Coopérateur | Octobre 2015

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Maltraitance animale : appel à l’unité de l’industrie Pommes de terre Laurentiennes, avant-gardistes ! OCTOBRE 2015 cooperateur.coop VOTRE VIE, VOS AFFAIRES ANXIEUX ? Vous n’êtes pas seul !

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Maltraitance animale : appel à l’unité de l’industrie

Pommes de terre Laurentiennes, avant-gardistes !

OCTOBRE 2015 cooperateur.coop VOTRE VIE, VOS AFFAIRES

ANXIEUX ?Vous n’êtes pas seul !

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3COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

VOTRE VIE VOS AFFAIRES

SOMMAIREÉDITION OCTOBRE 2015

* For English version, please visit our website at www.cooperateur.coop/en

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GESTION EXEMPLAIRE, Techniques avant-gardistes

4338

COMMERCIALISATION À LA FERME

90 ansFerme Saguenayenne

Maltraitance des animaux

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Site Web : www.cooperateur.coop

Version virtuelle : www.cooperateur.coop/fr/magazine

AFFAIRES AGRICOLES20 Ferme laitière Saguenayenne, établir la relève

23 Ferme Flamande — prix à l’agroenvironnement

24 L’EFFET BOEUF Bruno Langlois*

26 Une journée pâturage à la ferme Brylee

28 Mise à jour du modèle de l’ASRA

30 Pommes de terre Laurentiennes : avant-gardistes !

34 Nouveautés de maïs ELITE

36 Nouveautés de soya ELITE

38 La commercialisation à la ferme

44 Maltraitance animale : appel à l’unité de l’industrie

AFFAIRES ÉCONOMIQUES47 ZOOM AFFAIRES

48 L’impact de l’aquaculture sur l’agriculture

50 FAITS ET GESTES Vincent Cloutier*

VIE COOPÉRATIVE5 ENTRE NOUS Denis Richard*

6 MA COOP

8 PAUSE PENSÉE Colette Lebel*

10 Citadelle fête ses 90 ans

VIE AGRICOLE12 Décoration —

l’importance de consulter tôt

14 Anxieux ? Vous n’êtes pas seul !

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VOLUME 44, NO 8 | OCTOBRE 2015

ABONNEMENT (version papier)

Contactez Nadine Kadé 514 384-6450, poste 3710 [email protected] complétez le formulaire à l’adresse suivante :www.cooperateur.coop/fr/abonnement

Coût d’abonnement (taxes incluses)

Membres : 11,29 $/année (défrayé par la coopérative locale)

Non-membres :1 an : 25 $ 3 ans : 55 $ 2 ans : 40 $ À l’étranger – 1 an : 90 $

CoopérateurC.P. 500 Station Youville, Montréal (Québec) H2P 2W2Tél. : 514 384-6450 – Téléc. : 514 858-2025 – Courriel : [email protected]

À VENIR DANS VOTRE MAGAZINE

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www.cooperateur.coop

Le Coopérateur est publié neuf fois l’an par La Coop fédérée. Il est l’outil d’information de la coopération agricole québécoise.

Éditeur Jean-François Harel

Directrice et rédactrice en chef Guylaine Gagnon 514 858-2146 (ligne directe) [email protected]

Rédacteur en chef adjoint Patrick Dupuis, agronome 514 858-2044 (ligne directe) [email protected]

Adjointe à l’édition Marie-Hélène Gaudin 514 384-6450, poste 3513 [email protected]

Révision Georges O’Shaughnessy enr.

Ont collaboré à ce numéroJérôme Auclair, Valérie Chabot, Vincent Cloutier, Hélène Cossette, Patrick Dupuis, Étienne Gosselin, Jean-Sébastien Laflamme, Bruno Langlois, Colette Lebel, Nicolas Mesly, Céline Normandin, Denis Richard, Jean Tanguay

Conception graphique Service de la création, La Coop fédérée

Graphiste Pierre Cadoret

Webmestre Ricardo Silva

Photographies et illustrations Normand Blouin, Pierre Cadoret, Martine Doyon, Patrick Dupuis, Étienne Gosselin, Claude Grégoire, Louis Jacob, Marc Lajoie (MAPAQ), Nicolas Mesly

Page couverture Igimage –Pierre Cadoret

Impression Interweb Inc.

Les photos, illustrations et textes publiés dans le Coopérateur et sur le site Internet de La Coop fédérée ne peuvent être réutilisés sans autorisation.

Publicité Pierre Grinsell | 450 661-8200 [email protected]

Correspondance Retourner toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada à :

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Tél. : 514 384-6450 | Téléc. : 514 858-2025 Courriel : [email protected] Site web : www.cooperateur.coop

Poste-publications, convention n° 40628621Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Québec

GestionVos équipements maximisent-ils votre rentabilité ?

Grandes culturesFerme Olofée, contre vents et marées

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LA SAISON AGRICOLE n’aura pas été aussi catastro-

phique que le printemps et le début de l’été le

laissaient entrevoir. Il y a eu plus de pluie que nous

l’aurions souhaité, mais finalement le temps chaud

nous a rattrapés, et il semble que généralement la

qualité et les rendements seront au rendez-vous.

C’est tant mieux, et on va le prendre pendant

que ça passe, parce que notre environnement

économique est comme notre environnement

physique : il y a des jours de beau temps, mais

aussi parfois les nuages s’accumulent.

L’écho que j’ai quand je me promène, c’est

qu’après quelques années d’embellie, la situation

financière des producteurs agricoles est en train

de se resserrer. Le prix du lait est à la baisse, et

l’épée de Damoclès qui pèse sur la gestion de l’offre

contribue certainement à ce climat morose.

Les marchés du grain et du porc ont également

une inquiétante tendance à la baisse. De plus, les

coupes budgétaires des dernières années dans

l’assurance stabilisation des revenus agricoles se

font sentir et n’ont rien de rassurant pour l’avenir.

Nous sommes tous des entrepreneurs agricoles

habitués à gérer les risques climatiques et de

marché, mais les marchés agricoles sont réputés

pour leur grande volatilité. C’est pourquoi la majorité

des pays mettent en place différents modes de

soutien à la production dans le but de mitiger ces

risques et de sécuriser les revenus des producteurs.

Depuis une vingtaine d’années, on constate

une tendance généralisée à la diminution des

soutiens de l’État à l’agriculture dans les pays

économiquement avancés et une tendance à leur

augmentation dans les pays émergents.

Cette recherche d’un équilibre au niveau

mondial est sans doute souhaitable à long terme,

mais à court et à moyen terme, elle demande du

doigté de la part des gouvernements, pour que

l’agriculture de leur pays ne soit pas déstructurée.

L’agriculture a de tout temps été source de

richesse, mais pas toujours pour ceux qui la prati-

quaient, et l’histoire nous montre que le prince

était souvent aveugle à l’apport de ceux qui le

nourrissaient. Encore aujourd’hui, le secteur agro-

alimentaire canadien est l’un des plus importants

créateurs de richesse : il génère le huitième des

emplois au Canada et contribue par ses expor-

tations à la balance commerciale du pays.

Cette contribution ne semble pas être prise à

sa juste mesure par bon nombre de nos dirigeants.

Le plus récent exemple émane une fois de plus de

la Commission de révision permanente des

programmes (également appelée commission

Robillard), qui, après avoir attaqué sans succès le

Programme d’assurance stabilisation du revenu

agricole l’an dernier, s’en prend maintenant au

Programme de crédit de taxes foncières agricoles.

Nos fermes et nos terres sont des outils de pro-

duction et de création de richesse. Il nous arrive

parfois de payer des terres au-dessus de leur valeur

agronomique pour des considérations stratégiques,

ce qui tend à faire monter leur prix. À moyen

terme, l’économie fait cependant son œuvre et ces

bulles spéculatives sont généralement corrigées.

Cela fait des années que les producteurs agri-

coles demandent une correction du Programme de

crédit de taxes foncières agricoles, qui constitue

un « bar ouvert » à la taxation municipale sans réelle

retombée pour le monde agricole. Le retrait de l’État

de ce programme après des années de laxisme

constituerait une injustice pour les producteurs

agricoles du Québec.

Partout en Amérique du Nord, les produc-

teurs sont soumis à des taux de taxation

distincts. Toute modification à ce pro-

gramme devrait tenir compte de ce que font

nos voisins et, notamment, s’inspirer de

l’Ontario, où la taxation foncière des produc-

teurs agricoles est plafonnée au quart du taux

résidentiel.

À trop en demander au secteur agri-

cole, et en lui imposant trop de nou-

velles contraintes, trop rapidement,

on met à risque un des moteurs éco-

nomiques du Canada. Et, on le sait,

les incertitudes ne sont pas propices

à l’investissement et au développement

économique.

C’est une question de gros bon sens et

de doigté !

Sur ce, je nous souhaite une bonne

récolte.

ENTRE NOUS

UNE QUESTION DE DOIGTÉ DENIS RICHARD, PRÉSIDENT DE LA COOP FÉDÉRÉE, [email protected]

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JOURNÉE PARCELLES À

LA FERME JEAN‑GUY PROULXPlus de 225 personnes ont participé à la Journée parcelles 2015, tenue à la Ferme Jean-Guy Proulx, à Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud. Cette activité a été mise sur pied par le Centre de services de Québec/Chaudière-Appalaches (CSQCA), qui regroupe les coopératives Agrivoix, Langevin, Rivière-du-Sud et Unicoop. Durant cette journée, on a présenté plusieurs variétés de maïs-grain, de maïs-ensilage et de soya. On a aussi montré des essais de fertilisation de même que des parcelles de céréales (orge, blé, avoine), de plantes fourragères et de cultures de remplacement.On a tenu des ateliers sur la culture de maïs sous plastique et intercalaire, sur les dates et les taux de semis, et sur l’usage des mycorhizes dans les céréales et les plantes fourragères. La société Héli-Mistral, partenaire du CSQCA, a fait connaître ses services, notamment l’épandage aérien de pesticides et l’application de chaux dans les érablières. Enfin,

1 l’entreprise New Holland a fait la démonstration de plusieurs équipements, comme la sous-soleuse Great Plains, guidée par GPS, et une nouvelle presse à balles rondes.

ANDRÉA RENAUD, NOUVELLE CONSEILLÈRE EN ÉDUCATION COOPÉRATIVE Colette Lebel, directrice des affaires coopératives à La Coop fédérée, est heureuse d’annoncer la nomination d’Andréa Renaud au poste de conseillère de ce même service.Comptant sept ans d’expérience en gestion et gouvernance d’entreprises coopératives, Andréa Renaud a été à l’emploi de SOCODEVI, du Conseil canadien de la coopération et de la mutualité et, plus récemment, de la Fédération des caisses Desjardins. Elle s’est fait remarquer par ses habiletés de communication, son dynamisme et son esprit d’équipe. Diplômée en psychoéducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Mme Renaud est aussi titulaire d’une maîtrise en gestion des coopératives et des collectivités de l’Université de Sherbrooke.

POUR LES BONNES PRATIQUES DANS LE PORC Pour connaître les bonnes pratiques afin de procurer un confort accru à vos porcs, allez à : cooperateur.coop/videos. Vous pourrez visionner une vidéo dans laquelle Mélanie Dinelle, productrice de porcs à Saint-Rémi, présente ses façons de faire. Marie-Josée Turgeon, agronome et coordonnatrice à la qualité du porc chez Olymel, nous y fait également bénéficier de son expertise. Selon elles, le confort des porcs, c’est simple et rentable !

INVESTISSEMENT DE 300 000 $ DANS LE CENTRE DE GRAINS DE L’ISLE‑VERTELa Coop Agriscar et ses 330 membres sociétaires ont investi, le printemps dernier, plus de 300 000 $ dans leur centre de grains de L’Isle-Verte, qui avait été ravagé par un incendie en septembre 2014. Ce centre a une capacité d’entreposage de plus de 15 000 tonnes métriques. Grâce à cet investissement, La Coop Agriscar a pu renouveler ses équipements

(principalement la balance à camions et le séchoir à grains). « Je suis heureux de pouvoir contribuer à maintenir cette fierté régionale : celle d’un centre de grains concurrentiel et efficace, au cœur de la région de Rivière-du-Loup et des Basques », dit Marco Dumais, directeur général de La Coop Agriscar.

ATELIER DE TRAVAIL DE SOL ORGANISÉ PAR NUTRINOR

Le jeudi 6 août, la coopérative Nutrinor organisait un atelier de travail de sol à la Ferme Boily, à Saint-Bruno. De la machinerie en provenance de cinq concessionnaires était à l’essai, notamment des déchaumeuses, des chisels, des vibroculteurs et des charrues pour labour vertical. Le tout était accompagné des explications du professeur-chercheur Vincent Lamarre, de l’ITA (campus de La Pocatière). Plus de 160 personnes ont répondu présent. Un événement couronné de succès qui en était à sa première édition… et probablement pas à sa dernière !

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selon WardsAuto. Pas étonnant que les camions Ram détiennent le taux de fi délité le plus élevé parmi tous les camions pleine grandeur. Le Ram 1500 2015, le camion le plus écoénergétique de l’histoire1, et le Ram Heavy Duty. Avec un légendaire moteur turbo diesel CumminsMD ou HEMIMD,

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tiers concurrents au Canada pour les années modèles 2008 à 2013 pour les camions neufs pleine grandeur.

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8 COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

L’humain est aussi un travailleur, un producteur, un entrepreneur, et c’est de là, bien plus que de la consommation, qu’il tire son bonheur.

ON NOUS A DIT pendant longtemps que le

client avait toujours raison et que c’était lui,

ultimement, qui détenait le véritable pouvoir.

Et c’était vrai. Mais quand on parlait de « client

roi », on exagérait un peu. L’expression relevait,

autrefois, bien plus d’un slogan commercial

que d’un fait établi. Mais la donne a changé.

Aujourd’hui, l’expression prend tout son sens.

À l’ère du consommateur bien branché et des

mégadonnées, oui, le client est vraiment le

roi. On déroule le tapis rouge sous ses pieds :

« Juste pour vous, voici une offre personna-

lisée qui saura répondre à vos aspirations. »

Touché !

Et puis, à grands coups de marketing, on

vous entraîne dans une « expérience client »

inédite. On vous chouchoute. Vous êtes l’objet

d’une énergique et coûteuse opération de

séduction. (Vous en oubliez même qu’à la fin,

c’est toujours vous qui payez.) Je pense à H&M,

qui, l’an dernier, a ouvert à New York son plus

grand magasin au monde. Cinq mille mètres

carrés de surface. Une mezzanine numérique

y a été aménagée, où de confortables canapés

et des tablettes tactiles sont généreusement

proposés. Une fois connecté, vous êtes invité

à monter sur un podium numérique, où vous

pouvez vous filmer (avec les produits H&M,

évidemment). Puis, vous pouvez partager la

vidéo sur plusieurs écrans dans le magasin

ainsi que sur les réseaux sociaux, histoire de

propager la bonne nouvelle : vous êtes le roi

du moment !

J’ai parfois l’impression qu’on nous prend

pour des imbéciles.

Tant mieux si l’avènement des mégadon-

nées permet aux marchands de mieux me

connaître et de me faire des offres person-

nalisées… mais restons de bon goût. Il y a

beaucoup de futilité dans l’air, et d’ailleurs je

remarque que ces offres – trop nombreuses –

qu’on m’achemine ne sont pas toujours

pertinentes. Normal, les mégadonnées fonc-

tionnent par algorithmes. En essayant de

m’analyser, on me fractionne pour me déposer

dans différentes catégories de consomma-

teurs. Ce n’est pas sans risque d’erreur. Et

puis, je ne suis pas dupe. Tout ce qu’on veut,

c’est me vendre quelque chose. Il faut faire

tourner l’économie, non ? Alors consommons.

Je me désole pourtant de ce modèle éco-

nomique qui glorifie l’humain dans son rôle

de consommateur boulimique, capricieux et

frivole. Il se trouve que l’humain est aussi un

travailleur, un producteur, un entrepreneur,

et que c’est de là, bien plus que de la consom-

mation, qu’il tire son bonheur. Heureusement,

il existe des modèles d’entreprise qui consi-

dèrent l’humain dans sa globalité, en lui

reconnaissant plusieurs rôles. Je parle bien sûr

des coopératives.

Il y a les coopératives de consommateurs,

où les propriétaires sont aussi les clients; les

coopératives de travailleurs, où les proprié-

taires sont aussi les employés; les coopéra-

tives de producteurs, où les propriétaires sont

aussi ceux qui produisent… Voilà qui équilibre

et tempère les comportements. Voilà qui

permet de prendre un peu de distance et de

retrouver une certaine objectivité, en offrant

des expériences multiples.

Nous pouvons toujours être des consom-

mateurs capricieux, voire des « clients rois »,

mais soyons avisés. Allons voir l’autre côté de

la médaille. Car bien des produits et services

qui nous sont proposés n’apportent fina-

lement que de petits plaisirs fugaces, qui, bien

souvent, ne font pas le poids contre les coûts

cachés qu’il nous faudra, tôt ou tard, assumer.

Faire le choix de coopérer, c’est donc se

donner une nouvelle porte d’accès à l’infor-

mation. C’est accepter de jouer différents rôles

et de porter un jugement éclairé sur la qualité

du système économique que l’on s’est donné.

Cela devrait aussi signifier prendre sa part de

responsabilités dans l’administration des

affaires. Pour notre bien commun.

