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Dès la première coupelle, Picasso pose la plupart des éléments

avec lesquels il va jouer : le cercle supérieur de l’arène, le cercle des spec-

tateurs, le cercle du ruedo, les protagonistes, la lumière et l’ombre. Une

double bande, ocre et brune, ourle la coupelle.

Réduits à de simples points, les spectateurs sont distribués dans

l’espace délimité par une frise qui stylise l’architecture des arènes. Deux

traits latéraux partent de la bordure, stabilisent la composition et guident

le regard vers le sujet qui dominera toute la série : le tercio de piques. On

retrouvera ce procédé ou des variantes dans d’autres coupelles.

L’artiste allie deux angles de vue. Une vue plongeante sur les

arènes, et, dans cette sorte d’œil que devient le ruedo, la charge du taureau

sur le cheval présentée en plan frontal.

Coupelle tauromachique. 12.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16 cm, hauteur 5,2 cm. MAMC Cer. 1991 0289

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Le point de vue s’incline, ovalise les formes et crée une perspective.

La charpente est devenue stable et puissante. Les deux triangles

verticaux guident le regard vers le centre.

Les spectateurs sont réduits à des éléments décoratifs.

Le ruedo a envahi l’espace et prend la forme d’un œil immense qui

brise le cercle de l'arène. On y trouve les silhouettes typées et variées de

tous les protagonistes, dont la verticalité est soulignée par l’ombre portée,

la cuadrilla est au complet. Tout est comme immobilisé. Le temps est sus-

pendu. Observation. Attente de l’élan et du choc.

Coupelle tauromachique. 13.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16,5 cm, hauteur 5,3 cm. MAMC Cer. 1991 0290

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On trouve ici la seule représentation de la pose des banderillas de

la série. Le torero, en équilibre sur une jambe, pose les banderillas sur le

morillo du taureau qui le charge. Sur la gauche et à l’arrière-plan, deux

peones s’apprêtent à intervenir en attirant l’attention du taureau avec leurs

capes. La scène est peinte avec de l’engobe très dilué, qui rappelle l’encre.

Cette composition montre bien comment Picasso peut échapper

aux contraintes de la forme imposée. Le sujet est cadré comme par un

objectif ou par un manteau de scène. L’habillage du cadre est puissant

mais sans aucune lourdeur. Il guide fermement le regard du spectateur

vers le centre mais il laisse apparaître le fond uniforme et léger. Deux traits

courbes esquissent le ruedo, en haut, et donnent son horizontalité au sol.

L’effet de profondeur de champ est remarquable. Le caractère théâ-

tral est manifeste. Nous sommes bien des spectateurs.

Cette composition graphique annonce celle de la coupelle 10.

Coupelle tauromachique. 13.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16,4 cm, hauteur 5,2 cm. MAMC Cer. 1991 0291

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C ‘est la première des huit coupelles qui conduisent le taureau de

la vie paisible des champs à la rencontre avec la mort dans l’arène.

Au centre, trois taureaux au champ avec leur vaquero à cheval sont

inscrits dans un soleil ocre dont les rayons sont groupés par trois. On

retrouve ces trois rayons sous forme de trois piques brunes au premier

plan de nombreuses coupelles. La corrida elle-même est découpée en trois

phases : le tercio de pique (dominant dans la série), le tercio de banderillas

et le tercio de espada (qui comprend la faena et l’estocade).

Image paisible ? Pas tout à fait. Le sujet est comme emprisonné.

L’étau est déjà en place.

Picasso introduit ici une nouvelle couleur avec l’oxyde métallique

blanc.

.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 17,5 cm, hauteur 7 cm. MAMC Cer. 1991 0293

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Cette coupelle, inscrite à l’inventaire du musée, a disparu dans les

années 70.

Le taureau est représenté seul sur le fond naturel. Il s’inscrit dans

une frise constituée de trois soleils enchâssés dont les rayons guident le

regard vers lui. Par rapport à la coupelle précédente, le nombre de soleils

et le nombre de taureaux est inversé.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes,diamètre 17 cm, hauteur 7 cm. MAMC Cer. 1991 0301

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La scène de l’entrée des arènes est prise dans la frise solaire. Les

rayons sont séparés par des rangées de trois points, ils soulignent la

convergence du public vers le lieu du spectacle.

