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PRÉFACE M ALGRÉ les travaux remarquables dus aux savants de notre époque sur les questions nobiliaires, le Traité de la noblesse de Gilles- André de la Roque a conservé toute la valeur et l'estime que les historiens gardent pour les savants Bénédictins des deux siècles précédents. Dans les recherches sur la noblesse, il faut toujours avoir recours au savant écrivain nor- mand, et, faut-il le dire, bien des mémoires, dignes d'ailleurs de toute estime, ne disent pas assez tout ce qu'ils doivent à ce véritable érudit. Ce traité, devenu rare, renferme des chapitres qui sont de véritables mémoires sur les ques- tions spéciales et le résumé de la science nobi- liaire à cette époque où ces questions étaient DOCLJmCfl D I I I I II 11M IIII 0000005618910 r

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PRÉFACE

M

ALGRÉ les travaux remarquables dus auxsavants de notre époque sur les questions

nobiliaires, le Traité de la noblesse de Gilles-André de la Roque a conservé toute la valeur etl'estime que les historiens gardent pour lessavants Bénédictins des deux siècles précédents.Dans les recherches sur la noblesse, il fauttoujours avoir recours au savant écrivain nor-mand, et, faut-il le dire, bien des mémoires,dignes d'ailleurs de toute estime, ne disent pasassez tout ce qu'ils doivent à ce véritable érudit.Ce traité, devenu rare, renferme des chapitresqui sont de véritables mémoires sur les ques-tions spéciales et le résumé de la science nobi-liaire à cette époque où ces questions étaient

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-6—si connues et si bien étudiées. Gilles de la Roquea consacré un chapitre tout entier (C. XLIII) à lanoblesse de Jeanne d'Arc et de sa famille.M. Herluison a eu l'heureuse idée de détacherce chapitre, qui forme un tout complet sur laquestion, et de k mettre en lumière en le joi-gnant à sa collection de pièces rares sur laPucelle. Espérons que, comme ses ainés, lepublic l'accueillera favorablement les nom-breux admirateurs de notre glorieuse Pucelleremercieront l'intelligent éditeur qui a vouluque l'exécution matérielle de cette collection fûtà la hauteur de son admiration pour Jeanned'Arc.

Nous voudrions dire quelques mots de Gillesde la Roque et de son oeuvre. Gilles-Andréde la Roque, sieur de la Lontière, naquit àCormeilles, près Caen, en 1597. Sa vie, con-sacrée à la science du blason et de la gé-néalogie, n'est connue que par ses ouvrages.L'étude des généalogies, et particulièrement decelles de la Normandie, fut sa principale occu-pation. Le soin avec lequel il se plaisait àdévoiler les fraudes généalogiques fut proba-blement l'une des causes qui l'empêcha de ter-miner son Histoire générale des maisons noblesde Normandie. 11 mourut à Paris le 3 fé-

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vrier 1687 (1). Il s'y était fixé depuis longuesannées, travaillant aux divers travaux qui,publiés d'abord séparément de 1673 à 1681,forment l'ensemble du Traité de la noblessedans l'édition complète publiée en 1734.

Venons au Traité de la noblesse de Jeanned'Arc et de sa famille, dont nous offrons aupublic une nouvelle édition. Bien des pointshistoriques ayant trait à la vie de l'héroïne ysont traités, sinon avec la sagacité qu'on adepuis apportée à l'histoire, du moins avec l'éru-dition la plus complète. Presque aucune desquestions élucidées depuis qui n'aient été tou-chées, grâce aux recherches nombreuses deG. de la Roque et à celles de ses correspon-dants. Il a consulté les archives et lu les histo-riens spéciaux. A ce titre, ce mémoire mérited'être consulté et étudié avec soin.

Mais il est un point sur lequel nous devonsinsister comme écrivain nobiliaire.

Après Pasquier, il est un de ceux qui aient sule mieux mettre en lumière le glorieux privilégeaccordé par Charles VII à la famille de la

Le Long, fil,. hist. de France. - Moréri, GrandDict. hist., t. VI. - Basle, Jean flrandrnuller, 1732, in-folio.- Dict. hist., critique et bibliographique, par une Sociétéde gens de lettres, Paris, Ménard et Desenne, 1822, in-81.

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Pucelle: le pouvoir de transmettre la noblessepar les femmes à leurs maris et à leurs descen-dants. Jamais service fait à la France ne vientau parangon de celui de la Pucelle. AussiJamais lettres d'an nob lisse ment ne furent de telpoids et mesure que celles-cy (1).

On a voulu contester ce privilége en rappe-lant que Gilles de la Roque lui-même rapportevingt-un anoblissements (de 1340 \ 1479) conçusdans des termes à peu près identiques.

M. Anatole de Barthélemy, auteur d'un savantmémoire sur la noblesse maternelle (2), dit queles vingt-une familles anoblies dans ces termesn'ont jamais émis la prétention de transmettrela noblesse en ligne féminine, et que cependantelles en auraient eu le droit aussi bien queles d'Arc. Il ajoute même que de la Roques'est bien gardé de conclure) de peur de se com-promettre.

Nous n'examinerons pas ici le droit de cesfamilles à la transmission de la noblesse fémi-nine, et encore moins chercherons-nous à com-parer les services de ceux qui furent anoblisà ceux de l'héroïne qui sauva la France du joug

Pasquier, Recherches de la France, liv. VI, chap. y,in fine.

\2. Bibliothèque de l'École des chartes, 5' série, t. II.

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anglais, et fonda de nouveau (s'il est permis dese servir d'une telle expression) la dynastie quia fait la France.

Nous n'invoquerons ni le droit, ni les termesdes lettres de Charles VII. Nous nous borne-rons à examiner les faits, et nous dirons quele travail de G. de la Roque conclut avec raisondans le sens du privilége, en rapportant desarrêts nombreux confirmant la noblesse auxdescendants féminins de la famille de la Pucelle.

Nous avons ajouté quelques notes brèves surles noms de personnes et de lieux cités par lesavant auteur normand, renvoyant pour lesdétails généalogiques au travail d'ensemble queMM. de Bouteiller et de Braux viennent de faireparaître (I).

Nous espérons que notre modeste travailoffrira quelque intérêt aux admirateurs nom--breux et passionnés de la plus grande héroïnde notre histoire, que tous les Français serontheureux de vénérer sous le nom de sainteJeanne de France.

G. DE BRAUX.

(t) La faniUle de Jeanne d'Arc. Paris, Claudin; Orléans,H. Herluison, in-80.

DE LA NOBLESSEnr.

JEANNE D'ARCDite du Lys

PUCELLE D'ORLÉANS

L

A France estoit sur le penchant de sa ruine, par lesgrandes conquestes que les Anglois y faisoient, à la faveur

des factions et des divisions qui regnoient entre les maisonsd'Orléans et de Bourgogne, lorsque Dieu, qui l'a toujoursfavorisée de sa protection dans les plus pressantes occasions,luy envoya un secours extraordinaire et plus qu'humain,faisant sortir des frontières de Champagne Jeanne Day ouDarc, depuis appellée la Pucelle d'Orléans, pour résister auxefforts de ses ennemis. Elle estoit née au village de Domp-remy, paroisse de Greux, sur la Meuse, en la prévostéd'Andelot, bailliage de Chaumont en Bassigny, élection deLangres, diocèse de Toul. Ayant esté conduite par Robert deBaudricourt au roy Charles VII, qui estoit 't Chinon enTouraine, ce prince loy permit de porter les armes pour sonservice, ce qu'elle fit avec tant de prudence, de valeur et desuccès, qu'elle rétablit les affaires de ce royaume, qui sem-bloient alors désespérées. Elle commença ses actions sur-

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prenantes par le secours qu'elle jetta dans Orléans, assiégépar les Anglais, qu'elle défit, et les contraignit de lever lesiège.

