Coopérer 2.0

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Point de vue Philippe Meirieu Coopérer en actes, Du « vivre ensemble » au « faire ensemble » p. 12 Projets innovants Droits de l’Homme et laïcité au CM2, Engager le dialogue pour ne pas le rompre p. 70 & Animation Education http://animeduc.occe.coop N°247-248 Juillet-Octobre 2015 - Prix : 5 Coopérer 2.0 [R]évolution numérique et pédagogique (dossier en p. 23) Dossier réalisé à partir de l’Université d’été 2015 de l’OCCE. Animation & Education est la revue pédagogique de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole Pour accéder au site d'A&E flashez ce QRcode

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Page 1: Coopérer 2.0

Point de vue

Philippe MeirieuCoopérer en actes, Du « vivre ensemble » au « faire ensemble »

p. 12

Projets innovants

Droits de l’Homme et laïcité au CM2,

Engager le dialogue pour ne pas le rompre

p. 70

&A n i m a t i o nE d u c a t i o n

http://animeduc.occe.coop

N°247-248 Juillet-Octobre 2015 - Prix : 5 €

Coopérer 2.0[R]évolution numérique et pédagogique (dossier en p. 23)Dossier réalisé à partir de l’Université d’été 2015 de l’OCCE.

Animation & Education est la revue pédagogique de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole

Pour accéder au site d'A&Eflashez ce QRcode

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ASSURANCE SCOLAIREMATERNELLE / ÉLÉMENTAIRE

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Une idée encore trop répandue laisse penser que la Responsabilité Civile su� t à protéger les enfants. C’est faux ! Elle les protège s’ils causent des dommages mais jamais lorsqu’ils sont victimes d’un accident.

L’Assurance Scolaire MAE protège intégralement vos élèves. Et c’est aussi une garantie pour vous, enseignants, dont la responsabilité peut parfois être engagée lorsqu’un accident survient et que votre élève n’est pas correctement assuré.

Créée en 1932 par des enseignants et toujours dirigée par eux, la MAE s’engage pour que chaque famille puisse faire face de manière égale aux conséquences d’un accident.

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S o m m a i r e

&A n i m a t i o nE d u c a t i o n

Animation & Éducation 101 bis, rue du Ranelagh - 75016 PARIS - Téléphone 01 44 14 93 30 Fax 01 44 14 93 42 - Email : [email protected] - Site Internet : http://animeduc.occe.coop - Revue de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole, Association reconnue d’utilité publique. Président de la Fédération OCCE Eric Weill - Directeur de la Publication Eric Weill - Rédactrice en Chef Marie-France Rachédi - Premier Rédacteur Graphiste et maquette Robert Touati - Correctrice/

Secrétaire Marie-Lorraine Astruc - Comité éditorial pour ce numéro : Lila Ammari (AD93), Marion Bertin-Sihr (AD58), Camille Biache (AD63), Valérie Berthier (AD18), Bernard Clerc (AD47), Isabelle Crenn (Fédération), Eliane Finet (AD38), Sophie Maissin (AD 93), Bruno-Yves Martin (AD84), Béatrice Musielak (AD 56), Gilles Petitjean (AD 37), Jean-Louis Sauzade (AD 84), Katell Tison-Deimat (Fédération) - Abonnements Gestion Informatique des Stocks, Service Abonnements, BP 93 14110 Condé-sur-Noireau – Impression Corlet Roto, ZA les Vallées, 53300 Ambrières-les-Vallées - Responsable médias & partenariats : Nicole Pinbouen tél : 06.19.71.77.68, tarifs préférentiels pour les associations fédérées à l’OCCE ou membres de l’ESPER. Dépôt légal à la date parution n° de CPPAP : 1012 G 82304. ISSN 0395-0840.

Couverture : Illustration : © Robert Touati

Coopérer 2.0[R]évolution numérique et pédagogique(dossier en p. 23)

Abonnement :

Pour vous abonner, rendez-vous sur le site de la revue - http://animeduc.occe.coop - ou envoyez le bulletin situé en page 15 de ce numéro.

Dossier réalisé à partir des travaux de l’Université d’été 2015 de l’OCCE.

Vie Fédérale 6A vos agendas !

Inscriptions aux actions pédagogiques de l'OCCE

Nouveau Conseil d’Administration de la Fédération nationale de l’OCCE

Editorial 5Quelles motivations

faire évoluer à l’OCCE ?Eric Weill

Président de la Fédération nationale

de l'OCCE

Le Journal scolaire 16Créer son journal, un jeu d’élèves !

Marie-France Rachédi

Ready to join them on their trip to Liverpool

Marie-France Rachédi

Images & Pages 80Images

L’enfant lionGilles Petitjean

Se mobiliser pour les valeurs de la République

Bernard ClercPages

Le voleur de chiensDaniel Feurtey

PROJETS INNOVANTS 70Droits de l’Homme et laïcité au CM2,

Engager le dialogue pour ne pas le rompre

Gilles Petitjean

Actions nationales 72étamine, vous connaissez ?

« Lire et Ecrire des images »Une Cérémonie de clôture digne

du Festival de Cannes !Simone Duclos

Photo-poème saison 2 et bientôt 3

Th^éâ 10 ans !Katell Tison-Deimat

Le théâtre est une parole adressée et active

Gilles Petitjean

Canopé-Théâ/OCCE« Le réseau THéâ/OCCE ne sera

jamais assez remercié»Jean-Claude Lallias

PROJETS COOPÉRATIFS 19Construire un projet de recherche

collaboratif entre des enseignants et des chercheurs, c’est possible !

Bruno ROBBES

Autour du monde 14Regard d’Asie

sur les partenariats coopératifsEmmanuelle Besset-Ferreira et Philippe Paillard

Livres jeunesse 78« Vivre auprès de mon arbre »

avec des livres de jeunesseChristine Houyel

Point de vue 12Coopérer en actes,

Du « vivre ensemble » au « faire ensemble »

Philippe Meirieu

LES ECHOS DES 10Un nouvel outil pour

les classes : Jard’infosBénédicte Bonnin

Conférence sur le Climat à Paris (COP 21) Vers une nouvelle étape

dans l’histoire humaine !Sophie Maissin

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5Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248 5

Editorial

La refondation de l’Ecole a maintenant plus de deux ans d’exercice, mais elle ne tient pas en-core debout toute seule : certains des chantiers ont bien avancé, d’autres sont en cours - et connaissent des parcours laborieux, mais tous les projets ne sont pas encore « sur la table ».

On peut dire la même chose de l’OCCE : cer-tains dossiers ont bien avancé - comme celui de la mise en œuvre des « chantiers » qui, en regrou-pant par grands objectifs d’apprentissages les actions précédemment éparpillées, et en mobilisant un plus grand nombre d’acteurs divers, donnent un élan et une cohérence nouvelle à nos travaux et productions. Le pôle pédagogie se dé-veloppe, témoin et lanceur des ambitions que nous avons en la matière. La rénovation de la communication entre dans sa phase d’opérationnalisation pour rendre plus visibles et lisibles l’identité et les actions de notre mouvement.

Pour structurer l’ensemble et lui donner une colonne vertébrale solide, il nous faut cepen-dant réinterroger notre mouvement : c’est le sens du travail décidé en mai 2015 qui doit déboucher en 2016 sur un projet associatif renouvelé : salariés, bénévoles et militants sont ainsi conviés à construire dès à présent les grandes lignes de l’OCCE que nous envisa-geons pour les années à venir.

Quelles motivations faire évoluer à l’OCCE ? Intrinsèques, pour recentrer sur quelques axes forts de l’identité de notre mouvement et re-chercher une cohérence dans un « système »

Quelles motivations faire évoluer à l’OCCE ?

qui tisse philosophie de l’éducation, politique éducative et sociale, pédagogie, mission et fonctionnement associatifs, discours et actes ; mais aussi extrinsèques, pour le faire entrer dé-libérément dans un monde et une société qui bougent vite et fort et, dans ce contexte, ac-compagner, participer à la refondation de l’Ecole qui se construit. N’oublions pas que nous devons promouvoir encore et encore sur le terrain cet

élément fondamental de la refondation qu’est la coo-pération dans l’apprendre, le travailler et le vivre en-semble - dont nous devons être les fers de lance au sein de l’Ecole. Parce que la société de demain doit pouvoir s’y fonder.

Nos valeurs sont notre référence commune, elles ne doivent pas servir d’obstacle à toute idée no-

vatrice, à tout moyen ou contenu nouveau que l’Ecole a à connaître, au contraire. C’est dans ce sens que s’est tenue notre troisième Université d’été (juillet 2015, à Chaumont), faisant la dé-monstration que les valeurs de la coopération ont toute leur place dans la culture numérique présente et future. A condition d’en construire les modalités et les mises en œuvre, avec patience et détermination.

Enthousiasmant défi pour l’OCCE, à mettre en œuvre dès aujourd’hui, en visant l’horizon 2025.

Bonne rentrée coopérative à tous.

Eric Weill Président national

« N’oublions pas que nous devons promouvoir encore et encore sur le terrain cet élément fondamental de la refondation qu’est la coopération dans l’apprendre, le travailler et le vivre ensemble (…) »

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V i e F é d é r a l e

A la rentrée, on ploie sous la paperasse, on ne sait où donner de la tête tant les sollicitations pour diverses manifestations, Prix, Concours, opérations… auxquels on doit « absolument » participer pour le bien des élèves sont multiples. Et, bien sûr, derrière chaque événement se cache une autre date importante : celle du bouclage du projet, de remise des productions et créations. Pour vous aider dans ce casse-tête événementiel, nous avons recensé les dates d’inscription et de bouclage des actions nationales OCCE (les fiches de présentations et les modalités d’inscription sont disponibles sur le site de la Fédération nationale OCCE www.occe.coop ).

A vos agendas !Inscriptions aux actions pédagogiques de l'OCCE

6 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Inscrivez-vous à éco’coop !

Vous menez un projet d'EDD à travers une des thématiques suivantes : eau, déchets, énergie, biodiversité, alimenta-tion…

Pour cela, dès la rentrée, téléchargez le coupon d'inscription sur www.occe.coop (rubrique actions nationales) et ren-voyez-le à votre Association Départementale OCCE avant le 30 octobre 2015. Menez votre projet coopératif d'EDD sur toute l'année. Enfin, témoignez de votre projet à travers notre dossier (4 pages à télécharger) et une affiche (à ren-voyer par mail à votre AD avant le 30 avril 2016).Pas de perdants, tous gagnants, pour un XXIème siècle har-monieux ! En juin, vous obtiendrez alors votre passeport ECO'COOP 2015/2016, symbole de votre engagement dans l'AGENDA 21 de votre coopérative.

Inscrivez-vous à étamine, jeunes lecteurs et auteurs de l'OCCE

L’opération étamine, Jeunes Auteurs et Lecteurs de l'OCCE vise à mettre en valeur, promouvoir et fédérer la créa-tion, la réalisation et l'échange de livres, à élargir la communi-cation entre classes, à inciter à

la rencontre avec des écrivains, des illustrateurs, des impri-meurs. L'évaluation coopérative des productions par des jurys d'enfants développe l'esprit critique et le respect de l'autre.Vous pouvez vous inscrire en ligne (jusqu’au 18 décembre 2015) comme Auteur et, dans ce cas, vous vous engagez à envoyer vos productions livresques avant le 25 mars 2016, à la Fédération Nationale de l'OCCE.Ou comme Lecteur (jusqu’au 18 décembre 2015) et, dans ce cas, renvoyez vos fiches « critique » avant le 30 mai 2016.Pour s’inscrire un lien unique :

http://www.occe.coop/~etamine/inscription/

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7Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

V i e F é d é r a l e V i e F é d é r a l e

Inscrivez-vous à THÉÂ !

Théâ, Opération nationale Théâtre, vise à développer une pratique coopérative de l'éduca-tion artistique aux arts de la

scène, à faire du projet « théâtre » de la classe un projet réellement coopératif et, donc, à susciter et accom-pagner des projets théâtre à l'échelle de la classe coopéra-tive. Cette année, vous explorerez les œuvres de Dominique Richard. Vos présentations théâtrales seront valorisées lors des rencontres départementales Théa. Inscriptions entre septembre et décembre 2015.

http://www.occe.coop/thea

Inscrivez-vous aux Écoles fleuries !

Vous avez jusqu’à la fin du premier trimestre pour vous inscrire au Concours national des Ecoles Fleuries et toute l’année scolaire pour réaliser le projet jardinage, fleurissement et embellissement de votre école. Vous devez constituer un dossier

(album ou autres) montrant toutes les étapes et la démarche de votre projet. Au printemps, un jury se rend dans les écoles inscrites et la remise des Prix nationaux a généralement lieu au mois de mars, dans un site prestigieux de la capitale. Ces prix concernent les classes qui s’étaient inscrites en 2014-2015.

Inscrivez-vous à la Semaine de la coopération à l'école !

Du 14 au 19 mars 2016, se déroulera, pour la 14ème année : La Semaine de la coopérationà l’école, action qui vise à sen-sibiliser les élèves aux prin-cipes de la coopération sco-laire et économique.

Renseignez-vous sur : www.semaine.coop

Inscrivez-vous à Lire et Ecrire Des Images !

Mars, mois important, égale-ment, pour ceux qui ont conduit un projet vidéo ou réalisé un diaporama sonorisé dans leur école ou collège puisqu’ils peuvent valoriser leur création

en s’inscrivant, avant le 12 mars 2016, à “Lire et écrire des images”, le Festival vidéo et photo de l’OCCE (présélection des oeuvres le 23 mars), action qui vise à promouvoir les films comme support motivant pour l’éducation à la lecture et à la critique de l’image en mouvement.En avril : ceux qui, avant de faire, veulent voir, peuvent participer au Festival comme « Spectateurs » et ainsi rece-voir la compilation des films sélectionnés pour les analyser et porter une appréciation. Ceux-là ne devront donc pas oublier de s’inscrire avant le 26 mars 2016 et d’envoyer leurs appréciations écrites avant le 2 juin 2016. La cérémonie de clôture se déroulera, quant à elle, le 22 juin 2016 à Strasbourg.

http://www.occe.coop/ad67/ledi

Inscrivez-vous pour défendre les Droits de l'Enfant !

Pour explorer la Convention interna-tionale des Droits de l’Enfant avec l’OCCE, inscrivez votre classe dès la rentrée. Cette année, l’action s’in-titule : Tous différents, tous égaux ! Ainsi, c’est à travers une création d'affiches représentant un droit en lien avec la non-discrimination, que l’OCCE invitera chacun des élèves des classes participantes à découvrir la CIDE pour comprendre combien ses droits sont valables pour lui-même et pour tous les autres enfants du monde.

Pour plus d’informations sur ces actions, n’hésitez pas à consulter les fiches de présentations téléchargeables sur le site de la Fédération OCCE.

www.occe.coop (rubrique "nos actions")

ou contactez l’association OCCE de votre département.

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8 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Pédagogie coopérative

BUREAU

1. Eric WEILL

Président

Inspecteur de l’Education

nationale

OCCE des Yvelines

2. Catherine FRACHON

Secrétaire Générale

Conseillère pédagogique

OCCE des Alpes-de-Haute-

Provence

3. Didier POINT

Trésorier

Professeur des écoles

OCCE des Yvelines

4. Camille BIACHE

Secrétaire Générale adjointe

Professeure des écoles

OCCE du Puy-de-Dôme

5. Huguette DEBROUWER

Vice-Présidente Vie Associative

Professeure des écoles

OCCE de l’Oise

6. Dominique DUPLAN

Vice-Président Vie Fédérale

Professeur des écoles

OCCE d’Eure-et-Loir

7. Patrick SIBEAUD

Trésorier adjoint

Professeur des écoles

OCCE de l’Aisne

8. Dominique CHARBONNIER

Professeure des écoles

OCCE du Jura

9. Bernard CLERC

Professeur de lettres certifié

OCCE du Lot-et-Garonne

10. Myriam DERVEAUX

Directrice SEGPA

OCCE du Nord

11. Eliane FINET

Inspectrice de l’Education nationale

OCCE de l’Isère

12. Michel LEDROIT

Professeur des écoles

OCCE d’Indre-et-Loire

13. Renaud LUNARD

Professeur des écoles

OCCE de Corrèze

14. Philippe MAHUZIES

Professeur des écoles

OCCE de l'Hérault

15. Jany NEVEUX

Professeur des écoles

OCCE de l’Isère

16. Jean-Claude PILON

Professeur des écoles

OCCE du Lot-et-Garonne

17. Jean-Pierre POLETTO

Professeur d'Histoire

ESPE-Université de Strasbourg

OCCE du Haut-Rhin

18. Christian ROBILLARD

Professeur des écoles

OCCE du Val-d’Oise

19 . Nicole ROSSO

Professeure des écoles

OCCE de l’Eure

20. Michèle VILLON-PERIN

Professeure des écoles

OCCE du Var

21. Jean-Georges WEBER

Professeur des écoles

OCCE du Bas-Rhin

22 . Martin WENZ

Professeur des écoles

OCCE de Corse du Sud

Nouveau Conseil d’Administration de la Fédération nationale de l’OCCE

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V i e F é d é r a l edu 31 août au 18 décembre

20152015

La Rentrée SolidaireUN CAHIER, UN CRAYON

www.uncahier-uncrayon.org

avec les enfants du Mali

Oui, je soutiens les actions de Solidarité Laïque en France et dans le monde. JE FAIS UN DON DE :

Voici mes coordonnées :Nom : ............................................................................................................................................................................................

Prénom : ....................................................................................................................................................................................

Adresse : ....................................................................................................................................................................................

Code postal : b Ville : ..............................................................................................................................

Courriel : ....................................................................................................................................................................................

Solidarité Laïque est habilitée à recevoir des legs. Renseignements : 01 45 35 13 13 ou : [email protected]

� Je recevrai le reçu fi scal me permettant une réduction d’impôts de 66%, soit les deux tiers de ce montant, mais donnant à l’association la possibilité d’agir 3 fois plus qu’il ne me coûte.

� Veuillez trouver ci-joint mon versement par chèque à l’ordre de Solidarité Laïque. Merci de m’adresser le livret d’informations sur les « Legs » en faveur

de Solidarité Laïque.

J’autorise Solidarité Laïque à m’informer de son actualité.

Soit, après déduction fi scale :

15 € 30 € 50 € 100 € ............................. €

5,10 € 10,20 € 17 € 34 € À ma convenance

Informatique et Liberté : Pour tout droit d’accès et de rectification, s’adresser à Solidarité Laïque. Si vous ne souhaitez pas que votre adresse soit échangée, veuillez cocher la case ci-contre ❏.

Organisée avec

Sous le haut patronage de la Ministre de l’Education nationale

Soutenez l’action de Solidarité Laïque, faites un donÀ retourner avec votre versement à : Solidarité Laïque - 22 rue Corvisart 75013 Paris

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LES ECHOS DES LES ECHOS DES

10 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Un nouvel outil pour les classes :

Jard’infosDepuis sa création en 2014, Jard’infos, la lettre numérique d’infos bimestrielle de l’OCCE du Cher est 100 % jardinage bio et pédagogie coopérative !

Jard’infos, qui a la coopération dans ses gènes, propose aux classes :

• de se tourner vers le vivant avec des fiches conseils pour préserver une grande biodiversité dans leur jardin, des fiches techniques pour la construction de nichoirs, mangeoires, hôtels à insectes… et l’utilisation d’astuces bio pour lutter contre les indésirables.

• De se tourner vers d’autres classes en partageant des expériences, en découvrant des techniques de planta-tions différentes avec la culture sur bottes de paille d’une école maternelle, le jardin en carré surélevé d’une école élémentaire qui facilite le travail des élèves en fauteuil roulant de l’ULIS école ou encore les serres pédagogiques d’une SEGPA de collège urbain.

• De partir à la découverte du « monde extérieur », en leur présentant des jardins et des espaces protégés de la région, des « jardins remarquables » à visiter.

A travers ses rubriques au fil des mois, Jard’infos partage avec les jeunes coopérateurs secrets et techniques pour un jardin pédagogique renouvelé.

Le jardin étant un excellent terreau pour faire germer la pédagogie, Jard’infos s’intéresse aussi aux sciences, à la littérature jeunesse avec des propositions d’ouvrages et aux arts plastiques avec, par exemple, du land art réalisé par des élèves lors d’ateliers animés par l’artiste plasticien Marc Pouyet.

Toutes les rubriques : Un jardin peu ordinaire, Petits travaux de saison au jardin, Actualités des jardiniers, Un lieu à visiter, La cabane à outils ainsi que le « dossier » du bimestre sont identi-

fiés par un dessin de l’illustrateur Patrick Soulat.Retrouvez tous les numéros de Jard’infos sur le site de l’OCCE du Cher : www.occe.coop/ad18, rubrique « Actions nationales », sous rubrique « Écoles fleuries ».

Bénédicte Bonnin

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11Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

LES ECHOS DES

11

Conférence sur le Climat à Paris (COP 21)

Vers une nouvelle étape dans l’histoire humaine !Du 30 novembre au 11 décembre 2015, la France va présider la 21ème Conférence Paris/Climat sur les changements climatiques COP 21 qui doit aboutir à un nouvel accord international dans l’objectif de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2°C. Chacun à son niveau peut contribuer à atteindre cet objectif en impulsant des actions comme « Un débat par classe pour le climat ».La Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques a été adoptée au cours du sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992. Elle est entrée en vigueur le 21 mars 1994 et a été ratifiée par 196 « parties » prenantes à la Convention. Cette convention universelle de principe recon-naît l’existence d’un changement climatique d’origine humaine et donne aux pays industrialisés le primat de la responsabilité pour lutter contre ce phénomène. 20 ans plus tard, cette lutte est de plus en plus cruciale et la France qui présidera la 21ème conférence sur les changements clima-tiques (COP 21) a un rôle à jouer au niveau international mais aussi national.Du côté de l’Education nationale, la mise en œuvre de l’édu-cation à l’environnement n’est pas nouvelle puisqu’elle existe depuis une circulaire de 1977 et s’est développée progressivement. En 2013, la loi de la refondation de l’Ecole inscrit l'EEDD dans le code l’éducation et lance la labellisation « E3D » des écoles et des établissements en démarche globale de développement durable. En 2015, lors

d’un communiqué de presse, les ministres de l’Education et de l’Ecologie présentent les mesures sur l’éducation à l’en-vironnement et au développement durable. Ces mesures se déclinent par des actions concrètes et de nombreux disposi-tifs permettent aux élèves de s’impliquer dans une démarche éco-citoyenne(1).Les objectifs sont nombreux et interdisciplinaires mais l’es-sence même de cette éducation à l’environnement durable est de permettre aux élèves d’en comprendre les enjeux pour agir en citoyen responsable et éclairé. Les questions s’articulent autour de trois axes : la compréhension des rela-tions environnementales, économiques et socioculturelles.

L'OCCE impliquéL’OCCE s’est emparé de ce thème au travers d’un réseau de partenaires qui prend « le pari que se tiendra un débat sur le climat dans chaque classe mais aussi dans tout type d’es-paces éducatifs, d’ici la COP 21 (Maisons des jeunes, Conseils des enfants, Séjours d’été, Centres de loisirs ou d’anima-tion...).Cette action intitulée « Un débat par classe pour le climat » permet « à chacun de devenir citoyen, d’apprendre à écou-ter, à participer, à s’exprimer, à argumenter, à échanger ses idées, à co-construire sa réflexion. C’est apprendre à « faire ensemble ». A chacun d’adopter la méthode qui lui convient. »Afin de mettre en œuvre cette démarche, des moyens sont mis à disposition(2) pour organiser ce débat, nourrir la réflexion et valoriser les actions.

Sophie Maissin

1. Vous pouvez retrouver des renseignements sur le lien suivant :

http://www.education.gouv.fr/cid205/l-education-au-developpement-durable.html

2. Rendez vous sur : http://reseauecoleetnature.org/fiches-pedagogiques.html contact : [email protected] 04.67.06.18.70

Un débat

par classe

pour le climat

Le Réseau Ecole et Nature, réseau national

d’Education à l’Environnement vers un

Développement Durable,

s’engage pour le climat.

Un projet du Réseau Ecole et

Nature et de ses p

artenaires

UN PARI

VOTRE INITIATIVE

LE DÉBAT

PROLONGEMENTS POSSIBLES

Nous prenons le pari que, d’ici la COP 21, se tiendra un débat sur le climat

dans chaque classe mais aussi dans tout type d’espaces éducatifs (Maisons des

jeunes, Conseils des enfants, Séjours d’été, Centres de loisirs ou d’animation...).

Enseignants, animateurs, parents, associations, collectivités et tous citoyens

impliqués pour l’éducation et la transition écologique, vous êtes invités à

prendre l’initiative d’organiser des débats.

Débattre, c’est permettre à chacun de devenir citoyen, d’apprendre à écouter,

à participer, à s’exprimer, à argumenter, à échanger ses idées, à co-construire sa

réflexion. C’est apprendre à «faire ensemble». A chacun d’adopter la méthode

qui lui convient.

- Pour organiser un débat

Des fiches méthodologiques sont mises à votre disposition. Nous vous invitons

à les découvrir, les expérimenter et les enrichir en nous faisant part de vos vécus.

- Pour nourrir sa réflexion

Vous vous questionnez sur le sens

d’un débat, sur les problématiques

liées au changement climatique... Des

fiches transversales vous y aideront.

- Pour valoriser son action

Partagez votre expérience pour contribuer à la COP 21 : une vidéo, un article,

un dessin, un slogan... Laissez libre cours à votre créativité pour retransmettre le

meilleur de vos débats !

Les jeunes peuvent réinvestir les méthodes expérimentées et organiser eux-

mêmes des débats dans les établisements scolaires, pour les habitants, dans

leurs quartiers, leurs villages...

Construisons,

ensemble, les débats

pour le climat !

Paris Climat 2015 - COP 21

Conférence des parties de la Convention-cadre

des Nations Unies sur le changement climatique

du 30 novembre au 11 décembre 2015.

www.cop21.gouv.fr

Circulaire ministérielle (MENESR) 2015 - 2018

du 4 février 2015 :

«Les écoles et établissements scolaires sont

également invités à organiser des débats sur les

enjeux liés au changement climatique tout au long

de l’année 2015»

Nos partenaires :

Des syndicats d’enseignants :

SGEN-CFDT, SNUipp - FSU

Des mouvements pédagogiques :

OCCE, ICEM - Pédagogie Freinet

Des membres du Réseau Ecole et Nature :

Alter Alsace énergies, AREpb, ARIENA, Aroeven, Au

Fil des Séounes, COOPERE 34, CPIE Bassin de Thau,

CREE Auvergne, DIFED, Demain la Terre !, Envie

d’Environnement, GRAINE Rhône-Alpes, GRANDDIR,

Le Loubatas, REEB, RéeL 48, Sentiers Vagabonds,

Vosges Climat 2015...

Et l’Institut Français de l’Education - ENS de Lyon

Vous êtes intéressé(e) par notre initiative,

contactez :

[email protected]

04.67.06.18.70

Pour télécharger, gratuitement, nos fiches pédagogiques

Rendez vous sur :

http://reseauecoleetnature.org/un-

debat-par-classe-pour-le-climat.html

Fédération des

Syndicats Généraux de

l’Education Nationale

Syndicat National Unitaire des

instituteurs professeurs des

écoles et Pegc affilié à la FSU

Institut Cooperatif

de l’Ecole Moderne,

Pedagogie Freinet

Office Central de

la Coopération à

l’Ecole

Institut Français de

l’Education

DES MOYENS (bientôt disponible sur www.reseau

ecoleetnature.o

rg)

Page 12: Coopérer 2.0

P o i n t d e v u e

12 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Coopérer en actes,

Du « vivre ensemble » au « faire ensemble »« Coopérer ?», thématique centrale de la biennale de l’éducation et la formation 2015, a donné lieu à 150 événements (conférences, symposia, ateliers…) dont cette intervention de Philippe Meirieu, professeur des universités, pédagogue et écrivain, sur « Coopérer en actes : du vivre ensemble au faire ensemble ». Extraits.

Je formulerai mes remarques autour de deux grands axes : il y a beaucoup de « bonnes » raisons pour ne pas coopérer mais il y a beaucoup de bonnes raisons et des raisons impé-rieuses pour coopérer. Je précise que j’emploie ici, à des-sein, le mot « raison » et non le mot « cause » car, en matière d’action humaine, il n’y a pas vraiment de causes, il n’y a que des raisons dont nous nous saisissons en fonction de ce que nous décidons de privilégier dans nos finalités.

D’abord, donc, il y a de bonnes raisons de ne pas coopérer.

� Coopérer prend du temps. La coopération produit toute une série d’activités parasites qui, finale-ment, peuvent nuire à ce que nous considérons comme prioritaire.

� Coopérer nous impose un certain nombre de renon-ciations narcissiques, en particulier celle qui consiste à décider seul, à pouvoir se revendiquer l’auteur unique d’une œuvre qui, dès lors qu’elle est collec-tive, ne peut plus être celle d’une personne.

� La coopération brouille souvent les hiérarchies sociales et intellectuelles. Faut-il faire coopérer des gens alors qu’il y a de toute évidence certains d’entre eux qui sont plus compétents que d’autres ? La coopération peut apparaître, à bien des égards, comme la négation, sinon de la hiérarchie, du moins de la différence objective des compétences entre les individus.

� La coopération stratifie souvent les groupes humains en quatre catégories relativement standardisées que l’on retrouve à peu près partout : les concep-teurs, les exécutants, les chômeurs et les gêneurs. Dès que vous mettez des individus dans l’injonction de coopération sans les accompagner, que ce soit dans une colonie de vacances, une classe ou une université, assez vite les concepteurs émergent, les exécutants dociles s’exécutent, les chômeurs ne font rien car s’ils participaient, cela gâcherait le résultat final. Quant aux gêneurs, il faudrait pouvoir s’en passer car ils font perdre du temps à tout le monde ! On se débrouille donc pour marginaliser les chômeurs et les gêneurs tout en leur expliquant que si le résultat est de qualité, c’est grâce à leur abs-tention dans sa fabrication.

Ce qui m’agace aussi dans l’injonction à la mode à la coopé-ration, c’est que cela devient, aujourd’hui, un moyen d’es-quiver, voire de nier les processus démocratiques. Combien de fois dans mes fonctions administratives, j’entends ce mot devenu aujourd’hui incontournable : « co-construction ». Et, au prétexte qu’un projet serait « co-construit », il devient indiscutable, toute objection ou alternative est récusée ! Or, la co-construction ne garantit pas que la démarche adoptée soit la seule possibilité. Il peut exister différents scénarios et la démocratie impose de les proposer au choix, même si l’un d’eux n’a été produit que par une seule personne.

« Vivre » ou « faire » ensemble ?

Il y a donc plusieurs bonnes raisons de ne pas coopérer et de se dire que la coopération crée plus de problèmes qu’elle n’en résout. Mais il y a aussi des raisons impérieuses pour coopérer.D’abord l’humain ne se construit pas seul. Il se construit en tissant, de manière subtile et sans fin, la ressemblance et la différence en un lien social que l’on appelle souvent aujourd’hui le « vivre ensemble ». Je dois dire que je fais partie de ceux que cette expression agace. On peut « vivre ensemble » lobotomisés sous la coupe d’un gourou charismatique ou tyrannique. On peut « vivre ensemble » dans la juxtaposition des indifférences. On peut également, et c’est cela qui est important, « vivre ensemble » en construisant du collectif. C’est la raison pour laquelle j’ai tendance à préférer, dès lors qu’il s’agit d’éducation ou de formation, l’expression du « faire ensemble » à celle du « vivre ensemble ».

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P o i n t d e v u e P o i n t d e v u e

13

Et ce qui a été développé pendant cette Biennale, c’est bien une coopération centrée sur trois dimensions fondatrices du « faire ensemble » : la dimension du projet, du mode de fonctionnement, et, enfin, de la nature et de la distribution des tâches.

La notion de projet

Il y a une ambigüité sur cette notion de projet au sein de ce que nous appelons la coopération : le projet doit-il préexis-ter ou bien est-il lui-même créé par la coopération ? Doit-il être mobilisateur et configurer une coopération dont les contours sont déjà définis ? Ou le projet doit-il être construit collectivement et capable d’intégrer d’autres que ceux qui l’ont déjà proposé ? La question implicite est celle de l’ad-hésion au projet dans la coopération. Or, pour moi, le projet est plus une dynamique, voire une dialectique, qui s’enrichit de l’apport de chacun à partir d’une mobilisation initiale, plutôt qu’une programmation a priori à laquelle il faudrait adhérer sans broncher. Le projet se nourrit de toutes les contributions et il doit emporter l’adhésion de ceux et celles qui ne s’y « conforment » pas mais contribuent à l’enrichir et à le modifier. Le projet doit être fondamentalement intégra-teur sans être normalisateur.

Le mode de fonctionnement

Que se passe-t-il quand on demande à des gens de coopérer et que leur demande-t-on concrè-tement de faire ? Il me semble qu’il y a trois types d’activités dominantes : produire ou créer ; transmettre ; apprendre. Or, il me semblerait intéressant, lorsqu’on évoque la notion de coopération, de préciser ce que nous attendons précisément des participants.Dans une logique où l’essentiel est de produire ou créer, la division du travail est tout à fait légitime. Dans une logique où l’essentiel est de transmettre, la dissymétrie des places est légitime et l’on pourrait réfléchir sur le caractère coopé-ratif des classes multiniveaux. Je fais partie de ceux qui militent fermement pour des « classes verticales », plutôt sur le modèle « mutuel » que sur le modèle « simultané » imposé par Guizot dans les années 1930, où tous les élèves sont censés avoir le même niveau et faire la même chose en même temps. Et il y a la logique où l’essentiel est l’apprentissage collectif entre pairs : c’est la plus compliquée à mettre en œuvre. Qu’est-ce qu’un apprentissage ? Comment peut-on « apprendre

ensemble » ? Rien n’est moins évident et cela nécessite un « mode de fonctionnement » très rigoureux tel que j’ai tenté de le définir dans mes ouvrages « Apprendre en groupe ? »(1). Il me paraît donc essentiel, lorsque nous parlons de coopération, de préciser ce que nous voulons dire et ce que nous voulons améliorer dans les comportements humains.

Enfin, la définition des tâches

Dans la coopération, la notion d’autorité et celle de respon-sabilité peuvent enfin s’inverser. Ce n’est plus l’autorité qui donne des responsabilités, c’est la responsabilité qui donne l’autorité. C’est parce que je suis responsable dans un col-lectif qui coopère que j’ai autorité sur quelque chose dans ce collectif. C’est ce qui fait qu’un enfant de trois ans peut avoir autorité sur le bocal de poissons rouges parce qu’il a été désigné comme responsable de ce bocal au nom du col-lectif. En ce sens, la coopération est l’apprentissage que

l’autorité est légitime dans un collectif dès lors qu’elle est subordonnée à une responsabilité et identifiée au nom de cette responsabilité.Coopérer est donc une affaire compli-quée. Il y a de multiples raisons de le faire et ces raisons me paraissent de très loin plus importantes que celles de ne pas coopérer mais il ne faut pas croire, pour autant, que l’on se débarrassera facilement des résistances à la coopéra-tion qui sont importantes. Ces résis-tances doivent être regardées en face, y compris quand elles émergent chez les promoteurs de la coopération. C’est ainsi que nous progresserons.

Intervention recueillie par Marie-France Rachédi

1. Voir sur le site de Philippe Meirieu les ouvrages publiés : www.meirieu.com

Il me paraît donc essentiel, lorsque nous parlons de coopération, de préciser ce que nous voulons dire et ce que nous voulons améliorer dans les comportements humains.»

Philippe Meirieu, professeur des universités,

pédagogue et écrivain

La Biennale de l’éducation et la formationLa dernière biennale de l’éducation et la formation s’était déroulée à

Lyon en 2006.

