CHIMIE ORGANOMÉTALLIQUE · Ces réactions concernent les complexes à 18 électrons, configuration...

13
CHIMIE ORGANOMÉTALLIQUE AVEC EXERCICES CORRIGÉS Didier ASTRUC Laboratoire de Chimie Organique et Organométallique - UMR CNRS 5802 Sciences Technologies U N I V E R S I T E C 7, avenue du Hoggar Parc d’Activité de Courtabœuf, BP 112 91944 Les Ulis Cedex A, France

Transcript of CHIMIE ORGANOMÉTALLIQUE · Ces réactions concernent les complexes à 18 électrons, configuration...

CHIMIE

ORGANOMÉTALLIQUE

AVEC EXERCICES CORRIGÉS

Didier ASTRUCLaboratoire de Chimie Organique et Organométallique - UMR CNRS 5802

Sciences Technologies

U N

I V

E R

S I

T E

BORDEAUX 1

C7, avenue du Hoggar

Parc d’Activité de Courtabœuf, BP 11291944 Les Ulis Cedex A, France

Grenoble SciencesGrenoble Sciences poursuit un triple objectif :• réaliser des ouvrages correspondant à un projet clairement défini, sans contrainte de

mode ou de programme,• garantir les qualités scientifique et pédagogique des ouvrages retenus,• proposer des ouvrages à un prix accessible au public le plus large possible.Chaque projet est sélectionné au niveau de Grenoble Sciences avec le concours dereferees anonymes. Puis les auteurs travaillent pendant une année (en moyenne) avecles membres d’un comité de lecture interactif, dont les noms apparaissent au début del’ouvrage. Celui-ci est ensuite publié chez l’éditeur le plus adapté.

(Contact : Tél. : (33)4 76 51 46 95, e-mail : [email protected])

Deux collections existent chez EDP Sciences :• la Collection Grenoble Sciences, connue pour son originalité de projets et sa qualité• Grenoble Sciences - Rencontres Scientifiques, collection présentant des thèmes

de recherche d’actualité, traités par des scientifiques de premier plan issus dedisciplines différentes.

Directeur scientifique de Grenoble SciencesJean BORNAREL, Professeur à l'Université Joseph Fourier - Grenoble 1

Comité de lecture pour “Chimie organométallique”Yves CHAUVIN, Directeur scientifique honoraire à l'Institut Français du PétroleRobert CORRIU, Professeur à l'Université de Montpellier 2,membre de l'Académie des sciences et de l'Institut Universitaire de FranceJean-René HAMON, Directeur de recherches au CNRS, Université de Rennes 1Henri KAGAN, Professeur à l'Université Paris Sud, Orsay,membre de l'Académie des sciences et de l'Institut Universitaire de FrancePaul KNOCHEL, Professeur à la Ludwig Maximilians Universität, MünchenBernard MEUNIER, Directeur de recherches au CNRS, Laboratoire de Chimiede Coordination du CNRS, Toulouse, membre de l'Académie des sciencesJean-François NORMANT, Professeur à l'Université Pierre et Marie Curie,membre de l'Académie des sciencesJean-Yves SAILLARD, Professeur à l'Université de Rennes 1Jean-Pierre SAUVAGE, Directeur de recherches au CNRS,Université Louis Pasteur de Strasbourg, membre de l'Académie des sciencesBernard WAEGELL, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille

Grenoble Sciences reçoit le soutien du Ministère de l'Éducation nationale, duMinistère de la Recherche, de la Région Rhône-Alpes, du Conseil général del’Isère et de la Ville de Grenoble.