Tant d'autres signalés avantages, qu'elle remporta sur eux,inspirèrent à ce prince de luy donner des marques éclatantesde sa reconnoissance, l'anoblissant avec Jacques Day ouDarc et Isabelle Roniéc, son père et sa mère; Jacquemin etJean Day, et Pierre Perrel, ses frères ensemble leur lignage,leur parenté et leur postérité née et à naître en ligne mascu-line et féminine. Les lettres patentes en sont données à Meun-sur-Yeurre, en Berry, au mois de décembre 1429, prèsensGregoire l'Ang]ois, évesquc de Sées, et les seigneurs de laTrimoifille et de Termes. Elles furent enregistrées à laChambre des comptes de Paris, tranférée â Bourges le 16 jan-vier de la mesme année, qui lors commençait à Pasques. Envoicy le contenu Carolus Dei gratta Fraucorum rex, adperpetuanr rei me,noriam, magnificaturi divina celsitudinis uber-rimas nitidissimasque gratias celebri min isterio Puellx IobannDay. de Donspremeio, cl,are et dilec?e nosira', de Baillivia Calvi-inontis, sen ejus ressortu elargitas, etc. Consideranles insuper peripsain Iohannam Puella,n ,nultitnodi impensa, et qua' in Juturumhnpendi speranuis, cerlisque alus causis ad hoc animiun nosirumiiducentibus, prefa!ain Pue flam, lacohum Day, dicti loci deDonipremeio, patrem ; Isabellam ejus uxoreni, matrem; lacque-minum, Iobanneru Day et Petrunl Pc'errelo, fratres ipsius Puella',et tatam ejus parentelam et lignagium, et in favoreni et pro con-Jemplatione ejusdem, ci eoru;n parenlelam ,nasculin.ani et foemini-nain in legitimo inalri,nonio natam et nascituratn nobilitaviinus,et per p?a'sentes de gratta speciali, et ex nosira certa scientia, etplenitudine poteslatis nobilitamus et nobiles facimus, concedentesexpressi, ut dicta Puel!a, dicli lacobus, Isabella, lacqueminus,lohaunes et Perus, et ipsius Puella' iota parente la et lignagiuni, etipsoruni posteitas nala et nascilura in suis actibus, in jndicio etextra ab osnnibis pro nobilil'us habeanlur et repuientur, etc. Con-cede,ztes eisdetn, c conem post'ria!i tain masculine qua?n foeniinina'

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in legilimo malri,nonio procraaia1 et procreanda', ni ipsi feoda ciretrofeoda, et ras nobiles é nobilibus, et alus qtdbuscunquepersonis, acquirere, et eam acquisitas quant acquireudas retinere,tene.re et possidere valeaut ai que possint, etc. Dat um M'agdunisuper Ebram, mense dece,nbri anno Dom mi 1429, reg ni veroflostri odavo. Et sur le reply est écrit: Per regem, episcopoSagiensi, dominés de la Trimotille et de Termes (t), cl alusprs'sentibus. Signé MaIllera. Expedita in Camera compotorumDomini regis decima sexta die inensis ianuarii auna Domini1429 et ibidem registrala in libro Chariarum hujus temporis,folio 121. Signé Agreelle, et scellé du grand seau de cireverte sur double queué, en lacs de soyc rouge et verte. Cettecharte fut adressée au bailly de Chaumont en Bassigny, pourestre registrée par devant luy, ce qui s'exécuta en l'an 1429.Elle a esté registrée en la Cour des Aides de Normandie,suivant son arrest, le 13 décembre i6o8. Signé De Planes.

Estienne Pasquier (2), avocat général en la Chambre descomptes, dans ses Recherches de la France, dit que ce privilégede noblesse est admirable, et non encore octroyé h aucuneautre famille qu'à celle-cy. Il ajoute que le roy Charles VII,pour donner à la postérité des témoignages des valeureuxexploits de cette Pucelle, luy donna pour armes un écu d'azurà l'épée d'argent mise en pal, la pointe en haut, ayant lacroisée et le pommeau d'or, soutenant une couronne d'or, etaccompagnée de deux fleurs de lis d'or. Et qu'il gratifia aussiLi famille du surnom du Lis. Cela se voit dans les registresde la Chambre des comptes en ces termes: A ,nessire Pierredu Lis, chevalier, frère de la Pucelle, six vingis et une livrepour sa pension de l'année 1454. Et en un autre article: Alehan du Lis, frère de la Pucelle, écuyer, bailly de Vermandois, etcapitaine de Chartres, pareille somme pour sa pension de l'an 1454.

(t) Il faut lire de Trèves Robert le Maçon, seigneur et baron de Trèves, enAnjou, chancelier de France. - V. P. Anselme, Iii,!. gin., t. VI, p. 395 et 396.

(3) Étienne Pazquier, Rechercha, chap. y, liv. VI, in fine.

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C'est pourquoy Alain Chantier (i), secrétaire du roiCharles VII, appelle cette Pucelle Jeanne du Lis. Voicy cequ'il dit en son histoire, page 69 Arriva une fille de l'aage de18 d 20 ans pardevers le Roy au chaslel de Chinon, nommée leannedu Lis la Pucelle.

Les mesmes registres de la Chambre des Comptes portentque Charles, duc d'Orléans, fit don de l'Isle-aux-Beufs, conte-nant 200 arpens, assise dans la rivière de Loire, dépendantede son apanage, au mesme Pierie du Lis et à Jean, son fils,pour en joclir leur vie durant, par lettres du 26 juillet 1443,employées dans un compte de l'an 1444 et dans un autrede l'an 1456. Ainsi ils quittèrent le nom Day pour prendreceluy du Lis, par allusion aux fleurs de lis de l'écu deFrance.

On a mis en doute si l'intention du roy Charles VU, enanoblissant la Pucelle d'Orléans, a esté de transmettre lanoblesse â la postérité féminine de ses frères, parce qu'ilest du stuc ordinaire de plusieurs autres chantes d'anoblirmâles et femelles, mais non pas les descendans des filles,si elles ne contractent des alliances nobles. Voici des exem-ples de ces anoblisseinens, qui néantmoins n'ont point eud'effet pour les descendans des filles, comme nous remarque-rons cy-après.

Le roy Philippes VI, par ses lettres données à Agen l'an5340, anoblit Gérard de Byle du Puy de la Roche, avec sapostérité mâle et femelle. Voicy les termes de la chartrePhilippus Dei gratin Francorum rex, etc. Notunr faciinus uni-versis tata presentibus quam fuluris; quod nos dilection nostrumGerardunr de Biole de Podio Ruppis qui cxl itil ah innobilibus paren-tibus procreatus, un-a cum ejus loin poslerilale procreala seu etiamprocreanda sied sint inasculi, sie femelLe nobililavimus ac tenorepresenlimem de gratia spci'ali ex nus! ra cL'r!a scientia, et locunt nos-

(L) In du fers r;ç C/er!es, s? Iin,,,e de û no,,,, etc. Pins, Irau;oisRegnault, I;28, poil in-folio gouii. du Issu if.

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trum tenente plenitudine potestalis nol'ililatnus, etc., aclutn apudAgennwn anno Do puini 1340.

[1 anoblit aussi Jean du Four de Figac, alors habitant deSaint -jean -d'Angely, avec sa postérité née et à naître,mâles et femelles les lettres en furent données à Royal-lieu, au mois d'aoust 1342, signé par le roy, R. de Molins.

Ce prince anoblit pareillement Guillaume le Champenoisde Chaumont en Bassigny, avec sa postérité mâle et femelle,suivant les lettres données à Saint-Germain-en-Laye au moisd'octobre 1344.

Jean Pisdoé, prévost des marchands de Paris, et Agnès,sa femme, receurent la mesme grace, pour eux et pourtoute leur postérité, mâles et femelles, par lettres expédiéesâ Fontaines-Saint-Martin au Maine, en juillet 1345, la financeremise.

Jean Phenapelier de Rougemont fut du nombre des ano-blis par le mesme roy, avec sa postérité, mâles et femelles,selon les lettres données à Brunay au mois de may 1346.

Il y a une chartre d'anoblissement concédée en septembre1352 à Guillaume de Bossac, bourgeois de Tulle, et pourtoute sa postérité, de quelque sexe que cc soit. Elle fut donnéeâ Brive-la-Gaillarde, en Limousin, et confirmée par lettres duroy Jean, datées de Gournay, en Normandie, le 2 janvier dela mesme année.