Les taches blanches animent la scène et indiquent l’entrée de

l’arène.

A l’arrière-plan, la ville est présente. Des spectateurs sont aux

fenêtres. Tout est à la fois schématisé et précis, léger, en effervescence. Les

toreros arrivent en calèche, la fête va commencer.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 17 cm, hauteur 7,1 cm. MAMC Cer. 1991 0294

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Le cercle extérieur, la frise et l’ovale du ruedo mettent en relief

l’horizontalité du défilé de la cuadrilla, son caractère incisif, théâtral,

triomphal...

Les silhouettes des alguazils, des toreros, des peones, des picadors

et des mulillas se détachent avec précision et expressivité : élan des che-

vaux de tête, retenue des toreros, lourdeur des chevaux des picadors. Tous

sont liés au sol par un trait brun dont les taches ombrées suggèrent le pié-

tinement.

Les protagonistes sont séparés des spectateurs par deux grandes

plages claires. Bientôt, ils seront seuls, face à la mort.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes,diamètre 17,5 cm, hauteur 6,7 cm. MAMC Cer. 1991 0295

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La frise est soleil ou iris de l’œil. Nous retrouvons les trois points

décoratifs dans les rayons, mais alternativement bruns ou blancs.

Dans le ruedo le sable est un second soleil aveuglant.

Le mouvement propre à chaque protagoniste est suspendu. Le

picador se prépare à recevoir la charge du taureau, la pique est en position,

les protagonistes sont figés dans une attitude d’attente. Arrêt sur image.

La rotation des rayons du soleil annonce l’élan imminent du fauve.

C’est l’instant de vérité où doit se révéler la bravoure du taureau.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 17,3 cm, hauteur 6,6 cm. MAMC Cer. 1991 0296

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Les rayons du soleil se sont figés, lourds. Deux carrés portant deux

gros points sombres stabilisent l’espace. Le ruedo est enserré dans un étau

de rayons, sombres dans la moitié supérieure, clairs dans la partie inférieure.

Cette opposition chromatique souligne l’incertitude de l’issue.

Car au centre c’est la cogida !

Tout est mouvement : l’élan des peones qui tentent de détourner

l’attention du taureau, le déséquilibre du picador de gauche, la violence du

coup de corne et, au-dessus, le torero qui flotte comme un pantin désarti-

culé. Le souffle des spectateurs est suspendu.

Moment incertain. Tout peut basculer. L’ombre a gagné du terrain.

La mort est présente.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16,4 cm, hauteur 5,2 cm. MAMC Cer. 1991 0297

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La structure est particulièrement forte, simple et originale.

L’ombre a gagné presque toute la surface. Le grand carré et le

cercle blancs enferment et ciblent le taureau qui se détache, noir, sur la

dernière flaque de lumière, fragile lambeau de vie. Le taureau figé est placé

pour recevoir l’estocade. Ses cornes et son sexe pointés et acérés mena-

cent encore. Mais son ombre le plombe et le relie à l’infini de la mort obs-

cure dans laquelle il va se fondre.

L’artisan de sa mort n’est même pas là. Picasso a choisi de rendre

hommage au fauve dans sa solitude.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16,8 cm, hauteur 7 cm. MAMC Cer. 1991 0292

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La frise solaire s’éclaire. Le sacrifice est accompli. Le souffle de la

vie soulève à nouveau l’arène. Les spectateurs du haut flottent dans l’es-

pace. Les sensations de vitesse et d’élan sont extrêmes.

Dans le sens inverse du paseo (coupelle 7), le taureau est sorti de

l’arène par un attelage de mulillas empanachées, c’est l’arastre. La masse

du taureau, désormais molle et parcourue par les ondes de la traction, est

entraînée sur la large trace brune comme une coulée de sang, aussi

pitoyable que le torero désarticulé de la coupelle 9.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes, diamètre 16,2 cm, hauteur 5 cm. MAMC Cer. 1991 0298

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La disparition de la frise et le croissant de ciel dans lequel flottent

librement des drapeaux et de légers nuages clairs donnent à la scène une

dimension beaucoup plus réaliste. Le peintre exalte le mouvement. Les

protagonistes sont saisis dans leur élan.

