Des grands hommes dans la ville

De Auguste Rodin, 1897

De Louis-Ernest Barrias, 1902

Vocabulaire à acquérirMonumentStatueSocleDrapéBronzeAllégorieSymboleFiguratif

Le XIXe siècle

Des grands hommes dans la ville

vocabulaire de la description subjective ou « Ce que je ressens »]

monumentaltrès hautressemblantdétails précis et bien sculptésdu mouvement – des envolées vers le ciel

impressionnantmoins hautmonstrueuxmystérieux - secretfort – puissant - tristebizarre – étonnantpas terminé – sobre – simple

vocabulaire de la description objective ou « Ce que je vois »]

au sommet, un homme en costume avec une cape – deux femmes dont l’une a des ailes et est à moitié dénudée – allégorie instrument - lyre - inscription (Victor Hugo)socle – décorsdes tissus très souples et plissés – drapésgris – pierre - bronzephoto noir et blancrond-point – carrefour

homme massif avec une très grande cape - on ne voit pas ses mains - des gros sourcils – les yeux enfoncés - pas de décors - le drapé est peu détaillésocle - inscription (A Balzac A Rodin)pierre – gris - vert - bronzephoto couleurjardin – square - rue – place – grille

vocabulaire attaché à l’identifi cation de l’œuvre, à ses fi nalités ou « Ce que je comprends, ce que je suppose »]

monument - statuesl’homme réfl échit – c’est un penseur - c’est Victor Hugo qui est représenté - le sculpteur, c’est Louis-Ernest Barriasmonument à la gloire de l’auteurmonument au centre d’une grande place, dans une grande villesymbole

monument - statuec’est une statue de Rodin ou de Balzac -cet homme doit être fort ou puissantl’homme regarde au loin, il est pensifmonument à la gloire de cet hommedans une grande villesymbole

- le Monument à Victor Hugo est créé en 1902 par le sculpteur Louis-Ernest Barrias(1841-1905) ;

- le Balzac est une création du sculpteur Auguste Rodin (1840-1917) ; le plâtre estproduit en 1897 mais la 1re fonte date de 1930

- les éléments constitutifs du monument(socle / statues /composition) ;

- les matériaux : pierre (socle) et bronze(statues) ;. la photographie du monument à VictorHugo est un cliché noir et blanc datantdu début du XXe siècle ; le monument aété détruit sous l’Occupation pourrécupération des métaux ;. la photographie du Balzac est un clichécouleur qui montre la couleur du bronzeoxydé.

- les personnages, les inscriptions : onpeut identifier les écri-vains Victor Hugo (1802-1885) et Balzac (1799-1850) ;

- allégorie = présence des femmes sur lemonument à Victor Hugo (La Poésieépique, par exemple, offre sa lyre aupoète) ;

- autres éléments signifiants etdécoratifs : accessoires (la lyre de La Poésie), les drapés… ;

- l’origine des deux monuments estsimilaire : commande publique pourcélébrer la gloire d’un écrivain françaisdu XIXe siècle avec projet d’installationsur la voie publique, dans Paris =symbole

- écart entre les deux réponses artistiqueset conséquences : la production deRodin, très éloignée des conventionspour le monument public, a faitscandale ; la commande a été annulée,la statue n’a été coulée qu’après la mortdu sculpteur, en 1930.

« Rodin doit la commande du Balzac à la Société des gens de lettres. Après six années de documen-tation et de recherches, Rodin sacrifi e tout signe de reconnaissance désignant généralement l’homme de lettres, toute vérité physionomique puisqu’il n’hé-site pas à déformer les traits de Balzac pour faire prévaloir un modelé puissant […] L’exposition du plâ-tre au Salon de la Société nationale des beaux-arts de 1898 provoque un incroyable scandale. La criti-que reproche au plâtre son aspect inachevé : il est qualifi é d’ébauche, voire de colossal fœtus. […] La Société des gens de lettres retire la commande au sculpteur. Une souscription est lancée pour le rachat de l’œuvre mais la publication de cette liste laisse apparaître le nom de nombreux dreyfusards et le dé-bat, dans le climat délétère suscité par « l’Affaire », s’envenime. Rodin, prudent, décide de reprendre son œuvre. […] La première fonte date de 1930 (Anvers, Koninklijk Museum). Ce n’est qu’en 1939 que Maillol et Despiau dévoilent la statue au carrefour Raspail-Montparnasse. » « Le culte du monument », Clés pour enseigner l’his-toire des arts – Le XIXe siècle.