Le mesme roy Jean anoblit, au mois d'octobre 1363, Jeanle Coq, maître de la chambre aux deniers, avec sa postérité del'un et de l'autre sexe, ce qui fut vérifié en la Chambre desComptes le lundy 13 mars suivant.

Miche! Bigot, de la ville de Bourges, fut anobly avec sapostérité mâle et femelle, par lettres du roi Charles V dumois de juin 1369, moyennant quarante francs payés auThrésor. L'enregistrement en fut fait à la Chambre des Comptesle 23 juillet.

Une chartre d'anoblissement fut expédiée â Paris au châ-teau du Louvre, le 18 avril 1372, et enregistrée à la Chambre

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des Comptes le 16 may 1373, en faveur de Jean Maillart,bourgeois de Paris ; d'isabelle, son épouse ; de Jean et deCharles Maillart, et de Jacqueline, fille desdits mariez etfemme de maître Jean le Coq, avec toute leur postérité, tantmâles que femelles.

Le roi Charles V accorda aussi des lettres d'anoblissementà Pierre Bernier, de Caén, diocèse de Bayeux, fi sa femmeet à ses enfans, mâles et femelles, au mois de mai 1372,vérifiées à la Chambre des Comptes le 13 octobre suivant.

Dieu-donné de la Parle, docteur en loix, maître desrequestes de l'hôtel, eut de pareilles lettres le 24 juin 1377,qui font mention de sa femme et de ses enfans, de l'un et del'autre sexe, connue anoblis avec luy.

Ois expédia une charte en latin, à Paris, au mois demay 1389, qui anoblit Renault Euldc, demeurant à Dieppe,avec sa postérité mâle et femelle. Elle fut enregistrée à laChambre des Comptes le 25 du mesme mois, moyennant8o livres. Et l'enregistrement commence en ces termesReginaldus Eulde libercr conditionis in villa Dieppe moramfrahens.

Un autre anoblissement fut donné par le roi Charles VI àGuillaume Budée, pourveu de l'office de Munitionaire desvins, pour le service de Sa Majesté, du la Reyne, et de Charles,dauphin de Viennois, leur fils. Sa postérité masculine etféminine y est comprise. Il est daté du monastère de Mau-buisson, près Pontoise, au mois de septembre, l'an 5399,et registré au livre des chartres le 15 may 1400, moyennantfinance.

Le roy Charles VII fit dresser des lettres de noblesse,estant à Jargeau au mois de may 5430, pour Guy de Mareau,eschevin de la ville d'Orléans, fils de Pierre de Mareau,receveur de cette ville, et pour Jeanne Champeaux, safemme, et leur postérité mâle et femelle. il leur fut permis defaire blasonner leurs armes d'or à trois trèfles de sinople.

Cc prince anoblit au ssi la postérité masculine et féminine

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de Jean Becquet, natif de Ro6en, et demeurant au Pont-de-l'Arche, et d'Estienne Guillier, de Coulomiers, en Brie. Leslettres en furent expédiées le 22 septembre 1441, et enregis-trées â la Chambre des Comptes le 24 mars 1443.

Il anoblit de mesnie Guillaume Dalmas, habitant de laville de Rhodés, et officier de la maison du comte de laMarche et de Castres, pour avoir monté le premier sur lesmurailles de la ville de Pontoise, lors du siège mis par SaMajesté. Elle luy donna pour armes d'argent à la croix ancréede gueules, avec une couronne murale en façon de créneauxde sinople pour l'ornement de son casque. Les lettres qui ensont données â Poitiers, au mois de juin l'an 1443, contien-nent aussi l'anoblissement de sa femme et de leur postéritémasculine et féminine. Elles furent vérifiées à la Chambredes Comptes le 18 novembre ensuivant.

Un autre exemple se voit en l'anoblissement d'Antoinede Vignoles, natif d'Anjou, avec sa postérité de l'un et del'autre sexe. Il a esté vérifié à la Chambre des Comptesl'an 1448.

La niesme chose se trouve dans les lettres de noblesse don-nées au Plessis-lez-Tours au mois de mars I40, pour Robertle Gras, vicomte du Ponteaudemer. Elles furent registrées à laChambre des Comptes le 22 de ce mois.

Un pareil exemple se peut prendre de la chartre qu'obtintJean le Meunier, notaire et secrétaire du roy Loths XI, et sonprocureur au grand Conseil, donné à Paris au mois d'octobre1467, par laquelle sa postérité née et à naître, de l'un et del'autre sexe, est anoblie.

Ce prince estant au Plessis du Parc, donna des lettresau mois de février 1479 à Gratian du Faur, président auParlement de Toulouse, pour l'anoblir avec ses enfants mâleset femelles.

Cependant, quoy que ces anoblissements fussent pour ceuxqui les obtenoient et pour leur postérité et lignée, de l'un etde l'autre sexe, néantmoins aucuns de leurs descendans par

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femmes n'ont prétendu en tirer la qualité de nobles, parcequ'il est certain que les filles de ces anoblis avoient bien leprivilège de se qualifier Damoiselles, mais non pas celuy decommuniquer la noblesse aux enfants sortis d'elles et de rotu-riers. Il n'y a eu que les paretis de la Pucelle d'Orléans quiayent pris cette liberté particulière de se dire nobles, quoyque la chartrc donnée en sa faveur ne comprenne que sapersonne, son père et sa mère, et ses trois frères. Ils y sonttous six expressément nommez, mais non pas les soeurs,ny aucuns autres de leurs parens, si ce n'est que l'on com-prenne par ces termes leur parenté, leur lignage et leur posté-rité, non seulement les descendans qui procèdent en droiteligne des frères de cette Pucelle, mais encore les descendansde ses tantes, et mesme tous ses parens, tant du côté paternelque du maternel.

Il est vray que ce privilège de noblesse fut depuis inter-prété par la déclaration du roy Henry II, donnée â Amboisele 26 mars avant Pasques, l'an 1555, par laquelle Sa Majestédit qu'il s'étend et se perpétué seulement en faveur de ceuxqui seroient descendus du père et des frères de cette Pucelle,en ligne masculine et non féminine ; que les seuls miles sontcensez nobles, et non les descendans des filles, si elles neSont mariées â des gentils-hommes. La publication en futfaite à la Cour des aides et finances de Normandie, qui donnaarrest le 23 avril après Pasques, l'an dont voicy lecontenu : Que ceux qui se disent issus de la race de ladite Pucellejouiront du privilége de noblesse, suivant ladite chartre, pourveuqu'ils portent le nom, ou qu'ils soient issus de filles de Jacques Day,n'ayant dérogé à leur estai, et ayant esté mariées à des gentilshommesvivans noblement. Les autres ne portans le nom et ayant dérogéseront taillables, et défenses à eux d'usurper les armes de Jean neDay, à peine de confiscatii.m de biens.

Ce privilège fut encore aboly à l'égard des descendans parfemmes, par l'édit du roy l-Ienry IV, de l'an 198, sur le faitdes anoblissemens créés depuis l'an 1578. Cc qui fut confirmé

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par édit du roy Loiis XIII, du mois de juin 1614, article to,et par les déclarations de 1634 et 1635.

Mais, nonobstant ces interprétations et ces restrictions ex-presses, les descendans des filles ont joiiy du privilége, lors-qu'ils ont vécu noblement, et qu'ils ont obtenu des lettresPatentes pour y estre maintenus.

jean Hordal, docteur aux droits en l'Université de Ponta-mouson, et parent de la Pucelle d'Orléans; Valeran Varan (t),docteur en théologie en l'Université de Paris ; EstiennePasquier, avocat général à la Chambre des Comptes; PierreGrégoire, Henry Sponde, évesque de Pamiers, et plusieursautres, tiennent dans leurs histoires cette noblesse constantepour la postérité mâle et femelle, et pour les descendans del'un et de l'autre sexe.