Réalisation et mise en pages : Centre technique Grenoble SciencesIllustration de couverture par Alice Giraud d’après E. Alonso et D. Astruc,J. Am. Chem. Soc. 2000, 122, 3222. : une nouvelle génération de catalyseurs, les

métallodendrimères, comportant des clusters à la périphérie (32 fragments Ru3(CO)11)

ISBN 2-86883-493-0© EDP Sciences, 2000

EXTRAITS

HISTORIQUE DE LA CHIMIE ORGANOMÉTALLIQUE 19

1961-1981 : LA DÉCOUVERTE DES LIAISONS MULTIPLES

CARBONE-MÉTAL ET L’ÂGE D’OR DE LA CATALYSE

Les composés “moléculaires” à liaison métal-métal ont été fabriqués depuis long-temps : les colloïdes d’or étaient connus dans l’antiquité pour leurs applicationsdécoratives et thérapeutiques et le calomel était utilisé par les chimistes en Inde auXIIe siècle ; la liaison Hg-Hg dans l’ion mercureux a été reconnue au début duXXe siècle. Cependant, avec le plein essor de la chimie organométallique dans lesannées soixante, les agrégats ou “clusters” métaux-carbonyles se développent, enparticulier sous l’impulsion de P. Chini en Italie, E. Muetterties et L. Dahl aux Etats-Unis et J. Lewis en Angleterre. Parallélement, la synthèse et la structure descomposés à liaison métal-métal multiple (double, triple et quadruple) sont reportées.Les travaux de F. A. Cotton (Etats-Unis) dans ce dernier domaine sont bien connus.

Cette décennie est aussi celle de l’avènement d’une famille extraordinaire : lescarboranes et métallocarboranes découverts par F. Hawthorne aux Etats-Unis . W. N.Lipscomb obtiendra plus tard, en 1976, le prix Nobel pour la clarification de lastructure des boranes.

Fe

2 –

Dicarbolyl fer(II)analogue du ferrocène

F. Hawthorne, 1965

En 1962, Vaska publie le célèbre complexe [Ir(CO)(Cl)(PPh3)], portant son nom, quifixe réversiblement l’oxygène et peut subir une grande variété d’additions oxydantes,par exemple avec H2 à 25°C.

IrPPh3OC

ClPh3PIr

PPh3OC

HPh3P

Cl

H

PPh3OC

OPh3P

Cl

OO2 H2IIII III

Ir

Complexe de Vaska et addition oxydante de O2 et H2, 1965

60 I - STRUCTURES DES COMPLEXES

Ru Ru

N

NN

NN

NN

N

avant liaison M=M : d6 + d6

après liaison M=M : d4

1.4. LES LIAISONS TRIPLES

Elles sont fournies par les familles de métaux d3 + d3 conduisant à une structure élec-tronique (σ)2(π)4 et d5 + d5 conduisant à une structure électronique (σ)2(π)4(δ)2(δ*)2.Exemples :

Mo Mo

CO

OCCO

CO

R = CH2SiMe3 : dMo–Mo = 2,17ÅR = NMe2 : dMo–Mo = 2,21Å

carbonyles semi-pontants

MoMo

RR

R

R RR

avant liaison M M : d3 + d3

après liaison M M : d0avant liaison M M : d5 + d5

après liaison M M : d2

Après formation de la liaison triple, les deux métaux d3 des fragments ayant formécette liaison deviennent d0 dans le dimère alors que les deux métaux d5 deviennent d2.

Les dérivés binucléaires des métaux-carbonyles suivant la règle des 18 électrons, il estfacile de déterminer l'ordre de la liaison métal-métal. Par exemple, le dimère[Cp(CO)2Mo-Mo(CO)2Cp] peut s'écrire sous la forme [Mo(CO)2Cp(X)y] si y estl'ordre la liaison Mo-Mo (chaque Mo étant ligand Xy pour le Mo voisin), c'est-à-dire :MoL4Xy+1.

NEV = 18 = nMo + 2 nL + nX – q = 6 + (2 × 4) + y + 1 = 15 + y, d'où y = 3.

La triple liaison Mo-Mo dans le complexe ci-dessus a une longueur de 2,2 Å alorsque la longueur de la liaison simple Mo-Mo est de 2,78 Å dans le dimère[Cp(CO) 3Mo-Mo(CO)3Cp] dont il est issu. Le racourcissement est effectivementtrès important.

1.5. LES LIAISONS QUADRUPLES

Elles sont fournies par les familles de métaux d4 + d4 conduisant à une structureélectronique (σ)2(π)4(δ)2. Après formation de la liaison quadruple, chacun des deuxmétaux devient d0 dans le dimère.

