme-FauneMOMS Management Oriented Monitoring SystemIKA Indice Kilométrique d’AbondanceSYVBAC Système de suivi de la Viande de Brousse en Afrique Centrale

vii

Preface

région. Pour ce faire, la mise en place de structures communautaires participatives de gestion de la chasse a été testée à titre pilote dans chacun des quatre pays (Gabon, République centrafricaine, République du Congo et République démocratique du Congo).

Pour ce faire, la FAO, en partenariat avec le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), le Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) et l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), a développé une série d’outils à travers une démarche de recherche action qui propose une approche en étapes pour la mise en œuvre de la gestion durable de la chasse villageoise. Ces outils s’adressent aux gestionnaires et aux fonctionnaires en charge d’appuyer la gestion durable de la faune. Le premier guide, publié en 2015, propose une approche pour la phase de diagnostic approfondi à mettre en œuvre avant le démarrage des activités de gestion (FAO et al. 2015). Ce document guide le gestionnaire à travers une série d’outils qui permettent d’acquérir une connaissance fine du système «communauté-faune» (terroir, utilisateurs, ressources, gouvernance locale en place, filière, etc.) afin d’appuyer le processus de gestion sur la base de l’existant et en prenant en compte le contexte local de mise en œuvre.

Le deuxième guide, qui fait l’objet de ce document, s’adresse aux gestionnaires qui souhaitent développer et mettre en œuvre un plan de gestion durable de la chasse villageoise en Afrique centrale. Bien que le cadre juridique de ces trois pays interdise la commercialisation du gibier (au-delà du village, du moins), la «Stratégie sous régionale pour l’utilisation durable de la faune par les populations autochtones et les communautés locales dans les pays d’Afrique centrale» de la COMIFAC, adoptée en 2015, soutient la valorisation et la promotion de la filière viande de brousse. Ainsi, ce guide s’applique aussi bien au contexte de gestion de la chasse pour la subsistance (usage coutumier), qu’au contexte de gestion dans le cas de l’existence d’une filière de commercialisation. La première partie de ce document présente les prérequis nécessaires pour

Les viandes provenant d’animaux sauvages terrestres ou semi-terrestres, dénommées «viandes de brousse», constituent une source primordiale de protéines animales pour les populations des pays d’Afrique centrale, et sont une composante essentielle de la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance dans les zones rurales. Cependant, la pression croissante de la chasse a des effets tangibles sur la faune et est susceptible d’avoir des incidences à long terme sur les écosystèmes forestiers. Les espèces sont plus ou moins capables de s’adapter à la pression de la chasse selon leur démographie et leurs contraintes écologiques. Cependant, avec l’effet concomitant de la dégradation des habitats pour la faune, la chasse peut entraîner la disparition locale d’espèces de faune sauvage et avoir des conséquences durables sur la biodiversité.

Répondre aux besoins alimentaires et économiques des populations locales tout en protégeant la biodiversité est un enjeu majeur pour les décideurs d’aujourd’hui. Répondre à ce double enjeu implique de soutenir les instances locales de gestion de la faune, qu’elles soient formelles ou informelles (Roe et al. 2009). En effet, le fait que la faune soit gérée par les populations locales au moyen de règles et de procédures élaborées par et pour elles-mêmes est le meilleur gage de durabilité de cette ressource (Ostrom 1990; Murphree 1993).

C’est dans ce contexte que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) ont lancé en 2012 un projet intitulé «Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale». L’objectif de ce projet est de démontrer que la gestion participative de la faune peut être une option viable pour conserver les fonctions, l’intégrité et la biodiversité de l’écosystème forestier dans le bassin du Congo. Le projet a pour ambition de renforcer les capacités des pays d’Afrique centrale dans la facilitation des processus de gestion participative de la faune et de la chasse à travers notamment l’appui à la mise en place d’un cadre politique et juridique approprié et la production d’approches et d’outils adaptés au contexte de la sous-

viii

vision souhaitée du système qui orientera les actions développées dans le plan de gestion. Enfin, sans imposer un canevas préétabli, ce document propose quelques éléments clés qui peuvent être développés dans le cadre d’un plan de gestion.

Ce guide est enrichi d’illustrations issues des exemples de mise en application dans le cadre du projet «Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale» sous la forme d’encadrés. Ces exemples doivent être compris comme des résultats intermédiaires et comme des processus en cours qui requièrent un appui continu sur le long terme.

garantir une gestion locale et participative durable de la chasse villageoise. Les sections suivantes ont pour but de fournir aux gestionnaires et fonctionnaires en charge d’appuyer la gestion locale et durable de la chasse villageoise, des éléments d’approche pour le développement d’un plan de gestion de la chasse. Le document amène le gestionnaire à s’interroger sur la forme de microgouvernance la plus appropriée localement pour le développement et la mise en œuvre de la gestion durable de la chasse, de manière à garantir un processus véritablement participatif. Ensuite, il guide le gestionnaire pour faciliter un processus dans lequel les parties prenantes analysent le système de chasse existant, identifient les contraintes et définissent la

La faune étant une ressource mobile et sujette à des utilisations partagées, elle est traditionnellement gérée de façon collective ou communale, et non individuelle. Les travaux d’Ostrom (1990) et de Murphree (1993) démontrent que les dispositions locales de gouvernance des ressources peuvent, en théorie, permettre de garantir une gestion durable, à travers le développement et l’adoption, par les groupes locaux d’utilisateurs de la faune, de règles communes qui limitent et réglementent les diverses utilisations. Cependant, un certain nombre de prérequis sont nécessaires pour permettre aux instances de décision locale de gérer leurs ressources durablement. En effet, les analyses pratiques des expériences passées de gestion durable de la chasse villageoise dans le monde, que ce soit dans le cas de la gestion formelle ou informelle, montrent que le succès des projets reste largement tributaire d’un certain nombre de paramètres liés au contexte institutionnel, écologique et économique. Parmi les

prérequis qui permettent de passer de la théorie à la pratique avec succès, nous allons ici nous attarder sur ceux qui nous semblent primordiaux: 1. Un contexte réglementaire favorable; 2. Une gouvernance locale et nationale adaptée; 3. La nécessité de gérer de façon adaptative.

1.1 Un contexte reglementaire favorable

Il ne saurait y avoir une gestion locale durable sans une dévolution graduelle des droits aux peuples autochtones et aux communautés locales, à travers un cadre juridique clair et favorable. Actuellement, la législation de la chasse dans de nombreux pays d’Afrique centrale présente un problème de chevauchement des normes, ce qui est source de confusion. La question des droits d’usage reste confuse et très souvent restrictive (Nguiffo et Talla 2010; Bigombe Logo 2007). De plus, le cadre

1 Prerequis pour une gestion locale durable de la chasse villageoise

©CIFOR/François Sandrin

2 Nathalie van Vliet et al.

actuel a tendance à contenir des normes techniques conçues pour la chasse sportive, mais qui s’appliquent indistinctement à la chasse communautaire. Les régimes fonciers permettant l’accès aux ressources cynégétiques ne sont pas assez précis et souvent ne reconnaissent pas les droits coutumiers des communautés locales et des populations autochtones sur les terres. Il est donc nécessaire, d’une part, de traduire en normes l’approche graduelle vers la dévolution des droits, et d’autre part, d’amender certaines dispositions de la loi, comme celles relatives à la réglementation de la chasse ou aux droits d’usage. Réciproquement, la dévolution des droits aux communautés doit être articulée dans le cadre du respect de grands principes simples de gestion durable (Lescuyer et al. 2013).

Dans le cas particulier de projets pilotes mis en œuvre dans un contexte où le cadre juridique national ne répond pas aux prérequis mentionnés ci-dessus, des mesures dérogatoires doivent être demandées à l’échelon le plus haut des institutions nationales, de façon à pouvoir opérer hors du cadre normatif, dans le strict objectif de formuler des recommandations concrètes pour le développement pragmatique d’un cadre juridique approprié.

1.2 Une gouvernance locale et nationale mûre pour soutenir et promouvoir la gestion locale

La gestion locale ne peut être durable que si les structures de gouvernance nationales sont effectivement décentralisées et suivent les principes de la bonne gouvernance (participation; transparence et reddition des comptes; responsabilisation). Par ailleurs, la microgouvernance locale doit être solide à long terme et représentative des intérêts des utilisateurs de la faune. De nombreuses initiatives de

gestion locale tirent les raisons de leur échec dans la mauvaise gouvernance locale (corruption, processus démocratiques limités, structures sociales dominées par les élites locales, etc.), le manque de préparation à la gestion (manque de leadership, manque d’initiative, manque de cohésion, etc.) (Roulet et al. 2007). Il est donc primordial de s’assurer que les structures locales de prise de décision sont opérantes et démocratiques et que les dispositions nécessaires pour renforcer les capacités organisationnelles sont prévues dans le cadre du projet d’appui à la gestion durable de la chasse villageoise.

1.3 La demarche adaptative comme principe fondateur de la gestion de la chasse

L’approche pour la définition d’un plan de gestion de la chasse villageoise doit se baser sur le principe de gestion adaptative, tel que décrit dans le diagramme ci-dessous (figure 1). La gestion adaptative défend l’apprentissage et la révision continuelle des plans de gestion comme stratégie de fonctionnement sur le plan pratique et à long terme (Berkes 2004). Dans le cadre de la gestion adaptative, les pratiques de gestion des espaces et de la faune sont axées sur leur capacité de résilience, plutôt que sur leur conservation stricte (van Vliet et al. 2015). On considère donc les conditions écologiques, mais aussi les dynamiques sociales, comme étant des facteurs qui peuvent influencer les processus et, par conséquent, la stratégie de gestion à suivre. La gestion adaptative représente l’intégration continuelle entre planification, gestion et suivi, afin de tester systématiquement les suppositions et de s’adapter aux contextes changeants (Agrawal 2000; Boddicker et al. 2002). Ainsi, la gestion adaptative intègre l’incertitude et l’imprévisibilité, qui sont des caractéristiques inhérentes à tous les socio-

Passé Futur

observation analy

ses

plani�cation

action

ré�exion suiv

i

nouvelle action

ré�exion suiv

i

nouvelle action

Figure 1: Schema qui demontre les etapes de la gestion adaptative des ressources naturelles (Berkes 2004)

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 3

écosystèmes. Dans ce cadre, l’intégration continuelle de nouveaux savoirs (traditionnels et scientifiques) et de l’information produite par le processus de suivi sont à la base de la gestion adaptative. En pratique, cela se traduit par une flexibilité dans la gouvernance de gestion qui permet de revisiter les règles et les processus mis en place de façon régulière. De plus, cela suppose un changement de paradigme entre l’approche scientifique classique (rigide et précise) qu’adoptent souvent les institutions d’appui et la nécessité de mécanismes flexibles, qui intègrent l’incertitude et le risque dans le cadre de la gestion adaptative par les communautés locales. Le défi à

relever ici porte sur la construction de la confiance entre ces deux groupes d’acteurs et le développement d’un compromis sur la rigueur scientifique qui sous-tend le suivi indiciel (sur la base d’indicateurs indirects) et la gestion adaptative (Cornelis 2017). La réalité de la gestion veut que l’on prenne des décisions même si on ne comprend pas encore le système dans sa perfection.

Ce changement de paradigme est nécessaire pour que les partenaires techniques, en collaboration avec les institutions nationales, appuient pleinement les peuples autochtones et les communautés locales.

2.1 Qu’est-ce qu’un plan de gestion durable de la chasse villageoise?

Le plan de gestion de la chasse villageoise peut s’entendre comme un document technique définissant les enjeux et objectifs de gestion de l’espace géré de manière différenciée. Il est souvent rédigé sous la forme d’un programme pluriannuel (p. ex. 3 ans) au sein duquel l’ensemble des ayants droit sur l’espace (p. ex. la communauté villageoise ou ses représentants, les concessionnaires forestiers, etc.) et sur les ressources fauniques (p. ex. l’association de chasse) formalisent entre eux et avec l’administration compétente la manière dont les activités vont être mises en œuvre afin de répondre aux objectifs de gestion durable de la chasse (Cornelis 2015). Le plan de gestion permet, à partir du diagnostic préliminaire approfondi: 1. de définir les enjeux pour lesquels l’entité de gestion locale de la chasse a une responsabilité, et les objectifs de gestion;

2. d’organiser et de planifier la gestion du site dans l’espace et dans le temps de façon pragmatique, objective et transparente. Ainsi, le plan de gestion est un outil indispensable à la formalisation de la gestion et à la programmation du travail du gestionnaire au quotidien.