Nous pouvons toujours être des « clients

rois », mais ne nous leurrons pas : même les

rois ont des responsabilités.

PAUSE-PENSÉE

L’AUTRE CÔTÉ DE LA MÉDAILLECOLETTE LEBEL, AGRONOME ET DIRECTRICE DES AFFAIRES COOPÉRATIVES, LA COOP FÉDÉRÉE

[email protected]

Page 9: Coopérateur | Octobre 2015

Que ce soit pour vous ou pour un parent proche, se préparer à la mort n’a rien de facile. C’est pourquoi nous vous accompagnons à travers toutes les étapes du deuil, en commençant par le dépôt de vos volontés funéraires, les documents de planification et les arrangements funéraires préalables. Parlons-en maintenant ensemble.

P R É S E N T À C H A Q U E

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« Nous avons discuté avant pour que tout se passe bien après. »

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10 COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

Citadelle est riche. Riche d’un chiffre d’affaires record de 113,1 millions $ et d’une ristourne de 1,9 million $ en 2014-2015, mais surtout riche d’une histoire nonagé-naire synonyme d’enracinement dans le milieu, d’expansion et d’innovation constante. « Citadelle, c’est un maillon de notre économie qui rayonne à travers le monde », déclare d’ailleurs Mario Fortin, maire de Plessisville, autoproclamée « capi-tale mondiale de l’érable ».

Pour souligner le 90e anniversaire de la coopérative, Citadelle a d’abord sondé ses 1856 membres pour s’enquérir de la meil-leure façon de célébrer. On a enregistré un mirobolant taux de réponse de 85 %. Visi-ter les installations a été le choix le plus populaire. « Nos producteurs ont rarement l’occasion de visiter nos usines. D’ordinaire, seuls les nouveaux membres peuvent enfi-ler le bonnet et constater l’excellence de nos actifs lors d’une journée de formation », signale le directeur général de Citadelle, l’ingénieur forestier Martin Plante.

Des navettes permettaient de relier l’usine de produits de l’érable de Plessisville et l’usine de transformation de canneberges d’Aston-Jonction, où l’on congèle-décon-gèle, infuse avec du sucre et sèche les fruits rouges. On pouvait même visiter les bureaux administratifs de Citadelle, en

Dans 10 ans, la déjà légendaire coopérative Citadelle fêtera ses 100 ans. Le 29 août dernier,

l’entreprise a toutefois offert une répétition convaincante des célébrations à venir

à l’occasion de son 90e anniversaire. La journée portes ouvertes avait des allures

de grand rassemblement familial.

La forteresse DE L’ÉRABLE

90 ansFÊTE SES

passant par des bâtiments aux tortueuses ramifications qui témoignent de l’âge véné-rable et des expansions continuelles de cette coopérative. Tout au long du parcours balisé dans les usines, des administrateurs et des employés (incollables) répondaient aux questions des visiteurs (captivés) et des journalistes (fureteurs) !

Plus de 1000 personnes ont participé à l’évènement – contre 750 il y a 15 ans, lors du 75e anniversaire –, sans parler des quelque 140 cyclistes du Défi vélo La Coop, qui ont profité du grand chapiteau pour venir se ravitailler à l’heure du dîner.

ÉQUIPÉE POUR L’AVENIRArmée de multiples certifications de qualité, de salubrité, de traçabilité et de provenance, Citadelle dispose des outils pour poursuivre son chemin dans les trois secteurs qui sont les siens : les produits de l’érable, du miel et de la canneberge, des produits complémentaires qui garnissent bien le portefeuille de plus de 800 produits de la coopérative, selon Martin Plante.

La certification Fair for Life, qui englobe plusieurs normes encadrant les pratiques sociales et le commerce équitable des pro-duits alimentaires, est notamment un atout que Citadelle met en avant auprès de ses clients sensibles au développement durable,

« L’image que projettent nos produc-teurs nous aide à mieux promouvoir qui nous sommes et à bâtir l’entreprise », indique Michel Labbé, président de Citadelle et acériculteur. Nommément, ce sont ici Marie-Pier Béliveau (Sainte-Sophie-d’Halifax), Yves Gauvin (Saint-Hyacinthe) et Nathalie Côté (Notre-Dame-de-Lourdes).

TEXTE ET PHOTOS D’ÉTIENNE GOSSELIN, AGRONOME, M. SC

| VIE COOPÉRATIVE

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11COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

aux pratiques d’affaires respectueuses de l’environnement et à l’impact social des entreprises dans leur milieu. « Nous avons fait le pari de pousser jusqu’au bout nos démarches pour obtenir cette certification, ce qui a demandé cinq ans de travail. Fina-lement, en 2014, notre produit est devenu le premier certifié en Amérique du Nord, révèle le directeur général. On pensait au début que c’était une mode, mais c’est aujourd’hui une certification que nous uti-lisons fièrement et que recherchent de plus en plus nos clients. » Le partage des profits de l’entreprise coopé rative sous forme de ristournes, qui stimulent la vitalité des fermes acéricoles familiales, est notamment une caractéristique qui a milité en faveur de l’obtention de cette certification.

« Nous jouons la carte de la coopération à fond, dit pour sa part Michel Labbé, président de Citadelle et acériculteur de Bellechasse. Nos certifications sont autant de symboles de qui nous sommes et de nos valeurs profondes. »

RACONTE-MOI CITADELLE

La jeune historienne et muséologue Caroline Fortin, sous la supervision de Jean-Marie Chouinard et de Yolande Pelletier, tous deux de Citadelle, a recensé, classé et sélectionné pendant un an le meilleur des archives de Citadelle, de sociétés d’histoire et d’organismes parapublics sur le thème de l’érable. Le résultat : une exposition en six thématiques, dans laquelle se côtoient panneaux informatifs, bandes vidéos, objets anciens et bon nombre d’anecdotes richement relatées. Avis aux intéressés : l’exposition est installée jusqu’à la mi-octobre au Carrefour culturel et touristique de la MRC de L’Érable, à Plessisville.

DE DESJARDINS À CITADELLE

Au printemps 1925, 102 producteurs des comtés de Dorchester et de Mégantic en ont assez d’accepter, impuissants, les prix dérisoires que des acheteurs états-uniens leurs proposent pour leur sucre d’érable. Ils forment donc officiellement une coopérative – Les Producteurs de sucre d’érable de Québec – qui deviendra en 1996 Citadelle, coopérative de producteurs de sirop d’érable. Cette initiative toute coopérative résulte du chef du Service de l’apiculture et de l’industrie du sucre d’érable du ministère de l’Agriculture du Québec, Cyrille Vaillancourt. Ce mythique personnage – il portera au fil de sa carrière les casquettes de journaliste, d’homme d’affaires, de sénateur ainsi que d’administrateur et de haut gestionnaire au sein de Desjardins – pousse donc l’idée d’une coop auprès des acériculteurs. L’homme ira même jusqu’à entreposer des produits de l’érable chez lui, à Lévis, dans son sous-sol, ce qui a fait de lui… le premier dépositaire de Citadelle !

Citadelle, coopérative de producteurs de sirop d’érable, réunit près de 2 000 producteurs de produits de l’érable, de miel et de canneberge qui ont à cœur de partager le meilleur de notre nature avec le monde entier.

NOUS SOMMES citadEllE

www.citadelle.coop

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1. Des quatre coins du Québec, les membres de Citadelle se sont déplacés en masse. Plus de 1000 d’entre eux ont participé à la journée portes ouvertes – contre 750 il y a 15 ans, lors du 75e anniversaire.

2. De tout temps, Citadelle a exporté sur les marchés étrangers, à commencer par un premier contrat de vente aux États-Unis, en 1927. « Aujourd’hui, 90 % de nos produits sont exportés dans près de 40 pays, ce qui évite de concurrencer nos membres qui approvisionnent le marché de détail local », explique Martin Plante.

3. Martin Plante, directeur général, et Michel Labbé, président. Le duo est unanime : Citadelle doit maintenir ses acquis et poursuivre un plan de croissance contrôlé, dans lequel l’innovation occupe une place centrale.

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TEXTE D’HÉLÈNE COSSETTE

Pour obtenir un résultat harmonieux, Isabelle St-Onge encourage fortement les gens à consulter un professionnel du design dès le début d’un projet d’autoconstruction ou de rénovation.

« C’est important, car tout est relié, estime la décoratrice. Le choix du revête-ment de sol va dicter celui des comptoirs, la peinture va guider le choix des rideaux, et ainsi de suite… »

« Ma formation me situe entre le design et la décoration », explique cette diplômée, cuvée 1989, du cégep Beauce-Appalaches en technique d’aménagement intérieur. « Comme je possède des notions d’archi-tecture, je m’occupe autant du côté fonc-tionnel que du look », tient-elle à préciser.

Lorsqu’on la consulte assez tôt dans le processus, elle peut suggérer certaines modifications à un plan de maison ou des-siner à main levée un croquis de rénova-tions, afin que les besoins des propriétaires soient parfaitement pris en compte.

À titre d’exemple, elle a récemment conseillé un autoconstructeur qui se demandait s’il devait fermer son vestibule ou se contenter du demi-mur prévu au plan initial. « Comme le canapé du salon allait être adossé à ce demi-mur, nous avons finalement opté pour la fermeture de l’entrée. Autrement, tous les manteaux des arrivants se seraient retrouvés sur le canapé, ce qui n’aurait été ni pratique ni esthétique », fait-elle valoir.

Cette spécialiste en aménagement inté-rieur peut également se rendre utile dans le choix des matériaux et des couleurs des revêtements extérieurs, de même que dans la sélection des luminaires, des couvre-planchers, de la robinetterie, des armoires de cuisine, etc. La boutique Inov qu’elle dirige propose d’ailleurs une belle sélec-tion d’accessoires décoratifs, de rideaux, de

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Consulter tôt pour unaménagement réussi

papiers peints et de meubles, en plus des matériaux (céramique, peinture, moulures, etc.) offerts dans les autres rayons.

« Nous pouvons réaliser un aménage-ment complet avec ce qu’on trouve ici », assure cette professionnelle qui offre aussi des services-conseils à domicile, à son compte, en dehors de ses heures de travail en boutique.

MAGASINER SA DESIGNERPar ailleurs, une designer ou une décoratrice se « magasine » comme tout autre type de conseiller, selon elle. « Il faut être à l’aise avec la personne choisie, car il s’agit souvent d’un projet d’envergure très personnel. »

Pour sa part, Isabelle St-Onge aime tra-vailler en complicité avec ses clients. « Je pose beaucoup de questions pour être en mesure de répondre précisément à leurs besoins », confie-t-elle.

Et contrairement à d’autres profession-nels qui se cantonnent dans un style, elle n’impose jamais ses goûts personnels aux clients. « Je ne crée pas un décor pour moi. Je le crée pour mon client, car c’est lui qui va y vivre », insiste-t-elle.

À preuve, elle ne suggère que très rare-ment le style anglais, qui est pourtant son favori. « C’est plus lourd comme style et moins attirant pour la plupart des gens. Je le garde donc pour moi ! » dit-elle.

Mais, quelle que soit la personne choisie au final, elle invite les gens à profiter au maximum de ses compétences. « Il faut nous utiliser à 100 %. Nous ne sommes pas là seulement pour la couleur ! » tient-elle à rappeler.

Isabelle compte à son actif 24 années d’expérience professionnelle, dont un peu plus de 2 comme gérante du Centre Déco Inov et du rayon peinture du centre de rénovation Unimat de La Coop des Cantons, à Saint-François-Xavier-de-Brompton. Au cours de sa carrière, elle a d’ailleurs livré plusieurs projets clés en main où elle agissait à la fois comme conseillère pour ses clients et superviseure des travaux.

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Anxieux ?Vous n’êtes pas seul !

S’ENFONCER ET S’EN SORTIR

À 25 ans, en pleine force de l’âge, Charles s’effondre près d’un de ses bâtiments de ferme. Incapable de se relever, il ressent une intense douleur à la poitrine. Est-ce une crise cardiaque ? Est-il en train de mourir ? Il est envahi par la peur et la panique.

C’était l’un d’une longue série de symptômes qui viendront confirmer, des années plus tard, qu’il souffre d’anxiété et du TDA.

Mais Charles est un bourreau de travail. Il mettra ces symptômes sur le compte de la fatigue et du surmenage, et continuera à bosser sans s’arrêter. Parfois jusqu’à 20 heures par jour. Il ne voit que le but à atteindre : développer l’entreprise. Père d’une jeune famille, producteur agricole, conseiller municipal, puis maire, le mot « excès » n’a jamais fait partie de son vocabulaire. Aujourd’hui, à 56 ans, il se confie à cœur ouvert.

LA FORCE DE L’ÂGEAu début des années 1980, à 20 ans, Charles se lance en affaires avec son frère. Ils achètent la ferme fami-liale de leurs parents. La situation économique est difficile, mais la banque ne les laisse pas tomber. Les deux frères travaillent d’arrache-pied pour remettre l’entreprise à flot, la faire grossir et en diversifier les activités. Les résultats sont au rendez-vous. Les finances se redressent et la production s’accroît.

Énergique, le regard allumé, volubile, Charles (nom fictif) nous confie combien il a souffert.

L’anxiété et le trouble du déficit de l’attention (TDA) ont profondément perturbé sa vie. Aujourd’hui, avec l’aide de sa famille et de professionnels de

la santé, il a retrouvé l’équilibre, physique et mental.

TEXTE DE PATRICK DUPUIS, AGRONOME

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En 1995, les deux frères se séparent. Charles et sa conjointe (il s’est marié à l’âge de 19 ans) deviennent associés. Mais leur vision du développement et de la gestion de l’entreprise est source d’intenses conflits. Résultat : le stress monte en flèche et le bonheur s’étiole.

L’ANXIÉTÉ« Plus j’avançais en âge, plus les symptômes d’anxiété, que j’ignorais à l’époque, se mani-festaient », dit Charles. Hypersomnie*, stress, fatigue, panique. Il ressent fréquemment d’intenses pressions à la poitrine. Épuisé, il n’en peut plus. Il consulte médecins et psychologues pour apprendre qu’il souffre du trouble d’anxiété généralisée. Il a 43 ans. Depuis, avec le soutien psychologique, la médication et l’amour de ses proches, Charles se réapproprie sa vie. En partie… car son insatiable appétit des grandeurs cachait un autre syndrome, qui colore sa vie depuis la petite enfance : le TDA.

L’ÉCOLE : LE GRAND DÉRANGEMENTÀ la petite école, Charles a du mal à se concentrer. Il n’est pas turbulent ni timide, et les profs l’aiment, mais c’est de justesse qu’il réussit. Être atteint du TDA n’affecte en rien l’intelligence. Au contraire : ceux qui en souffrent font preuve de beaucoup d’imagination et sont généralement très attachants.

Les personnes atteintes du TDA ont une carence de deux neurotransmetteurs : la dopamine et la noradrénaline. Des subs-tances qui, lorsqu’elles sont normalement présentes dans le cerveau, régularisent l’at-tention, modèrent les pulsions, aident à la motricité, maintiennent l’état de vigilance. Mais Charles l‘ignore. À l’école, l’absence d’intervenant psychosocial ne permet pas de déceler son état (on sait aujourd’hui que « 10 % des garçons de 6 à 11 ans ont des défi-cits d’attention ou sont hyperactifs** »).

Outre le sport, il a peu de centres d’in-térêt. La petite école ne répond pas à ses besoins, les cours d’éducation physique sont

inexistants. Tout change au secondaire. Le gymnase lui sera salutaire. Il s’y rendra tous les midis pour se défouler : culture phy-sique, jogging, haltérophilie. Puisque l’acti-vité physique intense stimule la sécrétion de dopamine et de noradrénaline, Charles retournera en classe physiquement épuisé, mais attentif et capable de suivre les cours. « Je me suis mis à triper sur l’école, dit-il. Et mes notes se sont améliorées. »

Mais à 17 ans, il abandonne ses études. L’agriculture le passionne et il ne peut attendre de mettre la main à la terre. « J’en mangeais ! » dit-il.

REVENIR À LA VIEC’est au début de la cinquantaine que les symptômes du TDA se font plus marqués. L’énergie lui manque. Il termine ses journées de travail exténué. Plus rien ne l’intéresse et il perd le goût de vivre. La situation est insoutenable.

Sa femme sonnera l’alarme en lui suggérant une lecture : Apprivoiser l’hype-ractivité et le déficit de l’attention. C’est la révélation. Il se reconnaît dans ce livre comme dans un miroir. Une vingtaine de symptômes confirment le diagnostic (perte de mémoire à court terme, inconfort dans la planification, difficulté de coor-dination, distraction, manque d’énergie, hypersensibilité émotionnelle et senso-rielle, nouveaux apprentissages pénibles, etc.). La sollicitude de sa famille lui sera d’un grand soutien.

Il consulte à nouveau et on lui prescrit du Ritalin. La réaction est immédiate et radicale. Sa capacité de concentration, sa curiosité et son goût pour l’innovation reviennent à des niveaux normaux. Charles renaît. Il a 53 ans.

Aujourd’hui, à 56 ans, sa vie a complè-tement changé. Avec sa femme et leur fils, il est à la tête d’une entreprise prospère. « Ç’a été du noir au blanc, dit-il. Je suis calme, je dors bien, mon rythme de vie est sain. Vous ne pouvez pas savoir comme je me sens bien. »  

* Trouble du sommeil qui se manifeste par une exagération du besoin de dormir.** Fondation des petits trésors de l’hôpital Rivière-des-Prairies.

