Brochure elections en argentine sob

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SOCIALISME OU BARBARIE Courant International http://sobfrance.unblog.fr - [email protected] - Août 2013 - Prix Libre Une élection historique de la gauche 1.000.000 DE VOIX ENTRE LE FIT ET LE NOUVEAU MAS Editoriale : Dur vote-sanction contre le kirchnerisme Une transition remplie d’incertitudes commence Les débats dans la gauche - Pages 10 à 15 Le bilan de la gauche - Pages 5 à 8 La campagne du Nouveau MAS - Pages 9 et 16 BROCHURE SPECIALE : ELECTIONS EN ARGENTINE

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Brochure sur les elections en Argentine publié par le courant Socialisme ou Barbarie International. La defaite du gouvernement, le bilan de la gauche, les debats

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SOCIALISME OU BARBARIECourant International

http://sobfrance.unblog.fr - [email protected] - Août 2013 - Prix Libre

Une élection historiquede la gauche

1.000.000 DE VOIXENTRE LE FIT ET LE NOUVEAU MASEditoriale : Dur vote-sanction contre le kirchnerismeUne transition remplie d’incertitudes commence

Les débats dans la gauche - Pages 10 à 15

Le bilan de la gauche - Pages 5 à 8La campagne du Nouveau MAS - Pages 9 et 16

BROCHURE SPECIALE : ELECTIONS EN ARGENTINE

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Nous publions cette bro-chure sur les élections enArgentine puisque nous

croyons qu’il s’agit d’une expé-rience très enrichissante pourcomprendre le développementdes gouvernements de centre-gauche en Amérique Latine, ainsique les réponses que nouspouvons apporter à gauche.

Le contexte régional

Ces élections ont étésignées par la détérioration dugouvernement Kirchner, au pou-voir depuis une dizaine d’années,et qui fait partie avec EvoMorales, Chavez et Maduro, etd’autres présidents, d’une sériede gouvernements de centre-gauche, soi-disant populaires etantiimpérialistes, mis en placepour apaiser la vague de protes-tations marquée par la révoltepopulaire d’Argentine en 2001, enBolivie en 2003 et 2005, lavictoire contre le Coup d’Etatpatronal en Venezuela en 2002,entre autres.

Sous le feu de la crise inter-nationale du capitalisme, cesgouvernements, depuis toujoursanti-ouvriers, ont avancé vers desattaques aux travailleurs et auxsecteurs populaires, ce qui est àla base de leur détérioration.

La nouveauté des électionsen Argentine est que tandis qu’auVenezuela, par exemple, cettedétérioration a profité à Capriles,candidat de la droite pro-impéria-liste, en Argentine elle a permis,toute proportion gardée, l’émer-gence d’un pôle politique de lagauche ouvrière : entre le FIT etle Nouveau MAS, section argen-tine du courant Socialisme ouBararie, nous avons obtenu 1million de voix. En même temps,les courants de la gauche réfor-miste et électoraliste, comme leMouvement Socialiste des Tra-vailleurs, qui soutient le gouver-nement de Chavez, n’a pas eu deproblèmes pour s’allier aux sec-teurs de la bureaucratie syndicaleet qui prend comme modèle Sy-riza, se sont effondrés. Ils n’ontobtenu à la Capitale Féderaleque 22.000 voix (contre 18.000du Nouveau MAS et 78.000 duFIT) et que 100.000 à la Provincede Buenos Aires, avec un front detrois partis (contre 68.000 du

Nouveau MAS et 342.000 duFIT). Les résultats obtenus par leNouveau MAS et le FIT donnentdes nouvelles bases pour le dé-veloppement d’une gauche révo-lutionnaire, de classe,antibureaucratique.

Une campagne révolu-tionnaire

Le Nouveau MAS, sectionargentine du courant Socialismeou Barbarie internationale, amené une campagne pour lesdroits des travailleurs, desfemmes et de la jeunesse. Aprèsavoir réalisée une intense cam-pagne d’inscription électorale,nous avons pu présenter descandidats dans les principauxdistricts du pays : Capitale Fédé-rale, province de Buenos Aires,de Cordoba et de Neuquen.

Loin des traits opportunistesdu FIT1, dont la consigne centraleétait « des parlementaires degauche » (pour faire quoi ?), nousavons défendu, dans le pays duPape François I, le droit à l’avor-tement légale, libre, sûr et gratuit,nous avons dénoncé le caractèreantipopulaire du gouvernementKirchner, ainsi que de l’oppositionde droite patronale, nous avonsdéfendu l’élimination de l’impôtsur les salaires, et des taxes pluslourdes sur les patronales, contrela précarité de la jeunesse, pourl’éducation et la santé publique.

Cette politique électoralerévolutionnaire, contraire aucritère d’obtention d’élus à toutprix qui a caractérisé au FIT, a eucomme résultat un score histo-rique pour notre parti, 115.000voix au niveau national. Maisbeaucoup plus important que lesvoix obtenu a été la possibilité defaire entendre notre politique so-cialiste parmi des secteurs largesde la classe ouvrière, de la jeu-nesse et des femmes, en établis-sant des basses plus fermes pourl’extension nationale de notreparti, ainsi que pour une construc-tion structurelle parmi ces sec-teurs.

Avec 1 million de voix, lagauche révolutionnaire a le défide se constituer en une forcehistorique qui puisse combattre labureaucratie syndicale peroniste,et aider au développement d’unmouvement ouvrier combatif,

démocratique et révolutionnaire,comme elle le fait déjà en étant àla tête des nombreuses sectionssyndicales combatives qui ont étéarrachées aux bureaucrates cesderniers années.

Pour la construction departis révolutionnairesindépendants

Ces élections sont aussi ladémonstration qu’il n’y a pasbesoin d’adoucir le programmesocialiste révolutionnaire pour sefaire entendre parmi les masses,ainsi que pour obtenir des bonsscores. Dans une Europe où lesformations réformistes comme leFront de Gauche en France ou

Syriza en Grèce ont séduit unegrande partie de la gauche, laconstruction de partis révolution-naires indépendants est de plusen plus d’actualité.

Le développement de lacrise, une lutte de classe de plusen plus aigüe et la trahison sûrede ces directions réformistes etbureaucratiques (l’exemple de laGauche Unie en Espagne, quifait partie du gouvernementd’austérité d’Andalousie en te-moigne) ouvriront sans doute despossibilités pour la constructionde courants lutte de classesdans les syndicats, de mouve-ments féministes socialistes et,en définitive, de forts partis révo-lutionnaires d’avant-garde.

Mais pour en arriver, il fautmener une lutte directe contrel’illusion que ce sera avec lesélections que les choses pourrontchanger, ou que le mouvementouvrier est dans une situation derecul qui ne permet que desalliances avec les réformistes. Aucontraire, nous vivons un cycleinternational de révoltes popu-laires, qui représentent un redé-marrage historique dans laconscience des exploités et desopprimés et qui, s’ils s’approfon-dissent, peuvent mettre à l’ordredu jour la perspective de la révo-lution socialiste. Cette lutte contreles réformistes implique, surtout,démasquer la politique du Frontde Gauche et de Syriza, quiconsiste à freiner la mobilisationdes travailleurs pour les détour-ner vers des solutions institution-nelles.

Cette brochure a pour butd’apporter dans ce sens au débaten cours au sein du trotskismeeuropéen. La campagne électo-rale en Argentine, la détériorationdu gouvernement, et les résultatsobtenus pour la gauche révolu-tionnaire, constituent des ensei-gnements importants pour lagauche européenne et mondiale.Nous mettons donc à dispositionde la gauche européenne lesleçons que nous en avons tiré.

1 Le Frente de Izquierda y de losTrabajadores – FIT (Front de Gaucheet des Travailleurs) est une allianceélectorale constituée par le Parti Ou-vrier (PO), le Parti des Travailleurs So-cialistes (PTS) et la Gauche Socialiste(IS).

L’importance stratégique desélections en Argentine

Le développementde la crise, une luttede classe de plus enplus aigüe et la trahi-son sûre de ces direc-tions réformistes etbureaucratiques(l’exemple de laGauche Unie en Es-pagne, qui fait partiedu gouvernementd’austérité d’Anda-lousie en temoigne)ouvriront sans doutedes possibilités pourla construction decourants lutte declasses dans les syn-dicats, de mouve-ments féministessocialistes et, en défi-nitive, de forts partisrévolutionnairesd’avant-garde.

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Une transition remplied’incertitudes commence

Dur vote-sanction contre le kirchnerisme

«Le résultat desPrimaires Ou-vertes, Simul-

tanées et Obligatoires amis en évidence le débutd’un nouveau cycle poli-tique et la mutation ducomportement politiqued’un secteur considéra-ble des argentins, àconfirmer dans les élec-tions d’Octobre ». (HugoQuiroga, journal La Na-ción, 13-8-13)

Dimanche dernier, le gou-vernement a subi une vraie dé-bâcle électorale; un recul plusgrave que ce que les sondagesprédisaient et même que ce quenous présidions dans ces pages.En ayant obtenu 54 % des voixaux élections présidentielles de2011, dimanche dernier il y a ob-tenu autour du 30%, c’est-à-dire,il a perdu 25 points et 4 millionsvoix.

C’est vrai que le parti aupouvoir peut faire valoir que lesélections de dimanche ne sontpas définitives : que les « vraiesélections » seront celles du 27octobre. Cependant, le vote-sanction subi et l’épuisementdes réponses économiques desa gestion sont d’une telle am-pleur que, même s’il pourrait ré-cupérer une partie de la perte(ce qu’on ne peut pas écarter àpriori), c’est un fait presque irré-versible que dans le pays unetransition politique vers une pé-riode post-kirchneriste s’est ou-verte, dont le signe politiquen’est pas encore défini et qui dé-pendra, au final, du développe-ment de la lutte de classes dans

la prochaine période. En toutcas, l’un des débats que cetteélection à laisse ouvert est sicette transition se déroulerad’une façon plus ou moins stableou avec des risques pour la gou-vernance.