Aussi il y a eu plusieurs lettres expédiées, et plusieurs juge-mens rendus en faveur des intéressez. Premièrement, il y aune sentence du prévost d'Orléans du troisième octobre 1501,une autre du baillv de Chaumont en Bassigny du 27 jan-vier 1525, pour la conservation des priviléges de la famille dela Pucelle.

En conséquence des lettres d'anoblissement de l'an 1429,on expédia à Roiien des lettres patentes au mois d'octobre1550, adressées aux baillis d'Orléans, de Blois, de Chaumanten Bassigny, et de Caèn, qui furent registrées à la Chambredes comptes de Paris le dernier avril 1551, signé Petremol.En voicy les termes : Déclaration d'anoblissement pour Robert leFournier, baron de Tournebu, et Lucas du Chemin, sieur duFeron, son neveu, pour eux et leurs parens, issus et descendus dela lignée de la Pucelle leanne Day, de Dompremy, près de Vaucou-leurs, au bailliage de Chaumont, lacques Day, son père; Isabelle,sa femme, mère de ladite Pucelle, ensemble de tout leur lignage,Postérité et lignée.

(x) De gestis Joanne sirginis Francie' iil 'ri quatuor. Venundantur Paràii iJoanne de Porta, in-4e de 68 if. non chiifr8s.

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Sur cela la Chambre des Comptes de Paris donna commis-sion, le 20 octobre 15 5o, aux baillis et prévosts de Chau-mont en Bassigny, d'Orléans, de Blois et de Caén, pourinformer de ceux qui estoient de la parenté de la Pucelle, eny appcllant les advocats et les procureurs de Sa Majesté.

On fit ensuite deux enquestes : l'une par Pierre Berruier,lieutenant général du bailly d'Orléans, le 4 novembre 15 50l'autre par Pierre André, lieutenant général du bailly deCaén, le 13 janvier suivant. Et on trouva que Robert leFournier, baron de Tournebu, receveur des tailles en l'électionde Caén, où il demeuroit, estoit fils de Jacques le Fournier,grenetier du grenier à sel de Chasteaudun et receveur destailles en cette élection, et de Marie de Villebresme, son pèreet sa mère, fille de François de Villebresme, receveur didomaine d'Orléans, originaire de la ville de Biais, et deCatherine du Lis, fille de Pierre du Lis et frère de laPucelle d'Orléans: et que Lucas du Chemin de Cesny enCinglais avait épousé Jeanne le Fournier, soeur dudit Robert.

Il y a deux arrests des commissaires des francs-fiefs, donnezà Paris en la Chambre du thrésor le 13 aoust 1551 et le29 juillet 1553, qui appuyent cette noblesse, et qui mettenthors de Cour Robert le Fournier et Lucas du Chemin, commeexempts du droit des francs-fiefs.

Elle est aussi confirmée pour tous les descendans de la racede la Pucelle en ligne masculine et féminine, par lettrespatentes données f Paris le 17 juin 1555, obtenués par Jeanle Royer, fils de Medard le Royer et de Marguerite de Voi-seul, fille de Jean de Voiscul, fils de Domange de Voiseul, filsde J . de Voiseul et d'Ameline Ramée, soeur d'Isabelle Ramée,mère de la Pucelle d'Orléans.

Robert le Fournier, baron de Tournebu, et Charles leFournier, son frère, sieur de Boisthenon, lieutenant généraldu vicomte de Can, obtinrent du roy Henry II des lettrespatentes données à Fontainebleau le 2 juillet 15 56, signéesBourdin, adressées aux généraux des finances et aides de

Paris, de Roùen et de Montpellier, au bailly de Roflen et âtous autres baillis, seneschaux et prévosts. Elles contenoientque ceux qui justifieroient estre de la parenté de Jeanne Day,tant en ligne masculine que féminine, seroient maintenuscomme nobles, nonobstant la déclaration donnée â Amboisele 26 mars 15 5 5 avant Pasques, par laquelle le privilégeestoit restraint pour ceux seulement qui seroient descendus depar le père ou par les frères de la Pucelle, en ligne masculineet féminine. Mais c'estoit en cas que les prédécesseurs desimpetrans du côté paternel, et dont ils estoient issus enligne droite, comme aussi ceux du côté maternel de la racede ladite Jeanne Day, eussent vécu noblement. Les éluset les paroissiens de leur résidence donnèrent leur consente-ment sur cela, et attestèrent que cette noblesse estoit sansdérogeance.

Le parlement de Roùen donna un arrest le dernier juin15 6 5, en faveur de Lucas du Chemin, sieur du Féron, appel-lant; le procureur général du Parlement, prenant la causepour le procureur général de la Cour des aides, intimé.

Ce privilége est encore compris dans les lettres patentesdonnées â la Rochelle le 15 septembre 1565, dressées surles mémoires de M. Nicolas le Comte, seigneur de Dracque_ville, maître des requestes de l'hostel du Roy.

Jean et Nicolas du Chemin, enfans de Lucas du Chemin,sieur du Feron, eurent en leur faveur un arrest des commis-saires des francs-fiefs, assemblez â Paris le 19 août 1576.

Le conseil privé donna un arrest le 3 février i 8o pourJean Marguerie, sieur de Sorteval, élu en l'élection de Caènpour Adam Dodeman, sieur de Placy; pour Jeanne Mar-gucrie, sa femme; pour Jacques Fauvel, sieur de Fresnay,lieutenant en l'amirauté de France, au siège d'Oistrehan;pour Charles Noël, sieur de Demouville, et autres, descendusde Jeanne le Foui-nier, et de ses soeurs issuis de Marie deVillebresme, fille de Catherine du Lis, descendué de Pierredu Lis et de Jeanne de Proville, son père et sa mère. Le pro-

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cureur général du Parlement de Rouen et les élus de Caénestoient défendeurs. Ils obtinrent encore des décharges pourles entrées des villes contre les échevins et les syndics deslieux de leur demeure.

Le bailly de Vitry donna une sentence le 16 aoust 1585pour les descendans de Jean Romée de Vouton, frère d'IsabelleRomée, mère de la Pucelle d'Orléans ; sçavoir Estienne leFévrc, élu de Chalons, fils de Jean le Févre, docteur en méde-cine en l'Université de Reims, et de Jeanne Marquin (i), filled'Estienne Marquin et de Marguerite de Pertes, fille de Coletde Pertes et de Marguerite Romée.

Ainsi Charles Il, duc de Lorraine, fit expédier des lettres âPontamouson, le so juillet 1596, pour Jean le Royer, sieurde Benecqueville (2), lieutenant des traites foraines doma-niales au bureau de Vaucouleurs, et pour Médard le Royer,et Marguerite de Voiseul, petite-fille d'Amclinc Roi-née, tantematernelle de la Pucelle d'Orléans Ces lettres confirmoient enl'état de noblesse les descendans des parens de la Pucelle enligne masculine et féminine.

Ce fut aussi en faveur de cette noblesse que les commis-saires des francs-fiefs donnèrent un arrest le 22 juin 1599 duconsentement du procureur général, pour Guillaume le Ver-rier, sieur de Tourville (j), assesseur en la vicomté de Valon-gnes, parce qu'il avoit épousé Denise du Chemin, fille deLucas du Chemin, sieur du Feron, et de Jeanne le Fournier,fille de Marie de Villebresme, fille de Cadierine du Lis, fillede Pierre du Lis, frère de la Pucelle.

Ce fut encore pour l'appuyer que Charles Baillard, sieur deFlamets, lieutenant criminel du bailly de Caux à Neufchâtel,obtint des lettres patentes du roy Henry IV le dernierjuillet 1603, pour estre maintenu en la qualité de noble et

(i) 11 faut lire Marguin.(z) Bumiqueville, ferme, commune de Vaucouleurs (Meuse).() Touille, en Normandie.