Au Québec, une personne sur quatre (24,9 %) sera atteinte d’un trouble anxieux au cours de sa vie, indique l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Mais la majorité d’entre elles (60 %, selon Statistique Canada) ne demanderont jamais d’aide. Méconnaissance de la maladie, tabous, crainte d’être jugé : les raisons de taire sa souffrance sont multiples. En parler à ses proches ou à des professionnels de la santé donne de l’espoir et du réconfort, et fait prendre conscience, bien souvent, que l’on n’est pas seul.

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DES CONSEILS« Je crois que de nombreux producteurs aux prises avec un besoin incessant de prendre de l’expansion, dont l’entreprise est parfois surdimensionnée et qui ne suffisent plus à la tâche, peuvent s’interroger sur la pos-sibilité d’être atteints du TDA, dit Charles. Généralement, ceux qui le sont n’en ont jamais assez de croître et ne savent pas se contenter. Êtes-vous toujours insatisfait de votre état présent ? Est-ce une drogue de prendre de l’expansion ou d’acqué-rir un “joujou” ? Il est bon d’analyser ses comportements, de dresser une liste de symptômes, d’en parler à son médecin, car c’est d’une réelle maladie qu’il s’agit, c’est physiologique. »

C’est par ces mots que se conclut le livre La peur d’avoir peur, coécrit par Andrée Letarte, chef du Programme des troubles anxieux et de l’humeur de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM). Cet ouvrage, écoulé à plus de 50 000 exemplaires, est un incontournable parmi les outils mis à la disposition des cliniciens et du public pour traiter les troubles anxieux. Entretien.

Comment vous êtes-vous intéressée aux troubles anxieux et qu’est-ce qui vous a motivée à écrire ce livre ?

Dès le début de ma pratique de psychologue clinicienne, en 1984, je diagnostiquais fré-quemment des troubles anxieux chez mes patients, dont beaucoup de troubles paniques avec agoraphobie. En 1989, j’ai commencé à travailler avec André Marchand, premier auteur du livre. Nous ne disposions d’aucun ouvrage en français, à jour, bien vulgarisé, exact scientifiquement, à proposer à nos patients. Malheureusement, chez beaucoup de gens, le syndrome n’est pas diagnostiqué de façon précoce. Leur trouble s‘aggrave au fil des ans et ils vivent une détresse toujours plus profonde, en plus d’ignorer ce qui les afflige. Le livre se voulait un outil de diagnostic pour les aider à se comprendre et à se traiter.

Y a-t-il dans l’anxiété une composante héréditaire, naturelle ou culturelle ?

Il y a une interaction importante entre une vulnérabilité physique aux troubles anxieux et la façon dont on a appris à les gérer. C’est déterminant dans leur développement et leur aggravation. Si l’on a appris dans l’enfance que le stress et la manifestation de symptômes physiques, telle une attaque de panique, ne sont pas en soi dangereux, on peut vivre avec une sensibilité à l’anxiété sans éprouver de problèmes. Par contre, si l’on a un parent atteint d’un trouble anxieux qui utilise l’évitement comme stratégie de gestion, qui dramatise la situation et qui perçoit l’anxiété comme une émotion dangereuse, l’enfant en fera sans doute tout autant. L’état s’aggravera donc plus vite.

Quand Charles a reçu son diagnostic (anxiété et TDA), il n’a pas hésité à en parler à son entourage. « Ç’a été très libérateur et jamais je n’ai été jugé, dit-il. Au contraire, mon expérience a fait réaliser à certains qu’ils en étaient aussi atteints. »

« Il faut connaître nos limites et nos capacités à gérer le stress, poursuit-il. Cela ne veut pas dire stagner et ne rien entre-prendre. Mais la croissance de notre entre-prise, par exemple, doit se faire de façon équilibrée. Enfin, il ne faut pas craindre la médication. Pour moi, ç’a été révélateur. »

« POUR AUGMENTER LE PLAISIR DE VIVRE »

Andrée Letarte, chef du Programme des troubles anxieux et de l’humeur de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM)

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Certains troubles anxieux peuvent être paralysants. Pensons à quelqu’un qui évite de mul-tiples situations, justement par crainte de vivre une attaque de panique, par exemple.

Ce peut être très dévastateur. N’importe lequel de ces troubles, lorsqu’il s’aggrave, peut rendre une personne dysfonctionnelle. Quand on ne peut plus faire ce qu’on aime et que l’on ignore pourquoi, une profonde détresse s’installe et des difficultés s’ensuivent. Un trouble anxieux non traité peut mener à une dépression et à un usage abusif d’alcool ou de drogues pour tenter d’en gérer les symptômes. Ça crée de la détresse non seulement chez la personne, mais au sein de tout son entourage.

Les personnes atteintes d’un trouble anxieux sont parfois stigmatisées, ce qui ne les incite pas à en parler.

Les préjugés liés aux problèmes de santé mentale ou de gestion émotionnelle sont encore nombreux. Les gens craignent d’être jugés et incompris, d’avoir l’air faible, alors que cela peut arriver à n’importe qui, toutes professions, intelligences et scolarités confondues. Vivre un trouble anxieux ou une période dépressive est un phénomène tellement courant. Et quand les gens se décident à en parler, ils réalisent qu’ils ne sont pas seuls et que d’autres autour d’eux ont aussi vécu des difficultés. Cela permet de briser l’isolement, de démystifier les choses et de réaliser que des solutions existent. Et ça crée souvent un grand esprit d’entraide.

Quels moyens sont mis à la disposition des gens atteints de troubles anxieux pour les aider à s’en libérer ou pour mieux vivre avec eux ?

Il y a plusieurs solutions efficaces selon l’importance du trouble. Et chacune per-met d’améliorer de façon marquée ses conditions de vie. Pour certains, au début de l’apparition des troubles anxieux, la lecture d’un livre sur le sujet – ce qu’on appelle bibliothérapie – aidera grandement à les désamorcer. Sinon, les deux traitements effi-caces, appliqués individuellement ou en combinaison, sont la psychothérapie cogni-tivocomportementale et la psychopharmacologie, qui auront des effets de réduction et de contrôle des symptômes permettant aux gens de reprendre un fonctionnement plus optimal. L’important, c’est de ne pas rester avec un trouble qui s’aggrave, qui isole et risque de dégénérer en dépression et en dysfonctionnement majeur.

Est-il possible de se libérer complètement de troubles anxieux ?

Oui. Mais cela peut dépendre des troubles. Certains se traitent complètement, sans laisser de traces. D’autres laissent certaines traces, mais qui se gèrent bien. Pensons au trouble obsessionnel-compulsif. Si quelqu’un avait six heures de compulsion par jour et qu’un traitement lui permet de réduire cela à une demi-heure, il pourra avoir une vie normale. Le trouble panique avec agoraphobie peut être traité com-plètement et ne plus laisser de séquelles. Si la personne a une attaque de panique, elle sera en mesure de la gérer sans peur et de continuer à bien vivre. La condition de vie de tous peut être améliorée, et il est très rare qu’on ne puisse pas augmenter son plaisir de vivre !  

L’anxiété peut se manifester de diverses façons, classées en quatre catégories :1. Les symptômes affectifs (peur,

inquiétude, irritabilité, etc.).2. Les symptômes physiologiques

(étourdissements, palpitations, difficultés à respirer, engourdissements, etc.).

3. Les symptômes cognitifs (difficultés de concentration, peur de devenir fou, de perdre le contrôle, d’avoir une crise cardiaque, etc.).

4. Les symptômes comportementaux (agitation, évitement, attitude crispée, etc.).(IUSMM)

Les six catégories de troubles anxieux(les regroupements diagnostiques ont changé dans les répertoires officiels

qui catégorisent les troubles mentaux)

L’état de stress post-traumatiqueLa phobie socialeLa phobie spécifiqueLe trouble d’anxiété généraliséeLe trouble panique avec (ou sans) agoraphobieLe trouble obsessionnel-compulsif (TOC)

Dans la population générale, 25 % des gens semblent avoir vécu de l’anxiété intense à un moment ou à un autre de leur vie, et environ 7,5 % de ceux-ci sont aux prises avec un trouble anxieux particulier. (IUSMM)

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Andrée-Anne Guay est médecin. Dans son cabinet, à Saint-Césaire (Montérégie), elle rencontre et soigne de nombreux pro-ducteurs agricoles. Elle-même agricultrice, elle connaît bien leur milieu de vie et les sources de stress qui touchent ceux et celles qui nous nourrissent. Elle pose un regard éclairant sur une profession et un secteur de plus en plus exigeants.

Un producteur agricole québécois sur deux (51 %) souffre d’un niveau élevé de détresse psychologique, dont le trouble anxieux, selon les travaux réalisés notam-ment pour La Coop fédérée par la psycho-logue Ginette Lafleur. Un chiffre corroboré par l’organisme Au cœur des familles agricoles.

LE MODE DE VIE AGRICOLE EST-IL SOURCE D’ANXIÉTÉ ?Le trouble d’anxiété généralisé est le trouble anxieux qu’Andrée-Anne Guay rencontre le plus fréquemment dans sa pratique. Ce sont les problèmes finan-ciers qui en sont le plus souvent la cause,

RETROUVER LA SÉRÉNITÉ AU TRAVAIL ET DANS LA VIE

dit-elle. Elle voit dans ce phénomène une tendance lourde : de plus en plus de pro-ducteurs doivent gagner un revenu consi-dérable à l’extérieur de l’entreprise pour équilibrer le budget de celle-ci.

« Les producteurs agricoles possèdent d’importants actifs, mais ce sont bien sou-vent les liquidités au quotidien qui font défaut, dit la Dre Guay. Tout l’argent que génère l’entreprise sert à la faire fonction-ner. »

Autre source d’anxiété, tout juste der-rière les problèmes financiers : l’admi-nistration de l’entreprise (paperasse, règlements, normes environnementales à respecter, etc.), qui demande de plus en plus de temps, parfois jusqu’à 35 à 40 heures par semaine, fait-elle remar-quer. Ajoutons à cela l’incertitude des prix, les risques climatiques, la gestion d’employés, les exigences du marché et celles des consommateurs. « C’est une course dans laquelle les obstacles sont toujours plus hauts. Beaucoup de produc-teurs sont débordés. Et ils sont nombreux à me consulter pour en parler », dit-elle.

Chez l’homme, l’anxiété et le stress se manifestent par un manque de patience, de l’irritabilité et des colères subites, explique la Dre Guay. Chez la femme, ils se traduisent par un manque d’énergie, de la fatigue chronique et une sensibilité à fleur de peau.

GÉRER SA « BOÎTE D’ÉNERGIE »Dans la boîte d’énergie qu’elle a imaginée, la Dre Guay a défini trois niveaux : feu vert, feu jaune et feu rouge. Tout en haut, dans la portion feu vert, notre énergie fluctue selon les évènements. Il y a des hauts et des bas que l’on peut bien gérer et qui ne constituent pas une menace pour notre équilibre physique et mental. Si la baisse d’énergie est trop marquée et fréquente, on se retrouve plus bas, dans la portion

Investir dans soi« Investissez dans votre personne pour assurer la continuité de votre entreprise et de votre vie. Investir 500 $ pour vous [cinq séances à 100 $ chacune avec un professionnel], c’est bien peu pour contribuer à votre bien-être. »

— Maria Labrecque-Duchesneau (Au cœur des familles agricoles)

Les producteurs agricoles sont bien souvent livrés à eux-mêmes lorsqu’il est question de

la maladie, qu’elle soit physique ou mentale. Le temps pour consulter leur

manque. Les ressources dont ils disposent dans leur milieu sont limitées.

Et puis, comment s’arrêter pour prendre du temps pour soi ou se soigner quand

une tâche n’attend pas l’autre ?

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feu jaune. C’est l’anxiété qui s’installe. Si elle s’accentue et persiste, on se retrouve encore plus bas, cette fois dans la portion feu rouge, où les épisodes d’angoisse sur-viennent. Et leur fréquence peut mener à la dépression. Tout au fond de la boîte, où l’énergie est au plus bas, c’est la mort, le suicide… « Il faut à tout prix éviter d’en arriver là, dit-elle. Et pour cela, il faut agir. »

DÉFINIR LES RÔLES« Les rôles de chacun dans l’entreprise agricole sont souvent mal définis. On habitue notre entourage à toujours comp-ter sur nous. Les risques d’en faire trop sont donc fréquents, ce qui mène la plu-part du temps à l’épuisement, souligne la Dre Guay. Si le sac à dos est trop pesant, il faut l’alléger. Dans ce sac, il y a des choses qui ne nous appartiennent pas, des voleurs d’énergie. Il faut les déceler et nous en délester. Les médicaments, s’ils sont parfois nécessaires pour atténuer un problème, ne sont qu’une partie de la solu-tion. Si l’on ne change rien à ses façons de faire, ils ne seront qu’une béquille. Il faut revoir ses priorités, se restructurer, rationaliser, miser sur ses forces, travailler en équipe et déléguer certaines tâches à des ressources externes, qui peuvent venir à la maison pour aider. »

ESPOIRLa Dre Guay rassure tous les producteurs qu’elle rencontre. « Ils ne sont pas seuls dans leur détresse, dit-elle. Ils iront mieux s’ils acceptent de changer les choses, et il existe toujours des solutions à leurs maux. Toujours. »

« Il est important, conclut-elle, d’assu-rer à chacun un bon équilibre entre les tâches à réaliser pour l’entreprise et le temps à consacrer à soi et à sa famille, afin de retrouver la sérénité au travail et dans la vie. »

Des ressourcesApprivoiser l’hyperactivité et le déficit de l’attention, par Colette Sauvé, La Collection du CHU Sainte-Justine pour les parents, 2007.

La peur d’avoir peur : Guide de traitement du trouble panique avec agoraphobie, par André Marchand et Andrée Letarte, 3e édition, Éditions Stanké, 2004.

Le piège du bonheur : Créez la vie que vous voulez, par Russ Harris, Les Éditions de l’Homme, 2009.

Dre Andrée-Anne Guay

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Adéquate pour une famille, TROP PETITE POUR DEUX

TEXTE ET PHOTOS D’ÉTIENNE GOSSELIN, AGRONOME, M. SC.

Normand Lapointe et Valérie Gobeil ont la cinquantaine à peine, une ferme et un fils qu’ils veulent établir. Comment tirer des revenus supplémentaires de la Ferme Saguenayenne pour faire vivre deux familles ? Cette exploitation du rang Saint-Damien, à Jonquière, est à la croisée des chemins. Quelle voie pour l’avenir ?

Rien n’est sûr pour la Ferme Saguenayenne. La petitesse de son quota ne permet pas de dégager des revenus suffisants pour rémunérer un fiston qui cognera à la porte dans deux ans et un père encore trop jeune pour lui laisser entièrement le champ libre.

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1. Valérie fait carrière dans le domaine bancaire, Normand se passionne pour la génétique et les hautes performances, alors que Maxime acquiert de nouvelles notions à l’ITA, notamment en comptabilité et en gestion.

2. Trois générations de Saguenéens à la Ferme Saguenayenne : Normand, Louis-Marie et Maxime. Malgré ses 79 ans, Louis-Marie brosse des vaches tous les jours.

3. L’agronome de Nutrinor, Richard Blackburn, évalue la présence de toxines dans l’orge des Lapointe. Ces derniers en cultivent sur 45 ha; ils ont aussi 65 ha d’un mélange de fléole-luzerne et 15 ha de pâturage.

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Stage d’été à la réputée Ferme des Marcil (Normandin) pour en apprendre plus sur les robots de traite, inscription en 2e année au campus de Saint-Hyacinthe du prestigieux Institut de technologie agroa-limentaire, et une baby face qui rappelle celle de son père : le champ des possibles est vaste pour le charmant Maxime Lapointe.

Pourtant, rien n’est sûr pour la Ferme Saguenayenne, à Jonquière. La petitesse de son quota (43 kg/j) ne permet pas de déga-ger des revenus suffisants pour rémunérer un fiston qui cognera à la porte dans deux ans et un père encore trop jeune pour lui laisser entièrement le champ libre. Qui plus est, les terres à vendre sont inexistantes pour l’instant, la disponibilité du quota est anémique, et les inquiétudes sur la gestion de l’offre plus présentes que jamais.

Sombre avenir ? Parlons franchement : il faudra augmenter les revenus de la ferme d’au moins 10 % pour consentir un salaire à Maxime. Heureusement, Normand Lapointe, qui qualifie son style de gestion de « conservateur et créatif », aime les défis, selon Maxime. « Mon père est sans aucun doute mon meilleur allié. Il m’appuie à 100 % dans mes projets. »

Normand et Valérie fondent beaucoup d’espoir en leur relève, qui aborde cette année les projets spéciaux et les études de cas à l’ITA. La ferme se prépare donc à un grand « virage gestion » pour diminuer le degré d’incertitude quant à l’avenir. Tout est sur la table. Même la vente du quota laitier ? C’est une option peu probable, Normand Lapointe préférant le contraire : acheter plus de quota pour générer plus de revenus. N’empêche, vendre le contingent permettrait un excellent démarrage dans d’autres productions, comme le maraî-chage, dont la ferme a tâté pendant une dizaine d’années avec la production de maïs sucré. Framboise ? Gourgane ? Réno-vation de l’étable et ajout d’un robot de traite ? « On est rendus à mettre par écrit des scénarios », expose Normand.

