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COURS TERMINALES Le Temps PLAN DU COURS I – La nature du temps a) le temps objectif mesurable b) Temps et durée c) Le caractère insaisissable du temps II – Vivre dans le temps a) L’incapacité de l’homme à vivre au présent b) Peur de la mort et divertissement c) Savoir jouir de son temps III – Dépasser l'angoisse du temps a) « La mort n'est rien pour nous » b) L'éternel retour comme manière de choisir sa vie AUTEURS ABORDÉS Saint Augustin, Bergson, Pascal, Kant, Epicure, Nietzsche, Sénèque. REPÈRES Médiat/Immédiat, Objectif/Subjectif, Origine/Fondement, Cause/fin. DEFINITION Du latin tempus : division du temps, période 1) Mesure de la durée obtenue en choisissant comme repère un évènement ou en prenant comme unité la durée d’un mouvement régulier observable. 2) DOCTRINES a – ARISTOTE : nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur. B – KANT : forme a priori de la sensibilité ; forme du sens interne et de tous les phénomènes en général qui sert de fondement à toutes les intuitions. Le temps est d’abord une manière humaine de percevoir. C – PHENOMENOLOGIE ET EXISTENTIALISME : essence du dasein unifiant la conscience par l’accord du passé et de l’avenir à travers le présent. Emmanuelle ROZIER Cours Terminales / Le sujet

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COURS TERMINALES

Le Temps

PLAN DU COURSI – La nature du tempsa) le temps objectif mesurableb) Temps et duréec) Le caractère insaisissable du temps

II – Vivre dans le tempsa) L’incapacité de l’homme à vivre au présentb) Peur de la mort et divertissementc) Savoir jouir de son temps

III – Dépasser l'angoisse du tempsa) « La mort n'est rien pour nous »b) L'éternel retour comme manière de choisir sa vie

AUTEURS ABORDÉSSaint Augustin, Bergson, Pascal, Kant, Epicure, Nietzsche, Sénèque.

REPÈRESMédiat/Immédiat, Objectif/Subjectif, Origine/Fondement, Cause/fin.

DEFINITIONDu latin tempus : division du temps, période1) Mesure de la durée obtenue en choisissant comme repère un évènement ou en prenant comme unité la durée d’un mouvement régulier observable.2) DOCTRINESa – ARISTOTE : nombre du mouvement selon l’antérieur et le postérieur.B – KANT : forme a priori de la sensibilité ; forme du sens interne et de tous les phénomènes en général qui sert de fondement à toutes les intuitions. Le temps est d’abord une manière humaine de percevoir.C – PHENOMENOLOGIE ET EXISTENTIALISME : essence du dasein unifiant la conscience par l’accord du passé et de l’avenir à travers le présent.

Emmanuelle ROZIER Cours Terminales / Le sujet

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Introduction

Qu'est-ce que vivre vraiment intensément ? La vie humaine a deux dimensions :* biologique et son corollaire la mort biologique ; la vérité de l’être humain est

d’appartenir aux êtres vivants* la vie de l'esprit et c'est par rapport à celle-ci qu'il peut vivre intensément ou non...

On parlera de sommeil de l'esprit si cette vie de l'esprit n'est pas intense.

Distinction vivre / exister. vivre sa vie sans intensité peut signifier en rester à la vie des besoinsexister revient à donner sens à son existence et à l'orienter en fonction de ce que l'on pense valable. Penser à sa mort biologique peut permettre un éveil pour devenir enfin vivant. Le temps nous est compté ce qui décuple notre conscience du caractère éphémère des moments vécus. Mais comment donner valeur au présent ?

L’évidence immédiate du temps : le temps fait pour chacun de nous partie de notre quotidien : nous vivons dans le temps, avons des impératifs : nous manquons de temps, devons rendre nos devoirs à temps, ou au contraire ne savons pas comment employer notre temps. le temps peut nous sembler long, dans l’expérience de l’ennui par exemple. Mais notre rapport au temps n’est-il pas plus complexe que cette apparente évidence immédiate du temps ? Intuitivement, nous savons tous ce que c’est que le temps ; mais dès lors que nous cherchons à le définir, des difficulté inextricables surgissent. Cf texte de saint augustin sur les 3 présents.