L’édition 2015 sonne donc comme un renouveau. Conçue et réalisée en partenariat par le CNAM et l’Association Biennale, elle s’est déroulée avec succès, du mardi 30 juin au vendredi 03 juillet, autour de la thé-

matique centrale « Coopérer ? ». En savoir plus : http://labiennale.cnam.fr/

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A u t o u r d u m o n d e

14 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Regard d’Asie sur les partenariats coopératifsL'Association départementale OCCE du Cher a accueilli, au printemps 2014, Yumi Tsuji, interprète et traductrice japonaise d’ouvrages de pédagogie. Cette dernière s’intéressait à la pédagogie coopérative et aux projets scolaires qui s’appuient sur des partenariats extérieurs.

Suite à cette première rencontre, Yumi Tsuji a exprimé le souhait d’organiser un temps de formation sur cette théma-tique à l’intention d’un groupe associatif d’une douzaine de bibliothécaires, enseignants et chercheurs-universitaires venant de différentes villes du Japon, réunis autour d’une même préoccupation : la lecture et l’écriture.

Pour répondre à cette demande précise, l’association OCCE du Cher a élaboré un stage de formation autour de certaines actions coopératives qu’elle met en œuvre ou qu’elle co-or-ganise en partenariat avec différentes structures, en parti-culier la Direction Académique des Services de l’Education Nationale du Cher et la Médiathèque de Bourges.

A l’issue d’échanges et de temps de préparation entre les différents acteurs, la délégation japonaise a été accueillie à Bourges, les 23 et 24 mars derniers.

La première journée du stage a été consacrée pour l’essen-tiel à étamine. Après une présentation de cette action natio-nale OCCE, il fut question de son accompagnement dans le département : rôle de l’association départementale, outils mis en place, réseau sollicité... suivi de temps de rencontres dans deux écoles avec des enseignants et des classes partici-pant à étamine 2015. La diversité et la richesse des ques-tions témoignaient de l’intérêt que portait la délégation à ce projet qui induit des pratiques pédagogiques et des modes de fonctionnement éloignés des habitudes japonaises.

Au cours de la seconde journée, les stagiaires ont été reçus à la Médiathèque de Bourges. Après une découverte des lieux, plusieurs actions partenariales leur ont été présen-tées : Printemps des Poètes à l’Ecole, Cher-Lurelu, Prix des jeunes lecteurs de théâtre, Défi lecture des CM1 de la Ville de Bourges*. Les membres de la délégation ont été surpris par la qualité et la diversité des collaborations construites

dans le cadre de ces différents projets. Ils ont témoigné un grand intérêt pour l’implication des personnels de la Médiathèque et la qualité des échanges entre les différents professionnels lors de la réalisation concrète de séances partagées.

A notre demande, une présentation du kamishibaï, théâtre de papier, par une bibliothécaire faisant partie de la déléga-tion s’est déroulée dans une école : présentation d’un conte traditionnel à des élèves de maternelle, échanges avec le public, puis débat avec les adultes présents.

http://www.occe.coop/~ad18/spip.php?article136

Les débats qui se sont déroulés lors de ce stage augurent, à n’en pas douter, de nouvelles collaborations.

Emmanuelle Besset-Ferreira et Philippe Paillard

OCCE du Cher

* Quatre actions partenariales en appui sur la littérature jeunesse, proposées aux écoles du département.

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A u t o u r d u m o n d e Autour du monde

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Photos : Présentation du kamishibaï, théâtre de papier, par une bibliothécaire faisant partie de la déléga-tion s’est déroulée dans une école : présentation d’un conte traditionnel à des élèves de maternelle.

Témoignage de Yumi Tsuji, interprète

« Nos deux journées à Bourges ont été très riches et très denses. Les livres confectionnés par les

enfants nous ont émerveillés et nous avons su comment ils étaient amenés, à chacune des étapes ; comment les élèves parvenaient à se concerter, à débattre et à se mettre d’accord pour que leurs travaux aboutissent

à une réalisation commune. Faire créer un livre par tous les enfants de la classe, cela nous paraît déjà une action bien entrepre-nante mais nous avons appris que le projet étamine ne s’arrête pas là : le livre ainsi fabriqué sera lu et critiqué par d’autres classes. Il est certain que cet échange assure un sens et une ouverture à la créa-tion. Nous avons également observé une séance du Défi-Lecture, projet de la ville de Bourges, et pris connaissance d’autres opé-rations municipales et départementales.

Un autre point qui nous a bien impressionnés, c’est qu’il existe dans tout cela un véritable partenariat entre l’école, les bibliothèques et d’autres structures sociales, éducatives et culturelles.

La coopération, l’échange, le partenariat, voilà les notions que nous avons retenues lors de notre visite de Bourges et qui alimen-teront nos réflexions.

Bien cordialement. »Yumi Tsuji

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L e J o u r n a l s c o l a i r e

Créer son journal, un jeu d’élèves !Dans le cadre de la Semaine de la Presse 2015, Madmagz, plateforme d’outils et de services permettant de créer et publier des magazines multimédia en ligne, a rendu son offre éducative gratuite donnant ainsi la possibilité à des centaines d’enseignants et d’élèves, de la maternelle au lycée, de créer leur journal scolaire.

402 établissements scolaires participants, 505 magazines créés et 145 publiés… Voici de quoi être satisfait ! L’offre de Madmagz de donner accès gratuitement aux enseignants et élèves à ses outils et services pendant la Semaine de la Presse et des Médias dans l’Ecole® peut donc être considé-rée comme un succès. Mais que propose Madmagz ? La possi-bilité de créer son magazine multimédia au format web, pdf ou papier grâce à des maquettes clés en main combinant textes, images, design et donnant même la possibilité d’in-sérer des vidéos ou des interviews sonores. Les professeurs peuvent ainsi monter un projet pédagogique multidiscipli-naire, stimulant et inspirant autour du journal scolaire sans avoir à acheter les logiciels de mise en page, à apprendre à les manipuler ou à créer une charte graphique. Enseignants et élèves réalisent le contenu (sélection des informations, choix des thématiques, rédaction d’articles, prises de photos ou réalisation des illustrations, choix des rubriques…), puis se rendent sur la plateforme Madmagz pour sélectionner un modèle de magazine, rédiger les titres et les textes dans les emplacements prévus et insérer les illustrations dans les espaces dédiés.

Comment fonctionne Madmagz ?L’enseignant doit d’abord créer un compte en entrant un email et un mot de passe, puis cliquer sur le bouton « créer ». Il sera alors invité à choisir une maquette (ensemble de pages dont le design est déjà créé). Plusieurs maquettes sont proposées pour répondre à différents objec-tifs éditoriaux : créer une newsletter, un journal de classe ou un catalogue. Une fois ce choix réalisé, reste à remplir les pages qui composeront le journal. Plusieurs sont également proposées : couverture, sommaire, édito, article, interview, brève… Il est permis d’insérer autant de pages que l’on veut (mais attention au coût de publication qui varie suivant le nombre de pages de votre magazine).Sur la plateforme Madmagz, un tutoriel explique clairement les étapes et le fonctionnement de cet outil : https://madmagz.com/fr .

Une plateforme collaborative Atout important de cet outil : il est collaboratif ! L’enseignant n’est pas obligé de réaliser tout le travail de saisie des articles, positionnement des photos… car il peut inviter des rédacteurs en leur envoyant, par mail, un lien pour accéder au magazine en cour de création. Chaque élève ou groupe d’élèves peut ainsi construire sa propre page et l’envoyer à l’enseignant qui, après toutes les vérifications nécessaires, pourra l’éditer.Une fois toutes les pages terminées et le magazine publié, les créateurs peuvent partager le lien permettant d’accéder à leur support avec les parents, d’autres élèves, sur le site de l’établissement ou sur les réseaux sociaux.Finalement, le plus difficile, c’est bien, comme souvent, de rédiger les contenus : trouver des idées d’articles, réaliser des interviews, aller à la pêche aux informations, vérifier…

Marie-France Rachédi

A savoir :

La Région Picardie met à disposition de tous ses lycées la ressource Madmagz

Dans le cadre d’un appel à marché public visant à mettre à dispo-sition de ses 150 lycées un bouquet de ressources numériques, la Région Picardie a retenu l’outil Madmagz pour la création et la publication de magazines et journaux scolaires en ligne.

Concrètement, Madmagz sera proposé directement dans la liste des ressources pédagogiques disponibles dans l’Environnement Numérique de Travail (ENT) de l’ensemble des lycées de la région. Le contrat entre Madmagz et la Région court sur une période de 4 ans.

http://osonsinnover.education/infographie-madmagz-pendant-la-semaine-de-la-presse-2015/

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17Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

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Ready to join them on their trip to Liverpool

« Prêt à les rejoindre dans leur voyage à Liverpool » ? « Les », ce sont les élèves d’une classe de seconde du Lycée Julie-Victoire Daubié à Argenteuil et leur enseignante d’anglais, Yasmine Trouillard, maître d’œuvre de ce projet de création d’un magazine numérique avec Madmagz, immortalisant leur voyage d’étude riche en découvertes culturelles et linguistiques dans la mythique Liverpool et sa région.

Un voyage inoubliable et ça se lit ! Des élèves de seconde du Lycée Julie-Victoire Daubié à Argenteuil ont même réussi à immortaliser ce voyage d’étude à Liverpool et dans sa région effectué en mars 2015 grâce à la réalisation d’un magazine entièrement en anglais retraçant leur périple en Angleterre des bains romains de Bath à Liverpool et son musée des Beatles, puis Conwy Castle et la station balnéaire de l’époque Victorienne de Llandudno au nord du Pays de Galles, avant de s’arrêter à Cambridge sur le chemin du retour ! Un plaisir pour les yeux et les oreilles ! Un important travail initié par Yasmine Trouillard, leur professeure d’an-glais, qui n’en est pas à son premier essai puisqu’elle a mené l’année dernière un projet de magazine numérique sur l’Ir-lande et la Saint-Patrick avec une classe de seconde(1). La qualité du travail réalisé par ses élèves, leur enthousiasme

et motivation l’ont conduite, cette année, à renouveler l’ex-périence profitant, ainsi, de l’offre gratuite de Madmagz (voir article ci-contre) pendant la Semaine de la Presse et des Médias dans l’école ®. « Le séjour d’études à Liverpool réalisé avec une autre classe de seconde, explique l’ensei-gnante, devait constituer la matière de ce nouveau maga-zine afin de valoriser les spécificités culturelles de Liverpool et sa région ». Le projet a été présenté aux élèves dès le début du mois de février et l’objectif clairement annoncé : ils devront promouvoir Liverpool dans un magazine numé-rique pour adolescents en incluant, comme le permet l’outil Madmagz, des articles écrits, des reportages parlés et des interviews. Un défi de taille donc surtout que, difficulté supplémentaire, ils devaient rédiger et réaliser les inter-views dans la langue de Shakespeare !Défi pour Yasmine Trouillard qui, outre la préparation du voyage d’étude, devait organiser et orchestrer toutes ces activités journalistiques. « Le travail est, en effet, consé-quent, confirme Yasmine Trouillard. Commencé en février, il s’est terminé avant les vacances d’avril. Beaucoup de temps a été consacré à l’organisation, l’explication des tâches, puis l’évaluation des travaux. »En amont, le cours d’anglais a permis aux élèves de décou-vrir les spécificités de la culture locale de Liverpool lors d’une séquence sur Liverpool en classe.Le projet avait un volet interdisciplinaire. Valérie Paireau, sa collègue d’Histoire-Géographie DNL (Disciplines non Linguistiques) apportait en parallèle les connaissances historiques nécessaires à une meilleure compréhension des sites visités.

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L e J o u r n a l s c o l a i r e

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Un livret d’activités à réaliser par les élèves accompagnant chaque visite a également été préparé conjointement par les deux enseignantes. Ce livret d’activités permettait déjà d’attirer l’attention des élèves sur certains traits culturels et historiques clés.

Une organisation déjà rôdéeL’organisation mise en place l’année dernière s’étant avérée efficace, Yasmine Trouillard l’a donc reprise. La classe a été divisée en groupes de 3 reporters. Même les élèves qui ne partaient pas à Liverpool ont été intégrés au projet (recherche d’information sur Liverpool, interviews de leurs camarades sur ce qu’ils ont vu, ressenti, aimé…). Le calendrier de pro-duction a également été soigneusement pensé (voir encadré) et les élèves ont tenu les délais. Chaque groupe de 3 reporters a réalisé un petit journal. La compilation de tous ces petits supports a constitué le produit final(2) : deux superbes maga-zines « An unforgettable trip » et « Tripmagz ».

Et qu’en est-il de l’outil Madmagz alors ? « Très bien, approuve l’enseignante d’anglais. Compte tenu du travail important qu’exige la réalisation d’un tel projet éditorial, il était difficilement envisageable de réaliser éga-lement la mise en page. Cet outil au maniement convivial,

fort simple et collaboratif a grandement facilité la réalisa-tion d’un magazine scolaire de cette envergure. Madmagz offre à toute personne novice dans l’édition la possibilité de se lancer dans des projets ambitieux ».

Témoignage recueilli par Marie-France Rachédi

1. Voici les adresses des deux magazines en ligne réalisés l’an dernier :Style grand public : http://madmagz.com/fr/magazine/339330Style tabloïd : http://madmagz.com/fr/magazine/339330

2. Voici les liens des magazines de mes élèves. Cela vous permettra de voir le projet terminé :

https://madmagz.com/fr/magazine/513269

https://madmagz.com/fr/magazine/513268

Vendredi 6 février 2015 : explication du projet aux

élèves, avec remise du docu-ment d’explication des tâches et de leur répartition. Découverte de Madmagz sur Internet et choix de maquettes. Constitution des groupes de trois reporters : chaque groupe doit se créer une adresse mail « Gmail » et envoyer un message à l’enseignante pour qu’elle puisse leur envoyer l’invitation Madmagz.

Travail pour les vacances d’hiver : assigner les

rôles par jour à chaque élève en regardant le programme du voyage à Liverpool. Chaque élève doit travailler toutes les compétences pendant le séjour (expression écrite, expression orale en continu et expression orale en interaction). Les rôles changent donc chaque jour et ils doivent tous s’entraider, notam-ment pour interviewer des pas-sants, prendre des photos... La cohésion de groupe est éva-luée. Les élèves doivent aussi préparer une liste de questions à poser durant leur séjour.

Mardi 10 mars : départ à 17h pour Liverpool. C’est

le moment de vérifier que tous les élèves ont bien avec eux le document récapitulatif remis le 6 février et de leur rappeler leur mission.

Durant le voyage : rappe-ler chaque jour aux élèves

que les rôles changent et leur donner des conseils pendant les visites. Ménager des temps libres également.

Au retour du voyage, mardi 17 mars : échéan-

cier de remise des travaux.

Pour le mardi 24 mars : rapporter les reportages

parlés et interviews sur clé USB (l’enseignante en garde une copie).

Pour mardi 31 mars : m’envoyer son article

écrit sous Word (prétexte pour garder une copie des travaux et dynamiser le travail).

En parallèle, les élèves ont tapé leurs articles sur les pages de la maquette. En classe, ils ont relu les articles de leurs cama-rades pour corriger un maxi-mum d’erreurs.

Mardi 7 avril : séance de correction collaborative,

choix des photos, préparation des couvertures et envoi final des pages. En amont, les élèves ont été sensibilisés au droit à l’image et à la notion d’image libre de droits.

Bouclage : Le mardi 14 avril, le numéro était

bouclé par les élèves. L’enseignante allait ensuite prendre le relais pour inclure les productions orales de tous les élèves dans le magazine, organi-ser la cohésion des pages, les numéroter et modifier les som-maires en conséquence. « J’ai choisi de laisser les maladresses et erreurs des élèves. Seules les erreurs faisant obstacle au sens ont été corrigées. L’entraide des élèves pour la correction mutuelle a permis des produc-tions de qualité, ce qui a facilité la relecture ».

Les magazines ont été publiés sur Madmagz en mai.

Les moments clés du planning

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19Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

P R O J E T S C O O P É R AT I F S

Lorsqu’on pense coopération à l’école, on pense généralement à la coopération entre enfants, mais qu’en est-il entre adultes ? Et qu’en est-il lorsque des enseignants d’une école primaire pratiquant une pédagogie « différente » et des chercheurs universitaires décident de travailler ensemble ? Entre octobre 2013 et juillet 2014, six chercheurs du laboratoire EMA de l’université de Cergy-Pontoise et un chercheur du LIRDEF de l’université Montpellier 3(1)

ont relevé ce défi de construire un projet de recherche collaboratif, avec l’équipe enseignante de l’école élémentaire d’Oran à Paris (18e).

L’idée naît suite à une première collaboration entre Véronique Bavière, la directrice de l’école élémentaire d’Oran à Paris (18e) et moi, autour d’un article décrivant le projet pédagogique qu’elle y mène(2). La directrice souhaite que des chercheurs étudient le travail de l’école et ses

effets. Il s’agirait d’aider l’équipe enseignante à se distan-cier de ses pratiques et à les améliorer, d’évaluer des acqui-sitions scolaires d’élèves, de permettre une évaluation de l’école par ses partenaires. En mai 2013, plusieurs cher-cheurs de notre laboratoire se disent intéressés, ainsi que Sylvain Connac. Je propose à la directrice qu’avec l’équipe enseignante nous élaborions un projet de recherche collabo-rative en 2013-14, pour une mise en œuvre les années sui-vantes. Les enseignants accueillent favorablement la propo-sition. La demande est donc conjointe : l’équipe enseignante veut travailler avec des chercheurs ; l’équipe des chercheurs souhaite étudier des pratiques d’écoles « différentes ».

Octobre-décembre 2013 : la rédaction d’un pré-projet par les chercheurs et la préparation de la première réunion entre enseignants et chercheurs

Entre la mi-octobre et fin novembre, les chercheurs rédigent un pré-projet. Il nous permet de nous accorder sur nos orien-tations méthodologiques et de recenser les objets de recherche sur lesquels nous sommes prêts à nous engager. Nous préparons également la première réunion avec l’équipe enseignante. Nous jugeons essentiel de rencontrer l’ensemble de l’équipe, ce qui n’engage aucun enseignant par la suite, pour écouter les demandes. Nous comptons aussi présenter le pré-projet, aborder la question de l’information de la hié-rarchie et des autorisations à demander. Nous enregistrerons la réunion et prendrons des notes pour faciliter la rédaction du projet définitif.

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Construire un projet de recherche collaboratif entre des enseignants et des chercheurs, c’est possible !

Page 20: Coopérer 2.0

P R O J E T S C O O P É R AT I F SJanvier-mai 2014 : l’élaboration et la contractualisation du projet

La réunion a lieu le 14 janvier 2014. Les enseignants ne se sont que partiellement exprimés, ce qui est normal puisque la demande de départ émanait de la directrice et des cher-cheurs, qu’ils viennent de découvrir notre proposition. Faire émerger progressivement des demandes chez les enseignants fait donc partie de la phase d’élaboration du projet. Pour cela, nous prévoyons un double dispositif : le 14 janvier, j’ai laissé mon adresse mail aux enseignants afin que chacun puisse exprimer une demande sans passer systématiquement par l’équipe ; je leur envoie également un tableau compre-nant nos objets de recherche.

Par ailleurs, je demande à la directrice de contacter l’IEN de la circonscription, pour solliciter un entretien où je me ren-drai avec elle. Nous lui exposerons notre projet, répondrons à ses questions, envisagerons comment l’y « associer » et l’informer de son suivi. Il s’agira aussi de réfléchir à la stra-tégie à adopter pour obtenir l’autorisation du DASEN. La rencontre a lieu le 14 février. L’écoute est attentive et les

échanges fructueux. L’IEN donne son accord pour que nous engagions le projet de recherche collaborative avec l’école et se propose d’obtenir la signature du DASEN. Quittant son poste en fin d’année, elle souhaite aussi apporter sa contri-bution en nous proposant d’avoir un entretien avec elle avant juillet.

Plusieurs questions d’enseignants me parviennent début mars. Une question concerne l’apprentissage de gestes pro-fessionnels d’enseignants. D’autres portent sur le déroule-ment des recherches, la crainte qu’elles ne perturbent les pratiques habituelles, la demande de précision de notions ou concepts, de méthodologies de recueil de données. D’autres sont des demandes d’apports formatifs sur les TIC(3), l’orga-nisation de la coopération entre élèves et du travail de groupe, la métacognition, le processus de dévolution, la construction de la discipline dans la classe. D’autres ques-tions encore concernent l’organisation de la recherche : rôle des enseignants, intensité de leur investissement, temps de concertation nécessaire, objets de la recherche, présence des chercheurs, organisation de la collaboration ensei-gnants-chercheurs, utilisation des données enregistrées. Des

20 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Les conditions d’une collaboration (extraits) (1)

� la demande d’autorisation aux autorités hiérarchiques ;

� les conditions financières de la recherche : la recherche ne peut se dérouler si elle n’est pas financée ;

� l’engagement d’inscrire la recherche dans une durée et son calendrier : la durée totale prévisionnelle de la recherche est de 4 années. Rien n’impose à un enseignant de participer à la recherche, mais c’est l’implication qui permet d’ap-prendre et d’en retirer des bénéfices ;

� les questions sur lesquelles porte la recherche ;

� la contribution des chercheurs au développement profes-sionnel des enseignants ;

� la sécurité des personnes : chaque collaborateur au projet a la liberté et la responsabilité de porter des regards à la fois bienveillants (respectueux des personnes) et exigeants sur les dispositifs, les pratiques et leurs effets, mais pas néces-sairement congruents avec ses propres logiques de conviction professionnelle ;

� les temps de recueil et de traitement des informations : les chercheurs s’engagent à apporter leurs compétences dans le champ d’un recueil et d’un traitement rigoureux des données.

Ils respectent une déontologie professionnelle. Ils favorisent l’explicitation des éléments sur lesquels porte l’analyse. En échange, les enseignants s’engagent à mettre à disposition de l’équipe de recherche collaborative leur espace profes-sionnel, sans pour autant accepter toute forme d’ingérence. Les enseignants sont associés à la production de savoirs scientifiques ;

� les temps de mutualisation à l’intérieur de chaque pôle ;

� les temps de restitution : au moins une fois par an ;

� les clauses de confidentialité ;

� la diffusion des résultats : un rapport final est rédigé, qui précise le mode d’élaboration du document et le nom des participants. La co-signature de publications entre ensei-gnants et chercheurs est possible (selon le type de publica-tion envisagé). En cas de bénéfices, un partage en fonction de l’apport de chacun est fixé par contrat.

1. Bien que largement remanié, ce contrat s’inspire de Oury, F. (1968). Réflexions sur la recherche pédagogique. In L. Martin, P. Meirieu et J. Pain (dir.) (2009). La pédagogie institutionnelle de Fernand Oury (pp. 171-176). Vigneux : Matrice

Page 21: Coopérer 2.0

21Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

P R O J E T S C O O P É R AT I F S P R O J E T S C O O P É R AT I F S

enseignants expriment des attentes sur l’état des lieux du fonctionnement actuel de l’école et attendent des retours de notre part pour enrichir les pratiques pédagogiques. Des questions se posent concernant les bénéfices de la recherche pour l’école et les enseignants.

Courant mars, je demande à chaque chercheur d’élaborer des propositions d’objets, de questions, d’hypothèses de recherche qu’il souhaiterait travailler, à partir de ce qu’il a entendu des demandes des enseignants. Six axes se des-sinent, les trois premiers étant privilégiés : l’équipe ensei-gnante, l’évaluation des dispositifs mis en place, les compor-tements des élèves face aux apprentissages, la question de la langue, l’utilisation des TIC, l’aménagement spatial. Le 28 mars, trois chercheurs affinent la proposition. Elle com-prend trois pôles thématiques pour la recherche, avec un chercheur référent par pôle (1. La coopération entre élèves au sein des classes ; 2. Le travail en équipe ; 3. Les conduites de classe, l’organisation des relations, les médiations dans les relations enseignant/élèves et entre élèves), ainsi qu’une étude portant sur le regard de la hiérarchie sur l’école. Nous prévoyons également de répondre à des questions posées par les enseignants, dans la partie du projet consacrée aux conditions de la collaboration.

Je mets en forme le projet, le soumets aux chercheurs, puis l’envoie à la directrice le 25 avril pour qu’elle le transmette à l’équipe enseignante. Dans un premier temps, je propose que les enseignants m’envoient leurs remarques, commen-taires, réactions par courriel. Le 8 mai, la directrice me demande de retirer l’élément de phrase « que les ensei-gnants qualifient d’innovantes » à propos des pratiques de l’école, avec le commentaire suivant : « Nous ne qualifions pas nos pratiques d’innovantes, certaines de nos pratiques sont expérimentales, sans plus ». Je m’assure auprès d’elle que l’ensemble des enseignants accepte de s’impliquer dans le projet et que l’équipe souhaite travailler sur les trois pôles proposés. Elle me le confirme le 12 mai. Le projet de recherche collaborative est validé.

Cependant, il reste deux étapes à franchir et non des moindres. La première étape consiste à demander des finan-cements pour pouvoir effectuer la recherche. Avec mes col-lègues, nous constituons des dossiers auprès de la fondation de l’université de Cergy-Pontoise et surtout auprès de la Fédération nationale de l’OCCE avec laquelle nous élaborons une convention de partenariat(4). La seconde étape vise à obtenir l’accord définitif de l’IEN et du DASEN.

Mai-juillet 2014 : la communication du projet à l’IEN afin d’obtenir l’accord du DASEN

L’IEN reçoit le projet de recherche collaborative début juin. Elle y réagit en me proposant un entretien téléphonique au cours duquel elle formule plusieurs questions en forme d’ob-jections qui s’adressent aux chercheurs. Un courrier qu’elle

m’envoie le 20 juin reprend ces points et nous demande des réponses. Afin d’obtenir les autorisations d’accès à l’école, nous allons devoir rédiger un document complémentaire au projet initial. L’IEN ajoute qu’une fois ce complément envoyé, l’accord du DASEN ne posera pas de problème.

Ces demandes de l’IEN ont tenu un rôle d’interpellation finalement très utile aux chercheurs. Elles nous ont permis de mettre en évidence des débats entre nous sur les orien-tations du projet de recherche, mais surtout de préciser nos objets d’études et nos méthodologies. La longueur (5 pages) et la densité de notre réponse en attestent. On peut donc dire que l’IEN a elle aussi collaboré à l’élaboration du projet, et ce d’autant que l’entretien envisagé avec elle a bien eu lieu en juillet.

Bruno ROBBESMaître de conférences en Sciences de l’éducation

Université de Cergy-PontoiseResponsable du projet

1. Marie-France Bishop, Sylvain Connac, Nathalie Denizot, Arnaud Dubois, Sylvain Genevois, Sébastien Pesce, Bruno Robbes.

2. Bavière, V. (2015). Des « petits savoirs » aux grandes idées : vers une école élémentaire apprenante. In Hugon, M.-A., & Robbes, B. (dir.). Des innovations pédagogiques et éducatives en réponse à la crise à l’école (pp. 67-91). Arras : Artois Presses Université (collection Éducation et formation).

3. Technologies de l’information et de la communication.

4. Les décisions favorables nous parviennent dès septembre 2014, ce qui nous permet d’engager la recherche.

« [j'ai demandé] à chaque chercheur d’élaborer des propositions d’objets, de questions,

d’hypothèses de recherche qu’il souhaiterait travailler, à partir de ce qu’il a entendu des demandes des enseignants. Six axes se [sont dessinés], les trois premiers étant privilégiés : l’équipe enseignante, l’évaluation des dispositifs mis en place, les comportements des élèves face aux apprentissages (…) »

21

Page 22: Coopérer 2.0

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Page 23: Coopérer 2.0

DOSSIER

23Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Alors que la société actuelle pousse à l’individualisme, les technologies numériques conduisent-elles au

collectif, au collaboratif… au coopératif ?

Transposer à l’Ecole et à la classe, c’est prendre la mesure de l’évolution pour ne pas dire la révolution que l’usage des outils numériques peut/doit (?) engendrer dans notre conception actuelle et à venir de l’Ecole.

En quoi une « nouvelle pédagogie » voit-elle le jour en intégrant l’impact que le numérique a sur le rapport au savoir des élèves et sur les modalités d’apprentissage, modifiant la posture des enseignants, projetant la classe hors les murs…?

Cette école à venir est-elle un leurre démocratique ou pourrait-elle être plus inclusive et émancipatrice pour les élèves contribuant à l’émergence de la pensée ?

Cela nous conduit-il à l’obligation de repenser l’éducation comme le dit Bernard Stiegler ?Autant de questions que l'Université d’été 2015 de l'OCCE a abordé grâce à l’éclairage et l’analyse de nombreux intervenants : universitaires, enseignants chercheurs, porteurs de projet, partenaires ; au travers de conférences, agoras et ateliers.Ce dossier laisse une grande part aux conférences, agoras et ateliers de cette université d’été qui était ouverte à tous les enseignants, éducateurs, parents d’élèves, étudiants… et s’adressait à tous les acteurs de l’Ecole et de l’éducation en général qui souhaitent mettre au cœur de leur(s) action(s) l’Envie d’Ecole, le Goût d’Apprendre.

Coopérer 2.0 (R)évolution numérique et pédagogique

Coopérer 2.0 : (R)évolution numérique et pédagogiqueEric Weill, Président national de l’OCCE .....24

Parce que grandir ne suffit pas !André Tricot, Professeur à l’ESPE de Midi-Pyrénées et chercheur au CNRS de Toulouse ............................26

Entre usages individuels et nécessité de collaboration, le numérique : un pont ou un fossé ?Bruno Devauchelle, professeur associé en ingénierie des médias à l’Université de Poitiers ............................................28

Même pas mouillé !Emmanuel Davidenkoff, journaliste, auteur du livre : « Le tsunami numérique » .............31

Le numérique expliqué à Suzanne et à quelques autres…Michel Guillou, consultant et conférencier, spécialiste du numérique éducatif ............34

L’EMI, un enjeu citoyen La Formation, un enjeu pour sa réussiteDivina Frau-Meigs, Directrice du CLEMI ......36

Quelles démarches de coopération à l’ère numérique ?Sylvain Genevois, Agrégé d’histoire-géographie......................................................39

Le numérique au quotidien : état des lieux et enjeuxBertrand Formet, Formateur Canopé et CLEMI ......................................................41

La #twictée : les secrets de sa réussiteCatherine Massicot, Bruno Mallet, twictonautes professeurs des écoles, Christelle Prince, conseillère pédagogique ...42

Des outils numériques au service de la rencontre et de l’échangeMarion Bertin-Sihr ...............................45

Les Tice pour créer des environnements facilitants Jack Sagot, ancien professeur au CNEFEI et à l’INSHEA .....................................46

Concilier outils numériques et inclusion scolaireBéatrice Musielak ................................48

A l’épreuve de l’écriture numérique collaborativeCatherine Lenoble, auteure et médiatrice culturelles numériques ...........49

Vers une école post-numériqueAnge Ansour, directrice pédagogique du programme « Les Savanturiers » ........50

C’est quoi cette capsule ?Gilles Petitjean ...................................52

Web Radio, Web TV… pourquoi ? Comment ?Thierry Adnot, professeur documentaliste .....................54

Vive le TNI libre avec Open Sankoré*Gilles Petitjean ...................................56

Vous avez dit « Logiciels libres ? »Camille Biache ...................................57

SCRATCH, un programme qui accroche !Camille Biache ...................................58

« Faire vivre Internet responsable dans sa classe »Boris Raguet, professeur des écoles et maître-formateur .............................60

Tablette en maternelle Pourquoi rejeter un outil qui permet de mieux travailler ?Véronique Favre, professeur des écoles .....62

« Beatbox augmenté » : de l’art, du numérique et toujours de l’humain !Ezra (Vincent Chtaïbi), créateur et directeur artistique de la Cie "Organic orchestra" ......64

Land Art et Qr codesMarie-France Rachédi ...........................65

Jeux numériques, sources d’apprentissages ?Marion Bertin-Sihr ...............................66

Internet à l’école, se lancer sans hésiter !Marie-France Rachédi ...........................67

Formation, équipement… une myriade de solutions !Alexandre Acou, professeur des écoles ......68

S o m m a i r e

Dominique Hennequin Président de

l’OCCE 52

Giles Ribet Responsable de l'UE 2015

Fédération OCCE

Page 24: Coopérer 2.0

24 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Coopérer 2.0 : (R)évolution numérique et pédagogique

C e numéro va retracer les moments les plus importants et significatifs de notre récente Université d’été qui s’est tenue à Chaumont, dans la Haute-Marne, du 07 au 09 juillet 2015 sur « Coopérer 2.0 :(R)évolution

numérique et pédagogique »(1).Outre l’accueil remarquable de

l’Association départementale OCCE de la Haute-Marne et des autorités institutionnelles locales (DSDE, ESPE, Canopé et mairie), je vais re-tenir quelques éléments clé de cette UE, utiles pour le professionnel tout autant qu’à titre personnel :

� je pensais en connaître un peu sur « le numérique » (concept qui, je l’ai retenu, est franco-français : il n’en existe aucune traduction dans d’autres langues) ; ce que je sais est bien mince dans l’immense champ couvert, encore plus mince rapporté à ce qui va sans doute être progressivement découvert ; de plus, ce savoir est très fragile car presque dépassé en perma-nence par des vagues successives d’outils, de pratiques de réfé-rences, de réflexions, d’études et de recherches sur le sujet ; le numérique est un objet plein de vie(s) ;

� je sais que les mises en œuvre des outils numériques à l’Ecole sont dépendantes de l’architecture des locaux, des achats de matériels et de leur maintenance, et de la for-mation et de l’accompagnement des enseignants engagés ou qui souhaiteraient l’être ; on constate que les rythmes et choix d’équipe-ments des uns et des autres ne convergent pas toujours dans le temps ; faut-il changer la Loi qui fixe, depuis le 19è siècle, les par-

tages de compétences entre l’Etat et les collectivités locales ? la forme scolaire est interrogée ;

� il se confirme qu’un usage ouvert, pertinent, efficace des outils numériques est possible si on en libère les usages dans les classes ; il se confirme qu’il convient d’ou-vrir les espaces scolaires aux pra-tiques sociales des jeunes, nos élèves - mais que cela ne sera pas sans conséquence sur les places respectives des enseignants et de ceux que certains appellent appre-nants, que les styles pédagogiques vont devoir bouger, pas sans conséquences non plus sur cer-tains contenus d’enseignement : la forme scolaire est encore claire-ment interrogée ;

� nous avons la tâche immense de faire que notre école, ce bien com-mun qu’il a été si long de construire pour que tous les enfants s’y trouvent réunis, faire que ce bien

commun reste un lieu partagé - et non pas éparpillé, dans un temps contrôlé - et non pas émietté, avec des objets d’apprentissages et d’action pour les citoyens de demain ; nos élèves doivent deve-nir des usagers éclairés des outils numériques, sujets actifs et non pas utilisateurs captifs de ces ex-nouvelles technologies ; c’est tout l’enjeu de la place de l’Ecole pour permettre que chacun, tous, puissent accéder aux connais-sances secondaires - au-delà du lire/écrire/compter ;

� quels défis pour l’Ecole qui, dans le même temps, doit cesser d’être perçue et utilisée comme « bonne à tout faire de la société » : les enseignants ne sont pas là pour cela ; il convient de s’en occuper rapidement, au risque de continuer à les dévaloriser, sentiment qu’il serait dramatique qu’ils s’ap-pliquent à eux-mêmes.

Il s’agit donc de construire en-semble les cadres d’une Ecole ou-verte, moderne, utile et féconde pour chacun des élèves, en repensant ses outils, ses lieux, ses périodes et modalités de fonctionnement.

Sur toutes ces questions, l’OCCE n’a pas une doxa arrêtée, figée, to-talement structurée, mais en re-cherche et à l’écoute de la recherche ; par contre, dès qu’il est question de pédagogie, de place de l’élève dans les processus d’apprentissages, dans la déclinaison de son parcours sco-laire, dans la définition des contenus d’enseignement qui englobent les apprentissages fondamentaux sans s’y limiter, qui fasse une large place à la créativité de l’élève -quels qu’en soient les outils, qui fasse une vraie place à son initiative, à sa faculté d’apprendre à travailler seul mais aussi avec d’autres, de manière ré-fléchie et efficace, de s’engager dans

« Il se confirme qu’un usage ouvert, pertinent, efficace des outils numériques est

possible si on en libère les usages dans les classes (…) »

Page 25: Coopérer 2.0

25Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

une démarche de collaboration, de co-construction, de coopération -bref d’être, à sa manière un élève braconnier, alors l’OCCE a des choses à dire et des propositions à faire pour les équipes d’enseignants ou de jeunes qui veulent se lancer.