Débordement électoralpar la droite, mais aussipar la gauche

La première chose qu’il fautétablir est où sont allés les voixperdus ; la deuxième chose : lesraisons de cette migration élec-torale. On peut dire que les troisquarts de ces voix sont allésvers des candidats et des op-tions qui sont à droite du parti aupouvoir, bien que ces candidats

ne présentent pas ses proposi-tions de façon claire mais plutôtdiffuse. Cela se exprime dans lefait que les candidatures ga-gnantes de l’élection ont des po-sitions plutôt républicaines etlibérales, et ils remettent enquestion sous un angle généra-lement conservatrice les traitsminimalement « progressistes »du parti au pouvoir.

Il s’agit de figures patro-nales comme Massa1 dans laprovince de Buenos Aires (levainqueur de l’élection), Macri etCarrio dans la capitale fédérale,Binner à Santa FE, Cobos àMendoza, De la Sota à Cordoba,etc.. C’est-à-dire: les candidats àdroite du gouvernement Kirch-ner, bien que les options les plusà droite comme De Narvaez ont

fait une très mauvaise élection.Des analystes ont remarqué unerécupération relative du radica-lisme2, ainsi que l’impuissancedu PRO3 à s’étendre nationale-ment.

Le contrepoids de ceci estle million de voix obtenus par lagauche révolutionnaire ; toutd’abord, le FIT, mais aussi lenouveau MAS, en exprimant qece débordement électoral augouvernement était non seule-ment à droite, mais qu’il y a euune frange minoritaire mais demasses qui lui a désavoué par lagauche.

Même si c’est une minoritéet la majorité a voté des candi-dats patronales à droite du kirch-nerisme, ce serait précipité deparler d’un virage à droite élec-

Journal Socialismo o Barbarie, Argentine, N°257, 15/08/2013

Cristina Kirchner et Massa, son ancien chef de cabinet, aujourd’hui dansl’opposition et grand vainqueur de l’élection

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torale, parce que les électionsn’ont pas fini. Ne peut pas êtreexclu que le gouvernementfasse un « virage à gauche »dans son discours et récupèredes votes (ce que Cristina a faitdans son dernier discours). Enoutre, il reste à voir comment lescore de la gauche évolue: s’ilse maintiendra, augmentera oureculera. Dans la mesure oùles résultats des élections di-manche sont encore « provi-soires », il faudra attendre aux« vraies » les élections du 27octobre, dans lesquelles cesphénomènes électorales cris-talliseront de façon définitive.

Les raisons duvote-sanction

Par rapport aux raisons durecul électoral du gouverne-ment, parmi les analystes il y adeux explications : celles quil’expliquent par rapport à desraisons économiques et cellesqui s’appuient sur des raisonspolitiques. Sans doute, l’impor-tance des deux raisons varieselon les classes sociales.

A priori, il nous sembleque, parmi les travailleurs aprévalu, un sentiment de colèreenvers le gouvernement qui ades fondamentaux plutôt éco-nomiques (bien que « conta-miné » des autres). Cetterépudiation n’est pas le résultatd’une situation économiquedésespérée, mais d’une dété-rioration économique dont lesmoteurs sont l’escalade desprix, une limitation sur les pos-sibilités d’emploi et les exac-tions comme la taxe sur lessalaires, que la classe ouvrièredans son ensemble vit commeune injustice insupportable.

Bien que nous manquonsencore de données suffisantessur les raisons du vote, nouspensons que parmi la classeouvrière une division électorales’est produite : ceux qui ontvoté contre le gouvernementen exprimant leur colère devanttout ce qui précède, avec unefrange non négligeable qui avoté à gauche, et ceux qui ontmaintenu leurs voix vers legouvernement en pensant aucontraste entre la situation ac-tuelle et celle de 20014.

Les classes moyennes re-

présentent une toute autre réa-lité: avec les chiffres en main,on peut dire que la plupart de laclasse moyenne s’est tournévers un vote contre le gouver-nement, dont le fondement estplus politique qu’économique. Ilne faut pas oublier que dans ladernière période on a vécudeux ou trois cacerolazos5

fortes, où les secteurs richesont entraîné une grande partiedes classes moyennes. Ils ontfait cela basées sur des motiva-tions politiques, telles que lerejet de la réforme constitution-nelle et la réélection de CristinaKirchner, l’effroi devant l’at-taque présumée du gouverne-ment à la propriété privée, larépudiation au contrôle surl’achat des devises qui limite lapossibilité d’acheter des dollarslibrement.

La somme de ces raisonséconomiques et politiques, aconduit le 70 % de l’électorat àvoter contre le gouvernement,avec une majorité qui a votédes différents candidats patro-nales, mais avec la nouveautéqu’une frange minoritaire desmasses a voté la gauche révo-lutionnaire.

En débordant leprogressisme par lagauche

Nous voulons parler main-tenant de cela. Bien que danscette édition, nous effectuonsune large couverture spécifiquede l’élection de la gauche et dubilan de notre parti, il est impos-sible de ne pas faire référenceau million de vois que nous ob-tenu entre le FIT et le NouveauMAS. Ce score montre un faitsans précédent qui se passeen Argentine et qui ne se ré-pète pas de la même manièredans le reste de l’Amérique la-tine.

Au cours de la dernièredécennie, une série de gouver-nements « progressistes » quisont venus à résorber la rébel-lion populaire en faisant desconcessions ici et là, mais enmaintenant le capitalisme et ladémocratie bourgeoise ont as-sumé. Mais ce que nous obser-vons dans la dernière périodeest la détérioration lente maisapparemment irréversible de

ces gouvernements, qui, danscertains cas, profite à la droite. C’est surtout le cas du Vene-zuela, même si ce n’est pas lecas en Bolivie, l’Équateur (oùCorre vient d’être réélu), ni en-core moins au Brésil, où la re-mise en cause dugouvernement du PT émergepar en bas dans un immensesoulèvement populaire qui esten cours en ce moment.

Toutefois, une situationcommune à tous ces cas, est lagrande difficulté de la gaucherévolutionnaire à s’ouvrir unchemin et à apparaitre commeune alternative politique face àdes secteurs plus larges; leplus souvent elle est victime dela polarisation entre ceux d’enhaut, qui est devenue étouf-fante dans le cas du Vene-zuela.

Nous avons vécu une cir-constance pareil, même, dansnotre pays il y a quelques an-nées avec le conflit entre legouvernement et la patronaleagraire commandé par la So-

ciété Rurale, qui, pendant unepériode, semblait ne pas laisserd’espace politique pour lagauche indépendante.

Cependant, cette conjoc-ture pourrait commencer àchanger même en termes élec-toraux, même si nous devronsattendre les résultats en octo-bre. Sans passer par une situa-tion de grandes luttes, sansque déclin économique soit ca-tastrophique (mais avec unecolère grandissante contre legouvernement parmi les travail-leurs et les secteurs « progres-sistes » des classes moyennesex-kirchneristes ou encorekirchneristes), dans les élec-tions primaires une frange mi-noritaire mais de masses d’unmillion de travailleurs se sonttournés vers la gauche, phéno-mène que nous analyserons endétail dans cette édition.

En tout cas, ce qui est si-gnificatif ici est face à des sec-teurs plus larges que leshabituels, une alternative de lagauche révolutionnaire diffé-rente et opposée au progres-sisme de la dernière décenniepourrait commencer à émerger,raison qui explique le mauvaisscore obtenu par la gauche ré-formiste, qui revendique, d’unemanière ou une autre, le cha-visme.

1 Ex chef de cabinet de CristinaKirchner, Massa est passé à l’oppo-sition patronale suite au discrédit dugouvernement des derniers mois.Ces mots d’ordres principaux sont ladéfense des institutions « républi-caines », contre la corruption, contrele crime, etc., ainsi qu’une politiqueéconomique plus libérale.

2 Parti bourgeois historique del’Argentine, similaire politiquement àl’UMP français, avec une base so-ciale essentiellement petite-bour-geoise

3 Le PRO, parti du maire de laCapitale Fédérale, Macri, est un partide droite soi-disant péroniste.

4 La révolte populaire de 2001 aété précédé d’un chômage demasses, un appauvrissementénorme de la population, la réductionde salaires et des retraites, etc.

5 Il s’agit de mobilisations contrele gouvernement par la droite : endéfense de la « république », contrela restriction à l’achat des devisesétrangères (notamment le dollar),etc.

Le vote-sanction

subi par le gouver-nement et l’épuise-ment des réponseséconomiques de sagestion sont d’unetelle ampleur que,même s’il pourraitrécupérer une par-tie de la perte (cequ’on ne peut pasécarter à priori),c’est un faitpresque irréversi-ble que dans lepays une transitionpolitique vers unepériode post-kirch-neriste s’envisage.

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Bilan des scores electoraux du FIT et du Nouveau MAS

Une élection historique dela gauche

Journal Socialismo o Barbarie, N°257, 15/08/2013

Le dimanche dernier unfait d’une importance po-litique énorme du point

de vue de la gauche révolu-tionnaire dans notre pays a eulieu: entre les trois forces re-groupées dans le FIT1 et notreparti avons obtenu environ 1million de voix, un score sansprécedants. Il est vrai quedans les années 1980, levieux MAS a obtenu un scoreimportant dans le cadre d’unfront avec le PC. Et que, enoctobre 2001, le score de lagauche (en additionnant lesvoix d’Izquierda Unida (frontMouvement Socialiste desTravailleurs-PC), le front PO-Nouveau MAS, Zamora –diri-geant du MAS dans lesannées 90 et deux fois députénational-, le Parti Humanisteet le PTS) a atteint 1,2 millionsde voix, en anticipant le climatque le pays vivrait des moisplus tard avec la rébellion po-pulaire. Cependant, qu’entre leFIT et le Nouveau MAS nousobtenions le total 1 million devoix, et cela en déplaçant lesprojets opportunistes de lagauche réformiste, qui sontentrés dans une faillite quasi-totale, configure une situationqu’il faut expliquer.

Le kirchnerisme perdune frange de voix àgauche

Il y a quelques annéesLuis D’Elia (dirigeant d’unmouvement de chômeurs de-venu kircherneriste en 2003)justifiait l’opportunisme du« péronisme révolutionnaire »et de tous ceux de la gauchequi sont rentrés au gouverne-ment Kirchner avec l’affirma-tion que « à gauche dukirchnerisme il n’y a rien ».