L’homme et la machineDepuis la domestication au néolithique de Bos taurus, il y a plus de 9000 ans, l’homme s’est fié à ses sens pour sélectionner les individus les plus performants. Des millénaires plus tard, et malgré la disponibilité d’outils informatiques, l’Homo sapiens Normand Lapointe fait encore confiance à son jugement et à son intuition. « Je suis un gars de pif, de feeling. Et je ne suis pas toujours by the book », affirme celui qui, comme les maîtres des échecs, n’abdique pas devant la supériorité de la machine sur l’humain. « Normand est vraiment “sur la coche” et il va chercher le maximum de ses animaux, s’exclame son agronome Richard Blackburn, coordonnateur de l’équipe Ruminants de Nutrinor. C’est un client vraiment spécial ! »

PRODUCTION OU CONFORMATION ?Passionné de génétique, Normand Lapointe fut longtemps juge d’exposition pour Ayrshire Québec. Il a mené certaines de ses propres vaches jusqu’à des titres de grandes championnes à l’Expo-printemps et à Expo Québec. Mais aujourd’hui, il tend à s’éloigner des expositions. Il n’enverra plus qu’une ou deux bêtes à deux expos majeures chaque année, sans plus. « Le show, c’est bien beau, mais le lait, c’est plus payant », évalue l’éleveur, pour qui l’argu-ment de la production prend aujourd’hui l’ascendant sur celui de la conformation dans la vente et l’achat de génétique.

Excellent gestionnaire de troupeau, Normand délaisse donc les concours et la quête de la vache parfaite pour un objectif plus réaliste (et rentable ?) : l’élevage de vaches capables de faire du lait à moindre coût. Au milieu des années 1970, une Ayrshire de son troupeau avait été la première au Canada à franchir la barre psychologique des 10 000 kg produits par année. En 2015, une autre de ses vaches, Saguenayenne Blackaddar Sherlock Modaly

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(TB-85, MCR combinée de 1477), battra le record canadien de production pour une vache de troisième lactation et plus (vêlages à 22, 34 et 46 mois) avec 16 192 kg de lait produit ajusté à 305 jours.

La Ferme Saguenayenne résulte de la vision du père de Normand, Louis-Marie, aujourd’hui âgé de 79 ans, qui a démarré en 1962 avec 11 vaches : 1 Ayrshire et 10 Hols-tein. Aujourd’hui, le cheptel est inverse, avec 36 Ayrshire et 10 Holstein. « Je préfère les Ayrshire, même si j’ai des Holstein parce qu’elles sont plus facilement disponibles, dit Normand. Les Holstein fatiguent plus quand tu pousses leur production, leurs frais vétérinaires sont plus élevés et elles nécessitent plus de saillies. »

Malgré les grands questionnements et les grandes décisions à venir, l’éleveur reste-t-il serein ? « Quand je ferme mes yeux le soir, je vois notre qualité de vie en premier lieu. Je vois ensuite mon fils qui s’apprête à prendre la relève, ma conjointe heureuse avec sa vie professionnelle et avec la vie à la campagne, et mon père qui s’amuse encore à la ferme », dévoile Normand.

Bref, une famille forte et unie... comme dirait un certain slogan syndical !

IPV et Pro $Que pensent les Lapointe de la reformulation par le Réseau laitier canadien de l’IPV – qui n’est plus l’Indice de profit à vie, mais l’Indice de performance à vie – et de la création de l’indice Pro $ (prononcez « Pro dollars »), nouvel outil qui donne une meilleure dimension économique à la production laitière ? Rappelons que l’IPV avait, jusqu’en août dernier, une pondération de 51 % pour la production, 34 % pour la durabilité et 15 % pour la santé et la fertilité. Ces proportions sont aujourd’hui réajustées à 40 %, 40 % et 20 % respectivement. « Personnellement, je trouve que l’IPV est mieux réparti, dit Normand Lapointe. Il est important pour une ferme que les vaches soient rentables, donc que la durabilité et la santé prennent davantage d’importance. J’aime bien regarder l’indice Pro $ : cela nous permet de voir quelles sont les vaches qui sont plus rentables que d’autres. »

L’ALIMENTATION DU TROUPEAU

Richard Blackburn, agronome, coordonnateur de l’équipe Ruminants de la coopérative Nutrinor

n Troupeau d’environ 45 vaches en lactationn Moyenne de 9372 kg de laitn MCR : 252-263-259n 4,3 % de grasn 3,5 % de protéinen Classification Holstein : 4 TB, 6 BPn Classification Ayrshire : 2 EX, 14 TB, 20 BPn Intervalle moyen entre les vêlages :

425 jours

Veaux et génissesn 0-2 mois : Goliath XLR 27-16 et 3 kg/jour de

Goliath VO-19n 3-14 mois : orge* humide 26 % et 500 g/

jour de complément Synchro 3036AUn 15-22 mois : 200 g/jour de minéral Goliath

12-4 texture, orge humide et complément Synchro 3036AU

n Toujours servis avec foin de 1re coupe à volonté (grosse balle carrée) à 14,8 % de PB et 1,31 ENl

Tarissement (60 jours)n 300 g de minéraln Foin de 1re coupe (balle carrée) à volonté,

à 12 % de PB et 1,31 ENl

Préparation vêlagen 5 kg d’orge humide 26 %n 1 kg de complément Synchro 3036AUn 100 g de minéral Transilac VT7-3C cube

Vaches en lactationGroupe 1n Ensilage de 2e coupe à volontén Foin de 1re coupe (une balle carrée)n Foin de 2e coupe (une balle carrée)n 12 kg d’orge humide 26 %n 5 kg de complément Synchro 3036AUn 100 g de minéral Synchro 18-5Tn 66 g/vache de Palmit 80

Groupe 2n Ensilage de 2e coupe à volontén Foin de 1re coupe (une balle carrée)n Foin de 2e coupe (une balle carrée)n 8-10 kg d’orge humide 26 % n 3-4 kg de complément Synchro 3036AUn 100 g de minéral Synchro 18-Tn 66 g/vache de Palmit 80

Groupe 3n Ensilage de 2e coupe à volontén Foin de 1re coupe (une balle carrée)n Foin de 2e coupe (une balle carrée)n 6 kg orge humide 26 %n 1-2 kg de complément Synchro 3036AUn 100 g de minéral Synchro 18-5 tn 66 g/vache de Palmit 80

* Orge Selena (2 rangs); poids spécifique de 69 kg/hl

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23COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

Nancy et Luc, de la Ferme Flamande, avec leurs cinq enfants (de gauche à droite) : Daphné, Tristan, Jeanne, Charlie et Loïc.

Quelles raisons ont pu motiver la décision des juges d’octroyer le prix à la Ferme Flamande, propriété de Nancy Vézina et de Luc Malenfant ? Le producteur laitier hésite, puis se lance. « Tout est dans les détails. C’est l’ensemble de nos façons de faire qui nous a fait nous distinguer. »

Gérée en mode biologique depuis 2002, la Ferme Flamande partait-elle avec une longueur d’avance ? Sans doute, déclare Luc, dont l’exploitation se trouve à Saint-Hubert-de-Rivière-du-Loup. D’abord, pas besoin de gérer des pesticides et des fertilisants inorganiques puisqu’on n’en utilise pas. On mise plutôt sur la valorisation des fumiers, gérés scrupuleusement et entreposés dans une fosse depuis 2000, même si l’entreprise n’était pas dans l’obligation de se doter de cette infrastructure. Depuis 1994, la ferme est membre du Club Sols Vivants.

Ensuite, le cahier des charges de la conduite biologique oblige une bonne rota-tion et une bonne diversité, qui s’expriment en deux années de céréales (la deuxième année étant sous forme de plante-abri ou céréale grainée) et quatre années de prai-ries, durant lesquelles on sème les plantes les mieux adaptées aux conditions envi-ronnementales (trèfle ladino, trèfle rouge, lotier, fléole, dactyle, brome, ray-grass, etc.). « J’utilise plusieurs sortes de plantes fourragères pour échelonner les maturités sur toute la saison de croissance de mes huit parcelles de pâturage », explique Luc.

Conséquemment, la saison de pâture est prolongée au maximum, jusqu’à cinq mois par année. « Tout ce que les vaches mangent au pâturage n’a pas besoin d’être récolté, et il n’y a pas de fumier à épandre, d’où moins de pollution », justifie Luc, qui est en outre

président de La Coop Saint-Hubert depuis 2009. La ferme est autosuffisante pour l’alimentation du troupeau.

« Les gens de la Ferme Flamande pro-duisent en harmonie avec la nature, sans pratiques interventionnistes, tout en prévention », estime par ailleurs leur conseillère Manal Baghagha, de La Coop. « Ils sont très à l’écoute des besoins de leurs sols, des exportations par les récoltes. Par exemple, ils ne feront pas une troisième coupe de foin si elle ne peut pas être com-pensée par une application de chaux et de fumier. Ils sont vraiment “sur la coche” ! » ajoute, avec son charmant accent maghré-bin, leur experte-conseil, spécialisée en mode biologique.

À l’étable, les ani-maux bénéficient depuis 2010 d’un confort accru apporté par la stabu-lation libre. L’eau usée issue du lavage du lac-toduc est recyclée pour laver le plancher de la salle de traite.

Autre point d’intérêt : la topographie de col-lines, où les gros coups d’eau printaniers sont fréquents, a poussé l’entreprise à aménager des voies d’eau engazonnées sur ses terres. Enfin, près de la maison et des bâtiments agricoles, on a planté des haies brise-vent pour les protéger des grands courants d’air et pour enjoliver le paysage… car c’est aussi ça, l’agroenvironnement !

TEXTE D’ÉTIENNE GOSSELIN, AGRONOME, M. SC.

Comme l’a appris Luc Malenfant de la bouche d’un des juges de l’Ordre national du mérite agricole, c’est l’addition des bonnes pratiques de son entreprise qui lui a permis d’obtenir le Prix La Coop fédérée à l’agroenvironnement.

LA FERME FLAMANDE : SAVOIR ADDITIONNER LES BONS COUPS

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L’EFFET BOEUF

BRUNO LANGLOIS, AGRONOME CONSEILLER SPÉCIALISÉ EN PRODUCTION BOVINE, LA COOP FÉDÉRÉE, [email protected]

C’EST UNE DISCUSSION ESTIVALE avec un éleveur vaches-veaux qui m’a inspiré pour cette chronique. On parlait de la succession presque magique de conditions et d’évè-nements ayant mené les bovins canadiens à des prix que personne ne croyait vraiment possibles : cheptel des vaches (Canada, États-Unis et Mexique) à son plus bas niveau depuis les années 1960, effet de la diarrhée épi-démique porcine sur l’offre globale de viande et dégrin-golade du dollar canadien face au dollar américain.

C’est à ce moment que ce jeune producteur m’a exposé sa source de motivation à bien faire les choses. Sa prémisse de base est que si on laisse complètement faire la nature (minimum de travail et d’interventions), probablement que 75 % des vaches du troupeau sèvreront un veau à l’automne. Toutes les heures qu’il investit annuellement à surveiller les vêlages, aider les veaux à boire, leur donner du colostrum et s’assurer que les mères adoptent bien leurs petits – sans parler de l’alimentation minérale (une priorité chez lui) – lui permettent de faire passer ce chiffre à 95 %.

UNE ÉVIDENCE… ÉVIDENTEPour 100 vaches gardées, la « récolte » est donc de 20 veaux supplémentaires par année pour un investis-sement d’environ 3,5 heures par jour pendant 60 jours. Quand le prix d’un veau était de 800 $, ses heures sup-plémentaires lui rapportaient environ 12 000 $, une fois l’alimentation minérale défrayée, soit 60 $ l’heure. Selon lui, il n’y a pas de plus belle motivation. Surtout qu’avec les prix actuels, ce taux est plutôt de l’ordre de 150 $ l’heure !

Cette anecdote ne fait que souligner une fois de plus que les petits détails jouent toujours un rôle très important. Mais cela est encore plus évident quand le multiplicateur « prix » est grand !

LA TECHNOLOGIE À LA RESCOUSSEOr, c’est là que ça devient intéressant. Traditionnel-lement, en production bovine, tous ces points de gestion

ne reposaient que sur la somme des heures travaillées. En fait, il y avait très peu d’outils technologiques à la disposition du producteur. Augmenter la durée de saison de paissance signifiait faire davantage de clôtures barbelées. Réduire les pertes de veaux à la naissance se traduisait par « coucher à l’étable », etc. Rien de bien attirant et motivant.

Mais le visage de la production change rapide-ment. Bien entendu, « l’huile de coude » sera toujours nécessaire, mais en quantité beaucoup plus faible. Aujourd’hui, bien que souvent méconnus, les outils technologiques existent et prennent leur place. Ne pen-sons qu’à la combinaison suivante : abreuvoirs mobiles, raccords rapides, dévidoirs de fil de clôture électrifiée, piquets amovibles et véhicule tout-terrain biplace, qui, lorsqu’ils sont bien utilisés, permettent de garder un plus grand nombre de vaches sur une même surface de pâturage pendant une période plus longue. Dans bien des cas, le testeur de tension a remplacé la masse et les « crampes ».

Autre exemple ? L’arrivée de caméras de surveillance reliées à un ordinateur ou à un téléphone intelligent. On pourrait aussi mentionner les colostrums de remplace-ment commerciaux de qualité, les indices de sélection pour les taureaux (EPD), l’insémination artificielle grâce aux techniques de synchronisation des chaleurs. Et, bien entendu, la possibilité d’obtenir des programmes alimentaires et de fertilisation parfaitement adaptés, réalisés par des conseillers spécialisés en production bovine. L’équipe Opti Bœuf en est d’ailleurs la parfaite expression.

Ces technologies modifient grandement le quotidien du producteur de bovins ainsi que les performances obtenues. Autrefois très traditionnelle, la production bovine est aujourd’hui résolument moderne et orientée vers l’avenir. Parions que ces changements attireront de nouveaux acteurs au cours des prochaines années. À quand le premier drone pour surveiller le travail des taureaux en période de saillie ?

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Un matin brumeux et pluvieux du mois de juin dernier, une soixantaine de producteurs s’entassent dans la belle vieille grange qui sert de table champêtre à Brian Maloney et Lise Villeneuve, de la Ferme Brylee, à Thurso. Tous sont venus écouter les enseignements d’Ian Mitchell-Innes. Selon ce Sud-Africain, un pâturage bien géré, sans apport d’intrants, est un écosys-tème résilient sur lequel ni la sécheresse ni les inondations n’ont d’impact.

Tout ce que le rancher Ian Mitchell-Innes professe, il dit l’avoir d’abord expé-rimenté lors des 20 dernières années, sur ses 6000 ha de terre d’Afrique du Sud. Selon lui, avec le pâturage ultra-intensif, il est possible de produire tout en amélio-rant le couvert végétal et la vie du sol. Le conférencier fait même miroiter un gain moyen quotidien de cinq livres par jour au pâturage, sans aucun supplément, hormis des vitamines et des minéraux offerts à volonté – une performance que Bruno Langlois, agronome à La Coop fédérée, n’a observée qu’en période de gain com-pensatoire (privation avant alimentation). Pensée magique ?

PÂTURAGE EXTRÊMELe pâturage ultra-intensif ou mob grazing est plus que du pâturage rotatif. La méthode consiste à concentrer le troupeau en une parcelle pour qu’il paisse le tiers supérieur des plantes dans leur stade végétatif. C’est ce tiers supérieur qui est riche en glucides et en protéines. Les deux tiers restants referont vite les réserves de la plante, pour un temps de repos réduit et une meilleure productivité des superficies.

La paissance intensive stimule la croissance des plantes, notamment par

BRYAN MALONEY, PRODUCTEUR BOVIN DE L’OUTAOUAIS, PRÊCHE POUR LE PÂTURAGE, À CONDITION DE SAVOIR COMMENT LE GÉRER. SA MÉTHODE PRÉFÉRÉE : LE PÂTURAGE

DE MASSE OU PÂTURAGE HAUTE DENSITÉ, DONT LE PLUS FERVENT DÉFENSEUR EST UN SPÉCIALISTE EN GESTION HOLISTIQUE, IAN MITCHELL-INNES.

TEXTE ET PHOTOS D’ÉTIENNE GOSSELIN, AGRONOME, M. SC.

PRÊCHER POUR LE PÂTURAGE

le piétinement des plantes indésirables et par l’apport de fumier. Ian Mitchell-Innes suggère même, pour établir de nouvelles prairies, de travailler avec les banques de semences existantes, qui suffisent à coloni-ser tout l’espace. « Les producteurs restent surpris de voir des espèces émerger, dont ils ignoraient l’existence ! », s’enthousiasme l’homme qui agit aujourd’hui comme consultant et éducateur, certifié par l’orga-nisation Holistic Management International.

Oui, mais l’homogénéité de tels champs ? Selon l’homme, il ne faut pas accorder d’im-portance à l’uniformité, car « la nature est chaos » et une meilleure biodiversité parti-cipe à une meilleure stabilité. En somme, le formateur pousse à une certaine forme de permaculture, sans travail de sol qui oxyde et détruit la matière organique.

Et les plantes non pâturées ? Selon l’homme, elles se dégraderont, car les autres plantes, stimulées par la paissance, prendront le dessus et les étoufferont. Et les sols acides ? Et les sols mal drainés ? « En séquestrant plus de carbone dans le sol, la matière organique agit comme un tampon dans un cas, comme une éponge dans l’autre », explique simplement Ian Mitchell-Innes.