Université d'été 2015 de l'OCCE : un programme copieuxDu mardi 07 au jeudi 09 juillet, l’Office Central de la Coopération à l’école a invité les acteurs de l’éducation à débattre, s’informer, se former, partager leurs expériences et projets dans le cadre de son Université d’été, à l’Espé centre de Chaumont-en-Champagne, sur « Coopérer 2.0, (R)évolution numérique et pédagogique ».

Le programme de l’Université d’été de l’OCCE sur « Coopérer 2.0, (R)évolution numérique et pédagogique » s'est avèré copieux : trois conférences, quatre agoras, deux tables-rondes et 18 ateliers de pratique ont rythmer ces trois jours d’échanges, informations, for-mation et surtout de partages d’expériences et de connaissances, auxquels étaient conviés tous les acteurs de l’éducation intéressés par cette question du numérique à l’école.

Conférences

Apprendre avec le numérique Mythes et réalitésEst-ce que les espoirs et les promesses liés au numérique comme outils pour l’apprentissage, ou même comme moteur d’une révolution péda-gogique sont tenus ?

Conférence animée par André Tricot (Formateur à l’ESPE de Toulouse et chercheur au labora-toire Travail et Cognition du CNRS à Toulouse, André Tricot travaille sur les apprentissages et la recherche d’information via les documents hypermédias)............................ Synthèse pages 26-27

Entre usages individuels et nécessité de collaboration

Le numérique : un pont ou un fossé ?Pourquoi et comment le monde scolaire peut s’emparer de cette question ?

Conférence animée par Bruno Devauchelle

Docteur en sciences de l’éducation, Bruno Devauchelle est professeur associé en ingénie-rie des médias à l’Université de Poitiers, chargé de mission TICE à l’Université catholique de Lyon et auteur de Comment le numérique trans-forme les lieux de savoirs (éditions FYP, janvier 2012). Il tient aussi les chroniques numériques du Café Pédagogique.......................... Synthèse pages 28 à 30

L’OCCE fait confiance aux enfants, aux jeunes, aux enseignants, c’est l’énergie la plus durable pour faire fonctionner le moteur Ecole, fut-il converti aux technologies numé-riques. Cette Université d’été a confirmé et renforcé l’OCCE, mouve-

ment pédagogique fermement convaincu que le pédagogique aura toujours le dernier mot.

Eric Weill Président de l’OCCE

L’école face au « tsunami numérique »« L’école face au « tsunami numérique » » annonce une déferlante sur les enseignements primaire et supérieur. Faut-il enseigner autrement ? Réinventer l’école à l’heure où il est question d’économie des savoirs ? Sommes-nous prêts à aborder la révolution qui vient ? Autant de ques-tions que soulèvera cette conférence tout en nous fournissant les clés pour décoder l’impact individuel et collectif de ce tsunami.

Conférence animée par Emmanuel Davidenkoff, directeur de la rédaction de l’Etudiant, chroni-queur sur France Info. Auteur du Tsunami numérique (Stock, 2014).......................... Synthèse pages 31 à 33

Les Agoras

Bertrand FormetFormateur et médiateur numérique à l’espace éducation numérique, Besançon, directeur ate-lier Canopé Besançon.

Jack SagotAncien formateur à l’INSHEA, actuellement enseignant-chercheur au laboratoire THIM-Chart 4004 de l’Université Paris 8. Chargé de cours « Technologies & scolarisation des jeunes handicapés » dans le Master « Technologie et Handicap » de l’Université Paris 8.

Sylvain GenevoisMaître de conférences en sciences de l’éduca-tion Université de Cergy-Pontoise- ESPE de l’académie de Versailles.

Ange AnsourTraductrice et enseignante. Directrice du pro-gramme « Ses Savanturiers » - Ecole de la recherche au Centre de Recherches Interdisciplinaires (CRI).

Les tables-rondes

« Pratiques artistiques et créatives des arts numériques à l’école »Animée par Roland Bouchon (directeur des arts vivants 52)

« Habiletés coopératives et outils numériques : comment mieux apprendre avec les autres » ?

Animée par Stéphanie de Vanssay : Conseillère technique au secteur éducation du SE-UNSA, créatrice du projet TwitMOOC (apprentissage en ligne des réseaux sociaux).

Détail du programme de l'UE OCCE 2015 : http://www.occe.coop/universite-ete

Page 26: Coopérer 2.0

PARCE QUE GRANDIR NE SUFFIT PAS !

« Le numérique nous rappelle la vocation fondamentale de l'école : apprendre ce qui n'est pas utile immédiatement. Parce que grandir ne suffit pas » a conclu André Tricot(1),

lors de sa conférence sur « Apprendre avec le numérique : entre mythes et réalités » donnée lors de l’Université d’été de l’OCCE de juillet à Chaumont. Synthèse des points clés de cette conférence.

Pour André Tricot(1), les connais-sances académiques requièrent l’in-tervention de l’enseignant et sont plus nécessaires que jamais. La révo-lution numérique bouscule le métier d’enseignant obligé de recourir à de nouveaux supports de connaissances et de tâches. Pourquoi ?

Le numérique a envahi nos quoti-diens. Google, twitter, wikipédia et facebook sont utilisés régulièrement par une grande partie des jeunes. Une étude réalisée aux USA montre que les adultes passent 4h30 en moyenne par jour à lire, contre 1h46 il y a 40 ans. On n’a jamais tant lu ! L’école ne saurait être en reste. Cette évolution des techniques correspond à une évolution des apprentissages, aussi bien implicites (hors l’école) qu’explicites (enseignés). Se pose aujourd’hui le défi du passage entre apprentissages sociaux et apprentis-sages scolaires.

Les connaissances scolaires n’ont jamais été aussi importantes qu’au-jourd’hui. Si l’on s’appuie sur les travaux de Geary (2008), qui dis-tingue les connaissances primaires qui s’apprennent de manière impli-cite dans l’adaptation à l’environne-ment, au groupe (exemple du lan-gage oral) des connaissances secondaires qui nécessitent un ap-prentissage explicite et permettent à l’individu de se construire en

adulte responsable, en citoyen (exemple des maths, de la philoso-phie), le statut des savoirs ensei-gnés à l’école conserve son caractère fondamental.

Pour les premières, la motivation est intrinsèque, l’enfant apprend par le jeu, l’exploration, les relations sociales ; elles lui permettent de vivre dans son environnement quo-tidien. Pour les secondes en re-vanche, une motivation extrinsèque est indispensable, elles s’apprennent de manière explicite.

Ces connaissances sont produites chaque jour par les écrivains, scien-tifiques, artistes, chercheurs,... Il y en a toujours plus à apprendre pour pouvoir être libre, épanoui, conscient, citoyen. A la génération suivante, il y aura encore plus besoin d’école, car

encore plus de connaissances secon-daires à apprendre. Chaque jour le fossé s’accroît entre connaissances primaires et secondaires.

Quant aux tâches scolaires, elles ne sont pas fondamentalement mo-difiées par le numérique. Leur nature a peu évolué en cent ans. Il faut cependant différencier les tâches et les niveaux d’engagement. Le numé-rique permet une plus grande diver-sité dans le niveau d’engagement de l’apprenant :

• passif ou cognitivement actif : focalisé sur l’information qu’il reçoit

• actif : il rentre dans la tâche, il fait physiquement une chose observable

• constructif : il génère plus qu’il ne reçoit, il produit des connaissances, des références

• interactif : partage, interagit dans un dialogue de co-construction.

L’enseignant conçoit le contenu, la tâche et son niveau d’engage-ment.

Qu’attend-on alors des ensei-gnants ? Faire en sorte que le théo-rème de Thalès soit passionnant et pas seulement accessible !

Distinguer l’outil et la tâche

L’important est de bien distinguer l’outil de la tâche : quel outil avec quelle tâche au service de quel apprentissage et avec quels élèves.

Prenons l’exemple de l’usage du MP3 en classe de langue, qui revient à utiliser un outil familier pour une tâche scolaire. Une étude a analysé la stratégie d’écoute d’une classe dans cette situation : comment les élèves utilisaient les fonctions du MP3 (arrêt, réécoute) pour améliorer

26 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

« L’important est de bien distinguer l’outil de la tâche : quel outil avec quelle tâche au service de quel

apprentissage et avec quels élèves. »

Page 27: Coopérer 2.0

la compréhension d’un texte. Elle montre qu’une partie des élèves ne les utilisent pas ; il s’avère que ce sont les élèves qui ont le plus de difficultés avec la langue. L’outil n’est pas au service de la tâche : écouter et décider comment on écoute, c’est trop. D’autres élèves comprennent mieux avec le MP3 plutôt qu’avec une lecture imposée du professeur. Pour certains cela ne change absolument rien.

En conclusion, la révolution que nous vivons est aussi importante que l’invention de l’écriture ; c’est un moment rare dans l’histoire et si on ne comprend pas vraiment ce qui nous arrive, c’est normal.

Malgré la profondeur de cette ré-volution, le numérique ne modifie fondamentalement ni les tâches ni les apprentissages scolaires : ce qu’on apprend à l’école, c’est ce qui n’est pas immédiatement utile, car grandir ne suffit pas. Ce qui est modifié, en revanche, c’est l’accès à des supports de connaissances et de tâches. Et la manipulation de ces supports requiert de nouvelles com-pétences, de nouvelles exigences.

Se pose alors la question fonda-mentale des contenus d’enseigne-ments : quelles connaissances, quelles habiletés l’école doit-elle transmettre ? Comment amener les élèves à devenir plus compétents à

gérer la complémentarité entre in-terne et externe, et notamment cette dualité entre mémoire interne et mémoire externe ? Mais aussi : qu’est-ce que le numérique nous permet d’aborder comme nouveaux contenus ? Par exemple, quelle situa-tion de production d’écrit plus au-thentique que de contribuer au do-cument public qui sert de référence sur internet, en rendant les élèves producteurs d’écrits sur Wikipédia ? Cela aurait été le rêve de Freinet !

Synthèse Marion Bertin-Sihr 1. André Tricot est Professeur à l’ESPE de Midi-Pyrénées

et chercheur au Laboratoire Travail et Cognition du CNRS de Toulouse. Il travaille sur les apprentissages et la recherche d’information via les documents hyper-médias.

27Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

L’époque est propice aux idées toutes faites, véhiculées sans jamais se soumettre à la preuve. André Tricot* pointe quelques « évidences » et les confronte aux résultats de la recherche : apprendre avec le numérique, entre mythes et réalités.

On est plus motivé quand on apprend avec le numérique

Oui, mais pas toujours. Cela dépend de la tâche. Par exemple, c’est le cas pour des activités de lecture, mais moins pour l’écri-ture. Les jeunes semblent ne pas être sujets de fascination ou de dogme en la matière. Le choix du support n’est d’ailleurs pas toujours lié à l’efficacité de l’apprentissage.

On apprend mieux en jouant grâce au numérique

Oui, un peu. Mais ce n’est pas forcément le jeu qui favorise l’ap-prentissage, c’est plutôt l’activité. Les élèves apprennent mieux en étant actifs ! On constate un effet de mode des « serious games » jusqu’en 2012/2013. Et puis... on peut aussi jouer en apprenant sans le numérique !

Le numérique favorise l’autonomie des apprenants

C’est l’inverse ! Le numérique exige que l’apprenant soit d’abord autonome. Il doit en avoir les moyens. Sortons du mythe de l’autodidaxie, où la personne serait capable d’apprendre tout seul sans l’aide d’autrui une connaissance académique.

Le numérique permet un apprentissage plus actif

Oui, dans le sens où les tâches et les activités permettent de conce-voir des situations où les élèves

sont plus engagés, rentrent dans des hypothèses, des contro-verses, et notamment lorsqu’ils produisent. Mais attention, ils ne deviennent pas pour autant en mesure d’organiser leur parcours d’apprentissage, ce qui est une exigence trop élevée.

Les images animées permettent de mieux apprendre

Oui, quand l’objectif est de com-prendre un phénomène dynamique. En fin d’apprentissage, lorsque l’élève a déjà compris un certain nombre de composantes et de changements d’états, l’image ani-mée réactivera ses connaissances.

Les images animées sont efficaces notamment dans le domaine de l’apprentissage de gestes (exemple : nœud marin, origami) mais pas dans celui de l’apprentis-sage d’une procédure (exemple : maison en lego, qui implique une suite d’étapes). C’est la succession d’étapes qui est importante et là l’image animée ne suffit pas.

La lecture sur écran réduit les compétences en lecture

Oui, à l’époque des écrans rétroé-clairés (fatigue de l’œil, lignes trop longues, couleurs inadap-tées, ...). Mais en fait non, car elle fait appel à des compétences par-tagées de lecture sur papier et en nécessite même de nouvelles.

Les élèves savent utiliser efficacement le numérique car

c’est leur génération

Oui, principalement dans le cadre de leurs usages personnels. Mais attention à ne pas se laisser convaincre par le mythe des digi-tal natives, inventé par Marc Prensky. Il n’y a aucun cadre théorique, aucune recherche qui vienne valider cette affirmation.

M. B-S

Apprendre avec le numérique. Entre mythes et réalités.

Page 28: Coopérer 2.0

Entre usages individuels et nécessité de collaboration, le numérique :

UN PONT OU UN FOSSÉ ?Le développement du numérique se traduit par des exigences

sociales, cognitives et intellectuelles renouvelées. Dans le monde scolaire, de nombreuses initiatives, inventions, innova-

tions semblent témoigner d’un réel potentiel. Cependant la réalité des pratiques actuelles invite à s’interroger sur la construction effective d’un idéal collaboratif. Un système scolaire collectif et collaboratif grâce au numérique : rêve ou réalité ? Conférence de Bruno Devauchelle(1).

Nous sommes avec le numérique confrontés à deux paradoxes : le premier est que nous développons des machines de plus en plus indi-viduelles (Smartphone, tablettes…) mais les attentes sont de plus en plus collaboratives. Le second : notre système scolaire prétend être collectif et, en même temps, prône la réussite individuelle.

Dans quelle mesure le monde sco-laire peut-il dépasser ses paradoxes pour permettre la construction d’un « idéal » collectif et collaboratif ? Quelles compétences construire pour permettre aux jeunes de se dévelop-per dans le monde numérique ?

Pour dépasser ces paradoxes, la forme scolaire doit effectuer une mutation. Le système scolaire tel qu’il est actuellement est devenu moins supportable. De sa mission de socialisation dans un monde fini, il doit évoluer vers une mission de socialité dans un monde sans fron-tière a priori.

A travers les moyens numériques et l’écriture d’une nouvelle culture d’usage, il est possible de répondre à cette nécessité de mutation et de construire un monde durable qui

correspond aux valeurs que l’on sou-haite défendre mais aussi qui fasse sens pour les jeunes.

Les évolutions ne se feront qu’en définissant le projet d’appropriation par les jeunes. C’est cette notion d’appropriation de l’environnement qui est, aujourd’hui, au cœur d’une révolution éducative. Pourquoi est-elle fondamentale ?

« Les fonctionnements psychiques, cognitifs, mentaux, explique Bruno Devauchelle, sont altérés, modifiés par l’environnement : notre cerveau se développe dans l’interaction avec le milieu, dès lors que l’on introduit de nouveaux objets dans le milieu, inévitablement le cerveau se trans-forme. Or, aujourd’hui, un être hu-main dispose d’un certain nombre d’objets numériques autour de lui (Smartphone, tablette, clavier, logi-ciel, algorithmes…). Il perçoit et agit par rapport au monde grâce à ces moyens-là. Il agit par rapport à un espace humain et relationnel, un espace géographique et naturel, es-paces eux-mêmes marqués par le numérique ».

Outre les objets numériques, les réseaux sociaux viennent également modifier l’espace social et intro-duisent une dimension collective forte : « Les réseaux sociaux, le web 2.0 sont nouveaux parce qu’ils sont numériques et parce qu’ils rendent accessible à chacun l’investissement en réseau sans en avoir la charge. Les réseaux sociaux numériques per-mettent un travail de relations mais n’imposent pas l’investissement personnel. Il y a bien une nouveauté dans l’espace social : le réseau social qui réinterroge le collectif et le col-laboratif ».

Pour le conférencier, l’enjeu majeur n’est pas dans les objets numériques mais dans la façon dont ils sont intro-duits dans l’environnement. C’est pourquoi se pose la question du rôle des éducateurs : parents, enseignants… mais aussi du monde scolaire.

Docteur en sciences de l’éducation, Bruno De-vauchelle est professeur associé en ingénierie des médias à l’Université de Poitiers, chargé de mis-sion TICE à l’Université catholique de Lyon et auteur de « Comment le numérique transforme les lieux de savoirs » (éditions FYP, janvier 2012). Il est intervenu dans le cadre de l’Université d’été de l’OCCE qui s’est tenue à Chaumont du 07 au 09 juillet 2015.

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Bruno Devauchelle, est Docteur en sciences de l’éducation et professeur associé en ingénierie des médias à l’Université de Poitiers, chargé de mission TICE à l’Université catholique de Lyon. Il est l'auteur de « Comment le numérique transforme les lieux de savoirs » (éditions FYP, janvier 2012). Il est intervenu dans le cadre de l’Univer-sité d’été de l’OCCE qui s’est tenue à Chaumont du 07 au 09 juillet 2015.

Photo : OCCE

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Et le monde scolaire dans tout cela ?

Le monde scolaire refuse les Smartphones et, jusqu’à la fin du lycée, tous les appareils numériques personnels des élèves. Seuls les ap-pareils fournis par l’institution sco-laire sont acceptés ! Et encore pas tous. La tablette, objet intermé-diaire entre le téléphone et l’ordina-teur est acceptable car il est pos-sible de la contrôler, d’en limiter l’usage. « Le problème de fond, aujourd’hui, du monde scolaire, analyse Bruno Devauchelle, c’est qu’il refuse d’accepter la forme que prennent les usages de communica-tion des jeunes et d’un certain nombre d’adultes » (…) « car le monde scolaire est fortement marqué par le refus d’une communication qui ne soit plus contrôlable. (…) .

L’appareil personnel reste suspect dans le monde scolaire, d’où les pro-jets d’équipements massifs, d’où le développement des ENT, d’où les refus du BYOD (Bring Your Own Device), sauf dans le supérieur. En effet, à l’université, le changement est radi-cal. Selon une enquête conduite deux années de suite par Jean-François Cerisier(2) : « plus de 95 % des étu-diants de première année arrivent avec un ordinateur personnel connecté et l’utilisent à l’Université ». Les élèves passent donc, en un an, d’un espace où ils n’avaient pas le droit de l’utiliser à un endroit où ils l’utilisent systématiquement et n’importe où ! ».

Cette réticence du système sco-laire par rapport aux équipements et surtout à leurs usages se retrouve aussi face au collectif. L’image do-minante du travail scolaire est indi-viduelle : évaluations, contrôles, classement, lutte contre la copie entre élèves, classe silencieuse où bavarder est suspect. Si le numé-rique permet de s’affranchir plus

aisément des limites traditionnelles, les pratiques collectives et collabo-ratives restent cependant limitées.

Certes le numérique incite : « de la FAD (Formation à Distance) à la FOAD (Formation Ouverte et à Dis-tance) et jusqu’aux MOOCs (Massive Open Online Courses) et aux classes inversées, le numérique bouscule, explique Bruno Devauchelle. L’émer-gence des activités collaboratives dans ces dispositifs est significative. On s’aperçoit que la FOAD a fait émer-ger petit à petit les forums de discus-sions, les espaces collaboratifs. Les MOOCs ont fait naître des espaces de co-évaluation et les MOOCs collecti-vistes favorisent le travail collaboratif en ligne puisqu’il s’agit de construire ensemble les connaissances ».

Ces dispositifs pédagogiques émergents montrent une prise de conscience qui n’apparaît pas encore dans les pratiques éducatives. Les

équipements individuels confortent l’activité individuelle en s’appuyant sur la différenciation. « Lorsque les enseignants intègrent la tablette dans leur classe, illustre le conférencier, leur premier réflexe est de faire tra-vailler les élèves individuellement et de tenter la différenciation. Lorsque le scénario pédagogique est bien pensé, cela fonctionne parce que ces outils offrent un potentiel de différen-ciation particulièrement important, sauf qu’il ne s’appuie pas sur la collaboration mais, au contraire, sur la capacité de chacun à cheminer. C’est pédagogiquement intéressant mais pas pour le développement du collaboratif ».

Le numérique actualise le di-lemme et pose la question de savoir comment passer de l’usage individuel à l’usage collectif de l’ordinateur ? Et comment passer du prescrit collectif à l’usage individuel ?

La tablette, objet intermédiaire entre le téléphone et l’ordinateur est acceptable car il est possible de la contrôler, d’en limiter l’usage.

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De multiples changements

Les équipements mobiles in-duisent de multiples change-ments qui se traduisent par :

� fin de la règle des trois unités.

Les équipements individuels mo-biles connectés bousculent également la règle des 3 unités : le lieu n’est plus circonscrit à l’espace de la scolarisa-tion, le temps n’est plus limité au temps scolaire, l’action et l’interaction ne sont plus cantonnées au travail individuel.

Le numérique donne ce potentiel mais l’enseignant dans l’école main-tient l’unité de lieu, de temps, d’ac-tion et la porte fermée. On dispose de ce potentiel mais on ne l’utilise pas forcément et c’est là que réside la difficulté.

� Renforcement du potentiel d’au-tonomie de l’élève, à condition de maîtriser certaines compétences.

� Accès direct aux sources d’infor-mation, « sauf que la maîtrise de ces sources nécessite un travail d’éduca-tion aux médias et à l’information et il va de soi qu’aujourd’hui si ce travail n’est pas réalisé, c’est une catas-trophe pour l’élève ».

� Désintermédiation et ré-intermé-diation : les médiateurs traditionnels de la société se sont trouvés transgressés et tentent de se réapproprier le public à travers leur propre système. Ils introduisent de la ré-intermédiation. Un certain nombre d’enseignants se ré-instituent en tant qu’intermédiaires.

� Espace cognitif enrichi.

De nouvelles compétences tech-no-cognitives doivent donc être développées, parmi lesquelles : la maîtrise des environnements tech-niques, le repérage dans l’espace

informationnel, la gestion des formes de communication. Un travail de structuration est nécessaire.

Quels changements donc pour plus de collaboratif ?

« La vraie collaboration, précise le conférencier, c’est lorsque l’on travaille en commun sur un projet et que l’on ne revendique pas chacun sa petite part du projet mais ensemble la totalité du projet ». La collabora-tion est une modalité pédagogique qui permet de travailler le lien entre l’individuel et le collectif. Il n’est pas nécessaire de recourir au numé-rique pour collaborer. De même, il ne suffit pas de dire « tu vas être soli-daire, tu vas partager ». C’est la notion de choix qui doit être pre-mière et il est important de déve-lopper les nouvelles socialités fon-dées sur la solidarité et le partage choisis.

Et finalement quel numérique ?

Un numérique évidemment fondé sur les réseaux qui permet l’ouver-ture aux autres, favorisant les échanges et les mutualisations pour permettre des formes variées de partage. Combien d’enseignants contournent le système de leur éta-

blissement en utilisant une Dropbox, un Google drive... C’est un signe qu’il faut prendre en compte.

Un numérique ouvert aux infor-mations de toutes natures, permet-tant à chacun d’accéder à toutes les ressources au moment où il en a besoin et évidemment pas dans n’importe quelles conditions : à por-tée de main, pas à portée de ma main. L’outil numérique doit être au service du collectif apprenant et non pas seulement d’une activité indivi-duelle, à un moment donné. Mais ceci n’est possible que si chaque élève, chaque personne dispose d’un appareil numérique et si la pédago-gie évite que « 1 appareil par per-sonne » ne devienne un appareil personnel utilisé dans des tâches individuelles.

Le collectif ou le collaboratif sup-pose donc des trésors de pédagogie dans un espace temps redéfini par le numérique. L’acte pédagogique doit être pensé comme « un chemi-nement avec » qui est le sens initial d’accompagner, dans la relation et l’interaction. L’acte pédagogique doit permettre d’assurer des temps de structuration qui articulent indi-viduel et collectif.

Enfin il faut accepter l’évaluation collective et donc faire évoluer nos modèles d’évaluation et de contrôle.

Synthèse Marie-France Rachédi

1. Docteur en sciences de l’éducation, Bruno Devauchelle est professeur associé en ingénierie des médias à l’Université de Poitiers, chargé de mission TICE à l’Université catholique de Lyon et auteur de « Com-ment le numérique transforme les lieux de savoirs » (éditions FYP, janvier 2012). Il est intervenu dans le cadre de l’Université d’été de l’OCCE qui s’est tenue à Chaumont du 07 au 09 juillet 2015.

2. Jean-François Cerisier, spécialiste des usages des technologies numériques de l’information et de la communication dans le champ éducatif. Ensei-gnant-chercheur en Sciences de l’Information et de la Communication Université de Poitier. Directeur du laboratoire Techné (Technologies numériques pour l’éducation).

« L’outil numérique doit être au service du collectif apprenant et non pas seulement d’une activité individuelle, à un moment donné. Mais ceci n’est possible que si chaque élève, chaque personne dispose d’un appareil numérique »

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Même pas mouillé !

Directeur de la rédaction de l’Etudiant, chroniqueur sur France Info et au Huffington Post, Emmanuel Davidenkoff analyse dans son livre, « Le tsunami numérique »(1), l’impact en termes économique et

sociétal de l’invasion du numérique dans notre système éducatif. « Il est temps de réagir si l’on ne souhaite pas finir comme Kodak » a-t-il expli-qué aux participants de l’Université d’été de l’OCCE(2).

« Vous avez dit « tsunami », même pas mouillé ! » aime à plaisanter Emmanuel Davidenkoff, journaliste spécialiste de l’éducation et auteur d’un ouvrage qui connaît un réel succès depuis sa parution en 2014 : « Le tsunami numérique ». Dans ce livre, Emmanuel Davidenkoff ex-plique, avec force exemples, chiffres, constats factuels, la façon dont les technologies numériques ont boule-

versé, bouleversent et bouleverse-ront -que l’on résiste ou pas- notre quotidien et notre façon d’enseigner et d’apprendre. Pourtant, l’analyse du système éducatif français montre de fortes résistances -dues certes à son histoire mais surtout à sa struc-ture, à une gestion trop verticale privilégiant le tous pareils sans libé-rer les énergies intrinsèques- à l’in-tégration du numérique.

Parmi toutes les questions qui ont permis d’alimenter son analyse, celle qui préoccupe le plus le journaliste est : l’école est-elle prête pour le changement ? Est-elle prête pour le monde numérique ?

Parce que le monde numérique, c’est aujourd’hui et Emmanuel Da-videnkoff le montre en traçant un bref historique de l’accélération de l’avancée dans ce domaine et de l’évolution de notre système éduca-tif. On a construit, explique-t-il en substance, des systèmes éducatifs qui étaient tournés avant tout vers

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Un Fab Lab (contraction de l’anglais fabrication laboratory, « laboratoire de fabrication ») est un lieu ouvert au public où sont mis à sa disposition toutes sortes d’outils, notamment des machines-ou-tils pilotées par ordinateur, pour la conception et la réalisation d’objets.

La caractéristique principale des Fab Labs est leur « ouver-ture ». Ils s’adressent aux entrepreneurs(euses), aux desi-gners, aux artistes, aux bricoleur(euses), aux étudiants(es) ou aux hackers en tout genre. Ils regroupent différentes populations, tranches d’âge et métiers différents. Ils consti-tuent aussi un espace de rencontre et de création collabora-tive qui permet, entre autres, de fabriquer des objets uniques : objets décoratifs, objets de remplacement, pro-thèses, orthèses, outils…, mais aussi de transformer ou réparer des objets de la vie courante.

Pour être appe- l é Fab Lab, un ate-lier de fabrication doit respecter la charte des Fab Labs, mise en place par le Massachusetts Institute of Technology (MIT).

Ce dispositif permet d’aider à faire plus de choses et à déve-lopper l’entraide. Ce lieu qui est ouvert à tous permet de co-construire des projets avec les différents partenaires éducatifs, notamment les parents.

De nouvelles formes pédagogiques

«Apprendre en faisant » ou les FAB LAB

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la délivrance de connaissances avec l’idée que l’enseignant en savait un petit peu plus que les élèves. C’est toujours le cas aujourd’hui sauf que les élèves ont accès à une quan-tité d’informations qui dépasse les connaissances d’un être humain. Cependant, on continue à évaluer les élèves sur leurs capacités à en-granger des connaissances.

Selon une étude aux Etats-Unis réalisée par le département du tra-vail, 65 % des adolescents qui sont à l’école exerceront un métier qui n’existe pas sous sa forme actuelle. Cela signifie que ces métiers auront changé et feront appel à des com-pétences qui ne sont pas forcément au cœur de notre système.

Obsolète l’école ?

Au 20ème siècle, l’ordinateur a commencé à être développé et la technologie informatique a fait de tels progrès qu’elle est devenue capable de dépasser l’être humain. On peut, par exemple, citer ce match d’échecs de 1996 dans lequel le champion du monde de l’époque, Garry Kasparov, a été battu par l’ordinateur Deep Blue (surnommé alors Deeper Blue). Les compétences intellectuelles sont alors concurren-cées. Les intelligences artificielles entrent aujourd’hui en concurrence avec des professions qui exigent une formation supérieure de 2 ou 3 ans après le baccalauréat…

Ce qui prime, c’est la façon dont nous allons gérer l’articulation de cette pédagogie nouvelle pour que les élèves développent un certain nombre d’ouvertures de savoirs et de savoir-faire. Pour cela, il faut chan-ger de paradigme : utiliser l’intelli-gence artificiel +X, le « X » étant les enseignants, les parents, élèves ou encore d’autres partenaires. L’image de l’humain de demain est celle du centaure : l’homme augmenté par la machine.

Même si de nouvelles formes pé-dagogiques voient le jour : FabLab, Design thinking, Moocs… (voir encadrés), un certain nombre de personnes sont déçues par un sys-tème éducatif en perte de vitesse et prennent l’initiative de dévelop-per de nouveaux marchés, notam-ment aux Etats-Unis. Il y a une

émergence des Start up liées à l’éducation qui brassent beaucoup d’argent et voient là une porte ou-verte. Si l’éducation nationale n’évolue pas, elle peut se retrouver face à cette concurrence.

Aux Etats-Unis, bon nombre d’ac-teurs sont convaincus que l’explo-sion du marché de l’éducation est pour demain. Ils exploitent ce filon et développent l’offre éducative gra-tuitement ou sur des fonds privés.

Toutefois reste qu’une fois franchi la porte de leur salle de classe, les enseignants sont des décideurs po-litiques, ils sont seuls maîtres de leurs pédagogies.

La question de la formation ini-tiale et de la formation continue est donc primordiale. Si on veut infor-mer, diffuser, transmettre, il faut prioritairement travailler avec les enseignants. L’innovation existe déjà dans l’éducation nationale, le numé-rique reste omniprésent chez les enseignants dans l’utilisation qu’ils en font pour préparer leur travail et ils innovent tous les jours dans leurs classes. Il n’y a qu’à observer « La vague » de François Muller qui est

« Ce qui prime, c’est la façon dont nous allons gérer l’articulation de cette pédagogie nouvelle pour que les élèves développent un certain nombre d’ouvertures de savoirs et de savoir-faire. »

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économie

Physique

Sociologie

Ce dispositif est constitué d’étudiants qui viennent de toutes les filières de l’université et qui vont travailler ensemble sur un programme de plusieurs mois. Ils vont apprendre à résoudre un problème ensemble selon une méthode qui est celle développée par la D.School de Stanford. Il est basé sur un processus ité-ratif par essai erreur qui a pour intérêt de décloisonner les disciplines. Ce dispositif existe en France, à Paris.

Ce genre de méthodologie a été développée avec l’idée sous-jacente qu’en reliant différents cerveaux humains qui ne sont pas faits de la même manière et qui ne pensent pas avec le même vocabulaire ou utilisent des outils intellectuels différents, on peut réussir à trouver des solutions que la machine ne pourra pas trouver.

DESIGN THINKING D.School de Stanford

Page 33: Coopérer 2.0

un collage de vignettes numériques correspondant aux nombres d’inno-vations relevées sur le terrain.

Emmanuel Davidenkoff conseille alors d’encourager la capacité à chercher des réponses efficaces chez les enseignants. L’éducation natio-nale a tout intérêt à développer des outils qui lui permettront de rester plus convaincante notamment en se servant en partie de ce qui se passe déjà sur le terrain grâce à des ensei-gnants innovants.

Pour conclure, il n’hésite pas à faire le parallèle entre l’entreprise Kodak qui a fait faillite et l’Educa-tion nationale : il nous explique qu’on peut être une organisation avec des tas de gens innovants, si le modèle générale ne bouge pas et qu’une concurrence plus forte que les autres émerge, on finit par faillir.

Toute cette énergie doit contri-buer à faire changer ce système pour éviter qu’une concurrence privée émerge et bouleverse le modèle que l’on a choisi en France. Celui qui est construit autour d’un projet de so-ciété basé sur des savoirs, des sa-voir-faire mais aussi des valeurs es-sentielles dont cette concurrence ne se souciera pas.

Il convient donc maintenant d’opérer une véritable conversion pédagogique car malgré tout le nu-mérique ne peut se substituer à l’être humain dans ce qu’il a d’unique.

Synthèse réalisée par Lila Ammari

1. Emmanuel Davidenkoff est l’auteur de plusieurs ou-vrages « Comment la gauche a perdu l’école » (Ha-chette Littératures, 2003), « Réveille-toi Jules Ferry, ils sont devenus fous ! » (Oh ! Editions, 2006) et « Le Tsunami Numérique », Stock, 2014. Voir critique de Régis Forgionne dans A&E 241-242, Juillet-Octobre 2014, page 69.

2. Conférence du jeudi 09 juillet 2015, Université d’été de l’OCCE, du 07 au 09 juillet, à Chaumont « Coopérer 2.0 (R)évolution numérique et pédagogique ».

De nouvelles formes pédagogiques

Illustrations : Robert Touati

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Physique

Les MOOCsNés aux Etats-Unis, les Massive Open Online Course sont des cours en ligne ouverts à tous.

Bon nombre de projets articulant éducation et numérique ont tourné autour de ces MOOCs.

Ils ne sont pas simplement des cours filmés mis en ligne. En effet, ce qui est intéressant est la dimension collaborative d’un certain nombre de plateformes, d’un apprentissage et d’une évaluation par les pairs.

La capacité pour ceux qui pilotent un MOOC de recueillir des données sur la façon dont on apprend ou qu’on délivre un savoir est ce que l’on utilise dans le processus de classe inversée.

La « Gamification » Le fait de pouvoir apprendre par le jeu, c’est le transfert des mécanismes du jeu dans d’autres domaines, en particulier des situations d’apprentissage, des situations de travail ou des réseaux sociaux. Pour que ces jeux soient efficaces, il faut un processus de reformulation qui permette à l’élève de conscientiser le fait qu’il a appris quelque chose.

Page 34: Coopérer 2.0

Le numérique expliqué à Suzanne et à quelques autres…

N aturaliste tombé dans le numérique et l’éducation aux médias... Michel Guillou, consultant, conférencier est un observateur avisé du numérique éducatif et des médias numériques. Ses analyses

et réflexions forment la matière de son blogue* dont est extraite cette chronique éclairante, rédigée il y a presque un an, dédiée à sa petite fille et… à beaucoup d’autres.

Suzanne, tu as plus de deux ans. Tu sais d’ailleurs très bien le dire quand on t’interroge à ce sujet. C’est ton troisième été. Je t’aime toujours autant et, tu le sais, tu es l’objet privilégié d’une chronique es-tivale où je dis tout de toi et des questions que je me pose à ton en-trée dans un monde de plus en plus numérique.