2.2 L’equipe ideale pour la facilitation d’un processus de planification de gestion

Le facilitateur du processus de gestion a sans doute un rôle clé dans l’équipe. C’est le chef d’orchestre du processus. C’est la personne qui devra établir la confiance au sein du groupe d’utilisateurs au niveau local, ainsi qu’auprès des autres acteurs (concessionnaires forestiers, fonctionnaires, ONG, etc.). Dans ce sens, il est très important de s’attarder suffisamment sur le choix du facilitateur. Celui-ci devra assurer une présence continue au sein de

2 Pourquoi un plan de gestion durable de la chasse villageoise?

©CIFOR/Nathalie van Vliet

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 5

la communication communautaire, les connaissances techniques liées au plan de chasse, la transformation et la conservation des produits, le suivi de la faune et celui des quotas, etc.

2.3 Étapes pour le developpement d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise

Le processus de décision sur le plan de gestion durable de la chasse villageoise implique deux étapes principales (figure 2):• La première concerne la mise en place de la

structure de gouvernance locale adaptée pour la prise de décision. Cette étape est primordiale et il convient de s’attarder suffisamment sur celle-ci, afin d’établir des bases solides pour le reste du processus de décision.

• La deuxième étape consiste à amener les acteurs concernés à s’accorder sur le système de chasse qu’il s’agit de gérer, et à réfléchir, échanger et décider des objectifs de gestion, des contraintes actuelles observées, de la vision du système souhaitée, afin de définir une feuille de route (ou théorie du changement) pour la mise en œuvre de la gestion.

Figure 2: Étapes pour le developpement d’un plan de gestion de la chasse villageoise

la communauté tout au long du processus de planification de la gestion, mais aussi dans la phase initiale de mise en œuvre. Il devra savoir interpréter les discours locaux tout en maîtrisant les aspects les plus techniques de la gestion. Il devra trouver les moyens adaptés pour communiquer sur les processus de décision et de gestion en impliquant largement les parties prenantes et les différents membres de la communauté. Il devra également avoir des capacités à gérer les conflits entre parties prenantes et une bonne compréhension des divers aspects d’une bonne gouvernance.

Cependant, l’équipe idéale d’appui à la gestion ne peut pas comporter uniquement une seule personne compte tenu du caractère pluridisciplinaire de l’exercice. Bien que le facilitateur ait un rôle clé dans le processus, celui-ci doit être appuyé par divers experts qui l’accompagneront ponctuellement au cours des diverses étapes du processus. Ces experts, qui seront probablement externes dans un premier temps, devront assurer la formation et le transfert des responsabilités à des membres désignés par le comité local de gestion. Les expertises qui peuvent être requises dans le cadre de la gestion concernent la gestion des conflits, l’économie et le marketing,

1. Micro-gouvernance: Mise en place ou

renforcement d’une structure locale pour la

gestion de la faune

2. Concertation et prise de décision pour le développement du plan de gestion durable de la chasse villageoise

Comprehénsion commune de la structure et des

limites du système de

chasse: territoire, acteurs, et

interrelations

Concertation sur le système

de chasse souhaité:

dé�nition de l’objectif de

gestion et des critères et

indicateurs

L’identi�cation des problèmes

et des contraintes

pour une gestion durable

de la chasse

Théorie du changement et

plan d’action

6 Nathalie van Vliet et al.

2.4 Les outils pour l’accompagnement à la prise de decision

Il existe une diversité d’outils pour l’accompagnement à la prise de décision que l’on peut regrouper au sein du terme «modélisation d’accompagnement». Il s’agit d’une démarche permettant de faciliter des processus collectifs de décision, en proposant un travail d’explicitation de la diversité de points de vue au cours des diverses étapes de l’élaboration d’un plan de gestion. La modélisation d’accompagnement peut aider les participants à toutes les étapes du

processus: depuis la compréhension commune du système actuel, jusqu’à la concertation du système souhaité en passant par les actions à mettre en œuvre pour y arriver. L’accompagnement vise à s’assurer que les décisions sont concertées et alimentées par des informations techniques (issues de la phase de diagnostic, des informations secondaires, des avis d’experts) et la connaissance locale et traditionnelle. L’objectif est d’enrichir le processus de prise de décision, que ce soit sous son aspect technique ou sous son aspect sociologique (Collectif ComMod et al. 2005).

3.1 Quel type de participation rechercher?

Au cours des dernières décennies, la mise en place ou le renforcement de structures de gouvernance locale qui intègrent la participation communautaire a gagné une importance croissante dans les projets de conservation et de développement (Shackleton et al. 2002). La participation permet aux «acteurs locaux» (citoyens, usagers des ressources) de contribuer à l’élaboration des projets et politiques les concernant (Chambers et al. 1989; Borrini-Feyerabend et al. 2004). Elle peut prendre différentes formes (tableau 1) qui représentent des gradients d’appropriation des processus par la communauté, allant de la participation passive jusqu’à l’autodécision. Ces formes de dialogue entre des acteurs hétérogènes se concrétisent par la mise en place de plateformes multiacteurs (ou des «parties

prenantes») plus ou moins pérennes, généralement pilotées par une ou plusieurs personnes appelées animateurs, facilitateurs ou médiateurs.

Dans les processus de gestion communautaire, il est important de prendre en compte les différents niveaux de participation possibles. Le degré de participation maximum de l’autodécision devrait néanmoins être encouragé dès le début du processus de mise en place de systèmes de gestion de la faune.

La vraie participation peut aider à: • renforcer la résilience des populations en

soutenant les stratégies locales; • augmenter les capacités locales en travaillant avec

les acteurs locaux; • renforcer le tissu social et, par conséquent, poser

les fondations d’une future action collective pour le projet de gestion;

3 Quelle micro-gouvernance pour la prise de decision sur le plan de gestion durable de la chasse?

©CIFOR/François Sandrin

8 Nathalie van Vliet et al.

• encourager les populations bénéficiaires marginalisées à être actives pour leur propre bénéfice et, par conséquent, les inviter à regarder vers l’avenir et à surmonter leur traumatisme ou sentiment d’abandon (White 1994).

3.2 Qui participe à la gestion durable de la faune?

Pour renforcer ou mettre en place des processus communautaires participatifs, il est important de comprendre ce que signifie une communauté. L’expression «communauté locale» renvoie à un espace géographique suffisamment petit pour être considéré comme un milieu de vie où règne un sentiment d’appartenance, et suffisamment grand pour avoir des institutions qui lui sont propres ainsi qu’une certaine gouvernance. Bien qu’étant un système ayant sa propre réalité, la communauté n’est

Tableau 1: Typologie de la participation (Roe et al. 2009)

Typologie Description

Participation passive

On annonce aux participants ce qui va se passer ou bien ce qu’il s’est déjà passé. C’est une annonce unilatérale faite par une administration ou par les gestionnaires de projet, sans aucune écoute des réponses des intéressés. Les informations partagées appartiennent seulement aux professionnels extérieurs.

Participation par partage d’information

Les personnes participent en donnant des réponses aux questions posées par des chercheurs «extractifs» et par les gestionnaires de projet au travers de questionnaires d’enquête ou d’approches similaires. Les personnes n’ont pas l’opportunité d’influencer les procédures, étant donné que les résultats des recherches ou la conception du projet ne sont pas partagés ni approuvés par les enquêtés.

Participation par consultation

Les personnes participent au travers de consultations et des agents extérieurs écoutent leurs points de vue. Les agents extérieurs définissent à la fois les problèmes et les solutions et peuvent modifier ces dernières au vu des réponses des personnes. Un tel processus consultatif ne permet pas le partage dans la prise de décision et les professionnels ne sont pas obligés de prendre en compte les points de vue exprimés.

Participation à travers une motivation matérielle

Les personnes participent en fournissant des ressources, par exemple du travail, en échange de nourriture, argent ou autre motivation matérielle. Ce type de participation est très répandu. Cependant, les personnes n’ont aucun intérêt à prolonger les activités quand les motivations matérielles cessent.

Participation fonctionnelle

Les personnes participent en formant des groupes pour atteindre des objectifs prédéterminés du projet, qui peuvent inclure le développement ou la promotion d’organisation sociale initiée extérieurement. Une telle implication ne survient pas en général aux premiers stades des projets, mais plutôt après que des décisions importantes ont déjà été prises.

Participation interactive

Les personnes participent aux analyses conjointes qui conduisent aux plans d’action. On a en général recours dans ce cas à des méthodes interdisciplinaires qui recherchent de multiples perspectives et utilisent des processus d’apprentissage systématiques et structurés.

Automobilisation / Participation active

Les personnes participent en prenant des initiatives indépendamment des institutions externes afin de changer les systèmes. De telles mobilisations auto-initiées et actions collectives peuvent, ou non, perturber la distribution existante des richesses et des pouvoirs.

pas un bloc monolithique: différentes visions de la communauté cohabitent généralement, de manière plus ou moins harmonieuse, influencées par les intérêts des acteurs.

Ainsi, les intérêts des usagers de la faune (chasseurs, consommateurs de viande de brousse, etc.) peuvent plus ou moins bien être représentés au sein des structures de gouvernance présentes dans la communauté. Dans certains contextes, les chasseurs bénéficient d’un certain prestige et prennent part aux prises de décision communautaires. Dans d’autres, les chasseurs sont minoritaires, peu reconnus et leurs intérêts mal représentés dans les instances de gouvernance locales. Le plus grand défi des processus participatifs dans le cadre de la gestion de la faune consiste donc à atteindre les parties prenantes les plus marginalisées pour encourager leur participation au processus de décision de gestion.

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 9

Le chef de groupement explique en langue locale l’importance de la gestion durable, Baego – RDC (©CIFOR/François Sandrin)

La participation implique de donner du pouvoir à certaines personnes et, par conséquent, affectera toujours les relations de pouvoir préexistantes. Si ces structures préexistantes (traditionnelles ou formelles) excluent ou marginalisent certains acteurs clés, il est nécessaire de s’assurer que ces acteurs puissent être inclus dans le processus de décision. Les approches participatives ne doivent donc pas toujours forcément se traduire par des approches communautaires. Elles peuvent s’appuyer sur des groupes d’intérêt pour reconnaître la diversité qui existe au sein d’une communauté, tout en assurant la cohérence de cette communauté.

3.3 Quelle est la structure appropriee pour la prise de decision?

Les structures de gouvernance les plus appropriées pour assurer une gestion durable de la chasse peuvent prendre différentes formes en fonction

des contextes. Dans certains cas, les structures traditionnelles peuvent fonctionner efficacement et être reconnues par les instances officielles. La reconnaissance des structures traditionnelles touche au problème de la reconnaissance formelle des droits d’usage coutumier et de la définition juridique de leurs limites. Dans d’autres cas, il sera nécessaire de formaliser la structure de gestion locale en utilisant les cadres prévus par la loi: forêt communautaire; association de chasseurs, coopérative de chasseurs, etc. L’éventail réduit des cadres juridiques possibles pour les entités de gestion de la chasse dans les pays d’Afrique centrale représente une limite, car toutes les situations ne sont pas encore prévues. Le choix de la structure formelle est notamment contraint par son objectif (but lucratif ou non lucratif ). Cela a des incidences au niveau fiscal par exemple selon que l’on s’inscrit dans le cadre d’une meilleure gestion des droits d’usage coutumier (non fiscalisés) ou dans le cadre d’une véritable filière commerciale (fiscalisée). Le passage à une structure formelle est associé normalement à l’accès à des droits élargis et à la reconnaissance de ces droits (ainsi qu’à leurs pendants en termes de devoirs).

3.4 Comment assurer un processus participatif?

Une large participation des acteurs locaux constitue une priorité pour renforcer la pertinence, le bien-fondé, l’adhésion et la capacité de l’organe participatif de gestion de la faune à réaliser ses activités. Il existe de nombreuses façons d’assurer un processus participatif qui inclut des formes de communication informelle et des formes de communication formelle.

