C O M E N I U SET L'EDUCATION CONTEMPORAINE

UN SYMPOSIUM INTERNATIONAL

édité par.

C. H. DOBINSON

1972

INSTITUT D E L ' U N E S C O P O U R L ' E D U C A T I O N , H A M B O U R G

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C O M E N I U SET L'EDUCATION CONTEMPORAINE

UN SYMPOSIUM INTERNATIONAL

édité par

C. H. DOBINSON

1972

INSTITUT D E L ' U N E S C O P O U R L ' E D U C A T I O N , H A M B O U R G

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l'Institut de l'Uneseo pour l'Education (Hambourg)est un institut à caractère international financé par unfonds auquel est versée, en particulier, la contributiondu gouvernement de la République fédérale d'Allemagne.Alors que les programmes de l'Institut sont établis enconsultation avec le Directeur général de l'UHESCO,l'Institut assume la pleine responsabilité de ses publi-cations et l'tnffiSCO, en tant qu'organisation, n'est pasresponsable de leur contenu.

les points de vue, faits et opinions exprimés icisont ceux des auteurs, et ne correspondent pas nécessai-rement aux positions officielles de 1'Institut"de l'Unescopour l'Education, Hambourg.

Institut de 1'Unesco pour l'Education, Hambourg

Jan Amos Comenius1592 - 1670

PERSOMES QUI OUI APPORTE IŒUR COMRIBUlIOBiA LA BEDACSIOÏT DE CEI OUTOAGE

C.H. DOBINSOIT (éditeur)Professeur émêrite d'éducationà l'Université de ReadingRoyaume Uni

John E. SADEERPh.D., P.O.P.Précédent Directeurdu Département d'éducationCity of Birmingham Collège of EducationBoyaume Uni

Dagmar CAPKOVA

Bogdan SUCHODOISEI

Ph.Dr., Ose.Institut d'Education ComeniusAcadémie tchèque des sciencesŒché o o sloTaquie

Dr.Professeur d'éducationà l'Université de VarsoviePrésident du Comité pour l'éducationà l'Académie polonaise des sciencesPologne

Jean AUBA Inspecteur généralDirecteur du Centre internationald'éducation à SèvresFrance

PBEAMBUIiE

le Conseil de surveillance de l'Institut de 1'Unescopour l'Education a décidé, au cours de sa 21e session,gui a eu lieu à Hambourg en 1969, âe publier un ouvragepour commémorer le tricentenaire de la mort de Jean AtaosComenius. Ce grand éducateur du 17e siècle inspire encoreceux qui se préoccupent d'améliorer l'éducation contem-poraine. C'est pourquoi, on a estimé qu'un tel ouvrageserait aussi des plus appropriés comme représentant unedes activités de l'Institut de 1'Unesco pour l'Année Inter-nationale de l'Education 1970, qui a été désignée parl'Assemblée générale des Hâtions Unies à la suggestion del'UHESCO.

l'Institut de l'Unesco remercie M. G.H. Dofcinson,professeur êmérite à l'Université de Heading qui, par sesremarquables qualités de rédacteur, a permis la publicationde cet ouvrage, et aussi tous ceux qui ont contribué parleur -travail et recherche à rédiger les articles contenusdans ce symposium international.

A l'occasion de la publication de la version française,nous aimerions exprimer notre gratitude à Mme P. Armier,du Centre international d'Etudes Pédagogiques à Sèvres, quia bien voulu contrôler soigneusement le texte françaistraduit de l'original anglais par M. E. Winandy, de l'Institutde 1'Unesco pour l'Education (excepté le chapitre IV dontl'original est rédigé en français).

ILâBIE DE MAŒIEEES

Bref aceI

n

III

îage6

Comeniizs: 1'i.onmeJohn E.. Sadler

les reconmendations de Oomenitisrelatives à l'éducationdes Jeunes enfantsDagmar Capcovâ

Oomenlus et les mètnoâes d'enseignementBogdan Suoùodolski

ComeniuB et l'organisation de1 ' enseignementJean

Oomenius, citoyen internationalJohn S. Sadler

Hôtes

Bibliographie

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42

69

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PREFACE

M. ïetsuya Eobayashi, Directetir de l'Institut del'Unesco pour l'Education à Hambourg a eu l'heureuseidée de marquer la coïncidence de l'Année Internationalede Pédagogie avec le tricentenaire de la mort du premiergrand éducateur international. L'importance de cettecoïncidence justifie à ses yeux la publication d'unouvrage consacré à Oomenius, ouvrage gui ne devrait passeulement mettre en évidence cette vision prophétique del'éducation élevant toute l'humanité à un niveau plusélevé de compréhension fraternelle et intellectuelle, |mais illustrerait lui-même cette idée BOUS la forme d'unrecueil international d'articles.

Il a eu, bisn sûr, la chance de pouvoir compter surd'éminents savants de quatre pays, qui ont accepté de separtager cette tâche. Mais 1'attribuer à la chance seule,ce serait ne pas tenir compte du facteur le plus importantde succès - notamment la corde qui fit vibrer dans lecoeur de chacun de ces grands savants l'idée de M. Kobayashi.On ne se rappelait pas seulement les appels passionnés deComenius, en avance de plusieurs siècles sur son temps,en vue de créer un corps international d'éducation et derépandre universellement l'étude, sans distinction de race,de couleur ou de religion. Il y a aujourd'hui un appelmondial, provenant surtout de jeunes, à un leadership quiconduise hors de la vallée du spectre de la mort. Œandisque les nations accumulent des .armements nucléaires etbiologiques, l'avenir de toute l'humanité est suspendudans un équilibre précaire, et les conflits idéologiques,dont les graines sont généralement semées à l'école, main-tiennent ces activités diaboliques vivantes et en progres-sion.

Ainsi, toute approche qui présente l'éducation commequelque chose qui déborde la nationalité, les frontièreset les langues, tout en faisant naître chez chaque êtrehumain ces pensées et ces sentiments qui l'obligent à sesentir préoccupé du bien-être et du bonheur de tout autreêtre humain, est à la fois une source d'inspiration etd'espoir.

Il y a toujours parmi nous des cyniques et despessimistes pour essayer à tort de se faire entendre, etsi on' avait discuté, il y a vingt ans, de la possibilitépour l'être humain de marcher sur la surface de la lune,ils auraient probablement 5tê en forte majorité. Mainte-nant que "l'impossible1 a été réalisé dans le monde .physique, on défie partout les hommes et les femmesd'atteindre l'impossible dans les relations humaines etde rendre la guerre impensable.

la tâche est prodigieuse, mais un progrès a été réaliséet se poursuit; comme Comenius, nous devons nous tenirfermement à cette vision et ne jamais cesser de travaillerà sa réalisation. C'est en effet l'héroïsme de Comenius,la façon dont il n'a jamais failli dans les buts qu'ils'était.assignés, malgré les souffrances et les obstaclesqui se dressèrent continuellement sur sa route, qui a donné,pour toutes les générations suivantes, une significationparticulière à son message. Car il est aisé de parler etd'écrire de 'place au soleil', lorsque tout est confortableet facile, agréable et sain autour de soi: c'est tout dif-férent lorsque l'expérience même favorise le pessimisme etle profond désarroi. Ainsi Comenius, par l'exemple de savie, a en quelque sorte sanctifié ses vues, la question desavoir maintenant si ses idées avaient - et ont encore -de la valeur apparaîtra clairement dans ce livre.

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Un. des principaux buts des auteurs et de l'éditeur,a consisté à rendre ce livre, nalgrê l'érudition qui secache derrière chaque chapitre, feBB"ïTipnBmigTn± lisible , etmëse par endroits, passionnant, tant sa. point de vueémotionnel qu'intellectuel. Il eet, en effet, difficilede considérer, sans éaotion, la vie et les pensées de cevisionnaire héroïque. H se trouve aujourd'hui probablementtrès peu d'écrivains, dont les pensées vaudraient lapeine d'être reconsidérées - et cela universellement — enl'année 2270 de notre ère. H est encore Boias probableque leurs écrits justifieront les efforts commis d'éminentssavants de quatre pays. En tant qu'éditeur, je désireexprimer ma gratitude à ces savants pour leur coopérationet surtout, pour avo±r limité leurs contributions à l'aspectde la pensée de Coraenius qu'on leur demandait de traiter,alors qu'à tons moments, ils auraient désiré arâeaaentrédiger tout l'ouvrage.

De toutes raanières, grâce à leur remarquable mélangede connaissances, d'enthousiasme.et de discipline de soi,nous possédons maintenant ce recueil international —résultat qui symbolise de manière unique et simultanéecertains des buts de l'Unesco et un peu de la vision, deJean Aiaos Comenius.

C.H. Dobinson

I. Commis: L'HOMMEJohn E. Sadler

Ceci est l'histoire d'un professeur tchèque, quimouiut .il y a trois cents ans. ïeut—être pas un nomme quiavait réussi, mais bien un homme qui a été considéré parses semblables et par beaucoup' d'autres, comme un grandpenseur et un héros. En cette occasion - le tricentenairede sa mort — il peut inspirer les hommes et les femmes detoutes croyances, races et nationalités.

Il s'appelait Jean Amos Comenius et naquit le 23 mars1592 dans un village de Moravie, province qui appartenaitalors au royaume de Bohême. Son père fut un membre respec-table et pieux d'un groupe religieux connu sous le nomd"Unitê de Stères' qui avait été fondé au 15e sièclecomme une expérience de vie chrétienne. Comenius et ses troissoeurs furent élevés dans une ambiance sévère, mais heureuse,selon les règles des Erêres. Il n'avait que 12 ans quand savie paisible fut profondément endeuillée par la mort de sonpère, de sa mère et de ses soeurs, emportés par une épidémiede peste. Ce terrible coup du sort ne modifia pas seulementtout le cours de sa vie, mais laissa inévitablement dans sonesprit une marque indélébile; c'est ainsi que plusieurs annéesplus tard, il racontait comment la sympathie qu'il éprouvaitpour les orphelins et les enfants délaissés, avait un caractèrepoignant, qui provenait de ses propres souffrances.

Entre 12 et 16 ans, Oomenius passa de pénibles annéesentre les mains d'un tuteur imprévoyant et de professeursincapables. En conséquence il en vint à ressentir une profondepi-feié pour tous ces enfants confiés à des professeurs ignorantsde leur art, fatigués par leurs paroles 'pleines de vent etdignes de perroquets', et qui étaient battus comme si 'leurpeau était de métal'.

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II tut préservé d'un tel sort par la générositéd'amis qui l'envoyèrent dans tin lycée de Ererov, od ileut la chance de tomber sous l'influence d'un directeurqui se rendit compte de ses talents et qui l'encouragea àétudier. Bien qu'il ne trouvât pas les méthodes d'ensei-gnement très enrichissantes, Comenius se montra un étudiantenthousiaste et fit d'étonnants progrès. Il fut remarquépar un des principaux membres de l'Unité de ïrères, commeun candidat apte au Ministère et comme il ne pouvait pasfréquenter l'Université de Erague, ' on l'envoya en Allemagnepour parfaire son éducation. Il fréquenta tout d'abord uneAcadémie calviniste à Herborn, et ensuite l'Université deHeidelberg. Il rencontra, dans ces .deux établissements, desprofesseurs encourageants qui lui enseignèrent à faire detoutes les connaissances humaines son champ d'études. On lemit en rapport avec les idées révolutionnaires de l'AnglaisIrancis Bacon,*' et c'est ainsi qu'il apprit la valeur d'uneapproche scientifique des problèmes humains. Il embrassa ladoctrine selon laquelle le règne millénaire du Christ BUT laterre était imminent. Il ne devint pas un grand savant ouun érudit, mais il lut beaucoup, considéra l'univers commeson manuel, et chercha à y comprendre l'unité de toutesôshoses.

A son retour en Bohème, Comenius eut de bonnes raisonsde regarder l'avenir avec confiance. Pendant un certain temps,il enseigna dans son ancienne école et aida son ami ledirecteur. Il y trouva les méthodes d'enseignement défec-tueuses et, pour aider ses élèves, il écrivit pour eux unegrammaire latine. A l'âge de 24 ans, il fut ordonné, et deuxans plus tard, nommé Ministre dans une église florissante à3?ulnet..Sa paroisse était un mélange de Œchêques et d'Allemands,et il leur prêchait dans leur propre langue. Il avait uneconception très large de ses responsabilités envers eux. Illeur enseigna des arts pratiques, tels que l'apiculture. Ilfit la classe à leurs enfants dans une école attenant à

11l'église, et surveilla la formation des jeunes gens quidésiraient se consacrer au sacerdoce. Malgré un programmeaussi chargé, il écrit des pamphlets relatifs à ses préoccupa-tions telles que l'atroce oppression des pauvres gens. Iladore la campagne qu'il explore et dresse une carte de laprovince de Moravie, qui est publiée. Durant ses voyages,il rassemble proverbes, idiomes et dictons en un volume qu'ilintitule: "Trésors de la.langue tchèque". H mène, en mêmetemps, une vie privée très heureuse. A son arrivée à Pulnek,il épouse Magdalène, la belle-fille du bourgmestre de ïrerov,et peut bientôt se réjouir de la naissance d'un fils.

Cette situation se transforme soudain, et ses projetssont contrecarrés par la déclaration de guerre entre protes-tants et catholiques. Un protestant est élu roi de Bohême,mais cette élection est contestée par le catholique îerdinaridd'Autriche. A la bataille de la Montagne'blanche, située unpeu en dehors de Erague, le roi ïtédéric, protestant, estbattu et repoussé. Ferdinand se fait couronner roi et faitbientôt part de sa détermination de supprimer complètement leprotestantisme. Il envoie ses soldats dans tout le pays pourentamer une terrible persécution contre ceux qui ne se eorfor-meraient pas à son édit. lorsqu'ils parviennent à Pulnek,Comenius s'est enfui, mais ils détruisent son école et sabibliothèque. Sa femme attend un autre bébé et elle doitrester cachée jusqu'à sa naissance; c'est alors qu'elle etles deux enfants meurent de la peste. Comenius apprend cesnouvelles avec douleur. Il peut seulement sauver sa vie, ense dissimulant dans diverses cachettes, oïl il jouit de laprotection de propriétaires terriens bien disposés à sonégard. Parmi ceux-ci, se trouve le Comte Zerotin qui l'avaitantérieurement appuyé, alors qu-1!! était étudiant. Ce comtejouit encore de quelque immunité et possède un grand domainedans un endroit appelé Brandys. On l'appelle encore la ValléeKomensky, et c'est là que Comenius se cache pendant un certain

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temps et qu'il parvient à écrire des livres et tracts, demanière à maintenir vivante la foi de 1"'Unité de Frères1.Il doit avoir joui d'une certaine liberté, car il montresa foi en l'avenir en épousant la fille d'un des Ministres.

Cependant, Comenius n'est qu'un fugitif, se déplaçantd'un endroit dans un autre pour des raisons de sécurité,et il est constamment attristé par les nouvelles de la fuiteou de la mort de ses amis. Après sept années de cetteexistence, ceux qui survécurent lui demandèrent d'aller enPologne pour y chercher un refuge plus durable. Il y trouva,dans la ville de leszno, un groupe de Frères qui s'étaitéchappé plusieurs armées auparavant, et qui jouissait de laprotection du seigneur local. Encouragés par le rapportfavorable, un nombre considérable de gens se rassemblèrentsecrètement et, conduits par Comenius, traversèrent lesmontagnes au cours de l'hiver de 1628 et firent route verscette nouvelle demeure.

Comenius accepte la situation et n'est que tropheureux de devenir enseignant au lycée qui fait la fiertéde Iieszno. Une fois de plus, il se met à écrire des ouvragesqu'il avait projetés durant ses années de solitude. Il seréjouit grandement, lorsque les Frères parviennent à fairesortir leur machine à imprimer hors de Bohème, car ainsises livres peuvent être publiés. Peu de temps après, il estnommé Secrétaire de l'Eglise, ce qui signifie qu'il doitgarder par correspondance des contacts avec tous les exilésrépartis en différents endroits. A la même époque, il nedésespérait pas que Ferdinand fût battu, car, quoique laguerre déclarée en Bohème se fut répandue par la suitejusqu'en Allemagne, les Protestants avaient un redoutablechampion en la personne de Gustave Adolphe, roi de Suède.C'est ainsi que Comenius commença à faire des plans pour lejour otl il pourrait retourner en Bohème et participer à

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l'établissement d'une société meilleure que celle qu'il avaitconnue auparavant. L'éducation devait être la clé du nouvelétat et Oomenius écrivit une "Brève proposition relative aurenouvellement des écoles dans le royaume de Bohème". Dansce texte, il émit l'opinion que la société ne pourrait êtreréformée que s'il existait un 'système prudent et sage' d'écoles,où 'toute la Jeunesse de la nation' devrait être êduquêe.C'était un avant-goût d'un système national et polyvalent,où les enfants de toutes les classes seraient amenés à aimerleur culture nationale, mais où l'accès à une culture plus•universelle au moyen de la langue latine leur serait aussiproposé. Il n'acceptait pas que l'étude du latin fût nécessai-rement la tâcîie fastidieuse et longue qu'en faisaient lesenseignants. Srâce à un enseignement plus intelligent, cetteétude pourrait être rendue tellement facile que tout enfantpourrait l'entreprendre et la mener à bien. O'eèt pourquoiil écrivit un manuel, qu'il intitula: "la grande Porte" versl'étude de la langue. Cet ouvrage différait de tous les précé-dents, car il n'insistait pas sur la grammaire et donnaitdes descriptions de toutes les choses utiles à connaître.H fut écrit originairement en tchèque et en latin, et destinéà des enfants tchèques, mais lorsqu'une version allemande futpubliée, "la grande Porte" fut rapidement connue à traversl'Europe, et Cômenius fut encouragé d'une façon inespérée. Acette époque, la restauration de la Bohême paraissait de moinsen moins probable. Ainsi, Cômenius en vint à penser que sil'éducation pouvait devenir universelle, la voie vers uneréforme universelle de la société humaine serait ouverte.

Sous certains aspects, l'époque était favorable pourune idée aussi merveilleuse, car il y avait beaucoup d'hommesen Europe qui la partageaient. Parmi ceux-ci se trouvait unmarchand allemand vivant à londres, nommé Samuel Hartlib, quiétait un membre indépendant d'un groupe d'ardents réformateurspolitiques et sociaux. Il fit la connaissance de Cômenius

14par l'intermédiaire de deux étudiants de l'Unité deîrêres qui étudiaient à Cambridge et, lorsqu'il reçutde Comenius une description de ses propositions, il lafit imprimer et distribuer aux savants à travers toutel'Europe. la réponse fut favorable et Eartlib pressaOomenius à venir en Angleterre pour le conseiller ausujet de la création d'un collège, en vue d'une éducationuniverselle.

Après beaucoup d'hésitations, Comenius accepte devenir et, au terme d'un voyage difficile, il arrive àLondres le 21 septembre 1641, otl il eat accueilli jparHartlib et par un groupe d'éminents savants et politiciens.En arrivant, il dut paraître plutôt misérable, car ilraconta plus tard à leszno qu'il fut conduit chez untailleur qui lui confectionna 'de nouveaux habits d'aprèsla mode courante des théologues anglais'. Ainsi vêtu, ilalla dîner avec 1'Evoque de Mncoln, mais surmontabientôt son embarras lorsqu'il apprit que le Parlementanglais proposait de créer un collège 'dont les revenusseraient attribués à un certain nombre d'hommes appelésde tous les pays1, et qu'il devait le diriger.

Alors que l'on discutait les plans, Oomenius se mità rédiger encore des essais et des rapports, mais ilapparut bientôt évident que la guerre civile menaçaitd'éclater en Angleterre entre le roi Charles 1er et leParlement, qui, en conséquence, n'eut pas le temps desuivre le plan prévu par Comenius. Celui-ci attendit dixmois, et commença alors à chercher autour de lui d'autresdébouchés. Quelques savants français lui écrivirent, etavec l'appui du Cardinal de Richelieu, ''l'invitèrent àParis, mais la mort prématurée du Cardinal mit fin à sesprojets. On possède la preuve qu'il a été invité à accepter

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la présidence de l'ïïniversité de Harvard, et il fut grande-ment attiré par la possibilité d- introduire la nouvelle•philosophie expérimentale' en Amérique, mais le projetn'aboutit pas. Aussi accepta-t-il enfin une offre duChancelier suédois, afin de préparer une série de manuelslatins selon la nouvelle méthode de la 'grande porte1.

Pour exécuter ce travail, Oomenius s'installa àBlbing sur la rive sud de la Baltique, mais son idéeconsistait à lier les manuels à un plan plus précis d'éducationuniverselle, basé sur des fondements philosophiques, lesSuédois, cependant, ne furent pas impressionnés et ils lepressèrent d'entamer la tâche plus utilitaire pour laquelleils le rétribuaient. Pauvre Comeniusi II désirait que sesmanuels soient fondés sur une philosophie et il luttaitdurement pour satisfaire à la fois ses employeurs et sonpropre idéal. Il échoua, ce qui lui valut des difficultésfinancières; sa femme, qui l'avait rejoint, et lui tombèrentmalades. Cependant, il activa encore son travail. la dernièredésillusion l'atteignit lorsque la paix fut faite entreprotestants et catholiques, et que l'indépendance de laBohême ne fit pas partie de l'accord. Ses coreligionnairesà leszno furent plongés dans le désespoir, et Comeniusdécida qu'il était de son devoir d'y retourner pour les aider.Sur le chemin du retour, sa femme mourut, et il arriva avecla charge de jeunes enfants.

l'année 1649 fut probablement la plus sombre de sonexistence, mais il survécut. Il eut la chance de rencontrer•une autre femme disposée à l'épouser et elle s'avéra unecompagne affectueuse et une bonne mère pour ses enfants. Peude temps après, il reçut par l'intermédiaire d'un princeprotestant hongrois, nommé Sigismund Eâkôczi, une Invitationà reprendre du service, c'est-à-dire fonder une école d'aprèsses théories de l'éducation. C'était une offre tentante,car elle lui donnait l'occasion de prouver que ses idées

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pouvaient s'appliquer et ainsi con.Tain.cre les autres quel'éducation universelle était possible. Mais il était peudisposé à abandonner sa nouvelle épouse et à laisser uneéglise qui semblait sur le point de se démembrer. Hsavait que le voyage à Saros Patak, où le prince vivait,serait dangereux, et que la Hongrie était un pays arriéréoù il y avait peu d'enseignants. Loyalement, sa famille etses amis l'incitèrent à accepter et son courage fit le reste;il accepta cette mission comme un appel du ciel. Il serendit compte que ce serait probablement la dernière chancequi lui serait offerte de prouver qu'il avait découvert uneméthode universelle.

Aussi se mit7il en route. A son arrivée à Saros Patak,en 1650, il fut très encouragé par la chaleur de l'accueilqui lui fut réservé, et enchanté d'apprendre que le princeétait fiancé à la fille du roi qui avait été battu à la•Montagne Blanche'. 11 entrevit, en effet, en ce couple, denouveaux espoirs, en faveur de la cause protestante. Ilperçut aussi quelque enthousiasme parmi la population localepour cette nouvelle école, et fut heureux de voir nommer unBeeteur qui avait été en Angleterre dans le cercle deSamuel Hartlib. le prince avait réservé, pour la réalisationde ce projet, plusieurs bâtiments et des jardins spacieux,de sorte qu'il eût tout un terrain universitaire. De plus,,on pouvait disposer d'une machine à imprimer.

Comenius se mit au travail avec grand enthousiasmepour préparer l'ouverture de l'école. Il se mit lui-même autravail pour réécrire les manuels dans la langue magyare.Il.rédigea un plan détaillé de l'organisât ion de l'école, etdonna des conférences pour expliquer ses méthodes. Au boutde neuf mois, en février 1651, la première classe fut formée,en tout environ 100 personnes, provenant de tous les rangsde la société. Comenius était au septième ciel!

17les choses, mal heureusement, commencèrent à se détériorer,

le pire désastre fut la mort prématurée du Prince Râkôczi etde sa femme, quelques mois après leur mariage. Privé de cetappui, le nouTeau Recteur, qui avait semblé tout d'abordcoopératif, devint jaloux, et les professeurs commencèrent àmanifester de l'indifférence pour un plan qu'ils ne comprenaientpas réellement. Oomenius pensait qu'ils étaient paresseux,mais le mal venait du fait que de nombreux élèves pouvaientà peine lire; il y avait aussi beaucoup de retard dans l'im-pression des manuels. Comenius se rendit compte qu'il fallaitleur donner quelque chose de beaucoup plus simple, et c'estainsi qu'il commença à préparer un livre d'images à leurintention. Il disait qu'il s'agissait d'un livre pour jeunesenfants, ou pour ceux à'1'intelligence vacillante1. Quelquespages-modèles furent imprimées, mais il ne put pas trouverd'artistes pour faire les gravures sur bois destinées à son"Image du Monde", et c'est ainsi que les enfants de SarosPataJc ne virant Jamais le livre qui devait devenir mondialementcélèbre.