Mais il est clair qu’un des phé-nomènes de cette élection aété exactement le contraire :une frange politico-électo-rale d’une ampleur inhabi-tuelle s’est exprimée à lagauche de kirchnerisme.

Bien que la presse écriten’ait pas donné de l’impor-tance que ce phénomène mé-rite, c’est évident que, si le Kont perdu environ 4 millions devoix par rapport à 2011, plusd’un demi-million (une chiffretrès importante) est allé à lagauche révolutionnaire : 400000 pour le FIT et 115 000pour le Nouveau MAS (dontils existent des milliers d’anec-dotes de nos camarades à cetégard) !

Pour arriver à ces chiffres,le FIT est allé des 520 000voix obtenus aux primairesd’Août 2011 aux 900 000 voix

actuels (il avait obtenu580.000 en octobre de lamême année) ; tandis que leNouveau MAS, en ce quiconfigure une véritable exploitpolitique compte tenue de ladisproportion de moyens ma-tériels, de présence à la télé etde toutes sortes avec lesquelsnous avons dû faire face à lacampagne, est passée de seu-lement 16 000 voix dans laprovince de Buenos Aires ob-tenus aux primaires de 2011 àobtenir à l’échelle nationaleprès de 115 000 voix (provincede Buenos Aires, Cordoba,Capitale Fédérale et Neu-quén) en multipliant par septnotre score et avec une corré-lation avec le FIT dans ces dis-tricts de 5 à 1 (le FIT a obtenudans ces districts un demi-mil-lion de voix).

Le million de votes obte-

nus et l’emplacement desforces de gauche (au pluriel,comme le journal Clarin l’aprésenté) comme le cin-quième score dans le total na-tional signifie qu’une frangeminoritaire mais de massesde l’électorat a décidé devoter en faveur de la gaucheouvrière. C’est d’une impor-tance politico-stratégique capi-tale pour ce qui viendra, bienque cela nous oblige à redou-bler les efforts dans laconstruction organique de nosorganisations, qui est qualita-tivement derrière les résul-tats obtenus, encore plusdans notre cas que dans lecas du PO et du PTS, qui ontquand même des fortescontradictions.

La polémique pour le

Par Roberto Sáenz

Nos candidats à députés Eduardo Mulhall, ex-dirigeant ouvrier de l’au-tomobile, et Julia Di Santi, activiste pour les droits des femmes, en cam-

pagne avec les camarades de la province de Cordoba

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bilan

Après l’évaluation du scorede l’ensemble de la gauche, lesbilans plus spécifiques et lesdures polémiques à ce sujetcommencent à apparaitre. LeParti Ouvrier, chef incontesté dufront, est venu à dire à traversd’Altamira, son principal diri-geant, que « la conclusion poli-tique qui se dégage de cetteélection est que la gauche enArgentine c’est le FIT ». Cettedéclaration, en plus de fausse, ale paradoxe que le lecteur vaensuite se demaner « bien, maisalors, c’est quoi le FIT? », unequestion de difficile réponse.

L’affirmation d’Altamiracontient tellement de contradic-tions qu’il ne faut que soulignercertaines d’entre elles pour fairetomber tout ce délire auto-pro-clamatoire. Si l’affirmation seraitvraie, l’actuel triomphe électo-rale pourrait se transformer enune tragédie sans nom : lagauche argentine disparaitraitle lendemain de la divisionéventuelle du FIT !

Le premier problème d’unedéclaration de ce genre est,donc, qu’elle méconnait le faitincontestable que le FIT est unesomme de forces distinctes :une coopérative électorale,dans le jargon de la gauche. Etune coopérative qui est arrivéeaux élections beaucoup plusdivisée dans son activité quo-tidienne qu’il y a deux ans (àtoutes fins utiles, elle a déve-loppé une campagne avec cha-cun de ses membres agissantséparément). En outre, il y a euune hégémonie disproportion-née du PO, qui inévitablementsera une source de crises récur-rentes aiguës à l’intérieur, ca-chées pour le moment parl’excellent score obtenu.

Deuxièmement, il reste lefait que le FIT est un front élec-torale d’organisations que cha-cune de son côté, c’estincontestable, obtiendraient unnombre de voix nettement in-férieur à celui obtenu mainte-nant. Dans ce cas, comme dansd’autres, le tout est plus que lasomme des parties, ce qui bé-néficie ce front électoral. Maisce « tout » est cristallisécomme un front électoral etrien d’autre. Ce front électoralne peut pas aller vers l’avant,parce cela signifierait avancerdans l’unification de ses organi-sations, ni vers l’arrière, parceque cela signifierait la division

du FIT et la fin de « l’entrepriseélectorale » que celui-ci repré-sente pour ses membres.

Le troisième problème estque cette prétendue « seulegauche de l’Argentine » n’existeen tant que telle que dans le do-maine électoral, qui fonctionnecomme une représentation dé-formée de la réalité de la lutte declasses quotidienne. Là, nonseulement d’autres compo-santes de la gauche, mais lesmembres du FIT eux-mêmesavancent dans des sens diffé-rents, en désaccord sur lesaspects les plus fondamen-taux de la politique nationale: les cacerolazos (mobilisations

de la droite), le soutien à lagrève de gendarmes, l’interven-tion commune dans les syndi-cats dans lesquels les partis duFIT existent, etc. C’est mêmeune réalité que là où il y a desparlementaires du FIT (essen-tiellement à Neuquén; à Salta iln’y a que le PO) ils ne se sontpas mis d’accord sur la gestioncollective de ces élus.

Quatrième problème : leFIT comme front n’a existé pources élections que dans huit dis-tricts, il est vrai que dans plu-sieurs des plus importants :Buenos Aires, CABA, Cordoba,Santa Fe, Mendoza, Tucuman,Neuquen et Jujuy, en obtenant730 000 votes. Mais dans d’au-tres six districts il n’y a que lePO (avec 130.000 voix), danstrois il n’y a qu’IS (30.000) etdans un district il n’y a que lePTS. Cette disproportion dansles rapports de force à l’intérieurdu FIT, ajouté au fait que lescandidatures qui peuvent êtregagnées ont des militants duPO en tête, est la base desénormes contradictions quitraversent le FIT, et dont laperspective est de se multi-plier une fois passées les rê-veries électorales.

Nos 115.000 voix

La cinquième question estqu’en dehors du FIT le NouveauMAS s’est présenté et a obtenule chiffre non négligeable de 115000 voix entre quatre districts(Capital Fédérale, Buenos Aires,Córdoba et Neuquén). En com-parant nos scores dans cesquatre districts avec ceux du FIT(la seule comparaison valable),nous obtenons non pas une pro-portion de « 1000 à 1 » qui per-mettrai au FIT de se considérer« la seule gauche », mais uneproportion de 5 à 1, ce qui mon-tre que sauf pour Santa Fe (oùnotre parti n’a pas de légalitéélectorale, mais où le FIT n’estfort non plus) dans le centre dupays –le plus important stra-tégiquement – c’est absolu-ment ridicule de présenter leFIT comme « laseule gauche », en excluantnotre parti.

En résumé: un des phéno-mènes les plus importants duscore de la gauche est que surcinq voix que le kirchnerisme aperdu, quatre voix ont été gagnépar le FIT et un voix par le Nou-veau MAS. Il s’agit d’une réus-site énorme de notre parti qui

nous place, objectivement,comme une partie de plein droitde la frange qui a rompu par lagauche avec le gouvernement,et aucune auto-proclamation op-portuniste d’Altamira et de Pi-trola dans les médias ne pourranous arracher cette victoire.

1 Le Frente de Izquierda y de losTrabajadores (Front de Gauche etdes Travailleurs, FIT) est une al-liance électorale constituée par leParti Ouvrier (PO), le Parti des Tra-vailleurs Socialistes (PTS) et laGauche Socialiste (IS).

2 Rester sur des fermes critèresstructurels est la base pour la com-préhension d’un ensemble de contra-dictions quand il s’agit de l’évaluationdu score de la gauche et d’en finiravec les illusions auto-proclamatricesdes membres du FIT. Par exemple, duPO, qui a démesurément augmentéson hégémonie au sein du FIT. Le POest une organisation relativementforte au niveau territoriale, dans lemouvement étudiant et chez les en-seignants et les fonctionnaires, maiscependant dans son insertion ou-vrière et structurelle il est encore tropfaible. Ici est plus forte le PTS, qui ce-pendant apparaît stratégiquement surla défensive et n’a pratiquementaucun « front de masses ». Enfin, ISest une organisation qui languit, ca-ractérisée par une génération mili-tante vielle et est qualitativement plusfaible que les autres membres du FIT.

3 Cette réalité est la responsabi-lité surtout du PTS, qui a cédé cepoids au PO comme une concessionpour exclure le Nouveau MAS dufront. Pour ces élections ils ont laisséau PO les candidatures principalesdans les deux districts principaux dupays, ce qui transformé à Altamira etPitrola -candidat à député pour la pro-vince de Buenos Aires- en porte-pa-roles exclusifs du front; en intégrantnotre parti, le front aurait eu un autretype de contrepoids. C’est pour cela,que nous avons été obligés deconstruire en dehors du front et nousavons obtenu une victoire politiqueclaire à ce sujet dans cette élection,malgré la limite de ne pas avoir passéle seuil prohibitifs de 1,5 % pour par-ticiper aux élections générales.

4 La direction du PO elle-même adéfini sans rougir que le FIT est une« entreprise électorale ». C’est dansces termes que les camarades ontposé la question dans la seule réu-nion que nous avons eu cette annéepour essayer de rediscuter l’incorpo-ration du Nouveau MAS au FIT. Cettedéfinition transforme « toute lagauche argentine », selon Altamira,en une procession marchante et quine vise que l’obtention d’élus à toutprix.

En résumé: un des

phénomènes les plusimportants du scorede la gauche est quesur cinq voix que lekirchnerisme aperdu, quatre voixont été gagné par leFIT et un voix par leNouveau MAS. Ils’agit d’une réussiteénorme de notreparti qui nous place,o b j e c t i v e m e n t ,comme une partiede plein droit de lafrange qui a rompupar la gauche avec legouvernement, etaucune auto-procla-mation opportunisted’Altamira et dePitrola (FIT) dans lesmédias ne pourranous arracher cettevictoire.