3.4.1 Communication informelle 

Il est important que l’équipe de facilitation prenne le temps de parler de façon informelle avec les parties prenantes. Les communications informelles constituent une source féconde d’échanges qui peut compléter les événements formels. Ce sont à la fois des opportunités pour recueillir de l’information et augmenter la compréhension, mais aussi pour améliorer l’acceptation du facilitateur parmi les populations.

3.4.2 Communication formelle 

La communication formelle avec les communautés fournit une occasion aux participants de s’exprimer en présence de leurs chefs et porte-parole pour

10 Nathalie van Vliet et al.

présenter une information, leur politique ou leurs opinions. Les réunions publiques sous formes diverses sont une approche courante, à condition de s’assurer lors de la planification que personne n’en est exclu (socialement ou géographiquement). Par

conséquent, les obstacles potentiels devront faire l’objet d’une attention toute particulière, par exemple en choisissant le lieu et l’horaire, en proposant une collation, un moyen de transport et des méthodes de travail qui permettent aux plus timides d’exprimer

Encadre 1: La cooperative: structure d’organisation adoptee par le regroupement de Ngokoela (Ovan, Gabon) pour mettre en œuvre une gestion participative et durable des multiples ressources de son terroir (Abdon Bivigou)

La coopérative est le statut juridique choisi par les populations du site de Ngokoéla pour la structure chargée de la gestion de l’exploitation des ressources sur divers espaces: 1. d’une part, une forêt communautaire, qui confère à la coopérative l’usage exclusif des ressources forestières (ligneuses et non ligneuses) dans la limite des 4 993 ha attribués par le Ministère en charge des forêts; 2. d’autre part, une aire de chasse communautaire, dont les limites s’étendent au-delà de celles de la forêt communautaire, sur tout le terroir villageois de chasse d’environ 15 000 ha au total défini par cartographie participative, et où les populations peuvent exercer sur les produits forestiers non ligneux et la faune leurs droits d’usage coutumier tels que reconnus par la loi gabonaise (usage non exclusif ).

Le choix de la structure en coopérative s’est imposé de facto au regard des dispositions réglementaires actuellement en vigueur au Gabon. En effet, contrairement au statut d’association qui n’est prévu qu’à caractère non lucratif, la coopérative est la seule forme de structure compatible avec une organisation communautaire gérant des activités génératrices de revenus. À travers le statut de coopérative, Ngokoéla souhaite développer diverses filières exploitant plusieurs ressources. Sous cette forme juridique, elle a le droit de générer des bénéfices qui peuvent aussi bien servir à rémunérer les différents intervenants au prorata des investissements consentis au préalable qu’à financer la mise en œuvre du plan simple de gestion attaché aux espaces que la coopérative exploite, et du plan d’actions communautaires qui lui est annexé, conformément à des règles de redistribution des bénéfices fixés dans ses statuts.

La coopérative de Ngokoéla est régie par ses statuts et son règlement intérieur, adoptés par tous les membres adhérents au cours de son Assemblée générale constitutive. Ces cadres réglementaires définissent les modalités de fonctionnement et prévoient différents organes de gestion, notamment un Bureau exécutif, l’Assemblée générale des membres et des commissions techniques permanentes ou ponctuelles. Les règles de composition de ces organes ont été ajustées de manière adaptative, face à diverses situations conflictuelles dans les prises de décision, et afin de favoriser leur appropriation, reconnaissance, et légitimité par les populations de Ngokoéla. Ainsi les statuts prévoient au final que les cinq membres du Bureau exécutif soient choisis parmi le groupe des délégués représentant les quatre quartiers du regroupement (correspondant aux anciens villages), à raison de quatre délégués par quartier. Les délégués sont désignés par les membres adhérents de chaque quartier, chaque membre étant coopté par sa famille pour la représenter au sein de la coopérative. Les membres ont ainsi voulu que la représentativité des familles (lignées) soit claire au sein de la coopérative, compte tenu de son importance dans la gestion d’un terroir villageois traditionnellement découpé en zones familiales.

Les commissions permanentes ont été constituées pour chaque secteur d’activité ou filière identifiés par les membres comme prioritaires dans l’aire de chasse communautaire et consignées dans le plan simple de gestion (gestion de la faune sauvage, gestion des produits forestiers ligneux et non ligneux, activités agropastorales, activités halieutiques, activités commerciales et restauration). Elles sont composées de membres choisis en fonction de leur expertise personnelle. Des commissions ponctuelles peuvent également être constituées en fonction des nécessités.

En dehors de l’Assemblée générale, le Bureau exécutif peut consulter d’autres organes externes mis en place pour faciliter et rendre transparentes ses relations avec les autres parties prenantes du développement local, et pour l’aider dans ses prises de décisions sur des questions plus complexes de fonctionnement de la coopérative, de réalisation de certaines activités ou de résolution de conflits. Une plateforme des parties prenantes a ainsi été mise en place sur décision préfectorale. Elle est présidée par le préfet de la localité et est constituée des responsables des administrations locales concernées par la gestion des ressources naturelles et des organisations communautaires. Un Conseil des sages constitué des notables des différents quartiers s’est également organisé comme un groupe d’influence à part entière, contraint néanmoins par les efforts de structuration de la coopérative et de la plateforme des parties prenantes à s’exposer de manière plus formelle et transparente dans ses positions.

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 11

Exemple de réunion informelle à Phalanga entre l’équipe technique, l’ONG facilitatrice du projet et les autorités locales (chefs de village et chef de groupement) (©CIFOR/Nathalie van Vliet)

Encadre 2: Processus de coconstruction et validation des accords de gestion de l’Aire Communautaire de Chasse de Liouesso, Republique du Congo (Alain Ampolo)

En République du Congo, bien que le cadre juridique et réglementaire actuel offre aux communautés autochtones et locales l’opportunité de disposer et de gérer durablement des espaces forestiers classés au titre de forêts de collectivités locales, il n’est pas encore prévu de disposition reconnaissant les terroirs de chasse villageoise se superposant avec les concessions forestières sous aménagement durable comme des aires communautaires de chasse (ACC) où la responsabilité des communautés pour la gestion de la faune dans ces aires qu’elles exploitent serait partagée avec les exploitants forestiers. Cette situation est pourtant fréquemment rencontrée. Une approche pilote pour délimiter ces ACC et en fixer les règles de gestion à travers la définition concertée d’un plan simple de gestion de la faune a été testée à Liouesso.

Le test a reposé sur la mise en œuvre d’une feuille de route retraçant les étapes du processus de coconstruction et de validation des éléments de gestion, élaborée et agréée par les différentes parties prenantes au niveau central dans le cadre des réflexions sur la proposition d’un canevas pour l’élaboration et la rédaction des plans simples de gestion communautaire des ressources forestières au Congo. Ceci a permis de conférer d’emblée un caractère formel aussi bien au groupe de facilitation mis en place localement pour mettre en œuvre la feuille de route (composé des membres du bureau de la structure communautaire devant gérer l’ACC, des responsables des ONG locales, du chef de village de Liouesso et du facilitateur du projet) qu’aux réunions constituant ses étapes. Ce caractère formel a ensuite été renforcé par la présentation de la feuille de route aux acteurs locaux et leur implication pour la planification du calendrier des réunions collectives et entretiens de consultation par acteur, permettant de les rassurer sur la prise en compte des points de vue de chacun d’eux et offrant une transparence et une visibilité sur le déroulement de l’ensemble des négociations. L’organisation systématique de chaque réunion, autour du récapitulatif des résultats de la précédente réunion et d’un ordre du jour précis, a également contribué au caractère formel du processus et des consensus qui en ont découlé.

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12 Nathalie van Vliet et al.

leur opinion et de contribuer. La création de groupes de travail par thème, secteur d’activité, zone géographique ou groupe d’intérêt (groupe de chasseurs, groupe de femmes vendeuses de viande de brousse, etc.) est un moyen supplémentaire non seulement d’élargir et d’approfondir le processus participatif et consultatif, mais aussi de répondre à des besoins ou priorités spécifiques. D’autres façons formelles d’assurer la participation incluent la recherche et la collecte de données participatives ainsi que les exercices de planification participative qui fixent les engagements et les responsabilités (Allen et al. 2001). Les responsabilités du facilitateur

peuvent être décrites comme suit: 1. Installer une atmosphère confortable pour l’apprentissage: chaleureuse, ouverte, amicale et encourageante; 2. Présenter des documents écrits comme des ordres du jour, des procès-verbaux et des renseignements généraux; 3. Résoudre les problèmes; 4. Stimuler les discussions et poser des questions; 5. Maintenir les discussions sur la bonne voie; 6. Expliquer les buts et les méthodes; 7. Établir les règles de base et l’ordre du jour; 8. Faire des liens vers des exercices précédents; 9. Être conscient et sensible à la dynamique de groupe; 10. Résumer et clarifier les points clés; 11. Motiver les participants.

Une première réunion regroupant les membres du groupe de facilitation, la population de Liouesso, et des représentants de certains villages voisins (c’est-à-dire les villages utilisant les mêmes zones de chasse que la communauté cible) a ainsi été organisée pour construire une vision commune de la gestion de la faune dans le terroir. Les participants ont dessiné de manière interactive une carte de leur terroir, base de l’aire communautaire de chasse. Puis, à partir de cette carte, les usages du terroir ont été discutés, permettant d’aboutir à la définition d’une vision commune de gestion.

Sur la base de cette vision et en s’inspirant des règles traditionnellement définies pendant le rituel dit «des propriétaires terriens», le groupe de facilitation a élaboré une première ébauche de règles et mesures d’accès. Cette ébauche a été discutée au cours d’une deuxième réunion avec les populations de Liouesso et les représentants de certains villages voisins (5 sur 14 villages voisins au total). Une proposition enrichie de mesures et règles de gestion y a été adoptée par l’ensemble des participants. Cette proposition a ensuite été diffusée pour examen par le groupe de facilitation auprès de tous les villages voisins, y inclus certains qui n’avaient pas été consultés lors du processus de mise en place de la structure de gestion de l’ACC. D’autres règles et mesures ont été encore ajoutées à cette occasion.

La proposition des règles et mesures ainsi consolidée a été soumise à l’examen des responsables de la Société Industrie Forestière de Ouesso (IFO) et à la Direction Départementale de l’Economie Forestière (DDEF) de la Sangha. La DDEF a indiqué la préséance des règles et mesures d’accès déjà définies par le plan d’aménagement de l’UFA Ngombé (Unité Forestière sous Aménagement), et plus précisément par le plan de gestion de l’UFP3 (Unité Forestière de Production) qui se superpose avec l’ACC de Liouesso, par rapport à celles définies par les populations au regard du cadre juridique en vigueur. Ce plan de gestion de l’UFP3 a été mis à disposition de l’équipe de facilitation par IFO.

Une restitution des résultats obtenus à l’issue de toutes les concertations et négociations a ensuite été organisée à Liouesso auprès de plus de cent personnes venues de Liouesso et de tous les villages concernés par l’ACC. Les règles et mesures d’accès à l’ACC ont été complétées au regard des directives de la DDEF pour refléter le plan de gestion de l’UFP3 et adoptées par tous les participants. Les représentants de tous les villages ont signé un accord contraignant dans lequel ils se sont engagés à respecter les limites de l’ACC, ainsi que les règles et mesures reconnues par l’ensemble des villages. Ces règles ont été soumises pour examen et validation à la plateforme de concertation des parties prenantes locales mise en place dans le cadre du projet (composée de représentants de la sous-préfecture, des populations des villages pilotes, de la société IFO, des administrations publiques, des propriétaires terriens, des ONG locales et des partenaires techniques et financiers opérant localement).

L’enchaînement de réunions avec le rappel systématique de la logique des étapes, des résultats atteints par étape ainsi que le caractère formel du processus ont permis de maintenir une forte participation et implication des populations locales tout au long du processus, de pallier le manque de maîtrise du sujet par certains habitants, générateur d’incompréhensions et de désaccords (notamment concernant la contribution de chaque chasseur à la caisse de la structure de gestion de l’ACC au retour de chasse), et d’obtenir un consensus sur des règles et mesures de gestion qui reflètent à la fois les contraintes légales attachées à la préséance de l’aménagement forestier et les règles à caractère plus traditionnel.