Temps objectif et temps subjectif : Exemple de cet élève qui lors d’un cours ennuyeux dit : je regarde ma montre, il est 25 ; 20 minutes après, il était la demi. Que nos enseigne cette anecdote ? qu’il y a un conflit entre deux représentations du temps. Le temps objectif, mesurable, celui de la montre et des horloges ; et le temps ressenti, vécu, celui de l’intériorité de la conscience, de la mémoire et du souvenir. Qu’est-ce que le temps exactement ? Le temps est-il une réalité objective, mesurable objectivement ? Ou bien faut-il également prendre en compte la durée subjective, celle que nous éprouvons et qui fait que le même laps de temps peut, suivant les activités que nous pratiquons, sembler plus ou moins long ? lequel de ces deux « temps » est réel ?

L’angoisse de la fuite du temps : cette difficulté de saisir l’essence du temps se redouble si l’on se souvient que notre approche du temps est le plus souvent source d’angoisse, devant le vieillissement, et la mort à venir. Analyse du poème de Baudelaire : « Las ! le temps mange la vieEt l’obscur ennemi qui nous ronge le cœurDu sang que nous perdons croît et se fortifie. »Notre temps est compté : voilà pourquoi il est si difficile pour nous de vivre dans le temps. Peut-on jouir du temps qui nous est imparti en ayant conscience de la mort à venir ? Peut-on vivre au présent ?

Le cours se divisera en 3 parties ; nous essayerons d’abord de cerner la nature du temps. Puis nous verrons s’il est possible pour nous de bien vivre dans le temps. Enfin, ce cours est à relier à ceux sur la conscience, l’existence et la mort. La conscience parce que toute conscience est conscience de soi dans le temps. L’existence et la mort, parce que si nous existons dans le temps, la mort, elle, marque évidemment notre rapport au temps, puisque elle signe la fin de notre temps.

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I - La nature du temps

a) le temps objectif et mesurable.Que le temps passe est une évidence que rien ne semble pouvoir démentir : nous avons l’habitude de gérer notre temps, de respecter (ou non) les impératifs de notre emploi du temps. Nous avons une excellente connaissance du temps parce que depuis toujours nous le mesurons. Cette idée selon laquelle on peut mesurer le temps vient de la division des jours en heures, minutes, secondes, etc. C’est à l’origine pour des raisons pratique et pour des rythmes de travail fondés sur l’agriculture que nous avons pris l’habitude de mesurer le temps. Aussi la première expérience que nous avons du temps est celle d’un temps objectif et mesurable ; c’est le temps des horloges, par opposition à la durée psychologique qui peut paraître plus ou moins longues selon les situations.

Si nous avons découpé les journées en 24 heures, c’est pour suivre le rythme des naturel des jour et des nuits, c’est à dire le mouvement de rotation des planètes. Ainsi, le temps est mesure du mouvement des planètes, c’est pourquoi Aristote définit le temps comme « nombre du mouvement ». Physique, 4.

Ce temps mathématisé est le temps universel, celui de la physique de Galilée et ne Newton. c’est un temps mathématique. Le temps est une grandeur mesurable, susceptible d’ordonner des expériences et de les relier mathématiquement. Exemple : grâce à ce temps mathématique, Galilée a pu établir que la hauteur de chute libre d’un objet est proportionnelle au carré du temps de sa chute (= loi de la chute des corps dans le vide).

Mais ce temps mathématique et universel correspond-il à l’expérience intime que nous avons du temps ? Nous avons vu que du point de vue de ma conscience, le temps n’est pas homogène et continu comme le temps mathématique. Des évènements plaisants sembles occuper un laps de temps bien plus bref que des événements désagréables. Faut-il dés lors opposer deux visions du temps, le temps des choses et le temps de ma conscience ?

b) Temps et duréeBergson nous invite à faire la entre le temps mathématique, découpé en heures et en secondes, et la durée telle qu’elle est ressentie par ma conscience. Le temps est le découpage artificiel que l’intelligence effectue pour les commodités de la vie. Mais ce découpage artificiel, ce calcul, ne correspond pas à l’expérience que fait notre conscience. Pour la conscience il n’existe pas du temps, mais de la durée. Cela ne veut rien dire « une minute », car si je asse cette minute à attendre le résultat de mon permis de conduire ou si je la passe dans les bras de mon petit ami, la durée de cette minute ne sera pas la même !

« quand on veut préparer un verre d’eau sucrée, force est bien d’attendre que le sucre fonde ! »Cet exemple commun illustre bien qu’il existe un temps de la conscience distinct du temps des montres et des horloges.