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Lorsque la politique révolutionnairesurmonte un rapport de forces adverse

«La politique ré-volutionnaireen tant qu’ap-

plication « subjective »(dans le sens de faite parun sujet) à un champ dedéterminations objectivespeut déplacer des mon-tagnes dans la mesure oùelle acquière matérialitéen découlant des pré-misses de la réalité elle-même ; ou, comme ledemandait Lénine dansses Notes Philosophiquesà Hegel, où elle sachecomment attraper lesmaillons les plus fortesde la chaîne de réalitéelle-même »(Science et art de la poli-tique révolutionnaire).

Dans le cadre du phéno-mène objectif de tournure versla gauche d’une frange de l’élec-torat en rupture avec le kircher-nisme, notre parti a obtenu unscore historique : jamais dansson histoire le Nouveau MASavait obtenu un tel score, etmoins encore dans des condi-tions tellement défavorables ence qui concerne le degré d’ins-tallation, le ressources maté-rielles, l’accès à la TV, laquantité de militants et d’autrespar rapport au FIT, sans oublieren plus que le FIT est un frontélectoral de la gauche. C’estpourquoi les félicitations et lesdéclarations de vote que nousavons reçu d’activistes, de col-lègues, journalistes et bien d’au-tres, militants d’autres courantspolitiques, y compris de nom-breux kirchneristes et d’autres.

Un exploit politique

C’est clair, les masses neparlent pas des scores de lagauche (ils parlent de Massa-candidat de l’opposition au gou-vernement-, des kirchneristes etpas grand-chose d’autre ; dansce sens, il faut garder les pro-portions: 95 % des électeurs ontvoté des forces bourgeoises).Mais par rapport à l’avant-gardeau sens large et un peu au-delà,le public est beaucoup plusinformé et célébré le score duFIT, mais est aussi étonné parle nôtre.

Ce qui nous ramène à l’ex-plication de notre score. Il y aplusieurs facteurs politiques et «structurelles ». Les facteurs po-litiques sont, sans aucun doute,la réussite de la politique élec-torale avec laquelle nous avonsfait face à la campagne. Notreparti ne pouvait pas faire unecampagne avec la globalité quele FIT (qui, d’une certain façon,n’en a pas profité ce fait) pouvaitavoir.

Nous avons choisi, au lieude cela, de mettre en place desaxes politiques très clairs decampagne reflétant les revendi-cations qui touchent plus profon-dément la classe ouvrière, lajeunesse et le mouvement desfemmes, tout en profitant de lascène électorale pour dénoncerles responsables politiques deces fléaux, toujours du point devue d’une opposition de classeau gouvernement Kirchner etpas d’adaptation aux règles durégime politique. Quelque choseque le FIT ne pourrait pas affir-mer honnêtement de sa proprecampagne, marquée de touscôtés par des traits liés à l’ob-

tention d’élus à tout prix.Cette utilisation révolution-

naire de la scène électorale amontré une force considérablepar rapport à nos possibilitésmatérielles réelles, comme c’estle cas si une politique révolution-naire correcte est formulé et sil’on la considèré comme un le-vier de transformation, en s’ap-puyant sur certains situations.

Nous avons ensuite les fac-teurs matériels. Nous avons faitface à l’élection de 2011 avecl’exclusion sans principe du FITet avec une seule légalité élec-torale : celle de la province deBuenos Aires. Nous ne nousavons pas laissé impression-ner par l’adversité électorale,le très mauvais score que nousavons obtenu, ou par le scoredu FIT, qui, dans ses versionsplus opportunistes, a préditnotre « disparition ». C’est uneautre grande leçon de la lutte ré-volutionnaire : ne jamais selaisser impressionner par lapropagande de l’ennemi declasse ou par les adversairesde la gauche : la réalité est tou-jours moins plat et homogèneque comme les propagandistesveulent la présenter ; elle est cri-blé de contradictions et posetoujours des points d’appui pourun développement futur ou pourinverser une situation défavora-ble. Ce qu’il y a derrière lesphénomènes est un ensemblede développements opposés,« un tas de processus dialec-tiques qui se déroulent dansun monde inachevé » (ErnstBloch) qui donnent toujoursles points d’appui pour unelutte si celle-ci est vraimentrévolutionnaire.

Face à cette adversité —

qui a eu, cependant, l’avantagede durcir les nouvelles généra-tions militantes du parti – nousavons voté un plan dévoué detravail qui nous a permis d’arri-ver à cette élection avec la léga-lité électorale dans quatredistricts différents, à très peuconditions pour demander la lé-galité nationale. Ainsi, une partieimportante de la jeunesse denotre parti a milité tout l’été der-nier pour obtenir la légalité dansla province de Cordoba, où nousavons fait une élection histo-rique.

Parallèlement à cela, notreparti a développé une grandecampagne militante, en cher-chant à atteindre des secteursplus larges que l’habituel et enutilisant de la façon la plus effi-cace nos ressources limités. Cedernier est également un desarts politiques : l’utilisationmaximale des ressources li-mitées.

C’est une loi du développe-ment de nos partis : les sautsqualitatifs dans la constructiondes organisations révolution-naires se produisent grâce à laconcentration de tous les res-sources politiques dans unpoint unique (comme Clause-witz recommandait dans l’art dela guerre) en cherchant à fairece saut avec une politique quiest forte parce qu’elle part desconditions matérielles et objec-tives

Un bilan de l’élection districtpar district

Dans la Capitale Fédéralenous avons obtenu un peumoins de 20 000 voix, un chiffrechoquant dans une proportion

Journal Socialismo o Barbarie N°257, 15/08/2013Par Roberto Sáenz

Le bilan du Nouveau MAS

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d’un à quatre avec le FIT eten rude concurrence avecd’autres alternatives : LuisZamora (figure centrale ettrès reconnue du vieux MASet deux fois Député Natio-nal), Lozano (membre duCongrès national actuelle-ment) et le MST (dont le can-didat, Bodart, est législateurpar la ville).

Pour l’évaluation de nosrésultats en Capitale Fédé-rale on ne peut pas ignorerque nous n’avons jamais eudes voix dans ce district :notre base était pratiquementnulle. Avec une accumulationhistorique moindre que celledes membres du FIT, maisavec un poids croissant dansla jeunesse et l’impact denotre travail dans le mouve-ment des femmes avec LasRojas, notre organisation fé-ministe, nous avons atteintprès de 1 % des voix.

Il est vrai que nousn’avons pas atteint le seuilprohibitif de 1,5 % pour seprésenter aux élections natio-nales, ce qui aurait couronné unénorme effort militant. Cepen-dant, nous avons installé ledébat du droit à l’avortementet la figure de notre camaradeManuela Castañeira, candidateà Député Nationale de façonpublique, visible et objective etnous avons fini la campagneavec du prestige et de la visibi-lité dans des secteurs trèslarges, bien au-delà des limitesstructurels de notre parti: unefrange minoritaire, mais demasses.

Le défi maintenant estd’étendre notre parti dans toutela capitale, aussi bien que de lefaire beaucoup plus organique,non seulement dans la jeunesselycéenne et universitaire, maisaussi dans des secteurs crois-sants de la classe ouvrière.

Dans la province de Bue-nos Aires, nous avons obtenuprès de 70 000 votes, un chiffresemblable à celui obtenu parle PO, quand il s’est présentétout seul dans ce district en2009. Même le front Podemos(intégré par l’Union Populaire, leParti Communiste Révolution-naire et le Mouvement Socialistedes Travailleurs) n’obtenu quequelques voix de plus, un échecnotoire étant donné qu’ils étaient

trois partis.Notre camarade, Hector

Heberling, a été donc encoreune fois à la tête d’une liste quia obtenu des milliers de voix,comme cela a été le cas lorsqu’ila été à la tête du Front deGauche et des Travailleurs So-cialistes en 2009 (intégré à cetteoccasion avec le PTS et IS). Il atombé en 2011, mais il a resurgidans cette élection, en créant demeilleures conditions pour avan-cer dans son installation commefigure publique, en plus d’une vi-sibilité accrue entre les frangesde l’avant-garde de travailleursde notre camarade Jorge Ayala,délégué syndical à l’usine FATEet de Laura Granillo entre lemouvement des femmes et lajeunesse étudiante de la pro-vince.

Celui de Cordoba est, peut-être, le score le plus représenta-tif de la définition d’exploitpolitique que nous avons donnéà notre élection. Là, la dispro-portion totale avec le FIT (qui estdirigé par une figure comme Li-liana Olivero, député provincialeet dispose d’une base électoraletrès élevée) a été surmontée, enobtenant presque 25 000 voix :une proportion de quatrecontre un avec le FIT dans ladeuxième province ouvrière

du pays !C’est peut-être dans ce

district stratégique que leNouveau MAS a obtenu sonscore le plus important, ce quicrée de meilleures conditionspour faire avancer notre ex-tension nationale. Une pro-vince avec une compositionouvrière et étudiante straté-gique qui est dans le centredu pays et dont l’influences’étend dans tout le nord dupays.

Le fait d’avoir consolidéune section de jeunes dansce province, qui a fait une tellecampagne électorale ouvredes énormes possibilités deconstruction nationalespour le Nouveau MAS entant que parti d’avant-garde.

Enfin, dans le cas deNeuquén c’est là où nousavons été le plus proche desurmonter le seuil prohibitif de1,5%. Compte tenu de l’instal-lation que le FIT à là-bas, lescore obtenu a été extraordi-

naire : nous avons obtenu envi-ron 4 500 votes dans desconditions très inégales. Il estvrai que la figure d’AlcidesChristiansen, ex-dirigeant ou-vrier du bâtiment et candidat àDéputé National, dépasse deloin la portée de la section duparti. Toutefois, ici nous avonsaussi arrivé à briser l’inertie po-litique et électorale, en installantle Nouveau MAS dans la pro-vince d’une manière qualitative-ment supérieure à toutetentative précédente. Il convientde rappeler que la seule fois quenous avons pu présenter Alcidesdans la province comme candi-dat avec le Nouveau MAS a étéen 2011 avec la candidature aumaire, avec seulement 1 000votes ; nous avons maintenantmultiplié presque par cinq cescore et nous avons établi unrapport de 4,5 contre 1 avec leFIT.