Encadre 2: Suite

4 Concertation et prise de decision pour le developpement du plan de gestion durable de la chasse villageoise

4.1 La comprehension commune de la structure et des limites du système de chasse: territoire, acteurs, et interrelations

Une fois bien établie la structure de gouvernance locale pour la prise de décision, l’étape suivante consiste à s’entendre sur une compréhension commune de la structure et du fonctionnement du système de chasse. Ceci implique d’identifier collectivement les principaux acteurs concernés par l’existence de la zone de gestion de chasse, leurs entités de gestion et les principales dynamiques en jeu entre ressources et acteurs, comme préconisé par la méthode ARDI (Acteurs, Ressources, Dynamiques et Interactions)

(Etienne et al. 2011). Pour ce faire, les participants qui contribuent à la construction schématique du système de chasse doivent répondre aux trois questions suivantes:• Quelles sont les principales ressources du territoire

et les informations essentielles pour en garantir une utilisation durable?

• Quels sont les principaux acteurs qui semblent pouvoir/devoir jouer un rôle décisif dans la gestion de ce territoire?

• Quelles sont les règles formelles et informelles d’utilisation de la ressource?

Les réponses à ces questions sont formalisées sous la forme de schémas faciles à comprendre collectivement (cf. exemple en figure 3).

©CIFOR/Nathalie van Vliet

14 Nathalie van Vliet et al.

Figure 3: Schematisation du système de chasse par les acteurs de Phalanga, Republique democratique du Congo

4.2 Concertation sur le système de chasse souhaite: definition de l’objectif de gestion et des critères et indicateurs

La concertation pour la définition du système idéal de chasse qui intègre la durabilité écologique, économique et sociale peut se construire à travers un exercice de visioning. Le visioning est un processus mental dans lequel les images de l’avenir souhaité (buts, objectifs, résultats) sont rendues intensément réelles et convaincantes pour agir comme des motivateurs pour l’action actuelle. Le visioning est un outil participatif qui réunit les citoyens et les parties prenantes et sert à aider un groupe d’intervenants à développer une vision partagée de l’avenir (Sanginga et Chitsike 2005). L’exercice de visioning se concrétise par la définition d’un ou plusieurs objectifs de gestion et par un ensemble de critères et indicateurs qui décrivent cet état futur souhaité (Lynam et al. 2007). Dans le processus de planification, le visioning est habituellement facilité après l’analyse du problème et de la situation actuelle, et avant la planification

détaillée et le processus de prise de décision avec les parties prenantes impliquées.

La vision souhaitée du système de chasse se traduit en premier lieu par la définition des objectifs de gestion. Ceux-ci doivent être clairement établis en fonction de chaque contexte, sur la base d’un processus participatif et en prenant en compte les résultats de la phase de diagnostic préliminaire. Les objectifs de gestion peuvent concerner la réduction des dégâts sur la production agricole liés au gibier ravageur des cultures, l’amélioration de la sécurité alimentaire de la population locale, la génération de revenus, la préservation des espèces phares pour le maintien de la biodiversité, etc., ou une combinaison de ces options. De plus, en fonction des contextes, la gestion peut se concentrer sur la chasse pour une consommation locale, ou la chasse dans le cadre du développement d’une filière structurée (lorsque les cadres juridiques le permettent).

Faune

Habitat

Chef de village

Chef de Famille

Consommateurs locaux

Femmes

restauratrices

Chasseurs de Phalanga

Réglemente

Chassent

Vendent

Achètent

Vendent à des consommateurs

Ouvrent des pistesOuvrent de nouvelles plantations

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 15

Par ailleurs, la vision se concrétise également par une série de critères et indicateurs de la gestion durable. Afin de générer un consensus autour de la notion de durabilité de la chasse, il convient de faciliter la discussion autour de la compréhension de ce terme. Bennet et Robinson (2000) définissent une chasse durable comme étant celle qui garantit: 1. que les populations chassées n’affichent pas une baisse constante de leurs effectifs sur le long terme; 2. que les populations chassées ne soient pas réduites à une densité à partir de laquelle elles deviennent vulnérables à l’extinction localement. Cependant, cette définition ne prend pas en compte les trois piliers de la durabilité: durabilité économique, sociale et écologique. Le terme durabilité est un néologisme utilisé depuis les années 1990 pour désigner la

configuration de la société humaine qui lui permette d’assurer sa pérennité. Cette organisation humaine repose sur le maintien d’un environnement vivable, sur le développement économique et social et sur une organisation sociale équitable. Dans ce sens, la gestion pour une chasse durable doit permettre de garantir aux générations futures les produits et services que fournit la faune, sans engendrer pour les espèces chassées une disparition locale ou la réduction des effectifs à un niveau qui compromette la dynamique des populations à long terme. Cette définition générale peut être adaptée à chaque contexte de gestion à travers la déclinaison de critères qui décrivent la durabilité économique, sociale et écologique de la chasse durable.

Durabilité sociale:- Il existe un mécanisme

e�cace pour gérer les con�its

- Il existe un contrôle social pour assurer l‘équité dans l‘accès à la ressource

- Le groupe de chasseurs participe activement au bien-être de la communauté au travers d'oeuvres sociales

Durabilité économique:- Les chasseurs maitrisent les coûts

et les béné�ces de leur activité - Les béné�ces économiques ne

baissent pas- La mercuriale tient compte des

coûts des intrants et de la concurrence

- La viande de brousse a un prix spécial pour les membres de la communauté

Durabilité écologique:- Les espèces ne disparaissent pas- L’abondance des espèces ne

diminue pas- Les règles de gestion sont

acceptées par tous- Un programme de sensibilisation

sur les accords de gestion est mis en place

Figure 4: Definition de la durabilite economique, sociale et ecologique telle qu’etablie par les chasseurs et membres de la cooperative de Ngokoela à Ovan, Gabon (van Vliet et Tiani 2016)

16 Nathalie van Vliet et al.

4.3 L’identification des problèmes et des contraintes pour une gestion durable de la chasse

L’analyse des problèmes et des contraintes est un outil participatif qui permet aux planificateurs du processus de gestion d’identifier les barrières actuelles à la mise en oeuvre de la vision souhaitée afin de planifier les activités qui permettront de lisser ou éliminer ces contraintes.

Encadre 3: Identification des contraintes à la realisation d’une chasse durable telles que perçues par les membres de la cooperative de Ngokoela à Ovan (van Vliet et Tiani, 2016)

Au sein de la coopérative de Ngokoléa, Ovan, Gabon, le groupe de chasseurs a identifié et ordonné les contraintes suivantes liées à la réalisation d’une chasse durable:

Visualisation des contraintes identifiées par les chasseurs à Ovan – Gabon (©CIFOR/Nathalie van Vliet)

- Manque de permis de chasse liée à l’ignorance du processus pour l’obtention

et au manque de transparence sur le processus de délivrance des permis

illégalité de l’activité

problèmes de sécurité liées aux équipements vieux et de fabrication artisanale

problèmes de santé chez les enfants (Ascaris)

pertes économiques

chasse moins attractive pour les jeunes générations

rentabilité économique de l’activité limitée

durabilité écologique compromise pour certaines espèces

rentabilité économique compromise

la faune rentre en compétition avec l’activité agricole, donc pertes économiques si la chasse ne contrinbue pas à réduire les con�its homme faune

- Manque d’équipements de chasse (munitions, fusils, divers)

- Pertes liées à la décomposition du gibier dûe aux di�cultés de conservation du

gibier et de la viande préparée

- Risques encourrus par le métier de chasseur en forêt (morsûres de serpents, accidents avec des animaux, accidents de chasse…)

- Eloignement du gibier

- Dévastation des cultures par certaines espèces (éléphants, hérissons…)

manque d’e�cacité à la chasse

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 17

4.4 Theorie du changement et plan d’action

Une théorie du changement est une représentation schématique qui permet d’expliquer comment des activités sont censées produire un ensemble de résultats qui contribuent à la réalisation des impacts finaux ciblés. Elle peut être utilisée dans le cadre d’une planification stratégique d’un plan de gestion de la chasse afin de baser l’analyse sur la situation existante (opportunités et contraintes) et la situation souhaitée, et de coconstruire la stratégie et les actions nécessaires pour passer de l’une à l’autre (Rogers 2014). Cela permet de contribuer à élaborer des objectifs réalistes, à préciser les responsabilités et à établir une interprétation commune des stratégies à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs (voir tableau 2). La théorie du changement est aussi compatible avec la gestion adaptative en ce sens qu’elle permet d’accompagner une intervention qui évolue et s’adapte en fonction de questions émergentes et de décisions prises par les parties prenantes. Une fois les actions identifiées, les participants peuvent alors établir une priorisation

temporelle des actions à mettre en œuvre et la matérialiser sous forme d’un calendrier de mise en exécution. Le plan d’action inclut un plan de chasse qui décrit les modalités pratiques de la chasse (voir section sur le plan de chasse).

L’ensemble des activités mentionnées dans un plan d’action ne sont pas forcément également prioritaires. Certaines de ces actions nécessitent la réalisation antérieure d’une autre action (tableau 3). Ainsi, il est important de prioriser les actions à mener en fonction de trois critères principaux:1. L’urgence de l’action: les actions qui nécessitent

une intervention immédiate;2. L’importance de l’action pour le bon

déroulement des autres actions à mener: les actions sans lesquelles les autres actions ne peuvent être exécutées;

3. Les ressources disponibles pour exécuter l’action: à critères 1 et 2 égaux, les actions trop coûteuses seront planifiées pour une étape ultérieure afin de sécuriser les ressources pour leur bonne mise en œuvre.

Participants à l’élaboration du plan de gestion de la chasse, Ovan – Gabon (©CIFOR/Nathalie van Vliet)

18 Nathalie van Vliet et al.

Tableau 2: Exemple de contraintes et actions à mener pour les resoudre telles qu’identifiees par les chasseurs des villages de la zone de Baego, Republique democratique du Congo (van Vliet et Tiani 2016)

Contraintes/Actions Responsable Partenaires Intervenants

Intrusion dans nos forêts par les chasseurs des villages voisins

S’entendre sur la notion de chasseurs étrangers Structure de gestion Projet médiateura

Définir les modalités d’accès aux permissions de chasse Structure de gestion Chefs de villages

Sensibiliser les chasseurs des villages voisins sur le respect des limites dans la forêt

Chefs de villages Chefs de groupement

Établir les types de sanctions en cas d’effractions et les modalités de leur application

Structure de gestion Chefs

Relation conflictuelle avec les forces de l’ordre et le service de l’environnement

Former les chasseurs sur les lois et règles régissant leur métier Projet médiateura

Consultants externesStructure de gestion

Adresser des requêtes en vue de la réduction des prix de permis de chasse et des taxes à l’État et aux élus du peuple

Structure de gestion Projet médiateura

Élites

Conflits d’usage entre la chasse et l’exploitation forestière: bruit

Diviser la forêt en assiettes de coupe et planifier l’utilisation de l’espace dans le plan de chasse

Structure de gestionExpert

Projet médiateura

GroupementSecteur

Prix eleves de la viande de brousse pour les locaux

Prix différenciés pour les familles du village par rapport au prix demandé aux passants et commerçants

Association des chasseursStructure de gestion

Chasseurs

Création d’un marché de viande de brousse commun aux trois forêts communautaires

Association des chasseursStructure de gestion

Secteur, Projet médiateura et Sages

Certaines espèces sont difficiles à trouver

Établir un plan de chasse qui définisse les règles de gestion de la faune sauvage, les types de chasse à accepter ou à interdire dans la forêt communautaire, le nombre de pièges acceptables par piégeur, etc.