2 - LES COMPLEXES BIMÉTALLIQUES ET AGRÉGATS POLYMÉTALLIQUES 61

Exemples :

Re Re

Me

Me

Me

Me

Me

MeMe

Me

2 – 4 –

MoMo

MeMeMe

Me

Me Me

MeMe

avant liaison M M : d4 + d4

après liaison M M : d0avant liaison M M : d4 + d4

après liaison M M : d0

(Li+)4(Li+)2

Dans le dimère [Re2Cl8]2–, le NEV est de 16 si on compte tous les ligands Clcomme ligands X. Chaque rhénium doit être compté comme monoanionique et semet sous la forme ReX4+y

–.

Il vient : NEV = nRe + 2 nL + nX – q = 7 + 0 + 4 + y – (– 1) = 12 + y = 16,d'où y = 4.

La distance Re-Re (2,24 Å) est inférieure à la distance Re-Re dans le métal lui-même(2,71 Å) mais la force de la liaison quadruple Re-Re est seulement de85 ± 5 kcal . mole–1 (355 ± 20 kJ . mole–1) dont 5 kcal . mole–1 (21 kJ . mole–1) pourla quatrième liaison δ, ce qui est aussi faible qu'une liaison hydrogène).

ReCl

Re

Cl Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

Cl

2,24

2,293,32

87 ± 1

103,7 ± 2,1

z

Structure de l'ion [Re2Cl8]2– Croquis montrant la formationd'une liaison δ dans [Re2Cl8]2–

par recouvrement des orbitales dxy du métal

Rappelons que les ligands chloro et alcoxy sont des donneurs π qui peuvent êtrecomptabilisés LX tant que le NEV ne dépasse pas 18 : par exemple, dans[(CH3O)3Mo-Mo(OCH3)3], on aurait, pour chaque Mo, NEV = 12 si l’oncomptabilisait chaque méthoxy seulement comme ligand X, la liaison Mo-Mo étanttriple. En comptant chaque méthoxy comme ligand LX, alors on a plus logiquementNEV = 18 pour chaque Mo.

Les travaux de Cotton et de son équipe dans le domaine des liaisons quadruples afourni une abondance de résultats et un éclairage particulièrement remarquables2.1.

CHAPITRE 4

RÉACTIONS DES NUCLÉOPHILES ET DES

ÉLECTROPHILES AVEC LES COMPLEXES

Ces réactions concernent les complexes à 18 électrons, configuration électroniqueconférant aux complexes la robustesse leur permettant de subir ce type de réactions.Elles sont généralement d’une grande utilité dans une perspective de synthèseorganique. Les additions nucléophiles et électrophiles comprennent aussi l’additiondes réactifs les plus simples : le proton et l’hydrure. Lorsque le nucléophile estencombré, il devient une base et, lorsque l’électrophile est encombré, c’est unabstracteur de H–. Ainsi, les additions et abstractions de H+ et H–, courantes enchimie organométallique, permettent des interconversions simples entre lescomplexes électrophiles et nucléophiles . Cette pratique est courante dans le but defonctionnaliser un ligand selon la nature, nucléophile ou électrophile, du réactif donton dispose. Pour les applications en catalyse et en synthèse, voir le chapitre 19.

1. LES ATTAQUES NUCLÉOPHILES

1.1. ADDITIONS NUCLÉOPHILES

Les additions nucléophiles ont une force motrice d'autant plus grande que le greffonorganométallique, sur lequel est fixé le ligand attaqué, est plus électroattracteur. Cecaractère électroattracteur du greffon peut être provoqué par une charge positive oupar des ligands électroattracteurs, typiquement des carbonyles, sur le métal dugreffon. Les facteurs qui déterminent l'attaque sont le contrôle orbitalaire, le contrôlede charge et le contrôle stérique. Quand le greffon est chargé positivement, le contrôlede charge joue souvent (mais pas toujours) un rôle prédominant. En l'absence decharge (et parfois même quand le greffon porte une charge positive atténuée par desligands uniquement hydrocarbonés donneurs), le contrôle orbitalaire prédomine. Lecontrôle stérique joue toujours un rôle important. Il impose la stéréochimie del'addition. En effet, les attaques des nucléophiles sur les ligands se font toujours enexo c'est-à-dire du coté du ligand opposé au métal. Souvent également, l'effet stériquejoue son rôle sur la régiosélectivité des réactions.