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d'écuyer, â cause de sa parenté avec la Pucelle d'Orléans. Ilestoit fils de Germain Baillard, élu en l'élection de Neuf-chastel, et de Madeleine Garin, fille de Robert Garin etd'Anne Patris, fille d'Esticnne Patris, docteur et professeuraux droits en l'Université de Caén, conseiller au Parlementde Roùen et garde des seaux de cette Cour, natif de Beau-caire, en Languedoc, et de Jeanne le Fournier, fille deJacques le Fournier, et de Marie de Villebresme, fille deFrançois de Villebresme et de Catherine Day, fille de PierreDay ou du Lis, frère de la Pucelle. Ces lettres ayant estéenregistrées â la Cour des aides de Normandie le 30 oc-tobre 1604, elle ordonna que l'impetrant jofiroit du privilègede noblesse par provision, et que cependant rembntrancesseroient faites au roy, sur la qualité des mesmes lettres. Maiselles furent enregistrées définitivement le 29 marsen faveur de Pierre Baillard, fils de Charles, et son succes-seur en la charge de lieutenant criminel à Neufchastel,et l'arrest d'enregistrement suivy d'une sentence des élusde Neufchastcl du 3 juin suivant, par laquelle il estoitdit qu'ils joiiroient du privilège de noblesse, â cause de laPucelle.

Ce fut pareillement à ce sujet que l'on expédia des lettrespatentes â Paris le premier aoust i6o8, enregistrées à laCour des aides de Roûen en la mesme année, pour Thomasde Troismons, sieur de la Marc, conseiller au presidial deCaen, parce qu'il avoit épousé Charlotte Ribaut, fille de JeanRibaut, sieur du Mcsnil Saint-Tore, receveur des décimes audiocèse de Bayeux, et de Madeleine Patris, petite niepcc de laPucelle.

Le roy Loi.iis XIII accorda des lettres patentes données âParis le 25 octobre 1612, à Charles du Lis, conseiller etadvocat général à la Cour des aides de Paris, et à Lucas duLis, conseiller, notaire et secrétaire de Sa Majesté, qui sedisoient de la race de la Pucelle. L'enregistrement en futfait au Parlement de Paris le iS décembre, et â la

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Cour des aides le 30 des mesmes mois et an. Ce qui fut suivyd'un factum qu'ils publièrent pour faire cannoître leur origineau public.

Gilles Hallot, sieur de Martragny, advocat du roy aubailliage de Cadn, eut de semblables lettres, â cause de Char.lotte Bourdon, sa femme, descendué de la race de la Pucelle.Elles furent vérifiées à la Cour des aides de Rofien l'an 1625,pour jo.iir du privilège de noblesse, avec sa femme et leursenfans, mais non pas par ceux qui sortiroient d'un secondmariage, s'il y convolait.

Robert le Comte, sieur de Saint-Evrout, qui avait épouséAnne de Troismons, fille de Charlotte Ribaut, dont il a estéparlé, obtint en sa faveur un arrcst de la Cour des aides,séante â Caèn, le douzième juin mil six cens quarante.

Par arrestdu Conseil d'Estat, tenu â Paris le 31 may 166,Jean-François Hallot, sieur de Martragny, advocat du roy aubailliage de Cadn, fut déclaré noble, comme descendu parCharlotte Bourdon, sa mère, en ligne féminine de la race dela Pucelle, estant fille de Guillaume Bourdon, sieur deRoquereul, contrôleur des finances en la généralité de Caèn,et d'Antoinette Ribaut, soeur de la mesme Charlotte Ribaut.

Et par autre arrest des commissaires du Conseil assemblezà Paris l'an 1667, donné en exécution de la déclaration duroy du 22 mars 1666, Philippes Baratte, sieur de Vergenetté,de la paroisse de Fontaines-Hal bout; Lotus Dotiesy, sieur deCaumont, et Jean Doûesy, son frère, sieur d'Ardaine, de laparoisse de Saint-Loup-de-Fribois, dans l'élection de Falaise,généralité d'Alençon, ont esté maintenus dans la noblesse dela Pucelle d'Orléans, comme mariez ou descendans de gensmariez, avant la déclaration du roy Louis XIII, donnée enjuin 1614, mentionnée cy-dessus.

Il y a encore plusieurs autres arrests et sentences quidéclarent nobles les parens de la Pucelle, tant ceux qui por-taient le nom du Lis que ceux mesmes qui portoient d'autresnoms de diverses familles.

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Le P. Vignier (s), prestre de l'Oratoire, auteur d'uneHistoire de Lzraine, fondé sur un manuscrit qui estoit à Mets,et qui contenait les actions de la Pucelle d'Orléans, avancequ'elle a esté mariée à Gilles, seigneur d'Armoises ; qu'elleen a eu des enfans, et qu'elle n'a jamais esté brûlée qu'enfantôme. Mais ce sentiment est trop nouveau et trop faiblepour donner atteinte à ce que l'antiquité nous a appris ducontraire. Il proteste avoir veu l'original du contract demariage du mesme seigneur d'Armoises, ancien gentilhommelorrain, et de cette Pucelle ; mais cette pièce a sans doute estéfabriquée par ceux qui ont prétendu s'anoblir par une descenteféminine.

Cette noblesse, semblable aux philactères des luifs, s'esttellement étendue, que non seulement les descendans de sesfrères et de ses soeurs, et leurs parens et alliez s'en sontprévaluz; mais mesme la famille de Guyon et d'Aignan deCailly (a), parce qu'ils l'avoient logée dans Orléans : commesi cette héroïne, semblable à l'arche d'alliance, qui apporta desgraces et des bénédictions à Obededon, pour avoir reposéchez luy, leur a dû produire un tel avantage. Ils ont aussi oséprendre pour armes d'argent à trois chérubins de gueules,pour témoigner qu'ils avoient eu part aux révélations de laPucelle, et qu'ils avaient eu communication avec les anges.En un mot, on peut comparer cette noblesse à l'or deMidas, qui convertiroit en pareil métail tout ce qu'il touchait,parce que tous ceux qui ont pis approcher cette Pucelle sedisent nobles.

Remarquons maintenant les principales circonstances de savie et de sa mort. Français le Maire, conseiller au présidial

(r) Véritable origine dot maisons d'Alsace cl de Looraine, Paris, Gaspard Ms-foras, in-folio. - Voir sur la dame dcs Armoises le Mercure de Franco, et unarticle du Figaro du 7 octobre r8. (Extrait de I'As?seneum,) - Hist. de Renéd'Anjou, par Lecoy de ta Marche.

(z) V. Quicherat, Procès, ronc V, P. 342, les lettres de noblesse accordées àGuy de Cailly pour les services du récipiendaire.

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d'Orléans, dit que cette Pucelle fut livrée à Pierre Cauchon,évesque de Beauvais, le 3 juillet 1430, qui luy fit son procezen langue latine, assisté de Jean Magistri, de l'Ordre des frèresprescheurs, vice-gérent de Jean Graverant, inquisiteur généralde la foy; d'Estienne Estiver (s), officiai de Bayeux, faisant lacharge de promoteur en cette cause, Ci deux notaires aposto-liques, signèrent ce procez.

Cet évesquc prit sur cette affaire l'avis de trente-deux jugesecclésiastiques, tant du corps du Chapitre de l'église cathé-drale de Roien que de docteurs en théologie de l'Universitéde Paris et d'advocats de l'eschiquier de Norniandie. Ensuite,il remit la prisonnière entre les mains des juges séculiers deRotien, qui la condamnèrent à estre brûlée toute vive dansune cage de fer, ce qui fut exécuté le dernier may 5435, dansla place dite aux Veaux de cette ville de RoLïen, en laparoisse de Saint-Michel. Elle avoit esté prise à Compiègne,livrée par Guillaume de Flavy (2) à Jean de Luxembourg, quila vendit aux Anglois. Ils en chantèrent le Te Deum, et firentdes feux de joye de sa mort dans Paris, tant ils estoientanimez contre Cette innocente, niais très-vaillante fille. Lapreuve s'en voit dans les registres du Parlement de Paris.

J'ay leu un manuscrit fort curieux, qui est un journal faitpar un bourgeois de Paris, depuis Fan 5409 jusques en l'an1444. 11 y a un chapitre qui commence par ces ternies Le30 may 1431, leanne la Pucelle fut brûlée à Rofeu. Et ensuiteFut fait un prescisement, elle estant en un eschaffaut vestu d'unhabit d'homme, par lequel prédicateur Iny fut ddclarê devant tout lepeuple les grands maux qu'elle noit commis, et les fausses erreursqu'elle avoit eues contre la J', de quoy elle ne s'effraya point, ainsrépondit hardiment aux articles qu'on luj' proposa, nonobstant queles clercs de l'Université de Paris qui là estoient la priassent

(z) Jean d'Estivet.(2) V. Jeitne d'Arc et Guillaume de Flavy, par Z. Rendu. Compiègne,

Dclhaye, in-8e.