Comenius aurait-il pu surmonter ces difficultés? Personnene pourrait le dire, car les nouvelles d'une déclaration deguerre entre catholiques et protestants le décidèrent àretourner à leszno. Mais cette aventure en Hongrie ne fatcertainement pas un échec complet. 1*école subsista, même sice n'était pas tout à fait selon les plans qu'il avait dressés,et son allocution d'adieu fut écoutée et appréciée par unlarge public qui lui souhaita bonne chance. Il emporta lemanuscrit du livre d'images et, lorsqu'il fut terminé, ill'envoya à ïïuremberg où vivaient des artistes adroits. C'estlà qu'il fut publié. Il était temps, car peu après une arméecatholique déferla sur leszno et brûla tout avec une brutalitésauvage. On enterra autant de manuscrits que possible, puisComenius et sa famille s'échappèrent dans la forêt, n'emportantpour tout bien que les vêtements qu'il portaient sur eux. Aprèsde grandes souffrances et des maladies, ils se trouvèrent ànouveau réunis dans la ville d'Amsterdam, crà. Oomenius futaccueilli avec une aimable hospitalité, et où il reçut unepension qui suffisait à ses besoins.

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Aidé par ses bienfaiteurs, il rassembla tous lesmanuscrits qu'il put récupérer et les publia en 1657, dansune édition d'environ mille pages. Il donna alors sonattention à la tâche qui l'avait si longtemps préoccupé:celle de rédiger un ouvrage important sur la réforme desrelations humaines. Même si les hommes ne pouvaient1'écouter de son vivant, il espérait qu'ils le feraientaprès sa mort. Mais ce fut une tâche gigantesque, il étaitparalysé par la sciatique et attristé par l'effondrementapparent de son église. Sa fidèle épouse, Jane Cajus,mourut, et il se rendit compte qu'il était engagé dans unecourse contre la mort pour terminer le travail auquel ilavait été appelé. Son esprit était indomptable et ilcontinua à écrire jusqu'à la fin. Finalement, il fit venirà son chevet son fils Daniel et son associé le plus intime,Christian Nigrinue, et les pria de veiller à ce que seslivres soient publiés. 11 mourut le 15 novembre 1670 etfut enterré dans l'église française réformée de Haarden,sur le Zuyderzee.

Œous ses manuscrits n'ont pas été publiés. Ils furentrecopiés par Higrinus et confiés à la surveillance d'ungroupe religieux à Halle, Allemagne. Ils demeurèrent dansla bibliothèque d'un orphelinat jusqu'à ce qu'ils fussentenfin découverts en 1935 par un savant russe, et publiésà Prague en 1966.

Il n'est pas aisé de rendre un jugement sur Comenius,car il y a bien des traits contradictoires dans soncaractère. Certains 1'écarteraient comme un fanatiquehonnête, mais à l'esprit confus. Ils prétendraient qu'iln'a laissé aucun message à notre monde de science et detechnologie, parce que sa perspective fut essentiellementmédiévale. Ils conviendraient que ce fut une figure hêroi'que,mais souligneraient que ce fut un échec pathétique sans

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signification ni message adapté au 20e siècle. Ils leclasseraient parmi les hommes simples, bienveillants,sans ambition personnelle et sans mesquinerie de carac-tère, mais ni grand penseur, ni bon réformateur.

Un tel jugement serait unilatéral et inexact. Ilavait certains aveuglements, mais c'étaient ceux de sontemps, et ce qu'il jugeait réellement nécessaire pourpermettre à l'homme d'échapper à son cercle vicieuxétait .de loin en avance, non seulement sur son époque,mais sur la nôtre également. Ce fut un visionnaire, etmême, s'il ne parvint pas à mettre ses idées en pratique,son échec noue apprend plus que le succès de nombreuxhommes de moindre valeur. Il était convaincu que larupture qu'il souhaitait dans le cours de l'histoire seproduirait dès que les hommes en viendraient à la croirepossible. Les éveiller à cette conviction devint pourlui une tâche impêrative, et ses tentatives, tout au longde sa vie, pour remplir cette mission permettent certaine-ment de le considérer comme un grand homme.

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II. LES BECOMHEHIlAIIQirS HE COMEHTUS EEiATIYES AIi'EKICAIIOH DES JEUNES ESSA8TS

Dagmar Capeovâ

I1intérêt profond et permanent manifesté par Comeniuspour l'éducation commença dans son pays natal et trouva unaliment dans la territile déshumanisation de l'Europe centralelors de la guerre de Trente 1ns. ' Ses conceptions doiventégalement beaucoup à son étude approfondie des cultures passéeset contemporaines, tchèques et étrangères.

H prit pour bases les meilleures traditions de l'édu-cation nationale tchèque, et surtout l'aspiration vers unedéfense permanente de la vérité et de la liberté de conscience;vers une responsabilité morale et une noblesse de caractère,vers une justice sociale et vers une véritable fraternitéhumaine qui se manifeste dans le travail de tous les hommesau bénéfice de tous. Poursuivant la théorie et la pratique dedémocratisation de l'éducation qui avaient été entamées par2\John Eus ' et ses disciples - les Hussites - Comenius envi-sageait l'éducation pour tout le monde sans exception, sansaucune distinction de race, de sexe, de croyance, d'originesociale, ou de nationalité. Il préconisait aussi une éducationspéciale pour les enfants souffrant de troubles physiques oumentaux, car il était convaincu qu'une éducation judicieusepeut considérablement améliorer le sort de ces enfants arriérés.

lie travail de Comenius relatif à l'éducation des enfantsreflète son grand désir: à savoir que ses idées devraientprofiter d son pays et entraîner l'enrichissement de sa culture.Il désirait voir son pays doté d'un système intelligemmentconçu de bonnes écoles, et il intitula un de ses grands projetspédagogiques "le Paradis tchèque." Lorsqu'en 1620, son peuplefut privé de son indépendance et de sa liberté et que Comeniusfut persécuté en Moravie et en Bohême, et qu'il dut s'exiler

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en 1628, il continua à soutenir ceux qui luttaient pourl'indépendance politique de son peuple. Il commença aussià développer "Le Paradis tchèque", traduisant certainesparties en latin - langue internationale de son époque -pour qu'il puisse profiter aux autres pays. Ce fut cetouvrage qui devint plus tard "£a Grande Didactique'1.

la place de l'éducation des jeunes enfantsdans l'ouvrage de Oomenius

Dans les ouvrages pédagogiques de Comenius, une placetrès importante dans le système qu'il préconisait, revienttoujours à l'éducation des tout petits enfants et de tousles enfants. Il ne fait aucun doute que les théories etméthodes de l'Unité de îrêres '•' - groupe religieux au seinduquel naquit Comenius - y ont largement contribué. L'Unitéformait une communauté protestante tchèque où les gensvivaient dans des relations d'entraide ressemblant à cellesqui lient frères et soeurs. Ils avaient été si souvent per-sécutés aux 15ème et 16ème siècles, parfois privés d'écoles,qu'ils avaient développé l'éducation par la famille, ce quiles avait aidés et avait permis à leurs conceptions de sur-vivre. C'est ainsi que les Frères continuèrent à s'intéresserbeaucoup à l'éducation des très jeunes enfants, considérantcette éducation comme primordiale.

C'est des Irères aussi, sans aucun doute, que Comeniustira sa croyance à la grande fonction sociale de l'éducation.Adaptant les vues de -John Eus, ils croyaient que tous leshommes sont faits à l'image de Dieu et que, comme tels, ilsont le même droit (qui constitue aussi un devoir) d'êtreêduqués, de développer leurs dons naturels et de continuer àtendre tout au long de leur vie à la perfection. Cetteopinion, développée, par la suite, apparaît dans le systèmed'éducation universelle 'de tous les hommes', depuis leurnaissance jusqu'à leur mort, préconisé par Comenius à partir

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de 1640, comme étant une méthode très efficace de réformesociale universelle. Cette opinion, qu'il devait .développerpar la euite, figure déjà dans "Réflexion générale sur laRéforme des Affaires humaines" (De rerum humanartun emendationeconsultatio catholica). Mais même ici, comme dans "la grandeDidactique"« on met fortement l'accent sur l'éducation donnéeau tout petit enfant et à l'enfant au cours des toutespremières années.

De plus, Comenius considérait comme tout naturel quel'éducation dût commencer aussi tdt que possible. "H estplus facile d'éduquer que de rééduquer," disait-il. Pourlui, les enfants sont des plantes célestes, et, comme lesplantes terrestres, elles doivent être soignées et cultivéesdepuis le tout début pour que les promesses renfermées dansles semences portent leurs fruits. Pour être préparé àacquérir une sagesse de vie, il est essentiel ûe commencertôt. Héanmoins, considérant le rapide développement desconnaissances, même à son époque, et le progrès de la société,il ajoute: "nous devons apprendre beaucoup plus que nosancêtres si nous désirons pouvoir rivaliser avec eux." 4'

Buts de l'éducation des jeunes enfantsEn organisant l'éducation de l'enfant, Gomenius s'intéressa

toujours au développement total de l'être Humain et au butfinal de la vie. Ainsi, même dans l'éducation préscolaireet primaire nationale, il familiarisait l'enfant avec l'objetde toute la vie humaine: la préparation à une vie bénie aprèsla mort. En conséquence, la qualité et la nature de cettepréparation sont de grande importance.

la préparation, durant la vie sur la terre, doit fairel'objet d'une éducation Orientée, avec un but précis rendupossible par la croyance à la perfectibilité de l'âme humaine. •C'est pourquoi, cette préparation devait tendre vers laperfection par la connaissance de la vérité, en choisissant

23le bien et en rejetant délibérément le mal, en décidant cequi devrait être fait et en le faisant au bénéfice de l'hommeet de la vie sociale. Bien sûr, des buts pédagogiques spéciauxdoivent.être établis pour chacune des différentes périodesde la vie - pour l'étape préscolaire, l'école primaire natio-nale, l'éducation des adultes et la vieillesse - et ces butsdoivent être déterminés par les capacités et possibilitésassociées aux étapes de ce développement. Mais l'enfance, etsurtout la prime enfance, doit avoir la priorité dans cetteplanification. "l'enfance est le printemps de la vie", ditComenius "et nous ne devons pas manquer la première occasionde bien préparer le sol de notre champ, l'homme qui désireune récolte totale doit ensemencer tout le champ qu'il possède.Comme la graine qui doit produire la récolte est semée tôtau printemps (ou même dans le cours de l'automne précédent),la graine d'une bonne vie doit être semée au commencement dela vie."

le but social - réformer chaque homme et chaque société,tous les hommes - s'accompagnait de l'exigence suivante:l'éducation ne devrait pas être simplement limitée à lapériode de scolarité, mais devrait s'étendre de l'âge pré-scolaire à la vie d'adulte. Pour Comenius, l'éducation destout-petits - et même la préparation de la mère durant lapériode prénatale - est la pierre fondamentale sur laquelleil faut construire tout le système de l'éducation postérieureet élaborer la réforme universelle de la société humaine."Dans l'ensemble nous sommes tous ce que l'éducation a faitde nous, " '

Comenius en tant que réformateur européende l'éducation des enfants

Ce qui différenciait Comenius de tous ceux qui, dansl'Europe de-son temps, cherchèrent à réformer l'éducation,c'était sa conception de l'éducation comme un processus detoute la vie - 'du berceau à la tombe1, pourrait-on direbrièvement. Dans ses efforts pour rendre cette image de

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1 'éducation convaincante, il dut expliquer en, détail, ce qu'ildésirait voir développé non seulement à l'école primairegénérale, mais aussi dans l'éducation préscolaire. le fait deproposer cette éducation au premier stade du développementdu jeune enfant et d'y mettre l'accent, le distingue - dessiècles en avance - de tous les autres écrivains pédagogiquesde son temps.

En même temps, sa claire vision des choses, selon les-quelles l'éducation doit être un processus de toute la vie —opinion qui n'a trouvé son application que dans quelquespays, *) malgré le fait que la télévision puisse rendrel'étude passionnante et agréable - explique pourquoi Comeniusne pouvait se satisfaire de solutions partielles aux grandsproblèmes.. Ces solutions partielles s'appliquent à des problêmestels quei l'enseignement des langues, le programme et le pland'étude, les techniques d'enseignement comportant l'utili-sation d'images ('les auxiliaires visuels', comme nous lesappellerions aujourd'hui) et ainsi de suite. Comenius traitade toutes ces questions parce qu'elles formaient des partiesconcrètes du projet d'ensemble, mais ces choses moins impor-tantes il les situa toujours dans le cadre général de l'édu-cation universelle, l'éducation de tous les hommes, au coursde toute leur vie, l'éducation qui amené l'amélioration maté-rielle et spirituelle de l'homme et de la société. Dans lemonde d'aujourd'hui, qui devient progressivement plus maté-rialiste et plus cynique, il se trouve peu de personnes assezcourageuses pour écrire des ouvrages transmettant un telmessage. '

Avec tout sou idéalisme, Comenius fut aussi un réaliste,et il reconnut qu'aucun progrès réel vers sa vision deschoses ne pourrait être fait, sans des changements radicauxdans la nature de l'éducation dans toute l'Europe. Avec sesgrands dons Intellectuels et sa sensibilité aiguë", il fitécho aux principaux courants de pensée de l'Europe du 17âmesiècle. C'est ainsi qu'il reconnut, presque avec passion,la grande contradiction entre l'élargissement de l'horizon

25de l'homme (sous .l'influence de la science an plein dévelop-pement) et l'éducation crà les méthodes de la mémorisationunilatérale, et le manque de contact avec la •vie réelle,étaient prédominantes. Il est vrai que l'Humanisme, aucoure des siècles précédents, s'était efforcé en partie deremplacer le but médiéval de l'éducation ascétique en faisantrenaître l'ancien idéal d'.harmonie entre les aspects physiques,moraux et esthétiques de l'éducation, et avait préconiséune discipline plus souple et un intérêt pour l'homme, entant que personne. Ces pensées influencèrent aussi Comenius.Hais, à cette époque, les derniers humanistes s'étaienttellement soumis à l'autorité littéraire de la Grèce et dela Rome antiques qu'ils avaient emprisonné leurs propresidées ri ans un nouveau formalisme littéraire, et leurs doc-trines étaient par conséquent devenues stériles. Il n'existaitaucune école nationale générale d'enseignement obligatoirepour tous les enfants sans aucune distinction, aucune écolenationale qui formerait la première année d'un systèmescolaire pour tous les enfants à part.ir de l'âge de 6 ans.

Réalisme pédagogique?•}Comenius, comme Michel de Montaigne " et J. Wolfgang

Eatke ' avant lui, exige que l'éducation des enfants partede leur environnement, de la véritable vie contemporaine,"les mots ne devraient pas être appris sans rapport avecles objets." °' Autrement, il .serait impossible de distinguerl'essentiel de l'accidentel, et le nécessaire du préjudi-ciable et du futile dans la vie de tous les hommes.

Comenius considérait que tout l'univers, avec la terre,les planètes et les étoiles, doit constituer un tout harmo-nieux; c'est ce qu'il appelle le macrocosme. Il considéraitses composantes (organisées extérieurement et intérieurement)- les plus significatives étant la nature, l'homme et Dieu -comme étant reliées entre elles, pour avoir été liées origi-nairement.

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la connaissance des principes valables dans une desprincipales couches peut contribuer à découvrir lesprincipes qui s'appliquent dans une autre couche. De cettemanière, Oomenius appliqua ses observations de la nature àla vie et à l'éducation de l'homme, et de ces observationstira ses principes de l'enseignement et de l'étude, gradués,faciles, agréables, mais approfondis, tels qu'il lesexpliqua dans "La grande Didactique".

l'homme dans son développement forme une étape trèsimportante dans l'évolution du monde, car lui, en tant quepetit monde lui-même (microcosme), est lié à la nature eten constitue physiquement une partie. Mais il possède aussides capacités qui sont spécifiquement humaines, par exemplel'habileté manuelle, le pouvoir de parler, de raisonner,la volonté et le sentiment; le rOle de l'éducation est dedévelopper ces capacités depuis le plus jeune âge. l'hommeest l'unique créature au monde qui puisse finalement par-venir à maîtriser complètement la nature. Il peut aussi,par son travail, sa moralité et sa piété parvenir à lamaîtrise de soi et ainsi tendre vers la perfection de Dieu.

l'intégration des connaissancesdans la personnalité de l'enfant

C'est pourquoi un des buts de l'éducation est d'aiderl'homme, à partir du tout jeune âge, en passant par lesétapes intermédiaires de son développement, à réaliser lasagesse universelle, c'est-à-dire à connaître les chosesessentielles concernant la nature, la société humaine etDieu. C'est pourquoi, Comenius a cherché dans les manuelsqu'il écrivit, comme "la ?orte des langues" et "le Mondevisible" à faciliter ce processus dès ses premières étapes.De plus, si l'univers constitue un tout harmonieux, alorstoutes les manifestations de l'homme, microcosme quireflète le maerocosme, devraient également former une unité

27harmonieuse. Cette pensée a mené Comenius à la conclusionqu'il devrait y avoir une harmonie dans la formation: ducorps et des sens, de la parole et de l'activité (jouerdans la première étape de développement, travailler plustard), du raisonnement, de la moralité et de la piété.

Dans toute son oeuvre pédagogique, Comenius a critiquéles connaissances éparpillées et partielles; il désiraitintégrer les connaissances humaines, à la fois dans ledomaine de l'éducation des enfants et dans celui de larecherche scientifique. Il crut, comme Socrate, que l'hommeest fondamentalement bon, avec îraneis Bacon que "connaître,c'est pouvoir"; il a choisi la connaissance non seulementcomme moyen d'analyser la nature, mais aussi pour améliorerl'homme lui-même et les affaires humaines, H visait une'sagesse universelle' plus large et plus profonde que celledes manuels habituels ou des encyclopédies de son temps.A partir des principes de la réalité et à partir de la grandemultitude des choses, Comenius fit un choix de ce qui rendaitl'homme 'sage et heureux', qui le conduirait vers la vérité,de manière que "formé correctement par la réalité, chaquehomme se tienne au-delà des précipices de l'erreur et duhasard, et marche dans les sentiers de l'exactitude". ' Ceprincipe est important, même pour l'éducation des jeunesenfants, parce qu'il a été considéré comme la première étape,la plus déterminante, vers une société paisible et harmo-nieuse.

Comenius se trouve au carrefour de nombreux sentiersde pensée, de son temps et des époques passées. Avec bonnombre de ses contemporains, il partagea la croyance - apparueà l'origine dans des sectes religieuses persécutées - selonlaquelle un millénaire d'une société plus harmonieuseapprochait, la tâche de tous les hommes consistait à êtrebien préparés à travailler à son avènement, non seulementsur le plan individuel, mais aussi sur le plan social. Dans

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sa " Oonsultatio " Comenius essaya de montrer comment êtrepréparé à .la vie personnelle, aussi bien qu'à la vie socialedans son. ensemble. Cependant, à l'opposé des réformateurssociaux, tels que Sir ïhomas More , ïhomas Oampanella 'et J.T. Andreae ', Comenius n'a pas dépeint la sociétéidéale dans un pays ineonnn ou dans une Ile, mais dans lavéritable société européenne. Et il n'a pas traité l'éducationcomme quelque chose de marginal, mais comme une nécessitévitale pour parfaire la nature humaine.

Contenu de l'éducation des jeuneB enfantsles idées relatives à l'éducation des très jeunes

enfants, exprimées par Comenius dans son "Ecole de l'Enfance"et flans "la Grande Didactique", ont été complétées par luidans la quatrième partie de sa "Oonsultatio". c'est-à-dire"Béflexion générale sur la Réforme des Affaires humg-i'Tiap".Cette partie s'intitule: "Pampaedia". c'est-à-dire "Educationuniverselle", et comprend l'éducation.préscolaire des enfants,c'est-à-dire avant qu'ils n'atteignent l'âge de six ans.

Education familiale., les parents et leurs relationsavec leurs enfants

le cadre naturel de la toute première éducation est lafamille, et c'est pourquoi Comenius a examiné tout d'abordles conditions préalables d'une bonne famille. Une bonneéducation des tout-petits enfants dépend surtout des parents,de leur niveau moral et intellectuel - et par conséquent d'unbon mariage basé sur une connaissance réciproque de plus enplus profonde et sur le respect mutuel. Le père et la mère,selon Comenius, devraient être les éducateurs de leursenfants; c'est pourquoi tous les deux sont responsables dela santé et de la condition morale de leurs enfants. Ilsdevraient faire en sorte que la maison devienne un foyerd'amour, de respect mutuel entre toutes les personnes, le cadred'une vie bien ordonnée, de manière que chacun connaisse sesdroits et ses devoirs, et soit disposé à aider et à conseiller

29les autres à n'importe quel moment. Comenius explique guéla famille devrait être 'une petite école', 'un. petit état-1,et une 'petite église', et indique donc la fonction socialetrès large de l'éducation familiale telle qu'il la conçoit.Par les relations mutuelles de toutes les personnes vivantau sein d'une famille, les enfants sont formés à la compré-hension des relations sociales. Comenius discute le problèmede l'autorité des éducateurs et de la spontanéité des enfants,de sorte que, lorsqu'il parle de l'autorité des parents, ill'associe toujours à leurs devoirs envers leurs enfants; leursdevoirs essentiels comme ceux des professeurs, sont de savoiréduquer leurs enfants, de désirer le faire, et d'être capablesde le faire.

Comenius critique les parents qui donnent beaucoup desoins à leurs biens matériels, mais négligent l'éducation deleurs enfants. Bans son "Ecole de l'Enfance", il parle, d'unemanière poétique, des enfants qui "devraient être plus cnersà nous (parents) que l'or et l'argent" et "méritent que nousles aimions, au moins autant que nous nous aimons nous-mêmes","les enfants sont des fleurs célestes, et comme les fleursterrestres doivent avoir du soleil et de la pluie, les enfantsdoivent avoir de l'amour." Yoilà comment son coeur aimant,celui d'un père, a cherché à persuader les autres parents querien au monde ne peut priver les enfants de leur droit à êtreles biens les plus précieux de leurs parents.

Comenius admoneste aussi les parents qui pensent avoiraccompli tout leur devoir s'ils enseignent à leurs enfantscomment manger, boire, marcher, comment parler convenablementet s'habiller. Ges choses, seules, sont insuffisantes, car lesoin le plus important est celui de l'âme, de l'esprit et ducoeur, pour que les enfants puissent commencer à connaîtreDieu. De plus, ils doivent parvenir à connaître le mondeenvironnant et commencer à régler leur vie avec soin et intel-ligence, préparant à la fois leurs forces internes et externesà agir sagement dans les différentes situations de la vie.

30ïandis que, d'une part, Comenius préconise d'étroites

relations d'amour entre parents et enfants, il s'élèved'autre part contre les institutions oïl les enfants sontautorisés à faire tout ce qu'ils veulent, et à grandirsans discipline ni correction. Il refuse d'accepter l'excusede parents qui disent: "Ce n'est qu'un enfant, il necomprend pas." Au contraire, prétend Comenius: "les fautesde la prime éducation accompagnent l'homme toute sa vie". ^Une discipline judicieuse, sans violence, qui ne rend pasl'enfant craintif, mais comporte la correction de ses fautesdès leur début et des louanges prudentes pour l'encourager,voilà l'essence des conseils que donne Comenius.

La période prénatale et le soin des bébésles parents devraient se préparer à leur tâche avant

que l'enfant soit né. l'entourage et l'hérédité sont deuxfacteurs qu'examiné Comenius. Le père et la mère devraientveiller à leur santé, mais aussi à leur développementmoral, de manière que les premiers exemples qu'ils donnentà leur enfant puisse être les meilleurs.

Comenius accorde la plus grande attention à la condi-tion physique et morale de la future mère, car son compor-tement peut affecter l'enfant qui va naître. Il donne desconseils détaillés d'hygiène - comment faire des exercices,la nécessité de conserver un régime alimentaire soigné,en évitant l'alcool et les aliments épiées, et la nécessitéd'éviter les excès dans l'exercice, la température, lanourriture et même le sommeil, et comment elle devrait sepréparer à nourrir son bébé. l'allaitement au sein estessentiel, dit Comenius, du point de vue non seulement dudéveloppement physique de l'enfant, mais aussi du point devue mental et moral, comme les psychologues et les psy-chiatres, trois siècles plus tard, se sont efforcés del'enseigner aux mères du monde entier. De plus, dit Comenius,

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le "bon développement du petit enfant peut être assurépar une attention soigneuse et constante à tous les besoinsdes nourrissons. Ensuite, le premier soin des parentsdevrait être de se soucier de tous les besoins corporelset sensoriels du bébé, en créant des occasions d'exerciceet de jeux. Plus tard dans la vie du bébé, une alimentationrégulière, ainsi que le sommeil et des. jeux habituentl'enfant à une vie régulière et à un certain ordre danssa vie, alors qu'il commence à grandir.