La coupelle est divisée en trois zones chromatiques. La zone noire

correspond aux places à l’ombre, les plus chères... C’est à partir de là que

Picasso va poursuivre son travail dans les trois coupelles suivantes et trai-

ter le thème sol y sombra, ce thème essentiel de la corrida.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes,diamètre 17,4 cm, hauteur 6,9 cm. MAMC Cer. 1991 0299

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Picasso systématise le découpage en trois zones de façon remar-

quable. Le jeu des intersections met en valeur le sujet. Celui-ci est à la fois

cerné et partagé. Dans l’ombre les silhouettes sont travaillées comme des

graffitis. La confrontation a lieu à la rencontre de la lumière éblouissante et

de l’obscurité, de la vie et de la mort. Le peintre échappe au réalisme pour

atteindre la métaphore.

Coupelle tauromachique. 14.4.1953. Terre de Lugnon et émail, diamètre 17 cm, hauteur 6,9 cm. MAMC Cer. 1991 0300

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Elle illustre bien le principe de la déclinaison propre au travail en

série : répartition différente des plages chromatiques, des ellipses, des

intersections, inversion des couleurs.

Ici le point fort de la composition est encadré par deux ellipses , l’une

gravée, horizontale et l’autre, verticale, délimitée par les couleurs ocre-

rouge et brun.

Les trois spectateurs du bas, à la silhouette précise, apportent

richesse et vie à la scène. Picasso nous place au deuxième rang. Effet de

zoom avant.

Le face-à-face est, là aussi, mis en valeur par un cercle et par le

chromatisme naturel du support.

Coupelle tauromachique. 15.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes,diamètre 17,5 cm, hauteur 6,7 cm. MAMC Cer. 1991 0305

14

Elle reprend la structure de la coupelle 14, mais avec un zoom arrière.

Subtils contrastes entre clair et obscur.

Picasso reprend la frise décorative de la coupelle 1. Elle détermine

dans l'architecture une série d'arcades reprises sous forme de larges

taches brun-noir dans la suite de la série.

Les deux rangées de spectateurs du bas nous positionnent dans

l’arène et accentuent l’effet de perspective.

Coupelle tauromachique. 15.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 16,4 cm, hauteur 5,5 cm. MAMC Cer. 1991 0304

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L’arène est traitée de façon très dépouillée, le public et le ruedo

sont sommairement dessinés sur le support naturel, seuls le centre du

ruedo et le ciel sont peints. Tout semble disparaître devant la charge du

taureau.

Des touches de blanc, dans le public s’organisent et créent une liai-

son entre le ciel et l’aplat jaune du ruedo. Désormais ces deux couleurs

seront associées et annonceront l’apparition du soleil (coupelle 24).

Coupelle tauromachique. 15.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail, diamètre 16,4 cm, hauteur 5,2 cm. MAMC Cer. 1991 0303

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Coupelle tauromachique. 15.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,2 cm, hauteur 6,6 cm. MAMC Cer. 1991 0302

Version presque nocturne, orageuse, de la précédente. Elle en pro-

longe le mouvement.

Les personnages sombres du premier plan se transforment pro-

gressivement en arcades sombres dans la partie supérieure de la coupelle

de façon à cerner le ruedo, à donner du rythme, à accentuer la perspective.

Sous la charge du taureau, le cheval se cabre. Dans ses scènes tau-

romachiques, Picasso peint toujours le cheval du picador sans le capara-

çon de protection qui, pourtant, est obligatoire depuis 1928. Picasso détes-

tait cette lourde protection qui impose à la corrida un rythme moins sou-

tenu en entravant la liberté de mouvement et qui minimise la prise de

risque du cheval et du picador.

Le peon s’élance. Le torero poursuit son quite pour tenter de

détourner la charge du taureau.

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Le blanc et le jaune prennent de plus en plus d’importance ; ils don-

nent son rythme et sa lumière à la coupelle.

Le ruedo est très restreint. Le public est plus fortement présent. Au

premier plan, les personnages de dos peints à l’engobe brun créent une

pyramide sombre qui se poursuit sur le sable et porte à son sommet les

trois protagonistes.