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qu'elle se repenhist et revL)cast son erreur, et que tout luy seroit par-donné, sinon elle seroil devant tout le peuple arse, et son ornedamnée, boy montrant l'ordonnance et la place où le feu devoit estrefait. Quand elle rid que c'esloit certes tout de bon, elle cria mercy,et se rci'oqua de bouche, et fut vestué d'habit de femme; mais aussi-tost elle commença son erreur comme devant, demandant sonhabillement d'homme ; et tantost elle fut de tous jugée â mourir, etliée à une attache qui estoit sur ledit escha/faut, qui estoit fait depiastre. Le feu y fut mis, dont elle fut bien-tost estouffée et sa robetoute asse. Puis le feu fut tiré arrière, et fut veui de tout le peupletoute nué, pour les doutes dudit peuple, et quand ils l'eurent assqet à leur gré veué toute morte, le bourei retnit le feu dont elle futtoute consommée et réduite en cendre, laquelle fut toute jetiée en lasrivière pour les sorceries qui s'en fussent peu ensuivre. Assç avoit là,et ailleurs qui disoient qu'elle estoit mariée; et pour son droit bon-neur, autres disoieni que non, et que mal avoit fait qui l'assit gardée.

Depuis, d'autres personnes qui estoient abuse d'elle creusentfermement que, par sa sainteté, elle s'estoit eschapée du feu, et qu'oneut arse une autre, cuidant que ce fust elle-niesme.

En l'an 1440, le Parlement et l'Université firent venir à Parisune femme suivant les gens de guerre, que plusieurs croyoient estreleanne la Pucelle, et pour cette cause â Orléans avoir esté honorable-ment receué. laquelle femme fut ,nonstr,e an Palais sur la pierrede marbre en la grande court, et là fut preschée, et toute sa vie, ettout son estat; et recognut qu'elle n'estoit pas pucelle et qu'elle avoitesté mariée.

M. Halley (s), fondé sur l'opinion qu'ont eu Varan etHordal (a) des mérites de Jeanne la Pucelle, dit, conjointe-ment avec ces deux autheurs, dont l'un a écrit sa vie en prose,et l'autre en vers, que si son corps fut brislé, son coeur, quien estoit la plus noble partie, triompha des flammes comme

(1) Ant. Halley, professeur d'éloquence à l'Université de Caen.(2) Hordal, professeur de l'Université de l'ont-t-Mousson, auteur k: He-

roi ne, etc., D.urc, 1612.

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la salamandre, et qu'il ne put estre consommé du feu. Voicyles termes dont il se sert dans l'épigramme qu'il a publiée, quiluy fit remporter les premiers prix des Palinots de RoCien etde Caén, au Puy de la Conception

Co, unum, cor virginci paorfrale decorisSanc!ius, illgsum cil, et oza,,ti ex igne !riumphai.

M. Malherbe la compare â Hercule, tant pour ses exploitsmilitaires que pour son genre de mort.

L'ennemy, bus droits violon!,Belle amazone, en vous brûlant,Témoigna son anse perjtde:Mais 1€ destin n'eni paint de tort;Celle qui sécu! comme AlcideDevoli mourir comme il est mort.

M. de Mezeray, historiographe de France, dit en la vie duroy Charles VII qu'il anoblit la Pucelle Jeanne Darc, sonpère et ses trois frères, et tous leurs descendans, niesme parfilles; qu'il changea le nom de leur race, qui estoit Darc, enceluy du Lis, et qu'on rapporte que son coeur se trouva toutentier parmy les cendres, et qu'on vit une colombe blanches'envoler du milieu des flammes, pour marque de son inno-cence et de sa pureté.

C'est ainsi que prit fin cette héroïne, que les historiens deFrance ont comparée à Debora, à Judith et à Abigaïl, etautres femmes fortes. Mathieu dit sur les décisions de Guy,pape, quest. 84, 4u'elle prit les armes par inspiration divine, etqu'elle rétablit le royaume de France dans son lustre. Le prési-dent Chassanée (i) dit qu'elle releva le courage des Français quisembloient abbatus, et qu'elle rétablit leur gloire et leur liberté.

Le cardinal Baronius, dans le supplément de ses annales,rapporte qu'elle finit sa vie avec un courage plus que mâle,l'an 1430 OU 1431.

(s) Lii,. ,o, 2 part., Ca!al. glor. s,sundi.

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Gaguin (i), ministre général des Mathurins, luy donne ungrand éloge, décrivant sa mort en peu de paroles: Obiit PuellaDominitae pielatis anno 1431, mense inaio.

Paradin (2), doyen de Beaujeu, représentant l'enseigne de laPucelle d'Orléans, qui contenoit l'épée accompagnée d'unecouronne et de deux fleurs de lis, dit que c'est un perpétuelmonument du secours qu'elle apporta â la France par inspira-tion divine. Consilio firmata Dei, etc. Elle estoit, ajoûte-t-il,aussi chaste en son corps qu'innocente du crime de sorcellerieque les Anglois luy imposèrent, qui, â tort, la firent brûlertoute vive dans Rofien.

Le crime qu'on luy imputoit â l'Inquisition, malgré sapiété exemplaire, estoit d'avoir porté l'habit d'homme, etd'avoir quitté celuy qui appartenoit à son sexe, ayant ainsicontrevenu au décret du Deuteronome (3): Non indueturmulierveste virili, nec vir utetur veste fœmined abonunabilis enim apudDentn qui Jacit hec. Les autres crimes qu'ils luy imposoientestoient l'hérésie et une feinte virginité.

Du Haillan (4) écrit que cette Pucelle s'appelloit Jeanne;qu'elle estoit née à Vaucouleurs, en Loraine, fille d'un labou-reur, nourie â la campagne avec les brebis et les moutons;qu'elle avoit vingt-deux ans quand elle fut menée au roy;que luy ayant dit qu'elle venoit vers luy inspirée de Dieu,avec promesse qu'elle chasseroit les Anglois de la France, illuy donna une armée, avec laquelle elle secourut Orléans, quiestoit réduit â l'extrémité par un siège de sept mois, si bienqu'elle contraignit les ennemis de le lever. Le miracle decette fille, soit que ce fut, dit-il, un miracle composé etaposté, ou véritable, éleva les coeurs du roy, des seigneurset du peuple, etc. Cette invention de religion feinte et

(t) Robert Gaguits, Origine et geais Frcsncrrum perspective compendiistn. Paris,André Bocart, 1497, liv. X, fol. Sa.

(2) E'nl'Iirnes et devises héroïques.(3) Cap. 24.

() De l'étal des affaires de France,liv. 1 1 p. 9.

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simulée, ajoûte-t-il, profita tant à ce royaume, qu'elle relevales courages perdus et abbatus de désespoir. Enfin elle fut prisedes Anglois devant Compiègne, et menée à Roûen, là OL sonprocez luy estant fait, elle fut brûlée.

Guy Pape (ï), conseiller au Parlement de Dauphiné, rapportequ'après sa condamnation, pour éloigner son cruel supplice,et pensant modérer la passion de ses ennemis par quelqueespèce de miséricorde, elle feignit estre grosse : Illa utbostes misericordid frangeret, pra'gnanteni se esse si?nulavd in,l y''etn menses servala ad pat mm ut res voua apparriil, crudeliterexusla est.

C'est ce qui a peut-estre donné la pensée à Hector Boétiusde ne parler pas favorablement de sa chasteté, lorsqu'il ditNonullos existimasse catit quoad virginilatem servae'il inviolatam,numquam adver.nx fortuno' insidiis succubuisse; al posiquam conta-ininasset, in ejusmodi incidisse nusla.