EN RÉGRESSION, LE PÂTURAGE

Avec la collaboration d’Éric Massicotte, agroéconomisteInstitut de la statistique du Québec

Superficies en pâturage (ha) au Québec

Terres naturelles

pour le pâturage

Pâturages cultivés ou

ensemencés

2013 131 100 123 900

2011 134 200 126 300

2006 158 600 147 400

2001 185 900 182 800

1996 – 197 300

1991 – 270 900

1986 – 301 100

1981 – 443 600

1976 – 470 300

Qu’en pense Jack Kyle ?Rencontré sur place, le spécialiste des animaux de pâturage du ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario, Jack Kyle, s’accorde pour dire que les méthodes empiriques mises de l’avant par Ian Mitchell-Innes ne sont pas dénuées de sens. Des sujets plus controversés (pâturage forestier, paissance sur parcelles enneigées) recueillaient toutefois moins d’enthousiasme de sa part, surtout sous les conditions climatiques de l’Est canadien.

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Page 27: Coopérateur | Octobre 2015

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L’ANNÉE 2014 A MIS UN TERME À LA FAIBLE RENTABILITÉ DES FERMES PORCINES DES ANNÉES PRÉCÉDENTES. IL SEMBLE TOUTEFOIS QUE L’EMBELLIE AURA ÉTÉ DE COURTE DURÉE,

PUISQUE NOUS REVENONS À UNE ANNÉE AVEC COMPENSATION DE L’ASRA DÈS 2015. QUEL EN SERA L’IMPACT SUR NOS FERMES ET COMMENT LE LIMITER AU MINIMUM ?

L’assurance stabilisation des reve-nus agricoles (ASRA) base ses compen-sations sur les résultats d’une ferme modèle de type naisseur-finisseur. Les résultats financiers de la ferme

modèle en production porcine sont réévalués tous les cinq

ans. La dernière révi-sion a été fondée sur l’année 2012 et

dictera le modèle pour les années 2014 à

2018 inclusivement. En compa-raison avec la ferme modèle pré-cédente, le coût de production a

diminué substantiellement (tableau 1).

Mentionnons que la réévaluation de la ferme modèle ne part pas du

modèle précédent auquel on applique une réduction, mais il y a rééva-luation complète de celui-ci. C’est pourquoi la différence entre les deux versions varie chaque année.

EFFET DES COTISATIONS PLUS BASSESDes compensations moins généreuses

amènent des cotisations plus basses. Si l’on compare la moyenne des années 2012-2013 avec celle des années 2014-2015 (tableau 2), on prévoit une baisse de cotisations de 7,76 $ par porc. Cette baisse

TEXTE DE JEAN TANGUAY, AGRONOME

NOUVELLE

FERME MODÈLE ASRA, NOUVELLE STRATÉGIE

amoindrit l’impact de la diminution importante du revenu stabilisé. Donc, au net, on se retrouve avec une situation où l’on doit aller chercher 8,78 $ de plus par porc pour obtenir une liquidité semblable à celle des modèles précédents (tableau 3).

EFFET DE L’AMÉLIORATION DE LA PRODUCTIVITÉDans la révision de la ferme modèle, La Financière agricole du Québec capte aussi, tous les cinq ans, les améliorations de productivité. Est-ce que nos résultats moyens se sont suffisamment améliorés pour que nous suivions les changements du modèle ASRA ? Comment aller encore plus loin et dépasser le modèle ?

Pour conserver une rentabilité sem-blable à celle de la ferme modèle, il est important d’améliorer ses résultats au même rythme que celle-ci… ou de faire mieux. En considérant les améliorations moyennes des cinq dernières années d’un groupe représentatif de la Filière porcine coopérative, on constate que la rentabi-lité s’est améliorée de 11,88 $ par porc de 2009 à 2014. Si vous faites partie de ce groupe, vous n’avez évidemment pas à vous inquiéter pour ce qui est d’affronter les 8,78 $ supplémentaires qu’il faut aller chercher par porc en vertu du nouveau modèle ASRA.

L’auteurJean Tanguay, agronome Coordonnateur des évaluations économiques en production [email protected]

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29COOPERATEUR.COOP – OCTOBRE 2015

Pour améliorer son sort, l’entreprise doit non seulement atteindre les résultats de la moyenne, mais passer du groupe de la moyenne au groupe des 25 % supérieurs. Dans un tel cas, elle augmentera sa renta-bilité de 8,46 $ par porc.

Si l’entreprise passe du groupe des 25 % inférieurs à celui de la moyenne générale, l’augmentation est encore plus grande, soit 13,19 $ par porc. Notons que si l’entreprise se trouve dans le quart inférieur, faire par-tie du groupe de la moyenne devient une question de survie.

En conclusion, vous devez trouver les points à améliorer pour que votre entre-prise reste dans la course, sinon il vous faudra repenser sa vocation (voir l’article en page 20 du numéro de février 2015). Votre expert-conseil de La Coop est bien placé pour vous appuyer dans votre démarche, que ce soit en vue de l’amélioration de la productivité des truies, des performances en matière de mortalité, du GMQ, de la conversion alimentaire ou de tout autre cri-tère influant sur la rentabilité de la ferme. Il peut aussi vous accompagner dans votre réflexion, si les défis sont trop grands à relever.

Tableau 2COMPARAISON DES COTISATIONS ASRA DE 2012 À 2015

Cotisation truies

($/porc)

Cotisations engraissement

($/porc)

Cotisation naisseur-finisseur ($/porc)

2012 109,87 9,14 13,53

2013 90,21 7,60 11,21

2014 22,07 2,46 3,34

2015 (partiel) 44,01 4,12 5,88

Différence – 67,00 – 5,08 – 7,76

Tableau 3DIFFÉRENCE ENTRE LES COMPENSATIONS ET LES COTISATIONS POUR LES NAISSEURS-FINISSEURS POUR LE MODÈLE 2014-2018

Compensation naisseur-finisseur ($/porc)

Cotisation naisseur-finisseur ($/porc)

Net ($/porc)

Différence – 16,54 – 7,76 – 8,78

Tableau 1COMPARAISON DES COMPENSATIONS SELON LE MODÈLE 2009-2013 ET LE MODÈLE 2014-2018 CALCULÉE SELON LES ANNÉES 2012 ET 2013 (DOLLARS PAR PORC PRODUIT)

Année de compensation

Compensation modèle 2009-2013

– truies

Compensation modèle 2014-2018

– truies1

Compensation modèle 2009-2013

– engraissement

Compensation modèle 2014-2018

– engraissement

Différence naisseur-finisseur

2012 340,58 180,28 27,81 18,02 – 16,20

2013 168,38 25,82 13,75 2,58 – 16,87

Moyenne – 16,54

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TEXTE DE PATRICK DUPUIS, AGRONOME

UNE GESTION EXEMPLAIRE, DES TECHNIQUES AVANT-GARDISTES, UNE RELÈVE BIEN EN PLACE, L’ENTREPRISE POMMES DE TERRE LAURENTIENNES A DE NOMBREUX ATOUTS POUR SE DISTINGUER SUR LE MARCHÉ MONDIAL DE LA SEMENCE DE POMMES DE TERRE.

Une centaine de camions de 30 000 kg à ravitailler, 350 hectares à semer en pommes de terre, maïs et soya, les arro-sages et l’irrigation à préparer, les équipements et les entrepôts à désin-fecter, tout ça en l’espace de six semaines, un rush commencé à la mi-mars. « C’est le temps de l’année le plus exigeant », s’accordent pour dire Ginette Cardinal et Bernard Desjardins, copropriétaires de l’entreprise de Notre-Dame-de-la-Paix, en Outaouais. Les journées sont très longues, les nuits plutôt courtes et les semaines interminables.

DES POMMES DE TERRE TRAITÉES AUX P’TITS OIGNONS

Tommy, 19 ans, et Vincent, 16 ans, la tête remplie d’espoir et de projets, sont à la barre de l’entreprise avec leurs parents.

Appuyée par ses neuf employés, une équipe performante à tous les niveaux (mécanique, logistique, production), l’exploi-tation se tire admirablement bien d’affaire.

Lancé en affaire en 1996, le couple Cardinal-Desjardins mise depuis sur l’orga-nisation serrée de chacune des étapes de production. « C’est une de ses très grandes forces et elle est au cœur de sa réussite », souligne Chanelle Bouladier-Laprade, agro-nome et experte-conseil à La Coop Agrodor.

Page 31: Coopérateur | Octobre 2015

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1. L’irrigation est une des clés de la réussite de l’entreprise. Tout le système, qui compte 14 pivots, peut être contrôlé à l’aide d’un téléphone intelligent.

2. Tommy et Vincent. Les deux frères, complices et passionnés, suivent les traces de leurs parents tout en apportant une bonne dose de sang neuf.

3. Munie de sondes, la station météo sert entre autres à mesurer la pluviométrie et le taux d’humidité du sol. Les données, transmises par l’entremise d’un téléphone intelligent, permettent aux producteurs de déclencher à distance le système d’irrigation pour combler un manque d’eau.

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LE GRAND SAUTGinette et Bernard font connaissance au tournant des années 1990 et partagent l’ardent désir de démarrer leur propre entreprise. Une rencontre fortuite les met sur la piste de Notre-Dame-de-la-Paix. On leur vante la région et ses caractéris-tiques favorables à la culture de la pomme de terre, tout particulièrement pour la semence : terres sablonneuses, climat frais, absence d’autres producteurs de semences de pommes de terre, proximité des marchés de l’Ontario, des États-Unis et des grands centres du Québec.

Ils acquièrent une exploitation de 160 hectares et y effectuent de multiples essais de variétés. Leur mission : produire de la semence de pommes de terre de qualité pour répondre aux besoins des marchés. Les rendements sont au rendez-vous et la demande progresse au-delà de leurs espérances. La croissance est inévitable et passe par l’acquisition de terres, pour porter la superficie en culture à 350 hectares.

Malgré ses nombreuses qualités, la région souffre de précipitations insuffi-santes, une situation résolue grâce à un bon accès à l’eau (l’entreprise possède notamment son propre étang alimenté par des sources), jumelé à un ingénieux système d’irrigation, essentiel pour assu-rer qualité et rendement.

Quatorze pivots ont été installés pour assurer l’irrigation des pommes de terre, du maïs et du soya. Le système, de concep-tion française et de très haute technologie, est efficace et économe en eau, en argent et en temps. La pression sur les ressources hydriques locales est donc réduite. On peut recouvrir 45 hectares (110 acres) de 19 mm (3/4 po) d’eau en 24 heures, pour un coût d’environ 5 $ l’hectare. « Le sys-tème fonctionne à l’électricité, à raison de 6 à 7 $ l’heure, dit Tommy, formé au collège d’Alfred. Avec l’ancien système au diésel, pour couvrir la même superficie, il fallait compter plus de quatre jours à 40 $ l’heure. »

AFFAIRES AGRICOLES |

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4. Pour assurer l’épandage efficace et précis des produits de protection, Pommes de terre Laurentiennes s’est dotée d’un pulvérisateur dernier cri. C’est Tommy qui en a l’entière responsabilité.

5. Sur l’écran du pulvérisateur, on distingue, en bleu, la portion du champ qui a été traitée. Au centre, la ligne verte représente la position du pulvérisateur. En rouge et jaune (écran du bas), on observe la quantité de produit appliqué, ce qui permet d’être le plus précis possible.

6. Certains pivots d’irrigation tirent leur eau d’une rivière grâce à une puissante pompe. Environ 11 km de tuyaux servent à transporter l’eau. L’entreprise respecte les ressources hydriques et observe à la lettre les normes gouvernementales en matière de captation des eaux.

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GÉRER AU QUART DE TOURL’entreprise produit plus de 20 variétés de semences de pommes de terre – une logistique réglée au quart de tour, régie par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA). L’implantation d’une nouvelle variété débute par le semis d’en-viron cinq kilos de semences nucléaires produites dans des centres de recherche spécialisés et hautement sécurisés, afin de réduire au minimum les possibles conta-minations.

À la récolte, on obtiendra la première génération, appelée semence Pré-Élite. Remise en terre l’année suivante, la Pré-Élite produira de la semence Élite 1, qui, semée au printemps suivant, produira l’Élite 2. Enfin, c’est l’Élite 3 que Ginette et Bernard vendront aux producteurs com-merciaux de pommes de terre de table et de transformation au Québec, en Ontario, à l’Île-du-Prince-Édouard, en Alberta, aux États-Unis et, pour une première fois cette année, en Uruguay.

Il faut compter trois ans de travail pour mettre en marché une nouvelle variété de semences de pommes de terre. Chaque étape est rigoureusement suivie par

l’ACIA : tests pré et postrécolte, observation visuelle aux champs, certification. Les pro-ducteurs s’allouent trois ans pour décider si la variété répond à leurs exigences.

LUTTER CONTRE LES ENNEMIS« La gale est l’ennemi numéro un », indique Bernard. Pour en briser le cycle, et celui d’autres maladies, la rotation des parcelles est essentielle, soit une année en pommes de terre (environ 95 ha), une année en soya (de semence et à identité préservée pour consommation humaine) et deux années en maïs-grain. L’ACIA exige, sur une par-celle, deux années sans pommes de terre. Les propriétaires misent sur trois.

Pour le tubercule, la récolte est un choc. L’extraction du sol peut lui causer des blessures. Une période de cicatrisation de trois semaines en entrepôt est donc nécessaire. La pomme de terre entre ensuite en dormance, à 4 °C et 95 % d’humidité, pour éviter les repousses.

Au printemps, les pommes de terre doivent être réveillées, délicatement. Les tiges qui pousseront alors permettront la multiplication des tubercules, une fois ceux-ci semés. Leur tranchage accélérera PH

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Visionnez d’autres photos du reportage dans le site du Coopérateur ! www.cooperateur.coop - section Affaires agricoles

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le processus. Toujours au semis, on ajoute de l’engrais en bande. Viennent ensuite les applications d’herbicides et le fractionne-ment de l’azote, en une à deux doses selon la variété. Puis, c’est le renchaussage des plants. Fongicides et insecticides sont appliqués religieusement.

Tard en saison, on procède au défanage, pour éliminer le feuillage. L’énergie du plant se concentrera alors dans le tubercule, pour le faire grossir et favoriser l’épaississement de la peau, ce qui le rendra moins fragile et assurera une barrière contre les maladies.

Outre les exigences agronomiques, les deux éléments touchant la réussite de l’entreprise sont le rendement et le prix sur les marchés. On produit en moyenne 300 quintaux (vendus) à l’acre (34 000 kg/ha), un rendement à la hauteur de l’attente des proprios. Quant au prix, ce sont l’offre et la

demande qui mènent la danse. L’efficacité est donc de rigueur.

« Pour satisfaire les producteurs com-merciaux souhaitant se démarquer auprès de leur clientèle, nous sommes à l’affût de nouvelles variétés performantes et dis-tinctes », fait savoir Ginette.

« On mise sur des variétés ayant belle apparence et exemptes de maladies, des critères de première importance », ajoute Bernard.

La présence de Tommy et Vincent, dési-reux de prendre la relève, est vue d’un très bon œil par les clients de l’entreprise, car c’est un gage de continuité et de sécurité d’approvisionnement.

« Le succès de nos producteurs, c’est aussi notre succès et notre fierté », conclut le couple.

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TEXTE DE VALÉRIE CHABOT, AGRONOME, M. SC.

SUR LES CENTAINES D’HYBRIDES QUE LA COOP FÉDÉRÉE A TESTÉS DANS DE MULTIPLES CONDITIONS AU QUÉBEC ET AILLEURS AU CANADA, HUIT ONT ÉTÉ SÉLECTIONNÉS

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Nos critères de sélection permettent de choisir les meilleurs hybrides dotés des meilleures technologies actuellement offertes, afin de maximiser vos productions de grains et d’ensilage. Voici les nouveautés pour vos semis de 2016, toutes offertes en refuge intégral.

E46J77 R Cet hybride de génétique hâtive montre une très bonne vigueur printanière et se démarque par son poids spécifique très élevé. Bien que ses plants soient plutôt courts, la précocité, la rapidité de séchage et la qualité de ses grains en font un hybride de choix pour les zones hâtives.

E50P52 R Grâce à sa très bonne vigueur printanière et à un départ rapide, cet hybride permet un semis hâtif ou avec beaucoup de résidus de culture. Il répond très bien aux hautes populations et aux bonnes conditions de croissance, tout en s’adaptant bien aux envi-ronnements plus difficiles. Bref, rendement et vigueur le caractérisent.

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Hybride UTM MR* Trait technologique Désherbage

E46J77 R 2150 76 Agrisure GT Glyphosate

E50P52 R 2400 80 Genuity VT Double Pro Glyphosate

E52V92 R 2450 82 Genuity VT Double Pro Glyphosate

E55T32 R 2575 85 Genuity VT Double Pro Glyphosate

E57L60 LR 2675 87 Genuity Smart Stax Glyphosate, Liberty

E61C35 2725 91 Aucun Conventionnel

E63Y80 LR 2775 93 Genuity Smart Stax Glyphosate, Liberty

E70G30 LR 3000 100 Genuity Smart Stax Glyphosate, Liberty* Maturité relative (en jours)

E52V92 R Le E52V92 R montre une très bonne perfor-mance en matière de rendement ainsi que de tenue des tiges et des racines, et possède un très bon poids spécifique. Polyvalent, il est performant dans tous les environnements de croissance.