Vers la construction du Nou-veau MAS comme partid’avant-garde

Que, dans ces conditionsdéfavorables, nous ayons réussià briser l’inertie, en se frayant unchemin parmi la gauche et enobtenant une proportion 5 à 1avec un FIT en pleine ascension

dans les principaux districts estun exploit politique électoralqui montre les progrès énormeset la consolidation du projet so-cialiste révolutionnaire qui ex-prime le Nouveau MAS. Lalimite a été, nous sommesconscients de cela, que nousn’avons pas été en mesure d’ob-tenir le 1,5% demandé dansaucun des quatre districts oùnous avons eu des candidats,bien que nous étions trèsproches à Córdoba et Neuquén.

En tout cas, les tâches dumoment sont très claires : lesélections primaires ayant passé,les élections d’octobre sont en-core très loin et il s’agit mainte-nant de retourner aux activitésquotidiennes et de lancer unplan de construction offensif duparti. Nombreux camaradesnouveaux nous ont donné uncoup de main dans la campagne; nous devons appeler tousces camarades à rejoindrenotre parti, en commençantpour discuter le bilan desélections.

Pour cela, il y a deux tâchesprincipales : assurer la distribu-tion et la vente de notre hebdo-madaire et ouvrir nos comités -ou en créer des nouveaux - pourl’incorporation de plus de cama-rades, dans la perspectived’étendre au niveau nationalnotre parti.

Nous devons faire ceciavec la compression que nousavons fait un pas d’importancevers l’installation du NouveauMAS comme organisationd’avant-garde à part entière. Ànotre Congrès qui s’est tenue ledernier mars nous avons discutéqu’une des conditions pour setransformer en un parti d’avant-garde était d’avoir une baseélectorale propre. Une réalitétranscendante de l’élection de lagauche, c’est que notre parti aétabli des proportions avec leFIT dans ce domaine. Il s’agitd’une victoire énorme que, encas de se consolider, nous per-mettra d’avancer dans le défique nous avons entrepris denous transformer, au sensconstructif, en un parti d’avant-garde. Cette élection est uneétape de grande importancedans cette perspective.

Que, dans cesconditions défavora-bles, nous ayonsréussi à briser l’iner-tie, en nous frayantun chemin parmi lagauche et en obte-nant une proportionde 5 à 1 avec un FITen pleine ascensiondans les principauxdistricts est un ex-ploit politique électo-ral qui montre lesprogrès énormes etla consolidation duprojet socialiste révo-lutionnaire qui ex-prime le NouveauMAS.

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La campagne du Nouveau MAS

La campagne électorale du NouveauMAS se fait sentir dans la banlieueNord et Ouest de Buenos Aires

Les compagnons de la régionNord du Grand Buenos Airessommes vraiment très

contents de l’impact de la cam-pagne électorale du NouveauMAS dans la région. Noussommes nourris de la satisfactionqui donne la réponse du peuple,et nous redoublons les efforts pourque la voix pour les droits des tra-vailleurs, les jeunes et les femmespuisse atteindre de plus en plusde gens et pour que tous nos ef-forts mènent à que le NouveauMAS surmonte le piège des Pri-maires Obligatoires1 et puisse êtreprésent dans les élections géné-rales d’Octobre.Que la voix des travailleurssoit entendue par les tra-vailleurs

Ces dernières semaines,nous avons fait un effort militanténorme pour diffuser les proposi-tions du parti parmi les travailleurset travailleuses. C’est pourquoinous avons été dans des zonesde concentration ouvrière tels quePanamericana et Route 197, Pa-namericana et Route 202 (tousdeux zones de concentrationd’usines), Virreyes, Carupa,Puente Saavedra, San Miguel,José C. Paz, Moreno, Boulogne,Munro et Grand Burg (quartiersouvriers), etc. Là nous avons dis-tribué des tracts avec nos propo-sitions, qui ont été reçues avecbeaucoup de sympathie; en parti-culier la campagne contre la taxesur les salaires a été très bienreçue parmi les travailleurs.

L’effort des militants et ceuxqui soutiennent nos propositionset qui sont venus nous donner uncoup de main a été énorme, doncavec froid ou chaleur, le matin,l’après-midi et le soir (commedans 197 et Panamericana oùnous étions au début de la mati-née), nous avons été là pour dé-fendre des idées qui servent à laclasse ouvrière.

C’est pourquoi nous avonsamené également la campagne àla porte des usines où les travail-leurs et les travailleuses de FATE,Pirelli, Ford, Pilkington, Metalsa,Kraft, Lear, Donelley et EmFer ontreçu nos tracts, conscients que la

politique du Nouveau MAS estconforme à leurs intérêts.

Ainsi, nous avons diffusé lespropositions qui étaient renforcéespar des spots télévisés et de radioqui ont fait que nous soyonsconstamment reconnus. Il y a euaussi des situations particulièresoù les travailleurs reconnaissaientleur collègue comme candidat,comme c’est le cas avec Jorge «Chupete» Ayala délégué syndi-cale à FATE et candidat à DéputéNational, et étaient contentsd’avoir la chance de voter un tra-vailleur « en chair et en os » pourles représenter au Congrès.Une campagne pour la jeu-nesse

Cette élection a une particu-larité qu’aucune élection du passén’a pas eue : les jeunes de plus de16 ans ont le droit de voter. LeNouveau MAS a défendu ses pro-positions parmi les jeunes, quenous considérons des sujets pen-sants et non des « clients »,comme les considèrent les partispatronaux. Cette campagne a engénéral la particularité de vendredes « produits » et pas des projetspolitiques. C’est dans ce sens quenous avons décidé, à contre-cou-rant, de présenter des proposi-tions aux jeunes sur l’éducation, lasanté, la sexualité et que nous lesproposons de se rebeller et defaire entendre leurs revendica-tions pour changer la réalité qu’ilsvivent, de s’identifier avec des ac-tivistes et militants comme Ma-riano Ferreyra2, CarlosFuentealba3 et d’autres, et pasavec des figures médiatiquescrées artificiellement. Pour cela,nous avons amené nos proposi-tions aux lycées de San Fer-nando, Tigre, Vicente López, SanMiguel afin que les jeunes aient lapossibilité de choisir les meilleuresidées et pas les personnages detélévision qui leur semblent « sym-pathiques ».Que la voix des femmes quiluttent soit entendue

Le Nouveau MAS accordeune grande importance aux pro-blèmes des femmes, et c’est pour-quoi notre organisation féministe

Las Rojas est à chaque endroit oùleurs droits ne sont pas respectés,et les élections ne nous ont pasempêchées d’être dans la mobili-sation au Congrès National en so-lidarité avec la fille chilienne violéedont la réalisation d’un avortementest niée par les autorités de cepays. Puisque nous comprenonsbien que les problèmes du mou-vement des femmes sont très im-portants (ce qui ne semble pascomprendre le Front de Gauche etdes Travailleurs –FIT- qui ne parledu droit à l’avortement que trèspeu de fois) nous avons diffusénos propositions parmi desfemmes de régions comme SanIsidro, Caseros, Tigre, San Fer-nando, San Martín, Moron, Pa-checo, etc., où elles ont vuqu’elles ont la possibilité de voterune activiste féministe qui défendeleurs droits, la candidate à Dépu-tée Nationale pour la province deBuenos Aires, Laura Granillo. Ilfaut aussi souligner les nombreuxcommentaires que nous avonsreçu de part tant d’hommes quede femmes sur notre candidate àDéputée pour la Capitale ManuelaCastañeira, qui commence à êtrereconnue au niveau nationalcomme une figure de la lutte fémi-niste.Que les élections ne te dé-tournent pas de la lutte

Nous, les partis des travail-leurs, nous organisons avec notrepropre militantisme et sans lacontribution économique des pa-trons qui permet que « d’autresmilitent pour vous ». Nous militonset luttons pour des convictions, etpas pour des compensations éco-nomiques, mais cette réalité im-plique un effort énorme et bienplus encore à une époque oùd’autres peuvent « acheter dixfois » chaque activité militante quenous faisons (tracts, affiches, pu-blicités, etc..). Nous, les activistes,devons également continuer à tra-vailler et étudier, et nous devonsêtre à tous les combats qui se po-sent pour le mouvement ouvrier,les jeunes et le mouvement desfemmes. C’est pourquoi être aumilieu de la tempête électorale nenous a pas empêché de soutenir

fortement la lutte des travailleurset des travailleuses de Kromberg,en faisant partie du blocage deroute réalisé par ces ouvriers, etde la répression subie dans lecomplexe industriel de Pilar (oùl’entreprise fonctionne) et d’autresactivités que les travailleurs ontréalisé ; ce ne nous a pas empê-ché de répudier le licenciement ar-bitraire subi par un travailleur deFATE et d’assister aux mobilisa-tions appelés sur ce sujet ; ce nenous a pas empêché de participerà l’occupation de plus de deux se-maines du lycée « Etats-Unis » deSan Martin, où les étudiants sesont battus pour une meilleurequalité de l’enseignement et ils ontgagné. Comme nous avons ditplus haut, ce ne nous a pas em-pêché de nous mobiliser pour lecas de la fille chilienne dont la réa-lisation de l’avortement est nié.

En résumé, dans le NouveauMAS nous considérons les élec-tions comme un important champde bataille où se battre pour lesdroits des travailleurs, les jeuneset les femmes, et c’est pourquoinous demandons ton vote pourque quelqu’un comme toi soitCongrès National au lieu des cri-minels de toujours ; mais nouspensons que c’est une grosse er-reur laisser les luttes dans la ruepour « plus tard »…

Pour tout cela, n’oublies pas :le 11 Août, votes les candidats duNouveau MAS pour que nouspuissions en Octobre disputer unsiège dans le Congrès National.

1 Les Primaires Obligatoires,légiférées par le gouvernementKirchner, obligent les partis à ob-tenir le 1,5% des voix pour pouvoirparticiper aux élections législa-tives.

2 Etudiant et militant du PartiOuvrier, tué par un groupe dechoc des bureaucrates du Syndi-cat de Cheminots lors d’un blo-cage de voies ferrées en 2010.