112 II - RÉACTIONS STŒCHIOMÉTRIQUES DES COMPLEXES

Ligands hydrocarbonés de �2 à � 7

M + Nu– M+

M+

M+

M+

M+

M+

Nu

MNu

MNu

M

η2 η1

+ Nu–

η3 η2

+ Nu–

η4 η3

+ Nu–

η5 η4

+ Nu–

η6 η5

+ Nu–

η7 η6

Nu

M

Nu

M

Nu

L'attaque se fait avec diminution d'une unité de la hapticité. De plus, trois règles,établies par Davies, Mingos et Green4.1, se dégagent quand la réaction est souscontrôle de charge pour déterminer la régiosélectivité de l'attaque, si plusieurs ligandsou sites d'un ligand sont en compétition . Ces règles sont à respecter avec l’ordre depriorité suivant :1. Les ligands pairs sont attaqués préférentiellement aux ligands impairs.2. Les ligands ouverts sont attaqués préférentiellement aux ligands cycliques fermés.3. Sur les polyènes ou polyényles ouverts, l'attaque a lieu sur le carbone terminal du

ligand.

Prenons l'exemple d'un complexe cationique contenant les ligands benzène (pairfermé), butadiène (pair ouvert) et allyle (impair ouvert). L'attaque du nucléophile sefait en exo et suivant les règles sur un carbone terminal du ligand butadiène :

11 - LES MÉTALLOCÈNES ET LES COMPLEXES SANDWICHS 251

FeFe 2 Cp

4pe2ge2u

e1g

e1g

e1ue1u

a1g

a1g

a1g

a1g, e1g, e2g

a2u

a2u, e1u

a2u

4s

πe*1g (xz, yz)

3dδa'1g (z2)

σ

e2g (x2-y2,xy)

π*C-C

πC-C

D5d

liaison σ liaisonCp→Fe Cp→Fe

Cp→Fe

π

liaison liaisonπFe→Cp (retour)

Cp

Fe

Cp

Cp

Fe

Cp

Cp

Fe

Cp

Cp

Fe

Cp

aussi s

a1g a2u e1u e1u

e1g e1g e2g e2g

pz

dyzdxz dxy dx2-y2

dz2

δ

px py

zy

Diagramme moléculaire et interactions orbitalairesdans le ferrocène en conformation décalée

Dans le cobaltocène et le nickelocène, le niveau double antiliant e*1g est occupérespectivement par un électron (distorsion Jahn-Teller) et deux électrons non appariés.

414 IV - CATALYSE

3. Les protéines à cuivre dans lesquelles ce dernier est ligandé par des atomes d'azoteet de soufre (plastocyanine, azurine). La médiation rédox a lieu grâce à l'inter-conversion entre CuI et CuII.

4. Les flavodoxines et quinones dont la structure est basée sur des groupementsflavines. Alors que les trois catégories précédentes sont composées de médiateursinorganiques monoélectroniques, les flavines ne contiennent pas de métal et trans-portent les électrons et les protons (2 e– + 2 H+) entre le NADPH et l’oxygènase.

On rencontrera un exemple de chaîne de médiation rédox dans le paragraphe qui suit.

4. EXEMPLES D'ENZYMES OXYDO-RÉDUCTASES :LES MONOOXYGÉNASES

Les enzymes oxydo-réductases peuvent se diviser en deux grandes catégories : lesmétalloporphyrines (porphyrine = hème ; ces enzymes sont dites hémiques) et lesautres. Examinons seulement, à titre d'exemple, le cas des monooxygénases qui sontprobablement les mieux connues. Il existe des monooxygénases hémiques (cyto-chrome P-450) et des monooxygénases non hémiques. Dans tous les cas, la réactionconsiste en un transfert d'un seul atome d'oxygène d'une molécule O2 au substrattandis que l'autre se retrouve sous forme d'une molécule d'eau. Les atomes d'hydro-gène n'étant pas fourni par le substrat (il ne s'agit pas ici d'une déshydrogénation), laréaction a besoin d'un co-réducteur, NADPH qui est la forme réduite du phosphate denicotinamide-adénine dinucléotide (NADP+).