Structure de gestionAssociation des chasseurs

ChefsProjet médiateura

Mettre sur pied un mécanisme de suivi à l’aide des indicateurs identifiés 

Structure de gestionAssociation des chasseurs

ChefsProjet médiateura

Mettre sur pied ou activer le mécanisme de sanction en cas de manquements

Structure de gestion ChefsProjet médiateura

Meconnaissance de la rentabilite de la chasse

Formation à la gestion d’entreprise et au calcul économique de l’activité de chasse

Projet médiateura/expert

Structure de gestion

a porté par un service public ou par une entité non gouvernementale

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 19

Tableau 3: Proposition de calendrier d’execution des activites proposees par les chasseurs dans le plan d’action d’Ovan, Gabon (van Vliet et Tiani 2016)

 Action Octobre-Decembre

Janvier-Mars

Avril-Juin

Juillet-Septembre

Octobre-Decembre

Rechercher l’information officielle (et la partager amplement) sur le processus d’obtention des permis d’obtention d’armes et de munitions pour la chasse

X        

Constituer une commission multiacteurs pour faire du lobbying auprès des élus du peuple et des administrations compétentes pour l’obtention des permis d’achat d’armes et de munitions pour la chasse

X X      

Passer un bon de commande pour l´équipement de chasse (vêtements, chaussures, etc.), s’assurer de la qualité des produits et s’assurer de la disponibilité constante de ce type de matériel localement

X        

Faire une demande officielle pour avoir accès à l’électricité

X X      

Formation aux techniques de conservation/restauration

    X    

Développement d’une politique commerciale (qui inclut une étude de marché) pour les produits issus de la viande de brousse (fumés ou frais)

    X X  

Mettre en place une commission tripartite pour une mercuriale locale des prix des cartouches et de la viande de brousse

    X X  

Obtenir une dérogation pour l’activité du projet pilote signée par l’organisme provincial des Eaux et Forêts

X        

Mettre en place un système de suivi de la chasse X X X X X

Quotas pour le potamochère et autres espèces de catégorie B fixés en collaboration avec les autres partenaires - Au départ fixé à 35 potamochères par an

X       X

Procéder à un enrichissement forestier avec des arbres fruitiers locaux pour attirer la faune

      X X

Mettre en place un système de suivi des problèmes de destruction des plantations

X X X X X

Mettre en place des accords chasseurs-agriculteurs pour les espèces nuisibles

X X X X X

20 Nathalie van Vliet et al.

5 Elements cles d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise

5.1 Canevas pour un plan de gestion durable de la chasse villageoise

Il n’existe actuellement pas de cadre normatif (modèle ou formulaire standard) spécifique à la gestion communautaire de la chasse en Afrique centrale. Compte tenu de la diversité des modes d’appropriation et d’usage de la ressource en Afrique centrale, mais également de la diversité des cadres légaux et réglementaires, il serait hasardeux de proposer un modèle standard applicable à l’ensemble des contextes. Nous proposons cependant un canevas théorique à titre indicatif (voir encadré 4). Il se décompose en deux parties: • La première partie consiste en un état des lieux du

socio-écosystème chassé à gérer. Cette première partie est essentiellement basée sur les résultats de

Le gibier étant par nature un bien commun, les modalités de sa gestion peuvent découler des 7 principes de gouvernance recommandés par Ostrom (1990), à savoir:• Une ressource clairement délimitée;• Une reconnaissance minimale par les Autorités de

droits d’autogouvernance; • Des règles de maintenance et d’appropriation

de la ressource spécifiquement adaptées au contexte local;

• Des dispositifs de choix collectif, où tous ou la plupart peuvent participer;

• Un dispositif de surveillance, délégué ou effectué par les utilisateurs eux-mêmes;

• Des sanctions graduelles;• Des mécanismes de résolution des conflits simples,

rapides, transparents.

©CIFOR/François Sandrin

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 21

la phase de diagnostic préliminaire (cf. le guide pratique n°1 et ses exemples d’application - FAO et al. 2015). L’ensemble des éléments constitutifs de l’état des lieux doit permettre de déboucher sur un premier état des contraintes et opportunités pour la gestion durable de la chasse, qui peut se formaliser par une théorie du changement telle que présentée dans la section précédente.

• La seconde partie porte spécifiquement sur le plan de gestion de la chasse. Celui-ci résulte du processus participatif de concertation et de prise de décision présenté plus haut dans le présent document et formalise les objectifs, le plan d’action (y compris un plan de chasse), ainsi que les modalités de mise en œuvre, de financement, et de suivi- évaluation.

Encadre 4: Proposition de canevas pour un plan de gestion de la chasse

1. État des lieux1.1 Identification de l’entité juridique du territoire communautaire de chasse Nom de l’entité juridique, date de création de l’entité juridique, localisation du territoire communautaire de

chasse (Province/Département/Canton/Regroupement…)., nom(s) du ou des villages où est situé le territoire de chasse, adresse de l’entité juridique, nom du représentant de l’entité juridique.

1.2 Carte du territoire communautaire de chasse Limites externes du territoire de chasse, description des modalités de partage de l’espace au sein du territoire

communautaire de chasse (ayants droit et usagers), localisation des campements de chasse permanents.1.3 Gouvernance locale Autorités traditionnelles ou locales, identification des ayants droit coutumiers sur l’espace, identification des

usagers de la ressource faune (chasseurs) reconnus par la communauté, modalités d’exercice du droit de chasse.

1.4 Profil socio-économique de la communauté villageoise Effectif de la population humaine incluse dans le territoire de chasse, contribution de la chasse à l’alimentation

de la communauté, contribution de la chasse aux revenus de la communauté, filière de commercialisation des produits de la chasse.

1.5 Profil écologique et cynégétique du territoire communautaire de chasse État de référence des populations animales du territoire, caractérisation des pratiques de chasse,

caractérisation des prélèvements cynégétiques, caractérisation de la consommation en protéines animales, caractérisation de la filière gibier au sein de la communauté (autoconsommation et vente).

1.6 Autres usages des terres en concurrence ou complémentaires de l’usage cynégétique Usages agricoles, forestiers….1.7 Contraintes et opportunités pour la gestion durable de la chasse (théorie du changement)

2. Plan de gestion de la chasse2.1 Objectif et usages prioritaires du territoire communautaire de chasse Objectif du territoire de chasse, usages prioritaires du territoire de chasse.2.2 Plans d’actions - Plan d’action global: activités, calendrier d’exécution; - Plan de chasse: espace sous gestion (zonage interne), ayants droit, règles d’accès, espèces chassables,

périodes de chasse, modes de chasse. 2.3 Modalités de mise en œuvre Responsabilités de mise en œuvre, mécanismes de contrôle et traçabilité, résolution des conflits et sanctions,

modalités de suivi des populations animales, modalités de suivi de l’exécution du plan de chasse, modalités de gardiennage (surveillance/lutte anti-braconnage), formation et sensibilisation des ayants droit et usagers, évaluation périodique.

2.4 Financement du plan de gestion Génération des fonds propres, financements externes.2.5 Suivi et évaluation du plan de gestion de la chasse Suivi et évaluation à court, moyen et long terme, par les services gouvernementaux concernés et avec l’appui

de l’équipe du projet. Permet de formaliser les leçons apprises et d’adapter les règles de gestion.

22 Nathalie van Vliet et al.

Dans les pays où la législation prévoit la création de forêts communautaires (exemple: Gabon, RDC), les plans de gestion des forêts communautaires sont cadrés par des canevas spécifiques. Bien que ces cadres normatifs prévoient la réalisation d’un état des lieux global (inventaires multiressources, etc.), les méthodes et outils de planification et de gestion recommandés sont inspirés de la foresterie au sens strict et sont peu compatibles avec la démarche de gestion adaptative requise en matière de chasse (Cornelis et al. 2017). Bien que le cadre légal impose un plan de gestion global de la forêt communautaire, les spécificités de gestion de la faune requièrent donc un plan de gestion spécifique. Selon le contexte et les objectifs de gestion de l’espace communautaire, le plan de gestion de la chasse peut être considéré comme une section du plan de gestion de la forêt communautaire, ou comme un document séparé. Il importe toutefois que les facilitateurs veillent dès le départ à la bonne intégration/imbrication des différents outils et documents de planification dans les contextes d’usages superposés (en particulier en présence d’acteurs externes tels que les sociétés d’exploitation forestière). À ce titre également, il est important que les différents protocoles de suivi (de la faune, des prélèvements, etc.) déployés dans la phase de diagnostic (voir van Vliet et al. 2015) soient réplicables en phase de mise en œuvre du plan de gestion de manière à permettre rapidement l’extraction d’indicateurs de gestion.

5.2 Le plan de chasse

5.2.1 Qu’est-ce qu’un plan de chasse?

Le plan annuel de chasse ne constitue qu’une partie du plan d’actions ou plan de gestion. Alors que le plan de gestion a pour objectif de répondre stratégiquement aux objectifs de chasse économiquement, socialement et écologiquement durable définis localement, le plan de chasse consiste à définir, pour un espace géographique (ou territoire) donné et des ayants droit identifiés, une liste d’espèces chassables, éventuellement assortie d’un nombre ou «quota» maximal1 de spécimens d’une ou plusieurs espèces à prélever, pour une ou plusieurs saisons de chasse (Cornelis et al. 2017).

1 À noter que le quota peut prendre la forme d’un nombre minimal d’animaux à prélever, par exemple lorsque l’objectif vise à réduire certaines populations (ex.: dans le cas de conflits homme-faune).

Un plan de chasse s’inscrit dans une durée limitée et est renouvelable en fonction de la qualité de son exécution; il est généralement de 1 an. Le plan de chasse inclut la description des éléments suivants:• Espace sous gestion spécifique à la chasse (zonage

interne qui peut inclure des espaces superposés avec d’autres utilisations);

• Espèces chassables;• Périodes de chasse;• Quotas par espèce;• Modes de chasse autorisés;• Durée de validité.

Le plan de chasse a pour objectif de garantir la conservation et l’exploitation durable des populations de gibier et de préserver leurs habitats, en conciliant les intérêts agricoles, sylvicoles et cynégétiques. Lorsque le cadre normatif le prescrit, le plan de chasse doit faire l’objet d’une demande portée par la structure mise en place pour la gestion de la chasse telle que définie plus haut.

5.2.2 Determination des quotas

Un quota représente le nombre maximal par espèce autorisé à l’abattage dans un espace donné et pour une durée limitée (généralement une saison de chasse). Le concept de quota ne doit pas être confondu avec ceux de «latitude d’abattage» ou encore de «prélèvement maximum par sortie de chasse» imposés par l’arsenal réglementaire actuellement en vigueur de plusieurs pays. Ces derniers définissent une limite de prélèvement par permis et pendant une période de chasse considérée (une saison, ou une journée), mais sans considération d’unité de gestion spatiale. Ce mode de régulation, issu du code éthique de la chasse sportive au début du 20e siècle, n’est pas adapté à la chasse villageoise où une approche territorialisée est indispensable (Cornelis et al. 2017).

Toutes les espèces ne doivent pas être soumises à quotas. Les quotas sont généralement définis pour les espèces dont on souhaite restaurer les populations, généralement de grande taille, à reproduction lente ou ayant un statut de protection particulier (par exemple, les espèces de catégorie B comme le potamochère au Gabon).

La théorie voudrait que la détermination des quotas dans une optique de production de biomasse (viande) repose sur des principes dérivés du modèle logistique (figure 5). Ce modèle postule qu’une population animale, partant d’un niveau très bas, croît d’abord

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 23

lentement, puis exponentiellement pour ensuite se stabiliser à une valeur appelée «capacité de charge» (K). Dans ce modèle, le taux d’accroissement de la population atteint sa valeur maximum au point d’inflexion de la courbe, soit approximativement à la moitié de la capacité de charge K (K/2). Si la stratégie de gestion consiste à maximiser la production en biomasse, on cherchera donc à maintenir la population en question à un taux de charge (Nt/K) voisin de 0,5.

Selon le cas de figure, l’objectif peut être de stabiliser, restaurer ou optimiser la production en ajustant les prélèvements de chasse pour l’espèce en question au sein du territoire de chasse. La mise en œuvre de cette approche requiert cependant de pouvoir estimer et suivre dans la durée à la fois l’effectif de population de l’espèce concernée (dans un site chassé et un site témoin) ainsi que les quantités prélevées sur l’espace considéré (pour davantage d’explications, le lecteur peut se référer plus bas à la section portant sur la batterie d’indicateurs utiles pour l’ajustement des quotas).

En pratique, un quota est souvent le résultat d’un compromis entre différents enjeux. Il n’a de sens que si les parties prenantes se l’approprient réellement, au premier rang desquelles les chasseurs. Il est donc crucial que le quota ne soit pas imposé par l’administration de tutelle et/ou la structure d’encadrement, mais qu’il résulte d’un réel exercice de coconstruction où chacun prend conscience des objectifs, mais également de ses droits et devoirs.