Les principaux autheurs qui ont écrit ses faits généreux etqui ont refuté les crimes qu'on lu)' imposoit par calomniesont Nigellus, Icari Bouchet, Eneas Sylvius, depuis pape,appellé Pie II; saint Antonin, archcvcsque de Florence ; Paullove, évesquc de Noccra; Gilbert Gencbrad, archevesqucd'Aix ; Arnaud de Pontac, évesque de Basas; Charles deBourgueville, sieur de Bras, lieutenant général du bailly deCaèn; lacques Meyer, Flamand; Jean Neder, Jean Naucler,Jean Gerson, Delrio; les pères lean Mariana, Caussin, Petauet Girard frères, et autres qui l'ont estimée sainte et martyre.

Aussi sa mémoire fut purgée, selon Jean du Tillet (2),greffier du Parlement, à la requisition de Jean et Pierre Day,ses frères, par Jean Juvenal des Ursins, ar±evesque de Remis;par Guillaume Chartier, évesque de Paris, et par RichardOlivier, évesque de Constances, juges déléguez par un rescrit

(t) In Deci,. ucL, 84.(2) afém,ires et r,c)xrctcs de Jean du Tiflei, 2e édition. Troyes, 18, in-8',

P- '34.

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du pape Calixte III, lesquels donnèrent un jugement sur lajustification de son innocence le 7 juillet 1456, dans Roien,où elle avoit esté condamnée. Il portoit que les informationsfaites contre cette innocente Pucelle cstoient fausses, etcomme telles cassées, et elle déclarée pure et innocente de toutce qu'on lui avoit imputé, et la sentence qui l'avoit condamnéedéclarée nulle.

La devise qu'on luy attribué convient bien â son genrede mort. C'est un phénix qui se brûle sur un bucher avec cemot : Invilo funere vivei, qui désigne que sa mémoire demeu-rera immortelle.

Au reste, la piété exemplaire qu'elle a fait paroitre en savie et en sa mort a esté assez puissante pour détruire lacalomnie de ses ennemis. Ce vice horrible et exécrable,selon l'expression du bien-heureux pape Pie V, a fait plus dehonte â ses audieurs qu'il n'a fait de mal à cette illustrePucelle, dont l'innocence, faussement attaquée, a esté de lanature de la palme qui l'a couronnée, laquelle se relève âmesure qu'on l'abaisse.

Les habitants d'Orléans furent si rcconnoissans de laliberté qu'elle avoit conservée â leur ville, qu'ils l'ont repré-sentée sur leur pont. Et Isabeau Romée de Vouton, sa mère,y estant allée dcmçurer l'an 1438, les échevins luy fournis-soient ses nécessitez, avec la somme de deux écus et dem y parmois. Elle mourut l'an 1458, et Pierre du Lis, son fils,obtint la mesme pension, comme il se voit par les comptesde Gilles Marchoisne et d'Hervé Paris des années 1436, io,1457 et 1458. Le mesme Pierre du Lis eut deux fils portans lenom de Jean; l'aîné épousa Macée de Vezines, selon leurcontrat de mariage passé devant les notaires du Chasteletd'Orléans le 26 mars avant Pasques 1456.

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TITRES, EXTRAITS DES REGISTRES DE LA CHAMBRE DES COMPTES,QUI CONCERNENT LA PUCELLE D'ORLÉANS, COMMUNIQUEZPAR M. D'HEROIJVAL (i).

Extrait du compte 13 et dernier de maistre HemonRaguier, thrésoricr des guerres du roy, des receptes etdespenses par luy faites, à cause de son dit office, depuis lepremier de mars 1424 jusques au dernier jour de Sep-tembre 1433.

L'estat du voyage fait à Reims pour le sacre et couronne-ment illec du roy nostre seigneur.

Aux capitaines et chicfs de guerre cy-après nommez. Lettrespatentes dudit seigneur, données au cliastcl de Gien-sur-Loirele vingt-deuxiesme jour dudit mois de septembre oudit an1429, adressées à maistre René de Boullegny, général, con-seiller sur le fait et gouvernement de toutes finances.

A lehanne la Pucelle la somme de 243 livres tournois,forte nlonnoye, et trente ducats d'or, qui es mois d'aoust etseptembre 1429, de l'ordonnance et commandement du roynostre seigneur, luy a esté plusieurs fois baillée et délivrée parledit thrésorier, pour commettre ou fait de la despenseordonnée par elle faire ou voyage fait par ledit seigneur àReims, pour le fait de son sacre et couronnement; comme ilappert par lettres patentes d'iceluy seigneur, données auchastel de Gien le 22 e jour dudit mois de septembre ouditan 1429, adressantes à maistre Jean Regnier de Boullegny,général, conseiller sur le fait et gouvernement de toutesfinances, et par lui expédiées le 23e jour dudit mois de sep-

(t) De Vyon d'IIérauval, auditeur des comptes, avait recueilli grand no:t,rde documents sur Jeanne d'Arc. Godcfeoid en profita pour l'Histoire de Charleà Vil.

Paris, Itop. royale, 166t, in-folio.

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tembre, cellui an, par lesquelles est mandé par ledit seigneurque en les rapportant et quittance sur ce de Mathelin Raoulordonné â faire la despence de ladite Tehanne tant seulement,ladite somme soit alloûée es comptes et rabattuë de la receptedudit thrésoricr par Messieurs des comptes, sans aucun con-tredit ou difficulté; nonobstant que ladite quittance précèdeen datte lesdites lettres, et quelsconqucs ordonnances, mande-mens on deffences à ce contraires. Pour ce par vertu desditeslettres et quittances cy rendus à ladite somme de 243 livrestournois et trente ducats d'or, dont faut rabattre 151 livrestournois forte monnoye, trente ducats d'or.

A lehanne la Pucelle la somme de 236 livres tournois fortemonnoye, qui es mois d'aoust et septembre 1429, du coin-mandement et ordonnance du roy nostre seigneur, luy a estébaillée et payée par ledit thrésorier. C'est â sçaavoir pour uncheval que ledit seigneur luy fit bailler et délivrer à Soissonsoudit mois d'aoust, trente-huit livres dix sols tournois, pourun autre cheval que semblablement ledit seigneur luy fitbailler et délivrer à Senlis oudit mois de septembre, six-vingtsdix-sept livres dix sols tournois. Et â Reims, que iceluyseigneur luy fit bailler et deslivrer, pour bailler à son père,soixante livres tournois, comme il appert par lettres patentesdudit seigneur, données ou chaste! de Giem le 22 e jourdudit mois de septembre oudit an 1429, adressantes à maistreRegner de Boullegny, général, conseiller sur le fait etgouvernement de toutes finances, et par luy expédiées le23 e jour dudit mois de septembre celluy an, etc., deux censtrente-six livres tournois forte monnoye.

Aux chefs et capitaines de guerre cy-après nommez, lasomme de deux mille quatre cens neuf escus d'or, etc. Sep-tembre 1429.

A Ichanne la Pucelle, pour despence, 40 escus.Aux personnes cy-après nommées, la somme de 450 livres

tournois qui ou mois d'avril 1429 aprs Pasques, de l'ordon-nance et commandement du roy nostre seigneur, a esté payée

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et baillée par ledit thrésorier c'est à sçavoir à Ichan de Niés,pour la despense de la Pucelle, aoo livres tournois.

Au rnaistre armeurier, pour un harnois complet pourladite Pucelle. Audit lehan de Més et son conipaignon,pour luy aider t avoir des harnois, pour eux armer et habiller,pour estre en la compagnie de ladite Pucelle, six-vingts cinqlivres tournois.

Et à Hauves Poulvoir, paintre, demourant à Tours, pouravoir paint et baillé estoffes pour un grant estandart et unpetit pour la Pucelle, vingt-cinq livres tournois.