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DUREE TEMPS

Conscience, intériorité extérieur

Durée vécue par chaque individu singulier Découpage artificiel pour les besoins de la vie

Intuition Intelligence

Continu Discontinu

c) Le caractère insaisissable du temps. Comment dés lors savoir réellement ce que c’est que le temps ? le temps est-il dans les choses ou dans la pensée ? peut-on réellement connaître cet objet qu’est le temps, ou bien sa nature même le rend totalement inconnaissable ?

Texte de Saint Augustin.« Qu’est-ce donc que le temps? Si personne ne me le demande, je le sais; mais que je veuille l’expliquer à la demande, je ne le sais pas! Et pourtant – je le dis en toute confiance – je sais que si rien ne se passait, il n’y aurait pas de temps passé, et si rien n’advenait, il n’y aurait pas d’avenir, et si rien n’existait, il n’y aurait pas de temps présent. Mais ces deux temps, passé et avenir, quel est leur mode d’être alors que le passé n’est plus et que l’avenir n’est pas encore? Quant au présent, s’il était toujours présent sans passer au passé, il ne serait plus le temps mais l’éternité. Si donc le présent, pour être du temps, ne devient tel qu’en passant au passé, quel mode d’être lui reconnaître, puisque sa raison d’être est de cesser d’être, si bien que nous pouvons dire que le temps a l’être seulement parce qu’il tend au néant. [...] Enfin, si l’avenir et le passé sont, je veux savoir où ils sont. Si je ne le puis, je sais du moins que, où qu’ils soient, ils n’y sont pas en tant que choses futures ou passées, mais sont choses présentes. Car s’ils y sont, futur il n’y est pas encore, passé il n’y est plus. Où donc qu’ils soient, quels qu’ils soient, ils n’y sont que présents. Quand nous racontons véridiquement le passé, ce qui sort de la mémoire, ce n’est pas la réalité même, la réalité passée, mais des mots, conçus d’après ces images qu’elle a fixées comme des traces dans notre esprit en passant par les sens. Mon enfance par exemple, qui n’est plus, est dans un passé qui n’est plus, mais quand je me la rappelle et la raconte, c’est son image que je vois dans le présent, image présente en ma mémoire. En va-t-il de même quand on prédit l’avenir? Les choses qui ne sont pas encore sont-elles pressenties grâce à des images présentes ? Je confesse, mon Dieu, que je ne le sais pas. Mais je sais bien en tout cas que d’ordinaire nous préméditons nos actions futures et que cette préméditation est présente, alors que l’action préméditée n’est pas encore puisqu’elle est à venir. Quand nous l’aurons entreprise, quand nous commencerons d’exécuter notre projet, alors l’action existera mais ne sera plus à venir, mais présente. [...]Il est dès lors évident et clair que ni l’avenir ni le passé ne sont et qu’il est impropre de dire: il y a trois temps, le passé, le présent, l’avenir, mais qu’il serait exact de dire: il y a trois temps, un présent au sujet du passé, un présent au sujet du présent, un présent au sujet de l’avenir. Il y a en effet dans l’âme ces trois instances, et je ne les vois pas ailleurs: un présent relatif au passé, la mémoire, un présent relatif au présent, la perception, un présent relatif à l’avenir, l’attente. Si l’on me permet ces expressions, ce sont bien trois temps que je vois et je conviens qu’il y en a trois ».

Saint Augustin, Confessions (vers 400), trad. E Khodoss, livre XI, § XIV, XVIII et XX.

Dans ce passage des Confessions, St Augustin s’interroge sur la nature du temps. Il cherche à en donner une définition, et surtout, à savoir s’il est un être ou un non-être (question ontologique, portant sur l’être et le mode d’être de quelque chose). Ce qui conduit St Augustin à cette réflexion est une opposition entre l’Eternité divine, fixe et immuable, et le

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temps, qui ne cesse de s’écouler. Le propre du temps est qu’il disparaît sans cesse, ne cesse de s’engloutir. A un instant succède immédiatement un autre instant. La seule compréhension que nous pouvons avoir du temps consiste à le morceler, à le couper en heures, minutes. Mais à y regarder de plus prés, cette spatialisation du temps en manque l’essence. Le propre du temps est de s’écouler, il est pas essence destruction de l’instant. Cf un sablier. Mouvement continue de la durée.