Le ruedo est inondé d’une lumière qui dessine un halo autour des

spectateurs du premier rang créant un effet de relief saisissant.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,4 cm, hauteur 7 cm. MAMC Cer. 1991 0308

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Les touches grises qui strient le ciel, l’alternance dans la partie infé-

rieure des taches blanches et des taches noires, donnent plus encore que

dans la coupelle précédente sa percussion et son rythme à la coupelle.

La lumière blanche continue à monter. Elle ourle la masse jaune du

centre. Ensemble elles se dressent vers le ciel.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,8 cm, hauteur 6,6 cm. MAMC Cer. 1991 0306

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Elle reprend pour l’essentiel les deux coupelles précédentes en

apportant simplement une variation au niveau de la partie supérieure.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,5 cm, hauteur 6,8 cm. MAMC Cer. 1991 0307

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La pendule indique 6h15. Le premier taureau de la tarde reçoit le

châtiment de la pique.

De fortes symétries par rapport à l’axe vertical stabilisent la cou-

pelle. La ligne du ruedo dessine une immense courbe sensuelle. Un œil,

une bouche, un sexe ?

Le ruedo s’ouvre dans sa partie inférieure. Un triangle clair

pointe, s’introduit pour rejoindre la partie blanche du centre. La pous-

sée verticale s’amplifie.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,9 cm, hauteur 5,8 cm. MAMC Cer. 1991 0309

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La forme pyramidale des spectateurs du bas conduit vers le sujet.

Elle semble se frayer un chemin et elle tend à rejoindre la tache blanche qui

entoure le jaune.

La tache jaune vient buter sur la barrera verticale qu’elle ouvre et

sur la ligne supérieure des arènes, quasi perpendiculaire, et qui brise le

cercle du support. Elle commence à se dresser.

La répartition des zones colorées renforce la structure et permet

de jouer avec la contrainte concave/convexe qu’impose la forme de la

coupelle.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon et décor aux engobes et émail,diamètre 17,6 cm, hauteur 5,2 cm. MAMC Cer. 1991 0310

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Cette coupelle reprend l’organisation de la précédente, elle est

cependant beaucoup plus épurée, elle garde la sensualité de la courbe du

ruedo de la coupelle 21.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,5 cm, hauteur 5,7 cm. MAMC Cer. 1991 0311

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Le soleil fait son apparition, rejoint par la ligne jaune. Il vibre dans

des cercles concentriques, semble aspirer l’arène et lui impose une distor-

sion voluptueuse.

Là encore Picasso échappe à la contrainte du cercle. La sensualité

de la courbe du ruedo est plus forte encore. Les silhouettes des person-

nages, légères, à peine esquissées, sont d’une admirable précision.

Coupelle tauromachique. 16.4.1953. Terre de Lugnon, décor aux engobes et émail,diamètre 17,7 cm, hauteur 5,5 cm. MAMC Cer. 1991 0312

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Les coupelles du 17 avril sont toutes réalisées en terre blanche de

Provins. Ce support sera très souvent laissé vierge.

Jusqu’à la dernière pièce, le soleil dominera la scène.

Deux univers se répondent.

Le soleil : un point sombre entouré d’un cercle dont la couleur

variera et de rayons.

L’arène : le sujet central, sombre, entouré lui aussi de cercles et de

formes rayonnantes.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobes etémail, diamètre 17 cm, hauteur 5,6 cm. MAMC Cer. 1991 0313

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Les coupelles où le soleil brille ne sont pas les plus éclairées. Ici

aussi, l’astre semble au contraire aspirer la lumière de l’arène et lui impri-

mer l’ondulation signalée dans la coupelle 24.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobes etémail, diamètre 17,7 cm, hauteur 6,5 cm. MAMC Cer. 1991 0314

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Malgré un soleil éclatant l’arène continue à s’obscurcir.

Les intersections de plan structurent la coupelle d’une façon tout à

fait étonnante. Arène, piste de cirque, théâtre ? Le voile léger de la nuit,

comme un rideau, peut se tirer vers la gauche. Là le soleil devient aussi

projecteur.