Parmi les devoirs incombant aux chasseurs figure un engagement impératif de déclaration des prélèvements. Cette déclaration constitue à la fois une base indispensable pour orienter la gestion (et donc le prélèvement) selon les objectifs (restauration, stabilisation, optimisation) et un gage préliminaire d’adhésion des chasseurs au processus de gestion. À ce

titre, il est nécessaire que les chasseurs intègrent dans la démarche par quotas qu’une déclaration honnête des prélèvements est une condition nécessaire au maintien ou au renforcement de ces quotas (en effet, une sous-déclaration entraîne de facto un taux de réalisation de quota faible et suggère mécaniquement une révision à la baisse du quota).

Dans le cas d’une première année de gestion, le quota peut être basé sur le suivi des prélèvements de l’année de référence et ajusté l’année n+1 en fonction des tendances dégagées par une série d’indicateurs. Une première estimation du prélèvement annuel par les chasseurs eux-mêmes est donc une condition préalable à la négociation formelle d’un quota.

5.3 Gestion de l’utilisation du gibier

5.3.1 Commerce et traçabilite des prelèvements

Dans les situations fréquentes où une partie du gibier prélevé intègre des filières de commercialisation, il peut être nécessaire de prévoir des quotas de commercialisation pour préserver une alimentation de qualité aux populations de la communauté.

Autoriser les chasseurs à vendre leur gibier en dehors de la communauté implique la mise en place de mesures de régulation, parmi lesquelles un système de traçabilité du gibier commercialisé. La traçabilité vise à mieux qualifier les produits de la chasse mis sur le marché, à mieux maîtriser les risques sanitaires et à certifier la provenance pour le consommateur.

En pratique, tout gibier abattu doit être muni d’un bracelet à usage unique daté et numéroté délivré par une autorité compétente (voir photos). Selon le cas de figure, l’apposition du bracelet peut être exigée sur le lieu même du tir ou lorsque le gibier est vendu

Figure 5: Taux de charge et objectifs de gestion des populations chassees

• siNt / K >> 0.5: Objectif d’optimisation

• siNt / K ≈≈ 0.5: Objectif de stabilisation

• siNt / K << 0.5: Objectif de restauration

24 Nathalie van Vliet et al.

sur la voie publique. Une fois la règle établie et communiquée à l’ensemble des chasseurs, son non-respect devrait constituer une contravention.

Les bracelets des espèces soumises à quota sont distribués en nombre limité aux responsables désignés de chaque territoire de chasse et il leur revient de distribuer ces bracelets aux chasseurs conformément au règlement intérieur de la structure de gestion. En revanche, les bracelets des espèces chassables non soumises à quota (par exemple les rongeurs) sont distribués sans limite de nombre. Chaque pièce vendue doit être accompagnée d’un bordereau de transport reprenant 1. l’identifiant unique du bracelet; 2. le lieu et la date du prélèvement; 3. le nom du chasseur ou du premier détenteur 4. l’espèce de gibier; 5. la destination de la pièce ou du lot de gibier.

La mise en place d’une démarche de traçabilité implique la reconnaissance officielle d’une filière commerciale locale par l’agrément de ses acteurs (territoires de chasse, chasseurs-vendeurs, transporteurs, et commerçants). Dans le cas de figure d’une gestion territorialisée de la chasse (p. ex. à l’échelon départemental), ces quotas de commercialisation et les outils de traçabilité associés peuvent également permettre de réguler les flux commerciaux. On peut en effet aisément imaginer que la commercialisation de certaines petites espèces comme les petits primates soit uniquement autorisée au sein de la communauté villageoise afin de limiter les risques de transmission de pathogènes (exemple: Ebola) (figure 7). En revanche, les plus grandes espèces de gibier, soumises à quotas, pourraient intégrer des filières commerciales de proximité (villes

secondaires) pour autant qu’elles soient munies d’un dispositif de traçabilité réglementaire.

5.3.2 Mesures sanitaires

Lorsque l’animal est consommé par le chasseur ou sa famille, il ne devrait pas y avoir d’obligations réglementaires relatives à la traçabilité et au contrôle sanitaire, sauf en cas de pandémies qui nécessitent un suivi immédiat. Par contre, lorsque le gibier est vendu à un tiers, il devrait être soumis à un contrôle sanitaire et à un estampillage vétérinaire à la charge de l’intermédiaire. Bien que le cadre réglementaire actuel en Afrique centrale ne prévoie pas de dispositions au sujet de la traçabilité, des mesures sanitaires devraient théoriquement accompagner toute initiative de commercialisation de la viande de brousse. Ces mesures sanitaires peuvent s’inspirer de celles appliquées à la viande d’élevage destinée à la vente. Une «fiche d´accompagnement du gibier» peut être élaborée par l’entité de gestion et remplie par chaque chasseur afin d’y indiquer les anomalies détectées sur le gibier commercialisé. De manière simplifiée, cet examen s’effectue sur la partie externe et la carcasse interne ainsi que sur les abats rouges et blancs. Il ne s’agit pas de détecter ou de diagnostiquer précisément telle ou telle maladie de la compétence d´un vétérinaire, mais simplement de faire un diagnostic pertinent permettant de limiter, même en cas de doute, la distribution de gibier qui présente un aspect anormal (maigreur, odeur, aspect visuel…). Un certain nombre de mesures sanitaires doivent être observées au cours du transport, de la manipulation et de la préparation du gibier. Ces mesures sanitaires représentent une liste de bonnes pratiques à observer après la mort du gibier et incluent l’usage de gants

Bracelets de traçabilité numérotés à usage unique employés en Europe pour le suivi de la filière chasse (©CIRAD/Daniel Cornelis)

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 25

probablement la forme de conflit la plus fréquente en Afrique centrale. Les cultures, comme le manioc, les arachides ou la banane plantain sont régulièrement ravagées par une grande variété d’animaux sauvages. Les rongeurs, les primates, les antilopes, les potamochères, les éléphants, mais aussi les oiseaux et les insectes peuvent régulièrement détruire les cultures. Certaines de ces espèces sont également consommées comme source de protéines. Une bonne gestion de la chasse devrait inclure la protection des cultures pour maximiser la production de viande tout en diminuant les dégâts sur les cultures.

5.5 Restauration des habitats pour la faune

La dégradation des habitats propices à la faune, à travers la construction d’infrastructures, l’expansion des plantations agricoles et l’exploitation minière ou forestière, est souvent une cause de diminution des espèces de gibier, voire de leur disparition locale. La réduction des superficies boisées, la fragmentation des habitats forestiers, ou simplement

Figure 6: Quotas et traçabilite des prelèvements comme instruments de regulation de la chasse et du commerce (Cornelis et al. 2017)

pour le dépeçage et la manipulation des animaux, des ustensiles propres, une infrastructure minimum qui garantit l’accès à l’eau potable pour la préparation et/ou l’emballage du gibier, ainsi que l’usage de techniques de conservation appropriées (chaîne de froid, fumage, salage, etc.).

5.4 Attenuation des conflits homme-faune

Les conflits hommes-faune sauvage sont généralement définis comme «toute interaction entre le genre humain et la faune sauvage induisant des effets négatifs sur la vie sociale, économique et culturelle des communautés ainsi que sur la conservation de la faune et de son environnement» (Lamarque et al. 2010). Les conflits homme-faune peuvent prendre différentes formes et incluent les attaques ou blessures par la faune, la transmission de maladies zoonotiques, les accidents de la route liés à la faune, la destruction de certaines infrastructures et habitations, la prédation du bétail par la faune, etc. Cependant, la destruction des cultures est

26 Nathalie van Vliet et al.

l’appauvrissement en espèces de ligneux producteurs de fruits consommés par les animaux, ont modifié la fréquentation d’espèces de mammifères dans certains terroirs de chasse. La réalisation d’aménagements fauniques permet de préserver, de rétablir ou d’améliorer les habitats, tout en favorisant une cohabitation harmonieuse avec les activités agricoles (Sutherland 2008). La préservation d’habitats naturels, l’enrichissement des jachères en arbres fruitiers, la création d’abris, la création de points d’eau et de sel, l’aménagement de corridors de déplacement, sont autant d’actions qui permettent de fournir des habitats diversifiés aux espèces de gibier.

5.6 Le suivi: un outil indispensable à la gestion adaptative de la chasse villageoise

5.6.1 Suivi d’indicateurs de durabilite du système

Les systèmes de suivi sont basés sur un ensemble complet de critères et indicateurs qui permet d’observer les changements dans l’environnement écologique et social d’un territoire soumis à un plan de gestion de la chasse. Ils sont utilisés par les gestionnaires et les chasseurs afin de faire le point sur les conséquences directes et indirectes de leur plan

de gestion et pour être en mesure de contrecarrer les changements indésirables. Il ne s’agit donc pas seulement d’évaluer les résultats finaux d’un plan de gestion au bout de 3-5 ans, mais d’aider à rediriger le plan d’actions/plan de gestion en cours de route

Barrière de pièges à collet protégeant les cultures. Phalanga, RDC (©CIFOR/François Sandrin)

Ravage et piétinement de plantains par les éléphants (©CIRAD/Sébastien le Bel)

L’athérure (à gauche) et l’aulacode (à droite) sont deux rongeurs ravageurs des cultures contre lesquels les agriculteurs doivent lutter. Phalanga - RDC (©CIFOR/François Sandrin)

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 27

si nécessaire. Un indicateur devient significatif s’il est orienté vers l’action, permettant à ses utilisateurs d’influencer leur environnement (Garcia et Lescuyer 2008). Dans le contexte d’une gestion décentralisée des ressources naturelles, les systèmes de suivi doivent être entièrement élaborés et mis en œuvre par les structures locales (Topp-Jørgensen et al. 2005) (Tableau 5). Cela implique d’adapter les techniques

de suivi aux contextes locaux, tout en veillant à maintenir des coûts d’implémentation réduits et en proposant des outils robustes qui peuvent être facilement adoptés. Le rôle de l’institution d’appui est de contribuer à l’élaboration participative des indicateurs. Afin de fournir aux membres de la communauté des outils pour le suivi de leurs actions, l’approche participative de suivi appelée MOMS

Encadre 5: La gestion des Conflits Homme-Faune en Afrique centrale (Sebastien le Bel)

L’Observatoire des Forêts d’Afrique Centrale (OFAC) a pour mission de fournir des systèmes opérationnels de suivi des forêts d’Afrique centrale. L’OFAC s’inscrit dans le contexte de la mise en œuvre du Plan de convergence de la COMIFAC pour une gestion plus efficiente et durable des ressources forestières. Il a aussi pour mission de procurer aux gestionnaires des aires protégées des informations indispensables aux prises de décisions relatives à la protection de la biodiversité et à la gestion des interactions entre les communautés humaines et cette biodiversité. Les Conflits Homme-Faune (CHF) constituent en Afrique centrale l’un des principaux points d’achoppement de l’intégration des aires protégées dans les stratégies de développement local. Les indicateurs de suivi de ces conflits peuvent procurer des informations capitales pour les gestionnaires et décideurs relativement aux stratégies de gestion de la faune et des aires protégées. Ces indicateurs seraient complémentaires de ceux développés jusqu’à présent par l’OFAC dans le cadre du SYVBAC, en particulier en relation avec les aires protégées.

La Commission FAO des Forêts et de la Faune Sauvage pour l’Afrique a ainsi conclu à la nécessité de développer des approches et mesures pour réduire rapidement les effets des CHF, tout en permettant aux populations locales de mieux bénéficier de la ressource sauvage. Dans cette perspective, la FAO et le CIRAD, en collaboration avec le RAPAC, ont développé une Boite à Outils de gestion des CHF (BO-CHF) pour l’Afrique centrale, inspirée de celle élaborée par le CIRAD pour l’Afrique australe.