Texte de SAINT Augustin, Magnard, pager 126.1er texte : l’aporie du temps : le temps est insaisissable pourtant il faut bien quelque chose qui passe. Qu’est-ce donc que le temps ? Si personne ne me le demande, je le sais ; mais si on me le demande et que je veuille l’expliquer, je ne le sais plus. Une fausse évidence : je crois savoir ce que c’est que le temps mais cette certitude s’évanouit dés que j’entreprends un effort pour le définir. La connaissance que j’ai du temps n’est qu’apparence. Si on parle du temps, en disant que les choses " étaient ", " sont ", et " seront ", le langage nous trompe. A l’analyse, i.e., dès que nous voulons penser ce qu’est le temps, en donner une définition, le temps nous échappe, et on doit avouer que rien de tel que le temps ne peut en fait exister. St Augustin montre en effet que le temps n’est composé que d’inexistences. Aporie du passé : il n’est pas car s’il était il serait du présent ; il n’est plus. Aporie du futur : il n’est pas pur les mêmes raisons. Il sera ;A rigoureusement parler, il est donc incorrecte de dire de ces 2 temps, passé et avenir, qu’ils sont ; il sont une forme de non-être. Paradoxe ; où le non-être est, et alors ce n’est pas du non-être ; ou le non-être n’est pas. C’est le premier principe philosophique, énoncé par Parménide dans son Poème : « il n’y a qu’une seule voie qu’il faut suivre, c’est que l’être est et que le non être n’est pas. » cela paraît tellement évident et trivial que l’on est autorisé à se demander pourquoi Parménide a-t-il eu besoin de l’énoncer : mais tout simplement parce que nous ne cessons jamais de commettre des impers concernant cette règle élémentaire de logique, et, par exemple, lorsque nous parlons du temps.

Texte 2 : à l’issu de cette 1ère réflexion, Saint Augustin est bien obligé de reconnaître que « ni l’avenir ni le passé n’existent ». Pourtant, ils ont un mode d’existence, mais ne sont plus !!! C’est que notre langage se révèle impropre : « Peut-être dirait-on plus justement il y a trois temps, le présent du passé, le présent du présent, le présent de l’avenir. »Que faut-il entendre par les 3 présents de Saint Augustin ?le présent du passé ; c’est la mémoire. Le présent du présent, c’est l’intuition directe.Le présent du futur ; c’est l’anticipation, l’attention, le projet.

En quoi consiste la solution de St Augustin ? Augustin lève bel et bien l’aporie en expliquant que seul le présent est. Le passé et l’avenir sont des non-êtres. Il y a donc bien trois temps, mais si on veut parler avec rigueur, il faut donc dire qu’il y a le présent du passé (=mémoire), le présent du futur (=attente), et même, le présent du présent (=vision, attention). Sa solution revient donc à mettre le passé et le futur dans le présent par le biais de la mémoire et de l’attente, qui sont deux modalités de la conscience/âme/esprit.

Conséquence ? quelle est la nature du temps ? Augustin en déduit donc que les modes du temps que sont le futur et le passé n’existent que dans l’âme, ne renvoient pas au monde extérieur, mais à notre esprit, dans lequel seul ils " existent ». Le temps est une propriété non des choses mais de ma conscience.

Toutefois, si tout en quelque manière se ramène au moment présent, il s’avère que le présent lui-même n’est rien, n’existe pas. En effet, le présent, plus précisément, l’instant présent, " ne peut être qu’en cessant d’être ". Sa caractéristique majeure, à lui aussi, est de " passer " (sinon, ce ne serait plus du temps !). A peine présent, il est déjà du passé, et j’en parle pratiquement toujours au passé… paradoxe, irrationalité du temps : seul le présent existe et pourtant rien n’existe moins que le présent ! entre l’immédiatement passé et l’immédiatement futur, où est le présent ? hop, il vient de passer à tout jamais…

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II – Vivre dans le temps.

Nous venons de voir que le temps, a pour caractéristique de fuir sans cesse. Tandis que l’espace est réversible( je peux le parcourir d’un côté puis de l’autre), le temps lui est irréversible. La fuite du temps est inexorable, ce qui n’est pas sans créer de l’angoisse chez nous : à l’instant où je viens de parler, un certain laps de temps s’est écoulé à tout jamais. Le temps est définitif, il m’engloutit avec lui (Chronos dévore ses enfants, Poème de Baudelaire.)