Activité et jeuOomenius a fait des recommandations qui montrent en

lui un observateur sensible du développement des enfants,même très jeunes. Il demande instamment qu'on exploite ledésir de l'enfant de se mouvoir, non seulement pour encou-rager l'emploi approprié des membres, mais aussi pourdévelopper son esprit et sa parole, la mère devrait mettreà portée de l'enfant les objets qui l'intéressent, leurdonner des noms et le laisser jouer et trottiner avec cesobjets. L'activité est un -trait essentiel de la vie, aussi"Faites de vos enfants qu'ils soient comme de petitesfourmis, continuellement occupés à faire quelque chose, à

n ne}porter, à dessiner, à construire et à communiquer . 'Comenius explique comment donner aux enfants les jouets' appropriés, avec lesquels ils peuvent imiter les activitésdes adultes et se préparer ainsi graduellement à des tâchesfutures, la formation aux activités devrait toujours êtreincorporée dans le programme pédagogique des enfants, àla maison et à l'école.

Oomenius fait remarquer les effets multiples des jeuxdes enfants - physiques, manuels, sociaux, moraux et biensur ceux qui interviennent dans le développement de laparole. Il est bien meilleur pour un enfant, dit Oomenius,de jouer avec d'autres enfants plutôt que de jouer seul,

32car les communications renforcent l'intelligence etobligent l'enfant à ne pas penser qu'à lui-même. Au moyende jeux bien organisés - et le jeu pour les enfants estaussi nécessaire que la nourriture et le sommeil - leséducateurs peuvent intégrer les fondements du développementd'un enfant, y compris le goût du beau.

Bien sûr, Comenius se rendit compte que tous lesparents ne peuvent pas s'arranger pour que leurs enfantsjouent avec d'autres. C'est pourquoi, il suggère dans un deses ouvrages, que les enfants du même quartier puissentjouer ensemble sous la direction de braves femmes qui lessurveilleraient et les instruiraient. Il ne fait pas de douteque, dans son projet d'une telle éducation préscolaire,Comenius utilisa la tradition de quelques groupes de parois-siens de l'Unité de Frères qui, parce que les mères étaientparties travailler, avaient envoyé leurs enfants d'âge pré-scolaire dans les écoles primaires de l'Unité, juste pourassister à l'enseignement, et il connaissait les suggestionsfaites par S. Hasenmûller ' sur le jardin d'enfants. Deplus, il connaissait, et cite quelques jeux avec l'alphabet,de Saavedra. ''

néanmoins, par son insistance sur l'importance pédagogiquedes années préscolaires, Oomenius était des siècles en avancesur son temps.

Périodes de développement des enfantsComenius divise toute la vie humaine en 'Ecoles de la

Vie", celle de la période prénatale étant 'lîEcole de laNaissance1, suivie par 'l'Ecole de la prime Enfance', couvrantles six premières années de la vie, ensuite "l'Ecole del'Enfance", pour l'éducation primaire de sis à onze ans. Maisil constate une différence marquée entre les problâmes desenfants en dessous de trois ans, et ceux entre les âges de

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trois et de aiz ans; en d'antres étapes aussi, il trouveque les subdivisions en périodes plus brèves sont néces-saires. H nomme ces périodes plus trêves 'Classes1.Ainsi, une des 'Classes' de 'l'Ecole de la prime Enfance'est appelée 'la Classe du Babillage et des premiers Pas'.A ce stade, Comenius pense que l'acquisition du langagepeut être facilitée, en rapport avec les premiers pas etlorsque la perception est devenue plus efficace. C'estpourquoi, Comenius insiste tellement pour que les jeunesenfants aient le plus d'occasions possibles de contactavec leur environnement, surtout avec la nature. Lesimages et d'autres moyens devraient être utilisés commeremplacement de la réalité, seulement lorsque c'est abso-lument nécessaire, mais l'objectif devrait être de laisserl'enfant percevoir les choses telles qu'elles sont enréalité. Dans la 'Classe de Perception', qui vient plustard, l'observation réglée et dirigée contribue audéveloppement des facultés de raisonnement de l'enfant etprépare ainsi la voie à une éducation morale dans la'Classe de Moralité', îar la formation de tous les sens,le développement de la nain, de la langue et de l'espritpeut facilement être intégré à un âge précoce.

Connaissance du mondeAvant l'âge de six ans, on ne peut donner aucune

instruction 'formelle relative aux choses et aux phéno-mènes de la vie. Cependant, les parents ne devraient pasoublier une introduction systématique à la connaissancede tout ce qui est important pour vivre, comme les phéno-mènes du monde naturel, de la vie humaine et de sesrapports avec Bieu. Manifestement, la présentation devraitêtre telle que l'enfant puisse apprécier et comprendre àun moment donné. Par exemple, en ce qui concerne les con-naissances du ciel, l'enfant devrait être entraîné à

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discerner les différences entre le soleil, la lune etles étoiles; à une étape ultérieure, il apprend que lesoleil et la lune se lèvent et se couchent, qu'il y aparfois pleine lune, parfois demi-lune, parfois un croissantde lune; à l'âge de six ans: que les jours sont plus courtsen hiver et plus longs en été, ce qui signifie que pourles nuits, c'est exactement le contraire, etc.

Comenius conseille aussi que lorsqu'un enfant, aucours d'une promenade, observe quelque chose d'intéressantdans l'a nature, il essaye, une fois de retour chez lui,de dessiner ce qu'il a vu et soit encouragé à en parler..Ainsi Comenius forme presque simultanément l'esprit,l'êlocution et la main; et ce tut devrait être recherchédélibérément plus tard à l'école, les enfants reconnaissentrapidement les différences non seulement entre les diversessortes de plantes et d'animaux, mais entre les typesd'hommes et de femmes, et leur conduite (bonne ou mauvaise)et le comportement même des groupes sociaux. Us devraientêtre encouragés à parler de leurs impressions et aidés,dans tout ce qui touche le comportement humain, à établirde justes valeurs. On peut aussi les aider à -voir lesliens entre la famille, la communauté, l'état, etc.

ManuelEn essayant d'aider les gens à mettre ses idées en

pratique, Comenius & composé ce que l'on pourrait appelerun manuel (quoique ce ne fut pas sa première activité dansce domaine de publication) prévu pour les très Jeunesélèves, mais utilisable aussi pour certains des enfantsd'âge préscolaire. Il l'intitule "le Monde visible" etdans 150 brefs chapitres, tous accompagnés d'images, essaiede traiter, de manière élémentaire, les aspects de lanature, organique, et inorganique, l'homme, son développementphysique, ses aptitudes manuelles, les divers aspects de

55son travail (mental aussi), le repos et les jeux desenfants aussi bien que ceux des adultes, les étapes dela vie d'un homme (enfance, Jeunesse, mariage, parents,vieillesse), les relations sociales bonnes ou mauvaises(guerres), la vie morale et l'homme présentés dans desimages allégoriques de vertus, la vie religieuse dansdifférentes églises, etc. les choses et les phénomènessont présentés de telle manière que les enfants peuventtoujours remarquer leurs corrélations et leur développementd'un état inférieur à un état supérieur. Si l'enfantreconnaît que l'homme devient le maître de la nature parson travail, et qu'il peut se maîtriser lui—même, c'est-à-dire, contrôler son comportement, dans ce cas on aura poséde solides bases dans le développement d'une perspectivemondiale.

Tout ce qui est décrit dans le livre est expressémentnommé, et comme les idées vont des trèé simples aux pluscomplexes, il en va de même aussi, inévitablement, del'appellation.18

Eré-paration à l'école -publique nationaleAvant d'entrer à l'école primaire nationale qui,

d'après-Comenius, devrait être créée partout pour lesenfants entre six et onze ans, les jeunes écoliers doiventêtre préparés à la fois mentalement et psychologiquement,les paragraphes précédents ont montré comment Comeniusaurait envisagé la préparation mentale, en faisant ensorte que le jeu des enfants de cinq à six ans contiennedes éléments d'activités de travail.

la préparation psychologique doit être fournie parl'attitude des parents vis-â-vis de l'école - leurs parolesde louanges et d'admiration envers les enseignants et leurfaçon de présenter l'école comme la grande occasion

36d'obtenir connaissances et bonheur. De cette manière, lesfuturs Élèves pourraient être amenés à l'envisager avecplaisir, et feraient leurs débuts à l'école avec l'attitudeappropriée. Dans l'esprit de Oomeirhis, la principale tâchede l'école primaire publique nationale, commençant commeil se doit par la inrmation de 1'observation et de la percep-tion, est d'entreprendre le développement des facultés deraisonnement, et d'associer à la raison le langage parlêy lelangage écrit, l'activité manuelle et physique, le 3eu et laréalité elle-même» Comenius, par les idées qu'il a émises,est un des .fondateurs de l'enseignement par groupes d'élèvesdu même âge, qui suivent le même •programme sous la directiond'un enseignant qui n'a pas seulement affaire à des individus,mais enseigne à un plus grand nombre d'élèves en même temps.

Education morale et religieuseSelon sa conception du monde comme un tout harmonieux,

créé par un Dieu parfait, et en conformité avec ses vuessur le but .final de la vie, tous les ouvrages de Comeniussont pénétrés et nourris de religion* Ce n'est pas cependant,une religion qui, comme le calvinisme, tolère l'idée deprédestination. Comenius était convaincu que tous les êtreshumains sont perfectibles. Pour lui, tout le processusd'acquisition des connaissances avait un but moral. Même lechoix des sujets d.1 étude doit être dirigé vers la formationdu coeur et de la volonté, en plus de la formation de lafaculté de raisonnement.

Pour l'éducation morale préscolaire, Comenius recom-mandait l'exemple continu d'un comportement vertueux. Ladiscipline devrait être douce, mais très réglée et renforcéepar des instructions prudentes et soigneusement mesuréesconcernant des exercices de bonne couduite. Remontrances etlouanges devraient être utilisées pour soutenir cette action,mais avec précaution, et accompagnées de conseils,lorsqu'ilssont nécessaires.

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Comenius donne une liste des vertus que les enfantsdoivent acquérir au coura âe leur croissance, et c'est làqu'il dévoile ses préoccupations sur ce qu'en languemoderne nous appellerions les interférences logiques, psy-chologiques et sociologiques. Bans son étude, les premièresvertus, notamment la propreté et la sobriété, ont trait àl'environnement physique; d'autres, telles que la confianceen soi, ont trait à la maturité intellectuelle, à l'activitéhumaine (industrie), au contrôle de soi (modestie, patience),au respect des autres et aux relations sociales.

l'ouvrage de Oomenius comporte aussi des références àce que nous appelons aujourd'hui l'éducation esthétique. Ildésirerait développer le sens de la beauté dans la nature,dans tous les travaux de l'homme et dans les relationshumaines. le développement de cette sensibilité esthétiquemène les enfants à prendre des décisions justes qui tiennentcompte du bien-être des autres. Haas un tel développementesthétique, la musique, le chant, la récitation, la formationlinguistique et religieuse ont tous un rôle à jouer.

l'importance des •principes de Comenius relatifs àl'Education Tmiverselle des tout— petits et des jeunes

pour l'éducation moderneDans le plan des activités dressé par 1 "Unesco pour

l'Année Internationale de l'Education 1970, on a mis enrelief un certain nombre d'exigences relatives au dévelop-pement et à l'amélioration de l'éducation.

Parmi ces exigences, citons :1. l'éducation doit être prise dans son sens le

plus large, de manière à comprendre toutes lesformes d'instruction et de formation. Ce pointest repris, il est vrai, par le suivant.

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2. l'éducation est l'affaire de toute une vie3. l'éducation s'adresse à tous les êtres humains: aussi

doit-il y avoir des chances égales d'accès pour lesfilles et pour les garçons, pour les femmes et pourles hommes.

Ces idées, qui sont l'objet d'une attention et d'uneimpulsion spéciales cette année, sont les idées de Comenius,exprimées par lui-même, il y a plus de 300 ans. En ce quiconcerne le premier point, Comenius écrivait qu'il ne devraitpas y avoir de frontières entre les domaines de l'éducation,par exemple entre l'éducation Intellectuelle et morale, ouentre les différentes disciplines. Ce dernier point a étésouligné dans son plan d'éducation des jeunes enfants.

la conception de l'éducation, comme un programme detoute la vie, est entièrement une pensée de Comenius. Ce futlui qui, il y a plus de 300 ans, dans un monde fortement il-lettré,, eut conscience que l'apparition de la science avaittellement modifié la vie que seule une éducation de la vieentière pourrait suffire, si l'on voulait faire du monde unendroit heureux.

Quant à l'éducation de tous les êtres humains, cettepensée pourrait presqu'être appelée la pierre de touche dela philosophie de Comenius, car, il endura sans faiblir lasérie de terribles malheurs que la vie lui apporta, pointqui apparaît plus clairement dans d'autres chapitres de celivre.

Dans ce chapitre, nous avons traité seulement les idéesde Comenius relatives à l'éducation des enfants depuis lanaissance jusqu'à l'âge de onze ans. Nous savons aujourd'huique les soins prénatals sont importants et que toutes lesrecommandations de Comenius concernant la santé et les

39meilleures conditions poux la future mère sont tout à faitmodernes. Quant à l'éducation de l'enfant d'âge pré-scolaire, c'est seulement aujourd'hui que le monde entiera reconnu toute la signification de ces premières annéespréscolaires pour le développement d'un adulte digne de cenom, possédant toutes les qualités ou la plupart des qualitésque nous admirons.

Bans certains pays, comme l'Italie et les pays socia-listes, une organisation préscolaire complète a été incor-porée dans le système scolaire. Il comprend !'éducationfamiliale, ainsi que la barde des "bébés dans les crècheset plus tard, pour les tout petits enfants, dans les jardinsd'enfants. Ces institutions répondent aux exigences d'unesociété, où les femmes sont occupées régulièrement en dehorsde chez elles.les jardins d'enfants permettent aux enfantsqui n'ont ni frères, ni soeurs, de pouvoir s'amuser et jouirde la compagnie d'autres enfants.

On a découvert que dans l'ensemble, la combinaison del'éducation familiale et ensuite des jardins d'enfants pourdes enfants de quatre à six ans peut être satisfaisante. lescrèches pour les tout jeunes enfants, au dessous de troisans, se heurtent au problême de la frustration des enfantset du manque de soins individuels constants. Bans certainspays socialistes, un grand problême subsiste: la différenced'organisation entre les institutions qui s'occupent dessoins pour les très jeunes enfants, les bébés jusqu'à l'âgede trois ans, et celles qui s'occupent de la dernièrepériode préscolaire. Pour la première catégorie, le pointde vue psychologique domine, les crèches étant contrôléespar le Ministère de la Santé, et il y a un manque totald'orientation ou de pensée pédagogique. Dans les jardinsd'enfants, par contre, on peut parfois rencontrer l'absencede préoccupation psychologique. ÏÏOU.B rappelons que, bienque Oomenius, il est vrai, ait établi une différence entrela période préscolaire de la toute petite enfance et la

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période suivante, 11 les a toujours considérées au seind'an plus grand ensemble et non pas traitées si différemmentcomme rla.TiB le cas que nous venons de décrire; 'il considérait,en effet, le développement du -tout petit enfant comme unensemble continu.

Comenius écrivit qu'une "transition lente et progressivevers l'école primaire est nécessaire. C'est un autre problèmede l'éducation préscolaire contemporaine. Une étape inter-médiaire, gui constitue une préparation psychologique,mentale et aussi sociale pour l'école officielle, existedepuis longtemps en Angleterre dans les écoles de tout-petits,et en Erance dans les écoles maternelles depuis 1882. Bansles pays socialistes, ce stade intermédiaire consiste àintroduire les éléments de l'apprentissage scolaire d'unemanière -très simple dans la dernière année de l'écolematernelle. En Eépublique démocratique allemande, on aorganisé un système appelé 'après-midi de jeux et d'étude'.Les enfants, qui n'ont pas été envoyés par leurs parentsdans une école maternelle, rencontrent le professeur de lapremière classe primaire, font connaissance avec lui ouavec elle de -manière à être préparés à l'avance à fréquenterrégulièrement l'école primaire. Bans les pays socialistes,la question de la formation des maîtres d'enseignementpréscolaire a été discutée en rapport avec des propositionsprévoyant que la dernière année de l'école maternelle, c'est-à-dire entre cinq et sir ans, devrait être rendue obli-gatoire pour tous les enfants.

La conception eoménienne de l'éducation •universelledes tout peti-ts enfants et des enfants en général, peutaussi s'appliquer ici, car sa théorie était que par le jeuon peut non seulement développer la spontanéité de l'enfant,mais aussi commencer 1'acquisition des connaissances systé-matiques, qu'il jugeait si importantes. Candis que les payssocialistes et l'Italie ont toujours défini les buts péda-gogiques et ensuite abordé 1« problême de savoir comment

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les mettre en accord avec la spontanéité des enfants, danscertains pays, l'éducation préscolaire n'a d'autre but quele développement des aptitudes créatives des enfants.

3J'opinion de Comenius selon laquelle la perception,l'activité physique (qui peut être manuelle) et l'êlocutiondoivent toutes être développées simultanément, encourageune étude plus approfondie des différentes manières dontce principe peut être réalisé dans la vie de tous les jours,la conception comênienne des jeux est particulièrement enaccord avec l'éducation moderne comme moyen d'éducationuniverselle de tous les enfants. Elle n'est pas du toutformelle comparée à l'intellectualisme de Sroebel, etcorrespond bien aux idées des éducateurs qui sont résolus àpréserver les conditions du développement de la créativitéchez les enfants.

Comenius, en tant que premier écrivain dans le domainede la théorie pédagogique fut bien en avance sur son temps.Son rôle de premier plan a été pleinement reconnu en cequi concerne l'éducation préscolaire étant importante nonseulement pour l'éducation scolaire mais aussi pour unelarge réforme sociale continue dans notre société moderneen rapide évolution.

Mais la grande vision de l'éducation tout au long dela vie pour tous les hommes et les femmes du monde entier,dont l'éducation préscolaire n'était que l'introduction,n'est pas encore accomplie. Comenius est un précurseur dela psychologie génétique, et son travail, où il essaie demontrer les maùiêres de mettre l'éducation en accord avecle développement le plus complet de la personnalité humainede l'enfant et de l'homme, demeure une source de grandeinspiration à tout moment, lorsque comme aujourd'hui lesforces de déshumanisâtion de la vie sont en progression.

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III. COMEHIUS Eï LES MEIHODES D'EHSEIGHEMEïrSBogdan Suehodolaki

Le 'labyrinthe de la vie' et une réformedu monde humain par l'éducation générale

Comenius conçut le monde comme un 'labyrinthe'. Cettematamore" est profondément enracinée dans les traditionsmédiévales de mysticisme et d'ascétisme, de désespoir etde mépris pour cette 'vallée de larmes', pleine de misèreet de chagrins, que la mort seule peut apaiser. Ces accentssont fortement marqués dans les ouvrages religieux deComenius. Mais la métamore 'le monde est un labyrinthe'a aussi une autre signification. la légende dit qu'il y aun chemin pour sortir du labyrinthe, un chemin que l'ontrouve en suivant le fil d'Ariane. Oomenius chercha coura-geusement et continuellement le chemin pour sortir dulabyrinthe 'vers les plaines ouvertes1, comme il le dit dansun de ses derniers ouvrages. Il jugeait de son devoir demontrer le bon chemin à la race humaine, égarée dans lelabyrinthe des mauvaises écoles.

"Chaque homme peut devenir un homme", tel eat le principefondamental qui guide les efforts de Comenius quand ilorganise le système scolaire, élabore les programmes d'étudeet les formes de direction, formule des méthodes d'ensei-gnement, et rédige les livres et les manuels. Comenius acombattu le système scolaire médiéval avec son programmescolastique, ses méthodes et son organisation particulière;il a combattu aussi.certains aspects de la nouvelle etaristocratique 'Ecole latine" des Humanistes. H posait en

43.principe une uniformité démocratique du système scolaire,au moins jusqu'à l'âge de onze ans; de telles écoles'devaient préparer leurs élèves aux exigences de la vieréelle, et y 'éduquer un homme1 en utilisant les réalitéslocales dans le processus d'enseignement, en éveillant lesintérêts des enfants et en donnant le sens de l'effort. Uneécole tien organisée devrait faire acquérir les aptitudespratiques utiles à la vie sociale, aussi bien que la con-naissance scientifique de l'environnement naturel.

le programme de Comenius ne peut pas être considérécomme simplement antifêodal, car il exprimait beaucoup plusque les tendances réformistes de la bourgeoisie. Son sortfut celui d'un pauvre exilé, et son idéal d'humanismedémocratique tendait vers l'avenir, au-delà des limitesdu système capitaliste qui venait d'émerger. C'était unidéal utopique mais Comenius sentit assez profondément lesbesoins des masses populaires pour dépasser à la foisItopinion étroite et élitiste de l'école humaniste, et lalimitation aux aptitudes manuelles de la formation profession-nelle pour les classes dites inférieures. Il défendit ledroit de chaque homme d'atteindre un développement maximum,et d'avoir ainsi une chance d'acquérir de vastes con-naissances sur le monde, aussi bien que des talents variésdans le domaine pratique.

Comenius nourrissait l'espoir que la réforme de l'édu-cation entraînerait une réforme du monde. Partant de cepoint de vue, il décrivit l'éducation comme 'le bien communde tous'. H s'adressa "à tous ceux qui détiennent lepouvoir dans les différents états, églises, écoles etfamilles", les sommant d'appliquer les découvertes et lesrecommandations de la pédagogie, de sorte qu'il y ait."moins d'ignorance, de confusion et de discorde, mais plus

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as lumière, d'ordre, de paix et de silence".

Bans Tin discoure consacré au développement du talent(De eultura ingeniorum oratio), Comenitis présenta endétails les avantages sociaux de l'éducation et leur signi-fication pour l'état. Il souligna que les nations éclairées,par opposition aux nations ignorantes, savent utiliser, dela meilleure façon, les fruits du sol, le rendre plus fertile,organiser l'industrie et le commerce, traiter toute l'éco-nomie de la façon la plus efficace. Les nations éclairéessont à même d'établir un ordre légal définissant les droitset les obligations de chaque citoyen, et un système de pro-tection de la santé prévu pour conserver la force de l'huma-nité. Les nations éclairées établissent d'équitables rela-tions humaines, basées sur les services mutuels, la compré-hension et la bonne volonté. C'est sur leur sol que l'étudese répand et explique des choses jusque là inintelligibles,et l'art fait de même en formant les sentiments des hommes.Dans la "Pangersia". Oomenius mit en évidence le rôle del'éducation en vue de l'amélioration des relations inter-nationales, pour la paix générale et le bien-être de tousles peuples. Dans sa "Didactica Magna". Comeuius écrivit:"II est temps de faire sonner la cloche de l'éveil, de fairesortir les gens de l'indifférence et de la torpeur où ilss'ankylosent, sans voir les dangers qui les menacent, euxet leurs familles. Ce sont les Européens qui devraient seréveiller les premiers, de manière à ce que les autres na-tions les suivent, pour s'unir".

De la même manière, Oomenius recommanda très vivementun développement international de la science et de l'étude,et de l'art de l'éducation en particulier; il chercha lecontact avec différentes institutions, il formula de nou--veaux modèles de coopération internationale. Il proposa,

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par exemple, un collège international pour la science del'éducation ott "tous les efforts devraient être coordonnéspour préciser plus exactement les bases de la science, pourfaire briller la lumière de la connaissance toujours plusvivement et à la rendre plus réellement accessible à tous,au moment où les nouvelles inventions les plus utiles diri-gent le cours des affaires humaines vers leurs meilleuresperspectives".

3Je monde des objets et la raisonl'èloeution et les aptitudes manuelles

Les idées pédagogiques générales de Comenius s'ex-primèrent dans des considérations détaillées sur la structure.du système scolaire et les méthodes d'enseignement desdiverses matières, le postulat démocratique de l'éducationpour tous exigeait de telles méthodes, de manière à obtenirde bons résultats de tous les élèves. Oomenius critiquaittrès sévèrement le système scolaire existant, faisantremarquer que le chaos et l'ignorance y prédominaient, queles leçons étaient ennuyeuses et entièrement verbales - rienque des mots - de sorte que l'étude décourageait les enfants.Contrastant avec l'inefficacité de l'étude, la formationreçue dans l'expérience de la vie courante est des plusfructueuses; la conclusion évidente était que toutes lesméthodes d'enseignement devaient subir une refonte totale.