(monooxygénase)S + O2 + NADPH + H+ → SO + NADP+ + H2O

Le substrat peut être soit endogène, c'est-à-dire impliqué dans la biosynthèse ou labiodégradation (stéroïde, acides gras) ou exogène, c'est-à-dire venir de l'environ-nement (médicaments, pesticides, solvants, etc.). Dans ce dernier cas, la transfor-mation d'un corps exogène en dérivé hydroxylé permet de le solubiliser dans lesmilieux aqueux, donc de l'éliminer. En particulier, le substrat peut, par exemple,être un alcane (méthane monooxygénase) oxydé en alcool, ou un alcène oxydé enépoxyde. La chaîne de médiation rédox (cf paragraphe ci-dessus) peut être schéma-tisée comme suit dans le cas du cytochrome P-45018.10 :

NADPH + H+

NADP+

P-FAD

P-FADH2

2 P-(FeII)2

2 P-(FeIII)2O2

H2O

P-450(FeIII)

P-450(FeV=O)

P-450(FeII)

ROH

RH

Chaîne de médiation et catalyse rédox biologique impliquant le cytochrome P-450

18 - CHIMIE BIO-ORGANOMÉTALLIQUE : CATALYSE ENZYMATIQUE 415

Le cytochrome P-450 se trouve dans les mammifères, les insectes, les poissons, leslevures et les plantes. Chez l'homme, il se situe dans différents tissus et organes, enparticulier dans le foie. Il est ainsi nommé car ses complexes avec les ligandscourants tels que CO, pyridine, etc.. présentent un maximum d'absorption autour de450 nm. Il en existe plus d'une centaine de variétés, toutes constituées d'un complexefer-porphyrine avec un cystéinate comme ligand axial lié au métal par l'atome desoufre. L'autre site axial est celui de l'activation de l'oxygène. Remarquons quel'hémoglobine et la myoglobine ont la même structure fer-porphyrine pour le siteactif, mais avec pour ligand axial une histidine liée au fer par un atome d'azote ducycle imidazole . Ces deux hémoprotéines ne font que transporter l'oxygène dans lesang et les tissus (respectivement) en formant réversiblement une liaison Fe-O-Ocoudée par réaction entre la forme FeII et l'oxygène moléculaire sans activer ce dernier.La différence extraordinaire d'action vis-à-vis de O2 entre le cytochrome P-450 et cesdeux hémoprotéines est donc uniquement due à la différence de nature du ligandaxial, c'est-à-dire à son effet trans sur la réactivité de O2. Le cycle mécanistique del'activation dans le cas du cytochrome P-450 est représenté ci-dessous.

O

OOH

Mécanisme d'oxydation d'un substrat S par le cytochrome P-450,un complexe fer-protoporphyrine IX comportant un ligand axial thiolate cystéine

FeIII

FeIII

FeV

FeIII-O-O

FeIII-O-O–

H-O-O–

FeII

H+

X

e–

O2

e–

XO

S

SO

X = donneur d'atome d'oxygène

H2OH+

Sur ce schéma, on remarque la présence de courts-circuits. Seuls, ces cycles courts-circuits ont pu être mimés catalytiquement et de façon efficace par les nombreuxmodèles de synthèse de structures voisines. En effet, l’activation de O2 est difficile etcompliquée, comme on peut le constater sur le schéma. En particulier, plusieurschimistes (en France : Meunier, Mansuy et Weiss) ont fabriqué des complexes métal-porphyrine (Fe, Mn) capables de mimer le cytochrome P-450 en utilisant desdonneurs d'un seul atome d'oxygène tels que H2O2, etc. (XO sur le schéma).