Bon, je vais essayer de t’expliquer tout cela. Si tu ne comprends pas tout, ce n’est pas grave, dis-moi « Ah ! » comme tu le fais d’habitude, je recommencerai plus tard.

C’est parce qu’on entend ou lit tellement de sornettes sur le numé-rique, Suzanne ! Tout d’abord, ne te trompe pas de mots ! N’écoute en aucun cas ceux qui, curieusement encore nombreux, ne cessent, la bouche en cœur et le doigt dans l’œil, de nous parler de « digital », les sots ne perçoivent même pas le ridicule accompli et monumental de l’anglicisme. Il existe aussi la caté-gorie de ceux qui prétendent ne pas savoir ce que c’est. « Le numérique ? Cela ne veut rien dire… », combien de fois a-t-on entendu cette affirma-tion péremptoire et dédaigneuse dans la bouche même de gens dont c’est justement le métier ? Il y a ceux, enfin, toujours en retard d’un

train, qui continuent à nier sa di-mension paradigmatique en usant, pour en parler, d’autres vocables à la fois réducteurs, abscons et suran-nés…

Suzanne, je vais donc essayer de te dire ce que le numérique re-présente pour moi… ce qu’il porte d’espoirs pour toi. Te dire que c’est à la fois simple… et complexe. Je suis certain que tu es capable de comprendre.

Le numérique, c’est d’abord et surtout de l’humain !

Tu vas le comprendre aisément. Le numérique, vois-tu, ce sont des femmes et des hommes qui le mettent en œuvre, qui le vivent au quotidien, qui s’expriment, qui échangent et partagent, le plus sou-vent de pair à pair, dans des micro-cosmes multiples qui s’interpé-

nètrent et desquels la figure classique des experts s’efface peu à peu. Ce sont des femmes et des hommes qui portent fièrement leurs opinions à la face du monde et ne craignent pas de les voir contredites ou censurées, même s’ils ont parfois à exercer à ce dernier sujet une grande vigi-lance. Le numérique, ce sont des valeurs et des attitudes nouvelle-ment renforcées, celles du partage, de la connivence, de la collabora-tion, de l’amitié, du désir, de la responsabilité, de l’écoute de l’autre, de l’attention à ses préoccupations, de la tolérance… Ce sont encore des libertés, celles de l’expression et de l’opinion, de la création, du choix et des orientations, de nouvelles navi-gations possibles… Ce sont des droits et des devoirs, de la culture, de la raison enfin… Ah ! la raison !

Le numérique, c’est un nouveau modèle d’humanisme, citoyen, social et politique…

Contrairement à ce que pensent nombre des marchands et des poli-tiques qui nous gouvernent et rêvent d’asservir les citoyens au seul profit de leurs idéologies dépassées, en faisant d’eux des usagers passifs, dociles et consommateurs, tu seras une citoyenne du numérique et de l’Internet, Suzanne, si tu fais confiance à tes parents et si le loup ne te mange pas. Oui, ma Suzanne préférée, tu seras une citoyenne engagée sur le réseau. Tu collabore-ras à des projets pour le bien com-mun et public, au partage des connaissances et des savoirs. Tu t’engageras pour la défense de ces biens culturels communs en défen-dant comme il convient la création et les auteurs, artistes, plasticiens, écrivains, musiciens… dont tu seras, je l’espère, contre ceux qui abusent et profitent de leur travail.

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Michel Guillou, consultant et conférencier est un observateur avisé du numérique éducatif et des médias numériques.

Photo : D.R.

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Oui, Suzanne, en toute conscience et en toute raison, j’en suis certain, tu sauras protéger ta personne, en ce qu’elle a de plus intime, contre ceux qui tentent de l’asservir.

Le numérique, c’est aussi de la culture, la plus complète et transversale possible… pour te permettre d’exercer ta citoyenneté.

C’est avec tes parents et à l’école que tu devras l’apprendre… Je fais pour cela entièrement confiance en les premiers mais l’école de la Répu-blique, tu le sais, je t’en ai déjà parlé, tarde à prendre le grand vi-rage… C’est si compliqué pour elle, comprends-la. Pourtant, à l’heure où elle se penche sur la réforme de ses programmes disciplinaires, à l’heure où elle réfléchit aux connaissances et aux compétences nécessaires à la formation d’un jeune citoyen, à la formation qu’elle te devra, Suzanne, il est temps pour elle d’intégrer dans tous les apprentissages la culture numérique transversale minimale et nécessaire. Cette culture numérique doit devenir objet d’enseignement, au-delà des peurs et des fantasmes qu’elle suscite à tort, au-delà des tensions qu’elle fait émerger, au-delà des archaïsmes qu’elle peut mettre en évidence, contre ceux à qui le mot de « culture » fait héris-ser le poil.

C’est nécessaire, Suzanne, pour t’exercer à mieux comprendre plus tard et déchiffrer l’information et tous les codes et messages, en par-ticulier ceux des médias, pour mieux éclairer ta réflexion sur le monde et ses évolutions, pour mieux com-prendre les enjeux philosophiques, sociétaux, économiques aussi et surtout, pour tout ce qui touche la création des œuvres, quelles qu’elles soient.

C’est nécessaire aussi, Suzanne, pour faire de toi cette jeune ci-toyenne émancipée et engagée, je le répète, capable de s’adapter sans difficulté aux métiers de demain, dans quelque secteur professionnel que ce soit, dont personne -oui, personne, pas même les prospecti-vistes les plus pertinents- ne sait ce qu’ils seront !

Le numérique, c’est d’abord de l’humain et de la culture, mais aussi, bien sûr, des technologies, des sciences et de l’économie.

Le numérique croît des sciences qui le mettent en œuvre, dans un domaine multiple et complexe qui s’enrichit d’apports divers, des ma-thématiques et de l’informatique bien sûr, aux sciences de la commu-nication, à l’algorithmique, la cyber-nétique, la robotique… et bien d’autres, jusqu’au design même sans oublier les champs nouveaux et ver-tigineux de l’organisation et du traitement des données. Le numé-rique, ce sont aussi des technologies sans cesse renouvelées, en perpé-tuelle évolution, merveilleuses et si prometteuses.

Et c’est aussi un enjeu économique considérable, pour l’emploi, pour le développement, disent les spécialistes. Je veux bien les croire.

Mais le numérique est transversal, définitivement transversal, il touche, éclaire et contribue à rapprocher chacune des disciplines d’enseigne-ment, chacun des champs du savoir et de la culture. C’est bien ce qui embête ceux qui n’y comprennent goutte, ceux qui contribuent à confis-quer le débat public au point de le rendre inintelligible, ceux dont j’ai dit qu’ils étaient les néo-obscuran-tistes de ce nouveau millénaire, ceux qui tentent de nous faire prendre des vessies pour des lanternes et, par exemple, l’enseignement du code -lequel d’ailleurs ?- pour l’éducation au numérique.

C’est juste pitoyable… et si dérisoire.

Là, Suzanne, je sens que tu dé-croches un peu ! As-tu mieux compris ce qu’est le numérique ? C’est déjà gentil de ta part de m’avoir écouté jusqu’au bout, alors que tu préfères d’habitude faire ta propre musique en frappant les touches de ce clavier virtuel, là, sur ma tablette… Ras-sure-toi, dans quelques mois, quand je te reparlerai de tout cela, toute cette agitation aura disparu aussi vite qu’elle est venue et il ne restera plus à l’école et à la société qu’à se préoccuper de l’essentiel.

Et puis, Suzanne, bientôt je te raconterai ce qu’en pensait Socrate . Sois patiente…

Michel Guillou

@michelguillou* culture-numerique.fr

1. Lire l'article "Socrate et le numerique" de Eddie Playfair sur son blog :

http://eddieplayfair.com/2014/07/26/socrate-et-le-numerique/

« Cette culture numérique doit devenir objet d’enseignement, au-delà des peurs et des fantasmes qu’elle suscite à tort, au-delà des tensions qu’elle fait émerger, au-delà des archaïsmes qu’elle peut mettre en évidence, contre ceux à qui le mot de « culture » fait hérisser le poil. »

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L’EMI, un enjeu citoyenLa Formation, un enjeu pour sa réussite

Dans un contexte où le support numérique est en expansion et où le ministère annonce le développement massif dans chaque collège et lycée d›un média (radio, journal, blog ou

plateforme collaborative en ligne), le CLEMI doit à la fois valoriser le dispositif (média), le contenu (information d’actualité et de donnée) et le support (analogique encore et numérique de plus en plus) pour que les spécificités de l’EMI ne soient pas diluées dans les autres usages du numérique. Pour Divina Frau-Meigs(1), l’enjeu est donc de combiner les acquis de la littératie médiatique et information-nelle à la nouveauté de la littératie numérique.

CLEMI : Réseaux sociaux, big data, internet et la responsabi-lité citoyenne, usages des jeunes, pratiques éducatives renouvelées... Le paysage a changé pour chacun d’entre nous, jeune et moins jeune. Quelles sont d’après vous les priorités absolues en éducation aux médias et à l’information pour le citoyen du XXIe siècle, évoluant dans une grande démocratie ?

Divina Frau-Meigs : Combiner les acquis de la littératie médiatique et informationnelle à la nouveauté de la littératie numérique implique de décliner en quoi cette dernière em-prunte aux codes médiatiques.

La culture médiatique relève au-tant de la communication que de l’information, ce qui doit apparaître plus clairement dans les contenus des enseignements. Il faut désormais :

� savoir informer et s’informer (ac-céder à l’information, la traiter, l’évaluer mais aussi la produire et la diffuser) ;

sitifs à mettre en partage pour donner de l’essor à la construction de la connaissance ;

� comprendre l’organisation des médias (sociale, économique, lé-gale) dont l’architecture de l’in-formation en ligne et ses divers acteurs fait désormais partie inté-grante ;

� garder bien présent à l’esprit la dimension éthique et le lien avec les Droits de l’homme, ce qui, en EMI, comprend le droit à la liberté d’expression (article 19) -enrichi du droit à l’information en émer-gence depuis les années 1990-, et également le droit à la vie privée (article 12) et à la participation (article 27) qui donnent une ré-sonnance nouvelle à l’expression des jeunes sur les réseaux.

À l’heure de la mise en œuvre, ces connaissances et compétences sont transversales à toutes sortes de dis-ciplines. Mais il faut les faire rejail-lir comme des méta-compétences, des processus cognitifs continus en amont des disciplines, qui doivent bénéficier d’une validation et d’une évaluation spécifique étant donné leur importance à l’ère numérique.

« Combiner les acquis de la littératie médiatique et informationnelle à la nouveauté de la littératie numérique implique de décliner en quoi cette dernière emprunte aux codes médiatiques. »

Divina Frau-Meigs, Directrice du CLEMI (Centre de liaison de l’enseignement

et des médias d’information )

� savoir communiquer sur soi et avec les autres, ce qui implique de maîtriser l’interactivité avec les écrans mais aussi de gérer l’interaction avec les autres via les écrans, pour bien vivre sa présence en ligne (certains parlent d’identité numérique, ce qui me semble réducteur) ;

� connaître les caractéristiques augmentées des médias dans le numérique, notamment la di-mension des réseaux sociaux et les enjeux autour de la « don-née » (data), des traces et des « biens communs de l’informa-tion », ces ressources et dispo-

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CLEMI : La formation est l’un des piliers historiques du projet CLEMI. Comment peut-on accompagner les personnes, les enseignants au pre-mier chef, face à cet univers cybé-riste qui nous enveloppe, souvent à notre insu ? Comment assurer des pratiques sensées, dans la classe, par la classe ? Quelle médiation peut-on construire pour assurer un enseignement éclairé à l’ère du numérique ?

D. F-M : L’ère « cybériste » nous incite à penser le XXIe siècle comme une inversion par rapport aux priori-tés industrielles et sociales du XIX-XXe : là où nous visions le stock, il nous faut désormais penser le flux. L’exercice n’est ni neutre ni naturel car les représentations du monde sont bouleversées ainsi que nos structures mentales et cognitives, sans parler des infrastructures écono-miques et sociales. Les choix, gestes, décisions et connaissances qui sont les nôtres sont d’abord acquis en ligne puis consolidés hors ligne. Le dispositif de la classe inversée est une bonne métaphore de ce proces-sus : les élèves préparent d’abord le travail en ligne, dans ou hors l’école, puis viennent en classe pour le véri-fier, le valider et l’approfondir.

La médiation numérique liée à l’EMI consiste d’une part en une ap-propriation des outils et dispositifs numériques ainsi que de leurs repré-sentations et usages et d’autre part en la dissémination des connais-sances sur les médias qu’ils per-mettent. Elle ne se dissocie pas d’une médiation pédagogique qui favorise les démarches par le faire et le dire, comme la webradio, les journaux scolaires (papier et en ligne), avec des projets de plus en plus en prise avec la réalité hors la classe et la proximité avec toutes sortes d’autres intervenants (associations, profes-

sionnels,..). Au bout du processus se trouvent de nouvelles formes d’écri-ture, de lecture, de publication des connaissances, qu’il faut accompa-gner tout en gardant une démarche critique et citoyenne car il faut pré-parer nos élèves aux transformations en cours, en les intéressant aux en-jeux culturels, politiques et écono-miques de l’environnement dans le-quel ils baignent. Cela implique une ouverture du périmètre de l’EMI tel qu’il est défini actuellement, notam-ment par le CLEMI, et une prise en compte des réseaux sociaux dans leur rapport à l’information et une accep-tation de leur rôle dans la socialisa-tion des jeunes, y compris par la fiction, le transmédia et le jeu.

CLEMI : La formation continue des enseignants demeure plus que jamais d’actualité au regard des nécessités numériques de la com-munauté. Elle se structure via les plans académiques de formation dans les services déconcentrés de l’institution. Comment envisager l’infléchissement des actions en matière de formation en EMI ? Qui doit-on convaincre, au-delà des textes, pour réussir à rendre li-sibles les actions de formation, inscrire des stages ou séminaires clairement identifiés EMI ?

D. F-M : Pour cela, il faut conti-nuer à convaincre les décideurs, les enseignants et les parents que la pédagogie du projet n’appuie pas que des compétences mais aussi contribue à la construction de connaissances. La rédaction d’un weblog ou d’un article de wikinews n’est pas juste un exercice scolaire mais une contr ibut ion, tout aussi modeste soit-elle, aux biens communs.

Le soutien institutionnel reste donc essentiel : il s’agit de convaincre les recteurs, les présidents d’ESPE, les chefs d’établissement, les corps d’inspection, qu’ils font d’une pierre deux coups avec l’EMI : formation au numérique dans sa dimension mé-diatique mais aussi revalorisation des disciplines et motivation des enseignants.

Mais l’accompagnement passe aussi par le développement d’une équipe de relais sur le territoire,

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« Il faut continuer à convaincre les décideurs, les enseignants et les parents que la pédagogie du projet (…) contribue à la construction de connaissances. La rédaction d’un weblog ou d’un article de wikinews n’est pas juste un exercice scolaire mais une contribution, tout aussi modeste soit-elle, aux biens communs. »

Divina Frau-Meigs Directrice du CLEMI (Centre de Liaison de l’Enseignement et des Médias d’Information).

Page 38: Coopérer 2.0

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Vous avez dit « Nipédu » ?

Leur recette : mise en confiance de l’interviewé, explication du dé-roulement, questions pertinentes. Bref, du travail de journaliste qui fait que l’on ne s’ennuie pas, on s’informe, on rit même !

Marie-France Rachédi

N ipédu, alias NipÉducation, est un podcast (Fichiers audio comme vidéo disponibles sur Internet) de la famille NipCast dédié à l’école,

à l’éducation et au numérique. rique…), de reportages réalisés, en direct, lors d’événements comme Educatice (3 hors-série consacrés), l’Université d’Eté de Ludovia ou celle de l’OCCE et d’échanges avec des invités, acteurs de terrain, ensei-gnants innovants, passionnés, pas-sionnants utilisant les outils numé-riques (tablettes, twitter...).

Outre la qualité réelle des conte-nus, la tonalité même des émissions séduit : sérieux, rires, bonne humeur se mêlent avec un juste équilibre.

Il est animé par Régis Forgione (Professeur des écoles), Fabien Hobart (Formateur) et Nicolas Du-rupt (Inspecteur de l’Education natio-nale), que l’on peut suivre également su r Tw i t t e r (@profdeseco l e s , @Karabasse77 et @nicdurupt).

« Tisanes » et « émissions » four-millent de réflexions sur de nom-breux thèmes ayant trait à l’usage des nouvelles technologies en classe (classes inversées, SVT et numé-rique, Education musicale et numé-

Quotidienne Régionale (PQR) qui demeure un axe majeur de son ac-tion et de sa réflexion. Avec inter-net, les réseaux sociaux, les pure players, le CLEMI doit continuer à accompagner les pratiques et les usages, former les cadres et les en-seignants, dialoguer avec les profes-sionnels de l’info-documentation et du traitement des données, produire des ressources et des outils avec les nouveaux éditeurs en ligne... Bref, contribuer par tous les moyens aux évolutions contemporaines qui af-fectent à la fois les médias et les jeunes.

Propos recueillis par Carole Helpiquet(2)

Responsable du réseau des Coordonnateurs Responsable de la Formation CLEMI

1. Divina Frau-Meigs est Directrice du Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information.

2. Interview réalisée par Carole Helpiquet dans le cadre du bilan de la formation 2013-2014. Conseil d’orien-tation et de perfectionnement. Synthèses des activités réalisées par le CLEMI durant l’année scolaire 2013-2014.

avec la valorisation du travail en équipe, notamment avec les profes-seurs-documentalistes et les CPE. Le CLEMI doit se mettre en capacité de construire rapidement un maillage territorial au service de l’EMI avec toutes sortes de référents compé-tents, en synergie avec les DANE, les DAAC, les CARDIE, les DAVL, les DAREIC, les ateliers CANOPÉ... mais aussi les EPN et les dispositifs en appui pour la formation des adultes en dehors de l’école, sans compter la mission égalité filles-garçons...

Le numérique lui-même est un atout supplémentaire de formation, pour la formation : il est propice au partage, au « Share With Others », et se prête aux pratiques mutuali-sées... Le MOOC DIY EMI, dont le CLEMI est partenaire, a été construit sur cette vision, pour donner des directions, encourager les initiatives et inciter au développement de pro-jets. Il en va de même pour le par-cours M@gistère EMI.

L’Éducation aux médias et à l’in-formation doit s’inscrire dans une continuité pédagogique, de l’école primaire à l’université. Cela requiert une forte implication en lien avec le nouveau Socle commun de compé-tences, de connaissances et de culture, où l’EMI peut largement s’inscrire dans les cinq domaines.

Pour conclure, je souhaiterais in-sister sur le fait que la grande force de l’EMI, et du CLEMI, reste de ne pas relever des seuls usages en ligne, et de promouvoir des littéra-ties autres que numériques qui per-durent dans le numérique. Le CLEMI a construit un partenariat de qualité avec les grands médias, la presse écrite et audiovisuelle, la Presse

Suivre @Nipedu sur twitter, s’abonner au podcast :

http://nipcast.com/category/nipedu

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Quelles démarches de coopération à l’ÈRE NUMÉRIQUE ?

S i la technologie n’a jamais déterminé la pédagogie, elle a toujours réussi à l’accompagner en se mettant au service de modèles pédagogiques différents. Pour Sylvain Genevois(1), l’usage que l’on fait

de la technologie n’est pas neutre, c’est l’état d’esprit de l’enseignant qui va déterminer la visée pédagogique, l’objectif. La mutation numérique au sein des écoles se fait à l’aune de quelles résistances, et quels outils numériques permettent d’envisager avec sérénité le développement de situations favorisant les coopérations ?

« Les enseignants portent un regard méfiant sur l’invasion du numé-rique dans la classe » constate Sylvain Genevois, « pourtant ce n’est pas l’outil qui détermine l’action, mais l’usage qu’on en fait ». Dans un numéro récent très critique, « Le Nou-vel Educateur » (N°218, juin 2014) énumère un certain nombre de risques.

� Accroître la dépendance de l’école à la sphère marchande… On peut se demander comment le numérique pourrait y échapper. Les enfants étaient la cible de messages publici-taires véhiculés par la presse écrite, la télévision, et maintenant par d’autres canaux. On rejoint une problématique de l’école : son évolution avec la so-ciété, ses nouveaux défis à relever pour amener les élèves à l’éveil des consciences, à l’esprit critique.

� « Prolétariser » les esprits. Le zapping permanent est devenu une pratique courante de notre société. Nous ne souffrons pas d’un manque de ressources, mais plutôt d’un problème de choix. Sommes-nous capables de traiter les informations, de sélection-ner celles qui sont fiables ? Selon quels critères ? Sommes-nous tous en mesure de croiser, vérifier les sources ? A quel moment sommes-nous certains d’avoir obtenu la bonne réponse ?...

Et pour l’enseignant, lui suffit-il d’avoir accès à ces ressources pour préparer sa classe et se prétendre pédagogue ?

Ce qui nous empêche de penser est-il dû à l’invasion sur les écrans de programmes « prolétarisants » ou sommes-nous dans l’incapacité de nous en extraire ?

� Cautionner de vieilles méthodes sous couvert d’innovation, par exemple faire un cours magistral au tableau… mais sur le TNI ! Le cours magistral est-il à bannir définitivement ?...

� Accentuer le contrôle sur les en-seignants et sur les élèves. Les pos-sibilités de contrôle des acquisitions sont accrues par la technologie qui permet l’élaboration de bases de don-nées. Le risque vient-il des données ou de l’utilisation qui en sera faite ?...

Pour Sylvain Genevois, ces re-proches sont fondés, mais interpellent plutôt la philosophie éducative. « L’école ne doit-elle pas redevenir le lieu où l’on prend le temps d’ap-prendre ? »(2) « L’enseignant ne peut-il s’appuyer sur les technologies numé-riques pour contribuer à l’émergence de la pensée ? »(3)

S’approprier des outils numériques collaboratifs : quelques pistes de réflexion

Comment apprendre ensemble avec le web ? Depuis 2005, ce qu’on appelle le web 2.0, à la fois participatif et collaboratif, suscite enthousiasme et crainte. Les expériences pédagogiques conduites avec des outils collaboratifs sont plus des pistes de réflexion que des modèles. Le web a développé dif-férentes pratiques sociales et une forme d’intelligence collective : au départ, des blogs, messageries instan-tanées, suivis par les wikis après l’arrivée en 2001 de Wikipédia, les journaux citoyens, les forums qui nous permettent de passer de consomma-teurs à conso-acteurs. Toutes ces ap-plications qui se multiplient offrent des possibilités intéressantes comme diffuser des diaporamas en ligne, sau-vegarder et partager des fichiers, faire des revues de presse, créer des cartes mentales... On partage à distance les mêmes informations, mais est-ce pour autant de la collaboration ?...

Qu’en est-il des twittclasses ? Elles sont basées sur le principe de la correspondance scolaire, avec des règles différentes. Par exemple « geometwitt » vise une forme d’ex-pertise par l’échange inter-classes de twitts associés à des photos dans le but de construire des figures géomé-triques. Certains enseignants rédi-gent avec les élèves une charte in-formatique pour Twitter. Ils rappellent que les échanges sont anonymes, qu’il s’agit d’un compte classe placé

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Sylvain Genevois est agrégé d’histoire-géographie, maître de conférence en Sciences de l’éducation à l’université de Cergy-Pontoise et membre du laboratoire « école, mutations, apprentissages ».

Photo : D.R.

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sous la responsabilité de l’ensei-gnant. Citons aussi les twictées... basées sur les dictées négociées (le groupe se met d’accord sur l’ortho-graphe du texte avant de l’envoyer). Comme le précise un site qui leur est consacré « la twictée invite les élèves à réfléchir aux stratégies orthogra-phiques en situation d’écriture. Le partage, la mise en regard de ces réflexions via un réseau social, au-delà de la motivation, permet à l’élève de développer un sentiment de res-ponsabilité face à l’acte d’orthogra-phier et face à sa production » (4).

Le tableau numérique, médiateur de l’interactivité en classe

Pour coopérer ou collaborer, il est nécessaire de communiquer, coordon-ner et produire ensemble, mais les outils collaboratifs ne concernent généralement que l’une de ces trois fonctions. Le TNI permet d’associer toutes ces fonctions. En effet, il per-met aussi bien l’affichage du récit de la classe de mer des correspondants qu’une production d’élèves sur la-quelle la classe va retravailler. Il peut être associé à des tablettes pour mul-tiplier les traces consultables au même instant, les modifier, mélanger, mémoriser. Il peut être utilisé pour l’introduction rapide d’une leçon à la classe entière et par groupes. Avec Google Maps, Scribble Maps, les élèves vont pouvoir dessiner des figures géo-métriques, intégrer du texte, des marqueurs, exporter des cartes…

Exemple de cette vitalité et de la volonté de partager les expériences, le site de François Lamoureux qui a mo-délisé son travail avec les tablettes, le partage de sa pratique avec d’autres enseignants, leurs échanges en visio-conférence(5).

Le maître-mot de ces outils numé-riques ne serait-il pas l’interactivité ?

Scénario d’apprentissage s’appuyant sur une instrumentalisation des pratiques

Tous les enseignants organisent au préalable leur intervention auprès des élèves, mais lorsqu’on multiplie les ressources et qu’on passe d’un instru-ment à l’autre, la multiplication des savoirs et des compétences à mettre en œuvre par l’enseignant pose problème. Même pour un « enseignant transmé-dia » capable de circuler de façon routinière dans les outils numériques, cela demande une scénarisation pous-sée. Où sont les ressources, comment y accéder, comment les fixer, comment les distribuer dans la classe, comment permettre aux élèves de les redistri-buer ? Ou encore, de façon plus prag-matique, comment alimenter ces outils en électricité, comment les mettre à disposition de façon sécurisée ?

A cause de ces problématiques, on observe des régressions sur les outils comme les tablettes car les pratiques créent des contraintes inattendues. Un enseignant extrêmement investi dans les nouvelles technologies et convaincu par leur intérêt pour une pédagogie collaborative peut trouver des solu-tions, mais cela demande beaucoup de temps et d’énergie. Les sites de ces passionnés méritent d’être visités.

Il ne faut pas négliger le rôle des traces laissées par les apprenants, car elles sont elles-mêmes sources d’ap-prentissage. On peut, grâce aux ENT, les comparer, revenir sur l’historique d’une trace, revenir sur une trace an-

cienne, compléter une trace existante de façon collaborative ou individuelle, ce qui permet de faire de l’évaluation formative.

5 conditions pour que le numérique soit l’avenir de l’école

Accepter la mutation de la fonc-tion enseignante qui n’est plus

de transmettre mais d’accompagner les infusions pour chacun.

Organiser la coopération dans la classe en sorte que les compé-

tences des uns deviennent des res-sources potentielles pour les autres.

Éviter la découverte descen-dante de nouvelles notions.

Introduire une part de travail personnel pour chaque enfant.

Demander aux élèves de finaliser leur travail seuls ou à plusieurs

par la production de supports.

Propos synthétisés par Béatrice Musielak et

Gilles Petitjean

1. Agrégé d’histoire-géographie, maître de conférence en Sciences de l’éducation à l’université de Cergy-Pon-toise et membre du laboratoire « école, mutations, apprentissages ».

2. « L’école, le numérique et la société qui vient » D. Kambouchner, B Stiegler, P Meirieu, Mille-et-une nuits, « Les petits libres n°80 »janvier 2012.

3. http://www.meirieu.com/ARTICLES/pedagog_nume-rique.pdf Philippe Meirieu

4. https://karabasse77.wordpress.com/

5. http://sicestpasmalheureux.com

6. Sylvain Connac (2014)

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« Il ne faut pas négliger le rôle des traces laissées par les apprenants, car elles sont elles-mêmes sources d’apprentissage. »

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41Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Le numérique au quotidien : état des lieux et enjeuxLe numérique est une vaste

question qui traverse les so-ciétés à l ’échelle mondiale, comme le montre Bertrand Formet, Formateur Canopé et CLEMI, directeur Atelier Canopé du Doubs, à travers ce rapide panorama(1) des usages du numérique et d’in-ternet qui donne toutefois la me-sure des enjeux pour l’Ecole.

Aujourd’hui, 30 millions d’indivi-dus utilisent Facebook, 280 millions Twitter, 3 milliards sont connectés à internet dont 2 milliards sur les ré-seaux sociaux. 80 % des personnes connectées le sont à partir d’un té-léphone mobile ! L’ordinateur n’est donc plus le seul moyen d’accès à internet.

Concernant les 12-17 ans(2) : 100 % se disent internautes, 98 % disposent d’une connexion internet à la maison. Ils passent en moyenne 5 heures par jour en ligne. 77 % participent à des réseaux sociaux. 89 % affirment qu’il leur serait diffi-cile de se passer d’internet au quoti-dien. Plus étonnant, 80 % des moins de 5 ans utilisent internet une fois par semaine.

Face à cette ampleur, l’utilisation pédagogique des réseaux sociaux ne cesse de se développer.

Des enseignants dits innovants avaient en effet très vite compris que la modification des outils devait enclencher un changement de

paradigme de l’éducation et qu’il ne suffit pas d’être un enseignant connecté pour permettre aux élèves de s’approprier la culture du numé-rique.

Le numérique est un outil au service de la pédagogie qui peut dynamiser le collectif tant dans la réflexion que dans la pratique. Ainsi, les gestes professionnels évoluent par le biais d’un espace propice aux partages, aux échanges, à la coopé-ration.

Suivant les traces des précur-seurs(3), les enseignants sont de plus en plus séduits par les multiples possibilités qu’offre le réseau Twitter. Depuis 2010, le site twittclasse recense celles utilisant twitter dans leur pratique et pour des projets pédagogiques spécifiques(4) : défis littéraires, mathématiques, géometweets, callitweets, twictées (voir article ci-contre), Twittéra-ture… Les projets ont pour seules limites la créativité des enseignants, des conseillers pédagogiques, des élèves… Outil de communication, d’information, Twitter devient alors un outil pédagogique permettant aux élèves de travailler de nombreuses compétences dont celles dans le do-maine de la maîtrise de la langue. Les

messages envoyés engendrent des débats, des échanges permettant de tisser des liens avec des élèves fran-cophones (ou pas suivant les projets) du monde entier. Les murs de l’école s’effondrent, les distances se ré-duisent, la créativité est exacerbée, la collaboration favorisée. Le pro-blème soulevé par l’enseignement du numérique n’est pas l’outil en lui-même, mais bien le projet pédago-gique, les objectifs à atteindre. L’in-térêt dans la classe est d’inviter les élèves à faire autrement avec d’autres moyens d’expression en construisant de nouvelles compétences.

Synthèse, Sophie Maissin1. Voir le Prezzi de Bertrand Formet réalisé pour l’atelier

« Le numérique au quotidien, état des lieux et enjeux. Quelles utilisations pédagogiques » de l’Université d’été de l’OCCE, juillet 2015. http://canope.ac-besan-con.fr/blog/le-numerique-au-quotidien-etat-des-lieux-et-enjeux-ueocce/

2. D’après : « Des pratiques numériques des jeunes aux enjeux de l’école », Intertice Michel Guillou, culture-numerique.fr, Saint-Ouen-L’Aumône, 20/05/2015.

3. Quatre twittclasses recensées en 2009-2010 (Eric Delcroix et David Cordina -Université de Lille-, Lau-rence Juin -à La Rochelle en Charente Maritime et Amandine Terrier à Crotenay dans le Jura) : http://www.cndp.fr/savoirscdi/cdi-outil-pedago-gique/base-initiatives/initiatives-pedagogiques/twit-ter-un-outil-au-service-de-la-pedagogie-comme-les-autres/des-twittclasses.html

4. Voir « Les vertus pédagogiques de twitter » sur le blogue du TwittMOOC : http://www.2vanssay.fr/twitt-mooc/?p=2522

Infographie extraite du Prezzi(1)de

Bertrand Formet réalisé pour

l’atelier « Le numérique

au quotidien, état des lieux et enjeux. Quelles

utilisations pédagogiques »

de l’Université d’été de l’OCCE,

juillet 2015.

Page 42: Coopérer 2.0

Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-24842

La #twictéeLes secrets de sa réussite

C onçu et initié par Fabien Hobart et Régis Forgione(1), le dis-positif collaboratif d’enseignement et d’apprentissage de l’orthographe, joliment baptisé Twictée, ne cesse de séduire

les enseignants désireux d’embarquer leurs élèves dans un projet collaboratif via le réseau social Twitter. Secret d’une réussite !

Twictée(2) saison 1 rassemblait trois classes, début de la saison 2, six mais à la fin de cette même sai-son elles étaient… cent-cinquante classes francophones inscrites dans ce dispositif collaboratif d’enseigne-ment et d’apprentissage de l’ortho-graphe. Si la médiatisation a légère-ment contribué à ce succès, c’est surtout le dispositif lui-même qui attire de plus en plus d’enseignants

désireux de se lancer dans un appren-tissage via le réseau social twitter. Quels sont donc ses atours ?

A écouter les twictonautes (ensei-gnant(e)s qui pratiquent la twictée), ce dispositif -qui propose une autre façon d’enseigner- répond à des objectifs pédagogiques fondamen-taux : « Twictée, explique Catherine Massicot, Maître-formateur dans une

classe de CM2 en Seine-et-Marne et lancée dans l’aventure dès l’origine, est un moyen de développer et auto-matiser les stratégies orthogra-phiques, de consolider les connais-sances des élèves, de valoriser leur travail et de les rendre autonomes. Ce dispositif permet de leur donner de bons outils, de bonnes méthodes pour l’avenir. Pour nous, enseignants, il offre l’opportunité de travailler en équipes avec des collègues de diffé-rents pays francophones, d’échanger sur nos pratiques, de faire évoluer les outils propres au dispositif, de nous auto-former… ». Entre les twicto-nautes, l’entraide va de soi et en cas de grosses difficultés, Fabien Hobart et Régis Forgione, concepteurs et initiateurs de ce dispositif, ré-pondent toujours présents.

Concrètement, le dispositif com-prend quatre étapes. Le passage par twitter représente 10 % du travail, l’essentiel étant réalisé avec du pa-pier et des crayons. C’est un élément qui a son importance : pas besoin

Intégrer twitter dans ses apprentissages

Apprivoiser twitter : le twittMOOC

Pour se lancer dans l’aventure « twittclasse », classe utilisant Twitter dans leurs travaux quotidiens ou à l’occasion de projets pédagogiques ponctuels (sorties scolaires, voyages scolaires…), il est bien sûr nécessaire de créer un compte classe sur le réseau social et, pour se faire, d’apprivoiser Twitter.

Le twittMOOC, projet d’apprentissage en ligne, créé par Stéphanie de Vanssay, professeur des écoles, conseillère technique au sec-teur éducation du SE-Unsa, est ouvert à tous. Il propose aux débu-tants d’apprendre à se familiariser avec ce réseau social, d’en appréhender les subtilités, les qualités et les limites. Collaboratif, le blog dédié s’enrichit régulièrement d’articles des participants ou tuteurs. Le twittos peut aller y puiser des éléments techniques, des témoignages, des réflexions, un kit de départ fort utile pour se lan-cer sur Twitter. Il peut relever différents défis pour mieux goûter les subtilités de ce réseau…

http://www.2vanssay.fr/twittmooc

Créer sa twittclasse : les préalables indispensables

Il est essentiel bien sûr avant d’ouvrir un compte classe de :

� demander toutes les autorisations nécessaires auprès de votre hié-rarchie, des parents, etc. ;

� d’informer le conseiller Tice, l'IEN ;

� de présenter l’outil aux familles, voire aux collègues ;

� d’expliquer le fonctionnement aux élèves ;

� rédiger avec eux une charte d’utilisation de ce réseau social (qui peut être plus large : charte internet).