Nécessairement, la fuite du temps est angoissante parce qu’elle me place en face de ma mort à venir. C’est la raison pour laquelle nous devons apprendre à vivre avec, et dans le temps. Or nous constatons que bien souvent nous fuyons notre temps. Nous ne savons pas profiter de l’instant présent, tout entier rongé par le passé dans l’expérience psychologique du remord, ou par le futur dans celle de l’attente.

a) l’incapacité de l’homme à vivre au présent« Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour l’arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans des temps qui ne sont point les nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C’est que le présent d’ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige, et s’il nous est agréable nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver.Que chacun d’entre nous examine ses pensées. Il les trouvera toutes occupées au passé ou à l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin.Le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi, nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous le soyons jamais ».

Pascal (1623-1662), Pensées 47/172Thèse : nous ne vivons jamais au présent : ou bien le présent est blessant, désagréable et nous cherchons à le fuir, ou bien il est délicieux mais nous regrettons déjà qu’il soit en train de nous échapper, oubliant par là d’en profiter ! Que fait Pascal à la fin du texte, de la ligne 11 à 15 ? il propose à chacun une introspection ; le lecteur pourra vérifier les propos de Pascal en se penchant sur lui-même. Nous aussi, regardons nos pensées : « Nous ne pensons presque point au présent. » par conséquent nous sommes condamnés au malheur, alors même que nous recherchons le bonheur. Manifestement, nous nous y prenons mal pour vivre notre temps !

b) peur de la mort et divertissement :Pascal écrit dans un but apologétique : il défend et fait l’éloge de la religion chrétienne. Il lui apparaît que la vie humaine est profondément misérable pour qui ne croit pas en Dieu. Quel sens en effet donner à une vie où l’homme ne trouve pas sa place, écartelé entre l’infiniment grand et l’infiniment petit, et où nous sommes irrémédiablement rattrapés par la mort à venir ? il y a dans les pensées de Pascal, qui sont des fragments pour un ouvrage apologétique, deux mouvements : d’une part Pascal décrit la misère de l’homme sans Dieu. Notre condition est la finitude qui se manifeste par deux éléments essentiels : notre disproportion dans la nature ; notre mort à venir. Cette condition insupportable, cette

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absence de sens peut être combattue de deux manières : une manière artificielle et vaine : le divertissement ; ou la conversion vers la religion chrétienne et le salut en Dieu.

NOTRE CONDITION MISÉRABLE : Prise de conscience, étroitement liée à la révolution galiléenne (la terre n’est pas le centre de l’univers, l’univers est infini) de notre disproportion. A l’échelle de l’univers, nous ne sommes rien. Souvenez-vous du 1er texte de Pascal que nous avons étudié ; il indiquait que l’univers peut, par une vapeur ou une goutte d’eau, nous écraser. L’univers immense m’effraie, me remplit d’effroi. Je suis saisi par son silence et son impassibilité ; il ne s’adresse pas à moi. « « le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie » Pensée 201. Mais, si nous sommes effarés et perdus devant cet infiniment grand, nous le sommes tout autant devant l’infiniment petit : les progrès techniques et l’invention du microscope montrent que nous sommes immenses par rapport au monde de minuscule des insectes pas exemple. Nous sommes égarés et ne trouvons pas de place dans cet univers disproportionné. A cette perte de repère s’ajoute la peur angoissante de la mort : L’homme est condamné à mort, sa vie n’a pas de sens, elle est absurde, car quel que soit le contenu de notre vie, cette dernière finira toujours mal ! «Le dernier acte est sanglant quelque belle soit la comédie en tout le reste. On jette enfin de la terre sur la tête et en voilà pour jamais. » Pensée 165. Mais ce qui est encore plus insupportable dans notre condition de mortels, c’est que nous avons conscience de cette tragédie à laquelle nous ne pourrons pas échapper. Pensée 434 : « Qu’on s’imagine un nombre d’hommes dans les chaînes, et tous condamnés à la mort , dont les uns étant chaque jour égorgés à la vue des autres, ceux qui restent voient leur propre condition dans celle de leur semblables, et, se regardant les uns les autres avec douleur et sans espérance, attendent la mort. C’est l’image de la condition des hommes »