Près de la fleur solaire, on remarque pour la première fois la pré-

sence d’oiseaux.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobes etémail, diamètre 17,4 cm, hauteur 5,7 cm. MAMC Cer. 1991 0315

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La coupelle est extrêmement épurée et son graphisme minimal.

Picasso laisse ici une place prépondérante au support naturel

blanc. Le haut de l’arène n’est même plus incurvé, les spectateurs sont de

simples points, le ciel n’est qu’un aplat jaune. Picasso joue sur l’intensité

des gris et des bruns pour mettre en valeur le sujet.

Deux zones, deux mondes soudés, de poids équivalent, se font

écho : celui du soleil éternel, celui de l’arène des passions humaines. Ils

forment un tout.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobes etémail, diamètre 17,5 cm, hauteur 6,8cm. MAMC Cer. 1991 0316

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Le soleil gagne du terrain. Ses rayons créent presque l’illusion que

la courbure de l’arène est convexe. Le ruedo se trouve écrasé dans la par-

tie basse, accentuant ainsi la sensation d’enfermement.

Le soleil semble devoir envelopper le globe terrestre. Sa lumière

pleut sur la scène.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobes etémail, diamètre 17,3 cm, hauteur 6,5 cm. MAMC Cer. 1991 0317

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L’unique reproduction que nous avons retrouvée de cette coupelle

est partielle. Cependant il était intéressant de la reproduire ici. Cette pièce

clôt la série.

Soleil et arène sont en totale symétrie. Chaque élément, chaque

couleur de l’un se retrouve dans l’autre.

La métaphore annoncée dès la coupelle 25 s’épanouit pleinement,

toute passion, toute violence oubliée, dans la délicatesse du blanc laiteux

et pur.

Picasso donne à la corrida une dimension universelle et pacifiée.

Coupelle tauromachique. 17.4.1953. Terre blanche de Provins, décor aux engobeset émail.

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Glossaire

Aficionado : amateur passionné de courses de taureaux.

Alguazil : vêtu du costume noir du XVIIème siècle et coiffé d’un chapeau à

plumes, l’alguazil (gendarme) conduit le défilé initial et assure la fonction

de police dans l’arène.

Arastre : enlèvement du cadavre du taureau par un train de mules ou de

chevaux.

Banderillas : bâtons de bois munis d’un crochet en forme de harpon et

ornés de bandes de papier multicolores. La pose des banderillas dans le

morillo du taureau constitue le deuxième tercio de la corrida.

Banderillero : torero chargé de poser les banderillas.

Barrera : barrière de planches qui entoure la piste.

Corrida : course de taureaux.

Cogida : littéralement prise. Circonstance où le taureau prend l’homme

avec sa corne, pouvant occasionner une blessure, voire la mort.

Cuadrilla : L’équipe du torero. Elle comprend le matador, ses picadors, ses

banderilleros et ses peones.

Estocade : mise à mort du taureau d’un coup d’épée ou estoc.

Faena : c’est le travail du matador avec la muleta au cours du troisième ter-

cio, avant la mise à mort.

Matador : torero dirigeant une cuadrilla et plus spécialement celui qui

assume le troisième épisode de la course et la mise à mort.

Morillo : protubérance charnue formée par le renflement de l’encolure du

taureau.

Muleta : étoffe écarlate montée sur un bâton, dont se sert le torero pour

toréer au troisième tercio.

Mulillas : ce sont les mules qui tirent la dépouille du taureau hors de l’arè-

ne. Quelquefois on utilise également des percherons.

Paseo : défilé initial des matadors avec leur cuadrilla.

Peon : aide du torero qui évolue à pied.

Peto : caparaçon protégeant les chevaux, adopté en 1928.

Picador : cavalier qui “travaille” le taureau à la pique.

Pique : lance de bois portant la pique proprement dite. Les piques consti-

tuent le premier tercio de la corrida.

Quite : passes de cape faites à un taureau pour l’écarter du cheval ou d’un

torero en danger.

Ruedo : synonyme d’arène.

Tarde : après-midi.

Tercio : tiers, un des trois épisodes de la corrida : piques, banderilles et

épée (mise à mort). Egalement un des trois terrains délimités dans l’arène

par des cercles imaginaires.

Toril : loge obscure où les taureaux sont amenés pour se calmer quelques

heures avant la corrida.