Voir le très riche Blog de François Lamoureux (professeur des écoles et directeur) comportant des vidéos humoristiques (mais pas que) sur l’usage d’internet et des outils numériques comme les tablettes et notamment cet article :

http://sicestpasmalheureux.com/2013/01/05/pas-a-pas-demarrer-sa-twittclasse

Page 43: Coopérer 2.0

Les Twittclasses ne cessant de se multiplier, Bertrand Formet a eu l’idée de les mettre en lumière grâce à la création d’un site. En août 2015, 603 Twittclasses étaient ainsi recensées.

Le site propose également :

� de suivre la balise #Twittclasse et les tweets des Twittclasses en direct

� des projets pédagogiques

� des témoignages d’enseignants et des reportages dans les classes

� de retrouver quelques comptes Twitter des enseignants des twittclasses, leur site ou leur blog.

http://www.twittclasses.fr

43Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

d’être un expert en technologie pour se lancer dans ce projet. Il suffit de posséder des connaissances ba-siques du maniement de Twitter. « Au préalable, prévient Catherine Massicot, un travail est réalisé avec les élèves sur la découverte de ce réseau, ses avantages mais aussi ses inconvénients, voire dangers. Une information est réalisée auprès des parents, une charte twitter est rédi-gée et toutes les autorisations de-mandées à son IEN. Tout ceci est nécessaire avant d’ouvrir le compte twitter de la classe ».

Les différentes étapes

Dictée collaborative entre plu-sieurs classes, ne dépassant pas 140 caractères, comme l’impose le ré-seau social, la twictée s’élabore en quatre phases.

Première phase, les enfants sont devant leur feuille et rédigent indi-viduellement la dictée créée en collaboration par les enseignants qui participent (sur un googe.doc ou

autre) : « En fait, précise Catherine Massicot, nous sommes organisés par équipe, chacune d’elle crée sa dictée suivant un point du programme que les membres souhaitent travailler avec leurs élèves ».

Après la dictée individuelle, les élèves, répartis en 8 groupes, vont, sur le modèle de la dictée négociée, essayer de se mettre d’accord sur un seul texte. Au final, seuls ces 8 textes (1 par groupe donc) seront tweetés. « Au sein de sa classe, explique Bruno Mallet, enseignant

au Mée-sur-Seine (Seine-et-Marne), autre twictonaute de la première heure, nous restons très libres de notre démarche. Certains enseignants autorisent les élèves à utiliser des outils comme le dictionnaire, d’autres non. Certains constituent des groupes homogènes, d’autres pas, etc. ».

Ces 8 textes sont envoyés via twitter, en message privé (pas de publication d’erreur sur twitter), à la classe miroir : « Ce sont Fabien Ho-bart et Régis Forgione qui, suite aux inscriptions des classes, réalisent une cartographie et apparient les classes, précise Catherine Massicot. A chaque classe scribe, sa classe miroir ». Peut alors commencer la seconde phase qui, aux dires de tous les praticiens, est la plus intéressante, formatrice et originale : la création de twoutils.

Un twoutil(3) est une petite règle d’orthographe, produite par les élèves de la classe-miroir pour aider leurs copains de la classe-scribe à corriger leurs erreurs. Là encore, libre

Intégrer twitter dans ses apprentissages (suite)

Une Twittclasse, pourquoi ?

Fanny Peissik, enseignante à Nogent-sur-Marne, présente au moins 10 bonnes raisons d’utiliser twitter en classe. Dans son Blog, elle explique son choix, ses débuts, donne des pistes.

http://bit.ly/1KHK7XE

Trouver d’autres twittclasses, des projets…

Twitter, une immense salle des professeurs !

Depuis deux ans, sous l’impulsion de Stéphanie Fontdécaba, enseignante Icem à Paziols (Hautes Corbières), se tient sur le réseau social, à une date et heure données, un twittconseil des enseignants de twittclasses : échanges autour de propositions de projets (défis mathématiques, lectures, définombre, géometweet, twittconte…), inscriptions de classes dans ces projets… L’année dernière, c’est un autre enseignant, Nicolas Olivier, qui a animé ce conseil qui a donné lieu à un document recensant les multi-ples propositions et dans lequel vous pourrez puiser des idées de projets à mener sur le réseau social. Début juillet, un compte twitter @twittconseil est ouvert pour favoriser les échanges, l’entraide et la circulation des informations.

http://bit.ly/1EBmcbl : projets twittclasses évoqués lors du 2è #twittconseil

Les élèves, répartis en 8 groupes, vont, sur le modèle de la dictée négociée, essayer de se mettre d’accord sur un seul texte.

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à l’enseignant d’organiser cette phase comme il l’entend. « Au départ, poursuit Catherine Massicot, je lais-sais les élèves corriger le texte des copains mais, très vite, j’ai mis en place une phase de correction en groupe pour mener les élèves à verba-liser leur stratégie orthographique : comment procède-t-on pour trouver l’erreur, à quelle règle orthographique ou lexicale se rapporte-t-elle ? On touche, là, la catégorisation des er-reurs, la typologie des erreurs. Evidem-ment, la classe-scribe a réalisé la même dictée que la classe-miroir. Nous jouons sur le répétitif pour automati-ser des réflexes orthographiques. Les élèves vont donc, comme dans la phase de la dictée, négocier, devoir verbaliser leur stratégie orthogra-phique. Cette répétition va conforter leurs apprentissages. Pour les élèves, les leçons de grammaire, de vocabu-laire… réalisées en français prennent à ce moment-là tout leur sens. »

Les #twoutils seront bien évidem-ment tweetés aux copains, ils doivent donc être rédigés en 140 caractères, ce qui oblige les enfants à être efficaces pour aider les co-pains à se corriger seuls.

Forme canonique du #twoutil

Pour que toutes les classes puissent travailler ensemble et se comprendre, les #twoutils doivent tous être rédigés de la même façon. Ils commencent tous par l’identifiant de la classe scribe, suivi de « #twou-til », puis de la phrase : « le mot correctement orthographié » s’écrit « correction du mot » car c’est « règle d’orthographe » suivie d’une balise(4) pour catégoriser les erreurs

et que les enfants comprennent mieux quels types d’erreurs ils ont faites (ex : @classescribe #twoutil « enfant » s’écrit avec un « s » car il y a « les » devant. #accordGN (Pépito)). C’est, bien évidemment, dans la grande salle des maîtres qu’est twitter, que les twictonautes ont réfléchi aux balises, à la forme rédactionnelle des twoutils, aux évolutions nécessaires…

Etape 3, les élèves envoient leurs twoutils et reçoivent ceux de la classe-miroir. Les élèves se re-mettent en groupes et vont corriger leur texte à l’aide des twoutils (phase possible d’échange si le twoutil n’est pas clair). Enfin, chaque élève va corriger sa propre dictée.

Suite à cette étape, les ensei-gnants laissent passer quelques jours et refont une dictée : « Là encore, insiste Bruno Mallet, libre à l’enseignant de refaire la même dic-tée ou de faire une dictée transfert reprenant les points orthographiques, les mots difficiles à orthographier ».

Pour en savoir plus, allez sur le site http://www.twictee.org/, vous y trouverez des modèles de charte twitter, de demandes d’autorisation… Et pour s’inscrire : http://bit.ly/1JBdcSx (lien vers un google doc : documents d'inscription et kit de démarrage)

« Un épisode twictée s’étale sur une quinzaine de jours, complète Catherine Massicot. Les calendriers sont mis au point par équipe en te-nant compte des vacances scolaires différentes selon les zones. Nous or-ganisons deux twictées par période scolaire. Alors, une précision qui a son importance, les twictées (textes courts) ne suppriment pas les autres dictées sur des textes plus longs. Elles viennent en complément ». « C’est une autre façon d’appréhender l’ortho-graphe, approuve Christelle Prince, conseillère pédagogique et twicto-naute, avec l’objectif majeur de valo-riser les enfants, de les rendre autonomes, une forte volonté d’éman-cipation du destinataire (l’élève) pour lui permettre d’aller agir sur le monde et sur les autres. Dans ce dispositif, les élèves apprennent en faisant, ils sont acteurs de leur apprentissage et, bien souvent, au bout de deux twictées, ils n’ont plus besoin de nous, ils travaillent en autonomie. »

Marie-France Rachédi

1. Fabien Hobart, Enseignant spécialisé, Conseiller péda-gogique Circonscription A.S.H. 1er degré, Chargé de Mission Délégation Académique au Numérique et, à la rentrée 2015, chargé de formation au Centre de Re-cherche interdisciplinaire pour le programme des Sa-vanturiers (@savantures) aux côtés de François Taddeï @FrancoisTaddei et Ange Ansour @AngeAnsour. Régis Forgione est professeur des écoles.

2. Le dispositif twictée (contraction de twitter et dictée) est inspiré de l’ouvrage de Catherine Brissaud et Da-nièle Cogis « Enseigner à l’école primaire : comment enseigner l’orthographe aujourd’hui », Hatier, no-vembre 2011.

3. Un twoutil est une petite leçon d’orthographe, pro-duite par les élèves, ayant pour but de corriger les erreurs. Voir article : http://www.twictee.org/2014/05/28/les-twoutils-au-coeur-des-twictees-mais-pas-que/

4. Utilisation de balises pour catégoriser les erreurs : par exemple : #accordSV (pour accord sujet-verbe) ou #accordGN… #ortholexicale #homophone…

Ces 8 textes sont envoyés via twitter, en message privé (pas de publication d’erreur sur twitter), à la classe miroir

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Des outils numériques au service de la rencontre et de l’échange

Les sites internet français et eu-ropéens E-twining (voir encadré) regorgent d’informations. E-twining se présente comme un intermédiaire entre enseignants partenaires qui forment une communauté éducative autour de projets pédagogiques ba-sés sur l’échange (exemples de pro-jets sur le site).

Un Bureau national valide le pro-jet, puis E-twining outille les ensei-gnants d’outils collaboratifs de base pour engager le travail : se mettre en relation, construire le projet, définir les fonctions de chacun. Avant de se lancer, une formation de deux jours est proposée. Ces propo-sitions s’adressent aux enseignants, de la maternelle jusqu’au lycée.

Les projets ne concernent pas seulement les professeurs de lan-gues ; il existe des projets en mathé-matiques, en sciences, etc. L’intérêt réside dans les situations de commu-nication entre élèves. Ils se re-trouvent confrontés à de nouvelles réalités, en fonction de leurs parte-naires, qu’ils soient en France ou à l’étranger.

Alors, quoi de neuf par rapport à une correspondance scolaire « classique » ?

Sans hésiter : le recours à des outils numériques pour diversifier les formes de productions. Réalisa-tion de vidéos mises en partage, conception d’œuvres d’art collec-tives, création de documents so-nores, d’images animées, la palette des possibles est désormais profon-dément élargie !

Les enseignants qui s’engagent disposent d’espaces de travail colla-boratifs (stockage de documents partagés, forums, chat, etc.), d’un tableau de bord par projet, d’un journal qui permet l’envoi de mes-sages réguliers entre les classes. Les

adultes disposent même d’une salle des profs virtuelle ! Quant aux en-fants, ils peuvent avoir un compte et intervenir directement. Enfin, ces espaces peuvent être accessibles à des « invités » : autres enseignants, parents, qui peuvent ainsi suivre l’évolution du projet à distance (consultation uniquement).

Avec E-twining, le partage de connaissances sur les outils externes et leurs utilisations est au cœur de l’accompagnement ; c’est aussi un aspect de cette « communauté » en perpétuelle co-formation.

Outils numériques conseillés par E-twining pour des usages divers (visioconférence, partage de docu-ments lourds, documents collabora-tifs, outils de production) : http://www.etwinning.fr/boite-a-outils/bons-outils-tice-pour-son-projet.html

Un conseil pour débuter ?

Commencer petit. Un projet peut durer un mois, juste pour la présen-tation. Prévoir le temps nécessaire à l’appropriation de l’espace de tra-vail. C’est un investissement impor-tant, mais qui ouvre la voie sans aucun doute à de nouvelles pra-tiques, tant au niveau des ensei-gnants que de leurs élèves.

Marion Bertin-Sihr

Au-delà de la correspon-dance classique, E-twining facilite l’organisation d’un

projet planifié en partenariat avec une ou plusieurs classes. Mise en relation, formation des enseignants, accompagnement à l’utilisation d’outils numériques collaboratifs.

Qu’est-ce qu’un projet E-twining ?

Un projet eTwinning est un projet de travail collaboratif mené à distance par au moins deux classes de pays européens différents. Un projet implique de mener au moins une activité en commun avec un partenaire d’un autre pays, sur la base de la pédagogie de projet et de l’enregistrer sur le Desktop de la plateforme eTwinning. Pour le reste, c’est à vous de définir !

Trouvé sur le site : http://www.etwinning.fr/decouvrir/quest-ce-quun-projet-etwinning.html

Exemple d’un projet mené dans une classe de langue, par Coralie Dugenest, « Un voyage virtuel sur la route des contes » :http://twinspace.etwinning.net/1234/pages/page/7614

Site français http://www.etwinning.fr, 7 étapes pour mener son projet, et exemples de projets sur la page : http://www.etwinning.fr/decouvrir/les-projets-etwinning.html.

Contacts académiques :http://www.etwinning.fr/nous-contacter/contacts-academiques.html

Exemples d’activités sur le site européen www.etwinning.net :http://www.etwinning.net/fr/pub/collaborate/modules.htm et de projets http://www.etwinning.net/fr/pub/collaborate/kits.cfm

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Les Tice pour créer des environnements facilitants

C omment passer d’une focalisation sur les troubles pathologiques à la création d’environnements facilitants ? Au cœur de la recherche de Jack Sagot, enseignant-chercheur à l’Université

Paris 8, concepteur du logiciel PICTOP(1), cette problématique se pose avec urgence depuis 2005. Une solution : utiliser les ressources numé-riques au service du parcours inclusif des élèves à besoins éducatifs particuliers, comme l’expose Jack Sagot.

La scolarisation des élèves handi-capés en milieu ordinaire, devenue la règle depuis la loi de 2005, a sans aucun doute accéléré le mouvement par lequel l’école a entrepris d’inter-roger ses modes de pensée et de fonctionnement. Partant de l’hypo-thèse de l’éducabilité et des capaci-tés de conceptualisation de toute personne, il s’agit moins désormais de se focaliser sur les facultés co-gnitives, sensorielles ou mentales déficientes que de créer les condi-tions de leur restauration en formant des environnements facilitants.

L’impact des déficits sur l’enfant dépend en grande partie de la qua-lité de l’environnement, c’est-à-dire des médiations éducatives et péda-gogiques dont il pourra bénéficier dans son parcours de vie.

En termes d’accessibilité et d’au-tonomie, on voit l’intérêt que peuvent constituer les Tice puisqu’elles per-mettent précisément d’apporter à l’élève handicapé dans le contexte scolaire les aides techniques com-pensatrices qui vont lui rendre acces-sibles les apprentissages.

Avec les Tice, le rôle du formateur se transforme radicalement, ce n’est plus celui qui transmet seulement les connaissances mais c’est celui

qui accompagne et qui aide l’appre-nant à atteindre son indépendance, à développer son autonomie (auto-nomie sociale, autonomie scolaire et en priorité l’autonomie de pensée).

Il s’agit avant tout de favoriser l’accessibilité pédagogique, c’est-à-dire de prendre en compte à la fois les besoins de l’élève et l’adaptation des démarches, des consignes, des supports et des outils que chacun de nous, enseignants, devons mettre en œuvre pour nos élèves en situation de handicap.

Divers par la nature des déficits, variables dans le temps et l’espace, ces besoins sont complexes car ils relèvent à la fois de l’ordre de l’ac-tion, de la pensée et de la relation de l’individu à la société.

Pour enseigner à des élèves DYS, il est donc nécessaire :

� d’interroger d’abord les tâches scolaires très variées que nous im-posons à nos élèves et qui mobi-lisent 7 fonctions cognitives : le langage, le visuo-spatial, les praxies, les gnosies (perception/reconnais-sance), les mémoires, l’attention, les fonctions exécutives (planification, inhibition, flexibilité mentale per-mettant de réaliser : stratégies, ré-solution de problème, prise en compte des erreurs…) ;

� de privilégier des démarches adaptées (verbalisation avec cer-tains, usage de l’image avec d’autres, travail à partir de groupes de be-soins, apprentissage différencié de la lecture en insistant sur code et sens en même temps …) ;

� de s’appuyer sur des aides humaines (AVS) ;

� et d’utiliser des aides techniques (ordinateur avec des interfaces ma-térielles et logicielles généralistes ou spécialisées).

Et toujours en prévenant et en contournant les obstacles à la sco-larisation.

Plusieurs attitudes pédagogiques sont à privilégier :

économiser l’énergie cognitive. Lutter systématiquement contre la double tâche en suppléant par les TICE les tâches de bas niveau pour mobiliser l’énergie cognitive sur les tâches de haut niveau.

Compenser les déficits : adapter les démarches (faire verbaliser les procédures, répéter les consignes, donner plus de temps, dispenser de certaines tâches toxiques) ; adapter les supports pour faciliter la prise d’information ; dispenser des aides personnelles en équilibrant les aides tantôt humaines, tantôt techniques (voir encadré).

Un élève utilisant la synthèse vocalepour accéder plus facilement au sensd’un texte (avec Pictop3 SpeakBack)

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Les aides doivent être appliquées en fonction des besoins. Chez les petits, il faut préférer les aides hu-maines aux aides techniques. A contrario, chez les plus grands, les aides techniques seront à privilégier afin de donner progressivement de l’autonomie (voir encadré).

Pour assurer l’autonomie scolaire et l’accessibilité pédagogique des élèves Dys, ces aides techniques doivent donc :

� être choisies en fonction des be-soins de l’élève (besoins qui évo-luent), la valeur d’un logiciel ne se mesure que dans son adéquation à un besoin couvert ;

� être maîtrisées par l’élève avant d’être introduites en classe (rôle des ergothérapeutes. La formation est nécessaire à l’autonomie) ;

� être comprises et maîtrisées par l’enseignant et l’assistant d’éduca-tion (qui doivent être formés !) … et les parents au domicile ;

� intégrées dans un environnement pédagogique cohérent (démarches + outils) ;

� appliquées à l’école en pluridisci-plinarité avec attention et rete-nue…

L’usage des Tice doit toujours être piloté par des objectifs et des choix pédagogiques et non pas en raison de la modernité technique ».

Jack Sagot*Extrait de Tice & Elèves TSA,

Le Havre, 19/03/2014 : http://cddp76.ac-rouen.fr/pdf/Ticedys.pdf

* Jack Sagot : Docteur ès sciences (biochimie), ancien professeur au CNEFEI et à l’INSHEA. Chercheur associé à l’Equipe THIM, CHART 4004. Cognition Humaine et ARTificielle, Université Paris 8.

Les aides techniquesLes matériels : magnétophone/dictaphone (MP3), tableau numérique interactif, stylo numérique, casque microphone, haut-parleur, souris, scanner, imprimante, tablette, clé USB et ordinateur.

Quelques logiciels

Les hypertextes avec Internet.

Traitement de texte fortement paramétrable, moteur de recherche, suite bureautique, Pictop, Dragon, Médialexie, Speakback, Claroread, Dicom , Didapage, Posop, TGT et Logiciels de géométrie dynamique (Géogébra,Cabri, Géométrix) et/ou de repré-sentation graphique (Sinéquanone, Toutxy)…

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Adapter l’environnement scolaire… pour mieux accéder aux connaissances

Quelques exemples d’usages des Tice avec des élèves DYS

� L’accompagnement de l’apprentissage de la lecture : le développement de la conscience phonologique, morphologique et syntaxique par l’usage du logiciel Pictop avec ses outils métacognitifs (voir ci-dessous).

� Lire et écrire avec la synthèse vocale pour accéder plus facilement au sens d’un texte quand, au mieux, l’élève déchiffre.

� Le traitement de texte et le mode formulaire bloqué.

� Accessibilité des documents par des macro-commandes.

� L’aide à la lecture : le marquage des syllabes avec Coupe-mots de SDVocal.

� La production de documents adaptés facilement manipulables : la numérisation, les hypertextes et la navigation simplifiée par des liens hypertextes.

� L’aide au calcul : la calculette et l’aide à la pose d’opérations.

� L’aide au traçage et à la géométrie : TGT & Géogébra.

� L’usage des correcteurs et des dictionnaires.

� La reconnaissance vocale.

Le bandeau de commande

La grille d’étiquettes

L’éditeur

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Concilier outils numériques et inclusion scolaire

« La société, l'environnement doivent s'adapter à l'élève en si-tuation de handicap et non l'inverse... », tel est le principe de l’inclusion. Les outils numériques, la création de logiciels

comme Pictop favorisent la mise en œuvre de ce principe. Exemple dans cette CLIS 1 (troubles des fonctions cognitives) de l’école Cassin de Chau-mont (en REP : Réseau d’Education Prioritaire).

TNI (Tableau Numérique Interac-tif), tablettes, classe mobile font maintenant partie de leur quotidien. Les 12 élèves* de CLIS 1 de l’école Cassin de Chaumont les utilisent pour lire sur différents supports, recher-cher des informations sur le net, ré-soudre ensemble leurs difficultés. En alternant ordinateur, tablette, dic-tionnaire, les élèves mobilisent leurs compétences et entrent dans les ap-prentissages. La journée commence par les rituels effectués à tour de rôle. Chacun doit écrire, au tableau ou sur son ardoise, la date, la météo et comment il se sent. Les plus grands ajoutent la saison, la date en chiffres et la fête du jour. Par 2 ou 3, les élèves se préparent à twitter la trace de l’apprentissage de la veille. Une mise en commun des tâches in-dividuelles et collectives se poursuit avec un questionnement réalisé en autonomie pour corriger, compléter... Twitter sert à communiquer sur le vécu à plusieurs, avec entraide, cor-respondre avec une autre classe et quelques parents. Il faut réfléchir avant de se lancer, coopérer, s’entrai-der, c’est difficile car les emplois du temps ne sont pas les mêmes du fait des inclusions dans les autres classes et des différentes prises en charge, par exemple au CMPP (Centre Médi-co-Psycho-Pédagogique).

Avant de s’engager dans l’écrit, les élèves échangent, confrontent leurs idées. Les tweets sont publiés après validation par la classe. L’en-traide s’organise soit spontanément, soit définie par la maîtresse. La coopération se développe autour du numérique : « Etre au TNI, ce n’est pas être seul face au tableau, les autres peuvent apporter leur aide, explique Stéphane Massenet. Les élèves ont appris à manipuler les tablettes par binômes. A la rentrée prochaine, ils seront tuteurs des nou-veaux ».

Même si dans cette classe, où les élèves rencontrent des troubles des fonctions cognitives, tout n’est pas

numérisé (il reste des affichages, des cahiers, des classeurs …), les nouvelles technologies multiplient les possibilités et chemins d’appren-tissage. « En 2014-2015, informe Stéphane Massenet, enseignante dans cette CLIS 1 depuis 6 ans, Del-phine Drouin-Pettelat, Conseillère Pédagogique et moi-même avons travaillé avec Jack Sagot, concepteur du logiciel PICTOP, pour une expéri-mentation en classe ».

Développé d’une part pour l’ac-compagnement scolaire des enfants en difficulté d’apprentissage de la lecture et de l’écriture et d’autre part pour la scolarisation d’enfants très sévèrement handicapés sur le plan moteur, ce logiciel permet d’écrire par des sélections d’étiquettes de lettres, de syllabes, de mots ou de phrases. Tout ce qui est manipulé par l’enfant peut être vocalisé et vient s’écrire dans l’éditeur à la place du curseur. On peut écrire en additionnant une à une les sélec-tions mais on peut aussi faire des exercices à trous. Le curseur saute alors d’un trou à un autre et l’élève peut alors constituer son texte après lecture et réflexion. « L’enfant choi-sit de lire seul, ou d’écouter la syl-labe, le mot, la phrase qui lui permet de se corriger, poursuit l’enseignante. Grâce au traceur, Pictop donne l’his-torique des étapes du travail de l’enfant, ce qui me permet de voir où se situent ses difficultés et de modu-ler ainsi les exercices puisque ce lo-giciel permet d’en élaborer de nou-veaux ».

Petit scoop, un nouveau PICTOP 3, offrant plus de fonctionnalités, sera bientôt disponible !

Béatrice Musielak* En début d’année, l’évaluation individuelle détaillée

vise à définir chaque projet pédagogique en lien avec le PPS (Projet Personnalisé de Scolarisation) déter-miné par la MDPH : Maison Départementale des Per-sonnes Handicapées.

Bibliographie :Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, ouvrage collectif sous la direction de Bruno Egron, SCEREN, 2011.

Médiation informatique et stratégie d’apprentissage de la lecture, Hélène Terrat, Jack Sagot, formation ASH Chaumont 2013.

Site INS-HEA : http://www.inshea.fr

logiciel PICTOP :Présentation :http://www.inshea.fr/content/pictop-2

Achat d'une licence :http://laboutique.inshea.fr/pictop-2,fr,4,Lo2.cfm

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Catherine Lenoble, auteure et médiatrice cultures numériques, se qualifie elle-même « d’auteure de fictions tout terrain ». Elle explore l’écriture dans un environnement numérique, à l’épreuve du réseau, du temps réel, de l’évaporation de la notion d’auteur. Son premier roman PetitBain, publié aux éditions « À la criée » en 2010 et déployé en ligne sur petitbain.net est une méta-narra-tion développée sous de multiples formes (livre, site web, lecture-perfor-mance, installation sonore, sérigra-phie). Par ailleurs, elle coordonne des méta-projets qui s’interrogent sur eux-mêmes, qui font des petits. En souterrain, elle fouille de nouveaux territoires : médiation du livre numé-rique, fabrication numérique et jeux de société, éducation et culture libre.

Elle anime des ateliers visant à initier à la pratique de l’écriture numérique :� augmentée par et avec d’autres médias� dans un environnement collabora-tif (faire ensemble)� en revenant sur la pratique, en se posant les questions de l’accessibi-lité, de la réutilisation en classe avec des élèves.

C’est le cas ce mardi après-midi.

En premier préalable, Catherine Lenoble présente Lia Perjovschi, artiste roumaine qui, après avoir com-mencé sa carrière par des dessins et performances, s’est progressivement concentrée dans les années 90 sur des projets plus conceptuels : Timelines, Mind maps,Knowledge museum…

Voilà pour l’inspiration. Il faut maintenant se familiariser avec l’outil de publication : Hotglue (logiciel libre) qui fonctionne sur l’idée du collage en temps réel, accepte la connexion multiple (ordinateurs - tablettes - portables) et simultanée à la page Web en cours de fabrication...

Reste maintenant à faire pour apprendre et comprendre. Il va s’agir de :� Créer ensemble une frise chronolo-gique subjective autour de l’idée des [r]évolutions numériques� Proposer (individuellement ou en binôme) un fait marquant dans l’his-toire de l’éducation, de l’art, de l’in-formatique / des technologies. Il faudra alors chercher à propos du fait

choisi : un texte en quelques lignes résumant l’information, un media (image, vidéo, audio) de préférence libre de droit, un lien hypertexte� Créer ces éléments sur « Hotglue » et les placer sur la ligne du temps commune.

A la fin, le bilan montre que se livrer à une écriture numérique col-laborative n’est pas simple car, outre le fait que l’appropriation de l’outil n’est pas si évidente, le résultat est plus que brouillon, chacun pouvant modifier (voire supprimer !) le tra-vail des autres.

Pour prévenir ces difficultés, il faut donc : � dégager les règles du faire

ensemble (ne pas toucher au travail des autres, se répartir l’espace de la page Web, organiser la page Web en construction).� Prévoir (papier ou tableau) une

visualisation préalable simplifiée du résultat à obtenir, discutée en com-mun et servant de référence à cha-cun.� Mettre en place un « échange

de connaissances » sur les fonction-nalités du logiciel découvertes par tâtonnement, de façon à mutualiser et en garder une mémoire collective sous la forme d’un « Guide Hotglue ».� Reprendre alors le travail sur la

page Web pour l’aménager en tenant compte de ce qui a été décidé ensemble.

Jean-Louis Sauzade

1. http://monoskop.org/Lia_Perjovschi

2. https://hotglue.me/start Exemple : http://litteraturing.hotglue.me

Le document qui mélange tous les médias (vidéo, audio, image, texte,

liens) est devenu courant sur le net. Les outils numériques boule-versent l’écriture et l’édition, donnent lieu à de nouvelles inten-tions, formes et collaborations, dans le champ de la production et de l’activisme culturel, de l’édi-tion et de la création numérique. Ce sont ces bouleversements qu’explore Catherine Lenoble, auteure et médiatrice cultures numériques.

A l’épreuve de l’écriture numérique collaborative

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Vers une école post-numérique

La conversion numérique de l’école introduit des artefacts et des modalités de travail

facilitateurs de la coopération et de la production des savoirs. Comment exploiter ce potentiel et s’y former lorsque ces vec-teurs seront un ordinaire de classe dans une école post-nu-mérique ? Voici la probléma-tique abordée par Ange An-sour(1) à l’Université d’été de l’Office Central de la Coopéra-tion à l’Ecole(2).

Provocatrice, Ange Ansour, direc-t r i c e p é da go g i q u e du p r o -gramme « Les Savanturiers » au sein du Centre de Recherches Interdisci-plinaires (CRI), l’est certainement un peu puisqu’elle appelle enseignants et élèves à devenir des « bracon-niers » du savoir. Jamais passif,

l’enseignant braconnier, explique-t-elle, crée, cherche, expérimente, in-vente, emprunte des chemins de traverse… Le braconnage est, selon Ange Ansour, une façon séduisante de considérer l’outil numérique et le cheminement vers une école post-nu-mérique impose cette posture.

Le contexte dans lequel s’est dé-veloppée l’école numérique permet de comprendre pourquoi certains enseignants ont dû emprunter des chemins de traverse et continuent aujourd’hui à le faire. Le dépouille-ment des archives du Conseil Natio-nal des programmes (1990-2003) montre les indécisions et les voies empruntées pour le numérique, tant bien que mal, par l’éducation en France. Dès les années 60, des expé-rimentations sauvages et limitées dans le temps ont lieu dans des ly-cées, puis dans les collèges et écoles,

Le site des Savanturiers : http://les-savanturiers.cri-paris.org

Ange Ansour, d’un premier métier traductrice, elle devient professeur des écoles, puis directrice pédagogique du programme « Les Savanturiers » au sein du Centre de Recherches Interdisciplinaires (CRI).

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Un dispositif de recherche scientifique entre classes et chercheurs universitaires, exemple-type d’une démarche dans l’école post-numérique.

« Les Savanturiers » est un programme éducatif créé par le CRI (Centre de Recherches Interdisciplinaires - Université Paris Descartes - Paris) qui travaille à la mise en œuvre de l’éducation par la recherche de la maternelle à l’école. Fondé en 2005 par son actuel directeur, François Taddei, le CRI mène ses actions (recherche, formation, projets inno-vants) au croisement des sciences de la vie et des sciences sociales. Son rôle principal est la promotion de techniques et stratégies éduca-tives innovantes, de telle sorte que les étudiants soient à l’initiative de leurs propres projets et les développent.

Dirigé par Ange Ansour, le programme « Les Savanturiers », proposé pour les classes, implique que les élèves endossent une posture de chercheur, posent des questions, définissent une problématique, for-mulent des hypothèses, créent leurs protocoles expérimentaux, réa-lisent des expériences et un projet final.

Les caractéristiques principales d’un projet « Les Savanturiers » sont :

� la pluridisciplinarité

� le partenariat avec un chercheur

� l’ambition et la rigueur dans les apprentissages

� une méthodologie issue de la recherche (hypothèses, vérification, déduction).

Les Saventuriers interviennent ainsi sur le temps scolaire directement dans les classes, mais également sur le périscolaire dans le cadre de l’aménagement des rythmes éducatifs de la ville de Paris.

En parallèle, les Savanturiers organisent également :

� des séminaires de recherche.

� Des formations des enseignants.

� Des ateliers de réflexion professionnelle avec la Cellule Recherche et Développement en Innovation et Expérimentation du Ministère de l’Education Nationale (CARDIE = fonction de veille et de conseil pédagogique auprès des équipes d’école et d’établissements).

� Des congrès de chercheurs pour la valorisation des travaux des élèves.

Cette démarche et les projets menés par « Les Savanturiers » ne sont pas sans rappeler ceux de « La main à la pâte » créé à l’initiative de Georges Charpak en 1996, mais également du tâtonnement expérimen-tal cher à Célestin Freinet !

Jean-Louis Sauzade

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la discipline des mathématiques en étant le support privilégié. Au lende-main du séminaire de l’OCDE au CIEP de Sèvres, en mars 1970, l’institution a commencé a marquer son intérêt. Une succession de rapports et d’expérimentations s’ensuivront, en passant par le Plan Informatique pour Tous ! Toutefois, rapidement, la « salle informatique » devient « géographiquement et idéologique-ment » isolée et génère des usages captifs qui n’influent en rien les pratiques pédagogiques.

Le vocabulaire est également si-gnificatif de ce développement aléa-toire. Le terme « Numérique » est employé en France comme substan-tif. Partout ailleurs dans le Monde, le mot « numérique » est un adjec-tif : éducation numérique, langage numérique, etc. Le substantif, pour Ange Ansour, empêche de penser. Or, l’environnement numérique est tellement envahissant que nous pouvons dire que nous évoluons

aujourd’hui dans un monde numé-rique. C’est un fait, nous y sommes immergés que nous le voulions ou pas. Et nous pouvons alors penser à un monde post-numérique. La preuve, c’est que nous précisons nous servir d’un appareil photo ar-gentique lorsque c’est le cas. Mais nous nous servons d’un appareil photo, intégré ou non dans le télé-phone portable, sans préciser qu’il est numérique.

D’aucuns affirment que le « numé-rique » transforme les gestes profes-sionnels des enseignants, et en cascade les pratiques des élèves en facilitant le travail collaboratif comme individuel en augmentant la disponibilité de l’adulte, l’itération et l’entraînement. Cela se pratique déjà dans les pédagogies coopéra-tives. L’usage du numérique n’est pas révolutionnaire, mais il permet des évolutions : la correspondance entre classes, les échanges entre pairs, les échanges adultes-élèves, la résolu-tion des tâches complexes, tout est démultiplié. Le temps et l’espace deviennent des facteurs pédago-giques. C’est bien cet ensemble de conséquences des outils numériques qui permettent les dispositifs de recherche scientifique entre classes et chercheurs universitaires à l’image du programme « Les savanturiers » (voir encadré).

Il devient urgent de se poser la question de l’importance de la pra-tique numérique dans les apprentis-sages. Les outils numériques ont envahi la vie sociale, c’est un ordi-naire social, pourtant ils restent aujourd’hui du ressort de l’extraordi-naire scolaire. Comment l’enseignant et les élèves peuvent-ils « bracon-ner » la culture numérique sociale ordinaire afin de l’inscrire dans une culture scolaire pertinente ?

Les supports numériques, quelle que soit leur nature, devraient faire partie de la panoplie pédagogique déployée par l’enseignant au même titre que des interactions entre pairs, des conflits sociocognitifs ou de l’empathie nécessaire.

Synthèse Camille Biache

1. Ange Ansour, d’un premier métier traductrice, elle devient professeur des écoles, puis directrice pédago-gique du programme « Les savanturiers » au sein du Centre de Recherches Interdisciplinaires (CRI).

2. « Coopérer 2.0 : (R)évolution numérique et pédago-gique », thématique de l’Université d’été de l’OCCE qui s’est déroulée à Chaumont, du 07 au 09 juillet 2015 : http://www.occe.coop/universite-ete

1. https://savanturiersdesglaces.wordpress.com/ecole-saint-exupery ;

du climat

« Les outils numériques ont envahi la vie sociale, c’est un ordinaire social, pourtant ils restent aujourd’hui du ressort de l’extraordinaire scolaire. »

51Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Pour l’année scolaire 2014-2015, Amélie Vacher (Classe de CE1-CE2 de la région bor-delaise) a travaillé avec ses élèves sur le cli-mat. Le projet s’est fait en collaboration étroite avec la chercheuse Céline Clément-Chastel, spécialiste en animaux polaires et guide aux pôles. Celle-ci est venue dans leur école fin janvier, juste avant de partir pour un voyage en Antarctique.