458 V - APPLICATIONS DES MÉTAUX EN SYNTHÈSE ORGANIQUE

7. QUELQUES EXEMPLES D’APPLICATION DE LA

CATALYSE ASYMÉTRIQUE19.30-19.32

Le principe de la catalyse asymétrique, développé à partir des travaux de pionnier deKagan avec l’hydrogénation asymétrique (cf. Chap. 15), donne maintenant lieu à unegénéralisation à tout le domaine de la catalyse. L’hydrogénation asymétriqued’oléfines prochirales elle-même a donné diverses applications19.49 dans le domainede la synthèse d’acides aminés tels que la L-DOPA (cf. Chap. 15), d’antibiotiques dela famille des carbapénèmes, d’alcaloïdes isoquinolines tels que la morphine et lesbenzomorphanes. L’hydrogénation asymétrique de doubles liaisons carbone-oxygèneprochirales (c’est-à-dire de dérivés pour lesquels les deux substituants sur le carbonedu carbonyle sont différents) à l’aide de catalyseur de type [RuCl2BINAP] conduit àdes alcools secondaires ayant des e.e. proches de 100% et a été utilisée en particulierpour la synthèse de précurseurs de prostaglandines19.50. Quelques exemples d’autresréactions particulièrement représentatifs seront illustrés ici. L’activité de recherchedans ce domaine subit une croissance exponentielle étant donné les multiplesapplications, en particulier dans les domaines pharmaceutique et agricole.

7.1. EPOXYDATION (CF. CHAP. 17)

L'endo-brévicomine optiquement active (+) ou (–) est une phéromone constituant unecible populaire dont la synthèse a été réalisée par de nombreuses voies. L'époxydation(cf. Chap. 17) asymétrique de Sharpless est l'une d'elles19.51.

O

O

Br

O

O

OH

O

O

OHO

O

O

O

OO

H

1) TsCl, KOH, 68%2) LiBr, 98%

O

O

BrO

70%

HCl diluépentane

69%

(+)(–) endo-brévicomine (+)(–)

OH

NaNH3 liquide

t-BuOOH

Ti(O-i-Pr)4(+)(–) Di PTe.e. > 90%

Me2CuLi

100%

Comme on peut le constater ci-dessous, la nécessité de disposer d'une fonction alcoolen position allylique pour que cette catalyse soit opérationnelle doit être payée par des

19 - EXEMPLES D'APPLICATIONS DES MÉTAUX EN SYNTHÈSE ORGANIQUE 459

étapes supplémentaires pour l'introduction, puis la suppression de cette fonction. Cetinconvénient a été surmonté grâce à de nouveaux catalyseurs d’époxydation qui nerequièrent pas la fonction OH dans l’oléfine. Ainsi, l’époxydation asymétriqued’oléfines simples telles que l’indène à l’aide du catalyseur chiral de Jacobsen (cf.Chap. 17) est une étape clé dans la synthèse de L-736524, un agent inhibiteur de laprotéase HIV prometteur (médicament contre le SIDA) 19.52.

O

Mn

N N

OCl

OOH

H2N

N

N

N

CONH-t-C4H9

OH

C

O

OHHN

L-736524, agent inhibiteur de la protéase HIV (anti-SIDA)

+ NaOCl 1 mol% MnIIIL*(Cl)

CH2Cl2, pH 11,3

MnIIIL*(Cl) =

7.2. ISOMÉRISATION D’AMINES ALLYLIQUES

En utilisant son ligand BINAP [cf. p. 460, énantiomère (S)] avec Rh, Noyori a réalisél’isomérisation catalytique (cf. Chap. 15) asymétrique des amines allyliques enénamines optiquement actives. Cette réaction, l’isomérisation de la géranyldiéthyl-amine en (E)-énamine de (R)-citronellal, est utilisée au Japon comme étape-clé de lasynthèse de 1500 tonnes annuelles de (–) menthol à partir du myrcène. Le catalyseurest recyclé, ce qui accroît encore son efficacité, la multiplication chirale atteignant ainsi