E55T32 R Cet hybride se distingue par son taux de séchage très rapide. Il a très belle apparence et montre une belle verdeur des plants à l’automne. Le potentiel de rendement est très élevé, surtout en conditions de culture plus intensive.

E57L60 LR C’est la version Genuity Smart Stax de l’hybride E57L62 R, pour une protection com-plète contre les insectes. Cet hybride à haut potentiel de rendement sèche rapidement. Il possède une bonne robustesse des tiges et des racines, ce qui lui confère une excellente tenue jusqu’à la récolte. De plus, il se démarque lorsque le maïs est cultivé en continu.

E61C35De génétique non OGM, offert avec ou sans traitement de semences pour les producteurs biologiques, cet hybride a un rendement en grains constant et stable dans toutes les conditions. Il se démarque aussi par la qua-lité des grains récoltés. De plus, ses plants sont hauts, ce qui permet un bon rende-ment en ensilage. Sa qualité alimentaire est également bonne, ce qui en fait un hybride constant et polyvalent.

E63Y80 LR Cet hybride se démarque par sa capacité d’être très performant même dans des conditions difficiles. Il possède un bon poids spécifique et a une très belle apparence à l’automne, avec des plants qui restent verts, pour un maximum de photosynthèse.

E70G30 LR Voici une génétique de pleine saison pour les régions chaudes du Québec. Le E70G30 LR offre un excellent potentiel de rendement et une excellente tenue. Sa performance s’exprimera dans les champs où règnent de bonnes conditions de croissance et un haut potentiel de rendement. Il est très vigoureux et a belle apparence à l’automne, avec des plants sains qui restent verts.

Pour consulter la gamme complète des hybrides ELITE, prenez contact avec votre expert-conseil ou visitez notre site Web : www.elite.coop.

L’auteureValérie Chabot, agronome, M. Sc. Chercheuse spécialisée en maïsLa Coop fédéré[email protected]

| AFFAIRES AGRICOLES

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De nouvelles technologies ont été mises en marché avec le passage de Roundup Ready à Roundup Ready 2 Rendement et, bientôt, à Roundup Ready 2 Xtend. Le soya a aussi pris une place plus centrale dans la planification des rotations. Enfin, un nouveau regard sur les maturités a permis de tirer pleinement avantage de notre saison de croissance ou de mettre au point des variétés plus hâtives que jamais, pour permettre l’établissement dans de nouvelles régions de production.

L’équipe de la Ferme de recherche en pro-ductions végétales de La Coop fédérée, à la base des innovations des semences ELITE, est fière d’avoir fait face à ces transitions et d’en être ressortie plus forte en matière d’amélio-ration génétique. Voici cinq nouvelles variétés pour la saison 2016.

NOTUS R2Le Notus R2 est notre variété la plus hâtive. Elle concentre tout son pouvoir dans une plante de petite stature, mais pas au détriment du rende-ment, bien au contraire. L’accent est mis sur les gousses. De plus, cette stature lui confère un avantage contre les grands vents du Bas-Saint-Laurent. Même si le Notus R2 représente la fine pointe des avancées génétiques en matière de maturité, il est quand même pourvu du gène Rps1c pour la résistance au Phytophthora, tout comme les cultivars plus tardifs.

AKRAS R2L’Akras R2 est la nouvelle superstar des zones hâtives. Lorsqu’on l’a mis au point, on avait en tête les nouveaux producteurs de soya dans ces zones. Ce cultivar est exceptionnel par son

LES DERNIÈRES ANNÉES ONT ÉTÉ MARQUÉES PAR PLUSIEURS TRANSITIONS QUI ONT MENÉ À LA MISE AU POINT DE

VARIÉTÉS TOUJOURS PLUS PERFORMANTES.

TEXTE DE JÉRÔME AUCLAIR, PH. D.

SOYA :LA GÉNÉTIQUE ELITE

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potentiel de rendement, et contre le Sclerotinia dans les essais du Réseau grandes cultures du Québec (RGCQ). Il possède aussi le gène Rps1k pour la résistance au Phytophthora. Même si ces caractéristiques étaient suffisantes pour en faire une variété championne, ce qui différencie l’Akras R2 de toutes les autres variétés est la hauteur de sa première gousse. Une caractéris-tique qui facilite la récolte et diminue les pertes. Les rendements réels sont d’autant plus grands.

AJOK R2Cette variété permet d’atteindre des rendements élevés tant dans de bonnes conditions que dans de moins bonnes. Il possède le gène de résis-tance Rps6, qui le protège contre plus de types de Phytophthora que les gènes usuels Rps1c ou 1k, en particulier contre la race 25, qui fait son apparition au Canada. Au RGCQ, de Nicolet à Saint-Césaire, l’Ajok R2 a démontré son potentiel dans un grand nombre de situations. Il produit un gros plant, qui remplira rapidement les rangs tout en soutenant le rendement supplémentaire d’une régie intensive. Malgré sa stature impo-sante, l’Ajok R2 montre une bonne tolérance au Sclerotinia (RGCQ 2014 et essais privés).

MYLITTA R2Le Mylitta R2 est une « grosse variété » : gros rendement et gros plant. Il est aussi très buis-sonnant et remplira rapidement les rangs au printemps. Il offre donc une performance supérieure, tant avec des espacements étroits (environ 15 po) que grands (environ 30 po). Il est doté du gène Rps1c contre le Phytophthora. Au un contre un, le Mylitta R2 bat de façon constante des variétés jusqu’à une semaine plus tardives. Il est issu d’une famille génétique peu présente au Québec, mais avec ses performances, vous verrez sûrement d’autres membres de cette famille dans les années à venir.

CARDA R2Le Carda R2 est la variété la plus tardive offerte au Québec. Buissonnant et de grande taille, il est particulièrement adapté au semis en rangs avec grands espacements. Résistant au nématode à kyste du soya (NKS) et pourvu du gène Rps1c pour la résistance au Phytophthora, le Carda R2 offre une protection complète pour le sud du Québec. Soya de pleine saison, il offre un potentiel de rendement sans précédent pour les producteurs qui veulent tirer avantage de toute la saison de croissance.

| AFFAIRES AGRICOLES

L’auteurJérôme Auclair, Ph. D. Sélectionneur en amélioration végétaleLa Coop fédéré[email protected]

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PHILIPPE DESJARDINS, ÉLEVEUR DE PORCS, A D’ABORD OUVERT UN KIOSQUE À LA FERME POUR QUE SA CONJOINTE PUISSE Y TRAVAILLER. IL A MAINTENANT UNE BELLE BOUCHERIE ET VEND SA VIANDE PARTOUT

AU QUÉBEC. DANS CET ARTICLE, NOUS PRÉSENTONS QUELQUES MODÈLES DE COMMERCIALISATION À LA FERME ET DES PROGRAMMES POUR INCITER

À LA DIVERSIFICATION DES MODÈLES D’AFFAIRES.

La Boucherie au Pignon Vert, pro-priété de Philippe Desjardins, à Saint-Liguori, est un des fleurons de Lanaudière. Bien qu’elle ait démarré modestement, en 2004, cette boucherie vend maintenant sa viande dans de nombreuses épiceries, tant en région que sur l’avenue du Mont-Royal, dans la métropole.

Pourtant, Philippe Desjardins, éleveur depuis les années 1990, avait un tout autre projet en tête lorsqu’il a ouvert son kiosque à la ferme. « À l’époque, ma femme travail-lait à l’extérieur et je voulais qu’elle puisse travailler à la maison, dit-il. Je voulais aussi élaborer un projet pour mes vieux jours. Comme je suis gourmand, j’ai eu l’idée d’ouvrir une boucherie ». Peu à peu, il achète l’équipement – d’occasion – nécessaire pour démarrer son projet et construit lui-même les bâtiments pour abriter sa boucherie.

Passionné, Philippe Desjardins a appris sur le terrain. Il est même retourné sur les bancs d’école pour recevoir les formations nécessaires en salubrité. Il contrôle son produit de A à Z : il cultive les grains qui serviront de moulée aux porcs et débite sur place la viande vendue dans son commerce.

Après 10 ans de travail, il se dit heureux des résultats. Son élevage et sa boucherie font vivre sa famille de trois enfants. En plus de diversifier son chiffre d’affaires,

TEXTE DE CÉLINE NORMANDIN

VENTE À LA FERME POUR DIVERSIFIER SON MODÈLE D’AFFAIRES

ses deux entreprises s’avèrent de bonnes occasions pour la relève familiale.

LA BERGERIE DU NORD : BÂTIR SUR DU SOLIDEUn an à peine après avoir débuté dans l’élevage d’agneaux, en 2003, à Normandin, Julie Trottier avait déjà en tête de diversi-fier ses activités par envie d’entreprendre un nouveau défi. « C’est ma personnalité, lance-t-elle, enjouée. La production ne m’occupait pas tant que ça, et j’aime avoir plein de projets. »

Après de nombreux essais et une pro-duction artisanale dans le sous-sol de ses parents, Julie commence la vente de savons au lait de brebis, parce que la production est « simple et que le créneau n’était pas développé », explique la productrice. Dix ans après qu’elle a repris et converti la ferme laitière de ses parents, le chiffre d’affaires de la Bergerie du Nord provient à parts égales de la vente de viande d’agneau et de celle de savons.

Pour Julie Trottier, son succès est lié à la fois à son entêtement et à sa démarche en affaires. Selon elle, il ne faut pas aller trop vite : il vaut mieux user de prudence et croître graduellement. « On travaille avec du vivant. Il faut consolider ses trucs avant de se lancer dans autre chose », dit-elle.  

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1. Après 10 ans de travail, Philippe Desjardins est heureux des résultats. Son élevage et sa boucherie font vivre sa conjointe et ses trois enfants.

2. Les porcelets nouveau-nés seront engraissés à la ferme.

3. La boucherie vend plusieurs produits, dont des charcuteries et des plats cuisinés, en plus de 20 sortes de saucisses.

4-5. Philippe contrôle son produit de A à Z : des grains qui serviront de moulée aux porcs jusqu’à la viande, débitée sur place et vendue dans son commerce.

6. Avec ses savons au lait de brebis qu’elle produit de façon artisanale, Julie Trottier développe un nouveau créneau de marché. Ses produits sont vendus partout en province.

7. Le succès de Julie a incité les dirigeants de La Coop des deux rives à lui confier la gestion du P’tit Marché du Nord, à Normandin

8. Un an à peine après avoir débuté dans l’élevage d’agneaux, Julie avait déjà en tête de diversifier ses activités et d’entreprendre un nouveau défi.

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Elle soigne son image sur les réseaux sociaux et y a développé, au fil des ans, une véritable communauté. Elle vend d’ailleurs ses produits partout au Québec.

Le succès de Julie a incité les dirigeants de La Coop des deux rives à lui confier la gestion du P’tit Marché du Nord, à Normandin (voir page 42), une initiative qui rejoignait son propre désir de faire valoir les produits du terroir.

FERME ANDRÉ LÉVESQUE : LA DÉMOCRATIE PAR LE LÉGUME !Après avoir délaissé la vente à la ferme pendant 10 ans, c’est par choix qu’André Lévesque décide de retourner à ses pre-mières amours. Producteur maraîcher depuis 40 ans à Roberval, il avait pourtant construit un solide réseau de vente chez les commerçants locaux. L’objectif de sa décision ? Reprendre la maîtrise de ses pro-duits, mais aussi de sa mise en marché, devenue dépendante des escomptes et des promotions de ses clients. « C’est pas mal

LANAUDIÈRE SE DÉMARQUELa région de Lanaudière fait belle figure au chapitre des PME, avec un nombre croissant d’entreprises agroalimen-taires florissantes dans des secteurs de production très diversifiés. La Coop Profid’Or s’est elle-même distinguée par son soutien et son encouragement à l’entrepre neuriat de ses membres. Elle encourage la diversification auprès des producteurs traditionnels et se fait un devoir de trou-ver des marchés, indique son directeur général, André Langlois. Le président de cette coopérative, Robert Perreault, a lui-même prêché par l’exemple en étant parmi les premiers dans la région à se lancer dans la production de blé destiné à la Boulangerie St-Méthode, entreprise soixantenaire dirigée depuis ses débuts par la famille Faucher.

Le Conseil de développement bioalimentaire de Lanaudière (CDBL) connaît bien les possibilités des secteurs agricoles et alimentaires. Cet organisme a pour objectif d’accroître la part du bioalimentaire dans le développe-ment économique de la région. « Comme nous sommes la quatrième région agricole du Québec, c’est un axe de développement économique fort important », confirme Annie Cossette, coordonnatrice de la mise en marché et de la promotion au CDBL.

Depuis 1991, le Conseil travaille à créer un environnement propice au développement des entreprises. Des activités de promotion des produits, de la R et D ainsi que des services spécialisés auprès des entreprises en agrotourisme sont quelques-unes des interventions déployées. Mentionnons que tous les acteurs de cette industrie travaillent en concertation.

moins stressant, commente le maraîcher. J’ai plus de contrôle sur mes récoltes et mes champs, parce que je suis plus présent à la ferme. Je contrôle mieux aussi la qualité de mon produit, puisque je ne dépends pas d’un intermédiaire. Et mon revenu est le même qu’avant. »

Selon le producteur, le succès dépend à parts égales d’une bonne mise en marché et de la qualité du produit. Un bon empla-cement ne nuit pas non plus. Il possède deux kiosques, un à la ferme et un autre sur une route régionale, près de la ville. « Il faut aimer le public », précise-t-il.

Mais le plan d’affaires d’André Lévesque repose sur une conviction profonde. « J’ai voulu faire ce que j’appelle de la démocra-tisation de la vente au détail, raconte-t-il. On me dit souvent que je devrais vendre plus cher. Mais je choisis de faire moins de profits et de faire profiter les consomma-teurs de beaux produits frais. J’ai com-mencé comme ça et j’ai toujours gardé la même philosophie. »  

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9 à 11. Producteur maraîcher depuis 40 ans, André attribue son succès à une bonne mise en marché et à la qualité de ses produits.

12. Installé sur un site enchanteur, André Lévesque est fidèle à sa philosophie. Il choisit de faire moins de profits et de faire profiter ses clients de beaux produits frais.

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Avis aux producteurs sur l’utilisation responsable des caractèresMonsanto Company est membre du groupe Excellence Through StewardshipMD (ETS). Les produits de Monsanto sont commercialisés conformément aux normes de mise en marché responsable de l’ETS et à la politique de Monsanto pour la commercialisation des produits végétaux issus de la biotechnologie dans les cultures de base. L’importation des produits commercialisés a été approuvée dans les principaux marchés d’exportation dotés de systèmes de réglementation compétents. Toute récolte ou matière obtenue à partir de ce produit ne peut être exportée, utilisée, transformée ou vendue que dans les pays où toutes les approbations réglementaires nécessaires ont été accordées. Il est illégal, en vertu des lois nationales et internationales, d’exporter des produits contenant des caractères issus de la biotechnologie dans un pays où l’importation de telles marchandises n’est pas permise. Les producteurs devraient communiquer avec leur négociant en grains ou acheteur de produit pour confirmer la politique de ces derniers relativement à l’achat de ce produit. Excellence Through StewardshipMD est une marque déposée de Excellence Through Stewardship.

VEUILLEZ TOUJOURS LIRE ET SUIVRE LES DIRECTIVES DES ÉTIQUETTES DES PESTICIDES. Les cultures Roundup ReadyMD possèdent des gènes qui leur confèrent une tolérance au glyphosate, l’ingrédient actif des herbicides RoundupMD pour usage agricole. Les herbicides RoundupMD pour usage agricole détruiront les cultures qui ne tolèrent pas le glyphosate. La technologie de traitement de semences AcceleronMD pour le canola contient les matières actives difénoconazole, métalaxyl (isomères M et S), fludioxonil et thiaméthoxam. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le canola plus VibranceMD est une combinaison de deux produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives difénoconazole, métalaxyl (isomères M et S), fludioxonil, thiaméthoxam et sedaxane. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le maïs (fongicides et insecticide) est une combinaison de quatre produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives métalaxyl, trifloxystrobine, ipconazole et clothianidine. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le maïs (fongicides seulement) est une combinaison de trois produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives métalaxyl, trifloxystrobine et ipconazole. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le maïs avec PonchoMD/VoTivoMC (fongicides, insecticide et nématicide) est une combinaison de cinq produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives métalaxyl, trifloxystrobine, ipconazole, clothianidine et la souche Bacillus firmus I-1582. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le soya (fongicides et insecticide) est une combinaison de quatre produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives fluxapyroxad, pyraclostrobine, métalaxyl et imidaclopride. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le soya (fongicides seulement) est une combinaison de trois produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives fluxapyroxad, pyraclostrobine et métalaxyl. Acceleron et le logoMD, AcceleronMD, DEKALB et le logoMD, DEKALBMD, Genuity et le logoMD, GenuityMD, JumpStartMD, Refuge Intégral et le logoMD, Refuge IntégralMD, Roundup Ready 2 Technologie et le logoMC, Roundup Ready 2 RendementMD, Roundup ReadyMD, Roundup TransorbMD, Roundup WeatherMAXMD, RoundupMD, SmartStax et le logoMD, SmartStaxMD, TransorbMD, VT Double PROMD et VT Triple PROMD sont des marques de commerce de Monsanto Technology LLC. Utilisation sous licence. VibranceMD et FortenzaMD sont des marques déposées d’une société du groupe Syngenta. LibertyLinkMD et le logo de la goutte d’eau sont des marques de commerce de Bayer. Utilisation sous licence. HerculexMD est une marque déposée de Dow AgroSciences LLC. Utilisation sous licence. PonchoMD et VotivoMC sont des marques de commerce de Bayer. Utilisation sous licence. Toutes les autres marques de commerce appartiennent à leur titulaire respectif.