Comenius basait cette refonte sur ses conceptionsphilosophiques. Selon celles-ci, "le monde visible a étécréé comme une ferme, pour élever, nourrir et éduquer lesgens". Coaenius croyait que, comme le créateur avait doté.l'homme de raison, il devait avoir veillé à ce "qu'il y

46Bit aussi pour la raison une nourritare appropriée". Cettenourriture de la raison humaine est constituée par lavariété et le mystère du monde qui se révèle à nos sena.Selle est la signification des paroles de Oomenius: "C'estle monde qui est notre école".

Se familiariser avec les sens est donc la premièreétape dans l'éducation de l'homme. Dans tous ses ouvrages,Comenius a porté son attention aux objets qui nous entourent,en un style sublime et émouvant. Il a également indiqué lanécessité de lier les impressions des sens à l'activité del'élève, et à l'étude de mots. Il écrivit: "l'écoute doitconstamment être complétée par la vue, et le travail de lalangue par celui des mains; ce qu'ils ont à étudier, on nedoit pas seulement le leur dire, de manière à ce que celapasse par leurs oreilles, mais il faudrait que cela soitégalement peint, de manière à frapper leur imagination parles yeux. Qu'ils apprennent, de temps en temps, à s'exprimerau moyen de mots, et, ensuite, au moyen de la main, demanière à ce qu'ils n'abandonnent rien avant que cela aitpénétré suffisamment leurs oreilles, leurs yeux, leur raison,leur mémoire.11 Comenius établit donc l'unité fondamentaledes impressions sensorielles, de l'éducation et de l'action,dans l'acquisition des connaissances.

Cependant, les connaissances ne sont d'aucune manièrelimitées à l'étape sensorielle, le principe selon lequel cesont "les choses, et non l'enseignant qui devraient parler"à l'élève, s'étend aussi au domaine de la raison. SelonComenius, la raison humaine est formée par l'étude à partirdes choses. On doit lui fournir une série de faits à desfins d'analyse; c'est la sélection appropriée de ceslfaits,et le moment exact de les apporter, qui sont décisifs pour_le bon fonctionnement de la raison, et par conséquent pour

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s.a formation. Bans l'ouvrage "Es soholasticis labyrinthisexitus in plantai". Comenius énumère dix principes pour laformation des capacités de raisonnement et donne troisobjectifs importants de son ouvrage. Bout d'abord, la raisondevrait être à même de déterminer ce qui existe; c'est leniveau des connaissances. Ensuite, elle devrait répondre àla question, pourquoi ce qui existe est-il ainsi; c'est leniveau de la compréhension, troisièmement, elle devrait êtreà même de trouver des applications pratiques pour ce qu'ellea appris; c'est le niveau de l'utilité.

D'après Comenius, il y a trois éléments qui influencentl'éducation dans une véritable situation d'étude. Ceséléments sont: la raison, la volonté et la capacité d'action.Il écrivit que la raison, est 'l'oeil interne de l'âme',profitant attentivement du inonde qui nous entoure en enre-gistrant fidèlement ses images; la volonté est 'la main del'âme', s'efforçant d'acquérir des connaissances et de dominerles choses; la capacité d'action utilise ce que la raison aappris et ce que la volonté a déterminé. Il y a aussi troisoutils de notre éducation. Oe sont les sens qui sont 'lesfenêtres de l'âme', par lesquelles elle perçoit le monde; lapensée consécutive qui est 'le miroir de l'âme1, s'exerçantsur ce que les sens ont apporté, enfin, la déduction créative,qui est le 'télescope de l'âme", permettant à l'homme d'ap-prendre ce qui est au-delà de la portée immédiate de sessens.

Sur ces bases, Comenius a établi trois degrés desagesse humaine et les a décrits comme étant: la théorie,la pratique, et la 'chresis'. le premier degré'consiste àreconnaître les choses telles qu'elles sont. C'est le degrédes connaissances indépendantes. le second degré est l'épreuveet la confirmation des connaissances dans les activitéspratiques. lie troisième degré, désigné par un mot grec,

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-signifiant l'emploi ou l'application, comprend l'actionutile et le langage approprié, basé sur les connaissancesacquises au cours de la vie.

Soute cette théorie a été exposée dans l'ouvragesynthétique posthume "îTriertium oatholicum". expliquantles principes élémentaires des connaissances et de leuracquisition, révélés par une analyse du processus desconnaissances humaines, essentiellement inséparable de laparole et de l'action. L'homme, dit Comenius, est unecréature qui apprend, parle et agit. l'éducation doit doncêtre tripartite, exactement comme le processus des con-naissances.

En conséquence, l'ouvrage suit un plan en troisparties, montrant les relations mutuelles et les parallèles.entre les éléments des trinités respectives. A la fin, ontrouve un schéma des principales caractéristiques de l'hommeet des manières dont elles peuvent être portées à la per-fection. Bans ce schéma, le centre est occupé par le mondedes choses, avec la raison, la parole et les aptitudesmanuelles (mens, lingua, manus) évoluant autour de lui commedes planètes autour du soleil. La raison, étant le miroirdes choses, détermine nos connaissances; la langue lestraduit et constitue notre moyen d'expression; l'aptitudemanuelle imite les choses et alimente l'action. Comprendre,signifie bien parler et bien agir. Mais bien parler, signifiecomprendre convenablement et agir convenablement. A sontour, agir convenablement signifie bien comprendre etbien parler. Il n'y a pas de compréhension sans expressionparfaite, et l'action exacte, et il n'y a pas d'actionexacte sans l'expression parfaite et la compréhension exacte.Le processus de perfection de l'être humain s'élabore au

- sein de cette trinité unifiée. Il y a trois disciplines

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servant ce processus. Ce sont: la logique qui enseigneles connaissances appropriées; la grammaire qui enseignecomment parler à la perfection; et la pragmatique quienseigne l'action efficace. Chacune d'entre elles établitses normes appropriées de conduite, basées sur l'expérienceadéquate et qui contribuent à d-'autres progrès.

l'évolution de l'homme vers la perfection est liéetrès étroitement à l'évolution de l'univers vers la perfec-tion. C'est à partir des choses que les connaissancesjaillissent par l'intermédiaire de la raison qui les réflé-chit; la parole naît des connaissances, où se fait entendrela voix des choses. les connaissances et la parole donnentnaissance à l'action, qui, à son tour, crée les choses.Ainsi la conception de Comenius est liée à son idée généraledu progrès, qu'il défendit tout au long de sa vie.

Education fructueuse à l'école

Comenius a fondé sur ces principes généraux un systèmeassez détaillé de suggestions didactiques, couvrant la répar-tition des' connaissances à enseigner, et le temps convenantà chacune, la gradation exacte de leurs difficultés, leuradaptation aux capacités des élèves, leurs rapports avecla pratique. Par contraste avec la pédagogie médiévale, et,dans une certaine mesure aussi par contraste avec la péda-gogie humaniste, Comenius a souligné la nécessité de prendreen considération la psychologie de l'enfant; mais il n'ajamais perdu de vue les objectifs de l'enseignement, l'obli-gation d'enseigner un contenu précis et d'obtenir des résul-tats définis. Selon Comenius, l'école devrait être une.école de jeu - schola ludus - mais seulement dans le sens

50QII l'obligation et la peur, l'ennui et l'indifférence doiventêtre chassés des classes, tandis que ce qui devrait êtreenseigné serait présenté d'une manière facile et agréable.

Comenius a porté une attention particulière aux méthodesd'enseignement des langues étrangères et de la langue mater-nelle. C'est ici que son opposition à toute la traditionprécédente de l'enseignement apparaît le plus fortement,les théoriciens de l'Ecole humaniste soulignaient l'importancede l'enseignement du latin. Mais ils avaient l'habi-tude del'enseigner sans rapports avec la langue maternelle desélèves, conseillant la méthode abstraite qui consiste àcommencer par les règles grammaticales et à passer des exemplesà'l'imitation1.

Comenius a inversé cet ordre. Il exige que les 'choses!et non les 'mots' soient le point de départ; les mots fami-liers devraient être introduits à l'étape suivante, et seule-ment alors on trouverait leurs équivalents étrangers; lestextes et les exemples devraient venir avant les définitionsde principes et les règles.

Comenius s'intéresse particulièrement à l'enseignementdes langues, mais il ne néglige pas du tout l'enseignementdes sciences naturelles qui eurent un rôle important dansses programmes scolaires. Il insiste sur le fait que c'estl'enseignement relatif au monde qui doit former la base detout autre enseignement. Ce principe marque tous les manuelspréparés par lui. Il croit que la démarche logique part del'observation pour arriver aux principes et à la pratique."Tous rendez la tâche plus facile à votre élève, si voualui indiquez l'emploi quotidien de tout ce que vous luienseignez... Si vous lui montrez oe qu'est l'utilisation4'une chose, vous la mettez à sa disposition, ainsi il prend

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conscience de ce qu'il sait et peut en faire l'application".

Comenius ne sépare jamais le processus de l'enseigne-ment des autres fonctions de l'école. H voit les méthodesd'enseignement par rapport à tout l'ensemble des conditionsdans lesquelles l'école fonctionne. Ceci errplique qu'ils'intéresse souvent à l'organisation intérieure de la viescolaire et cette préoccupation apparaît dans ses "Règlespour le gymnasium à leszno". "Principes de comportements'adressant à la jeunesse", "Lois d'une école tiien organisée".En établissant ces règles, Comenius désire surmonter le chaosqui règne dans le fonctionnement des écoles, et indiquer lapossibilité d'une organisation ordonnée, favorable auxrésultats les plus efficaces. Selon Comenius, l'école estun grand atelier qui forge les gens, ïorger ou créer desgens signifie développer leur raison, perfectionner leurlangage, cultiver leurs aptitudes et leur volonté. lesprincipes de travail et de vie de chaque école devraientêtre tels qu'ils procurent aux élèves les meilleures occa-sions de devenir vraiment des hommes, réalisant les grandespossibilités de la nature humaine.

Pendant ses dernières années, Comenius développe cesconceptions didactiques en un projet de grand système orga-nisé de connaissances sur le monde, qui aboutirait àutiliser toute la gamme des activités humaines. C'est l'idéede la "Pansophia". du grec "pan" (tout) et "sophia" (sagesse).

Pansophia - la sagesse universelle et utile à tous

D'après les premières esquisses de la conception de-Pansophia, cet ouvrage devait embrasser trois grands thèmesd'étude, les trois grands livres où il faut lire: Dieu, la

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Hature et l'Jbrt. Selon Comenius, le premier se reproduitdans les deux autres d'une manière définie, mais distincte,le livre de la Hature est un miroir simple et passif duCréateur, tandis que le livre de l'Art, créé par l'homme,en est l'imitation, active et libre.

Comenius s'intéresse de plus en plus au domaine du'monde humain1. Mais alors que Erancis Bacon' l'imaginaitdu point de vue de sea relations avec la nature, Comeniusse préoccupe plus de sa propre structure inhérente. PourBacon, le problême de l"art' consiste avant tout à étudierles voies de la nature pour en utiliser les forces; pourComenius, c'est un problême en soi. Bacon se posait laquestion suivante: pourquoi et comment les nommes furent-ilscapables de construire leur propre domaine dans les entraillesde la nature? Comenius se demande de quel genre de monde ils'agit.

la Pansophia est quelque chose de plus qu'une théorievisant à expliquer un 'troisième monde' complétant l'universde Dieu et celui de .la nature; ce terme indique égalementun projet et un programme pour sa construction et sa recons-truction, le concept de pansophia sert de base aux; appelsadressés par Comenius aux politiciens et aux savants, etforme la base de son système scolaire. Dans l'introductionde sa "7ia luois" (la Voie de la lumière"),Comenius décritla Pansophia comme étant un "système qui parvient à ordonnertoutes les choses présentes et futures, apparentes ou cachées,dans un ordre inébranlé et inébranlable, et avec une clartételle que tout homme qui l'examine attentivement, comprendracertainement tout ce qui s'y trouve et l'approuvera totalement".

la Pansophia révèle cette vérité: il existe des règles•de connaissances inhérentes à chaque homme, appelées notions

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•universelles; des excitations de désirs appelées instinctsuniversels; et des organes d'action qui peuvent être dénomméscapacités •universelles. C'est sur ces principes communs àtous les hommes que l'éducation devrait se fonder. Comeniusécrivit: "nous désirons avoir une école de sagesse, d'unesagesse universelle, une.institution admettant tous lesnommes, les formant tous à ce qui est nécessaire à la vie,d'une manière si complète et si sûre que l'on ne puissejamais reprocher à une personne ainsi formée de savoirquelque chose de manière inexacte, ou de le comprendreseulement en partie, ou de ne pouvoir l'appliquer d'unemanière sûre et exacte, ou enfin d'être incapable de l'expri-mer avec aisance."

Dans cette perspective, la Pansophia est la véritésynthétique relative au monde, embrassant la compréhension.et le traitement des choses, et une règle générale orientantl'application pratique par l'homme des connaissances et idéesthéoriques. Elle comprend donc tout ce qui est nécessaire àceux qui désirent atteindre la sagesse; ainsi les gens quivoient clairement les fins de toutes choses et les moyensd'y parvenir, avec les manières appropriées de .les employer,sont par conséquent capables de diriger toutes choses enleur possession vers de bonnes fins, et à même de poursuivrede telles fins sans risque d'erreur, par des moyens quisont bons et valables. Quiconque agit de cette ma.Ti.iere estdonc sage.

l'idée de la Pansophia a été attaquée par la religionorthodoxe, de même que par des philosophes orientés versle rationalisme et l'empirisme. 0.'était cependant un essaipour créer un rationalisme d'un type nouveau et un empirismed'un nouveau genre.

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Comenius reconnaît le mérite et la puissance de laraison humaine, bien qu'il ait manifesté sa confiance encette raison humaine en des termes différents de ceux de2\Descartes '; il reconnaît aussi la nécessité de l'obser-vation et du contact arec la réalité, quoique d'une manièredifférente de celle de Bacon. le rationalisme et l'empi-risme tels que les représente Comenius, concevaient lemonde comme un tout, et se donnaient la tâche d'élaborerun programme'intéressant de réformes raisonnables, justes,et généralement profitables, la Pansophia, connaissanceentière et profitable de l'univers, est en même temps uneconnaissance de l'homme comme reflet du Cosmos, et comme'le résumé' du monde. C'est ainsi que Oomenius élabora

sa Pansophia comme une philosophie de l'univers conçueessentiellement comme une philosophie de l'homme.

l'homme et ses activités occupent relativement beau-coup de place dans les écrits de Comenius. H accepte ladoctrine traditionnelle du péché originel, mais ses conclu-sions ne sont pas du tout orthodoxes, la nature humainedépravée par le péché, exige une re-naissance, mais en plusde la grâce et de la prière, l'éducation lui est nécessaire.Ces préoccupations pédagogiques de Comenius sont enracinéesdans la conviction d'après laquelle chaque homme doit passerpar un processus d'enseignement, parce que sa nature estdépravée et doit être restaurée dans sa forme primitive,pure et réelle.

l'homme devrait 's'amender' par ses propres ressources,et il en est capable. Comenius s'efforce de promouvoir cettethéorie par son activité pédagogique. Il conçoit l'éducationcomme une entreprise beaucoup plus sérieuse qu'une simpletransmission de renseignements et de formation des aptitudes..11 croit qu'elle est une réelle 'création' de l'homme en ce

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qu'elle contribue à recouvrer la vraie nature humaine età'développer ses capacités.

Comenius répète à maintes reprises que l'homme devienthomme par son propre effort humain. Cette pensée constituele point de départ de ses ouvrages didactiques, et le thèmeprincipal de ses discours sur l'école. Mais la conceptionde Comenius s'oppose diamétralement à ces théories tradi-tionnelles oïl l'amélioration des hommes est décrite commele résultat de leurs propres efforts individuels, tandisque les conditions sociales de la vie se réforment par desaméliorations individuelles. Quoique ses projets de réformesoient utopiques et reposent sur une croyance dans l'efficacitédes appels adressés aux dirigeants du monde, ils ont cepen-dant marqué un courant nouveau dans la philosophie de l'homme,le postulat, selon lequel la réforme de l'homme devraitêtre réalisée par les forces humaines, a pris un sens nouveau,comme un coup de clairon, pour améliorer l'univers humain.

La situation de l'homme dans le monde est! décrite parComenius comme la situation d'un être créateur. SelonComenius, l'homme doit continuer le travail de la créationen perfectionnant son entourage et lui-même. C'est pourquo^,dans son système métaphysique, l'univers de l''art humain'se situe dans la même direction que l'univers divin etnaturel, les oeuvres humaines ne sont pas de simples imita-tions de la nature, elles ne sont pas non plus destinéesuniquement à améliorer les conditions de la vie de tous lesJours; elles perfectionnent la nature, révèlent les possi-bilités qui sont latentes en elle, et seraient restéeslatentes si elles n'avaient pas été découvertes par lesinventions et le travail humains. les oeuvres humaines,dans toute leur utilité, constituent avant tout un dévelop-pement créateur du monde, un complément continu de lacréation divine.

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.Naturalisme et humanisme de Oomenius

Seuls les plus grands hommes s'aperçurent de lagrandeur de Oomenius - ainsi leibnitz ' prédit qu'unavenir splendide sortira des idées de Oomenius. Goethementionne Comenius avec voie profonde émotion, Herder ^'écrivit sur lui avec enthousiasme dans sa fameuse "Philo-sophie de l'Histoire de l'Humanité11 et Michelet ' appelleComenius 'le génie de la lumière, l'inventeur puissant,le Galilée de la pédagogie'.

Cependant, de l'avis de la plupart des pédagogues,ceux de son temps et ceux qui l'ont suivi jusqu'à une époqueassez récente, Comenius a été considéré comme un simpleréformateur des méthodes d'enseignement, surtout des languesétrangères; ses mérites dans le développement et la systé-matisation de l'idée de connaissance générale de l'universcomme base principale de l'éducation demeurent moins appré-ciées; on a. porté encore moins d'attention à ses conceptionsde la 'nature humaine1, de la structure tripartite de l'esprithumain et des relations entre la théorie et la pratique,avec l'importance donnée à l'action comme facteur développantla pensée et l'élocution. Pourtant c'est dans ces domainesde recherche que Comenius obtient des résultats qui justi-fient ses théories pédagogiques et leur donnent une pers-pective plus profonde, tandis qu'en même temps ces résultatsconstituent la première étape vers la pédagogie scienti-fique .

A l'inverse de ses contemporains, Comenius a uneperspective plus profonde que strictement professionnellesur le travail scolaire; tout en prodigant des conseilstechniques aux enseignants et aux éducateurs, il essaie deformuler les problèmes à étudier et il s'aperçoit que les

57écoles fonctionnent mal; mais à l'opposé des autres, ilprend la peine de rechercher les causes et de trouver laréponse, il examine en profondeur la 'nature' humaine,analysant les relations de l'homme et de la réalité, etles moyens de développement et de la perfection de l'homme.

Sous le charme des résultats de la technologie baséssur la connaissance des lois naturelles, Comenius s'efforcede réformer 'l'art' de l'éducation d'une manière similaire,en reconstruisant le système scolaire dans une grande•machine didactique' travaillant avec sûreté, et efficacité;il cherche continuellement ces penchants 'naturels' del'homme qui pourraient former la base d'une action pédagogique.scientifique et efficace.

Cette manière de poser les problèmes a ouvert unnouveau chapitre dans l'histoire de la pédagogie. Comeniusa consciemment dirigé cette discipline vers une approchescientifique de la réalité et vers une théorie d'actionsur des bases scientifiques.

ïout en soulignant ce caractêre_ des théories pédagogiquesde Comenius, il convient de noter que lès débuts de l'approchescientifique des problèmes de l'éducation ne doivent passeulement être rattachés à ce que l'on connaît sous leterme de conceptions naturalistes. Comenius se réfère, ilest vrai, aux exemples naturels et techniques, mais seule-ment par analogie, pour mieux comprendre les qualités parti-culières de la nature humaine et les manières de réaliser ladestinée de l'homme. Il veut accorder l'art "de l'éducationà la nature humaine, mais en tenant toujours compte desplus grandes possibilités intellectuelles et spirituelles".Il n'a nul besoin d'une interprétation matérialiste de lavie humaine qui considérerait la physiologie de l'homme à

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la fois comme l'explication et le moteur de tous ses compor-tements. Au lieu de cela, il voit clairement les exigencesintellectuelles, morales et spirituelles que la vie imposeaux êtres humains, et il en fait l'objet de ses recherches.

Il y a encore un autre sens du mot 'naturalisme1 quine doit pas être identifié avec lea théories de Comenius.Ceux qui comprennent ainsi le naturalisme, croient quel'éducation doit reconnaître d'une manière passive ce quel'on .suppose être le développement naturel d'un enfant,tandis que le rôle d'un éducateur se limite, à 'superviser'ce processus automatique. Comenius n'était nullement enclinà partager une telle attitude. Il souligne plutôt quel'homme ne devient homme que par un processus actif del'éducation, l'homme est un être qui peut différer de cequ'il a. été, parce qu'il apprend et agit. De même, commeles arts mécaniques peuvent réaliser quelque chose de neufet de plus puissant que la nature, laissée à ses propresressources, n'en fut jamais capable, ainsi l'art de l'édu-cation fait de l'homme quelque chose de plus qu'il n'estlui-même. Mais pour y parvenir, l'éducation doit être baséesur la connaissance des lois de la nature humaine comme lesarts mécaniques sont basés sur la connaissance des loisnaturelles. C'est seulement dans ce sens qu'il faut 'obéir1à la nature, les théories pédagogiques de Comenius sontimprégnées d'une foi optimiste, selon laquelle la découverteet la propagation d'une telle 'méthode naturelle' ouvriraientdes occasions magnifiques d'êduquer tout le monde dans tousles domaines, "l'homme est tout, parce qu'il peut devenirtout", dit Comenius. Ce mélange de naturalisme et d'humanisme,qui constitue l'essentiel du contenu des théories péda-gogiques de Comenius, explique son influence sur la postéritéJusqu'à nos jours.

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l'âge des lumières comme continuation des idées de Oomenius

L'approche de la pédagogie commencée par Oomenius aété poursuivie par Rousseau '', qui fit également de nom-breuses références à la nature de l'enfant. Sa. conceptiondu retour à l'état de la nature était dirigée contre lesystème social féodal, et était l'expression d'un sentimentrévolutionnaire de confiance dans la vie qui naît sponta-nément, lorsque les gens ne sont pas brimés, et de colèrecontre les gens 'bien élevés'.

Le programme pédagogique de Rousseau est contenu dans1'"Emile", ouvrage que les aristocrates français voulaientbrûler, et qui devint un manifeste de la nouvelle approchepédagogique jusqu'à notre époque. Il prétend que tout estbon lorsque c'est le créateur de la nature qui le fait, etque tout se détériore dans les mains humaines. Ainsi latâche de l'éducation ne peut pas être confiée aux gens.Il faut laisser l'enfant se développer librement et sponta-nément. Selon Rousseau, l'éducation ne devrait pas être lapréparation d'un enfant à son avenir, et ne devrait pas lemodeler d'une manière quelconque; elle devrait être la viemême de l'enfant. Le professeur ne devrait pas prétendrefaire plus qu'aider adroitement l'enfant à développer sespropres besoins, aspirations, sentiments et pensées, quifaçonneront sa future personnalité. Soute autre prétentionest injustifiée et même préjudiciable. La seule source decroissance de l'homme-est sa propre vie.

a\La même direction a été prise par ïestalozzi ' etEroebel '. Malgré toutes les différences importantes entreeux, ils cherchèrent tous deux les moyens de faciliter ledéveloppement des forces spontanées d'un enfant et de sespropres activités. Pestalozzi a consacré toute sa vie aux

60enfants les plus pauvres et il dut veiller à ce qu'onleur donne des moyens de gagner leur vie. Mais sa prin-cipale préoccupation fut de les élever selon leurs capa-cités et leurs aptitudes, avec leurs propres façons d'ex-périmenter le monde et la société. Dans sa langue à moitiémystique, Proebel fait remarquer l'unité universelle desfacteurs qui font qu'un enfant grandit spontanément, etqu'il devient un adulte en 'intériorisant' 1'extérieuret en 'extériorisant' l'intérieur. Cette dialectique roman-tique originale a trouvé son expression dans le processusqui consiste à devenir ce qu'un enfant a été et à être cequ'il est devenu, ïïne telle approche va bien au-delà desanalogies biologiques, connues depuis des oeuvres litté-raires antérieures et répétées naïvement plus tard: ellereflète un peu de la philosophie dialectique de Hegel10'.Voyant le développement de l'homme comme il le voyait,Eroebel devait voir l'enfance sous l'angle du jeu quipermet l'expression, l'exploration, l'action créatrice, leplaisir ou', pour /résumer, un feedbaek dialectique de'l'intérieur et de l'extérieur1, l'éducation se doit deservir ce type d'activité, la théorie de Iroebel fut lapremière conception pédagogique centrée sur le jeu.

l'idée que l'éducation devrait découler naturellementde la vie de l'enfant et servir à son développement, s'estrépandue. E.W. Emerson " écrit que l'éducation doit êtreaussi 'extensive' que l'homme, et devrait révéler et ren-forcer tout ce qui est en lui.