3 Professeur et militant duNouveau MAS, tué par la répres-sion policière lors d’un blocage deroute en 2007, dans le cadred’une grève de professeurs.

Journal Socialisme ou Barbarie N°255, 01/08/2013Par Diego Bouquet

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Débats dans la gaucheALTAMIRA, LANATA ET LA CORRUPTION

Critique des positions«libérales républicaines»«Le « gros put-

schiste » [Lanata1]n’est pas seul .Le

gouvernement a com-mencé à improviser, aprèsl’échec du 7D2, une offen-sive de prise de contrôle dela justice et de limitationdes droits individuels quiaffecte les travailleurs, quipourraient déboucher surun conflit entre les pou-voirs. Le gouvernement n’apas la force de défier un ju-gement défavorable de laCour Suprême de Justice,soit en ce qui concernel’élection du Conseil de laMagistrature ou le désin-vestissement que Clarin re-fuse d’effectuer. Mais s’ilaccepte ces jugements ilmet en risque sa capacitéde gouverner. Les coups etles auto-coups [d’Etat]s’engendrent réciproque-ment ; Alfonsin et De la Ruaont essayé de se sauver enexécutant l’état d’excep-tion. Simplement cette dé-cision s’est retournéecontre eux » («Le gros put-schiste», Jorge Altamira,journal Prensa Obrera1270).

Au fur et à mesure que le POs’enivre avec ses possibilités élec-torales, il a développé une ten-dance à approcher chaqueproblème national non pas d’unpoint de vue de classe, mais parun glissement politique et idéolo-gique « républicaine-libéral » dugoût des secteurs caceroleros3 dela classe moyenne-haute et desjournalistes qui les soutiennent.Même si le PO avait déjà participéaux mobilisations pour la sécurité(c’est-à-dire, pour plus de police),ou dans le conflit dans le conflitentre le gouvernement et le patro-nat agraire en 2008, il n’a pasréussi à esquisser une position in-dépendante contre ces deux sec-teurs patronaux, pendant ladernière période ce erreurs ontdonné un saut de qualité. En té-moignent ses positions par rapportà la grève de gendarmes de l’an-née dernière, qu’il a soutenu, ou ausujet des négociations du gouver-nement avec Iran, où le PO s’estallié avec des associations juives

sionistes du pays. Nous débattrons ici avec le

PO en défendant l’idée que l’af-frontement avec le gouvernementKirchner doit se faire à partir desdrapeaux de la classe ouvrière eten essayant de faire peser dans labalance de la lutte des classes, untroisième pôle : la classe ouvrière,ses besoins et ses luttes.Un gouvernement bour-geois assez normal

Une grande partie des pro-blèmes commence avec la carac-térisation du gouvernement deCristina Kirchner. L’opposition pa-tronale et ses scribes aiment leprésenter comme un gouverne-ment « totalitaire », « fasciste » oudes mots de ce genre. À notreavis, c’est faux. Celui du kirchne-risme est un gouvernement capita-liste qui n’a même pas les traits dunationalisme bourgeois du XXIesiècle, selon la forme du chavismeaujourd’hui en crise au Venezuela; rappelons que le bonapartismesui generis a été la définition deLeón Trotsky pour ce type de gou-vernements au siècle dernier.

C’est plutôt un gouvernementdémocratique bourgeois asseznormal, mais que comme un pro-duit de la rébellion populaire de2001 a été obligé de introduire iciet là des modifications dans lefonctionnement « néolibérale clas-sique » de l’Argentine (qui est unerépublique bourgeoise), précisé-ment pour réabsorber les mobilisa-tions du début du siècle. Cesmodifications ont été en rapportavec une intervention de l’Etatdans l’économie plus importanteque d’habitude (« régulation poli-tique » de certains aspects decelle-ci), mais sans mettre enplace, en tout cas, une circons-tance capitaliste d’État de type vé-nézuélienne ou bolivienne commela corporation médiatique essayede le présenter.

Parallèlement à cela, le gou-vernement a accordé des conces-sions limitées ou des « réformes »,la plupart des fois obtenus commerésultat des luttes d’aujourd’hui ouhistoriques venant d’en bas, et quilui ont permis de se légitimer, tellesque la réouverture des jugementsaux militaire de la dernière dicta-ture, le mariage pour tous et pasbeaucoup d’autre.

Aujourd’hui les limites de ces

soi-disant « reformes » apparais-sent brutalement dans la crisestructurelle que le « modèle »kirchneriste traverse, qui au défautd’introduire des modificationssubstantielles dans l’ordre écono-mique social capitaliste semi-colo-nial du pays, a fait que les vieuxproblèmes de l’Argentine retour-nent sous la forme d’une « fin decycle » qui démasque tous les li-mites du kirchnerisme. Les des tra-gédies de l’ancien Sarmiento4, duréseau ferré en général, le déficiténergétique, les inondations etd’autres, sont les preuves de ceque nous disons. Face à cettecrise il y a deux issues possibles àla crise du kirchnerisme. Une, celleque les courants socialistes révo-lutionnaires défendons, qui vise àmettre l’accent sur un angle declasse, anticapitaliste, face aux li-mites de ce essai frustré de gou-vernement bourgeois« progressiste ». L’autre, celle quiexpriment des courants comme lePO, qui dessine une capitulationau climat idéologique imposé parl’opposition patronale et la corpo-ration médiatique, qui privilégientun agenda « libérale » et « républi-caine » pour aborder les pro-

blèmes.A partir d’une caractérisation

de l’Argentine selon laquelle nousvivons une « dictature » qui « res-treint les droits individuels» et pré-pare « un coup ou auto-coup[d’Etat] », ils défendent l’idée d’unretour à la normalité qui laisse dé-finitivement derrière les héritagesde la révolte de 2001. Ceci seraitfait à travers le retour à la démo-cratie bourgeoise dans son sens leplus classique et libérale.

Idéologiquement, c’est un faitavéré que ce « libéralisme républi-cain » influe sur l’opposition patro-nale, de centre-droite ou decentre-gauche.Mais la gravité del’affaire c’est que la même chosese passe maintenant avec le FIT,où le PO est maintenant hégémo-nique5 et se conduit avec des ca-ractérisations comme celles quenous avons cité au début de cet ar-ticle : le coup et l’auto-coup d’Etatserait une possibilité immédiate ; la« réduction des droits individuels »« l’Etat d’exception » aussi…

Dans un tel contexte, la poli-tique correcte serait un « front uni» contre les coups d’État : de là àparticiper à une prochaine mobili-sation de la droite « républicaine »

Couverture de l’hebdomadaire satirique «Barcelona»,avec une photo de Lanata et la phrase «Je viens pour

l’offre d’emploi à Clarin»

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il y a peu de distance ! Mais unetelle possibilité n’existe que dansles têtes des camarades du PO etde ses alliés du FIT.

Il semble que l’approched’une opposition de classe intran-sigeante au gouvernement deCristina n’est défendue que par leNouveau MAS.Corruption, Etat et capita-lisme

De la définition du type degouvernement que l’Argentine aaujourd’hui, se dégage l’approched’une série de problèmes qui pro-duisent des divisions entre ceuxd’en haut. Nous parlons, entre au-tres, des questions telles que lacorruption.

Les allégations de corruptionau sein du parti au pouvoir sonttrès graves. Une autre marque dela fin du cycle que le kirchnerismetraverse. Au fond, Lázaro Báezn’est qu’un cas parmi les autres decorruption kirchneriste ; une sortede représentation de tout ce quela soi-disant « bourgeoisie natio-nale » peut réprésenter. Les allé-gations n’ont pas commencé aveclui. Beaucoup plus graves sontcelles qui pèsent sur le coupleKirchner lui-même : celles qui dé-montrent leur enrichissement àtravers l’affaire immobilière depuisleur jeunesse, dans la province deSanta Cruz. Ou les très graves al-légations concernant les affairesavec l’ancienne gravure Ciccone,qui touchent le Vice-PrésidentBoudou dès le premier jour de sonadministration. Ajouté à cela est lecas de Baez, qui a la particularitéd’avoir touché l’ancien présidentNéstor Kirchner, dont Baez était leprête-nom.

Quels est la base de ces casde corruption ? C’est assez simple: les affaires qui s’appuient sur lepouvoir politique ou à partir del’obtention de postes clés dansl’Etat. Ce croisement entre affaireset politique est typique où il y a uneplus grande intervention de l’Étatdans l’économie, comme c’est lecas actuellement, et c’est là queLanata s’appuie aujourd’hui pourfaire ses allégations de corruption.

Cependant, ce qui n’est passignalé est l’angle avec lequel La-nata fait ses allégations de corrup-tion, qui reste implicite. Son avisn’est pas naïf : dans le cadre del’idée générale que le problème enArgentine est le « capitalisme decopinage » qui domine aujourd’huisous Kirchner, la solution serait derevenir au « capitalisme tradition-nel de libre marché », où la poli-tique et les affaires sont «strictement séparés » et doncvoilà, fin à la corruption.

Le problème est quand uneapproche de ce genre, libéral etrépublicain, est formulée par lagauche ; c’est le cas d’Altamira :« Les allégations de corruption po-litique sont une arme pointue. Sielles sont servies avec humourelles peuvent être mortelles. Ilsdésacralisent l’État, qui prétend àavoir été désigné par la volonté dupeuple pour gouverner comme unSaint Père au-dessus des contra-

dictions de la société. Lutter contreces allégations est simplementréactionnaire, car il protège lespires aspects du pouvoir et parcequ’il ne sert pas à arrêter sa dé-composition. Les ignorer est stu-pide, parce que leurs effets sontirréversibles comme l’eau qui s’in-filtre dans le sol. La corruption estinhérente à l’Etat, qui est le mono-pole d’une bureaucratie qui est auservice de la classe dirigeante »(Prensa Obrera, journal du PO,idem).