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Jean-François Robert, des Jardins de St-Félicien, tout comme Guillaume Doucet, du Potager fleuri du Lac, aiment bien pouvoir écouler une partie de leurs produits bios au P’tit marché du Nord, situé à Normandin.

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LA COOP DES DEUX RIVES : ACTEUR DE L’ÉCONOMIE Contrainte de fermer l’ancien gas bar du centre-ville de Normandin, au Lac-Saint-Jean (oui, oui, le même que dans la chanson des Colocs !), La Coop des deux rives a saisi la balle au bond. Elle a transformé la ferme-ture d’un lieu symbolique en coup d’éclat qui a redynamisé la rue, en plus de donner un coup de pouce à ses membres.

L’ancien poste d’essence a ainsi fait place, en 2013, à un marché public (le P’tit Marché du Nord), devenu une vitrine pour les produits locaux et québécois. La for-mule a connu un succès instantané, autant auprès de la population que des membres de la coopérative. « C’est un projet positif qui progresse d’année en année et qui fait boule de neige », raconte le directeur géné-ral de La Coop des deux rives, Dominique Tremblay.

Devant le succès du marché, la coopéra-tive a décidé d’acquérir un centre de trans-formation qui permettra aux producteurs, dès cette année, d’augmenter leur produc-tion, tout en limitant les pertes. C’est qu’ils pourront entreposer leur surplus dans les congélateurs du centre.

La réussite du marché a également attiré de nouveaux venus en production maraî-chère, en plus de resserrer les liens entre les maraîchers et la coopérative. « On existe pour donner du succès à nos membres », déclare simplement Dominique Tremblay.

LE MAPAQ ENCOURAGE LE DÉVELOPPEMENTQui ne connaît pas la campagne Aliments Québec ? Depuis plusieurs années, le MAPAQ sensibilise les consommateurs québécois aux produits d’ici. Les étiquettes avec une fleur de lys permettent de repérer en épicerie les produits fabriqués dans la province. Mais le gouvernement provin-cial veut pousser plus loin cette logique. Le ministère de l’Agriculture, des Pêche-ries et de l’Alimentation a signifié dans ses orientations qu’il souhaite encourager l’agrotourisme – une manière, selon lui, de diversifier et d’augmenter les revenus des entreprises agricoles.

Ces dernières bénéficient déjà du Programme proximité. Il vise à inciter « les producteurs et les transfor mateurs artisans à tirer profit des occasions d’affaires que

présente la mise en marché de proxi mité ». Un nouveau programme est maintenant offert : le Programme d’appui à la diver-sification et au déve lop pement régional. Celui-ci vise à appuyer « les entre prises agricoles qui ont des projets d’amé lio ration de leur producti vité et de diversi fi cation de leurs productions ou de leurs activités ».

Le réseau Agri-conseil fournit aussi de l’aide : élaboration d’un plan d’affaires, étude de marché, mise en marché, points forts et faibles du projet, image de marque et réalisation du projet.

L’HUMAIN DERRIÈRE LE PRODUITRémy Lambert, professeur à l’Université Laval, le confirme : l’agrotourisme est un secteur appelé à se développer davantage. « La croissance se résume toujours à une question de demande. Ce créneau est lié à l’origine des produits et, de plus en plus, les gens se posent des questions sur la prove-nance des produits et sur la manière dont la nourriture est fabriquée. »

Ce professeur ajoute qu’il est important que le producteur communique sa passion pour son produit. « Le consommateur veut être rassuré sur le produit. Il est aussi à la recherche d’une histoire, celle de l’humain ou de la famille qui se trouve derrière le bien. » Et comme le démontrent ses recherches, les producteurs commercia-lisant eux-mêmes leurs produits auraient tout avantage à se joindre à un réseau déjà structuré, qui procurera une crédibilité et offrira une vitrine à leurs produits.

QUELQUES CHIFFRESIl est difficile de savoir combien d’entre-prises font de la commercialisation à la ferme, puisque les kiosques sont souvent considérées comme une filiale d’une autre entreprise. Selon le MAPAQ, 3099 entre-prises déclaraient faire de la vente à la ferme en 2012, sans que cela constitue nécessairement leur activité principale.

En matière d’agrotourisme, ce chiffre recule à 837 entreprises. Ces dernières se retrouvent surtout en Montérégie (29 %), dans les Laurentides (12 %), dans Chaudière-Appalaches (10 %) et dans la Capitale-Nationale (9 %). Lanaudière se classe au sixième rang, avec 6,5 % de toutes les entre-prises faisant de l’agrotourisme.

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Jeff Kooyman, propriétaire de la ferme Chillowack Cattle Sales qui compte 3000 vaches en lactation et 70 employés. Elle produit entre 3 et 5 % du lait de la Colombie-Britannique.

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TEXTE DE NICOLAS MESLY

JEFF KOOYMAN EST ENCORE REMUÉ PAR UNE VIDÉO TOURNÉE EN CAMÉRA CACHÉE DANS SA FERME, CHILLOWACK CATTLE SALES (CCS), PAR LE GROUPE DE DÉFENSE DES ANIMAUX MERCY FOR ANIMALS. UNE CRISE QUI A FAIT MAL À L’INDUSTRIE

LAITIÈRE CANADIENNE. QUE FERA QUÉBEC APRÈS LA VASTE CONSULTATION PUBLIQUE SUR SON PROJET DE LOI VISANT L’AMÉLIORATION DE

LA SITUATION JURIDIQUE DE L’ANIMAL ?

Diffusée sur le réseau CTV en juin 2014, la vidéo tournée à la ferme de Jeff Kooyman montre des employés qui traitent les vaches de « sales putes », tapent sur les bêtes à coups de pied ou de bâton, en pendent une à l’aide d’une chaîne attachée à la pelle d’un tracteur. La vidéo est devenue virale sur les réseaux sociaux. Une ava-lanche de lettres, d’appels téléphoniques, de courriels injurieux et même de menaces de mort a déferlé dans les bureaux de CCS.

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MALTRAITANCE ANIMALE :JEFF KOOYMAN APPELLE À L’UNITÉ DE L’INDUSTRIE LAITIÈRE CANADIENNE

Petite localité agricole lovée dans la vallée fertile du Fraser, Chillowack, qui se vantait d’avoir sur son territoire la plus grande ferme laitière de la Colombie-Britannique – CCS –, est devenue « la ville tueuse de vaches ». En un clin d’œil, près de 100 000 consommateurs ont signé une pétition de Mercy for Animals (MFA) contre la maltraitance des vaches et invité les consommateurs à boycotter les produits de Saputo, principal transformateur du lait

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AFFAIRES AGRICOLES |

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Jeff Kooyman veut donner sa ver sion des faits, après avoir été broyé par la machine médiatique.

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de cette ferme. Pourtant, Jeff Kooyman, rencontré dans les bureaux de CCS, continue d’affirmer que « ses vaches sont parmi les mieux traitées au pays ».

UN ŒIL AU BEURRE NOIRJeff Kooyman est la figure médiatique d’une crise qui a donné un œil au beurre noir à une industrie laitière représentant 19 milliards $ du PIB du pays, crise qui transformera les pratiques des quelque 12 000 éleveurs canadiens, dont près de la moitié vivent au Québec.

Ce producteur gère la ferme familiale avec ses sept frères. « Le clan Kooyman » a transformé la petite entreprise paternelle de 60 vaches à ses débuts, dans les années 1960, en une mégaferme de 3000 vaches en lactation. CCS compte 70 employés et produit entre 3 et 5 % du lait de la province.

Les huit employés de l’équipe de nuit filmés ont tous été renvoyés. Sans vouloir excuser leur comportement, le producteur les décrit comme « de bons petits gars du village qui ont fait une erreur de jeunesse ». Ils font pourtant l’objet d’accusations criminelles.

Jeff Kooyman accepte de nous accor-der une entrevue, en compagnie de Diana Barchard, directrice financière de l’entre-prise – malgré les conseils contraires de son avocat. Il veut en effet donner sa ver-sion des faits, après avoir été broyé par la machine médiatique.

Dans les jours qui suivent la sortie de la vidéo, des brigades d’experts et de vétérinaires indépendants débarquent chez CCS, pour vérifier l’état des lieux. L’Office de mise en marché du lait de Colombie-Britannique (BCMMB) refuse d’abord le lait de la ferme « damnée ». Plus de 35 000 litres de lait sont jetés aux égouts, déplore le producteur. Saputo, sous la pression de la pétition de MFA, annonce aussi qu’elle ne transformera pas le lait de son plus gros fournisseur. « Après nous être assuré que le lait produit chez CCS l’était conformément au Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers, nous avons dû rediriger le

lait refusé par Saputo », explique Vicki Crites, responsable des communications et des relations publiques à BCMMB. Le lait de la mégaferme a été acheminé à un biodigesteur situé dans l’État de Washington, pour un coût de 200 000 $, absorbé par tous les producteurs.

PLUS DE POUVOIR AU BCMMBDepuis septembre 2014 – trois mois après la sortie de la vidéo –, le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers, publié en 2009 par le Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage, est devenu obligatoire en Colombie-Britannique (il était volontaire auparavant). Et c’est le BCMMB, mandaté par le gouvernement de la province, qui s’assure que tout est fait dans les règles de l’art chez les 500 producteurs de la province. À ce jour, l’organisation a recruté six inspecteurs pour accomplir cette tâche. Et cinq visites-surprises ont été effectuées chez CCS, sans qu’on décèle aucun écart de conduite.

Vicki Crites indique que le Code de pra-tiques vise le bien-être des bêtes, mais « ne touche pas à la cruauté envers les animaux. Par contre, si nos inspecteurs trouvent des vaches en condition de détresse, parce que mal nourries ou sans eau, nous pouvons immédiatement suspendre la collecte du lait et même révoquer la licence du produc-teur. » De plus, une entente a été conclue avec les transformateurs : ces derniers ne pourront plus refuser le lait des produc-teurs qui respectent le Code, comme ce fut le cas de Saputo.

LES LEÇONS TIRÉES PAR LE CLAN KOOYMANDepuis le scandale, CCS a nommé un directeur des ressources humaines. Les employés reçoivent tous une formation de trois jours et travaillent dorénavant sous l’œil d’un superviseur. Des caméras de surveillance ont aussi été installées dans les bâtiments. « On peut surveiller ce qui s’y passe 24 heures sur 24 à partir de nos téléphones cellulaires », précise Jeff Kooyman.

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La pratique consistant à soulever à l’aide d’un tracteur une vache coincée dans le carrousel est dorénavant interdite. Il faut maintenant sept hommes munis de sangles pour déplacer une bête de plus de 600 kg. Pourtant, d’après l’éleveur, l’ancienne méthode, entérinée par son propre vété-rinaire, est courante et ne faisait pas mal à l’animal. Selon lui, les reproches concer-nant ses pratiques d’élevage faits par les vétérinaires indépendants dans la foulée du scandale se résument au fait que la densité d’animaux était légèrement élevée.

MALGRÉ LE CODE, IL FAUDRA MONTRER PATTE BLANCHESi le Code de pratiques traite de l’écornage sans douleur des veaux ou encore de la coupe des queues des vaches, « les éleveurs canadiens devront faire beaucoup plus pour éliminer les problèmes de boiterie de leurs vaches. C’est leur plus grand enjeu ! » avertit la Dre Anne-Marie de Passillé, pro-fesseure de bien-être animal à l’Université de la Colombie-Britannique. Révoltée par la vidéo tournée chez CCS, l’experte, en poste à Agassiz, village situé à peine à 70 km de Chillowack, dit cependant n’avoir jamais visité cette entreprise. Par contre, son constat sur les problèmes de boiterie provient d’une étude pancanadienne réa-lisée chez 110 éleveurs du pays1. Le Code de pratiques des Producteurs laitiers du Canada recommande un taux idéal de boiterie de moins de 10 %. Toutefois, moins du quart des étables à stabulation libre visitées par son équipe atteignaient cet objectif. Jeff Kooyman admet que le problème de boi-terie existe, mais pas dans son élevage, ce que contredisent les images de la vidéo.

C’est un employé ayant travaillé un mois chez CCS, en mai 2014, qui a tourné la vidéo dans cette entreprise. Il était en réalité « un enquêteur » travaillant pour MFA. Le siège de cette organisation vouée à la défense des animaux se trouve à Hollywood, en Californie, et son site Internet promeut l’alimentation

végéta rienne et végétalienne. « Chillowack est notre huitième enquête au Canada », dit Krista Osborne, directrice canadienne de l’organisation depuis janvier 2015.

Le clan Kooyman envisage-t-il des poursuites à l’encontre de son employé-espion pour atteinte à la réputation de l’entreprise ? « Ça se fait dans certains États américains, où il est possible de poursuivre un employé qui se fait embaucher sous un faux motif. Mais tout ce que cette famille désire, c’est tourner la page », explique Diana Barchard.

Jeff Kooyman se dit profondément heurté par les réactions initiales du BCMMB, puis de Saputo, « qui a plié sous le lobby de MFA ». En juin 2015, le premier transformateur canadien a annoncé qu’il mettait en œuvre son propre code de bien-être animal dans les quatre pays où il possède des usines. Jeff Kooyman croit que l’industrie laitière canadienne aurait plus à gagner en présentant un front uni face à l’enjeu de maltraitance animale. « Ce qui nous est arrivé peut arriver à n’importe quel autre éleveur », ajoute-t-il.

« Le Québec a déjà eu son Chillowack », affirme Me Sophie Gaillard, lorsque le groupe Mercy for Animals a publié une vidéo sur la maltraitance des veaux de lait tournée dans un élevage de l’entreprise Delimax, en avril 2014. Avocate pour

1 How are Canadian farms doing in terms of cow comfort and lameness? Dairy Cluster Project on cow comfort and longevity, Anne-Marie de Passillé, Ph. D., Laboratoire d’éthologie, Agriculture et Agroalimentaire Canada, 2012

PROJET DE LOI 54, LA COOP FÉDÉRÉE ET OLYMEL SE PRONONCENT Le mardi 15 septembre, La Coop fédérée et sa société en commandite, Olymel, ont déposé chacune un mémoire à l’Assemblée nationale dans le cadre des consultations parlementaires sur le projet de loi 54. Ce projet de loi vise à accorder aux animaux le statut juridique d’êtres doués de sensibilité et dotés d’impératifs biologiques. Plusieurs des dispositions concernent les activités de l’entreprise, sur le plan de l’élevage, du transport et de l’abattage.

La Coop fédérée et Olymel accueillent favorablement ce projet de loi, car elles estiment que le bien-être est aussi synonyme de productivité et de rentabilité. Elles ont toutefois formulé quelques recommandations, essentiellement dans l’optique d’avoir une réglementation qui ne compromet pas la compétitivité de l’industrie.

On peut consulter le mémoire de La Coop fédérée sur le site : cooperateur.coop - Section Affaires économiques

MALTRAITANCE DES VACHES : QUE FERA LE QUÉBEC ?

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Depuis le scandale, CCS a nommé un directeur des ressources humaines et des des caméras de surveillance ont été installées dans les bâtiments.

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la défense des animaux à la SPCA de Montréal, Me Gaillard représente le groupe Animal Legal Defense Fund, qui a classé le Québec, trois années de suite, parmi les bons derniers au Canada en matière de lois visant la protection des animaux.

C’est pour endiguer cette mauvaise réputation que le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, Pierre Paradis, a lancé cet automne une vaste consul tation publique sur son projet de loi 54. Ce projet vise à ne plus consi dérer les animaux comme des « biens meubles », mais comme « des êtres doués de sensi bi lité ayant des impé ratifs bio lo-giques ».

Reste à voir si le ministre Paradis rendra obligatoire illico le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers, par l’entremise de l’agence provinciale de mise en marché du lait, soit les Producteurs de lait du Québec, comme c’est maintenant le cas en Colombie-Britannique. De leur côté, lors de leur assemblée annuelle tenue à Vancouver en juillet dernier, les délégués des Producteurs laitiers du Canada (PLC) ont voté à l’unanimité l’adoption du programme ProAction, qui inclut un volet bien-être des vaches. Volontaire sur une période de deux ans, le programme ProAction deviendra obligatoire seulement en 2017.

« On vise à ce que le volet bien-être animal soit adopté par les producteurs, comme le fut le volet lait de qualité du

programme ProAction », explique Pierre Lampron, membre du conseil d’adminis-tration des PLC et responsable du dossier bien-être animal. Lancé il y a huit ans, le volet lait de qualité est adopté par 97 % des producteurs du pays. Il reste aujourd’hui une centaine de producteurs récalcitrants sur les quelque 6000 fermes du Québec, selon Pierre Lampron. Ces derniers se voient infliger des amendes oscillant entre 2 et 8 $ l’hectolitre.