LE DIVERTISSEMENT : que reste-il à l’homme pour éviter ces pensées insupportables ? il ne lui reste que le divertissement. Diverto en latin signifie « se détourner de ». Le divertissement est un détournement de la pensée qui ne peut supporter en face le délaissement de l’homme. Il s’agit de cesser de se tourner vers soi, car toute introspection rappelle le caractère misérable de notre condition. Aussi l’homme doit-il s’occuper à tout prix, et ne pas penser à lui. Il faut déplacer le centre d’intérêt de nous-mêmes vers l’extériorité. En réalité, ce que Pascal veut dire, c’est que l’homme ne peut supporter le repos et la tranquillité, qui seraient pour lui l’occasion d’une réflexion sur soi et le ramènerait au désespoir. Voilà pourquoi nous cherchons à remplir artificiellement notre vie. L’ennui est la pire des choses, non pas parce qu’il nous laisse vide, mais au contraire parce qu’il nous laisse trop pleins de notre réflexion sur nous-mêmes. Occupons-nous à tout prix, voilà quelle est la devise de l’homme qui n’a pas trouvé le salut en Dieu. Pensée 136 : « de là vient que le jeu et la conversation des femmes, la guerre, les grands emplois sont si recherchés » pourtant ce ne sont pas ces activités en elle-mêmes qui nous intéressent ; mais elles nous occupent, nous détournent de notre angoisse ; voilà l’homme aime « mieux la chasse que la prise » ; le chasseur voudrait-il du lièvre s’il lui était offert ? Non car il retomberait immédiatement dans l’inactivité et dans l’ennui. On voit que Pascal saurait être d’accord avec la position antique qui définit le bonheur dans le repos et dans l’absence de trouble ; au contraire, le repos est le trouble suprême, puisqu’il nous fait penser à notre condition de laquelle nous cherchons si ardemment à nous détourner.

ICI : TD sur la peur de la mort et le divertissement. Pascal.

CRITIQUE DU DIVERTISSEMENT :Mais si par le divertissement nous échappons à la conscience douloureuse de l’existence, ce dernier n’est qu’une solution de remplacement, éphémère, et dont nous sentons confusément le caractère insatisfaisant. En réalité, le divertissement masque une réalité certes effroyable, mais dont la prise de conscience est nécessaire pour que les hommes

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retrouvent la voie véritable, qui dans l’optique de Pascal ne peut être que celle de la conversion religieuse. Pensée 144 : « la seule chose qui nous console de nos misère est le divertissement ; et cependant c’est la plus grande de nos misères, car c’est cela qui nous empêche principalement de penser à nos et qui nous fait perdre insensiblement. Sans cela nous serions dans l’ennui, et cet ennui nous pousserait à chercher un moyen plus solide d’en sortir. » ce « moyen plus solide d’en sortir », nous l’avons bien compris, ne peut être pour Pascal que la Foi, la religion. En effet, la foi permet de sortir de cette terreur de la mort parce qu’elle ouvre la perspective de la vie éternelle ; toutefois on ne devient pas chrétien pour cesser d’avoir peur de la mort ; ce serait encore une version utilitariste de la religion, alors que celle-ci ne peut être qu’amour pur et désintéressé de Dieu. « Il faut n’aimer que Dieu et ne haïr que soi. »Mais somme-nous irréversiblement condamnés à cet état de fait ? N’est-il pas possible de bien vivre, et ce dés maintenant, de vivre au présent ?

c) Savoir jouir de son temps comme vient de le monter Pascal, notre plus grande misère vient de ce que nous ne savons pas jouir de notre temps présent. Nous sommes toujours dans la fuite, en avant ou en arrière. Pourtant, n’y a-t-il pas quelque chose de paradoxal à se plaindre sans cesse que la vie est coutre, angoissante, marquée par une fin imminente, et en même temps ne pas savoir profiter du temps qui nous est imparti ? l’attitude la plus raisonnable ne consiste-t-elle pas, précisément parce que la vie est courte, à en jouir au maximum ? c’est ce que propose Sénèque, philosophe stoïcien, dans un très beau traité intitule « de la brièveté de la vie. »Dans la foule des vieillards, j’ai envie d’en attraper un et de lui dire : « Nous te voyons arrivé au terme de la vie humaine ; cent ans ou davantage pèsent sur toi. Eh bien ! Reviens sur ta vie pour en faire le bilan. Dis-nous quelle durée en a été soustraite par un créancier, par une maîtresse, par un roi, par un client, combien de temps t’ont pris les querelles de ménage, les réprimandes aux esclaves, les complaisances qui t’ont fait courir aux quatre coins de la ville. Ajoute les maladies dont nous sommes responsables. Ajoute encore le temps passé à ne rien faire. Tu verras que tu as bien moins d’années que tu n’en comptes. Remémore-toi combien de fois tu as été ferme dans tes desseins, combien de journées se sont passées comme tu l’avais décidé ; quand tu as disposé de toi-même, quand tu as eu le visage sans passion et l’âme sans crainte, ce qui a été ton œuvre dans une existence si longue, combien de gens se sont arraché ta vie, sans que tu t’aperçoives de ce que tu perdais ; combien de ta vie t’ont dérobé une douleur futile, une joie sotte, un désir aveugle, un entretien flatteur, combien peu t’est resté de ce qui est tien ; et tu comprendras que tu meurs prématurément. » Quelles en sont les causes ? Vous vivez comme si vous deviez toujours vivre. Jamais vous ne pensez à votre fragilité. Vous ne remarquez pas combien de temps est déjà passé ; vous le perdez comme s’il venait d’une source pleine et abondante, alors pourtant que ce jour même, dont vous faîtes cadeau à un autre, homme ou chose, est votre dernier jour. C’est en mortel que vous possédez tout, c’est en immortels que vous désirez tout. Sénèque, De la brièveté de la vie.