Ce projet leur a permis :

� de construire des connaissances grâce à une méthodologie plus experte (démarche scientifique) ;

� de travailler en géographie, mathématiques, lecture ;

� de créer et alimenter un blog(1)

� de communiquer avec les parents sur le projet au fur et à mesure de son évolution ;

� de permettre une véritable émulation ;

� d’aller à Paris au congrès des élèves chercheurs, avec prise de parole des élèves, présentation d’un diaporama, explication du projet ;

� de faire grandir chez chaque élève le goût pour la science ;

� d’éveiller les curiosités ;

� de progresser dans les matières scolaires, dans l’autonomie, dans la coopération, dans la maîtrise numérique.

Jean-Louis Sauzade

Page 52: Coopérer 2.0

C’est quoi cette capsule ?

« Le précieux temps de classe serait mieux utilisé si on s’en servait pour interagir et travailler ensemble plutôt que de laisser une seule per-sonne parler ». C’est ce postulat qui sert de préambule au site « classein-versee.com ». Mais c’est aussi un postulat que n’auraient pas renié Célestin Freinet, Fernand Oury ou Barthélémy Profit. Pourtant, ici, pas de conseils coopératifs, mais des pratiques pédagogiques s’appuyant sur un cheminement de la pensée initiée par la consultation de res-sources vidéos, un processus d’ap-prentissage collaboratif à partir d’une ressource explicite partagée.

Travail

« C’est à la suite d’une conférence présentée par Marcel Lebrun*, et dans le cadre d’une réflexion sur les parcours individuels des élèves que nous avons entamé ce travail il y a quatre ans avec l’équipe de circons-cription. Il était primordial pour nous que toutes les étapes se dé-roulent à l’école », explique Sandrine Menut, enseignante en CM1/CM2 et directrice d’une école rurale de 6 classes dans la Marne, « nous ne souhaitions pas que les familles se retrouvent dans l’obligation de réa-liser un travail à la maison. » De son côté, Armelle Thivet qui travaille

ainsi depuis un an pour les appren-tissages en conjugaison avec sa classe de CM2 à Chaumont précise : « Nous nous sommes inspirées d’une pratique qui s’expérimente dans cer-tains collèges pour l’adapter à l’école primaire française. »

Classe inversée ou pédagogie inversée ? L’option « tout en classe »

Dans la pédagogie inversée, c’est en classe que la « capsule vidéo » est visionnée et utilisée par les en-fants (en classe inversée, les res-sources vidéos sont consultées à la maison pour faire ensuite l’objet de travaux en classe).

Une nouvelle approche pédagogique

Sandrine poursuit ses explica-tions : « Il y a quatre ans, mes premières tentatives reposaient sur l’utilisation de capsules vidéos déjà faites par d’autres enseignants ou structures (Canopé en propose de nombreuses, disponibles en ligne*), mais les enfants se sont montrés peu réceptifs à ces capsules jugées trop

impersonnelles ou trop encombrées par les éléments ludiques ». Pour gagner en lisibilité, l’enseignante s’est résolue à créer ses propres capsules vidéos pour amorcer une réflexion efficace dans des petits groupes, puis au sein de la classe. D’abord de simples power-point so-norisés, puis des vidéos plus élabo-rées. Elle a débuté avec la gram-maire et la conjugaison, puis d’année en année se sont ajoutés les maths et l’anglais. « Peu à peu, cette or-ganisation m’a amenée à mettre en place des plans de travail individua-lisés, ainsi chacun maîtrise sa façon de travailler à certains moments et je dispose d’un temps d’entretien individuel avec chacun de mes élèves ». Dans sa classe de CM2, Armelle observe qu’en un an ce fonc-tionnement a développé l’autono-mie, la différenciation des suivis et le tutorat entre élèves. C’est aussi un moyen efficace d’approfondir de façon quotidienne le décodage et la lecture de vidéos.

Un parcours d’apprentissage

Pour organiser ce type de travail, Sandrine partage sa classe en cinq groupes (deux en CM1, trois en CM2) afin de permettre la consultation de la capsule et tous les échanges et régulations qui suivent (cf. docu-ment).

U n dispositif qui recentre l’activité de la classe sur les interactions et

les quest ionnements : la « pédagogie inversée ».

un exemple d’emploi du temps permettant aux CM1 de travailler sur la capsule vidéo

52 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Page 53: Coopérer 2.0

Le protocole s’organise sur deux jours :

Les élèves d’un groupe prennent connaissance de la capsule vi-

déo (individuellement, à partir d’un ordinateur ou d’une tablette équipés d’écouteurs). Cette capsule ne dé-passe pas 3 minutes, les 10 der-nières secondes étant cruciales. Elle fournit les éléments essentiels pour réfléchir à une notion et permet de s’accorder sur un vocabulaire com-mun lors des échanges. L’association texte-images-parole donne à chacun la possibilité de comprendre à sa façon. Un très court exercice indivi-duel d’autoévaluation est réalisé immédiatement après.

Phase d’interaction et de struc-turation en petits groupes de 5

ou 6. Ils échangent sans que l’ensei-gnant intervienne sauf éventuelle-ment pour aider à structurer la prise de parole. Les enfants confrontent leurs compréhensions. Chaque petit groupe élabore une carte mentale (ou topogramme) représentant leurs réflexions (cette pratique choisie par l’équipe a réussi au point de débor-der le cadre des séances consacrées aux capsules vidéos). Ceux qui le souhaitent peuvent alors revenir sur leur exercice.

Le lendemain : phase d’interac-tion et de structuration en

grand groupe à l’aide du TNI : l’en-seignant restant le plus en retrait possible, les différents topogrammes sont confrontés et les échanges ar-gumentés amènent à l’élaboration d’un topogramme final qui sera dé-posé sur l’espace numérique de tra-vail afin que chaque élève puisse le consulter.

Réalisation d’un projet réalisé en petit groupe qui témoignera

de leur degré d’acquisition de la compétence travaillée. « Notre groupe d’enseignants a mis un an à engager cette phase de réalisation de ce que nous appelons chef d’œuvre » remarque Sandrine. « Ces projets peuvent concerner la créa-tion d’autres topogrammes, la pro-duction d’écrits à plusieurs mains sous forme de défis réalisés par notre twitt-classe ou de problèmes de géométrie, la réalisation de cap-sules vidéos en anglais, etc. »

Ces capsules sont-elles une panacée ?

Trois facteurs concourent sans doute à l’émergence de cette nou-velle façon de contractualiser sa classe : la proposition initiale vient

des États-Unis, les capsules vidéos circulent sur le net qui focalise de plus en plus et souvent exclusive-ment les recherches de « recettes pédagogiques », l’institution sco-laire est encline à soutenir un prin-cipe pédagogique qui permet une contractualisation de la classe sans donner de pouvoir aux élèves, sans risque de dérive autogestionnaire.

Tout ceci n’enlève rien à l’intérêt pédagogique de la proposition, mais il serait dommage que sa mise en place élude la pertinence de toutes les autres explorations de façons d’enseigner et transmettre. A chacun de rester vigilant sur les raisons qui conduisent ses pratiques pédago-giques et sur leurs implications.

Les deux enseignantes le confir-ment : « Seules les nouvelles notions méritent d’engager ce travail à partir de capsules vidéos. Cela n’occupe qu’une partie du temps de classe, nécessite une profonde réflexion en amont, et demande une grande ri-gueur dans la gestion de l’emploi du temps sur la semaine et sur la pé-riode ». Elles constatent que lors des phases d’interactions, ce sont les enfants qui rencontrent des difficul-tés scolaires qui vont participer le plus volontiers. « Ce sont vraiment des situations où tout le monde apprend de tout le monde », conclue Sandrine.

Explications recueillies par Gilles Petitjean

* Conférence de Marcel Lebrun, professeur à la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation de l’UCL de Louvain, le mercredi 3 Octobre 2012 lors du Forum@tice.

Document support de la conférence :

http://fr.slideshare.net/mobile/lebrun/forumtice-2012-reims

Le blog de Marcel Lebrun :

http://lebrunremy.be/WordPress/

Site Canopé de Reims :

http://www.cndp.fr/crdp-reims/index.php?id=1881

La trace écrite obtenue après la première phase d’interaction et de structuration

53Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Page 54: Coopérer 2.0

Web Radio, Web TV… pourquoi ? Comment ?

Q u’est-ce qu’une web radio, qu’une web tv ? L’école peut-elle s’emparer de ces technologies, en faire des outils pédago-giques ? Et ces outils peuvent-ils être collaboratifs, participa-

tifs, coopératifs, émancipateurs, vecteurs d’autonomie et de citoyenneté ? Pour Thierry Adnot(1), la réponse est positive, sans aucun doute.

Il est loin le temps où les radios « libres » fleurissaient sur tout le territoire, avec les batailles pour les attributions de fréquences, les pe-tits studios bricolés... Aujourd’hui, les outils numériques et informa-tiques permettent à chacun, devant son ordinateur muni d’un micro et d’une webcam, de réaliser une « Web Radio », ou une «Web TV». Toutefois, comme l’explique Thierry Adnot(1) : « les enseignants qui désirent se lancer dans ce genre de projet ont tout intérêt à « jouer » avec les lo-giciels pour en maîtriser le fonction-nement souvent intuitif, mais tou-jours complexe et à maîtriser un certain nombre de notions journalis-tiques, de démarches organisation-nelles, etc. »

Le vocabulaire d’abord. Il ne faut pas confondre le média : dispositif technique / technologique / infor-matique qui permet la transmission d’une information et la production médiatique : mise en forme d’un ensemble de données en vue de leur publication sur un média.

Ensuite, avant de mettre la ma-chine en route avec les élèves, il faut tout d’abord se poser la ques-tion du « Quoi dire ? » : quel sera le thème de la production ? quel(s)

angle(s) d’attaque choisir ? Vient alors le choix du « Comment dire ? », ce qui sera de l’ordre de l’oral, du visuel, de l’écrit... Puis, apparaît alors le « Qui fait quoi ? » et la répartition des rôles de chacun.

Des expériences concrètes, une organisation fonctionnelle

Après plusieurs expérimentations sur le terrain (d’abord en lycée, puis aussi en primaire, les « grands » du lycée servant de tuteurs-facilita-teurs), Thierry Adnot constate que l’organisation qui a fonctionné plu-

sieurs fois avec succès repose dans un premier temps sur la mise en place de deux équipes :

� la première est équipée d’enre-gistreurs numériques, smartphones, micros et casques, et va faire des « micros-trottoirs », en plusieurs binômes ;

� la seconde organise dans la classe un mini studio avec Webcam montée sur pied, reliée à un ordina-teur portable, pour enregistrer un débat entre plusieurs interlocuteurs, concernés par le sujet et si possible d’opinions radicalement opposées (on peut monter cela sous la forme d’un jeu de rôle, les élèves endos-sant la peau des intervenants). Un animateur -une animatrice - sera chargé(e) de relancer, modérer, mo-duler leur débat. Pour la technique, deux cameramen, un preneur de son et deux régisseurs (à l’ordinateur) se mettent en place.

Les deux équipes ont devant elles une quarantaine de minutes pour réaliser leurs interviews.

Le montage est réalisé ultérieure-ment en reprenant deux équipes, l’une chargée du montage son (logi-

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Quelles compétences ?Les apprentissages développés et les compétences mobilisées concernent :

� Le travail en équipe (coopération)

� La maîtrise de la langue écrite et orale

� La lecture de l’image

� L’écriture médiatique (les 5W + H / les points de vue / éthique et droits /)

� La maîtrise d’outils techniques / technolo-giques (image, son)

� La maîtrise d’outils informatiques (mon-tages image, son, publication web).

La création du média dans l’établissement amène à développer encore bien d’autres choses :

Le Web Radio / Télé intègre des contenus différents : débats, reportages, articles, news-games, etc.

Le Web Radio / Télé engendre un agenda particulier qui intègre un programme, des rendez-vous, des nouveautés.

Le Web Radio / Télé est un espace de collabo-ration, de coopération et d’échanges à l’inté-rieur de l’établissement.

Le Web Radio / Télé s’organise aussi hors les murs, autour des auditeurs - téléspectateurs : pour qui produit-on, pourquoi ? Comment gérer le calendrier des émissions (amont, aval), quel circuit(s) de la communication ?

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ciel libre Audacity), l’autre au mon-tage vidéo (logiciel gratuit Windows Movie Maker). Chacune de ces équipes peut être partagée en bi-nômes chargés de parties des infor-mations collectées. La répartition des tâches se fait par discussion entre les élèves, et choix en fonction des compétences de chacun, des moyens techniques, des ordinateurs disponibles (compter un pour deux élèves).

C’est le logiciel OBS (libre) qui permettra au final la publication de la production (en primaire, ce sera le travail final de l’enseignant).

La richesse des possibles, des échanges, des domaines abordés, le bas coût technique, la simplicité (relative) des outils, l’éducation à l’image, l’éducation à la citoyenneté, les compétences mises en œuvre, l’estime de soi, le travail en équipe interdisciplinaire... La liste est longue des très bonnes raisons de se lancer dans ce projet de classe, d’école, d’établissement !

Jean-Louis Sauzade1. Professeur documentaliste, correspondant web radio et

web TV de l’académie de Reims. Pour voir son travail : http://artsvisuelsjoinville.blogspot.fr/search/label/projet

55Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Quel équipement ?

La liste du matériel, le choix des logiciels, la mise en place des équipes, la répartition des tâches ont été pensés et expérimentés par les 45 élèves de 1ère ES et STI2D du Lycée Lebon de Joinville (Haute-Marne). Ils sont encadrés par Thierry Adnot, professeur documenta-liste et chargé de mission Web Radio pour l’Académie de Reims. Thierry Adnot est à la fois persuadé de la pertinence pédagogique de ces projets, de leur faisabilité à coût modique, et de leur capacité à produire du « faire ensemble ».

Matériel utilisé :

Ordinateur portable muni d’une webcam et d’un micro.

Logiciel libre OBS

Petite caméra avec pied / Smartphone

Enregistreur audio

Casques / écouteurs.

Logiciels utilisés :

Son : Audacity http://audacity.fr

(libre - Windows - Mac OS - GNU Linux)

Vidéo : Window Movie Maker

http://windows.microsoft.com/fr-fr/windows-live/movie-maker (gratuit seulement pour Windows)

WEB : OBS multiplatform https://obsproject.com (libre - Windows - Mac OS - GNU Linux)

� Le Centre de Liaison de l’Enseignement et des Médias d’Information (CLEMI) est chargé de l’édu-cation aux médias dans l’ensemble du système éducatif français depuis 1983. Il a pour mission d’apprendre aux élèves une pratique citoyenne des médias. Le CLEMI accompagne les élèves qui créent des médias scolaires. Plus : http://www.clemi.org/fr

� Le Groupe de Recherche sur la Culture et la Didactique de l’Information (GRCDI) est un groupe de recherche interrégional (Bretagne, Pays de la Loire, Normandie), réunissant une douzaine de personnes de ces régions, engagées dans diffé-rents travaux et démarches de recherche autour de la culture informationnelle, de la didactique de l’information et de la formation des élèves et des étudiants à la maîtrise de l’information : http://culturedel.info/grcdi/

� La Fédération des Enseignants Documentalistes de l’Education Nationale (FADBEN) a été créée en 1972, et regroupe des professeurs documenta-listes de collèges, de lycées et de l’enseignement supérieur. C’est une instance de réflexion sur la pratique et l’évolution de cette profession : http://www.fadben.asso.fr/

� Référentiels des compétences :

http://www.cndp.fr/savoirscdi/cdi-outil-pedagogique/apprentissage-et-construction-des-savoirs/leducation-aux-media

� Repères pour la mise en œuvre du Pacifi (Parcours de formation à la culture de l’information) - (Ministère de l’Ed. Nat.) :

http://eduscol.education.fr/numerique/actualites/veille-education-numerique/archives/2010/parcours-formation-culture-information

Pour aller plus loin

Page 56: Coopérer 2.0

56 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Depuis 2010, mis à disposition de chacun dans le cadre du pro-gramme Sankoré d’éducation pour tous en Afr ique, le logic ie l Open-Sankoré est utilisable dans les environnements les plus variés et avec des équipements informa-tiques peu puissants. Il est si « lé-ger » qu’il est facilement téléchar-geable sur une clé USB et utilisable depuis cette clé USB, ce qui en fait un logiciel nomade facilement par-tageable, même quand aucune

connexion n’est possible. Créé pour et avec des enseignants, il est dédié à l’enseignement interactif, fonc-tionne sur tout ordinateur ou ta-blette et est compatible avec tous les systèmes d’exploitation.

Ce logiciel est téléchargeable sur le site opensankore.org qui fournit des dizaines de tutoriels permettant au plus néophyte de comprendre le fonctionnement de l’ensemble de ses applications.

Il a tout d’un grand !

Open-Sankoré permet de créer un scénario pédagogique, met à dispo-sition des outils perfectionnés de tracé et d’écriture et l’organisation de calques. Les captures d’écran sont faciles et l’ensemble des actions est mémorisé en permanence.

En revanche, Open-Sankoré ne permet pas de partager l’écran ni de réaliser de reconnaissance de texte à partir d’une calligraphie, et si vous l’utilisez sur un projecteur vidéo classique, vous perdez la possibilité d’agir sur le tableau.

La communauté « Planète Sankoré »

Contribuez à la production de res-sources numériques libres et gra-tuites. Cette communauté permet d’échanger, de partager des cours avec d’autres enseignants, de disposer d’applications complémentaires facili-tant les interactions collaboratives.

Gilles Petitjean* Hommage à l’Université de Tombouctou (13ème/17ème

siècle)

Vive le TNI libre avec

Open Sankoré*

V ous disposez d’un banal projecteur vidéo mais aimeriez que son utilisation soit plus coopérative ? Un vieux TNI prend la poussière parce que le logiciel d’exploitation « plante » et que la licence n’a

pas été renouvelée ? En quelques minutes, un logiciel libre peut changer votre environnement de classe.

Page 57: Coopérer 2.0

Vous avez dit « Logiciels libres ? »

J usqu’où s’étend le monde du libre, de l’open source ? Ces deux façons de dire sont-

elles synonymes ? Essayons de comprendre…

Le « logiciel libre » fait référence à la liberté des développeurs, des utilisateurs éclairés, d’utiliser, de copier, de distribuer, d’étudier, de transformer et d’améliorer un tel logiciel. L’utilisateur ordinaire se contente d’utiliser le logiciel, pose éventuellement ses questions sur les forums dédiés.

L’expression « open-source » fait référence à la liberté d’étudier le code source du logiciel. Si celui-ci est dit « propriétaire », c’est qu’il est limité par une licence d’utilisa-tion. Qu’il soit libre ou propriétaire, il peut être gratuit ou « payant » mais un logiciel payant et open-source donne accès au code source et n’empêche pas sa modification.

Logiciels libres ou logiciels pro-priétaires, c’est encore flou ? Com-parons avec la cuisine : pour prépa-rer un plat, on dispose d’une recette et d’ingrédients, on cuisine et ob-tient le plat.

Au restaurant, on n’accède qu’au résultat final, le plat, le reste est « secret ». La philosophie du libre, c’est la cuisine comme à la maison, les sources (recettes, ingrédients, plat) sont disponibles.

En bref, ces logiciels proposent des libertés :

• utilisation du programme, du logiciel ;

• accès au code source, son étude, sa modification, son adaptation ;

• distribution de ses produits ;

• amélioration du programme, dis-tribution de ses modifications en vue d’un partage avec la commu-nauté du libre.

Tout utilisateur de logiciel libre fait partie de la communauté du libre. Autant dire que nous apparte-nons à cette communauté sans par-fois le savoir. Nous sommes tous, peu ou prou, libres.

Il convient toutefois d’être atten-tif : un logiciel libre n’est pas forcé-ment libre de droits, il y a les gra-tuiciels (freewares), les partagiciels (sharewares) et parfois même des raketticiels !

L’administration en France, les universités utilisent maintenant ces logiciels, dont l’utilisation dans l’ad-ministration française est recom-mandée par la circulaire Ayrault.

Les intérêts pour l’enseigne-ment sont nombreux : pas d’achat de licences contraignantes et restric-tives. Donc pas de « copie non au-torisée », des formats ouverts, pé-rennes et la possibilité de partager avec les élèves les logiciels légale-ment. De plus, ces logiciels sont sains, et gratuits. Nous en trouvons pour toutes les disciplines scolaires et tous les niveaux.

Camille Biache

57Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

Ces quelques exemples pour indiquer que, quel que soit le niveau d’enseignement, les logiciels libres sont présents dans tous les champs disciplinaires, et plus encore ! Ne vous privez pas de l’exploration et de l’utilisation de ces logiciels collaboratifs qui participent d’une volonté de démocratisation des outils numériques.

framasoft (http://framasoft.net/) qui propose un annuaire des principaux logiciels, mais sur-tout une framakey, qui décline une clef « généraliste », une clef « dyslexie », etc. Ainsi que des clefs dites portables, c’est-à-dire avec des applis portables, intégrées dans la clef. Plus besoin de quémander auprès du responsable TICE l’installation du logiciel. Il suffit au jeune ou à l’enseignant de brancher la clef sur n’importe quel ordi, le logiciel s’ouvre dans la clef, le travail se fait et s’enregistre dans la clef. Étonnant, non ? Et pratique.

cLibre (http://www.clibre.eu/) nous propose les principales ressources du Libre pour les non-informaticiens nombreux que nous sommes, logiciels, équivalences payant/libre, sites libres…

Le serveur scolaire Abulédu (http://www.abuledu.org/) vous séduira ;

et, pour terminer, cette liste non exhaustive, un blog d’échange très utile

orthophonie et logiciels libres (https://orthophonielibre.wordpress.com/).

Les incontournables

Page 58: Coopérer 2.0

58 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

SCRATCH, un programme qui accroche !

J usqu’où installer le numérique en classe ? Ne pas obéir à un phé-nomène de mode, mais choisir dans les pratiques numériques celles qui permettent d’apprendre, ou plutôt de multiplier les chemins qui

mènent aux apprentissages. Qu’apporte Scratch ?Scratch, qu’est-ce donc que cette

chose au nom barbare ? Son objet est la découverte de la programma-tion sans connaissance préalable de langage informatique, puisque, comme l’expliquent ses créateurs, « scratch est un langage de program-mation qui permet de créer facile-ment ses propres histoires interac-tives, jeux vidéos, animations, créations musicales et artistiques, etc. ». Spécialement conçu pour les enfants de 8 à 16 ans, son ergonomie est simple et un survol des différents blocs et espaces le prouve :

http://scratch.mit.edu/about/

Comment s’utilise-t-il ? L’envie de coder vient avec la nécessité, à l’oc-casion d’un projet de création/amélioration d’un blog ou d’une histoire animée, d’une petite vi-déo… Un exemple tout simple. Au départ, l’enseignant donne une consigne : commencez par demander au lutin (petit personnage du pro-gramme) de tracer un carré.

Si la construction du carré ne pose aucun problème de conceptua-lisation, son animation, améliora-tion obligent les élèves, par groupe de deux, à une gymnastique entre les différents scripts pour trouver les bons outils. Les voilà en recherche

et création ! Ils explorent les cos-tumes, les sons. Un « Miaou » intem-pestif donne envie aux autres d’uti-liser les sons, d’en créer aussi. Le carré réalisé, agrémenté de couleur et de miaulements, les élèves vont vouloir aller plus loin, tracer un cercle ou autre figure… La consigne de départ est réalisée, agrandie, transformée sans que l’enseignant intervienne. Celui-ci circule entre les groupes, observe, répond aux ques-tions. Il laisse les enfants explorer librement selon le projet qu’ils se sont donné. Réflexion, essais, er-reurs, pris au jeu.

Lorsque l’enseignant voit que tous ont bien compris et utilisé certains scripts, il propose de nouvelles consignes qui vont obliger les élèves à rajouter des outils à leurs créa-tions en découvrant les autres aires d’outils : les capteurs, les instruc-tions conditionnelles, par exemple.

Soyons concret, expliquons à quoi ressemble la programmation.

Pour que le lutin trace un carré, il suffit d’aller chercher dans les scripts les blocs nécessaires et de les empiler dans l’ordre. Ils s’accrochent à la manière d’un puzzle en vertical. Certains blocs s’insèrent dans les blocs de façon horizontale. C’est simple et rapide. La validation est immédiate, dès le clic sur le drapeau vert. Et si c’est raté, il suffit de lire la colonne d’ordres donnés à la re-cherche de l’erreur, et y remédier. La prise en main de Scratch est rapide.

Mais encore ! Est-il utile, néces-saire ou superflu d’utiliser Scratch en classe, et pourquoi ?

Nécessaire dès le cycle 3 pour travailler d’une autre façon la réso-lution de problème et la logique, à côté des tables de vérité, master-

Page 59: Coopérer 2.0

découvrir aussi des programmes de jeux, de dessins animés, des his-toires et autres animations musi-cales très élaborés. Ces programmes Scratch étant offerts sur le web en open source, ils en affichent la pro-grammation. Certains programmes sont donc utilisés, modifiés, aug-mentés, le tout en indiquant les emprunts. Une déontologie donc, basée sur une philosophie de la so-lidarité et du partage. La plupart de ces programmes affichent plusieurs auteurs, ce qui conforte l’impor-tance de la coopération dans cette pratique utilisée en classe de tech-nologie, mais que rien n’empêche d’utiliser dans les moments de vie scolaire, en atelier, en club.

Camille Biache

Liens :http://www.x2000.fr/scratchlille/realisations.htmlhttp://fesc.asso.fr/Creation-d-un-mini-jeu-avechttps://scratch.mit.edu/projects/10128368

59Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

mind et autres énigmes. L’utilisation de Scratch allie au raisonnement abstrait la réalisation concrète quasi instantanée, la validation par la réussite, ou le retour au programme pour rechercher ce qui coince. Ri-gueur, raisonnement, expérimenta-tion, organisation et gestion des données se construisent car ils sont incontournables.

Les jeunes produisent donc des algorithmes, c’est-à-dire qu’ils dé-cortiquent systématiquement la si-tuation problème en suite de procé-dures, ici de blocs. C’est une méthode qui répond à un certain nombre de questions : comment faire, comment calculer ? Pour travailler la géomé-trie également Scratch a son utilité. La reconnaissance globale du carré, par exemple, se fait depuis la mater-nelle, sa construction et ses proprié-tés réclament abstraction et adresse à manipuler compas et mesures. Ce qui peut représenter une compensa-tion à certains handicaps et a sa place en classe inclusive.

Cet outil numérique est une ré-ponse supplémentaire aux différentes intelligences et habiletés. Il n’est nullement question de transformer chaque élève en programmeur, mais bricoler des petits programmes leur fera comprendre que derrière les lo-giciels qu’ils utilisent, il y a beau-coup de travail, de la réflexion, et de la coopération. Il est aisé de le constater dans les différentes classes qui l’utilisent. Personne ne travaille seul, le binôme imposé par le maté-riel explose rapidement avec des échanges à droite et à gauche, des propositions, des encouragements. Le tout sous l’œil bienveillant de l’en-seignant, personne-ressource, aide, catalyseur. Bref, du travail en auto-nomie confiante, ce qui est l’un des buts de la pédagogie coopérative.

Autre raison pour laquelle ce lo-giciel est intéressant : il est puis-sant. Il offre des possibilités aux jeunes de réaliser des projets plus ambitieux que les seuls tracés géo-métriques. Des tutoriels, des blogs d’échanges et des possibilités d’aide sont également disponibles. Scratch permet aux jeunes d’investir le champ des sciences, un site leur est dédié. Une visite sur le site de cer-tains collèges en France, ou sur le site éducation du MIT, permet de

De nombreuses ressources sont disponibles en ligne dont ce guide de démarage téléchargeable au format PDF sur https://scratch.mit.edu/help

Page 60: Coopérer 2.0

« Faire vivre Internet responsable dans sa classe »

Ni moralisateur, ni bisou-nours, Boris Raguet, pro-fesseur des écoles et

maître-formateur, fait vivre l’Inter-net responsable dans sa pratique de classe à travers la mise en place de projets pluridisciplinaires motivants qui donnent du sens : un blogue sur un personnage imaginaire et des sites piégés. Attention, vigilance !

A partir d’une démarche active et constructive centrée sur des projets menés avec ses élèves de CM2 de l’école d’application Joliot Curie, de Charleville Mézière, Boris Raguet, professeur des écoles et maître-for-mateur, part de situations problèmes auxquelles les élèves sont confron-tés au quotidien. Cette démarche permet de travailler le domaine 2 du B2I : « Adopter une attitude respon-sable ». « Bien qu’incontournable, ce domaine reste difficile à travailler, à transférer dans les activités ou en-core à évaluer, constate Boris Ra-guet. A l’heure où internet et les réseaux sociaux envahissent les foyers et les chambres de nos élèves, l’enseignant ne peut faire l’impasse sur cet enseignement qui permet de former de futurs adultes respon-sables, éclairés et qui auront la ca-pacité d’utiliser leur esprit critique ou encore de protéger leur vie privée ». Pour appréhender ce domaine, il propose deux objectifs : « Adopter une attitude critique » et « Protéger ses données personnelles et sa vie privée ». Ces deux objectifs sont

travaillés à travers deux projets : Jean-Miichel Spetzz (blogue sur un personnage imaginaire) et Los an Tos (sites contenant de fausses in-formations) utilisant une démarche expérimentale permettant de prendre conscience des risques sur Internet. Ces projets soulignent en particulier que tout ce qui est mis sur Internet peut être vu et que tout ce qui est mis sur Internet le reste.

Le projet Jean-Miichel Spetzz (avec 2i et 2z)

C’est durant le temps des APC (atelier pédagogique complémen-taire) que ce projet est mené. Il consiste en la création d’un blog racontant la vie privée de Jean-Miichel Spetzz, un personnage ima-ginaire.

Les élèves commencent par vi-sionner l’épisode 8 de Vinz et Lou : un blog pour tout dire ?

Cet épisode est utilisé comme un déclencheur de parole et permet d’entamer un débat sur le problème décrit dans la vidéo.

Qui possède un compte Facebook ou un blog ? Peut-on tout dire sur Internet ? Le frère peut-il effacer des informations sur sa sœur quand il se rend compte de son erreur ? Autant de questions posées aux

élèves et permettant d’en extraire une situation problème, elle-même déclinable en deux questions princi-pales :

� maîtrisons-nous ce que nous met-tons sur Internet ?

� peut-on effacer simplement ce que nous ne voulons plus sur Internet ?

Hypothèses :

� nous pouvons effacer simplement ce que nous mettons sur Internet quand on le veut sans que cela ne laisse de trace.

� Nous pouvons effacer ce que nous mettons sur Internet mais des traces indélébiles subsistent.

Pour vérifier ces hypothèses, les élèves vont créer un site Internet sur le personnage imaginaire de Jean-Miichel Spetzz (avec 2i et 2z) et raconter sa vie dans les moindres détails.

Les élèves travaillent successive-ment la création de la structure du site Internet, la création des af-fiches « aides » pour la production d’écrits, l’écriture individuelle des textes, la confrontation à des textes références, la création des illustra-tions et la mise en ligne des docu-ments.

Après un temps d’attente de quelques semaines, le site est sup-primé par les élèves. Il est supprimé en classe avec le vidéoprojecteur. Les élèves peuvent voir que c’est effectivement fait : l’adresse ne fonctionne plus.

Puis, on recherche des traces lais-sées sur Google à l’aide de mots clés (Jean-Miichel Spetzz + vacances, etc.). Les élèves constatent que, malgré la suppression du site Inter-net, il reste des informations sur les moteurs de recherche.

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Le projet Los an Tos

L’objectif de ce projet est de prendre conscience des dangers d’In-ternet et en particulier que les in-formations trouvées sur Internet ne sont pas forcément vraies ou qu’elles peuvent être vérifiées en les confron-tant à d’autres sources comme les livres. Pour ce faire, Boris Raguet a eu l’ingénieuse idée de piéger ses élèves sur internet en créant des sites contenant de fausses informa-tions. Il entend ainsi les amener à prendre conscience de la nature de ces informations.

Dans un premier temps, les élèves sont donc piégés sur des sites Inter-net contenant des fausses informa-tions. Ils sont dirigés vers les sites ci-dessous pour répondre à un ques-tionnaire .

A la fin de la séance, une seule élève a douté des informations don-nées par les sites Internet, les autres n’ont rien remarqué, ils ont réellement été piégés.

Dans un deuxième temps, pour prendre conscience que « tout ce qui est sur Internet n’est pas forcément vrai », les élèves passent au vision-nage de la vidéo « tout n’est pas toujours vrai sur Internet » de Vinz et Lou .

Tout comme dans le projet précé-dent, cet épisode est utilisé comme déclencheur de parole et permet d’entamer un débat sur le problème décrit dans la vidéo.

Ceci va permettre de faire un re-tour sur la séance précédente et sur le piège. Les élèves font très rapide-ment le lien entre leur expérience et la vidéo.

Les deux premières séances vont permettre de publier un article dans le journal de l’école « la Pipelette ».

Un projet d’écriture est alors mis en place afin de créer un site Inter-net documentaire pour piéger une autre classe de l’école.

Cette démarche expérimentale va permettre une véritable investiga-tion… Loin du ton moralisateur et du « ce n’est pas bien », elle plonge les élèves au cœur de sujets qui les touchent. À travers cette démarche de projet, l’esprit critique de nos cybers citoyens est ainsi éveillé !

Lila Ammari avec la coopération de Stéphanie de Vanssay

Le programme Vinz et Lou sur InternetLe programme Vinz et Lou sur Internet propose une série de 15 dessins animés, avec activi-tés interactives et fiches pédagogiques. S’adressant directement aux jeunes de 7 à 12 ans, qui peuvent les visualiser sur le site, les animations sont proposées comme point de départ d’ateliers réalisés par des animateurs et éducateurs, et dans les classes dans le cadre du B2I. La série de dessins animés Vinz et Lou sur Internet est diffusée sur M6 et a fait l’objet d’une adaptation en bande dessinée.

Chaque épisode s’appuie sur des situations concrètes auxquelles sont confrontés les enfants de 7 à 12 ans et met en scène les répercussions de leurs actions dans leur quoti-dien. Ce programme n’impose pas une seule réponse ou un seul comportement, mais cherche à rendre l’enfant responsable, conscient des conséquences de ses actes.

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Tablette en maternellePourquoi rejeter un outil qui permet de mieux travailler ?

La classe de petite section de Véronique Favre n’est pas une classe numérique mais une classe de maternelle, tout simple-ment ! Une classe où les enfants, tout petits, en majorité non

francophones, explorent le langage, découvrent le monde, expéri-mentent, manipulent, jouent, apprennent avec des outils classiques, grâce aux sorties scolaires... mais aussi numériques.

« Pourquoi vouloir nous retirer un outil qui nous permet de mieux tra-vailler ? » interroge Véronique Favre, enseignante en petite section mater-nelle dans le 18ème arrondissement de Paris, en réponse à des détracteurs qui, pour la plupart, n’ont jamais mis les pieds dans une classe de petite section et en tous cas jamais dans la sienne. Une incompréhension pour cette enseignante qui, depuis 2011, a introduit, après multiples réflexions, tâtonnements et expérimentations, un outil d’apprentissage supplémen-taire dans sa classe : la tablette tactile. « Cet outil me permet de di-versifier et différencier les apprentis-sages dès la petite section, explique inlassablement Véronique. Les ta-blettes ne se substituent pas mais s’intègrent à tout un matériel clas-sique qu’elles enrichissent. Mes élèves

manipulent le réel, chaque jour ! Ils jouent avec du vrai bois, du joli plas-tique, de la pâte à modeler, de l’encre qui tâche et de l’acrylique qui salit les doigts. Mes élèves versent même par-fois de la farine, de la semoule, font rouler des autos ... Ils ne passent pas la journée devant un écran. Adulte de la classe, responsable, je régule, j’or-ganise, je sélectionne, je prépare des ateliers ... ». Pour suivre le travail de cette enseignante depuis 2011 (an-née où elle expérimentait pour la première fois les tablettes dans sa classe), Animation & Education peut attester de la véracité de ses propos(1).