QUI FERA LES INSPECTIONS DE BIEN-ÊTRE ANIMAL ET À QUEL COÛT ?À l’heure actuelle, on ne sait pas qui sera agréé pour faire les inspections visant à s’assurer que les bonnes pratiques pour le soin des bovins laitiers sont respectées. Ce mandat pourrait être confié par les Producteurs laitiers du Québec au secteur privé (vétérinaires, personnel de Valacta, classificateurs de Holstein Canada…). « On préférerait que ces inspections soient réalisées par les inspecteurs du MAPAQ », tranche Me Sophie Gaillard.

Quoi qu’il en soit, pour que le sys-tème d’inspection du bien-être animal ne revienne pas trop cher aux producteurs, il faudra « qu’il soit crédible », dit Pierre Lampron. À l’heure actuelle, il existe des zones grises entre le bien-être animal et la maltraitance. « Si le code est obligatoire et qu’on se retrouve avec un éleveur dont 80 % des vaches boitent, qu’est-ce qu’on fait ? » demande-t-il.

Par ailleurs, Pierre Lampron applaudit le programme de bien-être animal adopté par le plus gros transformateur laitier au pays, Saputo, et calqué sur le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers. « Ça va mettre de la pression sur les éleveurs, car Saputo doit rendre des comptes directement aux consomma-teurs », dit-il.

Selon Me Sophie Gaillard, une des condi-tions intrinsèques du bien-être animal est qu’une bête doit pouvoir exprimer ses comportements naturels. Le bonheur des vaches est-il dans les prés ? Dans les étables attachées ? Dans les étables à stabulation libre ? Les travaux de la commission parle-mentaire du ministre Paradis répondront peut-être à la question.

Le Code de pratiques des Producteurs laitiers du Canada recommande un taux idéal de boiterie de moins de 10 %. Toutefois, lors de son étude pancana-dienne, moins du quart des étables à stabulation libre visitées par la Dre Anne-Marie de Passillé et son équipe atteignaient cet objectif.

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ÉCONOMIEHAUSSE SUBITE DE 800 M $ DE LA VALEUR DES FERMES LAITIÈRES La modification de la politique sur le quota par les provinces signataires de l’entente P5, en juillet dernier, a des conséquences positives sur le bilan financier des fermes laitières. La conversion du quota non négociable, effectuée au mois d’août, représente un avoir net supplémentaire de quelque 800 M $ pour l’ensemble des entreprises du Québec et de l’Ontario. À l’échelle de la ferme, c’est environ 70 000 $ de plus en capitaux propres au Québec et 100 000 $ en Ontario. Dans cette dernière province, la totalité du quota non négociable a été convertie et le prix du quota a été diminué à 24 000 $ dès le mois d’août. Du côté de la Belle Province, seulement une tranche de quota non négociable a été convertie cet été. Lorsque la totalité de ce quota aura été convertie (d’ici le 1er août 2017) et que le prix plafond deviendra 24 000 $ le kilo de matière grasse, les entreprises bénéficieront d’un gain d’avoir net d’environ 850 M $ (140 000 $ par ferme) par rapport à la situation qui avait cours en juillet dernier.(Faits saillants laitiers québécois 2014, du Groupe AGÉCO; les calculs sont de nous)

GESTIONDES RÉUNIONS DE TRAVAIL RÉUSSIESIl n’est pas toujours évident d’organiser des réunions de travail pour une famille agricole. Lorsque nous proposons cette discipline d’équipe à des gens qui, pourtant, expriment le désir d’améliorer leurs relations, nous entendons souvent les mêmes commentaires : « On n’aime pas les rencontres planifiées » ou encore « On manque de temps pour faire notre ouvrage ! » Ces raisons sont très légitimes. Pour bien des familles qui sont dans les affaires, le problème est que leur expérience en matière de réunions n’est pas toujours positive. Il est donc très important de travailler sur les éléments qui freinent les bonnes rencontres et de se faire accompagner par un professionnel si on en ressent le besoin. Voici quelques principes de base pour rendre une réunion efficace :• Désigner une personne responsable de

planifier et d’organiser les réunions.• Affecter une personne à l’animation.

Cette personne s’assure entre autres de donner la parole à tout le monde. Vu le statut familial des entreprises agricoles, il est important que l’animateur soit capable de se détacher de la relation plus personnelle qu’il entretient avec les personnes qui parlent et de se concentrer sur ce qu’elles disent.

• Établir un ordre du jour avec des points précis à discuter.

• Choisir un lieu qui convient à tous.• Éviter les réunions durant les repas.• Faire les suivis nécessaires après

la réunion.( Isabelle Éthier, Groupe ProConseil , www.groupeproconseil.com)

AGRICOLELES PESTICIDES ET LA SANTÉ : RAPPEL DES BONNES PRATIQUESLes pesticides permettent de lutter efficacement contre les insectes ravageurs, les maladies des plantes et les mauvaises herbes. Dans le feu de l’action, on oublie parfois que ces produits peuvent être toxiques pour l’environnement et la santé humaine s’ils ne sont pas manipulés correctement. À ce propos, le ministère de l’Agriculture français a récemment rappelé que certaines formes de cancer, pouvant résulter de l’exposition aux pesticides, s’ajoutent aux maladies professionnelles des agriculteurs. Il est donc très important d’adopter les bonnes pratiques de gestion des pesticides. Il vous suffit de vous rendre sur le site du MAPAQ (goo.gl/YtcWRz) et de consulter la Trousse d’information sur les pesticides : pour protéger l’environnement et la santé humaine.

AGRICOLEINVESTISSEMENT POUR L’IMMUNITÉ

DES POULETSLe gouvernement du Canada a décidé d’améliorer la productivité dans l’éle-vage de poulets de chair en investissant 400 000 $ dans le Collège de médecine vétérinaire de l’Université de la Saskat-chewan. L’objectif : mettre au point et commercialiser une technologie visant à renforcer l’immunité des poulets. La technologie en question est un agent protecteur par aérosol qui pourrait s’avérer une solution de rechange aux antibiotiques.

ÉCONOMIEQU’EST-CE QU’UNE FERME MOYENNE ?La forte disparité au sein des entreprises agricoles québécoises diminue la pertinence du calcul de leur taille moyenne. En effet, le revenu moyen des entreprises agricoles au Québec, qui s’établit à 285 000 $, masque leur forte concentration. Un autre indicateur, le point milieu, permet mieux d’en prendre la mesure. Au Québec, le point milieu s’établit à 792 000 $, ce qui signifie que les entreprises agricoles qui génèrent un revenu supérieur à ce seuil sont respon-sables de la moitié de la production agricole québécoise. Ainsi, 2400 fermes concentrent 50 % du revenu agricole au Québec, l’autre moitié étant générée par quelque 27 000 entreprises.

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Environ les deux tiers de l’aquaculture se font à l’intérieur des terres, en eau douce, surtout dans des étangs.

n Poissons (aquaculture)n Viande bovine

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L’élevage de poissons a dépassé la production bovine en 2014. Une tendance qui ne va que s’accentuer dans le futur. (Source : FAO)

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AVANT LES ANNÉES 1980, LA RÉCOLTE DES POISSONS ET MOLLUSQUES AVAIT PEU D’IMPACT SUR LE SECTEUR AGRICOLE, CONTRAIREMENT AUX AUTRES VIANDES. DEPUIS QU’ON EN PRATIQUE L’ÉLEVAGE (AQUACULTURE), L’UTILISATION DE GRAINS ET D’OLÉAGINEUX POUR LEUR ALIMENTATION MODIFIE CETTE RÉALITÉ.

L’impact de l’aquaculture sur le sec-teur agricole est perceptible à tel point que la FAO mentionne, dans ses perspectives à long terme, que « les prix des tourteaux protéiques seraient même plus bas s’ils n’étaient pas soutenus par les prix élevés des tourteaux de poisson, résultat de la forte demande du secteur en expansion de l’aquaculture1 ».

Le poisson est un aliment de grande valeur nutritionnelle, riche en protéines et autres nutriments. Dans plusieurs régions du monde, il contribue à assurer une ali-mentation équilibrée. Il est populaire dans les pays très peuplés d’Asie, comme la Chine, le Japon et l’Indonésie. À titre d’exemple, un Japonais mange deux fois plus de poissons qu’un Canadien.

L’émergence de la classe moyenne dans les pays en développement aug-mente la consommation de poissons et fruits de mer par habitant, tout comme celle des autres viandes. Par le passé, cette demande était surtout comblée par la pêche. Mais ça fait plus de 20 ans que les volumes de pêche mondiaux plafonnent autour de 90 millions de tonnes par année. C’est largement insuffisant pour satisfaire les besoins totaux, évalués actuellement à 165 millions de tonnes.

Par ailleurs, les volumes de pêche ne devraient pas augmenter de façon consi-dérable à l’avenir. Bien que certains pays aient redoublé d’efforts pour recons-tituer les stocks et mettre en place de meilleurs systèmes de gestion, plusieurs espèces font encore l’objet de surpêche.

IMPACT DE L’AQUACULTURE SUR L’AGRICULTURE

La demande future devra nécessairement être comblée par l’aquaculture.

AQUACULTURE ET DEMANDE EN GRAINS ET OLÉAGINEUXQuasi inexistante au début des années 1970, la production aquacole a connu une croissance phénoménale depuis. À un point tel que l’élevage de poissons a récemment dépassé la production bovine en ce qui a trait aux volumes. Et tandis que la pro-duction bovine va progresser légèrement au cours des prochaines années, celle de poissons poursuivra sa lancée (figure 1).

L’aquaculture consomme dans le monde environ 60 millions de tonnes de grains et oléagineux; un tiers est préparé à la ferme, et les deux autres tiers sont sous forme d’aliments composés et préparés industriellement. En guise de comparaison, la production de moulée pour animaux au Canada s’élève à 20 millions de tonnes, soit trois fois moins que le volume mondial consommé par l’aquaculture.

1 Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2014-2023, p. 162.

Figure 1PRODUCTION MONDIALE DE POISSON ET DE VIANDE BOVINE

TEXTE DE JEAN-SÉBASTIEN LAFLAMME, AGRONOME, M. SC.

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n Poissons (aquaculture)n Viandes

Consommationen grain et oléagineux

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Le poisson est une denrée alimentaire dont les échanges commerciaux sont très importants. Le volume de poissons échangés entre pays est supérieur à celui de toutes les autres viandes combinées. (Source : FAO)

Le volume de poissons d’élevage représente presque le cinquième de toute la production animale. Mais l’aquaculture consomme seulement 5 % des grains et oléagineux utilisés en alimentation animale. (Source : FAO; les calculs sont de nous)

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IMPACT DE L’AQUACULTURE SUR L’AGRICULTURE Ce n’est donc pas rien, mais c’est peu

relativement au volume total de produc-tion, si l’on compare aux autres viandes. Ainsi, malgré le fait que l’aquaculture représente presque le cinquième de toute la production animale, elle consomme moins de 5 % des grains et oléagineux destinés à l’alimentation animale (figure 2).

Deux principaux éléments expliquent cette situation. D’une part, les poissons ont la conversion alimentaire la plus efficace de tous les animaux d’élevage, devançant même les poulets. D’autre part, le tiers des poissons produits en élevage ne néces-sitent aucun apport alimentaire externe. Ces poissons (surtout des carpes) se nour-rissent simplement en filtrant l’eau et en consommant les algues qui poussent dans le plan d’eau.

Malgré cela, l’impact de l’aquaculture sur la demande en grains et oléagineux ne va que s’accentuer. Tout comme pour les terres arables, le manque grandissant de superficies disponibles fait que l’on se tourne de plus en plus vers des élevages intensifs, où les poissons sont nourris avec des aliments complets. L’enrichissement de la population encourage aussi la pro-duction de poissons à haute valeur ajoutée (comme le saumon), qui consomment plus d’aliments que d’autres espèces.

Somme toute, l’aquaculture influence donc le marché des grains et oléagineux et le fera de plus en plus – même si la production

d’un kilo de saumon n’exige pas autant de tourteau que celle d’un kilo de poulet ou de porc.

LE PHÉNOMÈNE DE L’AQUACULTURELe boum de l’aquaculture n’est pas survenu en Amérique du Nord. On y produit moins de 1 % du volume mondial. La production a même décliné ces dernières années, notamment en raison de la hausse des importations provenant de régions avec des coûts de production plus compétitifs. En fait, l’essentiel de la production aqua-cole provient des pays d’Asie, soit près de 90 % des volumes mondiaux. À elle seule, la Chine assure les deux tiers de l’ensemble de la production. Cette concentration géo-graphique a pour conséquence que les poissons sont parmi les denrées alimen-taires faisant l’objet du plus grand volume d’échanges commerciaux (figure 3).

Environ les deux tiers de l’aquaculture se font à l’intérieur des terres, en eau douce, surtout dans des étangs. L’autre tiers se fait en mer, dans les régions côtières. Plus de 350 espèces de poissons font l’objet d’élevage. Les espèces les plus populaires appartiennent à la famille des carpes, surtout en Asie, alors que les salmonidés (saumons, truites, etc.) sont nettement plus populaires en Europe et en Amérique du Nord. L’élevage de crevettes représente aussi une part importante des revenus générés par l’aquaculture.

Figure 2VIANDES ET POISSONS DANS LE MONDE : VOLUME DE PRODUCTION ET CONSOMMATION DE GRAINS ET OLÉAGINEUX

Figure 3ÉCHANGES MONDIAUX DE CERTAINES DENRÉES ALIMENTAIRES

AFFAIRES ÉCONOMIQUES

Un Japonais mange deux fois plus de poissons qu’un Canadien.

L’auteurJean-Sébastien Laflamme, agronome, M. Sc., Conseiller aux affaires économiques, La Coop fédérée [email protected]

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États-Unis, Brésil, Nouvelle-Zélande, même l’Allemagne, voisine de la France : le modèle agricole dominant a changé et une nouvelle normale a été établie.

L’AGRICULTURE FRANÇAISE est bouleversée.

Au début du mois de septembre, tracteurs ont

roulé sur Paris et producteurs ont marché sur

Bruxelles, histoire de sensibiliser l’opinion

publique et les politiciens à ce que certains

qualifient de crise généralisée de l’agriculture.

Éleveurs laitiers, bovins, porcins, céréaliers :

la totale.

Personne ne se surprendra d’entendre les

éleveurs laitiers crier haut et fort leur désar-

roi. Le prix du lait sur le marché mondial

(dont les fluctuations touchent de près les

producteurs européens) a atteint un creux

quasi historique au printemps dernier. À

Bruxelles, un manifestant se désole : « Il nous

faudrait un prix de base de 350 à 400 euros

pour 1000 litres [52 à 59 $/hl], alors qu’on est

payés 280 euros [41 $/hl] actuellement. » Une

situation provoquée principalement par le

ralentissement chinois, la suppression défi-

nitive des quotas européens et l’embargo

russe. Par contre, dans le secteur des viandes

rouges, le déclin est loin d’être aussi pro-

noncé. Le secteur porcin européen souffre

davantage que d’autres de l’embargo russe,

certes. Mais si crise il y a aujourd’hui, que

vivait-on en 2013, lorsque les marges

étaient encore plus serrées ? Dans

le même esprit, le secteur céréalier

est loin des sommets de rentabi-

lité des dernières années, mais

on est à des lieues du creux du

début des années 2000.

La situation fait craindre que le secteur

agricole français souffre d’un malaise plus

profond, plus pernicieux. Pour le sociologue

du monde rural François Purseigle, « l’agri-

culture française, au modèle éclaté avec un

demi-million d’exploitations, a loupé le

coche de la mutualisation des investisse-

ments [consolidation], des économies

d’échelle et des attentes de la société en

matière de “normalisation environnemen-

tale” ». On ne saurait si bien dire. De tout

temps, les attentes des consommateurs et

les réalités intraitables de l’économie de

marché ont exigé un rythme soutenu de

croissance et d’innovation. Manifestement,

la concurrence s’est distanciée. États-Unis,

Brésil, Nouvelle-Zélande, même l’Allemagne

voisine : le modèle agricole dominant a

changé et une nouvelle normale a été établie.

Le président de la Fédération nationale des

syndicats d’exploitants agricoles – l’équiva-

lent français de l’UPA – constate le fossé : « Il

faut engager un vaste plan pour moderniser

les bâtiments, automatiser les abattoirs,

organiser les regroupements d’exploitations

afin qu’elles soient plus productives. »

La nécessité de suivre cette tendance

est-elle une inévitable fatalité ? L’un des rôles

des politiques agricoles est de procurer la

marge de manœuvre nécessaire au maintien

d’un modèle agricole reflétant les attentes

d’une société. Seulement, cette marge de

manœuvre n’est pas illimitée. Et c’est là que

le bât blesse : les outils français de politique

agricole, à travers la Politique agricole com-

mune, sont déjà plutôt généreux. Lorsque la

marge de manœuvre qu’ils procurent ne

suffit plus, c’est le cul-de-sac. Ajoutons à cela

l’évidente incapacité des États européens à

réinjecter des fonds dans leur agriculture à

hauteur des besoins exprimés, et le portrait

est complet.

L’agriculture française traverse une crise

existentielle profonde, qui laissera des cica-

trices tout aussi profondes. À méditer.

FAITS ET GESTES

ÉMOI À PARISVINCENT CLOUTIER, AGRONOME, MBA, ÉCONOMISTE PRINCIPAL, LA COOP FÉDÉRÉE

[email protected]

Page 51: Coopérateur | Octobre 2015

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