A propos de ce traité de Sénèque : Sénèque est un stoïcien romain qui perpétue les enseignements du haut stoïcisme.. Il rédige de nombreux traités afin que l’on se remémore les dogmes fondamentaux du stoïcisme. Parmi ces traités, De la brièveté de la vie interroge un lieu commun. Les hommes ont coutume de se plaindre que la vie est trop courte. C’est en effet une plainte récurrente que de pleurer la fuite du temps. Mais ce regret est-il fondé ? Faut-il reprocher à la Nature de nous avoir donné une vie trop courte ? N’est-ce pas notre seule responsabilité si nous jugeons que la vie est trop brève ? en effet, « la plupart des mortels se plaignent de la méchanceté de la nature (…) la durée qui nous est accordée s’écoule si vite et si rapidement qu’à l’exception d’un petit nombre, la vie nous quitte quand nous sommes en train de nous y préparer (…) Mais il n’est pas vrai que nous ayons peu de temps, mais nous en avons déjà perdu beaucoup. La vie est assez longue, et elle serait bien suffisante pour l’accomplissement de nos principales fonctions, si elle était organisée comme il faut. (…) Ainsi, nous n’avons pas reçu une vie brève, nous l’avons faite telle. »

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Thème : l’existence humaine et la manière dont l’homme utilise son temps.Thèse : les hommes ont tendance à perdre leur temps, comme si leur vie était infinie. Quelles sont les questions que nous pose ce texte ? que faisons nous de notre existence ? Savons vraiment jouir du temps qui nous est imparti ? Nos activités quotidiennes sont-elles essentielles ou futiles ? La mort est-elle nécessairement source d’angoisse ou bien existe-il une pensée positive de la mort ?

Lecture linéaire : dans la foule des vieillards : la plupart des gens vivent en insensés. La foule n’est pas philosophe. Si l’on prend un vieillard au hasard, nous avons toutes les chances de tomber sur l’un d’entre eux qui a vainement dilapidé sa vie.Pourquoi Sénèque s’adresse-t-il à un vieillard ? parce que la proximité de la mort indique qu’il est temps de faire le bilan de la vie. Mais nous qui ne sommes pas encore à l’age de la mort devons profiter de notre jeunesse pour faire dés à présent ce bilan, et éviter de perdre notre précieux temps en des futilités. Que fait ensuite Sénèque ? Par un certain nombre de questions, Sénèque montre que le vieillard a dilapidé, gaspillé son temps. Il s’agit pour cela de soustraire au temps de la vie les occupations futiles. On notera que en bon stoïcien, Sénèque fait le distinction entre les choses qui dépendent de nous (les querelles de ménage, etc…) et celles qui n’en dépendent pas (les maladies dont nous ne sommes pas responsables). Cette soustraction revient à se demander : quand ai-je vraiment vécu ? quand ai-je pris soin de mon âme ? il y a ici l’idée qu’il existe deux genres de vies : une vie futile et superficielle, et une vie authentique, celle qui est destinée à la sagesse et à la philosophie, c’est à dire au soin de l’âme. Quelle est la conséquence de ce questionnement ? Sénèque montre par là que l’on a bien moins d’année que ce que l’on croit. Le temps est passé, mais de manière inessentielle, en quelque sorte sans nous. Nous avons gaspillé notre temps. Que fait Sénèque dans la suite du texte ? la suite du texte est un second mouvement, dans lequel le philosophe énumère la conduite à tenir, c’est à dire la vie authentique. Comment se caractérise cette vie authentique pour Sénèque ? comme l’ataraxie : « le visage sans passion et l’âme sans crainte », éviter une « douleur futile, une joie sotte un désir aveugle… »Quelles sont les conséquences du texte ? on peut ne pas mourir prématurément si lon sait bien vivre. La réflexion sur la qualité conditionne celle sur la quantité. La vie bonne n’est pas courte. Ce sont les vies gâchées qui le sont. Il faut donc vivre chaque jour comme si c’était le dernier. Cette vie au présent nous enjoint à profiter du temps qui nous est imparti. En quoi peut-on dire que ce texte modifie la représentation ordinaire que nous nous faisons de la mort ? Traditionnellement nous considérons la mort comme source d’angoisse. Mais au contraire, seule la pensée omniprésente de la mort peut nous rappeler que nous avons le devoir éthique de bien vivre. Se rappeler notre finitude permet effectivement de savoir jouir de chaque instant en lui accordant toute sa valeur : c’est parce que je sais qu’elle est limitée dans le temps que la vie peut avoir du prix. La connaissance de notre finitude n’est donc pas un fardeau mais une chance.