Mais toute la pensée pédagogique française du dix-huitième siècle, fertile et révolutionnaire., provient deOomenius; elle est l'aboutissement d'un siècle d'évolutionde ses conceptions naturalistiques et humanistes de l'édu-cation. A cette époque, ses conceptions de la nature, étroi-tement liées avec la Divinité et donc avec la religion,

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ont laissé la place à une interprétation de la naturequi est entièrement laïque et a-religieuse. Cependant, latendance qui prédomine dans la théorie de Oomenius, c'est-à-dire, la tendance & concevoir les tâches de l'éducationdans une grande perspective sociale et historique de réformedes affaires humaines, est restée présente au cours de ladernière évolution de la pensée pédagogique, et elle estmême devenue plus forte et plus radicale, la pédagogienaturaliste est allée au-delà de sa base originale, la'nature'; en luttant pour l'éducation basée sur les 'choses'et en prenant en compte les traits particuliers du dévelop-pement psychologique de l'enfant, elle a mené vers lesespoirs plus nobles de reconstruction sociale et de per-fection future de l'homme.

Mais plus tard, durant les 19e et 20e siècles, appa-rurent des contradictions dans le courant des idées péda-gogiques lancées par Comenius, La croyance dans la nature,raffermie 'par les idées évolutionnistes, n'a plus été liéeà la croyance en la dignité et la responsabilité de l'homme,et tandis qu'elle perdait son appui sur le grand ordrenaturel, elle en venait à conduire de plus en plus souventau pays des rêves solitaires et des utopies.

le 20e siècle - l'âge de l'enfant, ou de l'échec

Ellen Eey ' a salué le 20e siècle comme l'âge del'enfant. Ses espoirs se sont réalisés à certains égards,mais ont été décevants sur d'autres points. Dans cette contra-diction se révèle l'antinomie fondamentale de l'éducationdans le monde contemporain.

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le 20e siècle a, certes, 'découvert' l'enfant, ledéveloppement des disciplines pédagogiques et en particulierde la psychologie du développement et de l'éducation ontpermis une compréhension meilleure que jamais de l'âme del'enfant.

Aussi dans presque toutes les formes de formationpédagogique, on a accepté la doctrine selon laquelle ily a plusieurs traits importants et particuliers dans ledéveloppement psychologique des enfants et des adolescentspour lesquels l'enseignant devrait être en alerte, lesélèves les laisseront voir généralement dans leurs pensées,leurs émotions et leurs manières d'agir.

Certes, la pédagogie s'est toujours efforcée de pro-diguer des conseils dans les questions pédagogiques et ellea toujours tenu compte de l'enfant. Cependant, son véri-table intérêt s'est concentré vers les résultats de l'en-seignement et de l'éducation, la manière de les réaliserpouvant être soit encourageante et attrayante pour l'enfant,soit autoritaire et contraignante. Mais maintenant, lespréoccupations se sont détournées des résultats qui étaientvraiment sans rapport avec l'univers de l'enfant, et s'orien-tent vers la participation plus complète de l'enfant dans leprocessus éducatif. Selle est la signification de l'expres-sion qui dit que l'enfant n'est pas un objet, mais plutôtun sujet d'éducation, l'activité de l'enfant, ses besoinset intérêts, sa curiosité et sa sensibilité ont pris laplus extrême importance, comme facteurs principaux de sondéveloppement intellectuel et moral, les nombreux projetsde réorganisation complète du système scolaire et desprogrammes d'étude ont été conçus pour répondre à ces pos-tulats. On pense que le cerveau de l'enfant s'intéresse à•la réalité d'une manière synthétique, par exemple dans les

63ensembles concrets que l'on rencontre dans la vie de tousles jours, sur cette base, on a formulé des critiquescontre l'enseignement traditionnel, divisé en multiplessujets correspondant en principe à la classificationcourante des connaissances humaines, et on a préconisél'enseignement unifié, qui permettrait par exemple àl'enfant d'enrichir ses connaissances en se familiarisantavec les phénomènes concrets sous fie nombreux angles avan-tageux à la fois.

Puisque l'activité de l'enfant était considérée commesuprêmement importante, tout ce qui pouvait la stimuleret l'encourager, en venait à être' fortement apprécié. Dece point de vue, les classes normales semblaient parti-culièrement monotones et futiles.

Œout ce processus, qui met l'accent sur les diffé-rentes particularités de la psychologie et de l'activitéjuvéniles comme base des efforts pédagogiques, devaitnécessairement conduire à poser le problême de l'indivi-dualité. Tandis que les théories pédagogiques tradition-nelles s'intéressent à l'enfant 'en général1, on essaiemaintenant de donner à l'enfant autant d'occasions dif-férentes que possible, l'école devrait être 'sur mesure',comme l'a dit Olaparêde. -1'

la pédagogie naturaliste moderne est à plusieurségards une continuation de la pédagogie plus ancienne,du naturalisme, mais il y a une différence essentielleentre les deux en ce qui concerne l'idéal de l'éducation,l'opposition principale se situe entre la notion plusancienne de l'éducation, comme modelant ou formant l'enfant1 selon la nature', tandis que la théorie naturalistemoderne conçoit l'éducation comme un développement naturel

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•de l'enfant. Dans le premier cas, l'éducation exerceen quelque sorte une influence dirigée par des objectifs,principes et valeurs définis, tandis que dans le deuxièmecas, c'est simplement une conséquence naturelle de la viede l'enfant.

l'idée selon laquelle l'éducation consiste à exploiterl'univers de l'enfant selon ses propriétés et lois, plutôtque d'imposer à l'enfant la forme et le contenu de l'universde l'adulte, s'est illustcée parfois de façon caractéris-tique dans des formulée et méthodes tout à fait différenteset plus générales d'évaluation du royaume Juvénile. Hest apparu à certains, non pas comme une réalité dont ilfaut tenir compte, mais comme un genre de vie incompara-blement plus beau et plus heureux que la vie de l'adulte,l'activité et la vitalité enfantines, la curiosité passion-née, l'invention inattendue, la liberté et audace d'expres-sion - tout cela apparaît comme meilleur que l'ennui, ladiscipline, la routine et l'hypocrisie des adultes, l'artde l'enfant a été apprécié de ce point de vue commel'expression des tendances.naturelles de l'esprit humain,non corrompu par l'éducation, l'opinion publique etl'influence sociale. Ainsi, l'univers de l'enfant a étéconsidéré comme le véritable Eden de l'homme, hors duquelil a été expulsé, condamné au travail et aussi aux obli-gations sociales qui suppriment les joies humaines de lavie. l'univers des enfants en est venu à tenir le rôleautrefois joué par l'image de 'l'état de nature', ou de lalégendaire vie heureuse et primitive de l'homme avant quela propriété et la puissance n'aient détruit l'égalité,la moralité simple et la culture spontanée et vivace. C'estdevenu une image utopique de la vie libre et heureuse menéepar des gens sincères et bons, consacrée au travail quiest une activité joyeuse, et à la création qui est un jeu.Par opposition à l'image du monde contemporain, dessiné

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en lignes durée et apocalyptiques, soulignant la déshuma-nisation de l'homme par le travail à la chaîne, parl'urbanisation sinistre, par le poids de la lutte pourla Tie, par la guerre et la mort - le monde de l'enfantest apparu sous les couleurs riantes de l'aspiration de1'homme à une vie libre et heureuse sans obligations etsans hypocrisie, libérée de l'effort ennuyeux et du recoursà la violence.

les espoirs d'Ellen Key ont-ils été déçus? le 20esiècle est-il vraiment devenu 'l'âge de l'enfant'? On nepeut répondre par la négative que dans un sens très étroit.En effet, d'importants progrès ont été réalisés dans lacompréhension de la psychologie des enfants et des principesfondamentaux du processus d'éducation, surtout aux pre-mières étapes, de même dans la compréhension du processusde l'individualisation et de ses difficultés et obstacles.Cependant, cette compréhension n'a' eu qu'une portée socialelimitée.

l'éducation a été conçue comme l'expression de la viejuvénile et son épanouissement. Mais alors,comment faut-ilconcevoir la transition de l'univers de l'enfant à celuide l'adulte, ou le passage de la nouveauté, la curiosité,la création à la routine, aux modèles fixes de comportementet aux obligations imposées ? Quel est le chemin de la'république des enfants' à la démocratie capitaliste?

Bertrand Bussel a vu clairement que le système socialexistant et le nouvel homme produit par la nouvelle édu-cation étaient incompatibles. Mais il conseille de nouvel-les voies en éducation, avec pour objectif la transformationde la société existante. Il fallait développer la curiositéet l'esprit critique pour se débarrasser de l'ennui et du

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dogmatisme de la vie intellectuelle des adultes. De même,les tendances créatrices devaient être encouragées pourrendre originaux et créateurs le travail et l'activitéfuturs des adultes; il fallait cultiver la sincérité etle courage pour libérer la société future de l'hypocrisie,et de la soumission; les penchants constructifs devaientfournir des dérivatifs pour les poussées agressives etles guerres qui s'en suivent; l'amitié et la tolérancedevaient éliminer le fanatisme des relations humaines.

Une telle attitude ne peut pas trouver son expressiondans un système pédagogique qui tolère l'état actuel deschoses, mais plutôt en un système tourné vers l'avenir,dirigé vers une action sociale réformatrice, tendant versune existence qui pourrait être réellement appelée humaine.

Comeniua et la croyance des éducateurs dans l'avenir

Ce'que noue appelons maintenant 'éducation pourl'avenir" exprime la croyance selon laquelle la réalitéactuelle n'est pas la seule possible; en conséquence,elle ne peut pas être le seul système de référence pourl'éducation. C'est la réalité future qui devrait êtrecette référence. l'avenir est défini par l'effet cumulatifde la nécessité historique et des réalisations de nosidéaux, le sens des réalités nous évite de tomber dansdes rêves utopiquea, tandis que l'activité orientée versl'avenir nous protège contre le fatalisme. l'éducationpour l'avenir devrait précipiter le processus de la déca-dence du passé et-accélérer la naissance de l'innovation,surtout lorsque les deux processus sont trop lents oufonctionnent mal.

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La tradition particulière de 'l'éducation pourl'avenir1 rejoint les lignes de la pensée pédagogiquequi a toujours refusé d'accepter le principe de 1'ajus-tement aux conditions actuelles comme la tâche suprêmede l'éducation, et aussi ceux gui'ont critiqué la réaliténon pas pour s'en abstraire mais plutôt pour contribuer

' à son amélioration.

A l'heure actuelle, se sont présentées des occasionsde surmonter les contradictions de base des plus ancienssystèmes d'éducation, de réaliser des idéaux gui, au coursde l'histoire, n'ont été que des thèmes de rêves uto-piques, d'abolir l'opposition entre la tâche d'êduquer unhomme et celle d'êduquer un citoyen, entre la formationd'élites et la promotion des masses ou entre la préparationau travail intellectuel et celle au travail manuel.

Ces occasions se réaliseront-elles? Cela dépend denombreux facteurs, mais le plus important semble être laprise de conscience des tâches pédagogiques dans une époquenouvelle et le pouvoir de les mener à bien.

C'est seulement maintenant, après les expériencesdramatiques de notre siècle que nous commençons à réaliserla grandeur humaniste de Comenius, et d'apprécier sa foirationaliste dans le rûle créateur de l'éducation dans samission de réformer les hommes et leur univers. Comeniusne voulait, ni fixer l'ordre social existant en se référantaux lois de la nature, ni céder au développement spontanéde l'âme juvénile dans les conditions de vie que mènentles classes supérieures. Ce qu'il envisageait, c'était lacréation de l'homme et le développement de la nature humaine,au moyen de l'éducation; il voulait développer l'hommeselon les exigences objectives de la connaissance et de la

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société, en cultivant son esprit et ses capacitésd'action pour le Men-être général. Oomenius s'efforçade lutter contre l'ordre social existant de manière àfournir à chaque enfant l'occasion de se développerpleinement et devenir un nomme.

C'est pourquoi le "professeur des peuples1 est siprès de nous et de notre temps.

69JT. COMSNIUS ET 1 ' OEGMISAŒIÛN DE 1,'EISEIGHEîMJŒ

Jeaa Aubâ

Jean. Amos Comenius, philosophe de l'éducation,n'est pas seulement un penseur généreux et profond, maisaussi un réformateur inspiré: animé de l'esprit de syn-thèse des vrais planificateurs, il sut concevoir desstructures efficaces qui peuvent encore servir de modèleaux réformes pédagogiques actuelles.

le système éducatif de Comenius se fonde sur unedouble constatation:

- la première est que l'organisation scolaire envigueur à son époque est absurde, improductive etinjuste.

"Ce sont des abattoirs de l'esprit od l'on passedix années et parfois davantage à emmagasiner ceque l'on pourrait apprendre en un an" '.

- la seconde est que l'homme n'est pas responsablede cet énorme gâchis des intelligences qu'il fautimputer aux structures scolaires.

Dès lors, avec sa profonde confiance dans les pos-sibilités de l'esprit humain et son tempérament de cons-tructeur de vastes ensembles gui 1'apparentent aux grandshumanistes utopistes (Thomas More, Campanella.:), Comeniuspeut affirmer qu'"il est possible de réformer et d'amé-liorer les écoles".2'

70II peut alors procéder à une refonte complète des

structures scolaires qui a'appuie sur une idée centrale:le parallélisme du développement de l'esprit humain etdu développement naturel. A partir de là, l'ordre qui"en tout est le fondement de la réforme scolaire" "nepeut être trouvé ail leurs qu'à l'école de la nature" '.

Ainsi l'éducation qui s'inspire d'une philosophieà la fois, optimiste, rationnelle et naturaliste, devientnon seulement une formation de l'enfant à l'école, maisse transforme en un processus intéressant la vie entièrede l'homme.

Quelques principes fondamentaux de son système

1. I j&êolepoar tousUne des grandes originalités de Oomenius est sa

revendication d'une école unique pour tous.

Cette exigence démocratique s'oppose à toutes lesinstitutions en vigueur à l'époque et notamment à cellesdes jésuites qui ne s'adressaient qu'à l'élite de lasociété.

"Tous les enfants, les garçons et les filles, ceuxdes riches et des pauvres, des nobles et des rotu-riers, des grandes cités et des petites villes, desvillages et des hameaux doivent être admis dans lesécoles sur un pied d'égalité." *'

Cette revendication découle de sa conception del'école: 'vrai laboratoire d'hommes' et "où, à tous, estenseigné réellement tout'. '

71l'école, ayant pour fonction de faire des hommes,

au nom de quoi priverait-on certains hommes de ce droit?Ea effet "quiconque naît homme, naît pour la même fin,celle d'être homme et de devenir un être raisonnable." '

Comenius n'en reste pas aux principes et formuleles structures à mettre en place: "Bans chaque cohabi-tation d'hommes tien administrés (cité, bourgade ouvillage) construction d'une école publique pour l'édu-cation commune à la Jeunesse".

Bon seulement, il faut que tous les enfants frê- •quentent l'école nationale (6-12 ans), mais encore lesétudes ne doivent pas se faire dans des écoles différentespour ceux qui veulent poursuivre au-delà et ceux qui s'ar-rêteront au terme de ce cycle pour exercer une professionmanuelle.

Ea effet, même ceux qui arrêteront leurs étudesdoivent avoir reçu une culture générale apte à formertoutes les facultés de l'homme. Il est donc nécessairequ'une culture générale soit dispensée aux élèves dansun tronc unique.

Ce tronc doit être commun aussi pour éviter unepré-sélection des enfants d'origine modeste, qui n'au-raient pas la possibilité de passer dans le cycle supé-rieur.

"Il faut donc les conduire tous ensemble Jusqu'aupoint oïl on peut les conduire tous ensemble afinqu'ils s'encouragent, se stimulent et s'affinent

" 81mutuellement '

Ainsi, le cycle suivant (12-18 ans) ne doit pas£tre réservé aux seuls enfants des riches car: "l'esprit

72souffle au il veut et quand il veut.* '

A cette fin, il est nécessaire que les écoles soientgratuites et que les communes payent les frais del'éducation des indigents.

2. lajaiiitèUne autre conséquence de la revendication d'une

école pour tous est l'éducation obligatoire pour lesfilles, là encore l'exigence de Oomenius est très anti-cipatrice pour son époque:

"H n'est possible d'avancer aucune bonne raisonpour priver le sexe faible (...) de l'étude dessciences. Plus nous leur apprendrons à réfléchir,moins elles seront frivoles, car la frivolité estgénéralement la conséquence du désoeuvrement del'esprit. 10)

-3. Adaptation aug divers tgggg d intelligengeC'est la conséquence la plus originale qui découle

de la volonté de Oomenius de n'"exclure personne desbienfaits de l'éducation".11' H faut que le systèmescolaire ne soit pas structuré à partir d'un seul typed'intelligence, ce qui éliminerait tous les autres, maisau contraire, soit capable d'intégrer tous les espritsmême les plus arriérés.

"le fait qu'il y ait des intelligences naturellementfaibles et bornées n'est pas un obstacle, mais au contraireune obligation urgente de cultiver tous les esprits. Carplus un enfant est intellectuellement faible et stupide,plus il a besoin de secours pour se libérer de sa stupi-dité et se guérir de sa faiblesse."

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Bfoptimisme de Comenius l'amène à ne désespérer depersonne. Des esprits épais peuvent devenir fins etpénétrants, autant que des esprits précoces, à conditionque le système scolaire ne les rebute, ni ne les décou-rage dès le départ. H faut, à cet effet, mettre enplace des structures de soutien pour les moins doués,tenir compte des divers types d'intelligence, que, parexemple, les plus doués soient nommés moniteurs d'ungroupe de dix élèves et qu'ils viennent en aide auxplus failles.

4. Une exigence d'organisation à l'échelle universelleComeniue a des perspectives plus vastes encore:

c'est à l'échelle planétaire qu'il formule ses projets.Son système s'adresse à tous les nommes sans exclusivesociale, religieuse, raciale ou nationale.

Bans son livre "La Pampaedia". il formule un projetd'éducation universelle;

"Mais il faut que nous désirions que même:les peuplestout à fait barbares puissent être éclairés et déli-vrés des ténèbres dues au manque d'instruction; carils font partie du genre humain, et cette partiedoit s'adapter à l'ensemble; d'ailleurs l'ensemblen'est pas vraiment l'ensemble s'il en manque unepartie (...) si 1'on ne veut passer pour un espritborné ou malveillant, il faut souhaiter que tout lemonde aille bien et pas seulement soi-même ou sesproches ou seulement son peuple." '

14)"Hême en Scythie, des Âaacharsis peuvent naître".

— l'organisme qui s'occupera de cette éducation uni-verselle est le Gollegium lucis gui est à la fois un

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ministère international de l'éducation et une académie"" O•universelle. Comenius définit cet organisme dans la"Panorthosie".

Ce Collegium ouvrira des écoles chez tous lespeuples même les plus 'sous-développés'; il surveilleral'organisation des écoles, le personnel enseignant; ilveillera au perfectionnement des méthodes, à l'éditiondes livres scolaires.

Tout cela est décrit avec la minutie propre auxutopistes mais, au-delà de certaines naïvetés se trouventpréfigurés ici les organismes contemporains tels quel'OTESCO ou le BEE qui ont pour but de favoriser la colla-boration internationale dans les domaines de l'éducationet de la science.

Plan du système scolaire selon Oomenius

C'est à partir de ces principes que Comeniusdessine tout un plan des structures scolaires à mettreen place.

Son système scolaire est subdivisé en niveaux cor-respondants aux divers stades du développement mentalde l'élève:

•*•' le s s truotur ea_goglair es1) l'école du giron maternel pour les tout petits

jusqu'à six ans. Cette école a pour fonction essentielled'exercer et de développer les sens externes de l'enfant.

2) 1'école élémentaire ou nationale

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Elle est ouverte à tous les enfants, garçons etfilles, de siz à douze ans. l'enseignement nedoit pas dépasser quatre heures par jour. Les deuxheures du matin sont consacrées à la culture del'intelligence et de la mémoire; les deux heures del'après-midi, aux exercices manuels et oraux, lereste du temps doit être employé par les élèves àla préparation de leurs devoirs, aux travaux domes-tiques et aux exercices physiques.

3) l'ê-cole latine ou gymnase, ouverte aux élèvesdoués de treize à dix huit ans. Une école latine doitêtre édifiée dans chaque ville. Elle est composée de HTTclasses et l'enseignement quotidien est toujours de quatreheures.

Au terme de ce cycle, les élèves subissent tin examenqui sélectionne ceux qui sont susceptibles de faire desétudes supérieures. l'Etat accorde une aide financière auxétudiants d'origine modeste pour leur permettre de conti-nuer leurs études.

4) l'AcadémieII doit en exister une par province.les études supérieures, qui durent encore six ans,

sont sanctionnées par des examens publics très sévères,car les Académies sont chargées de fournir au pays lescadres et les futurs dirigeants de l'Btat.

Dans tout son système, Comenius insiste sur l'unitéverticale qui doit s'établir entre les différents cyclesde l'enseignement. Ce n'est pas la matière des études quidifférera selon les cycles, mais la manière d'appréhenderet d'approfondir les contenus. Chaque cycle restructurece que le précédent avait élaboré .

2. Jrgari 1 gatipn de 1 ' Ecole

Pour Comenius, l'école doit être aussi une écoledu futur citoyen de la Cité. A cette fin, il faut qu'ellesoit une véritable société en miniature. Il y aura ainsià la tête de l'école un professeur et un recteur qui repré-sentent le souverain; un sénat, des juges, un préteur,toute une organisation qui prépare les élèves à la viepublique.

Il y aurait encore beaucoup de choses à examinerdans l'organisation scolaire prévue par Oomenius (l'ensei-gnement de la journée scolaire, le rôle des livres, destravaux manuels, etc...) mais .finalement, plus que leestructures élaborées par Comenius, dont beaucoup peuventapparaître surannées ou naives, ce sont les problêmesqu'il a soulevés à leurs propos, qui continuent d'êtred'une grande actualité pour noue.

Actualité des problèmes d'organisationsoulevés par Oomenius

Certaines des réformes préconisées par Comeniussont entrées dans les moeurs mais, malheureusement,nombre de problèmes qu'il soulève se posent encore aujour-d'hui et sont au centre des réformes des systèmes scolairesde plusieurs pays. C'est la permanence de ces problèmesqui donne sa plus grande actualité aux idées de Comenius.Celle notamment suivant laquelle l'école doit être ou-verte à tous en pleine égalité, l'éducation étant un droitpour tout homme.

De nombreux pays ont pris conscience de l'injusticede structures qui écartaient,des études,les enfants issus

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des couches sociales populaires et ont entrepris,depuis la fin de la seconde guerre mondiale, des réformesrépondant à cette préoccupation de démocratisation, Maison s'est aperçu qu'il ne suffisait pas de prolonger ladurée des études si, dans le même temps, on maintenaitles anciennes filières qui recrutaient leurs élèves' dansles milieux sociaux différents. On retrouvait ici 1'exi-gence de Comenius de mêler les enfants d'origines socialesdiverses. Déjà les systèmes américain et soviétique offrentl'exemple d'une école unique prolongée au niveau de l'en-seignement général du second degré. Dans ces deux pays,après l'école élémentaire, tous les enfants poursuiventen commun leurs études générales jusqu'à la fin du premiercycle de l'école secondaire au moins. H s'agit de la 'highschool' pour les Etats-Unis et de l'école secondaired'enseignement général polytecnnique pour l'URSS, les paysd'Europe occidentale ont mis sur pied des réformes tendantà organiser un cycle d'études secondaires commun à toutela Jeunesse scolarisable par la fusion dans un même typed'établissement de filières parallèles antérieures,

- réforme italienne de 1962 établissant un cyclecommun au niveau du secondaire,

- réforme de 1959 en France, complétée par la miseen place des Collèges d'Enseignement Secondaire quidoivent grouper tous les enfants de onze à quinzeans révolus. (Il ne s'agit pas uniquement.d'ailleursde regrouper tous les élèves dans ces Collègesd'enseignement secondaire, mais aussi d'offrir auxplus défavorisés des types de pédagogie différents;la vraie justice sociale consiste, au-delà du

. regroupement des élèves, à donner à tous le soutienque certains seulement trouvent dans le milieufamilial. Cette préoccupation explique l'existence

78des classes du type Collège d'enseignement généralet des classes de transition);

- réforme suédoise de 1962 gui a substitué à unsystème très complexe de filières, une organisationhomogène, un tronc commun potir tous les enfantspendant neuf ans: l'école de base avec un cyclesupérieur (les trois dernières années) où, à côtéde matières obligatoires, les matières à option semultiplient. Ces réformes sont loin d'être achevéeset soulèvent parfois des difficultés d'application,mais elles ouvrent la voie à un processus de démo-cratisation croissant de l'enseignement.