La tablette ne s’est pas substi-tuée, loin de là, aux outils d’appren-tissages classiques ni aux sorties culturelles ! Mais force est de consta-

ter que, dans sa classe, où les en-fants sont en majorité non franco-phones, où la relation avec les parents est une nécessité impérieuse et où elle introduit avec intelligence cet outil, les tablettes tactiles ont ouvert de nouvelles portes permet-tant de multiplier les approches, les activités, les modalités d’apprentis-sage. « Avec les tablettes, les élèves s’entraînent, apprennent, créent, en-registrent livres et chansons, ani-ment, imaginent, parlent, regardent, jouent aussi, insiste Véronique. En petite section, on ne sait pas lire mais on sait écouter une histoire, une consigne orale… Les ateliers sur ta-blette sont donc préparés à la maison (sélection des applications en fonc-tion de la compétence travaillée) puis, après les séances de création, production d’écrits… je synchronise le travail à la maison pour pouvoir mettre leur production en ligne sur le blogue de la classe où les parents apprécient de plus en plus de suivre les différentes activités menées. La tablette ne se substitue pas aux tra-ditionnels papier-crayon mais elle apporte l’avantage de laisser une trace du travail, tâtonnement, hésita-tions, réussites et difficultés de l’élève à tracer une lettre, comprendre la consigne… Cette trace me permet d’adapter les apprentissages aux com-pétences des enfants afin de leur permettre d’évoluer à leur rythme comme l’exige l’école maternelle ».

Le travail réalisé par Véronique est visible. En effet, pour accompa-gner et aider les collègues souhai-tant utiliser la tablette dans les apprentissages, elle anime un blogue joliment appelé « Doigt d’école »(2). Elle y consigne ses pratiques de classe, tests d’application, réflexions pédagogiques ou interventions dans différentes manifestations comme, en juillet, à l’Université d’été de l’Office central de la Coopération à

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l’Ecole où elle a animé un atelier « Elèves créatifs et créateurs, pro-ductions numériques en petite sec-tion maternelle »(3). Récemment, l’Académie de Paris a mis en ligne un reportage(4) témoignant du quo-tidien de cette enseignante et de ses élèves de petite section. Elèves qui,

À la découverte des autresune activité avec la tablette numérique en petite section, à la rentrée

app BookCreator + Photosmatériau : photos prises avec la tablette ou photos prises avec un appareil photo numérique et regroupées en un album dans l’application Photos sur la tablette.

dans ce reportage, et comme nous avons pu le constater, n’ont rien de robots lobotomisés sous la coupe d’un grand gourou du numérique aveugle et tyrannique !

Marie-France Rachédi

1. Voir : « L’iPad en petite section Gadget ou aide aux apprentissages ? » A&E 222 de mai-juin 2011 - pages 34 à 36. Et « Les tablettes numériques ne sont pas un gadget ! » A&E 241-242, Juillet-Octobre 2014 - pages 66-67.

2. http://www.doigtdecole.com/

3. http://www.doigtdecole.com/2015/07/ueocce/

4. https://www.ac-paris.fr/portail/jcms/p2_1073620/mise-en-activite-de-production-des-eleves-de-petite-section

Les voix de la classeChaque élève aura une page dans le livre numérique sonore de la classe.

L’enseignant, en petite section, a fortiori en début d’année, gagnera en efficacité à insérer lui-même les images (la structure du livre), voire même le prénom écrit pour renforcer l’introduction de l’étiquette prénom : souvent la première fois pour cer-tains de voir leur prénom écrit.

L’objectif principal est bien le livre à créer, l’objet numérique final mais aussi les étapes de mise en voix : chacun va enregistrer son prénom au mieux de ses possi-bilités : « je m’appelle ...» ou simplement son prénom, ou encore, s’il / elle est trop intimidé(e) pour parler, un autre élève va enregistrer pour lui / elle : « elle / il s’ap-pelle » ou bien encore « c’est ...».

L’enseignant pourra personnaliser avec chacun sa page : changer la couleur de fond, la couleur de la police d’écriture, un petit dessin ajouté près de la photo : l’occasion d’un échange privilégié en tête à tête bien nécessaire en début d’année scolaire pour se découvrir.

Ces images, insérées dans l’applica-tion Bitsboard, permettront de créer des jeux variés sur la base de cette présentation de classe

� vrai / faux

� touche l’image où il y a untel

Cette situation permet d’introduire simplement la créa-tion à l’aide des tablettes en classe.

Certes les tablettes servent à jouer, mais les élèves sont immédiatement mis en situation de produire avec celles-ci : ils touchent du doigt les enjeux numériques qui seront les nôtres pendant cette première année d’école.

Objectifs :� se connaître, vivre ensemble pour mieux apprendre, entrer dans le groupe-

classe, constituer le groupe-classe : se rassurer en apprenant à connaître l’autre

� créer un contenu valorisant à partager avec sa famille pour présenter la classe.

Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248 63

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« Beatbox augmenté » : de l’art, du numérique et toujours de l’humain !

Le Human Beatbox (« boîte à rythmes humaine » en anglais) consiste à produire de la musique avec la bouche, imiter des instruments, notamment les percussions en utilisant la voix.

Ezra (Vincent Chtaïbi) a explosé le genre par son éclectisme !

Spectacles, conférences, installa-tions interactives, interventions pé-dagogiques auprès de tous les pu-blics… toutes les opportunités sont bonnes à Ezra pour transmettre l’art du Human Beatbox et questionner la « technologie de la matière augmen-tée ». Dans les établissements sco-laires, il incite les enseignants à la coopération grâce à l’interdisciplina-rité requise par ses interventions :

professeurs de musique, de phy-sique, de technologie et arts plas-tiques accompagnent les élèves dans les ateliers. « Le « Human Beatbox », explique Ezra, nécessite quelques bases techniques : préparer le corps, jouer avec la voix, le timbre, le vo-lume sonore, produire des sons diffé-rents grâce à la respiration, inspirer ou expirer, par le nez ou par la bouche, sons de gorge bouche ou-

verte, bouche fermée, placer la langue contre les dents, collée au palais... faire des claquements de langue... travailler rythme, pulsation, silence, reprendre la « phrase » plusieurs fois, ajouter un son... ». Il évoque trois manières de respirer : respirer en beatbox comme pour parler, glisser des sons inspirés (entraînement à une phrase rythmique ascendante, le son monte puis décroît) et enfin séparer la bouche du nez, inspirer par le nez pendant qu’on produit un son avec la bouche.

Le beatbox stimule le travail d’im-provisation et le passage de l’indivi-duel au collectif dans la recherche d’orchestration.

Mais l’Art d’Ezra va bien au-delà de ces démonstrations vocales, aussi merveilleuses soient-elles ! Il a eu l’intelligence de marier les arts, la technologie et le numérique explo-sant du même coup les limites de la créativité, explorant sans cesse les applications du futur. En 2007, Ezra (Vincent Chtaïbi) a créé la Cie Orga-nic Orchestra(1) (Cie O.O) dont il est directeur artistique. Artiste peu à peu reconnu en France et à l’étran-ger, il va fédérer autour des diffé-rentes activités de sa Cie une équipe d’artistes, de techniciens, de scien-tifiques, d’ingénieurs, de pédago-gues et d’acteurs culturels. Tous chercheurs et tous désireux de défri-cher avec le même enthousiasme les innovations artistiques, numériques, technologiques, pédagogiques... En associant les outils technologiques au Human Beatbox, la Cie va propo-ser la pratique du « beatbox aug-menté ». Elle va créer de nouveaux outils de plus en plus innovants et ingénieux en détournant parfois simplement des objets de la vie quotidienne comme les smartphones, tablettes ou manettes de jeu vidéo. Avec Human Beatbox - Origami - Nouveaux Contrôleurs, elle propose

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Toutes les opportunités sont bonnes à Ezra pour transmettre l’art du Human Beatbox et questionner la « technologie de la matière augmentée ». Ici, démonstration lors de l'Université d'été 2015 de l'OCCE.

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la création de « contrôleurs » en papier à l’aide de cartes makey ma-key qui permettent à chacun de gérer sa production sonore préala-blement enregistrée pour faire partie d’un instrument collectif, tout le monde étant réuni dans une produc-tion commune.

La dernière création de la compa-gnie, un gant interactif, devrait, si ce n’est révolutionner l’Art numé-rique, du moins ouvrir plus large-ment encore le champ des possibles dans le domaine de la création artis-tique et au-delà.

Dans sa conférence « B-Glove »(2) (mélange entre conférence et perfor-mance artistique), Ezra retrace l’his-toire de ce gant interactif né de sa réflexion pour le spectacle « Bionic Orchestra 2.0 » en partenariat avec l’Atelier Arts Sciences. Conçu au départ comme une télécommande agissant sur le son, la lumière et la vidéo, les expérimentations techno-logiques durant le processus de création ont laissé entrevoir de multiples potentiels dans les do-maines aussi divers que le jeu vidéo, les outils industriels, la domotique, la santé...

Finalement, Bionic Orchestra 2.0 raconte le rapport passionnel qu’en-tretient l’humain avec la machine. « De par l’essence même de son acti-vité, conclut Ezra, mêlant Human Beatbox et arts numériques, mu-siques actuelles et spectacle vivant, la Cie Organic Orchestra se positionne dans la transversalité des genres et des compétences » et donc dans un futur en construction ou tout reste encore à découvrir, créer, oser !

Béatrice Musielak

1. http://organic-orchestra.com/

2. http://organic-orchestra.com/b-glove/

Dans le cadre de l’Université d’été Ludovia12(1), Sandrine Auban, Jean-Louis Mazonetto, Christophe Lanoux Blanco et François Folch(2) ont présenté un projet coopératif d’augmentation numé-

rique d’une exposition de Land Art avec des Qr codes ».Comment amener une vraie

plus-value numérique dans un projet d’arts plastiques ? Cette probléma-tique, à l’origine du projet de coo-pération entre Le réseau de lecture du Pays de Tarascon, le collège du Sabarthès, la Communauté de Com-munes du Pays de Tarascon et le Conseil Départemental, a trouvé une réponse dans la réalisation par des élèves de 4ème d’une exposition land art enrichie par des contenus numériques (photos, vidéos…) ac-cessibles grâce à des Qr codes. Ainsi, le visiteur, muni de la tablette mise à sa disposition à l’entrée de l’expo-sition, peut, en flashant les codes disposés à côté des très belles pho-tos des œuvres réalisées, accéder à des diaporamas retraçant les diffé-rents moments de création ou à des dossiers pédagogiques réalisés du-rant les cours de documentation.

Accompagnés par leurs profes-seurs d’Arts plastiques et de docu-mentation, les élèves ont d’abord découvert ce mouvement artistique, préconçu leur œuvre en classe, puis ont réalisé leur création in situ au col de Port.

Grâce à l’intervention d’un gra-phiste créateur de contenus sur In-ternet, Robin Pelucchi, les élèves ont pu, lors de deux ateliers réalisés à la médiathèque, découvrir l’environne-ment numérique. L’occasion de ren-contrer le graphiste et de s’immerger dans son travail, tout en étant aver-tis des dangers inhérents à l’utilisa-tion des médias sur Internet. Par

Land Art et Qr codes

ailleurs, ils ont pu tester l’expérience du visiteur en participant à un jeu de piste sur tablette dans la mé-diathèque de Tarascon grâce à un parcours conçu autour de QR codes et de recherches sur le catalogue de la médiathèque.

Marie-France Rachédi

1. L’université d’été de Ludovia s’est tenue du 24 au 26 août à Aix-les-Termes. Créée en 2004, elle réunit au-jourd’hui plus de 700 professionnels et cadres de l’enseignement. Tables-rondes interactives, ateliers de découvertes (explorCamps) ou de fabrication (Fab-camp) sont autant d’occasions de découvrir et de construire des ressources, des contenus ou des outils ; d’échanger des astuces entre enseignants avec son matériel… Le thème de son colloque scientifique qui réunit des chercheurs dans le domaine du numérique, des sciences cognitives et des sciences de l’éducation était, cette année : « Appropriation et détourne-ments ». http://www.ludovia.org/2015/

2. Sandrine Auban, Professeur documentaliste au collège du Sabarthès de Tarascon-sur-Ariège et Jean-Louis Mazonetto, principal du collège, Christophe Lanoux Blanco, responsable sur réseau lecture Pays de Ta-rascon et François Folch, Chargé de projet ressources numériques pour la Bibliothèque départementale de prêt de l’Ariège, Conseil départemental de l’Ariège.

En savoir plus :

Sur le site de Ludovia http://www.ludovia.com (faites une recherche sur le site avec les mots clés "QR code land art"). Sur le site Lecture à la demande du Pays de Tarascon (avec explications et vidéos) : http://lad-paysdetarascon.opac3d.fr

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Jeux numériques, sources d’apprentissages ?

I nternet regorge de « serious games », ces « jeux sérieux » qui se distinguent du divertisse-

ment par un supplément d’âme pédagog ique. Dans quel les conditions ces jeux numériques sont-ils sources d’apprentissage à l’école ?

La vocation d’un jeu sérieux est de rendre attrayante la dimension sérieuse par une forme, une interac-tivité, des règles et des objectifs ludiques. Selon les universitaires Julian Alvarez et Olivier Rampnoux, on peut distinguer différents types de jeux sérieux, dont les jeux à vo-cation éducative. Il en existe une très grande diversité.

Pour un enseignant, faire le choix d’utiliser des serious games dans sa classe, c’est favoriser à un moment de l’apprentissage une dimension ludique, qui peut apporter une mo-tivation supplémentaire aux élèves. Le jeu choisi est un support pédago-gique complémentaire des autres moyens mis en œuvre, à un moment précis, avec des objectifs précis.

Pourquoi utiliser le jeu sérieux ?

Le jeu numérique doit permettre aux joueurs de prendre du plaisir. Il favorise aussi une personnalisation du parcours de chacun, une manière d’avancer à son rythme. Le statut de l’erreur y est modifié, non sanction-née puisque c’est elle qui fait pro-gresser dans le jeu. Si le joueur n’essaie rien, il ne se passe rien.

Dans quelles conditions le jeu sérieux sert-il les apprentissages ?

Julian Alvarez, dans son livre « Introduction aux serious games », met en garde contre une vision ma-gique qui ferait d’un support ludique un support d’apprentissage automa-tiquement efficace. Il rappelle que le fait de se faire plaisir ne suffit pas à apprendre, et souligne le leurre de jeux qui seraient à disposition des élèves « en autonomie », censés les guider dans un parcours d’apprentis-sage individualisé.

Ses conseils pour l’utilisation de jeux sérieux en classe :

� on ne donne jamais le jeu numé-rique à un élève seul : préférer l’utiliser en binôme, qui permet la distanciation, la discussion au-tour du jeu ;

� organiser de manière systéma-tique une séance de rétroaction (débriefing) après le jeu. L’accom-pagnement de l’enseignant est indispensable. C’est d’ailleurs là que tout se joue, en amont comme en aval.

Quels apprentissages ?

Le jeu utilisé en fin de progres-sion permettra de réactiver des connaissances. Les jeux types « exerciseurs » aident aux processus d’automatisation, mais l’aspect lu-dique est alors absent.

Des études sur les jeux sérieux et l’apprentissage(1) montrent des ré-sultats encourageants dans trois domaines : l’acquisition d’une langue seconde, la prévention et la santé, et les apprentissages profonds. Tout en soulignant la nécessité de déve-lopper des études à long terme, les auteurs indiquent que les jeux sé-rieux peuvent inciter à la réflexion et à la résolution de problèmes, et permettre d’apprendre.

Quels jeux ?

De nombreux sites internet pro-posent des jeux numériques. On en trouve beaucoup mais il faut savoir choisir ! Vérifier, par exemple, que le jeu encourage la résolution de pro-blèmes et d’impasses, ce qui favorise les apprentissages profonds. Vérifier aussi que le jeu fournit des réponses adéquates aux joueurs (renforce-ments, informations pour les déci-sions futures, proposition de nou-velles situations à expérimenter), en fonction des actions à réaliser.

Marion Bertin-Sihr1. Site Canopé - Agence des usages des TICE :

http://www.cndp.fr/agence-usages-tice/que-dit-la-recherche/jeux-serieux-quels-apprentissages%C2%A0-48.htm

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Un site très riche sur l’usage des jeux sérieux pour les apprentissages :

� Documents de présentation (Canopé Troyes)

� Etudes, rapports, état des lieux

� Le jeu sérieux, un objet pédagogique

� Des ressources pour trouver des jeux sérieux

� L’évaluation

� Guides pour introduire ou concevoir des jeux sérieux

� Outils pour la création de jeux sérieux.

Site Canopé Reims : http://www.cndp.fr/crdp-reims/index.php?id=2237

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Internet à l’école, se lancer sans hésiter !

Sûre qu’après avoir lu « Internet à l’école, lancez-vous !» plus aucun enseignant n’hésitera à répondre à l’invitation. Simple, éclairant, pra-tique, astucieux, original… les qua-lificatifs manquent à rendre compte de la qualité de cet ouvrage. Alexandre Acou (professeur des écoles) et Katrin Acou-Bouaziz (journaliste) ont signé là un écrit de référence pour les professeurs des écoles peu fami-liers du web mais aussi pour les en-seignants inspirants qui souhaitent aller toujours plus loin dans l’explo-ration du champ des possibles.

Mine d’or donc, prouvons-le !

Après une introduction qui resitue le débat sur l’usage d’internet dans la classe à sa juste place, l’ouvrage s’ouvre sur un chapitre essentiel « Se lancer, oui, mais comment ? » qui propose d’aider l’enseignant à choisir ses pratiques numériques, l’équipement et passe en revue les différentes propositions de forma-tion à l’utilisation des outils numé-riques.

Les deux autres chapitres, tout aussi essentiels, explorent le champ des possibles avec internet et les outils numériques. Sont ainsi aus-cultés, détaillés, expliqués les ré-seaux sociaux, les blogs de classe, les espaces numériques de travail, la vidéo, le son, la photo via internet.

Pas de doute, cet ouvrage est bien l’œuvre d’un pédagogue qui pratique avec ses élèves dans sa classe. Tel un manuel pratique, chaque partie et sous-partie suivent le même plan

permettant de progresser pas à pas : est d’abord abordée la question du comment (comment choisir son réseau social ? Sa plateforme de blogging ?…), puis celle des com-pétences travaillées et, enfin, les obstacles à dépasser. Exemples concrets d’activités et astuces ja-lonnent les pages et éclairent les thématiques.

Enfin, l’annexe participe de cette mine d’informations, de conseils, d’idées : documents pratiques, mo-dèles d’autorisation (de publication, diffusion, utilisation de l’ENT…) et exemples de fiche de préparation (séance en maîtrise de la langue, mathématiques, géographie ou tous

domaines) finiront donc de faire tomber les derniers doutes et ultimes résistances (voir l'exemple de charte numérique page 69).

Au-delà de convaincre les ensei-gnants, les auteurs entendent, à travers cet ouvrage, contribuer à améliorer les compétences des élèves, à dynamiser leurs apprentis-sages, à susciter leur plaisir et envie d’apprendre et, par-dessus tout, à faire des élèves des internautes res-ponsables.

Un très bon livre. Je recom-mande !

Marie-France Rachédi

Internet à l’école, lancez-vous !

Katrin Acou-Bouaziz et Alexandre Acou,

Editions Retz, coll. « Professeur des écoles », janvier 2015.

Les auteurs :

Alexandre Acou, profes-seur des écoles, est initia-

teur de twittclasses à Paris et formateur au CLEMI

(Centre de Liaison de l’Enseignement et

des Médias d’Information).

Katrin Acou-Bouaziz est journaliste et auteure.

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Formation, équipement… une myriade de solutions !

M anque d’équipement, formation insuffisante voire inexistante sont souvent les deux raisons les plus citées par les enseignants pour expliquer pourquoi il n’utilise pas internet

dans leur classe avec leux élèves. Alexandre Acou, co-auteur de « Internet à l’école lancez-vous »* propose des solutions.*Internet à l’école, lancez-vous ! Katrin Acou-Bouaziz et Alexandre Acou, Editions Retz, collection « Professeur des écoles », janvier 2015.

Animation & Education : A la lecture de votre ouvrage, on en conclut que, finalement, quand la motivation est là, il y a peu d’obs-tacles à l’utilisation d’internet à l’école. Est-ce le message que vous souhaitiez transmettre ?

Alexandre Acou : L’idée au départ était, effectivement, de rédiger un livre qui soit concret, pratique et qui rende compte des multiples possibi-lités d’utiliser internet à l’école. C’est pourquoi nous avons décidé de traiter la partie théorique et les obstacles au début du livre, afin d’en identifier la nature et d’apporter des solutions.

Katrin Acou-Bouaziz a interviewé un grand nombre d’enseignants parmi les innovants, j’en ai moi-même côtoyé beaucoup et chaque fois les mêmes difficultés et soucis émergent chez leurs collègues : le manque d’équipement et l’absence de formation.

Attendre d’être équipé pour utili-ser internet et les outils numériques, c’est s’enfermer dans un cercle vi-cieux : l’enseignant n’est pas équipé donc ne l’utilise pas, du coup il n’en ressent ni l’intérêt ni le besoin et, donc, il ne demande pas à être équipé (ou l’institution pense qu’il

ne le veut pas), etc. Il faut sortir de ce cercle et se lancer, comme l’invite le livre, avec ce dont on dispose.

Pour pallier l’absence d’équipe-ment, si l’on a un peu de motivation, tout un tas de petites solutions existent. Il y a des solutions ex-trêmes, que je ne recommande pas forcément pour tout le monde, comme utiliser son propre Smart-phone. Si je prends mon exemple personnel, la connexion passait via la carte 3G de mon téléphone per-sonnel. Certains hésitent car ils ont

peur de financer sur leur forfait personnel. En fait l’utilisation d’in-ternet, comme par exemple poster un tweet, ne consomme pas de for-fait.

Dans le livre, nous proposons aussi des solutions moins extrêmes comme des demandes de prêts. Il faut que les enseignants se ren-seignent auprès de l’Inspection, d’un service académique, du CLEMI (Centre de Liaison d’Enseignement et des Médias d’Information) de leur dépar-tement qui peut disposer de matériel ou donner des pistes pour en trouver. Il peut également s’informer auprès du réseau Canopé, des Associations départementales OCCE (Office Central de la Coopération à l’école) ou de la Ligue de l’Enseignement.

On peut aussi imaginer que les enfants apportent leur propre maté-riel. Cette solution est peu répandue en primaire mais il m’est arrivé que, pour une sortie scolaire, les élèves me demandent s’ils peuvent apporter leur appareil photo qui s’avère, fina-lement, être l’ancien Smartphone d’un de leurs parents. De retour à la maison, les élèves s’aperçoivent qu’en connectant l’appareil à l’ordi-nateur de leurs parents, ils peuvent envoyer les photos par mail à l’en-seignant. Le « BYOD » (bring your own device) ou « AVAN » (apportez vos appareils numériques) est une bonne piste à exploiter à condition, bien sûr, de bien cadrer dès le dé-part. On peut imaginer, par exemple, de demander aux élèves d’apporter leur matériel une journée par mois ou par semaine en proposant un travail adapté à ces outils-là. C’est incroyable le nombre d’anciens Smartphones qui traînent à la mai-son ! J’en ai moi-même récupéré deux anciens et je m’en sers en classe hors connexion. Les élèves les utilisent pour prendre des photos, créer des exposés ou des mini-leçons

« Attendre d’être équipé pour utiliser internet et les outils numériques, c’est s’enfermer dans un cercle vicieux : l’enseignant n’est pas équipé donc ne l’utilise pas, du coup il n’en ressent ni l’intérêt ni le besoin et, donc, il ne demande pas à être équipé »

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qu’ils inventent, puis ils les envoient par email. Le Smartphone retient dans sa mémoire qu’il doit envoyer ce mail et c’est seulement quand j’arrive à la maison où il y a une connexion wifi que le mail part sur un ENT ou sur un blogue. Plusieurs enseignants utilisent des outils nu-mériques hors connexion (tablettes par exemple) pendant le temps de classe qu’ils connectent le soir à leur domicile pour actualiser et synchro-niser les travaux,…

Tout cela, c’est de la débrouille mais il faut essayer, demander, cher-cher : réparer le matériel disponible, utiliser le matériel obsolète (un vieil ordinateur peut au moins servir de machine à écrire et, muni d’une clé USB, l’élève peut transférer le texte

écrit en classe sur un ordinateur plus récent), récupérer du matériel non utilisé à l’extérieur de l’école…

A&E : Donc l’équipement n’est pas un réel obstacle, l’enseignant peut faire ce qu’il peut avec ce dont il dispose. Mais que répon-dez-vous aux enseignants qui dé-noncent l’absence de formation ?

A.A. : Les enseignants disent qu’ils ne sont pas formés mais ils consultent leurs emails sur leur téléphone, ils impriment des fiches de préparation depuis des blogues connus d’ensei-gnants… Cela correspond aux com-pétences que l’on demande de trans-mettre aux élèves. Cela revient à expliquer à leurs élèves comment ils procèdent quand ils préparent un

cours pour sélectionner leurs sources, choisir leurs sites… Finalement, les enseignants possèdent des compé-tences suffisantes qu’ils utilisent quotidiennement dans la sphère pri-vée mais pas dans la sphère profes-sionnelle. Peur d’être dépassés, pas assez qualifiés… je ne sais pas mais c’est un mauvais ressenti. Tous les enseignants ne possèdent pas le per-mis de conduire mais sont pourtant capables d’enseigner aux élèves com-ment se comporter dans la rue parce que les différents panneaux de signa-lisation touchant à la sécurité relèvent du bon sens. Un grand nombre de compétences du B2i relèvent également du bon sens. Alors, allez-y, lancez-vous !

Interview Marie-France Rachédi

Exemple de charte que l'on peut retrouver dans l'ouvrage Internet à l'école, lancez-vous !

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Droits de l’Homme et laïcité au CM2,

Engager le dialogue pour ne pas le rompreMise en place d’une pratique de réflexion et de témoignage par la Section tourangelle de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH37).

La classe de CM2 est partagée dans deux salles voisines. Ici, une séance de photo-langage devant un mur d’images amène chaque enfant à expliquer ce qu’il perçoit dans la photogra-phie qu’il a choisie. Chacun écoute et peut, s’il le souhaite, contribuer aux explications et exprimer son émotion. Là, des adultes, militants associatifs, abordent quelques éléments essentiels dans l’évolution des sociétés et des mentalités à travers l’évocation de certains soubresauts de l’histoire et des textes et des lois qui concernent les Droits de l’Homme. Là aussi le dialogue s’engage et chacun apporte sa pierre aux questions et aux réponses qui s’adressent à tous. Car c’est bien de ça dont il est question dans ces deux ateliers : les Droits de l’Homme, mais aussi la notion de laïcité, et Catherine Lizon-Croze, Elisabeth Gontier et Jean-Claude Galland, membres de la LDH37, organisent cette action pour la première fois.

Catherine Lizon-Croze explique : « La Ligue des Droits de l’Homme est attachée à l’universalité et au caractère indi-visible des droits politiques, économiques, sociaux et cultu-rels. Elle ne se contente pas de dénoncer les injustices mais s’efforce de les combattre en promouvant la citoyenneté politique et sociale de tous. ». Elle précise les objectifs poursuivis lors des interventions en milieu scolaire : « En venant échanger sur les thèmes de la laïcité et du vivre ensemble, nous avons souhaité montrer aux enfants que plusieurs points de vue coexistent, qu'on peut s'écouter mutuellement, qu'on peut aussi douter et que le doute a une valeur. »

Une volonté de témoigner et d’agir dans l’école

« A la suite des attentats du mois de janvier, lors d’une réunion, j’ai suggéré aux autres militants de la LDH37 d’en-treprendre une action « laïcité » dans les écoles, se souvient Jean-Claude Galland, Elizabeth a imaginé une intervention qui permettrait de travailler en demi-classes en utilisant le

principe du photo-langage et a proposé d’en parler à une enseignante retraitée impliquée dans le fonctionnement de l’OCCE 37, et c’est en accord avec cette association qui a établi le lien avec deux enseignants intéressés que nous avons alors réfléchi aux modalités précises de cette inter-vention prioritairement adressée à des élèves de CM2. Je suis très heureux que cette suggestion aboutisse à un beau projet en adéquation avec nos valeurs. »Elisabeth Gontier complète : « Je pensais qu’il fallait d’abord intervenir en primaire par crainte que nos interven-tions dans des classes d’élèves plus grands ne raniment la discorde. Certains adolescents ont manifesté leur refus de faire la minute de silence, ou ont pu dire « Je ne suis pas Charlie ». Je pensais également que le CM2 était la classe du primaire où il était plus facile de toucher les élèves par le raisonnement car nous ne sommes pas des pédagogues, nous n’avions aucune expérience de travail avec des classes ».

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« On ne naît pas

citOyen Ou citOyenne… »

2015-2016

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Echanger et réfléchir pour s’interroger et aller plus loin

Après deux mois de réunions et de préparatifs, six ligueurs, ainsi que s’appellent les militants de la Ligue des Droits de l’Homme, ont pu rencontrer deux classes de CM2 de l’école Morier, à Joué-lès-Tours. Ces deux interventions se sont déroulées à quinze jours d’intervalle pour pouvoir affiner le déroulement des ateliers qui occupent une matinée.« J'ai été étonnée du savoir des enfants sur les thématiques des droits de l'homme et de leur implication, constate Elisabeth Gontier, ce qui me semble fondamental, c'est de donner l'occasion aux enfants de vivre ensemble, et avec leur instituteur, une expérience qui les touche dans leur humanité. Le savoir extérieur qu'on espère leur apporter devrait surtout être une occasion de se poser de nouvelles questions ».

Parcours de militants des droits de l’homme

Elisabeth Gontier : « Je me sens très concernée par la pous-sée de l’extrême droite, depuis l’élection du premier dépu-té FN aux européennes au début des années 80, je crois. Je suis venue vers la Ligue en janvier 2014 après les manifesta-tions « Jour de colère », au cours desquelles les partis d’ex-trême droite m’ont paru avoir franchi une ligne rouge en défilant avec des pancartes « Mort aux Juifs ». »Jean-Claude Galland : « Un jour, un ami membre de la LDH m’a dit : « Tu devrais nous rejoindre, tu verras, c’est bien ce que nous faisons ! » … et je suis devenu président de section... »Quant à Catherine Lizon-Croze, avocate, professionnelle-ment impliquée dans la défense des sans papiers et de per-sonnes en situation de grande précarité, cet engagement est depuis longtemps une affaire de profonde conviction.

« Ecrits pour la fraternité », un concours pour réfléchir à la citoyenneté

Pour agir auprès des enfants, la section tourangelle de la Ligue des Droits de l’Homme(1) a également souhaité relayer le concours organisé par la Ligue des Droits de l’Homme au plan national(2), « Ecrits pour la fraternité ». Catherine Lizon-Croze donne quelques explications : « Créé en 1991, ce concours s'adresse aux classes de grande section de mater-nelle, d'élémentaire, de collège, de lycée et d'Institut médi-co-éducatif, mais aussi aux individuels. Les participants peuvent présenter des textes en prose ou en vers, des scènes de théâtre ou des textes de chansons. Ils peuvent aussi contribuer sous d'autres formes : chansons en musique, vidéos, dessins, peintures, collages, objets. Le thème pour l'année 2015-2016 sera « On ne naît pas citoyen ou citoyenne… ».Les enseignants, éducateurs, ou particuliers, doivent remettre à la section LDH de leur département les œuvres collectives ou individuelles avant le 1er avril, des remises de prix étant organisées en mai et juin.

Ce thème sera, pour tous les participants, l’occasion de s’interroger sur ce qui, au-delà des textes juridiques, contri-bue à faire de l’enfant un citoyen avisé, conscient et actif.La connaissance de textes qui fondent ses droits, l’exercice de son sens critique, l’ouverture au monde, la capacité de faire entendre sa voix et d’agir au sein de l’école et de la société, autant de pistes qui permettront à chaque enfant, avec sa classe, avec son école, de réfléchir à ce qui caracté-rise le chemin vers la citoyenneté.

Gilles Petitjean

1. Section tourangelle de la Ligue des Droits de l’Homme, 10 place Neuve, 37000 Tours. Site : http://ldh.tours.free.fr

2. Ligue des Droits de l’Homme : 138 rue Marcadet, 75018 Paris Site : www.ldh-france.org

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Actions nationales

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L’écriture, un apprentissage primordial pour nos élèves, mais pas tou-

jours facile de les motiver ?

Ecrire pour quoi, pour qui ? Pour être lu bien évidemment mais en sortant du cadre habituel de l’enfant. Etre lu par des pairs inconnus dans tous les coins du territoire français avec bienveillance et empathie. Pas de sanctions, « Etamine », action nationale de l’Office Central de la Coopération à l’Ecole, n’est pas un concours, juste un stimulateur du plai-sir d’écrire.

C’est un projet fédérateur au sein de la classe, vous décou-vrirez les bienfaits d’agir à plusieurs, la satisfaction de l’œuvre réalisée ! Vous attendrez avec impatience le retour des fiches d’appréciation des lecteurs. C’est aussi un projet qui donne du sens aux apprentissages et permet, à travers un projet commun, de développer des capacités et des connais-sances du socle commun.

Ecrire ce que l’on veut, sous la forme que l’on veut pourvu que l’œuvre soit coopérative et que toutes les compétences soient mises à contribution : dessinateur, peintre, écrivain, donneur d’idées... Alors, faites comme des milliers d’enfants qui ont participé depuis plus de 20 ans à cette action natio-nale : franchissez-le pas, osez, lancez-vous ! Chaque classe auteur se verra récompensée par l’envoi du livre réalisé par d’autres enfants lors du rassemblement étamine qui se déroulera cette année en Poitou-Charente. Et si vous ne savez pas comment l’aborder, le site étamine est là pour vous aider.

Trop timide ou manque de confiance pour démarrer, alors pourquoi ne pas commencer comme lecteurs ?

Modalités d’inscription et calendrier de l'action "étamine" sur le site : www.occe.coop

Témoignage d’enfants

«Ce livre est tellement beau et précieux,

je l’offrirai pour la fête des mères ».

« Je n’aime pas l’école, mais merci,

grâce à vous j’ai découvert l’envie de

lire et le plaisir d’écrire. »

étamineLes « auteurs » : chaque classe s’engage à créer collectivement un livre autour d’un thème libre, inventer une histoire, l’écrire, l’illustrer.

Les « Lecteurs » : chaque classe s’en-gage à recevoir des livres, les lire, les critiquer de façon constructive, complé-ter la fiche d’appréciation et la retourner au groupe étamine qui transmettra aux auteurs toutes les fiches.étamine, vous connaissez ?

Un coup de pouce apprécié !

Depuis l’année scolaire 2012-2013, l’action Etamine bénéficie d’un soutien financier du Crédit Mutuel Enseignant. Un coup de pouce au profit des élèves non négligeable puisqu’il a permis d’acheter des ouvrages pour les classes et d’of-

frir, à la fin du rassemblement national en Corse du sud, un lot d’une douzaine de livres « Mots corsés » aux classes. « Nous sommes heureux, ont d’ailleurs déclaré Alain Fréville et Eric Weill(1), que l’action étamine soit aidée, pour la publication, par le Crédit Mutuel Enseignant, dont les valeurs de solidarité et de coopération sont aussi celles de l’OCCE. C’est une belle aventure commune à pour-suivre ».

1. Respectivement : Président de l’Union nationale du Crédit Mutuel Enseignant et

Président national de l’OCCE.

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Actions nationales

Fiction Point limite

4ème Collège Sacré cœur B.6000 Charleroi, Belgique.

Une fiction de 5mn sur le harcèlement au Collège, court mais efficace. Une réalité, en fait, qui touche les adolescents en général et ceux de Charleroi en particulier qui ont sou-haité « sensibiliser les jeunes grâce à (notre) film ».

Zombie or not zombie

CE2, Ecole Marie Laurencin 27180 St Sébastien de Morsent.