Après avoir été testés pendant 4 mois sur 11 sites pilotes répartis dans 4 pays (Cameroun, Gabon, Congo et Angola), une centaine d’exemplaires de la version finale de la BO-CHF, produite par le CIRAD, furent remis aux délégations des pays concernés (Cameroun, Gabon, RCA, Tchad, Congo, RDC, Guinée équatoriale) lors de l’atelier de restitution de Douala en décembre 2014. Cette version de la BO-CHF comprend 5 sections: • uncahier«faune»aveclalistede17 espècesougroupesd’espècesàproblèmes;l’éléphantétantchefdefile;• uncahier«conflit»,avecquatregrandescatégories,quandlafauneperturbe1. l’agriculture;2. lasantéetlavie

des villageois; 3. la vie du village; 4. l’élevage et 5. l’accès à l’eau;• uncahier«solution»,avecunegammede45 solutionspratiquesdestinéesà1. prévenirlesconflits;2. barrer

l’accès à la faune sauvage; 3. repousser la faune sauvage et 4. retirer les animaux les plus dangereux;• uncahier«législation»adaptéaucontextenational;• uncahier«évaluation»desconflitsaucontextenational.

Pour faciliter le rapportage des CHF et le suivi de l’utilisation de la BO-CHF les participants de l’atelier de Douala en décembre 2014 ont adopté l’application KoBoCollect pour la collecte et la transmission des données de terrain facilitée par des formulaires avec listes à puces et géolocalisation par GPS.

Au terme d’une phase pilote d’un an (mai 2015 - mai 2016), 336 formulaires électroniques ont été soumis avec succès par 23 informateurs:• L’éléphantrestel’espècelaplussouventimpliquée,responsabled’unincidentsurdeux(51 %descas),suiviepar

legroupedesrongeurs(10 %),l’hippopotame(9 %),lepotamochère(6 %)etlespetitssinges(6 %).• Lesdégâtsauxculturesontétél’incidentleplussouventenregistrédanslescasdeCHF(80 %)etlamoitié

d’entreeuxparéléphant(52 %)avec700 tonnesdeculturesmatures,principalementdemanioc(enmoyenne3 700 m² de détruits par incident) et de plantain (une cinquantaine de pieds en moyenne par incident relevé).

• Durantlaphasedetest,lesdégâtsrelevésontétéévaluésàplusde150 K€.• Ausujetdesmesuresd’atténuation,laplupartdes45 solutionscompiléesdanslaboîteàoutilsFAOontété

testées(84 %);maislespluspopulaires(72 %)selimitentaufeu,aubruitouaulancerd’objets.Aucunevéritablemesure de prévention n’a été mise en place pour éviter les CHF.

28 Nathalie van Vliet et al.

Encadre 6: La gestion des habitats pour la faune à Phalanga, Republique democratique du Congo (Faustin Tokate)

Les efforts pour une gestion durable de la faune sauvage en forêts tropicales se sont souvent focalisés dans des zones de haute biodiversité et dans la perspective d’éviter la disparition locale de la grande faune. Par contre, les zones fortement anthropisées, et où la grande faune a déjà localement disparu, sont souvent délaissées par les efforts de gestion. L’exemple de gestion communautaire entrepris à Phalanga montre qu’il existe des opportunités intéressantes pour gérer la petite faune dans des espaces de mosaïques forêts-champs agricoles, dans un objectif de contribuer à la sécurité alimentaire de la population, au travers de la gestion de la chasse et des habitats. Même si leur intérêt du point de vue de la biodiversité est moindre, ces paysages en mosaïques forêts-champs-villages représentent un réservoir important de faune commune (rongeurs, petits carnivores, etc.) et fournissent une source d’alimentation complémentaire aux populations riveraines. De toute évidence, les objectifs de gestion dans ces paysages dégradés diffèrent de ceux envisagés dans le cadre d’espaces riches en grande faune. Il ne s’agit pas de conserver la biodiversité ni de protéger les espèces phares (qui sont souvent localement éteintes), mais plutôt de restaurer le milieu pour maintenir ou stabiliser la disponibilité en faune commune à des fins principalement alimentaires. Malgré l’augmentation des espaces dégradés en Afrique centrale, les tentatives d’y gérer la faune sont pratiquement inexistantes. Ceci constitue un champ d’innovation important à explorer dans des contextes d’insécurité alimentaire en milieu tropical. Étant donné la fragmentation actuelle de l’habitat dans le territoire de Phalanga, la communauté a suggéré de prendre des mesures pour contrôler la déforestation et restaurer les jachères à travers l’enrichissement de ces dernières en arbres nourriciers pour la faune. D’autres mesures, comme la protection de microhabitats propices à certaines espèces, sont aussi envisagées.

(Management Oriented Monitoring System) peut être utilisée (Stuart-Hill et al. 2005). Elle consiste à promouvoir l’utilisation d’un carnet de notes des événements (Event book system) qui diffère du mode conventionnel de monitoring en ce que: 1. la communauté décide de ce qu’elle veut

suivre; 2. les techniciens ne fournissent de soutien que sur demande pour faciliter le processus de conception; 3. la collecte et l’analyse des données sont entreprises localement par les membres de la communauté. Ce suivi servira à l’établissement du plan de gestion de l’année suivante, mais aussi

Paysage fragmenté de la mosaïque forêts-champs agricoles-jachère à Phalanga - RDC (©CIFOR/François Sandrin)

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 29

au contrôle global de la réalisation de ce plan sur le territoire concerné.

5.6.2 Suivi d’une batterie d’indicateurs pour l’ajustement des quotas

L’entité responsable de la structure de gestion communautaire (exemple: association de chasse) est redevable de tenir à jour un système de suivi pour l’ajustement des quotas. Il repose sur des indicateurs de durabilité du socio-écosystème soumis à un plan de gestion de la chasse.

En matière de chasse, l’ajustement des quotas repose principalement sur 3 types d’indicateurs (figure 7):• indicateurs de suivi de l’effectif;• indicateurs de suivi de la production;• indicateurs de suivi des prélèvements.

Les indicateurs de suivi de l’effectif d’une population chassée présentent un réel intérêt s’ils sont rapportés à celui des populations animales non chassées. À ce titre, le taux de charge Nt/K présenté plus haut dans la section «Détermination des quotas» est probablement l’indicateur le plus intéressant. Il implique en théorie une connaissance de l’effectif absolu N de la population

Tableau 4: Caracterisation des approches du suivi local (Adapte de Danielsen et al. 2009)

Categorie de suivi Collecteurs primaires des donnees Utilisateurs primaires de donnees

Géré extérieurement, exécuté par des professionnels

Chercheurs professionnels Chercheurs professionnels

Géré extérieurement, avec des collecteurs de données locaux

Chercheurs professionnels et populations locales

Chercheurs professionnels

Suivi collaboratif avec interprétation extérieure des données

Populations locales avec conseils de chercheurs professionnels

Populations locales et chercheurs professionnels

Suivi collaboratif avec interprétation locale des données

Populations locales avec conseils de chercheurs professionnels

Populations locales

Suivi local autonome Populations locales Populations locales

Figure 7: Indicateurs de suivi d’un plan de chasse

Indicateurs de suivi de l’effectif

• Taux de charge (Nt/K) (global ou local si le territoire de chasse est découpé en zones annuelles d’exploitation)

Indicateurs de suivi de la production

• Proportions de femelles gestantes

• Masse corporelle des individus

Indicateurs de suivi des prelevements

• Rendement de l’effort de chasse (nombre de prises par unité d’effort)

• Taux de réalisation d’un quota

• Prix de vente

30 Nathalie van Vliet et al.

au temps t («Nt») au sein de la zone chassée, ainsi qu’une connaissance de l’effectif absolu («K») de la population de l’espèce concernée dans une zone non chassée.

En pratique, l’effort d’échantillonnage requis pour estimer avec une précision satisfaisante l’effectif absolu des principales espèces chassées est très élevé, et totalement démesuré au regard des ressources des structures d’appui et des chasseurs (Mathot et Doucet 2006). C’est pourquoi les gestionnaires de chasse de par le monde se sont tournés vers des approches indirectes, dites indicielles par l’usage d’indicateurs de l’effectif (Cornelis et al. 2017). Dans le cadre du projet FAO, la méthode des caméras pièges a été choisie (voir Guide 1). Ceci dit, de nombreuses autres méthodes indicielles peuvent être jugées mieux adaptées selon le contexte (exemple: indices kilométriques d’abondance [IKA] le long de transects en lignes). Il s’agit alors de proposer une méthode qui soit relativement légère à mettre en œuvre et qui puisse être appropriée localement, afin de répéter les inventaires de façon régulière et durable dans le temps. À défaut d’une présomption d’une chute drastique des populations soumises à quotas (au travers des indicateurs de prélèvements par exemple), ce type de suivi assez lourd à mettre en œuvre peut être réalisé tous les trois ans, de telle sorte à fournir des éléments d’information utiles pour la définition du plan de chasse de l’année t+3.

Les indicateurs de suivi de la production permettent un suivi plus fin. De fait, une population présentant un effectif en croissance et des indicateurs de production à la hausse (par exemple augmentation de la masse corporelle ou du nombre de femelles gestantes) peut refléter la nécessité d’une montée en charge. À l’inverse, une population présentant un effectif en croissance et des indicateurs de production à la baisse peut refléter des taux de charge trop élevés et l’opportunité d’augmenter les prélèvements. Bien que potentiellement utiles, ces indicateurs requièrent un suivi des prélèvements assez élaboré et des connaissances techniques et scientifiques dont ne disposent pas nécessairement les acteurs locaux.

Les indicateurs de suivi des prélèvements reposent sur l’hypothèse forte que l’effort de chasse est corrélé négativement à l’effectif de la population. Parmi les indicateurs relevant de cette typologie, on peut citer 1. le rendement de l’effort de chasse (en anglais: «catch per unit effort» ou CPUE), qui traduit l’évolution du nombre de prises par unité d’effort (par exemple nombre moyen de potamochères tués

par journée de chasse); 2. le taux de réalisation du quota. Un taux de réalisation des quotas et un CPUE en forte décroissance peuvent traduire une difficulté à atteindre le quota et/ou un défaut de déclaration des prises. Dans les deux cas, des valeurs faibles invitent à la prudence et à la négociation d’une diminution du quota. À l’inverse, un taux de réalisation des quotas et un CPUE en faible décroissance peuvent simplement traduire une diminution du taux de charge, dans une gamme de valeurs supérieures à K/2. Dans ce cas de figure, rien n’oblige à court terme à revoir les niveaux de prélèvement. Ces indicateurs de suivi des prélèvements doivent impérativement faire l’objet d’un suivi et d’une synthèse annuelle.

Ces exemples illustrent bien que, si l’on veut se faire une idée des tendances qui se dégagent réellement du système, la convergence d’un faisceau d’indicateurs est nécessaire durant 2 à 3 années consécutives. Autant de raisons pour lesquelles nous invitons les gestionnaires de chasse à réviser les quotas à pas de temps de 3 ans minimum en l’absence de présomption de surexploitation notoire. Il importe également de bien garder à l’esprit que ces indicateurs n’ont de sens que dans leur dimension temporelle (suivi longitudinal d’un même territoire de chasse) et non spatiale (comparaison d’indices dans des biotopes différents), et que leur génération requiert l’usage de protocoles standardisés (on ne peut comparer des indicateurs générés par des protocoles différents).

Le suivi des quotas se pratique en général à travers un suivi continuel des prélèvements par chacun des chasseurs. Il peut se pratiquer à l’aide de carnets de suivi de la chasse ou à travers un applicatif mobile installé sur un téléphone portable ou une tablette. KoBoCollect est l’application mobile qui a été utilisée dans le cadre du projet de Gestion de la faune et de la viande de brousse en Afrique centrale. Cette application permet de réaliser des enquêtes de manière digitale. Une fois le questionnaire élaboré et téléchargé sur les téléphones mobiles des chasseurs, les questionnaires sont remplis à chaque sortie de chasse. Chaque mois, les données collectées sont envoyées à un serveur central de KoBoCollect à travers une connexion 3G ou wifi. Les données sont téléchargées puis analysées. Les résultats sont restitués de façon régulière à l’ensemble des chasseurs afin de leur permettre de prendre conscience de la réalisation des quotas et de discuter des stratégies à prendre pour ne pas dépasser le quota ou s’en approcher au plus près. Bien que l’accès limité au réseau internet et à l’électricité ainsi que le manque de pratique

Développement participatif d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise 31

de la technologie moderne par les chasseurs les plus anciens puissent être un frein à l’utilisation d’applicatifs mobiles tels que KoBoCollect, les avantages pour le suivi de la faune sont les suivants:• Interface facile à utiliser;• Permet un précieux gain de temps, car elle évite

l’entrée manuelle des données dans une base de données;

• Les données sont sauvegardées sur le serveur de KoBoCollect;

• Les données sont accessibles immédiatement après l’envoi, n’importe où dans le monde;

• Il est possible d’incorporer des images, des sons, des vidéos, et la localisation GPS dans le formulaire d’enquête;

• L’application est en amélioration continue en fonction des remarques et nécessités des utilisateurs.