Une autre préoccupation de Comenius rejoint unproblême qui se pose à tous les états modernes: quels sontles liens à instituer entre l'école et la société, commentl'école doit-elle préparer à l'entrée dans la vie active?

là encore, les besoins croissants des états modernesen cadres, techniciens et main d'oeuvre qualifiée donnentune idée entière aux idées de Comenius, partisan d'uneécole ouverte sur le monde, assurant la formation descitoyens utiles à l'Etat.

les pays socialistes, la Suéde, ou par ailleurscertains pays du Siers-Monde, répondent à ces besoinspar une véritable planification de l'enseignement enfonction d'objectifs globaux assignés en pays et selonles capacités d'accueil des établissements.

D'autres pays, comme les Etats-Unis, y répondentpar le développement de la 'vocational éducation', ensei-gnements professionnels et techniques du second degré,qui assurent une partie croissante de la formation de lamain d'oeuvre qualifiée.

79les expériences tentées dans plusieurs pays

de cours du soir, de formation, permanente visentle même objectif: une adaptation des structures sco-laires aux besoins des économies modernes.

Enfin, le droit à l'éducation était revendiquépar Comenius pour tous lee hommes de la planète. Cedroit a été reconnu dans la déclaration universelledes Droits-de l'Homme de 1948 qui a inscrit dans sonarticle 26:

"Toute personne a droit à l'éducation, l'êdu-'"cation doit être gratuite, au moins en ce quiconcerne l'enseignement élémentaire et fonda-mental".

Cependant, la réalité ne correspond guère à cesouhait, puisque 52$ des enfants dans le monde nepeuvent être scolarisés faute d'écoles et de maîtres,puisque 2 adultes sur 5 sont analphabètes et que 97pays comptent plus de 50$ d'illettrés.

Or, tout l'avenir des pays du Tiers-Monde estconditionné par un développement de l'éducation.

Ii'OTBSCO, sur ce plan, s'efforce dans son actionopérationnelle de lutter avant tout contre l'anal-phabétisme par des projets d'éducation de base; projetd'enseignement primaire en'Amérique latine qui sepoursuit depuis 1957; programme d'aide à l'Afriqueinauguré en I960; programmes nationaux de planifi-cation de l'enseignement et formation d'Instituteurs,etc. Là aussi, d'immenses problèmes restent à résoudre,

80mais certains résultats appréciables ont déjà étéacquis, qui offrent aux enfants un peu plus de chance,qu'il y a vingt ans, d'avoir accès à l'enseignement.

On a pu voir combien les structures scolairesavancées par Comenius étaient au coeur des préoccu-pations actuelles.

Mais là oïl Comenius peut encore nous offrir unmodèle stimulant, c'est lorsqu'il montre que le systèmescolaire n'est pas indépendant de ce que l'homme veutfaire de son avenir, qu'à travers les institutionsqu'on met en place, c'est l'homme de demain qu'onengage.

Partant, l'école 'ce vrai laboratoire d'hommes',a la responsabilité de l'idéal qu'on veut inculquer aufutur citoyen de la cité.

C'est un idéal humaniste et pacifiste que Comenius.nous propose à cet effet:,"Que les écoles formentl'homme, qu'elles le forment dans la totalité de sonêtre, de manière à ce qu'il soit à la hauteur des fonc-tions qui lui incombent dans la vie et prêt pour lavie éternelle." 15^

aiT. COMETOJS, OIIOTEÎf UTIEENAIIOICAI

John E. Sadler

Dans cet article, nous évoquerons Comenius, citoyeninternational, et nous chercherons ce que ses remarquablesidées de pionnier peuvent signifier pour nous aujourd'hui.Même dans notre vingtième siècle, il n'y a pas beaucoupde citoyens internationaux, même parmi ceux qui ontbeaucoup voyagé, ou appartiennent à des organisationsmondiales. Il existe, en effet, peu d'institutions dediscussion mondiale, et là oii elles existent, souventelles ne parviennent pas à promouvoir une perspectiveuniverselle. C'est ainsi que les représentants à l'assem-blée des Nations Unies ont tendance à parler pour leurpropre gouvernement, et non pas pour le monde tout entier.Parmi les membres permanents du personnel et les conseil-lers techniques des Hâtions Unies, et surtout de sesorganisations auxiliaires, il se trouve quelques personnesqui mettent réellement au premier plan de leurs préoccu-pations les besoins de l'humanité, mais l'étendue deleurs attributions est malheureusement très limitée. Hy a les despotes des affaires qui ont des intérêts danstoutes les parties du monde, mais qui travaillent pourle profit de leurs compagnies; aussi ne .peuvent-ils êtreconsidérés comme de véritables citoyens internationaux.Il y a des gens prêts à aller n'importe où, poussés pardes motifs religieux et humanitaires, pour offrir leursservices oïl l'on-en a besoin, mais en général, ils portentleur nationalité avec eux; il existe cependant quelquesnobles âmes qui s'intéressent à l'humanité de manièredésintéressée.

La raison pour laquelle il n'existe pas de passeports

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internationaux est que l'humanité, comme -telle, estun concept trop vaste pour que les nommes puissenten retirer quelque chose. Ceux qui le font, constituentl'exception à la règle.

Comenius fut certainement un homme qui essaya depenser universellement, bien qu'il ait vécu à uneépoque ou les engagements étalent plus étroits qu'ilsne le sont aujourd'hui. Un homme pouvait alors êtreconsidéré comme un étranger dès qu'il sortait de sapropre ville ou de son village, les lignes de différen-ciation, et par conséquent de discrimination, étaientmême plus strictes qu'elles ne le sont aujourd'hui, etla religion, qui devrait être une puissance unificatrice,était souvent cause de haine plutôt que d'amour, lorsqueles Européens avaient le sentiment profond d'appartenirà la chrétienté, c'était un idéal qui pouvait lesinciter à combattre l'infidèle. Cet idéal fut parfoissuffisamment fort pour qu'ils s'arrêtent de se faire laguerre. Cependant, au milieu de tous les conflits et leseffusions de sang du dix-septième siècle, il existaitdes groupes d'hommes qui travaillaient pour une commu-nauté universelle. Comenius appartenait à cette catégorie,et il voyait mieux que tout autre les implications d'untel objectif.

On pourrait affirmer que les circonstances l'ontforcé à avoir une vue plus étendue que les autres, parcequ'il fut si souvent - pour ainsi dire - arraché à sesracines, qu'il dut acquérir la mentalité d'un éternelvagabond, quoiqu'il ne fût jamais sans point d'attache.Pour citer un exemple: il perdit ses parents à l'âge dedouze ans, et dut quitter sa ville natale. Survint alorsune période assez malheureuse, jusqu'au moment ou1

esquelques bons amis lui permirent d'entrer dans un lycéeà Prerov, où il éprouva bientôt une passion pour l'étude.Pour son éducation universitaire, il fut envoyé enAllemagne, car aucune possibilité n'existait dans sonpays. A son retour, il devint ministre de sa secte,l'Unité de Stères, et commença une vie de dévouement,rudement ébranlée par la guerre. Pendant huit ans, ilne trouva aucun endroit sûr, mais vécut comme un fugitifpourchassé, jusqu'au moment où il finit par quitterson pays et trouva refuge à leszno en Pologne. Pendantquelques années, il attendit plein d'espoir une occasionde revenir, mais comme aucune occasion ne semblait seprésenter, il accepta une invitation à aller à londres,pour fonder un 'collège' en vue de créer une meilleureforme de société. Ces plans ambitieux furent anéantispar la guerre civile en Angleterre, et une fois de plusComenius dut s'éloigner. H s'établit cette fois à Elbing,sur la Baltique, oïl il se mit au travail et où il attenditqu'une paix équitable terminât la guerre de Œrente ans,paix qui, il l'espérait, entraînerait la restauration dela Bohême. Il eut la tristesse de constater que les poli-ticiens complotaient constamment pour leur intérêt national,et cette tristesse fut à son comble lorsqu'il découvritque même sa propre église commençait à se démembrer.

Ces déceptions eurent pour seul résultat de poussercet optimiste indomptable à faire de plus grands effortspour créer une communauté universelle, bien que, déçupar les dirigeants de l'Europe occidentale, il acceptâtl'invitation d'un prince hongrois. H espérait acheverla communauté universelle en créant une sorte d'écolerévolutionnaire qui, dans sa pensée, devrait être un'laboratoire d'hommes1. H lutta pendant quatre ans pourcréer cette école, mais dut finalement y renoncer etretourna en Pologne.

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Une fois de plus, la guerre intervint dans lavie mouvementée d« Oomenius. H perdit cette fois toutce qu'il possédait, et devint un réfugié sans ressources,jusqu'au moment oïl il trouva, après beaucoup de vicis-situdes, un endroit calme à Amsterdam, où les Hollandaisle reçurent généreusement. Comenius admirait beaucouples Hollandaiè, mais il trouva peu à admirer dans leflambeau d'internationalisme qui semblait fondé sur lecommerce compétitif. Oomenius s'émerveillait de leursvoyages dans les parties les plus éloignées du monde,mais il ne vit aucun avantage durable à. parcourir lesmers à la recherche de luxe superflu, les voyages provo-queraient tOt ou tard des conflits, et il fut convaincu,plus que jamais, de la nécessité pour tous les hommesde coopérer, s'ils désiraient créer une communauté inter-nationale. C'est pourquoi, les expériences qu'il vécutl'amenèrent à assumer lui-même le rûle de citoyen inter-national.

le problème aujourd'hui est à peu près le même.Malgré notre technologie dont nous sommes si fiers, nousnous trouvons aussi éloignés qu'avant de l'idée d'unmonde unique. Aujourd'hui comme précédemment, nous pro-duisons nos meilleurs efforts lorsque nous avons quel-qu'un à battre, et nous sommes toujours préoccupés pardes intérêts de classe ou de parti, ïïous essayons d'acca-parer des marchés, et non de les partager, lorsque -comme c'est parfois le cas - un groupe s'associe à unautre, c'est habituellement pour prendre l'avantage surun autre rival plus puissant. Au fond, rien n'a changé.

Pour la plupart, nous sommes conscients des dangersque comporte un monde divisé, mais il est étrange en effetque nous appelions à l'aide un pauvre exilé, un patriote

assans patrie, la victime d'un échec au sens matérieldu terme. Mais la grande force de Comenius résidedans sa loyauté réelle envers l'humanité, alors quenous avons tendance à placer nos espoirs dans deslignes de conduite qui, nous le savons, sont futiles.Au lieu de travailler sans cesse pour l'unité del'humanité, nous nous appauvrissons, eniôssayantd'ériger des défenses impénétrables contre des armesinvincibles. Nous échouons, parce que nous n'avonsaucune idée de ce que serait un univers unifié, quoiquela vérité nous saute aux yeux: "Un seul monde ou aucun."C'est pourquoi, nous devons au moins prêter l'oreilleau message de Comenius.

Ce message pourrait être résumé en trois propo-sitions très simples.

1) l'humanité se trouve dans un désordre indes-criptible

2) l'humanité a des ressources énormes3) l'humanité doit s'élever à un nouveau niveau

de pensée et de vie, pour exploiter cesressources.

Peu de personnes sensées douteraient de ces affir-mations et cependant, nous ne parvenons pas à les mettreen pratique. Est-il vraiment exact que l'humanité soitsi égoi'ste, avide, agressive, soupçonneuse, craintive,que la perspective de s'élever à une nouvelle dimensionsoit impensable? Hous pouvons méditer !'opinion d'uncontemporain de Comenius, Œhomas Hobbes, qui estime quela situation est si mauvaise que nous sommes obligésd'avoir un gouvernement pour nous protéger de la .violencedes autres. Chaque groupe d'hommes, se sentant menacé.,

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rend responsable un autre groupe et, par loyautéenvers notre propre groupe, nous approuvons lapolitique que nous réprouvons chez d'autres. Housnous sentons du moins impuissants, en tant qu'individus,à modifier les systèmes complexes agissant en notrenom. la liste des groupes qui s'opposent, enfermésdans cet antagonisme désespéré, est interminable.Si seulement il n'y avait pas de capitalistes (ou decommunistes), de noirs (ou de blancs), d'Israéliens(ou d'Arabes), d'employeurs intéressés (ou de syndicatsavides) et ainsi de suite. Dans tous ces cas, il nesemble pas y avoir d'issue pour sortir du cercle vicieuxdes loyautés néfastes.

Mais Comenius a affirmé qu'une telle issue exis-tait, et il a affirmé qu'on pouvait la trouver en propa-geant, sur une très grande échelle, une nouvelle façonde penser. Cela implique, il est vrai, certaines mani-pulations des esprits des hommes, et noue y répugnonsparce que la propagande dégage, pour les narines detout passionné de liberté, une odeur nauséabonde. Housnous rappelons combien de fois la propagande a étéutilisée pour le pire, comment elle peut justifier lesmauvaises actions les plus abominables, comment ellepeut être employée sans vergogne contre 'l'ennemi'.Elle bafoue la loyauté, exploite la peur, blanchit lafausseté et se nourrit de demi-vérité. Aussi nousdisons "Ne faites plus de propagande!" Hous estimonsque même les meilleures intentions ne peuvent pasracheter la propagande, et nous ne voudrions pas donnerla sécurité au monde en indoctrinant des conformistes.

Voilà de fortes objections, mais Comenius rétorqueque la propagation de la vérité ne peut pas constituer

S7une menace à la liberté. En ouvrant ans hommes "lavoie de la lumière', il pensait confirmer simplementce que tous les nommes savent au fond de leur coeur.Ainsi, dit-il, "notre espoir peut grandir à l'idéeque le monde ne s'agrippe pas si obstinément à sespropres désordres, mais qu'il accepte le meilleur,si l'occasion se présente". ' les valeurs les plusimportantes de la vie sont universellement acceptées,même si elles le sont inconsciemment; il ne peut doncpas y avoir de réelles objections à une campagne continueet totale pour les rendre explicites et conscientes,à la condition, évidemment, que les méthodes soientacceptables du point de vue moral. Pourrait-il y avoir,par exemple, un argument contre la proclamation del'idée d'un monde unique, car chacun sait qu'en finde compte c'est l'intérêt de tous?

Oomenius croit qu'une nouvelle ère pour lapropagation de la lumière a été inaugurée par l'inven-tion de l'imprimerie, et par l'art de la navigation,'de manière que tous les hommes puissent voir complè-tement et sans erreur tout ce qui est nécessaire àleur bonheur'. Il a été surtout impressionné parl'imprimerie, cette 'machine merveilleuse faite pourmultiplier à l'infini et à une vitesse déconcertantele nombre des livres'. ' C'est ainsi qu'il proposeque toutes les presses à imprimer soient mobiliséespour convaincre les hommes de ce qu'ils voulaient déjà- la communauté universelle de l'humanité.

S'il a été transporté d'une joie lyrique parl'invention de l'imprimerie, Oomenius aurait été bienplus encore saisi de stupéfaction, s'il avait puprévoir les moyens de communications de masse dont nous

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disposons aujourd'hui. Hous nous sommes habitués àla télévision, mais cela aurait dépassé ses rêvesles plus audacieux d'imaginer un enseignant du'collège de la lumière' parlant simultanément, eten personne, à des millions de gens dans leur proprefoyer. Yoilà qui dépasse de loin le champ de l'ima-gination du dix-septième siècle, et transforme enfait le monde en un seul village.

Peu de centres actuels de radiodiffusion préten-draient, cependant, être les collèges de lumière ap-portant, comme dit Gomenius, 'la lumière de l'auroredans l'obscurité du monde1, leur objectif fondamentalest de répondre à la demande du public. Ce procédésignifie parfois flatter les goûts de leur auditoire,parfois encourager leurs passions. Bans la mesure oïlils essaient d'offrir un miroir au monde, ils choisis-sent le sensationnel,,1e violent et le tragique. Ilfaut le reconnaître, les mass média nous procurent demerveilleuses occasions de rencontrer et de comprendred'autres personnes, mais, d'autre part, ils provoquentdes réactions très différentes. l'augmentation de nosconnaissances ne nous rend pas nécessairement plustolérants et paisibles. Oomenius croyait que les per-sonnes chargées des communications devraient choisiret présenter des nouvelles et des idées avec un seulbut présent à l'esprit - la réforme des affaireshumaines. Selon lui, la clé à ce problème est de dif-fuser seulement ce qui va dans le sens de l'unité etde la paix. C'est ainsi qu'il conclut sa descriptionde son collège universel en disant: - ils devraientprendre comme mot d'ordre, "Retournons" - 'retournonsde la dispersion à l'union, de la confusion à 1?ordre,des confins au centre du monde'. ^

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Cependant, il y a là tin dilemme qui gênaitréellement Comenius. Si propager la paix et l'unitésignifiait jeter un voile sur la folie et le vice,cela impliquait aussi la censure, et il en voyaitles dangers et les limitations. Il admet, par exemple,que même 'si tous les exemples et occasions de scan-dale pouvaient être réglés loin des yeux et desoreilles de l'homme', cette règle serait loin d'êtrefacile à mettre en pratique. ' II craignait, en effet,que les hommes exposés au mal, ne choisissent ce malau lieu de choisir le tien. Si on leur en donnaitl'occasion, ils pourraient écouter 'les sirènes quibercent les hommes insouciants pour les endormir parla fausse douceur de leurs chants'. Comenius concluten disant "pervers est le coeur de celui qui trouveson plaisir au nom des dieux et des déesses.....làoù tout est romance". *'• Pervers en effet!

Comenius avait, en tout cas, trop d'expériencedu fanatisme et de l'intolérance pour ne pas êtrealarmé par la perspective d'un groupe d'hommes contrO-lant les moyens de communication, car il fut le cham-pion des droits des minorités, passionnément attachéà la liberté de conscience. C'est pourquoi la sortede censure à laquelle il pensait, n'était pas cellequi essaierait d'exclure les critiques désagréablesou d'e'touffer le débat, mais pourrait être utiliséecomme moyen de maintenir une plate-forme commune àpartir de laquelle toutes les opinions s'exprimeraient,le mal doit être exclu, parce qu'il mine la base dubonheur. L'admettre au nom de la liberté équivaudraità détruire la vraie liberté. C'est pourquoi les hommesdoivent être immunisés contre le mal, et non exposésà ce mal; même sachant qu'il est inutile ou tyran-nique

90de brider la liberté, il fut plue conscient encorequ'il est fou de donner litre cours à la licence.Après une analyse profonde des sentiments humains,il conclut en disant que si l'on pouvait trouver leshommes capables de se charger des mass média, ilfaudrait leur faire confiance pour distinguer entrele bien et le mal. Mais è. cette affirmation, il y a uncorollaire: il faut trouver un moyen d'éducation quipousserait les hommes de tous pays à. être citoyens dumonde. C'est pourquoi, les écoles doivent s'intéressertout d'abord à l'éducation universelle, par laquelleon pourrait former les citoyens internationaux.

le problème qui préoccupait Oomenius était lesuivant: Comment peut-on choisir les hommes qui con-viennent, ou, si on les choisit, comment peut-on lesempêcher de se corrompre? Il n'existe pas de remèdepour conserver purs les sentiments des formateurs futursde l'esprit des hommes. C'est un problème séculaire -"Qui gardera les gardiens?" Selon son plan, ces gardiensdevraient 'poursuivre leur observation comme du haut,d'une tour, pour éviter que quelque chose d'indésirablen'y pénètre! ' Mais ce plan ne prévoyait rien pours'assurer qu'ils ne deviendraient pas des pédants oudes inquisiteurs, des gâteux ou des tyrans. Comme ladistinction entre le bien et le mal est parfois loind'être précise, il est difficile de voir comment 'lecollège de la lumière", en disposant du pouvoir dedécision, ne deviendrait une forteresse de ses proprespréjugés et éventuellement un bastion de ses intérêtsacquis.

Comenius a essayé de prévoir des garanties. lesmembres du collège universel doivent être 'choisis

91dans le monde entier'. Ils doivent constituer 'unealliance d'un grand nombre d'hommes1. Ils doiventêtre préservés du 'travail qui les distrait et lesrend incapables d'accorder leurs pensées aux problèmesuniversels', mais d'autre part, ils ne doivent pas prendre'comme but de leur vie le lucre des sacs d'êcus". ''

A la question de savoir oïl l'on peut trouver detels nommes, Comenius donne une réponse provisoire.Il était loin d'être convaincu gué l'on peut trouverles meilleurs dirigeants pariai la classe dirigeante -les gens de cour, les politiciens, les soldats, lesthéologiens et les savants. Il était plutôt attiré versles membres des groupes minoritaires, qui semblaientavoir de meilleures motivations. De tels groupes exis-taient en grand nombre en Europe du.dix-septième siècleet ils essayaient de s'abstraire du mal qui sévissaitautour d'eux. Certains étaient religieux. l'Unité deRrères constitue un exemple typique. Certains atten-daient le retour du Christ sur la terre, que Comeniusconsidéra comme étant le symbole de la nouvelle sociétéqu'il espérait créer. Certains, comme les Rosés-croix,combinèrent le mystique et l'occulte. D'autres commelés alchimistes, essayaient de percer les secrets fonda-mentaux de la nature. Il fut attiré par dessus toutpar ceux qui étaient inspirés par l'enseignement de IrancisBacon, mais qui cherchaient aussi à utiliser leur sciencepour créer une quelconque société utopique sur laterre. Il savait très bien que parmi ces groupes dif-férents, il y avait des charlatans et des fanatiques,mais il estimait cependant qu'il existait suffisammentde vrais idéalistes scientifiques pour constituer unvéritable collège de lumière. C'est pour créer une telleinstitution qu'il vint en Angleterre et qu'il prit

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part aux délibérations du 'collège invisible'.

le groupe qui l'impressionna le plus fut laSociété royale anglaise qui mit en 1660, sur une baseplus permanente, la "société invisible" moins précise.Comenius dédicaça avec enthousiasme é ses membres sa"Via Iiucis" (Chemin âe la lumière) et dit d'eux: "Atravers le monde, on proclamera au son des trompettesque vous êtes engagea dans des oeuvres qui ont pourbut d'obtenir que l'empire de l'esprit humain sur lamatière ne reste pas toujours une chose faible etincertaine". ' II ne semblait pas déraisonnable queceux qui pouvaient faire triompher 'l'empire del'esprit humain sur la matière1 puissent aussi êtreresponsables de la propagation des idées, et la oon-•ception d'un 'ordre d'hommes de sciences' consacré àl'amélioration des affaires humaines est une conceptiontéméraire, mais non sans attraits. On pourrait dired'ailleurs que les hommes de science sont particuliè-rement aptes à constituer un 'collège de la lumière',car leur recherche désintéressée de la vérité est es-sentiellement internationale, le personnel scientifiqueet technique des organisations internationales contem-poraines comprend fréquemment des hommes consacrés àun idéal d'universalisme et de développement total desressources humaines. Un organisme international com-prenant des représentants de la FAO et de l'OMS pour-rait, bien fusionner avec des représentants de l'DÏTESCOpour mobiliser l'opinion publique à travers le monde,en vue de l'édification d'une communauté universelle.