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III – Dépasser l'angoisse du temps

a) « La mort n'est rien pour nous »Prends l'habitude de penser que la mort n'est rien pour nous. Car tout bien et tout mal résident dans la sensation : or la mort est privation de toute sensibilité. Par conséquent, la connaissance de cette vérité que la mort n'est rien pour nous, nous rend capables de jouir de cette vie mortelle, non pas en y ajoutant la perspective d'une durée infinie, mais en nous enlevant le désir de l'immortalité. Car il ne reste plus rien à redouter dans la vie, pour qui a vraiment compris que hors de la vie il n'y a rien de redoutable. On prononce donc de vaines paroles quand on soutient que la mort est à craindre non pas parce qu'elle sera douloureuse étant réalisée, mais parce qu'à est douloureux de l'attendre. Ce serait en effet une crainte vaine et sans objet que celle qui serait produite par l'attente d'une chose qui ne cause aucun trouble par sa présence.Ainsi celui de tous les maux qui nous donne le plus d'horreur, la mort, n'est rien pour nous, puisque, tant que nous existons nous-mêmes, la mort n'est pas, et que, quand la mort existe, nous ne sommes plus. Donc la mort n'existe ni pour les vivants ni pour les morts, puisqu'elle n'a rien à faire avec les premiers, et que les seconds ne sont plus.

b) L'éternel retour comme manière de choisir sa vie"Le poids formidable. - Que serait-ce si, de jour ou de nuit, un démon te suivait une fois dans la plus solitaire de tes solitudes et te disait : « Cette vie, telle que tu la vis actuellement, telle que tu l'as vécue, il faudra que tu la revives encore une fois, et une quantité innombrable de fois; et il n'y aura en elle rien de nouveau, au contraire! il faut que chaque douleur et chaque joie, chaque pensée et chaque soupir, tout l'infiniment grand et l'infiniment petit de ta vie reviennent pour toi, et tout cela dans la même suite et le même ordre - et aussi cette araignée et ce clair de lune entre les arbres, et aussi cet instant et moi-même. L'éternel sablier de l'existence sera retourné toujours à nouveau - et toi avec lui, poussière des poussières ! » - Ne te jetterais-tu pas contre terre en grinçant des dents et ne maudirais-tu pas le démon qui parlerait ainsi? Ou bien as-tu déjà vécu un instant prodigieux où tu lui répondrais : « Tu es un dieu, et jamais je n'ai entendu chose plus divine! » Si cette pensée prenait de la force sur toi, tel que tu es, elle te transformerait peut-être, mais peut-être t'anéantirait-elle aussi; la question «veux-tu cela encore une fois et une quantité innombrable de fois », cette question, en tout et pour tout, pèserait sur toutes tes actions d'un poids formidable! Ou alors combien il te faudrait aimer la vie, que tu t'aimes toi-même pour ne plus désirer autre chose que cette suprême et éternelle confirmation!"Nietzsche, le Gai Savoir, paragraphe 341.

Conclusion

Le point aveugle de notre existence est bien notre mortalité inévitable. Comment l'aborder sans angoisse ?