Altamira ne se pose jamais laquestion de l’angle avec lequel La-nata mène ses allégations de cor-ruption et comment celles-cipourraient être réorientés dansune perspective anticapitaliste. Lechef du FIT ne peut pas le faire,tout simplement parce qu’il part dedéfinitions insuffisantes et donc li-mitées des bases sociales de lacorruption. C’est clair qu’il ne fautpas « lutter » contre les allégationsde corruption du pouvoir, ni es-sayer de les ignorer pour défendreun gouvernement bourgeois, quelque soit son signe, libéral ou« progressiste ». Mais une autrechose est de perdre de vue qui faitces allégations et avec quel carac-tère. Parce que les allégations deLanata sont marquées par la dou-ble morale typique de la politiquebourgeoise : voir la paille dansl’œil du voisin et ne pas voir lapoutre dans le sien. Il est clair queses allégations sont une critiquedu « capitalisme de copinage »,mais menée, en fait, pour la dé-fense du « capitalisme en général»: celui du marché libre que sesemployeur du groupe médiatiquesoutiennent ! De là que sa critique

ne pourrait être jamais contre tousles capitalistes, mais seulementcontre quelques-uns et, de sur-croît, en termes de pouvoir écono-mique, contre les plus faibles.

A ce problème qu’Altamira nedénonce ni signale, s’ajoute unautre plus « théorique » pour ainsidire : le lien entre la corruption etl’Etat ou le régime politique, enévitant de signaler que les racinessociales profondes de la corrup-tion bourgeoise, existent dans lecapitalisme en soi. Cette conces-sion majeure sur l’éducation poli-tique des exploités a le dangerd’être fonctionnel à l’opposition pa-tronale. Elle fait croire que la cor-ruption est inhérente seulementaux Kirchner et pas à tout gouver-nement capitaliste dans l’Argen-tine et dans le monde. Elle faitoublier que pratiquement toutegrande fortune a eu des phasesou étapes de « l’accumulation pri-mitive » et qu’il n’y a aucune accu-mulation de ce type sanscorruption, pillage, appropriationde terres ou de la richesse despeuples et un long etcetera. Ceuxqui emploient Lanata n’ont pasconstruit une partie de sa richesseen saccageant, par exemple, lesterres de la Pampa Humide qu’ilsont volé aux indigènes sous laCampagne du Désert de Roca ?

Notre «professeur trotskiste»semble oublier celles-ci et autresvérités fondamentales, tout sim-plement parce que l’angle poli-tique qu’il transmet au PO et auFIT n’est pas d’opposition declasse, anticapitaliste, au gouver-nement Kirchner, mais un anglequi menace à chaque étape à de-venir vulgairement libéral et répu-blicain.L’opposition au gouverne-ment doit être d’un point devue de classe

Il y a quelques décennies Mil-ciades Pena, historien marxiste,défendait une approche de laclasse pour analyser les nationali-sations du péronisme. RodolfoPuiggrós, politicien péroniste degauche, lui répondait que c’étaitune erreur de « demander une ap-proche de la classe dans un ba-teau qui naufrage ». Avec lapreuve des faits historiques, nouspourrions même dire, par exem-ple, que les enquêtes menées ence qui concerne le naufrage du Ti-tanic montrent qu’au fur et à me-sure qu’on descendait dansl’échelle sociale des classes danslesquelles l’équipage du navireétait divisé, le nombre de décèsaugmentait de façon géométrique.Laissant de côté les tragédies, di-sons que la tentative opportunistedu PO de gagner les faveurs desecteur de l’électorat, sans impor-ter d’où ces secteurs viennent eten diluant l’angle de classe de lapolitique révolutionnaire, et indé-fendable.

Aujourd’hui, la tâche face àces élections est de dénoncer legouvernement par la gauche, pourrapprocher les secteurs qui ontcommencé à faire de façon plusou moins « accéléré » une expé-

rience avec celui-ci aux positionsdu socialisme révolutionnaire. Cen’est pas question de faire ceci enrestant sur des positions abs-traites, ou en mettant un signed’égal entre les différents courantsbourgeois en oubliant que celuiqui gouvernement le pays au-jourd’hui est le kirchnerisme et quel’opposition a encore une largechemin pour construire un « Ca-priles » en Argentine.

Mais si on ne veut pas appor-ter de l’eau au moulin de l’opposi-tion, si on ne veut pas rentrer dansla logique opportuniste de « obte-nir des voix à tout prix », si on veuttravailler de façon stratégique etpas réformiste, la seule alternativeest de défendre une opposition declasse au gouvernement Kirch-ner ; s’opposer au kirchnerismeavec les positions du socialismerévolutionnaire et pas celles du ré-publicanisme libérale « démocra-tisant » comme le fait le PO, enentraînant derrière lui ses alliésplus petites comme le PTS.

1 Lanata est un des plus connus journa-listes de la droite en Argentine. Aprèsavoir crée un journal pro-gouvernement,il s’est passé il y a quelques années augroupe Clarin, principal groupe média-tique de l’opposition au gouvernement,avec une émission télé dans laquelle ildéfend les idées du patronat et de ladroite « républicaine ».2 Le 7 Décembre était la date limite de lamesure judiciaire qui permettait à Clarin,de ne pas réaliser le désinvestissementobligé par la nouvelle Loi des Médiasapprouvé par le gouvernement. Cepen-dant, cette date a été un échec pour legouvernement, qui l’avait très publicité,parce que elle a démontré les effets trèslimités de cette Loi, qui a laissé le groupeClarin presque sans changementsmême après son application totale.3 Les « caceroleros », sont des secteursde la classe moyenne-haute qui se ma-nifestent contre le gouvernement enfrappant des casseroles, avec des re-vendications à droite comme le libremarché et la possibilité d’acheter desdollars, etc. 4 En 2012, un accident de train dû aumauvais état des vois ferrés et du trainlui-même a causé la mort de 51 per-sonnes.5 Nous avons déjà expliqué que le PO afinalement réussi à monopoliser les prin-cipales candidatures du FIT pour lesprochaines élections : députés en Capi-tal Fédéral et province de Buenos Aires,et de législateurs dans la Capital Fédé-rale. Dans ces conditions, l’appeler front« PO-PO » n’est pas un manque de res-pect, mais le plus proche de la réalité. Ilfaut ajouter aussi que le PTS a laissédans l’oubli ses fanfaronnades autour demener une « débat programmatique »dans le FIT, débat que nous croyonsavait été pensé dans le sens de mettredes limites aux glissements « libéraux-républicaines » de ses alliés. Avec lesprincipaux candidatures de ce front auxmains du PO, même s’ils arrivent à avoirdes élus, c’est évident que mettre ces li-mites est maintenant impossible : les as-sociés plus petits du FIT devrontdéfendre tous les stupidités que les can-didats du PO dissent dans la radio et latélé.

Cependant, ce quin’est pas signalé estl’angle avec lequelLanata fait ses allé-gations de corrup-tion, qui resteimplicite. Son avisn’est pas naïf : dansle cadre de l’idée gé-nérale que le pro-blème en Argentineest le « capitalismede copinage » qui do-mine aujourd’huisous Kirchner, la so-lution serait de reve-nir au « capitalismetraditionnel de libremarché », où la poli-tique et les affairessont « strictementséparés » et doncvoilà, on finit avec lacorruption.

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Débats dans la gauche

Où va le Parti desTravailleurs Socialistes ?

Un tournant opportuniste, sans abandonner les traits de secte,qui ouvre des éléments de crise

«Le système électo-ral qui gouvernenotre pays est an-

tidémocratique par nature,comme tout autre systèmebourgeois (...). Nous dé-nonçons tout cela systé-matiquement. Mais,malgré cela, nous utilisonsla tribune électorale pourdiffuser nos idées dans lescampagnes électorales etpour se battre pour dessièges qui soient des tri-bunes pour promouvoir lamobilisation et l’organisa-tion des travailleurs et desjeunes dans une perspec-tive révolutionnaire. LesPASO peuvent être utili-sées aussi avec ces li-mites » (Accords etdésaccords dans le Frontde Gauche et des Travail-leurs, FIT, 13 juin 2013,www.pts.org.ar)

Dans la dernière période lePTS a eu une série de traits etdes développements qui sem-blent avoir fait une synthèse. Lagoutte d’eau qui fait déborder levase a été sa position par rapportaux PASO. Les PASO sont unmécanisme électoral instauré parla dernière réforme politique légi-féré par Kirchner, qui met enplace des primaires ouvertes despartis politiques. Derrière l’excusede permettre à la population dechoisir les candidats de chaqueparti, les PASO servent en réalitéà empêcher la participation élec-torale de l’extrême gauche : il fautrecueillir 1,5% des voix aux pri-maires pour participer ensuiteaux élections générales. La plu-part des partis ne présententqu’un candidat aux primaires : levrai but de ce mécanisme estdans les faits d’éliminer l’extrêmegauche des élections. La propo-sition du PTS d’utiliser ces pri-maires prohibitives pour régler lerapport de forces au sein du Frontde Gauche et des Travailleurs

(FIT) a exprimé un saut qualitatifqui nécessite une explication. Envérité, ces tendances auto-pro-clamatrices et de gains superstructuraux à tout prix, s’expri-maient depuis longtemps, mais àpart les voix qui peut obtenir leFIT, nous voyons déjà dans cetteorganisation des éléments de dé-viation opportuniste, qui com-mence même à générer une criseinterne. Une adaptation opportu-niste

Les camarades du PTS ontsouligné que « lutter contre lesprimaires prohibitives n’est pascontradictoire avec les utiliserpour régler les candidatures » etque les primaires seraient « unmécanisme intéressant pour ré-gler démocratiquement le débatinterne sur les candidats ». Biensûr, faire une déclaration et laprouver sont deux choses diffé-rentes, et le PTS n’a pas apportéun seul argument, au moins enpublic, pour démontrer pourquoicela « ne serait pas contradictoire». Nous, le Nouveau MAS, avan-cerons nos arguments pour dé-montrer pourquoi cela estcontradictoire.