« Le XIXe siècle n’a pas été avare de sculptures, encore moins de monuments publics dans lesquels celles-ci jouent le premier rôle. On veut rappeler au passant l’exemple et les leçons du passé comme du présent. Le monument se veut didactique, civique, patrioti-que, il cherche à souder la Nation autour de valeurs partagées, à orienter son avenir. […] Les sculpteurs répondent aux exigences des commanditaires en re-courant aux valeurs de l’art antique. Ils se montrent soucieux d’idéalisation, de dignité, de gravité , voire d’héroïsation par le nu. […] L’allégorie est régulière-ment convoquée. Ce langage conventionnel favorise une plus large compréhension de la signifi cation de l’œuvre. Au sommet de l’immense monument à Vic-tor Hugo, Louis-Ernest Barrias montrait l’Ode ailée offrant une lyre au poète tandis que la Poésie épi-que souffl ait dans la trompette de la renommée. Le Drame enlevait son masque comique pour révéler son visage tragique, la Satire faisait claquer son fouet (ce monument de pierre et de bronze a été détruit, comme tant d’autres, sous l’Occupation, afi n d’en récupérer les métaux). » « Le culte du monument », Clés pour enseigner l’his-toire des arts – Le XIXe siècle.

- le monument public, par son implantation dans la ville,s’adresse à tous les citoyens contrairement aux œuvres ex-posées dans des espaces fermés (musées…) ; les comman-ditaires (institutions, associations) passent commande de« messages » à l’adresse du grand public ;

art dans la rue = art pour tous

- le mode d’exposition sur la voie publique implique généra-lement des dimensions imposantes = monumentalet des compositions « fortes » pour capter et retenirl’attention du passant ;

- le lieu d’implantation du monument est important : lieu depromenade, de grande circulation automobile (au centred’une place, d’un rond-point…), près d’une mairie, à l’en-trée d’une ville…

- le monument public s’est beaucoup développé au XIXe siècle ;cette tendance s’est inscrite, et continue à s’inscrire, dansle cadre plus global de l’aménagement et du développementurbain ;

- le message porté par un monument peut être :. idéologique : à la gloire d’un système, d’un gouvernement,d’un chef d’État, d’un héros…. historique : devoir de mémoire, hommage à des victimes,célébration d’un évènement…. culturel : hommage à des artistes…. scientifi que : célébration des sciences et industries, hom-mage aux chercheurs…

Remarque : on peut signaler la « fragilité » des œuvres d’art qui peuvent subir les agressions de l’histoire (révolution, confl its, diktats idéologiques…).

- au-delà de ces constantes, le monument est la création d’unartiste ; c’est donc une pièce originale qui peut nous toucherou nous laisser indifférent ; elle s’inscrit plus ou moins, selonson concepteur, dans la tradition de son époque.

« L’autorité publique joue un rôle important dans ce culte du monument. Sous le Premier Empire, le monument public se met au service de la gloire de l’Empereur et de l’armée. De retour sur le trône, Louis XVIII remplace les statues équestres ou pédestres des Bourbons que la Révolution a jetées bas. La IIIe République multiplie les monuments à la République, à la Liberté, ou, évolution politique et sociale aidant, au T ravail – ouvriers et paysans ont enfi n droit à la pérennité du bronze ou de la pierre. »à « Le culte du monument », Clés pour enseigner l’histoire des arts – Le XIXe siècle. page 92

DES GRANDS HOMMES DANS LA VILLE

Les débats autour du « Balzac » de Rodin furent vifs !

« Cette statue est mons-trueusement massive. »

« Le portrait de Balzac n’est pas ressemblant. »

« Un monument sans attribut, sans décor, sans rien ! »

« C’est un bloc immobile, un rocher inerte. »

« Ni muse, ni encrier, ni livre… rien dans ce monument ne

montre un écrivain. »

« Monsieur Rodin, vous ne respectez pas les normes de

notre sculpture ! »

« Des sourcils trop gros, des yeux enfoncés, c’est mal

sculpté. »

« Un drap de miséreux pour tout costume ! »

« Décidément, ce monument ne ressemble à aucun autre ; je n’y

comprends rien. »

« Ce monument est inachevé, que Rodin le termine avant de

l’exposer ! »

« Rien en effet ! Aucun attribut, aucun artifi ce, seul Balzac compte. »

« Êtes-vous insensible ? Ce bloc-là est tout en mouvement, gonfl é et frémissant de passion. »

« Balzac, massif ? Oui, bien sûr ! Tout est massif chez lui, comme son talent ! »

« Un portrait fi dèle serait bien fade à côté de cette expression dominatrice. »

« Regardez comme ces sourcils exagérés mettent en valeur le regard profond et

saisissant de Balzac ! »

« Balzac est drapé dans sa robe de moine, vêtement qu’il portait toujours pour écrire. »

« Un encrier n’est rien, seule la puissance de création de Balzac mérite d’être sculptée ! »

« C’est courageux de rompre avec les normes ! Merci à Rodin de faire évoluer

notre art. »

« La nouveauté déroute toujours, il faut éduquer l’œil du passant. »

« Rodin a choisi le rugueux, les lignes fortes et les modelés vigoureux… le détail lissé et poli, que

vous qualifi ez d’achevé, ne l’intéresse pas ! »

MONUMENT À BALZACAuguste Rodin (1840 -1917)1898BronzeH. 270 cm ; L. 120,5 cm ; P. 128 cm

Voici quelques témoignages :