5.7 Mecanismes de resolution de conflits, contrôle et sanctions

L’entité locale représentant la communauté et les chasseurs est responsable de l’exécution du plan de gestion sur le terrain. Cette responsabilité, y compris pénale, peut être mise en cause en cas de mauvaise exécution du plan de gestion, la non-réalisation des activités prévues dans le plan de gestion ou la non-application des règles à suivre (p. ex. dépassement du nombre maximum d’animaux accordés, techniques de chasse autorisées, saison de chasse, etc.).

Des conflits peuvent surgir en cas de désaccords et de différends sur l’accès, le contrôle et l’utilisation des ressources naturelles. Ces conflits peuvent aussi survenir du fait de l’absence d’une cohésion entre les divers textes de loi, notamment lorsque les politiques, programmes et projets ne tiennent pas compte des situations locales.

La forme et l’intensité des conflits varient considérablement au sein d’une communauté donnée, en fonction du lieu et du temps. Ils se manifestent de plusieurs manières, de la violation des règles aux actes de sabotage et de violence. Parfois, les conflits restent cachés ou à l’état latent. Les populations peuvent laisser couver leurs ressentiments pour des raisons aussi diverses que la peur, la méfiance, la pression du groupe, les contraintes financières, l’exclusion de certaines procédures de résolution des conflits, ou encore pour des raisons stratégiques. Quand un conflit éclate, les différentes attitudes adoptées par les acteurs du conflit peuvent être de plusieurs natures: 1. le retrait; 2. l’étouffement; 3. la domination; 4. le compromis;  5. la collaboration. Chaque communauté développe ses propres mécanismes de gestion des conflits. Ces mécanismes peuvent être formels ou informels, violents ou pacifiques, équitables ou non. Pour la réussite des programmes de gestion communautaire de la faune, il importe d’insérer dès le départ, dans leur conception et leur mise en œuvre, des mécanismes pour la gestion et la résolution participatives des conflits. Ces mécanismes doivent veiller à ce que les conflits ouverts ou latents

Encadre 7: Suivi des prelèvements avec KoBoCollect à Ovan, Phalanga et Baego (François Sandrin)

À Ovan, Phalanga et Baego, les prélèvements de la chasse ont été suivis à l’aide de l’application mobile KoBoCollect. Les utilisateurs (chasseurs et équipe de projet) ont été formés à l’utilisation de l’application pour élaborer et remplir des questionnaires ainsi que pour le chargement des réponses au serveur central et le téléchargementdesformulairesremplis.Grâceàlaparticipationd’untotalde84 chasseurs, nous avons pu enregistrer les informations concernant 395 sorties de chasse pour un total de 1 366 animaux captures sur une duree de 6 mois. La composition spécifique des proies a été très différente dans les trois sites. À Ovan, les artiodactyles ont été les plus chassés, alors qu’à Phalanga, ce sont les rongeurs et à Baego, ce sont les primates etlesartiodactyles.Lecéphalophebleureprésenteprèsde50 %desanimauxchassésàOvan,alorsqu’àPhalanga ce sont les athérures et autres petits rongeurs qui forment la majorité des proies. À Baego, ce sont les cercopithèques, les céphalophes bleus et les céphalophes rouges qui forment la majorité des proies. Les espèces intégralementprotégéesreprésentent12 %àBaego,11 %àOvanet0 %àPhalanga.Lesespècespartiellementprotégéesreprésentent10 %desproiesàPhalanga,9 %àBaegoet3 %àOvan.Lenombredesortiesbredouillesaétéde16 %àPhalanga,9 %àBaegoet7 %àOvan.Lacaptureparunitéd’effort(CPUE)enkg/haétéparticulièrement élevée à Baego (entre 2,3 et 13,5 kg/h) par rapport à Ovan (entre 1,2 et 1,8 kg/h) et à Phalanga (entre0,5et3,4 kg/h).ÀPhalanga,plusde70 %desproiessontautoconsomméesdanslevillage;àOvan,laventeconstitueprèsde40 %desgibiers;àBaego,lachasseestessentiellementuneactivitécommercialeavec80 %desgibiers vendus.

32 Nathalie van Vliet et al.

soient traités de manière constructive pour éviter une escalade. Il existe différents modes de résolution des conflits dont l’utilisation dépend des situations, des circonstances, des motivations, etc. (Matiru 2001; Kamissoko 2008). Il s’agit entre autres de 1. l’arbitrage; 2. la conciliation; 3. la médiation. Ces deux derniers modes de résolution sont possibles grâce à la négociation, qui est un processus de dialogue structuré entre les parties en conflit sur des questions sur lesquelles leurs points de vue divergent.

Par ailleurs, il est essentiel de définir les modalités de contrôle et de sanction en cas de violation des accords et règles d’usage de la faune tels que spécifiés dans le plan de gestion. Le contrôle et les sanctions peuvent se pratiquer suivant la coutume ou à travers des processus formels.

5.8 Financement

Pour réduire les possibilités d’échec de la gestion adaptative, il est primordial de s’assurer que la gestion génère suffisamment de bénéfices pour les usagers, et qu’il existe assez de ressources pour assurer le processus dans le long terme (Rist et al. 2013). Le manque d’autofinancement à long terme qui caractérise de nombreuses initiatives de gestion participative rend ces processus sujets à disparaître

lorsque le financement externe éventuellement reçu pour le démarrage se termine. Il est donc essentiel de réfléchir avec anticipation aux mécanismes de financement qui permettront de maintenir les processus sur le long terme, notamment les coûts de monitoring, l’entretien d’un groupe actif au sein de la structure de décision, le financement des réunions diverses nécessaires pour maintenir un processus participatif ainsi que les coûts d’investissement pour couvrir certaines nécessités matérielles de la structure de gestion ou pour mettre en œuvre certaines activités du plan de gestion. Les financements peuvent provenir par exemple d’une taxe prélevée sur la vente de gibier (lorsque les cadres juridiques le permettent). La structure de gestion peut également penser au développement d’une activité économique propre à l’organisme de gestion (par exemple l’écotourisme ou la transformation des produits de la chasse, etc.) qui fonctionnerait comme une microentreprise susceptible de générer des dividendes pour financer la gestion durable. Il faudra cependant veiller à ce que les efforts mis en œuvre pour s’assurer du financement ne détournent pas l’attention sur l’objectif même de la gestion et des activités prévues dans le plan de gestion de la chasse.

Encadre 8: Organisme de suivi et de contrôle de la realisation du plan de gestion à Phalanga, Republique democratique du Congo (Faustin Tokate)

L’association ACOPAM à Phalanga, République démocratique du Congo, a la responsabilité de coordonner le processus de décision en termes de gestion et de faire appliquer les décisions prises par la communauté. ACOPAM joue le rôle d’organisme de contrôle dont le but est de veiller au bon respect des règles. La communauté considère qu’un certain pourcentage des ventes pourrait être géré par ACOPAM de telle sorte à pouvoir investir ce budget dans des œuvres qui bénéficient à la durabilité de la gestion. Toutefois, les prélèvements actuels sont tout juste suffisants pour couvrir les besoins alimentaires des familles et la vente ne pourra être envisagée que si le stock est rétabli. L’ACOPAM sera chargée de la diffusion d’information en termes de règles de gestion, de prix de vente du gibier et de faire le lien avec les autorités locales et la coordination provinciale de l’Environnement.

Ce guide propose une vue d’ensemble de l’approche participative qui peut être suivie pour le développement et la mise en œuvre d’un plan de gestion durable de la chasse villageoise en Afrique centrale. Nous ne fournissons pas une méthodologie pas à pas, car nous pensons que le détail méthodologique doit émerger des réflexions de l’équipe de gestion locale et non pas être imposé de façon externe et prédéfinie. De nombreux aspects de la gestion dépendent par exemple de l’objectif de gestion fixé et différeront en fonction des contextes en privilégiant plus ou moins les objectifs de conservation, de sécurité alimentaire, de gestion du territoire, du renforcement de la gouvernance locale, de génération de revenus commerciaux, etc. Cependant, nous pensons que les éléments d’approche que nous exposons ici permettent de comprendre comment rendre participatives toutes les étapes du processus de gestion et comment garantir une souplesse suffisante des mécanismes mis en place pour permettre une gestion adaptative. Nous insistons sur le fait que ces processus innovateurs nécessitent un investissement humain à long terme pour garantir le renforcement des capacités locales et l’apprentissage collectif autour des questions de gestion de la faune. Tout processus collectif étant non linéaire, il requiert du temps et doit intégrer dès le départ la possibilité de

l’erreur et de la correction. Les exemples de mise en application dans le cadre du projet «Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale» présentés dans ce guide doivent être compris comme des résultats intermédiaires et comme des processus en cours qui requièrent un appui continu sur le long terme. Par ailleurs, comme nous l’avons mentionné dans l’introduction, cette démarche conduirait à l’échec si un certain nombre de prérequis ne sont pas remplis pour la mise en œuvre de la gestion adaptative. C’est pourquoi il est important de continuer à travailler à l’échelle nationale et régionale pour adapter les cadres réglementaires de telle sorte que ces derniers offrent un environnement favorable à la gestion durable de la chasse villageoise. Par ailleurs, les politiques nationales et locales doivent conduire à renforcer la gouvernance locale à travers des mécanismes d’expression organisée de la société civile et le renforcement des capacités des leaders locaux. Enfin, les institutions (gouvernementales et non gouvernementales) d’appui à la gestion de la chasse doivent intégrer la nécessité de garder de la flexibilité dans les cadres techniques et administratifs de telle sorte à permettre de mettre en œuvre des décisions de gestion, même en l’absence d’une connaissance parfaite des systèmes considérés.

6 Conclusion

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Les viandes d’animaux sauvages terrestres ou semi-terrestres, dénommées «viandes de brousse», sont une composante essentielle de la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance dans les zones rurales d’Afrique centrale. Cependant, la pression croissante de la chasse a des effets tangibles sur la faune et est susceptible d’avoir des incidences à long terme sur les écosystèmes forestiers. Il devient donc nécessaire de s’assurer que l’utilisation de la faune se pratique dans les limites de la durabilité. Certaines expériences pratiques nous montrent que plus les communautés locales sont impliquées dans le développement du processus de gestion, plus les chances de succès sont élevées. Le premier guide de cette boîte à outils presente les composantes essentielles à la phase de diagnostic préliminaire approfondi qui permet de comprendre le système de chasse dans son état initial. Le deuxième guide qui fait l’objet de ce document, s’adresse aux gestionnaires qui souhaitent développer et mettre en oeuvre un plan de gestion participative de la chasse villageoise en Afrique centrale. Il propose une vue d’ensemble de l’approche participative qui peut être suivie, en décrivant les différentes étapes et aspects à prendre en compte pour le succès de la gestion dans le long terme. Par contre, nous ne prescrivons pas une méthodologie pas à pas, car nous pensons que le détail méthodologique doit émerger des réflexions de l’équipe de gestion locale et non pas être imposé de façon externe et prédéfinie. De nombreux aspects de la gestion dépendent par exemple de l’objectif de gestion fixé et différeront en fonction des contextes en privilégiant plus ou moins les objectifs de conservation, de sécurité alimentaire, de gestion du territoire, du renforcement de la gouvernance locale, de génération de revenus commerciaux, etc… Nous espérons que ce guide, inspiré du projet «Gestion de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale» pourra inspirer la mise en oeuvre de nouvelles initiatives en Afrique centrale.

fao.org/forestry/en cifor.org/bushmeat cirad.fr

DO

I: 10

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0064

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I7635FR/1/09.17

ISBN 978-92-5-209863-8

9 7 8 9 2 5 2 0 9 8 6 3 8