Personne sensible s’abstenir ! Un scénario dans la lignée des grands films d’horreur.

Le voleur masqué

CE2/CM1/CM2 Ecole primaire 91890 Videlles.

Ils en ont de l’imagination ces élèves. Zip, Zip et Zip, ils me surprendront toujours. Encore un moment fort agréable.

Hope

Collège Pierre ADT 57600 Forbach.

Coup de cœur du jury ! Je comprends pour-quoi. Il dure 4mn (suivi comme les autres de la démarche pour le réaliser) et on a comme une envie de sauter de joie à la fin ! Hope comme un parfum d’espérance.

Animation Pour avoir tenté d’en réaliser un, je mesure toute la difficulté de concevoir un film d’animation (scénario, décors, tournage…). Bravo donc pour :

Le repas des tigres aux élèves de Cycle 3 Ecole Cécile Coupaye 32240 Estang.

Coup de pompe aux CM2 Ecole Emile Gallé 54710 Heillecourt.

La petite fille de Monsieur Salin (mon petit coup de cœur personnel) aux CM1 Ecole Louise Michel 13500 Martigues.

Documentaire Le film des Droits de l’Enfant CE2 Ecole H. Wallon 94400 Vitry-sur-Seine.

La cerise sur le gâteau : à la fin de chaque film, les élèves expliquent comment ils ont procédé pour réaliser leur fiction, animation ou documen-taire.

Vous pouvez voir la majorité de ces films, ainsi que le palmarès et des photos de la journée sur le site dédié :

http://www.occe.coop/~ad67/ledi/

Marie-France Rachédi

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« Lire et Ecrire des images »Une Cérémonie de clôture digne du Festival de Cannes !C’était le 24 juin dernier, sous un soleil radieux. Canopé Strasbourg avait pris des airs de Festival de Cannes avec son espace d’accueil tout en rouge, son producteur à Panama et gros cigare pour accueillir les participants et les cameramen qui tournaient autour de tout ce petit monde.

Cinq classes avaient fait le déplacement, qui en bus, qui en train, qui en voitures particulières. Ils avaient parcouru de nombreux kilomètres, n’hésitant pas à se lever aux aurores pour arriver à Canopé à l’heure dite.

Ils venaient de Meurthe-et-Moselle, de l’Essonne, du Val-de-Marne, de Moselle et de Haute-Saône. Ils avaient entre 5 et 15 ans et ont pu assister à la projection des huit films primés (voir encadré).

Des petites séances de quizz collectif ont permis aux enfants de se détendre entre les projections, tout en les motivant pour regarder les films d’un œil attentif. Une ambiance excellente régnait dans la salle, les enfants se congratu-laient les uns les autres dans un esprit tout à fait coopératif.Les personnalités présentes ont remis les prix aux enfants : caméscope, tablette, appareil photo, micros, etc… des prix qui vont leur permettre de progresser dans la pratique de la vidéo et de la photo.

L’après-midi, toutes les classes sont parties à la découverte du centre historique de Strasbourg et surtout de sa cathé-drale, grâce à un rallye-photos organisé rien que pour eux.Une bonne journée pour la centaine de participants, enfants, parents et enseignants.

Simone DuclosAnimatrice pour Lire Ecrire des Images

Les lauréats du Festival 2015, catégories :

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Actions nationales

Photo-poème saison 2 et bientôt 3Sur la lancée de la création du Label « Ecole et poésie »(1), Le Printemps des poètes et l’OCCE ont donné naissance, en 2014, à l’opération Photo-poème qui propose d’allier productions plastique ou graphique, photographie et numérique. Lire, dire, écouter, goûter, chanter ou même danser un poème, tout chemin est bon pour aboutir à la création d’un Photo-poème. Opération impulsée en 2014 par Le Printemps des Poètes et l’OCCE (Office Central de la Coopération à l’Ecole), Photo-poème propose d’associer poésie, production plastique ou graphique, photographie et numérique. Sa pre-mière édition s’était déroulée autour du poème « Bleu Klein » de Zéno Bianu(2). Son édition 2015 a permis aux classes participantes d’explorer le poème de Maram al-Masri : « Lettre d’une mère arabe à son fils ». En quoi consiste concrètement cette opération ? Les élèves des classes participantes découvrent le poème choisi par les organisateurs de l’opération en lien avec la thématique du Printemps des poètes. Ils apprécient les mots, le jeu des rythmes, des sonorités… laissent naître en eux une multitude d’images. Ils vont alors réaliser des photographies en écho à ce poème. Et là, petite difficulté, les élèves doivent en choi-sir une seule et l’adresser aux organisateurs. Cette phase est souvent délicate mais non moins intéressante que les deux

autres en termes d’apprentissage. « La classe, explique Katell Tison-Deimat, chargée de mission art et culture de l’OCCE, doit en effet s’organiser pour un projet commun, partagé, coopératif -non non, pas de concours de classe pour choisir la plus belle photo individuelle ! Cette photo n’est pas forcément une « saisie » de la réalité mais plutôt la photographie d’une création (une création plastique en volume ou deux dimensions, une installation, une accumula-tion, un détail agrandi…). Ce n’est pas forcément une « illustration » au sens conventionnel, qui redirait en dessin exactement la même chose que ce que disent les mots du poète… Plutôt donc un écho, une correspondance visuelle, une résonance : les images que cela déclenche en nous, sur un mode sensoriel et sensible… ». Ce choix réalisé, la classe n’a plus qu’à envoyer son pho-to-poème qui viendra ainsi alimenter un mur d’images (en ligne), fruit du travail de l’ensemble des classes impliquées. Cette grande « mosaïque-poème » ainsi constituée est dévoi-lée le jour du printemps.

Marie-France Rachédi

1. Le label « École en poésie » est décerné aux écoles menant des projets « Poésie » afin de favoriser l’imprégnation poétique quoti-dienne des élèves. À partir d'une charte proposée par l'OCCE (Office central de la coopération à l'école) et le Printemps des Poètes, les écoles choisissent cinq projets au moins sur lesquels elles souhaitent mettre l’accent : trois doivent associer la classe et deux l’école. La demande de label est à faire parvenir, tout au long de l’année, aux associations départementales de l’OCCE. En savoir + : http://www.printempsdespoetes.com

2. Edition Printemps des poètes 2014 ; genre « Au cœur des arts » : http://www.printempsdespoetes.com/index.php?url=passeurs/fiche.php&cle=702

Extrait du poème de Maram al-Masri « Mon fils, sois

la goutte d’eau qui formera la vague avec les autres gouttes qui nettoiera la côte du monde et adoucira le rocher pointu… ».(in La robe froissée, éditions Bruno Doucey, 2012)

Comment participer ? La classe désireuse de participer commence par se connecter sur le site dédié : http://www.occe.coop/photo-poeme

Elle inscrit son adresse électronique (attention : une adresse pour chaque classe qui s’inscrit).

Elle reçoit alors un courriel pour accéder à un formulaire en ligne.

Il faut compléter ce formulaire et le transférer en même temps que la photographie.

La classe reçoit alors sa carte Photo-Poème électronique (email + PDF) et est ensuite informée du dévoilement de la grande Mosaïque (chaque photographie constituant la Mosaïque comporte le nom de la classe-photographe).

Partager sa photo ou celles des autres classes.Dès la mise en ligne de la Mosaïque, il est possible de partager son photo-poème avec ses amis, sa famille… Comment ? Il suffit de sélectionner une photo pour l’agrandir, puis de cliquer sur l’enveloppe en bas à droite.

Chers enfants d'aujourd'hui, les

hommes et les femmes de demain

Je vous remercie un par un pour

vos participations magnifiques au

projet de Photo-poème.

Vous avez bien exprimé dans vos

créations votre amour fort pour la

Liberté.

La liberté qui nourrit les esprits

nobles et qui vit dans le respect

de l'autre, le respect de la loi qui

est faite pour que chaque homme

vive sa Liberté sans attenter aux

libertés des autres.

Soyez toujours des esprits libres,

créatifs et justes.

Merci et bravoMaram âl Masri

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Extrait du poème de Maram al-Masri « Mon fils, sois

la goutte d’eau qui formera la vague avec les autres gouttes qui nettoiera la côte du monde et adoucira le rocher pointu… ».(in La robe froissée, éditions Bruno Doucey, 2012) 10ans !

10 ans que l’OCCE national a rêvé, conçu et construit son action coopérative d’éducation artistique Théâ, en faveur de la rencontre entre des enfants en classe entière et des écritures théâtrales jeunesse, avec la complicité successive de 14 auteurs, de compagnies, comédiens, danseurs, de théâtres, de partenaires(1).2014-15 signe l’année d’un très bel anniversaire, grâce à Sylvain Levey et Dominique Paquet, aux 554 classes partici-pantes, réparties dans 55 départements et leurs associations départementales OCCE, leurs enseignants, leurs artistes partenaires.10 ans ! Des Rencontres nationales Théâ accueillies en Rhône-Alpes, dans des théâtres d’Étoile-sur-Rhône (26) et Bourg-en-Bresse (01) durant 5 jours en juin. 28 classes de la région auront mis en partage sur scène leur travail de recherche de l’année, sur des fragments de Cent culottes et sans papiers, Ouasmok, Arsène et Coquelicot, Son parfum d’avalanche, Les escargots vont au ciel, Maman Typhon, et autres textes publiés de nos deux auteurs associés. 10 ans ! « Le théâtre, entre éthique et esthétique : éveil des consciences » : un forum au cœur de ces Rencontres a réuni auteurs, artistes, universitaires-pédagogues(2).Les 10 ans de Théâ, ce sont aussi les formations organisées par l’OCCE pour les enseignants et les artistes dans de nom-breux territoires et un maillage partenarial avec de multi-ples structures culturelles. Et des rencontres départemen-tales un peu partout en France.Des enfants et des adolescents qui lisent, disent, explorent, jouent, entrent en danse, en théâtre, inventent leur appro-priation sensible des mots, découvrent la poétique de l’es-pace, des corps, des voix, vont à la rencontre de spectacles, investissent des lieux de lecture, apprivoisent des espaces scéniques… et offrent à voir, entendre et partager le fruit de leurs parcours artistiques.

En 2015-16, une nouvelle aventure Théâ vous accueille, dont l’auteur associé sera Dominique Richard (voir entretien pages suivantes).L’OCCE invite donc toute classe adhé-rente à une démarche coopérative qui prend en compte les 4 essentiels d’un processus d’éducation artistique :

� LA PRATIQUE ARTISTIQUE : l’expérience sensible, le faire, l’exploration des langages, processus et questionnements artistiques. L’exercice du pouvoir d’agir et créer.

� LA RENCONTRE AVEC LES ŒUVRES : aller au théâtre voir des spectacles professionnels (les émerveillements, les chocs, les rejets, les questionnements), qui suppose le « déplacement physique » dans des lieux dédiés à la créa-tion et la diffusion artistique.

� LA CONSTRUCTION DES CONNAISSANCES, le recul et l’analyse, la reconnaissance des ressemblances et des différences (dont construction de l’Altérité).

� L’EXERCICE DE LA PAROLE des enfants et des jeunes sur leurs expériences artistiques et l’intelligence du monde qu’ils bâtissent.

Vous êtes bienvenus ! N’hésitez pas à contacter votre asso-ciation départementale OCCE.

Katell Tison-DeimatCoordonnatrice nationale Arts-Culture OCCE

[email protected]

1. Le Centre National des Écritures du Spectacle de Villeneuve-lès-Avignon ; l’ANRAT ; la Belle saison des arts vivants pour l’Enfance et la jeunesse.

2. Marie Bernanoce, Jean-Claude Lallias, Emilie Le Roux, Sylvain Levey, Dominique Paquet. Vidéo du Forum en ligne sur www.occe.coop/thea

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Actions nationales

Le théâtre est une parole adressée et active

Comédien, auteur et metteur en scène, Dominique Richard sera en 2015-2016, le nouvel auteur associé à Théâ. Avec un premier texte jeunesse écrit en 1998 et publié en 2002 : « Le journal de Grosse Patate », il explore un univers réaliste dans lequel il invite, au fil des années, Rosemarie, Paul, Hubert, Rémi, et bien d’autres personnalités qui tissent entre eux des liens qui les révèlent à eux-mêmes.

Déclencher le besoin d’écrire, entrer dans un récit

« Depuis longtemps, je n'ai plus besoin d'un déclencheur extérieur, une commande ou l'envie de raconter un souvenir pour entrer dans un nouveau texte qui serait isolé des précédents. Je suis dans un projet qui repose sur la volonté d'écrire sur la question de l'enfance en explorant différentes figures qui reviennent de texte en texte de façon récurrente. Ils grandissent, se transforment, tissent des relations. C'est la logique interne qui s'est construite de texte en texte qui détermine mon besoin d'entrer dans un nouveau récit. Ainsi « Les discours de Rosemarie » que j'ai terminé il y a quelques mois était un projet que j'avais en tête depuis 6 ou 7 ans, et je réfléchis déjà à deux textes pour lesquels je prends des notes. Pour moi, comme en chimie, il y a des produits qui sont en suspension entre le conscient et l'inconscient, et grâce à une goutte d'un autre produit la cristallisation va s'opérer à un moment donné. Alors, je sais que je peux me lancer dans l'écriture, mais c'est après avoir passé énormément de temps à bâtir des plans, à détailler chaque scène, chaque moment, pour en déterminer la logique profonde. Je considère que ce qu'on ressent d'un texte dépend de la façon dont il est distribué, composé, au point que j'ai désormais beaucoup de mal à commencer à écrire tant que je n'ai pas la structure globale du texte. »

La forme théâtrale plutôt que romanesque

« On n'écrit que ce qu'on lit. Les premiers livres qui ont provoqué chez moi un choc esthétique étaient des livres de poésie, puis j'ai commencé à faire du théâtre et j'ai retrouvé cette émotion et cet intérêt dans les lectures de théâtre. Aujourd'hui encore la poésie et le théâtre constituent la majeure partie de ce que je lis, avec également une curiosi-té pour les œuvres philosophiques. Je me méfie de la struc-

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Comédien, auteur et metteur en scène, Dominique Richard

sera, en 2015-2016, le nouvel auteur associé à THÉÂ.

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http://www.occe.coop/thea

Plus d'infos THÉÂ, CANOPÉ et Théâtre contemporain sur la toile :

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Actions nationales

ture facilement linéaire, descriptive, et donc potentielle-ment moralisatrice du roman. L'écriture théâtrale est rhizo-matique, car même quand on y raconte une histoire linéaire, son découpage en actes et en scènes raconte des interac-tions par une écriture en réseaux. Les lecteurs habitués à la forme romanesque ont parfois du mal à saisir les véritables enjeux d'une pièce de théâtre en restant accrochés à la forme linéaire. Malgré tout, je reconnais que ce genre roma-nesque me fascine, et deux textes s'en approchent un peu : « Le journal de Grosse Patate » qui est un journal intime, ce qui le rend plus facile à lire, et « Le garçon de passage » dont la forme est plus narrative, mais avec de nombreux retours en arrière qui laissent une grande latitude d'interprétation. Quelle que soit la forme adoptée par l'auteur, le théâtre reste toujours une parole adressée et active. »

Intervenir auprès d’une classe« Pour aider à la réalisation d'une forme spectaculaire courte, je me préoccupe avant tout de donner aux enfants les moyens de prendre conscience de toutes les dimensions du théâtre : la part du jeu, la place du corps dans l'espace, la question du texte, la notion de spectacle. Pour chaque classe ces différents domaines mériteront un développement différent. Cette posture de metteur en scène intervenant est complexe et délicate, car l'enseignant connaît bien les enfants et il peut être sensible à des aspects qui ne semble-ront pas importants pour l'intervenant, voire contre-produc-tifs. Je dialogue avec l'enseignant pour recentrer sur la question de la forme spectaculaire, pour n'en oublier aucun élément. »

Être spectateur au théâtre« J’ai d’abord été acteur vers douze ans, puis lecteur de théâtre, avant de devenir spectateur grâce en particulier aux déplacements organisés par le conservatoire quand j’avais dix-sept ans. Je suis un spectateur attentif et exi-geant, mais je garde la volonté de découvrir un spectacle, un texte, des acteurs, sans chercher à analyser pendant la représentation. Mais bien sûr je ne reste pas neutre, et le spectacle est décortiqué et fait l’objet de longues discus-sions après ».

Entretien recueilli par Gilles Petitjean

Retrouvez en ligne la totalité de cet entretien via le lien ci-dessous ou le QR-Code ci-contre :

http://animeduc.occe.coop/265

Canopé-THÉÂ/OCCE

« Le réseau THÉÂ/OCCE ne sera jamais assez remercié»

Je pense sincèrement que tout le tra-vail du Groupe THÉÂ est suffisamment pionnier et juste dans ses démarches pour qu’on essaye de mieux le faire connaître encore. Et le lien entre Canopé, la Librairie de l’Education et theatre-contemporain.net le permet…Je suis très heureux de voir avec quelle justesse et quelle rigueur THÉÂ

met les classes en contact avec les écritures théâtrales et les auteurs. Et combien le travail en partenariat invente des formes adaptées au partage collectif : elles sont comme des « réponses » chorégraphiques ou chorales aux écritures et à leurs thèmes. Auteurs, éditeurs, artistes, enseignants, parents, enfants…tous sont à leur juste place pour faire de l’Ecole encore et toujours un espace de liberté et de conquête pour chacun.Le réseau THÉÂ/OCCE n’en sera jamais assez remercié…Surtout aujourd’hui !

Jean-Claude LalliasConseiller Théâtre pour CANOPé

Délégation aux arts et à la culture

https://www.reseau-canope.frhttp://www.theatre-contemporain.net

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L i v r e s j e u n e s s e

78 Animation & Education - Juillet/Octobre 2015 - n°247-248

« Vivre auprès de mon arbre » avec des livres de jeunesse

Entre « la forêt étudiée » dans le cadre des programmes de sciences pour l’Ecole et « la forêt imaginaire » des contes, il existe un espace peu exploré par l’école : la forêt considérée d’un point de vue éthique, philosophique, pourrait-on dire.Justement, dans les nouveaux programmes d’Enseignement Moral et Civique (EMC) en vigueur à la rentrée 2015, les valeurs et les normes de l’école laïque y sont explicitées sur fond de philosophie humaniste. Ainsi, la culture morale et civique comporte quatre dimensions, étroitement articulées entre elles : une dimension sensible (culture de la sensibili-té) ; une dimension normative (culture de la règle et du droit) ; une dimension cognitive (culture du jugement) et une dimension pratique (culture de l’engagement).La thématique de « La forêt » traverse toutes ces dimen-sions. Dans cet article, la dimension sensible et celle de l’engagement seront plus particulièrement explorées, avec des livres de jeunesse.Un conseil : avant de présenter ces albums aux jeunes élèves de cycle 2, il est indispensable de s’assurer que chacun ait vécu l’expérience réelle de la forêt : ressentir au moyen des cinq sens en éveil, observer les traces de la vie animale, regarder les traces d’un feu de forêt et apprendre les règles de sécurité, avoir peur de se perdre ou d’être oublié la nuit…

L’arbre, la forêt pour développer la culture de la sensibilité

La sensibilité dans les pro-grammes d’EMC est envisagée du point de vue de la relation entre soi et les autres. On note une conception marquée par une vision occidentale ;

dans les pays d’Asie, la nature ferait partie de cette relation. Puisqu’il est demandé d’entraîner les élèves à « identifier et nommer leurs émotions et leurs sentiments », la poésie est un medium formidable pour cela. Parmi les classiques de la poésie, citons deux recueils de belle qualité : le recueil « Arbres » regroupe les poèmes de vingt poètes contempo-rains et celui « Je dors parfois dans les arbres » présente un choix de poèmes de Paul Vincensini qui s’ouvre sur :

T’es fouTire pasC’est pas des corbeauxC’est mes souliersJe dors parfois dans les arbres

Et qui se clôt avec l’humour qu’on lui connaît sur :

Allez-y tirezTirezJe n’y suis plusCe qu’il y a dans les arbresCe n’est pas moiC’est mes souliers.

Plus récent (2013) est le recueil de textes poétiques écrit par Benoît Broyart d’après 77 arbres imaginés par autant de créateurs. L’ensemble est un joli objet, bien tentant pour écrire et faire écrire les élèves, à leur tour. Par exemple, en écho à Vincensini, voici le poème écrit sur un dessin de cerf allongé, ses bois forment des branchages qui le mettent à l’abri (image de Delphine Chedru) :

Il avait vu le chasseur approcher.Il ne baisserait pas les yeux.Il lui tiendrait tête.Bientôt, c’est certain, l’homme renonceraitEt piétinerait son fusil.Il était intouchable.

Ou sur une image d’écureuil, une notice « arbre prêt à monter » entre les pattes, perplexe devant des caisses sur lesquelles est écrit « racines », « tronc », « branches », « feuilles » (image de Bruno Heitz) :

Recette facile. Budget modeste. Résultat garanti.Bonification assurée après quelques années.Epatez la galerie à coup sûr avec cettePréparation ancestrale à la saveur incomparable.

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L i v r e s j e u n e s s e

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La photographie est un media intéres-sant pour développer la sensibilité des enfants. Celles de Valérie Archeno, dans « Till », interpellent par le sujet -la ville et la forêt, en nocturne ; par

les plans aussi -du microscope au plan large ; par la manière d’illustrer l’histoire de Till -un petit garçon égaré dans la forêt proche de sa maison, la nuit. Au lieu d’être inquiet, il apprivoise sa peur et la transforme en expérience non dénuée d’émotions traduites dans le texte. On se dit que l’enfant a dû rêver, mais les photos, réalistes, laissent la place à l’interprétation et donnent envie d’initier les enfants à sortir dans la nature la nuit, pour éprouver des sensations inédites et marquantes.

L’arbre, la forêt, pour éduquer à la culture de l’engagement

A partir du film « Il était une forêt », de Luc Jacquet, plu-sieurs livres dérivés ont été publiés sous le même titre. L’ouvrage présenté ici est car-tonné, de format carré et se présente comme un imagier. A chaque photo de la page de droite correspond en page de gauche une phrase présentant le mot-titre, de « éléphant » (la graine de l’arbre est dans la

crotte de l’éléphant) à « moabi », ce géant de la forêt tro-picale humide d’Afrique qui dépasse la canopée. De bas en haut, les photos explorent l’Arbre, le rendent familier et invitent à participer à l’ambition pédagogique du réalisa-teur qui souhaite mobiliser par la connaissance et l’émer-veillement. Il déclare d’ailleurs avoir conçu son film comme « un devoir moral et artistique ». Son site Wild-Touch présente quatorze vidéos pédagogiques pour promouvoir son combat. Peut-être fera-t-il partie des « grandes figures féminines et masculines de l’engagement scienti-fique, humanitaire » qui permettront de « développer une conscience citoyenne et écologique », selon les préconisa-tions des programmes d’EMC.

La promesse écologique est tenue par l’ima-gier « Ma petite forêt », imprimé avec des encres végétales sur du carton 100 % recy-clé. Au-delà de l’objet, l’album présente les éléments de l’écosystème forestier -flore et faune- en faisant l’inventaire des animaux

qui y ont élu domicile. Le bestiaire est décliné en couleur ocre, pour ce « livre 100 % nature ».

L’album « Une forêt » est un plaidoyer artis-tique pour préserver la nature. Au début, les hommes remplacent les arbres qu’ils abattent, mais leur avidité les conduit à construire une ville à la place de la forêt. Une ville irrespirable, avec un air si lourd

qu’une tempête se déclenche. Il pleut si fort que la ville est emportée, sauf un petit arbre qui donne naissance à… une forêt. Le message, en forme de cercle vertueux, est illustré à l’encre et aquarelle, par petites touches en camaïeu de vert pour les arbres, tous différents ; au trait graphique et coloré lorsqu’il s’agit de la ville, au milieu de laquelle sont cachés les gratte-ciels les plus hauts du monde.

Pour les enfants du continent africain et pour tous ceux qui mènent combat au service des arbres de la planète, des droits de la femme et de la liberté, la Kenyane Wangari Maathai est une figure féminine de l’engagement. Née en 1940, première femme africaine diplômée en

biologie, elle met ses connaissances à profit pour créer le « Mouvement de la ceinture verte » en 1977, afin de replan-ter des arbres au Kenya, contre l’avis du dictateur au pouvoir. Elle fait de la prison à diverses reprises et, à la faveur de nouvelles élections, devient ministre déléguée à l’environne-ment, en 2002. En 2004, elle reçoit le Prix Nobel de la Paix « pour sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix ». Elle décède en 2011. Son action, soutenue par les Kenyanes, aura contribué à planter plus de trente millions d’arbres en 16 ans, pour prévenir l’érosion du sol. L’album « Wangari Maathai, la femme qui plantait des millions d’arbres », lui rend hommage.

Christine Houyel

Petite bibliographie pour « Vivre auprès de mon arbre »� « Arbres »,

collectif, ill. D. Moreau, Donner à Voir, 5,50 euros. Voir également sur le site de l’association « Donner à voir » l’exposition itinérante « Arbres » (poèmes et photos).

� « Je dors parfois dans les arbres », P. Vincensini, ill. H. Galeron, MØtus, 10 euros

� « Auprès de mon arbre », B. Broyart, la maison est en carton, 16 euros

� « Till », B. Belin, images V. Archeno, Actes-Sud, 23 euros

� « Il était une forêt », L. Jacquet, Actes-Sud junior, 6,50 euros Site Wild-Touch : http://www.wild-touch.org/

� « Ma petite forêt », K. Wiehle, Hélium/Actes-Sud, 7,50 euros

� « Une forêt », M. Martin, Circonflexe, 13,50 euros

� « Wangari Maathai, la femme qui plantait des millions d’arbres », F. Prévot, ill. A. Fronty, Rue du Monde, 17,50 euros

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L’enfant lionUne Afrique de légende pour entrer dans des problématiques actuelles. Ce film de Patrick Grandperret de 1992 (durée 1h26), inspiré du roman de René Guillot « Sirga la lionne », est programmé cette année dans le cadre du Ciné-Lecture organisé par l’OCCE d'Indre-et-Loire. Il s’adresse aux élèves du cycle 3 et du collège.

Deux enfants africains, Oulé et son amie Léna, sont vendus comme esclaves à un puissant seigneur des hautes terres. Léna raconte...Au village de Pama, sur les terres de Baoulé, hommes et lions vivaient en paix, les premiers sous la protection des seconds. Le même jour naquirent Oulé, fils du chef Moko Kaouro, et Sirga, fille de Ouara, la reine des lions. La brousse décida qu’ils seraient frère et sœur...Le tournage de l’enfant lion dura vingt-cinq semaines, éta-lées sur une année et en quatre fois, au gré des conditions climatiques dans différents pays : le Zimbabwe pour les grandes scènes d’animaux, le Maroc pour le palais du prince proche de Marrakech, le Niger pour la scène du marché aux esclaves, et surtout la Côte d’Ivoire où le village fut entière-ment construit et dont sont originaires les deux enfants interprètes du film.Un dresseur, Thierry Leportier, a fourni et dirigé les sept fauves qui ont permis le tournage dans un pays qui ne compte plus aucun lion.L’enfant lion est une fable, et comme toutes les fables elle a un caractère universel et intemporel. Si l’on fait abstrac-tion du contexte géographique, il s’agit du parcours initia-tique de deux enfants capturés par des forces qui les

dépassent. Confrontés à l’arbitraire et à la violence, ils restent déterminés à recouvrer leur liberté, à faire valoir leurs droits en s’appuyant sur leur solidarité et leur intelli-gence. Comme dans d’innombrables contes ils seront aidés par des puissances bienfaisantes qu’ils sont seuls à pouvoir convoquer grâce à leur pureté.De nombreux liens peuvent être établis avec d’autres œuvres pour la jeunesse, comme Le roi et l’oiseau (film de Paul Grimault sur un scénario de Prévert), Kirikou (Ocelot), L’œil du loup (Pennac), Histoires comme ça (Kipling), de nombreux contes africains ou le conte Hansel et Gretel, mais aussi pour les adultes, comme L’alchimiste de Cohelo ou Le lion de Kessel.René Guillot (1900-1969), l’auteur de « Sirga la lionne » (1951), a consacré la plus grande partie de son œuvre à la littérature jeunesse. C’est en exerçant le métier de profes-seur de mathématiques en grande partie en Afrique qu’il s’est intéressé au monde animal et aux sociétés humaines qu’il pouvait côtoyer. Il publie un recueil de contes africains dès 1933. En 1964, René Guillot a reçu le prix Hans Andersen et reste le seul Français à bénéficier de cette distinction.Les pistes de travail sont innombrables, autour des droits des enfants, de l’esclavage, de l’écologie, des approfondisse-ments concernant les modes de vie au-delà des stéréotypes que présente le récit fabuleux, de l’analyse des paysages, de la faune, de la végétation et du climat en relation avec le contexte géographique. La filmique de Grandperret mérite également une analyse poussée, avec la possibilité d’établir un lien et une comparaison avec le récit de René Guillot dont est tiré le scénario. On peut également s’intéresser aux musiques d’Afrique (Salif Keita joue le rôle du griot et a composé la bande son).

Gilles Petitjean

On consultera avec intérêt la sitographie réalisée par l’OCCE de l’Ain pour son action Ciné-Lecture sur http://www.occe.coo-p/~ad01/spip.php?article85

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L’association départementale OCCE du Lot-et-Garonne propose à ses coopératives scolaires une aventure d’écriture coopérative avec le réalisateur Fred Nicolas, à partir de son scénario de Max et Lenny, coécrit avec François Bégaudeau.

Se mobiliser pour les valeurs de la République

Le réalisateur Fred Nicolas accepte de faire vivre une aven-ture d’écriture coopérative avec des jeunes mobilisés par l’Association départementale OCCE du Lot-et-Garonne, sur son film Max et Lenny.

� Condition première : créer un partenariat de travail avec une ou plusieurs salles de cinéma, et des établissements scolaires. Les élèves de ces derniers pourront, en aval, découvrir l’œuvre cinématographique sur grand écran. Il sera évidemment utile, pour mettre en appétit, de diffuser la bande annonce. Dans le numéro précédent d’A&E, nous vous avons encouragé à faire partager ce regard positif sur le combat de deux jeunes filles des quartiers nord de Marseille pour refuser un déterminisme aliénant.

� Fred Nicolas, pour des jeunes intéressés par sa démarche cinématographique, met à disposition son scénario et la communication qu’il en a faite pour décider son producteur.

� UN EXEMPLE D’ATELIER DE TRAVAIL : partir du vidéogramme et écrire coopérativement le scénario. Echanger ensuite sur les choix faits…ou le contraire, concevoir le story-board à partir du scénario et échanger (projet possible à partir du cycle 3).

Extrait du scénario

Ext. Jour, cité Consolat, générique.

Le soleil est bas, les ombres des immeubles s’étirent au sol, des

papiers, des plastiques volent dans un tourbillon entre deux

tours alors qu’une musique résonne contre les immeubles : Bob

Marley, « Running Away ». Des bruits de pas qui courent

claquent dans le lointain en se rapprochant et soudain une sil-

houette déboule d’un passage entre les immeubles, une

capuche sur la tête.

30 juin 2012, version 17

extraits des notes de Fred Nicolas

Marseille… Dans les quartiers du nord, rien n’est joli ou pitto-

resque. Les gens vivent dans une précarité totale. Ici, l’accent

ne chante pas, il crie, et c’est un appel au secours. L’élément

déclencheur de l’écriture du scénario a été ma découverte de

la musique de Keny Arkana et de ses textes acérés qu’elle rap-

pait dès l’âge de 14 ans. Le fait qu’elle soit une fille qui fait

entendre une voix différente, là où les filles n’ont pas souvent

droit au chapitre, m’a donné l’envie de raconter une histoire de

filles.… Je veux filmer au plus près et sans pathos l’essence

des émotions, l’énergie des personnages, le trouble d’un senti-

ment, la poésie de la vérité. Je chercherai l’ombre et les contre-

jours, les contrastes. Comme ceux qui existent entre les lieux où

vont nous plonger les déambulations de Max et Lenny ; le

monde invisible de la banlieue de Marseille, poche de précarité

presque autonome, et celui, bien plus doux, des criques enso-

leillées et des quartiers résidentiels.

� D’autres Associations départementales OCCE intéressées pourront se joindre à l’AD OCCE 47 : ces associations rece-vront les modes de contacts avec le réalisateur et les docu-ments intégraux qu’il nous met à disposition. Elles prospec-teront auprès des établissements ou des conseillers pédago-giques, et auprès des salles de cinéma pour monter un projet partenarial. Je répondrai volontiers aux questions pour aider aux montages de projets.

Bernard Clerc ([email protected] )

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Le voleur de chiens

Le Congrès national ANCP*, qui se tenait les 21, 22 et 23 mai 2015 aux Eyzies de Tayac, a été comme chaque année l’occasion de décerner le prix du concours d’auteurs pour la jeunesse des conseillers pédagogiques. Livre lauréat 2015 : Le voleur de chiens de Guy Jimenes**. A découvrir !

Guy Jimenes nous a gardé un chien de sa chienne...« Les semaines qui ont suivi ont été carrément géniales. Je m’occupais bien de mon chien. On l’avait fait tatouer et vacciner. Il y avait des réserves de croquettes et de boîtes de pâtée dans le garage. Et tout un tas de jouets en plas-tique, des balles et de faux os en cuir à ronger. On lui en donnait aussi des vrais de temps en temps.Les deux chiens se sont repérés les premiers. J’ai lâché Nouky. Entre les arbres, j’ai aperçu Renaldo. Je n’ai pas tout de suite vu Popeye, mais son maître s’est penché, sans doute pour le détacher aussi, et le chien a déboulé. Il a tourné autour de Nouky. Je me suis approché de Renaldo.- Ils font connaissance, ai-je dit d’un ton que je m’efforçais de rendre neutre.- Ils se connaissent déjà, a-t-il corrigé. »

Ces extraits du livre lauréat évoquent les relations entre « les meilleurs amis de l’homme » et leurs maîtres. Le prix 2015 plaira aux enfants car il leur offre une histoire acces-sible, écrite de manière fluide et dans une langue de qualité, parfois au style imagé, notamment quand le style direct nous rappelle le fossé entre langage châtié et langage cru.Cette histoire d’amitié contrariée entre deux garçons, dou-blée d’une histoire de chiens face à de jeunes maîtres pleins de maladresse, nous confronte à des sujets tels que le vol, l’attachement à un animal, les problèmes d’élevage clandes-tin, les combats d’animaux interdits, les cobayes de labora-toires…

Cependant, les deux chiens, Nouky et Popeye, ne sont que prétextes à l’auteur pour qu’il nous entraîne dans les par-cours différents de deux jeunes adolescents qui n’hésitent pas à affirmer leurs différences de points de vue avec ceux des adultes…

Ces sujets ne sont qu’effleurés puisque ce sont prioritaire-ment les aventures de Nouky et Popeye, les deux labradors nés le même jour mais aux destins différents, que les lec-teurs découvriront prioritairement. Cependant, le choix de Guy Jimenes, auteur de littérature de jeunesse averti, est d’amener le lecteur à se questionner sur le sens que chacun peut donner à ses actes.

« Selon que vous serez puissant ou misérable,Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. » écrivait Lafontaine dans les animaux morts de la peste. Selon que vous serez adopté dans la lumière ou dans la clan-destinité, Vous serez animal de compagnie ou vous connaîtrez « une vie de chien ».

Sans être moraliste, le roman de Guy Jimenes nous ques-tionne sur notre capacité à comprendre ou à tenter d’expli-quer certains choix effectués par d’autres, à sortir de notre propre aveuglement et à faire preuve de clémence. Un bien bel ouvrage pour un auteur déjà très bien installé dans le paysage de la littérature de jeunesse.

Daniel FeurteyResponsable du prix littéraire de l’ANCP

*Association Nationale des Conseillers Pédagogiques.

**Le voleur de chiens : Guy Jimenes, illustré par Ewen Blain - Sedrap jeunesse, collection Lecture en tête, 2015. 6,30 €.

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