Comme il appert par lettres patentes du roy nostrc ditseigneur, douées â Chinon le t oc jour de nlay oudit an 1429,adressées à maistre Regnier de Boullegny, général conseillersur le fait et gouvernement de toutes finances, et par luyexpédiées le i5c jour dudit mois de may oudit an, par les-quelles est mandé que en les rapportant et quittances sur ccdes dessus dites tant seulement, ladite somme soit alloiiée èscomptes, et ribatuë de la recepte dudit thrésorier par Mes-sieurs des comptes, sans aucune difficulté ou contredit,nonobstant quelconques ordonnances, mandernens et deffencesâ ce contraires. Pour ce par vertu desdites lettres et quittancecy rendus, ladite somme de 410 livres tournois, dont fautrabattre cent livres tournois pour ledit armeurier, duquel n'estcy rendu aucune quittance; pour ce, cy seulement trois censcinquante livres tournois.

EXTRAIT DE LA LETTRE DE GOY XIV, SIRE DE LAVAL, ÉCRITEAUX DAMES DE LAVAL ET DE VITRÉ, SA MÈRE ET SON

AYEULE.

Mes très-redoutées dames et mères, depuis que je voutescrivis de Sainte-Catherine de Fierbois vendredy dernier,

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j'arrivay samedy â Loches, etc., et le lundy me party d'avecle roy, pour venir â Selles en Berry, â quatre lieues de Saint-Aignan, et feit le roy venir au-devant de luy la Pucelle quiestoit auparavant â Selles : disoient aucuns que avoit esté enma faveur, parce que je la veisse, et feit ladite Pucelle très-bonne chère, â mon frère et â moy, armée de toutes pièces,sauve la teste, et la lance en main, et après que feusmesdescendus â Selles, je allai à son logis la voir, et feist venir levin, et me dist qu'elle m'en feroit bien-tost boire â Paris; etsemble chose toute divine de son fait, et de la voir et de l'oèir,et s'est partie aux vespres de Selles pour aller â Romorentin àtrois lieuès en allant avant et approchant des advenués, lemareschal de Boussac et grand nombre de gens armez et descommunes avec elle, et la veie monter à cheval armée touten blanc, sauf la teste, une petite hache en sa main sur ungrand coursier noir, qui à l'huis de son logis se demenoittrès-fort, et ne souffroit qu'elle montast; et lors clic dist,menez-le â la croix qui estoit devant l'église auprès auchemin, et lors elle monta sans ce qu'il se meust, comme s'ilfeust lié, et lors le tourna vers l'huis de l'église qui estoitbien prochain, et dist en assez voix de. femme: Vous lesprestres et gens d'église, faites processions et prières â Dieutirez avant, son estandart ployé que portoit un gracieux page,et avoit sa hache petite à la main, et un sien frère qui estvenu depuis huit jours, partoit aussi avec elle tout armé enblanc, etc. Le roy s'efforce à mc vouloir retenir avec luy,jusques à ce que la Pucelle ait esté devant les places Angleschesd'environ Orléans, où l'on va mettre le siège, etc. Escrit àSelles le mercredy 8 juin, etc. Vos humbles fils Guy et Andréde Lavai, et Guy de Lavai.

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(1) EXTRAIT DE L'hISTOIRE D'ANGLETERRE, D'ESCOSSE ETD'IRLANDE, PAR ANDRÉ DU CIIESNE, G(-OGRAPIIE DUROY, IN-FOLIO. PARIS, 1641, IIENRY LE GROS.

Ceste Pucelle avoit trois frères appellés Jacquemin, Jean etPierre, dit Perrelo, lesquels le roy Charles annoblit avecqueleur postérité, tant masculine que féminine, par ses patentesen forme de charte données à Mehun-sur-Yewre au mois dedécembre 1429, vérifiées le 16 de janvier ensuivant en laChambre des Comptes de Paris transférée pour lors à Bourges;et non seulement voulut qu'ils portassent pour leurs armoiriesdeux fleurs de lys d'or en champ d'azur, séparées l'une del'autre par une espée tenant une couronne à la pointe, ainsique tesmoignent mesmes les lettres du roy d'Angleterre, etqu'au lieu du surnom Dare qu'ils avoient de par JacquesDare, leur père, ils fussent doresoavant surnommées du Lys,comme si la couronne de France et les lys eussent, par lesexploicts et pronésse de la Pucelle, leur soeur, et des leurs,repris leur ancienne splendeur et dignité. Mais aussi le ducd'Orléans ayant depuis esté délivré de prison, comme nousremarquerons en son lieu, donna particulièrement à Pierreune isle de deux cens arpens de terre, assise sur la rivière deLoire, vulgairement nommée l'Isle aux Boeufs, comme ilappert d'un article de compte-rendu par maistre Lobin Gaffarden la Chambre des comptes, l'an mil quatre cens quarantequatre, en ces mots, qui servent aucunement à l'illustration del'histoire

Laquelle isle mondil seigneur le duc a donné d messire Pierre du

(s) Nous avons ajouta au texte de G. de la Rogue cet extrait d'un ouvragerare de Du Chesne non cité par Brunet.

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Lys, chevalier, ouye la supplication dudit messire Pierre, contenantque pour acquitter si loyauté envers le roy, nosire dit seigneur etmonsieur le duc d'Orléans, il se partit de son pays pour venir auservice du roy nostre dit seigneur et de monsieur le duc, en lacompagnie de Jeanne la Pucelle, sa soeur, avecque laquelle jusques âson absentement, et depuis jusques â présent, il a exposé son corpset ses biens audit service, et au fait des guerres du roy, tant â larésistance des anciens ennemis du royaume, qui tindrent le siègedevant la ville d'Orléans, comme â plusieurs voyages faits et entre-pris par le roy nosire dit seigneur, et ses clfs de guerre et autre-ment en plusieurs et divers lieux. (Page 86 r.)

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BIBLIOGRAPhIE DES OEUVRES DE G. DE LA ROQUE.

Les blasons des armes de la royale maison de Bourbon, et deses alliances, recherchées et illustrées de discours généalo-liques, par le sieur de la Rocque (sic). Le tout gravé entaille doulce. Paris, Pierre Ftrens, 1626, pet. iii-fol.

Histoire généalogique des maisons nobles de la province deoimandic, avec permission du rov, suivant les lettres de

S. M. en date du 21C jour de juillet 1653. Coco, MonoYvon, 1654, in-fol.

11 n'en o paru que dcs fragments du s ce volume, contenant trois généalogies.

Histoire généalogique de la maison d'Harcourt. Paris, Seb.Marbre-Cramoisy, 1662, 4 vol. in-fol.

Le même, 5664, 1668, 4 Vol. in-fol.Traité de la noblesse, de ses différentes espèces... Paris,

Eslienne MicJ,allel, 1678, in-40.

Le même, Rouen, 1720, in-40, in-8°.

Le même, 3e édition. Rouen, 5734, in-40.Cette dernière édition, qui est la meilleure, contient de plus que les précé-

dentes le Traité du blasou, publié è pari è Paris, en 1673 et iéSi ; le Tratéé5 ban et de l'arriére-ban, es 1676, et le Traité de l'origine des noms et surnoms,en 1681, tous trois de format in-12.

Lettre du sieur de la Roque aux intéressés en l'histoire gé-néalagique des maisons nobles de Normandie. S. 1. 1653,in-fol.

In gentiles imagines, sive insignis Caroli a Sancta Maura ducisMontcuzerii, lemma epigraphicum. S. 1., 166, in-4°.

TABLE DES MATIÈRES

PRÉFACE ..............................................De la noblesse de Jeanne d'Arc, dite du Lys, Pucelle

d'Orléans. ..........................................liTitres, extraits des registres de la Chambre des

Comptes, qui concernent la Pucelle d'Orléans,communiquez par M. d'Flerouvai ..................32

Extrait de la lettre de Gu y XIV, sire de Lavai,écrite aux dames de Lavai et de Vitré, sa mère etson ave ule .........................................lYs

Extrait de l'histoire d'Angleterre, d'Escosse et d'Ir-lande, par André du Chesne, géographe du roy... 36

Bibliographie des OEuvres de G. de la Roque .... .. 38

IMPRIMÉ A ORLÉANS PAR G. JACOB

Le Se jour de ,,iai 1878

POUR HERLUISON, LIBRAIRE

A ORLÉANS

Tiré à soixante exemplaires, dont quatre sur peau de vélin et un sur chine