Cependant, Oomenius était préoccupé par l'idéeque les hommes de science .pourraient accorder tropd'importance aux améliorations matérielles et trop peu

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aux améliorations spirituelles. Il en-brevit les dangersd'une utopie technologique offrant aux nommes des ni-veaux de Tie élevés en échange de leur âme» II avertitles membres de la Société royale, que s'ils négli-geaient l'esprit de l'homme, ils créeraient une Babylone'la tête en bas, en construisant non pas vers le eiel,mais vers la terre1. °' Cependant, Comenius n'éprouvapas de sympathie pour ceux qui concevaient la nouvelleJérusalem comme une île enchantée destinée aux évadés,l'utopie qu'il trouva la plus satisfaisante ressemblaità celle décrite par son contemporain, John YalentineAndreae, "comme un simple atelier", mais dont la grandefierté fut la paix continue. 10

Comenius fut convaincu qu'une telle communautéétait réalisable, mais accepta la nécessité de prévoirdes freins à la puissance de ses dirigeants. Parconséquent, son collège de lumière ne devrait avoir del'autorité qu'au sein de sa propre sphère, tandis quepour d'autres sphères, il devrait y avoir d'autresinstitutions, de manière à conserver toujours un équi-libre des pouvoirs. A son avis, l'état national lui-même ne devrait pas être investi des derniers pouvoirs,encore moins quelque état supra-national. Aucune sou-veraineté ne devrait être absolue - -belle fut la théoriepolitique de Comenius - et c'est pourquoi il proposades Cours internationales d'Appel, chacune toute puis-sante au sein de sa propre sphère, mais aucune n'exer-çant un contrôle sur l'autre; le tribunal de paix pourrégler les différends sociaux et politiques,' le tribunalspirituel pour promouvoir la religion et la morale, letribunal de l'éducation pour propager les idées etorganiser les écoles. Ces tribunaux devaient êtreinternationaux, mais, sous leur juridiction, les insti-

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tutions locales, de l'état à la famille, devraientreproduire les mêmes subdivisions du pouvoir.

Comenius a une autre opinion du contrat socialque celle prévalant au dix-septième siècle, selonlaquelle l'autorité revenait totalement à l'état. Saproposition d'une 'gradation constante' de l'autorité',et de la division des pouvoirs à chaque niveau, avaitpour but de réduire ou d'éviter des groupes de puis-sance et des alliances militaires, et aussi de résoudreles problèmes de la masse sans racine, qui ne participepas au gouvernement. La communauté mondiale doit veillerà l'autonomie locale, sans se fragmenter.

Ses idées sur le gouvernement furent considé-rablement influencées par son expérience de la guerre,qui se poursuivit pendant la plus grande partie de savie. Quand il y avait des négociations de paix, ilessaya de toutes les manières possibles de faire pré-valoir son influence, parce qu'il considérait toujoursla table de conférence comme un point de départ éven-tuel pour le monde qu'il souhaitait. Pour comprendresa pensée, il est nécessaire de considérer, mêmebrièvement, Des guerres du dix-septième siècle. On a-estimé que durant ce siècle, il n'y eut que sept annéescomplètes sans guerre entre les états européens.C'est pourquoi, on acceptait la guerre comme une carac-téristique de la vie.

En ce qui concerne la guerre de Erente .fins (1618 -1648), une des guerres des plus terribles et des plusvaines, certains traits se détachent:

1. Elle engendre énormément de misères et de

destructions en Europe centrale. Même enBohème, qui ne semblait pas être le pirethéâtre de combat, on a estimé que la popu-lation est tombée de quatre millions et demi

n p\à un epu plus d'un million. '

2. Ce fut une guerre religieuse entre catholiqueset protestants. Cependant, la religion elle-même devait en souffrir. £a Rranee catholiqueintervint du oflté protestant pour acquérir duterritoire allemand. le protestantisme étaitpratiquement éteint en Bohême. En Allemagne, lareligion devint formelle et aride. Dans tous lespaye, beaucoup de gens en vinrent à la rejetercomme une raison de combats, et se tournèrentailleurs.

J>. Ce fut en un sens une guerre en vue de réaliserl'unité en Europe. En fait, il en résulta quele 'Saint Empire romain' (des pays germanophones)fut réduit à un niveau de fiction, tandis que .denombreuses petites principautés devinrent indé-pendantes et tyranniques. l'Allemagne devint un'squelette fragmenté.

4. Dans un autre sens, ce fut une guerre relativeaux différentes formes de gouvernement - d'uncôté, l'idéal des Habsbourg d'une autocratiecentralisée, et de l'autre, l'idéal hollandaisd'une fédération républicaine. Comme résultat,les deux formes échouèrent en Europe centraleet les conflits pour la suprématie s'étendirenten Angleterre et en ïranee.

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5. la plupart des participants à la guerrecombattirent par peur, et dans l'espoir d'uneultime paix. En fait, il y eut à 1'époqueune rupture presque complète de l'ordre social.

le caractère de la guerre de Œrente Ans a étérésumé comme suit: "la guerre n'a résolu aucun problème.Ses effets, à la fois immédiats et indirects, furentsoit négatifs, soit désastreux. Moralement subversive,économiquement destructive, socialement dégradante,confuse dans ses causes, tortueuse dans son cours, futiledans ses résultats, elle est l'exemple par excellence,dans l'nistoire de 1'Europe, de conflits dépourvus desens. «>

H ne ±aut pas s'étonner si Oomenius a été déses-péré en contemplant un gaspillage aussi insensé del'effort -humain. H se plaignit, amèrement que son proprepeuple ait été trahi par les Suédois. A la maison deHabsbourg, qui avait mené la politique catholique, iln'a jamais,cessé d'adresser blâme sur blâme. Il vitcomment les masses muettes furent sacrifiées au profitde ceux qui faisaient de la guerre leur affaire, les'entrepreneurs' qui organisaient des campagnes pour queles autres se battent, les 'marchands de canon' quioffraient leurs marchandises au plus offrant. En mêmetemps, il.se trouva fréquemment enfermé dans un dilemmepacifiste, le devoir de résister et de vaincre ce qu'ilconsidérait comme le mal, et cela le mena de temps entemps sur la scène politique.

l'autre guerre, dans laquelle Comenius fut intime-ment .impliqué, celle entre les Anglais et les Hollandais(1664 - 1667), ne fut pas si dévastatrice, mais également

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écrasante dans ses implications. H n'y avait pasdans cette guerre de différences religieuses ou poli-tiques ou aucune revendication territoriale, et lesdeux pays étaient les pionniers de la pensée et duprogrès européens. Ce fut simplement une question derivalité commerciale, maritime et coloniale. Ce futune lutte fratricide. lorsque les deux parties déci-dèrent de terminer la guerre, et envoyèrent leursplénipotentiaires à Brêda pour négocier la paix,Comenius estima qu'il était temps pour lui d'inter-venir et c'est ainsi qu'il leur adressa un pamphletintitulé: "l'Ange de la Paix". Dans ce pamphlet, illes supplia de ne pas faire de cette conclusion depaix un marchandage, mais d'agir de telle manière quetout conflit soit éliminé à l'avenir. H soulignaardemment ce que l'on gagne à être magnanime. En répa-rant les maux occasionnés, plutôt qu'en cherchant descompensations pour les maux endurés, il crut qu'ilspouvaient donner au monde un modèle de règlement detout différend. Il les pressa, en particulier, deconsidérer, en faisant leurs arrangements personnels,les intérêts de l'humanité. On n'obtiendra pas de paixvéritable en ee taillant des sphères d'influence quiignorent les droits des indigènes des pays d'outre-mer.Il parle en termes mordants de la prospérité nationalebâtie sur l'inflation, et demande "quel est le "bénéficede l'Europe se chargeant d'argent africain et américain,et de perles et de pierres d'Asie, si l'immense augmen-tation des stocks de métal s'est accompagnée d'unehausse vertigineuse des prix, de sorte qu'aujourd'hui100.000 florins valent à peine plus que quelques ducatsde l'époque de nos grands-parents." '

Comenius préconisait des autorités universelles

et indépendantes pour la paix, la religion et l'émis-sion d'idées, maie il pensait qu'il devait y avoir unelangue commune de par le monde, si tous les nommesdevaient devenir des citoyens internationaux, la multi-plicité des langues constituait un des plue grandsobstacles à la communauté universelle, parce qu'elleforçait les voyageurs à emporter leur insularité, partoutoii ils allaient, et limitait sérieusement les possi-bilités, des mass média. la barrière des langues rendles gens sourds et les coupe des communications inter-nationales .

la solution à ce problème, envisagée par Oomenius,est que chaque personne soit bilingue. Chaque hommedevrait avoir\ sa propre langue véhicu-laire dans laquelle il pourrait exprimer ses sentimentsles plus profonds - une langue de chez lui - et en plusavoir une 'lingua franca' par laquelle il pourraits'entretenir avec toute personne au-delà de son propregroupe linguistique et prêter l'oreille à la propa-gation des idées et nouvelles mondiales - une langue demarché, de voyage et de mase média.

Comme citoyen d'un pays relativement petit, parlantune langue peu parlée par les étrangers, il s'intéressasurtout à ce que l'internationalisme n'évince pas leslangues vêhiculaires. En fait, la langue tchèque devintla cible d'un gouvernement oppresseur qui essayait del'écraser, alors que Comenius la considérait comme unmoyen d'exprimer l'âme de son peuple. Quoiqu'exilé, ilcontinua à faire ce qu'il put pour la garder vivante.Pendant de nombreuses années, il rassembla de sagesproverbes et dictons tchèques dans les "Srêsors de lalangue tchèque". Après sa mort, certains de ses livres

99.furent secrètement distribués aux familles de paysansgui gardaient devant chez eux comme signe un genévrier,et cela les aida à maintenir, dans les/périodes sombresde l'histoire tchèque, leur langue vivante. PourComenius, la suppression de la langue vêhiculaireéquivaudrait à anéantir l'âme d'un peuple. Si elle estgrossière et fruste, raison de plus, pour les gens quila parlent, de la raffiner et de 1'étendre pour qu'ellecouvre la gamme complète de la pensée. la languematernelle des gens est, selon Oomenius, quelque chosede presque sacré: le véhicule de leurs sentiments, lemessager de leur esprit, le sésame par lequel leursenfants comprennent les premiers concepts élémentaires.

Exilé pendant la plus grande partie de sa—rie,Oomenius appréciait considérablement le fait que lelatin lui donnait un moyen de communication avec lesgens de tous les pays, la plupart de ses livres furentécrits en latin, pour la simple raison que c'était laseule façon de parvenir Jusqu'aux gens. Il écriviténormément de lettres, mais là encore le latin étaitle moyen normal d'expression parmi les savants, lelatin enchâssait la pensée des Anciens, il donnait àl'Europe une base de culture; c'était la langue de lareligion fit de la science.

D'autre part, Comenius s'impatientait envers lesgens qui désiraient préserver le latin tel qu'il futparlé par Cicêron. Il appelait le latin classique 'unenymphe sur laquelle on gaspille généralement uneadmiration sans borne'. '' le fait que des générationsd'écoliers aient été entraînés au latin classique luisemble dû à la- stupidité des enseignants plutôt qu'àcelle des enfants. leurs livres de grammaire (luther

100

les appelait 'les balivernes du diable') étaientincroyablement compliqués par /les exceptions et lesirrégularités. Plus les enseignants se démenaient,moins les êlèTes apprenaient, mais Comenius étaitconvaincu que tout le monde pouvait acquérir uneforme acceptable de latin, pour servir de linguafranca, non pas simplement pour les savants, maispour tout le monde. Il passa, à cette fin, une tonnepartie de sa vie à essayer d'ouvrir la voie du latincourant, se servant d'images, ou d'autres dispositifspour le rendre agréable et facile.

Cependant, il abandonna par la suite cettesolution au profit d'une langue universelle. Bien detout ce qu'il put faire pour l'adapter pour les genssimples, ne put surmonter le fait gué le latin demeuraitune langue morte qui ne pouvait pas être ressuscites.D'ailleurs, les savants eux-mêmes commencèrent à serendre compte qu'ils pouvaient beaucoup mieux s'expliquerdans leur propre langue. Comenius n'avait pas l'avantaged'avoir comme langue vékiculaire une des principaleslangues européennes, et il ne prévoyait pas que, mêmepour les gens instruits, le latin perdait sa suprématiequant à son utilisation internationale. Cependant, ilvoyait l'argument puissant qui s'y opposait: qu'il yavait des millions de gens dans les pays nouvellementdécouverts qui n'avaient aucun lien avec la Home clas-sique. Pourtant, ils étaient aussi des citoyens dumonde.

Aussi la solution qu'il préconisait était celled'une langue artificielle, aussi simple que possible,et exempte de toutes exceptions et anomalies. H nefut pas le seul dans ce cas et il continua à s'intéresser

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autant qu'il le put aux expériences de constructionde langue, surtout en Angleterre. ' Cependant, lapensée de Comenius à ce sujet prit, comme il dit, un"plus grand envol': la nouvelle langue devrait êtreconstruite à partir d'un système de symboles dontchacun représenterait une propriété ou une qualité,de sorte qu'une personne écoutant ou lisant un motpour la première fois serait tout de suite à même âereconnaître ce qu'il représente. Si cette personneconnaissait des symboles, elle connaîtrait la signi-fication du mot, et il ne pourrait y avoir aucune ambi-guïté. En conclusion, des sens particuliers devraientêtre conférés à des phénomènes particuliers; il exis-terait un parallèle évident entre la forme du mot etsa signification; chaque chose n'aurait qu'un nom quine pourrait s'appliquer à rien d'autre. Donc la formedu mot serait sa définition. Bien qu'il y ait unevariété infinie de sens, on pourrait, selon lui, laréduire à un nombre pratique d'éléments de base - ilen suggère environ 300. Pour augmenter les possibilités,il suggère, une gamme de préfixes et de suffixes, maisil ne pense pas que l'on obtiendrait moins de clarté -ce procédé donnerait plutôt une plus grande souplesse.

Comenius n'a pas élaboré son système en détail.Il a essayé d'explorer ce domaine , et il n'a certai-nement pas entrevu les immenses difficultés qui sur-gissent dans l'élaboration d'une algèbre linguistique,comme celle qu'il propose. Cela peut être possibledans une catégorie limitée de propriétés, comme ensciences, mais dans la langue commune, nous voyonsconstamment de nouvelles propriétés à assigner auxchoses qui nous entourent. Comenius voulait une linguafranca de telle manière qu'une traduction littérale

102puisse être faite en toute langue véhieulaire, sansconfusion de signification, et les linguistes appelle-

17 )raient cela une tâche irréalisable. ' Cependant,l'idée d'une espèce de langue 'pour ordinateurs'exerce "beaucoup d'attraits sur l'homme moderne quiest aux prises avec la confusion de Babel. Si l'onpouvait inventer une telle langue, elle augmenteraitde beaucoup la possibilité'd'une citoyenneté inter-nationale. L'apparition de langages informatiques etde machines qui parlent, capables de diviser la langaeen unités et ensuite de les reconnaître, devrait nousfaire hésiter à rejeter cette idée. Avec les ordinateurs,il ne semble pas y avoir d'impossibilité inhérente, etc.e serait certainement un énorme avantage si les gensde toutes races pouvaient communiquer l'un avec l'autresans confusion-.

En conclusion de ce rapport, examinons la contri-bution positive de Comenius à la conception de lacitoyenneté internationale. Son message fondamentalfut que nous ne devrions jamais désespérer. Si sombresque les choses puissent paraître, nous devrionsconserver l'espoir. Nous ne pouvons pas rompre avecle passé, mais nous ne devrions pas laisser le passédominer l'avenir. En tant qu'individus, nous sommesinévitablement limités à notre propre point de vue•étroit, mais nous devons nous efforcer de regarderplus loin. A mesure que nous nous ouvrons au monde,nous commençons à faire le monde. Nous partons, commeil est nécessaire de notre environnement et de notreexpérience, mais nous passons du particulier à l'uni-versel. En toute chose, nous tendons, ou nous devrionstendre, vers une harmonie de plus en plus grande.

Comenius attire notre attention sur les immenses

aojpossibilités des moyens modernes de communication.Il pense que l'imprimerie est une merveille. Nousdisposons, dit-il, de ressources gigantesques. Nedevrions-nous donc pas prendre courage et utiliserdélibérément et logiquement nos mass média pourpropager la paix et la coopération? Se devrions-nouspas choisir les nommes les plus éminents comme infor-mateurs, et leur donner vis-à-vis des pressions poli-tiques ou autres la même indépendance qu'aux juges?

Cela soulève, cependant, comme nous l'avons vu,le problème suivant: comment choisir les meilleurs?Comenius ne donne ici que peu de renseignements, sice n'est qu'ils devraient être mus par un véritableesprit international, 'pour veiller à ce que l'onprofite le plus largement possible, à travers le ,monde, des dons de Dieu'. ' Les pouvoirs, en bien ouen mal, de ceux qui sont choisis pour influencerl'opinion publique sont si grands, que toutes lesressources de la science moderne devraient être misesen oeuvre pour s'assurer que l'on choisisse les gensappropriés.

Peu de gens refuseraient les arguments en faveurd'une paix positive, La position de Comenius sur l'éga-lité sociale est donc fondamentalement uste. Iln'est pas bon que certaine doivent vivre dans unepauvreté dégradante, alors que d'autres disposentd'un luxe surabondant. Le décalage de plus en plusgrand entre les riches et les pauvres, les 'possédants'et les 'déshérités', les 'développés' et les 'sous-développés' est déplorable.

Mais tout le monde s'accordera-t-il avec Comenius

104pour dire que la question n'est pas simplementd'ouvrir un plus grand accès aux emplois intéressantset aux éléments modernes de confort-gui peuvent detoute façon n'être pas en nombre suffisant? Il neB"agit pas non plus seulement de re-répartir lesrichesses ou d'élever les niveaux de vie. Il ne faitpas de doute que ces objectifs sont excellents, maisla conviction de Comenius fut que la qualité de lavie pour tous, riches et pauvres, est la considérationla plus importante. Pouvons-nous réellement ne pas êtredu même avis, lorsque nous avons tellement de preuvesque la satisfaction des besoins physiques ne signifiepas nécessairement l'élévation du niveau spirituel?Nous, occidentaux, avons été capables, grâce à latechnologie, de rendre les gens plus riches, maisnous ne sommes paa parvenus à les rendre meilleurs.

Notre atten-tion s'oriente ainsi sur le conceptcentral de la philosophie universelle de Comenius,à savoir que la clé de tout le problème, c'est l'édu-cation. Ici, nous devons à nouveau insister sur lefait que c'est la qualité. et non la quantité quicompte, bien que l'éducation doive être partoutaccessible à tous les hommes. Mais une partie impor-tante de l'éducation actuelle est totalement impuis-sante à attaquer les vrais problèmes du progrèshumain, îîous avons seulement la place ici pour com-menter le fait que l'éducation devrait se préoccuperde donner aux hommes et aux femmes un esprit inter-national. Nous avons besoin d'enseignants qui seconsacrent à l'idéal de la citoyenneté internationale,d'enseignants qui inculquent à leurs élèves le concept'd'un seul monde". C'est la seule solution pour don-ner la sécurité sur cette planète aux générations

105futures de la race humaine; la guerre nucléaire nepourrait laisser derrière elle que quelques survi-vants, dans les régions situées prés des pôles, làoù les retombées nucléaires n'auraient pas pu sepropager. Pour développer cette idée de citoyennetéinternationale, Coaenius voulait un collège de lumièredans claque pays: si ceux qui préparent aujourd'huiles enseignants à leur tâche et ceux qui dirigent lesorganisations d'enseignants ont cette vision inter-nationale, et utilisent l'aide de l'OTESCO, l'objectifde Oomenius peut être atteint.

Bien qu'il ait pu prendre conscience maintesfois que l'idéal universel requérait la formation,le choix et le soutien d'une élite de dirigeants,sansaucune discrimination de sexe, de race, de statut oude religion, Comenius se rendait parfaitement compteque l'éducation s'adressait tout d'aborâ aux élèves.Si les hommes et les femmes ne sont pas éduqués d'unemanière appropriée, les efforts des dirigeants serontvains. lous les hommes sont partout égaux dans leurbesoin d'éducation, car le but est de produire, nonune classe de dirigeants, mais une communauté totale.Non seulement tout le monde devrait aller à l'école,mais chose plus importante encore, il faudrait leurpermettre à tous de poursuivre leur éducation tout aulong de la vie, et ceci est tout aussi vrai pour laplus médiocre intelligence que pour la plus élevée.Paire moins serait, dans l'esprit de Comenius, unenégation absolue de l'idée universelle. ÏDUB oupersonne - c'est ce qu'il prescrivait pour la nouvellesociété.

l'accent mis sur l'internationalisme met-il au

106

second plan les engagements locaux et particuliers?ïae du tout! Comenius, type même du citoyen inter-national, ne s'est jamais départi de sa considérationpour les plus petits groupes. Il est allé au-delà.Il s'est dévoué à sa propre petite église - l'Unitéde Frères - mais il n'a jamais désespéré lorsqu'ellesemblait se démembrer, parce qu'il avait conscienced'appartenir à une église universelle plus large ausein de laquelle toutes les sectes et croyances serejoignaient. Ce fut un patriote tchèque - en fait undes plus grands. Cela ne l'a pas empêché de se sentirEuropéen. Il fut un noble produit de la civilisationoccidentale et cela ne l'empêcha, en aucune manière,de s'identifier à toute la famille humaine, sans consi-dération de couleur, race ou croyance. Chez la plupartd'entre nous, ces engagements plus larges sont vagueset tiêdes. Chez Comenius, ils furent pressants etprofondément ressentis. Chaque engagement étroitrenforçait et approfondissait un engagement plus large.Chaque engagement plus large s'étendait et donnaitplus de cohérence au plus étroit.

Si l'histoire de sa vie, ressuseitêe à-l'occasiondu tricentenaire de sa mort, force notre admirationet approfondit notre compréhension de l'humanité commed'une seule famille, ne devrions-nous pas, tout commeComenius, nous efforcer, dans la foi et l'optimisme,de travailler inlassablement pour les choses quidevraient être?

107

N 0 ï E S

1O8

I.

1) l'Unité de Eeères est un groupe religieux,dont l'origine remonte aux Hussites, o'eat-à-dire aux nombreux groupes des disciplines deJohn Eus, qui ont fait leur apparition nonseulement en Bohême, mais aussi en Pologne,Allemagne, Hongrie, Roumanie et autres paysaprès le martyre de Hus. (Le Hussite tchèque,Pierre de Kravare, physicien, fut brûlé vif àSaint André, en Ecosse en 1429). Ce fut un desgroupes hussites les plua radicaux, congrégationpeu nombreuse qui crut à la vie commune despremiers chrétiens et qui chercha à la mettre enpratique. ("la multitude de ceux qui avaientcru n'était qu'un coeur et qu'une âme. Hul nedisait que sea biens lui appartinssent en propre,mais tout était commun entre eux." Actes desApôtres, chapitre 4» verset 32. traduction auto-risée.) Ce furent aussi, selon l'enseignement duOhrist, de fervents pacifistes et on les appelait"les gens sans êpêe". Ce groupe se fixa en Bohêmeorientale en 1467, accepta, en plus des idéesde John Hus, celles d'un de ses disciples, PeterChelcicky, qui exigeait que les chrétiens vécus-sent selon les préceptes du Sermon sur la Montagne.

2) Son appartenance à l'Unité de Erêres l'a faitexclure pour raisons religieuses.

3) BACOÏÏ Francis (1561-1626). Célèbre philosopheanglais, un des fondateurs de la méthode expé-rimentale. Ses oeuvres ont fait de lui un desplus grands représentants de l'application de

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ce-frte méthode d'aborder de nombreus: problêmesde vie.

4) EICHEHEïï, Armand-Jean du Plessis (1585-1642).le Cardinal de Richelieu fut Ministre de louis XIIIet un des plus grands hommes d'Etat que la Sxaneeait Jamais connus. L'historien Shierry écrività son sujet: "Œout ce qui a pu être réalisédans le domaine du progrès social à cette époquea, en fait, été accompli par Richelieu, dontl'intelligence comprenait tout, dont le géniepratique ne laissait rien passer. Il passait del'idée à l'action avec une remarquable aisance,et possédait à un niveau exceptionnel, l'esprit

- d'universalité et de liberté intellectuelle."Il encouragea le développement des connaissanceset fonda l'Académie française.

110

II.1) Des renseignements très succincts à ce sujet,

sont mentionnés au dernier chapitre: "Comenius,citoyen international".

2) HCTS, John(1367-14l9. Professeur à l'UniversitéCharles de Prague, fut disciple du réformateurde l'Eglise anglicane, John Wycliffe. Son oeuvrela plus importante fut "Je Ecclesia". où ilaffirme que le chef de l'Eglise, c'est Jésus etnon un pape, l'intégrité de son caractère et sesqualités incomparables de coeur et d'esprit ontfait de lui un orateur très influent à la ChapelleBethl-éem à Prague, première église de la Réfor-mation en Europe, lorsqu'il fut banni de Prague,il prêcha dans la campagne tchèque; on lui doitaussi l'introduction dans les services religieuxd'hymnes en langue tchèque, dont il fit égalementune langue littéraire. Ses enseignements religieux,furent réellement fondés sur ceux de Jésus et ilpréconisait la démocratie chrétienne; il critiquaitdonc l'ordre féodal. De nombreux adversaires sedressèrent contre lui à la Cour et dans l'Eglise,et finalement après avoir été ijugê et condamnépar le Conseil de Constance, il fut brûlé vif,quoique l'Empereur Sigismond lui ait promis unsauf-conduit de et vers Constance.

3) Voir note I.1

4) Pampaedia IX

5) En Grande-Bretagne, l'Open University ou «Univer-sity of -thé Air" (Cours par radio et télévision)

111offre depuis 1970 à tous ceux qui désirent etsont préparés à étudier, la possibilité de fairedes études en -vue d'obtenir un diplôme. EnTchécoslovaquie, il y a également des cours radio-phoniques et télévisés, et des universités popu-laires.

6) En 1955, un ouvrage intitulé "Ehe Education ofGood Men" par le Directeur du Département del'Education d'Oxford, et précédemment éminentDirecteur d'une importante Publie School non-conformiate, a été publié par Yietor Gollanea.Mais depuis cette date, quelques ouvrages surl'éducation publiés en Angleterre ont expriméouvertement, dans le titre, quelques préoccupationsde pédagogues en ce qui concerne le comportementde leurs élèves. Voir aussi note 14.

7) MONÏAIGNE, Michel de (1533-1592). Philosophefrançais de 'la sagesse de vie'. Dans ses penséessur l'éducation, rassemblées dans ses "Essais",il préconise la santé du corps et de l'esprit,il exige des connaissances qui ne soient pas for-melles, mais fondées sur l'étude des choses réel-les. D'après lui, l'éducation devrait contribuerà une amélioration de la moralité et de la vie;les enfants devraient être mis en contact avecla réalité qui les entoure, c'est-à-dire avec desphénomènes et choses concrètes.

8) RAŒEE, Wolfgang, Katichius (1571-1635). Eéfor-mateur allemand d'écoles et de l'éducation, Dansson "Frankfurter Mémorial" et dans son "Erklârung",il revendique l'éducation de tous dans trn système

112

dirigé par l'état, préconise l'éducation natu-relle, graduelle depuis l'éducation nationaleet souligne le rôle de l'enseignant à l'école.Comenius désirait connaître ses oeuvres, maisRatke ne les lui a pas envoyées.

9) la grande Didactique TTTT

10) Pampaedia I

11) MOBE, Shomas (1478-1535). Humaniste anglais,auteur de "Utopia" qui représente la visiond'une société idéale. Il préconise l'éducationdémocratique et exige que les enfants, encoreà l'état de bébés, reçoivent la liberté de mou-vements et de jeux, les enfants devraient êtrefortement aimés par leurs parents et les vieillespersonnes. More suggéra aussi pour l'éducation,des illustrations, des gravures sur les murs, etc.

12) CMEÀNEIiLA., ïhomasso (1568-1639). Œhéologienitalien, philosophe, combine l'enseignement théo-logique avec la philosophie de la nature. Il estl'auteur de l'utopie sociale "Civitas sola" oïlil demande que les enfants reçoivent une éducationsociale générale à partir de leur deuxième aimée.Il parle d'éducation physique, de formation lin-guistique, d'exercices d'alphabétisation com-mençant par l'alphabet. Il pourrait avoir influencéComenius, surtout comme philosophe de la natureet de l'univers.

13) MDEEAE, Johann Talentin (1587-1654). Poèteallemand, théologien, auteur de nombreuses oeuvres

113

«topiques; il souligne la chrétienté pratique,et définit une meilleure société chrétienne(par exemple "Chrietianae aocietatis imago",1619; "Heipublieae Chrietianopolis deseriptio",1619; "Christiani amoris dextra porreeta", 1620).Comenius a été influencé par certaines de sesidées et s. échangé de la correspondance avec lui,discutant aussi le problème de la sagesse uni-verselle. Il le considéra comme l'un de sesenseignants littéraires, tien qu'il suivît unevoie indépendante.

14) Pampaedia IX

15) "l'Ecole de l'Enfance".

16) EASEHMtJIiEBR, Sophonias, fut professeur allemandà Heilsbronn, et plus tard à Huremberg. Ilécrivit des poèmes, et en 1615, un petit ouvragepédagogique "Didactica". Dans cet ouvrage, sonprincipal intérêt consiste à aider les enseignantsà enseigner le latin. En 1624, il publie "Scholarumparticularium brevis designatio et requisitorumnotatio cum Didaetiea et libellis scholastieis"où il mentionne une école nationale préparatoireà l'école latine, ïïn groupe d'enfants se composede "pusili", e'est-â-dire des jeunes qui ne peuventni lire'ni écrire, mais à qui l'on peut enseignerà prononcer correctement, à prier, à réciter desproverbes et à compter de 1 à 100. On enseigneau second groupe d'enfants plus âgés à lire et àécrire; les enfants ont reçu un "lesebûchlein11(petit livre de lecture) et un "Sehreibbuchlein"(petit livre d'orthographe), comprenant un modèle

114

d'écriture et un catéchisme allemand. letroisième groupe comprend des enfants qui saventécrire et lire, apprennent à chanter et à quil'on enseigne la correspondance allemande. Oomeniusutilisa certaines suggestions de Hasenmullerpour l'éducation des Jeunes enfants ('pusili')»mais il élabora une conception fondamentale dif-férente .

17) SAAVEDRA.Ïajjardo Diego (1584-1648), écrivain ethomme d'Etat espagnol; écrivit une analyse poli-tico-pédagogique "Empresas politieas o idea deun principe Cristiano." (Idée d'un dirigeantchrétien). Comenius cite l'édition latine "Ideaprincipis christiani centum symbolis expressa".Il mentionne aussi certains principes concernantl'éducation de Jeunes enfants, par exemple onpourrait les initier à 1'alphabet au moyen depetites briques recouvertes de chaque côté delettres, etc., mais on devrait aussi leur ensei-gner continuellement à résister aux malaises etépreuves physiques ou, en français moderne, à's'endurcir'.

18) Bans la littérature tchèque, il existe un ouvragesimilaire, celui de J. Jaros-Samma "Brâzda zivota"(Sillon de la Yie).

115

HI.

1) Yoir note I.3

2) DESCAEÏES, René (1596-1650). Célèbre géomètre e-fcphilosophe français. Mit au point une méthode,jusque-là inconnue, qui consiste à appliquer laraison humaine aux problêmes métaphysiques, l'es-sence de sa méthode, connue sous le nom de Carté-sianisme, peut être exprimée dans cette affirma-tion: "Pour atteindre la vérité, il faut vider sonesprit de toutes les opinions dont il est empreint,et élaborer à nouveau depuis le début, son propresystème de connaissances." H est souvent considérécomme le précurseur de la psychologie moderne.

3) IBIBUIŒZ, Gottfried Wilhelm (1646-1716). Célèbremathématicien et philosophe allemand qui découvritun peu près en même temps gu 'Isaac Hevrton, lesbases du calcul différentiel. Il fut de tempéra-ment optimiste et s'efforça de réaliser la fusiondes églises catholiques et protestantes. Sonoptimisme est résumé dans sa phrase "Tout est pourle mieux dans le meilleur .des mondes possibles".

4) (rOEÏEE, Wolfgang (1749-1882). le plus célèbre poèteallemand. Egalement grand écrivain et penseur; ilfut aussi 'pendant quelque temps Ministre d'Etatdu Duc de Weimar.

•e

5) HEHDER,. Johann &ottfried (1744-1803). Célèbreécrivain et philosophe allemand. Son oeuvre la pluscélèbre fut: "Philosophie de l'Histoire de l'Huma- 'nitê".

116

6) KCCHBEBŒ, Jules (1798-1874). Un des plue grandshistoriens français aux idées très libéralesqui le mirent en conflit avec les autorités.

7) EOÏÏSSEAU, Jean-Jacques (1712-1778). Un des plusgrands écrivains français de tous les temps. Pilsd'un horloger de G-enêve. Il prêcha le retour àla nature, la nécessité d'un contrat social, quigarantit les droits de tous, et dans son "Emile",établit les bases de la psychologie éducative.Ses ouvragée passionnés et éloquents concernantles droits de l'homme ont Joué un rôle importantdans la formation des pensées de ceux qui provo-quèrent la Révolution française en 1789.

8) EESOL&IiOZZI, Johann Heinrioh (1746-1827), maîtresuisse, né à Zurich, Profondément influencé parles idées de Jean-Jacques Rousseau sur l'éducation,il a créé de nouvelles méthodes d'enseignement des-tinées surtout à de jeunes, enfants, et par sesouvrages a fait considérablement progresser lapsychologie de l'enfant.

9) EROEBE1, îriedrich (1782-1852). Maître doué qui,adoptant avec enthousiasme les théories dePestalozzi sur l'éducation, travailla ensuitependant deux ans à l'école Pestalozzi de Xverdun,et de cette expérience, acquit encore de plusgrandes idées. Son énorme et durable contribution,au point de vue éducation, fut le Eindergarten(jardin d'enfants) destiné à des enfants en dessousde l'âge de six ans, et les principes liés à detels établissements. D'après lui: "les premièresoccupations volontaires de l'enfant, si ses besoins

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physiques sont satisfaits sont: (a) l'observationde son environnement, la compréhension, spontanéedu monde externe, et (b) le jeu qui est l'expres-sion extérieure indépendante de l'action et dela vie internes", les occupations gui augmententen complexité au fur et à mesure que l'enfantprogresse au Jardin d'enfants sont? (1) les "dons"et "occupations" qui ont pour but de familiariserl'enfant avec des choses inanimées, (2) le jar-dinage et les soins accordés à de petits animauxdomestiques, de manière à faire naître chezl'enfant le goût des plantes et des animaux, (3)les jeux et chante comme ceux composés par Ecoebelpour que l'enfant fasse connaissance avec la vieinterne des animaux et de l'iumanité. Itoebelestimait que la nature est la manifestation duBien, et son étude, comprenant la contemplation defaits externes est le complément nécessaire de lareligion qui nécessite une contemplation interne.

10) HESED, Georg Wilhelm Eriedrich (1770-1831). Œoutjeune, il fut précepteur et devint ensuite direc-teur pendant huit ans d'un nouveau "gymnasiam"(grammar sohool) àTÇàremberg; plus tard, sa philo-sophie, basée sur sa conviction que Dieu est toutet que tout montre Dieu, le rendit célèbre. Hdéclara que "la pédagogie est l'art de rendrel'homme moral. Sa philosophie considère l'hommecomme doté de nature, et indique la façon dont ilpeut renaître et -voir transformer sa premièrenature en une nature spirituelle, d'une tellemanière que la -nature spirituelle lui soit doré-navant habituelle". Il estimait que la soumissionà l'autorité, l'admiration pour les réalisations

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spirituelles du passé, et la renonciation de soidevraient entraîner un nouveau soi-même spirituelqui n'atteindra son plein développement qu'ens'identifiant avec l'esprit de la nation. lefoyer, l'école, la classe sociale, l'église etla nation, tous jouent leur rôle comme instrumentsd'éducation; mais parmi ceux-ci, l'Etat est prédo-minant comme étant l'autorité supérieure à laquellesont soumis les lois et intérêts de la famille,et la communauté civique et sur laquelle ils re-posent". Ces principes ont pénétré et régi laphilosophie pédagogique de la Prusse.

11) EMERSON, Ralph Waldon (1803-1882). Philosopheaméricain né à Boston, auteur d'un ouvrage inti-tulé "Représentants de l'Humanité" qui a profon-dément influencé la pensée américaine pendant denombreuses décennies.

12) EEÏ, Ellen (1849-1926). Pédagogue et essayistesuédoise. Son ouvrage le plus connu s'intitule:"Le Siècle de l'Enfant" (1900). Après avoir ététraduit en anglais en 1909, il fut lu dans lemonde entier et la rendit célê"bre. Elle donna desconférences principalement en Europe et surtouten Allemagne. Elle influença de nombreux jeunesécrivains par l'immense correspondance qu'elleéchangea avec ceus: qui adoptaient ses idées.

13) CLAPAREDE, Edouard (1873-1940). Docteur en médecine;Chef du.laboratoire de Psychologie expérimentaleà l'Université de Sénevé et depuis 1904 Professeurde Psychologie à la Faculté des Sciences. H fondaen 1912 l'Institut Jean-Jacques Rousseau de

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l'Université de Sénevé, et par cet institut,exerça une grande .Influence sur le développementd'études psychologiques sur l'enfant au cours despremières vingt-cinq, années du 20ême siècle,ïïn de ses plus remarquables ouvrages est "lapédagogie expérimentale et la psychologie del'enfant", dont la quatrième édition a été tra-duite en anglais et publiée à londres en 1911. Hoffrit en 1921 à Jean Piaget le poste de Directeurde Recherche à l'Institut et ce lui; là que celui»ciaccomplit le travail qui entraîna la publicationde ses cinq premiers livres sur l'éducation.

120

IV.

1) .la grande Didactique XI. 92) la grande Didactique XII3) la grande Didactique XIV4) la grande Didactique IX. 15) la grande Didactique XI6) la grande Didactique IX. 27) la grande Didactique VIII.48) la grande Didactique XXIX. 29) la grande Didactique XXIX.310) la grande Didactique IX.511) la grande Didactique II.412) la grande Didactique IX.413) Pampaedia H. 1014) Pampaedia 11.2715) la grande Didactique XVHI

Bemarque

Soutes les citations de "Didactica Magna" de Comeniussont prises de la traduction française "la grandeDidactique, Eraitê de l'Art imirersel d'enseigner àtous. Introduction et traduction par J.B. Piobetta".Publié par les Presses universitaires de Erance, Paris1952.

121

V.

1) Tia Lueis XKI.7.2) Yia lucis 2III.7.3) Tia lucis XVIII.14.4) Pampaedia IV.15.5) la grande Didactique XXV. Panorthosia XVI.6) Panorthosia XV. 3.7) Via lucis 2TIII.. Panortliosia ÏTI.8) Tia luois Dêdioation 13.9) Via Liicis Dêdioation 24.10) J.V. Aadreae (Ciristiaaopolis 1619). Ir. P.E. Held

(New ïork 1916).11) G.N. Clark, The Seventeentli Century (1950), p. 98.12) Seton WatBon, History of Osecas and Slovaks (1943),

p. 130.13) C.V. Wedgwood, La Guerre de Œrente Ans (1938), p. 460.14) Ingelus Pacis 29.15) la grande Didactique XXIS.3.16) Cf. article par V.T. Mistorvska dans "Philosophie",

juillet 1962.17) Simeon Potter, linguistique, p. 100.18) Via iucis XVIII.4.

122

B I B L I O G R A P H I E

123

I. Oeuvres principales de Comenius

Comenius fut un écrivain prolifique et durantsa vie écrivit quelque deux cents ouvrages, ïïnnombre considérable d'entre eux (50 environ) sesont égarés, bien que l'on ait retrouvé des oeuvresremarquables que l'on pensait détruites. Voici laliste des principales oeuvres dont on dispose detraductions en anglais ou en français.

1. le labyrinthe du Monde et le Paradis du CoeurPublié à leszno en 1631.Traductions: le Comte lutzow (londres 1901)Matthew Spinka (Chicago 1942VM. de Crayencour (lille 1906)

2. la Porte ouverte des langues (Janua)Publié à leszo en 1631.Traductions: John Anchoran (londres 1633) sansreconnaître l'auteur: Comenius

John Eowbotham (londres 164-1)C. De Varennes (Paris 1646)C. Venier (Autun 1898

3. le Vestibule de la langue latine (Vestibulum)Pablié à leszo comme introduction à Janua (1633)Traduction: J. Brookbank (londres 1647)

4. l'Ecole de la première Enfance (Informatorium)Cet ouvrage constituait entre 1628 et 1631

un guide à l'intention des mères.Traduction : David Benham (londres 1858)

W.S. Monroe (Boston 1893)E.M. Eller (Caroline du Nord: PressesUniversitaires 1956)

5. la grande Didactique (Didactiea Magna)

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Comenius écrivit entre 1628 et 1632 une -versiontchèque de cet ouvrage comprenant une "BrèveProposition concernant le Renouvellement d'Ecolesen Bohême", dont on mentionne des extraits enanglais et en français dans les Sélections del'Université du 17 novembre (Erague 1964). laversion latine fut rédigée en 1636 et comprisepar Comenias dans ses Oeuvres rassemblées de 1657.ïraductioEBMM. Eeatinge (A. & C. Black, londres 1896).J.B. £iobetta (Paris 1952)

6. Philosophie naturelle (Hiysieae Synopsis)Publié à leszno en 1633Sraductioiu (londres, 1651)

7. Traités introduisant les Idées "pansophioues" deComenius (Erodromus, 1639 Dilueidatio, 1639 etDiatyposis 1643)ŒraductionK Samuel Hartlib. flandres 1642 JJeremy Collier. (londreB 1651).

8. la Yoie de la lumière (Via lucis)Rédigé en 1642, alors que Comenius se trouvait

en Angleterre, mais publié à Amsterdam en 1688et dédicacé à la Société royale de Londres nouvel-lement constituée.Œraduetion : E.ï. Campagnae (Idverpool, Eressee

la Mêtnode de langues la plus récente (Metnodus)"Cette oeuvre a été écrite à Elbing entre 1642

et 1648 comme base des méthodes pédagogiques pré-conisées par Comenius. le dixième chapitre est leplus important et est connu sous le nom de Didac-tique analytique.

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ïraductions: Une version anglai0e abrégée estmentionnée par A. lurek dane unedissertation de l'Université deDurham (1951)Didactique analytique, T. Jelinek(Université de Chicago, 1953)

10) Description d'une Ecole 'pansophique1 (Delineatio)Rédigé à Saros Patak en, 1650-51 pour décrire

le genre d'école réformée que Oomenius espéraitcréer.Craductions: Partie de la Dissertation écrite

par A. .ïurel: comme susmentionnée.Extraits en anglais et françaisdans la Collection de l'Universitédu 17 novembre (Prague 1964)

11) Image du Monde (Orbis Pie-feus)Ecrit à Saros Patâk pour débutants en latin,

mais publié -bout d'abord à Nuremberg en 1658.Quelque temps après, une version anglaise futpubliée à Londres par Charles Hoole. Un fac-similé fut publié par les Presses universitairesd xford en 1658. Un fac-similé de l'éditionde 1672 fut publié par les Presses universitairesde Sydney en 1968.

12) Exhortation des Eglises de Bohême à l'Eglised'Angleterre.Cet ouvrage fut publié à Amsterdam en 1661

et comprend un aperçu de la discipline de l'Unitétchèque de Frères. Une traduction anglaise suivitimmédiatement. l'aperçu de la constitution del'Unité fut traduit en 1866 par B. Seifferth.

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Cet ouvrage constitue vraiment une série desoeuvres sur lesquelles Comenius a concentré sesefforts depuis 1642 environ, jusqu'à sa mort en1670. Il l'envisageait comme une étude exhaustivede l'univers et de la sagesse nécessaire aubonheur de l'homme.

13) Consultation générale sur la Réforme des Affaires•humaines (Consultatio)

Cet ouvrage comprend sept parties dont lesplus importantes sont les suivantes:

a) Pansophia, comprenant huit livres corres-pondant à ce que Comenius croyait être lastructure spirituelle de l'univers.

t>) Pampaedià, où Oomenius considérait l'éducation"de tous les hommes, au sujet de toutes choses,de toutes les manières".

c) Panglottia, où il formule des propositionsen vue d'une langue universelle dépourvue detoute ambiguïté et confusion.

d) Panorthosia, traitant tous les aspects de laréforme sociale.

Œoute la collection de ces ouvrages futpubliée par l'Académie des Sciences tchèque,en 1966, On peut trouver des traductions d'impor-tantes sections en anglais et français dans lescollections suivantes:

1. Choix de 1'Unesco (Paris 1957)

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-2. Choix de l'Université du 17 novembre (Prague1964-)

3. Séries de penseurs pédagogiques (CollierMaemillan 1969) (Comenius)

14) t'.ange de Paix (-angélus 3?aeis)Publié en 1667.traduction : W.A. Morison (1944-)

Nota: Comenius publia en 1657 à Amsterdam une sériede ses oeuvres jusqu'à cette date. Elle eet disposéeen quatre sections chronologiques: I) 1627—1642,II) 1642-1650, III) 1650-1654 et 17) à partir de1654. Une nouvelle édition fut publiée en 1957 parl'Académie des Sciences tchèque (Opéra DidactieaOmmia).

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II. Ouvrages concernant ComenluaPendant longtemps après sa mort, Comenius

fut négligé, tien que ses manuels scolaires(Janua et Orbis Pictus) continuèrent à êtrepopulaires, l'intérêt pour sa oonoeption péda-gogique fut ravivé au dix-neuvième siècle parE.H. Quick, Réformateurs pédagogiques 1868 Ch.Xet par Gabriel Compayrê, Histoire de la Pédagogie,1887 On. VI. A la lin du dix-neuvième siècle,un certain nombre d'ouvrages furent publiés àson sujet dont les plus importants, en anglais,sont les suivants:

Monroe WH1 S., Comenius, thé Evangelist ofModem Pedagogy (Boston 1892)Maxwell W.H., ïhe Œext-Books of Comenius(Hew York Edue. Review 1892)Butler H. Murray, Œhe Place of Comenius inthé History of Education (lïew York 1892)Eeatinge M., Œhe Gréât Didactio, Biographicaland Historical Introduction (london 1896)laurie S.S., î.-à. Comenius, His iife and Work(london 1884)Monroe Will S., Comenius and thé Beginningsof Edueational Eeform (Sew York 1900)Adamson J. W,, Pioneers of Modéra Education1600-1700 (C.U.P. 1905)

Durant les vingt premières armées du ving-tième siècle, l'intérêt manifesté pour l'oeuvrede Comenius fut surtout centralisé en Europeorientale, mais à partir de 1920, un nombre desavants anglais et français commencèrent à fairedes comptes rendus. Parmi les publications lesplus importantes de ce siècle, citons:

Eeatinge HW., Œhe Gréât Bidactie: Intro-ductions. 2e édition (londres 197(3}

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Busk E. E., Doctrines o£ thé Gréât Eduea-tors, Ch. T (london 1918)Surnbull S. H., Hartlib and liis relationswith Comenius (Oxford 1920)Eeyberger Anna, J.A. Comenius, sa vie etson oeuvre d'éducateur (Paris 1928)Toung E.Ï., Oomeniua in England (Oxford 1932)Heedham J., (Ed) Œhe Œeacher of Nations(Cambridge 1942)Wright O.J., Comenius and thé 'Church Uni-ver sal (london, Herbert Barber 1942)Spinka M., J.A. Comenius, that IncomparableMoravian (Chicago 1943)Bovet P., J.A. Comenius, un patriote cosmo-polite (Geneva 1943)ïurnball G.H., Hartlib, Dury & Comenius(liverpool 1947)Piobetta J»-B., la Grande Didactique, Intro-duction (Paxis 1952)Jelinek T., Œùe Analytical Didactic, Intro-duction (Chicago 1953)Molnar A.. Une Eêforme parfaite, anthologie(Prague 1957)Piaget J., Introduction aux Choix de l'Unesco(Paris 1957)Clauser Jérôme E., The Pansophist fEssay from"ïhe Educated Man," Ed. Paul Hash (John Wiley1965)Sadler J.E., J.A. Comenius & thé Concept ofUniversal Education (Allen & Unwin 1966)Sadler J. E., Introduction to thé OrbisPictus (O.U.P. 1968)Sadler J. E., J.A. Comenius, EducationalŒhinkers Séries with Sélections from his Works(Collier Macmillan 1969).

Pendant quelques années, les recherches surComenius ont surtout été effectuées à l'Institutpédagogique de Prague et depuis 1957 des étudesInternationales ont été rassemblées dans la revue"Acta Comeniana" qui paraissait tout d'abordsemestriellement, et puis à partir de 1963, une

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fois tous les deux ans.. Cette revue contientdes articles en anglais et français, et fréquem-ment des résumés d'articles en d'autres langues.

Depuis 1969, la revue Archir Komenskêho(Acta Oomêniana) est devenue internationale, etelle publie des articles en anglais, français,russe, allemand (avec des résumés en tchèque)rédigés par des auteurs de différents pays.

D'autres Comeniana anglais sont les suivants:- Oonsultationes de Consultatione(éditeur: Dagmar Capkovâ). Etudes sur leConsultatio de Oomenius par un grouped'auteurs: G. Cervenka, D. Capkovâ, Y.!.Miskorskâ, J. Bramborn, H. Beekovâ).Institut d'Education Comenius, Ixague 1970,pp. 199.

- Jirlna Popelovâ: Jan Amos Komensky(Choix). Cs. vybor obrâncû mira.Prague 1956, également en anglais, français,allemand, russe, espagnol.

En 1958, la Maison d'Edition tchèque d'Etatpublia une traduction anglaise de la biographiepopulaire de Comenius: "la Vie triste et héroïquede J.A. Comenius" par Erantisek Kozik.