Tout d’abord, le PTS fait va-loir, dans un article qui se trouvesur leur site d’internet mais nonpublié en papier, comme s’il s’agi-rait d’un matériau interne, que lerégime et la loi électorale sont an-tidémocratiques « comme n’im-porte quel système bourgeois ».C’est une définition correcte dansl’abstrait qui cache une manœu-vre évidente : elle dilue dans uneaffirmation générale la naturespécifique de la Loi Electoralede Kirchner. Bien sûr que le ré-gime électoral a toujours été an-tidémocratique : le seuil de 3 %du registre électoral pour accéderà des sièges au parlement,l’énorme inégalité de moyens decommunication et des moyensmatériaux, presque prohibitifspour les expressions de lagauche révolutionnaire et les tra-

vailleurs, et bien d’autres formes,sans oublier de mentionner engénéral le caractère antidémocra-tique et trompeur du mécanismede « démocratie indirecte ». Enfin de compte, bien sûr, c’est une« démocratie » de classe, des ex-ploiteurs1 .

Mais lorsque la bourgeoisieet ses gouvernements (dans cecas le Kirchner, avec la complicitéde toutes les partis bourgeoiseset de la centre-gauche) imposentun mécanisme encore plus anti-démocratique, qui bloque la par-ticipation de la gauche encoreplus, la question ne peut pas sediluer de manière opportunistedans une définition générale.Tous les obstacles et les manœu-vres du régime que nous avonsremarqué plus haut sont unechose, mais une loi électoraleprohibitive qui met en place unseuil pour pouvoir même parti-ciper à l’élection générale(comme c’est le 1,5 % obtenuaux primaires qui est exigé pourparticiper aux élections géné-rales), déjà miné par les obsta-cles et les manœuvresanti-démocratiques est unechose totalement différente. Légi-timer ce mécanisme prohibitifspécifique en participant joyeu-sement sous l’idée que « il n’y aaucune contradiction » est uncas grave d’adaptation.

Bien qu’il ne les ait pasécrits, la direction du PTS a sûre-ment des arguments pour se jus-tifier. Un argument pourrait êtreque les primaires sont un « fait »,une « circonstance objective »pour les révolutionnaires, quin’ont pas d’autre option que departiciper. Cela est vrai... dansune certaine mesure. Par exem-ple, c’est vrai dans le sens qu’ilsencouragent à former des al-liances pour surmonter ce seuilprohibitif, comme le PTS a faitavec le PO dans le FIT et commenotre parti a défendu publique-ment. Ce que le PTS préfère ou-blier est qu’ils ont appliqué cesmécanismes prohibitifs contre

nous, pour nous laisser à côtédes élections et essayer ainsi derégler les relations générales desforces avec notre parti, en nousmettant dehors de la scène élec-torale grâce à l’utilisation d’une loibourgeoise prohibitive. Le PTS amême dit que nous allions « dis-paraitre » pour ne pas avoir capi-tulé aux conditions léonines qu’ilsvoulaient nous imposer, en profi-tant du fait que nous avions eudes difficultés pour obtenir la lé-galité électorale en 2011. Uneautre argumentation opportu-niste, parce que bien que lesélections soient très importantes,elles ne sont en tout cas qu’uneinstance tactique qui difficilementpeut définir le futur d’une organi-sation révolutionnaire.

Mais l’argument du PTS, ense cachant derrière la « réalitéobjective qu’on ne choisit pas »considère en fait les primairescomme un mécanisme déjà éta-bli et légitimé comme si leurexistence aurait des années etdes années, alors que la réalitéest presque le contraire. Il est vraiqu’aucune force bourgeoise n’aremis en question ce mécanismeantidémocratique, ce qui indiqueégalement que sa défense « desinstitutions et de la République »face à Kirchner, n’est que la dé-fense de la démocratie libérale etde la corporation judiciaire. Maisceux-ci ne seront que lesdeuxièmes primaires à être réali-sées dans l’histoire, il y avaitbeaucoup de doutes autour deleur réalisation, et il n’est pas sûrqu’ils survivront le gouvernementde Kirchner. Gabriela Römer,analyste politique bien connue,considère les élections en aoûtcomme « malgré tout, une étapevers la normalité » et ajoute: «Nous sommes aujourd’hui mieuxplacés comme citoyens face à unmécanisme qui clairement devraitaméliorer la qualité de cette dé-mocratie qui, non sans quelquesefforts, fait son chemin en mar-chant, comme dirait le poète Ma-chado » (La Nación, 23-6-13).

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C’est évident que s’il s’agit dequelque chose qui « fait son che-min en marchant », il n’est pas« consacré », comme l’affirme lePTS, en tant que mécanisme derenforcement du régime.

Dans ces circonstances par-ticulières, légitimer les primairesde part de la gauche (et les utili-ser contre les autres à forces degauche) semble un cas graved’adaptation opportuniste àl’un des mécanismes les plusantidémocratiques du régimepolitique, une situation à la-quelle le PTS arrive à cause dela soif de postes parlemen-taires.La « inexistence » dumouvement féministe

Un autre débat important àl’heure actuelle est le mouvementféministe. Une journée organiséepar la Fédération Universitaire deBuenos Aires a été réalisée ré-cemment à la Faculté de Méde-cine, où encore une fois le PTS adéfendu des positions ridicules,seulement explicables pour desraisons d’ordre interne et sansrapport avec le mouvement réel.

Nous ne développerons icique deux aspects du débat avecle PTS par rapport au mouve-ment féministe. L’un, que le mou-vement « n’existe pas » et l’autre,le programme à défendre. Un dé-veloppement particulièrementsectaire du PTS a été de défen-dre que « le mouvement féministen’existe pas », devant des comi-tés où il y avait des centaines dejeunes femmes réunies pour dis-cuter comment développer cemouvement. Nous allons exami-ner d’abord l’irréalité de cette af-firmation et ensuite les raisonsson existence.

En Argentine, le mouvementféministe s’est développé depuisde nombreuses années, etcomme beaucoup d’autres mou-vements, a eu une revitalisationet croissance après l’Argentinazode 2001. Au cours des dernièresannées et au-delà de leurs li-mites, des Rencontres Nationalesde Femmes se sont réalisés, cer-tains plus réussies que d’autres,qui réunissent jusqu’à 20 000femmes ou plus, en menant desmobilisations de masses àchaque opportunité, qui sont unfait politique dans la province res-pective et parfois à l’échelle natio-nale.

Mais il n’y a pas que cesRencontres. Font partie aussi dumouvement féministe des cou-rants de femmes de la Centralede Travailleurs de l’Argentine etd’autres syndicats, il y a « descampagnes nationales » qui sonten fait des groupes du mouve-ment des femmes liés au gouver-nement, plusieurs ONG qui,même si elles sont réformistes,participent au mouvement, desinstituts, des professeurs, des in-

tellectuels, etc.. Et, en outre, lesorganisations de gauche, le sec-teur le plus militant du mouve-ment. Pratiquement tous lespartis de gauche, au moins ceuxqui sont dynamiques, ont une or-ganisation de femmes liée à eux.Les Rouges, qui se sont très dé-veloppées grâce à la cohérencede leurs perspectives dans la der-nière période, est l’organisationde femmes lié à notre parti ; maisil y a aussi les femmes du PCR,le « Plénier de travailleuses » duPO, « Pain et Roses » du PTS,etc...

Si cela ne suffisait, au niveauinternational, et en accompa-gnant le cycle actuel des révoltespopulaires, il y a une nouvellesensibilité par rapport à l’oppres-sion des femmes et des minori-tés, qui a donné lieu à desdéveloppements de toutes sortes,tels que la rentrée en scène de lalutte pour le droit à l’avortement,l’approbation du mariage pourtous dans plusieurs pays et unlong etcetera qui comprend le dé-veloppement des mouvements etdes groupes de féministes sur lascène internationale.

Dans ces conditions objec-tives, dans cette réalité objective,comment peut-on dire que « lemouvement féministe n’existepas » ? Comme il s’agit d’une af-firmation objectivement impossi-ble à prouver, il faut trouver uneautre explication : une évaluationsubjective de la réalité qui apoussé dangereusement le PTSà abandonner de façon oppor-tuniste la lutte pour le droit àl’avortement. Parce que le PTS,incorrectement, avait presqueabandonné la lutte pour le droit àl’avortement et pour justifier cettedéfection opportuniste (avec l’ar-gument réformiste que « Kirchnerne le donnera pas ») il a décrétéque le mouvement féministen’existe pas. Inversement au cri-tère marxiste classique, pour lePTS ce n’est pas la réalité cequi détermine la politique, maisc’est la politique (opportu-niste), ce qui explique la « réa-lité », dans sa versionfanatiseuse à la PTS.

En outre, le PTS a, dans lemouvement des femmes, le pro-blème du programme étroit aveclequel il l’aborde, typique de cer-tain « réductionnisme trotskiste »du passé. Pour le PTS, l’oppres-sion des femmes comme tellen’existe pas ; ils n’existent queles problèmes des femmes ou-vrières. Bien sûr que les pro-blèmes des femmes ouvrièressont essentiels et configurent undouble ou triple oppression, à lamaison et au travail, et des mil-liers de problèmes liés à l’exploi-tation capitaliste des femmes. Encela, nous sommes d’accordavec le PTS.

Mais nous ne sommes pasd’accord avec ce qui est à la base

de son approche unilatéral et ré-ductionniste, à savoir : que, enfait, il semble que pour le PTS, lepatriarcat n’existe pas2. Le pa-triarcat est une institution an-cienne, basée sur un partageinégal des tâches entre hommeset femmes dans les sociétésd’État et de classe, qui existaitdéjà avant le capitalisme, maisqui a continué et s’est renforcéavec l’exploitation du capitalisme.Cette institution signifie que lafemme est subordonnée àl’homme, qui non seulement re-çoit un salaire plus bas et est plusexploitée, mais qui au sein de lafamille patriarcale occupe uneplace inférieure, qu’elle est res-ponsable des tâches ménagèreset de reproduction, que cetteplace subordonnée la rend vic-time de violence familiale, de fé-minicide et d’autres oppressions.

C’est cette réalité qui met àl’ordre du jour un programmeglobal contre l’oppression desfemmes : le droit à l’avortement,contre la violence oppressante,socialisation des tâches ména-gères, contre l’exploitation iné-gale du travail féminin. Autrementdit, un programme d’émancipa-tion de la femme dans le cadrede la lutte pour la révolutionsocialiste coud à coude avec laclasse ouvrière, son allié stra-tégique.

L’argument typique est quela gauche « ne s’intéresse pasaux femmes bourgeoises ». Maisce qui est oublié ici est que ces «femmes bourgeoises » obtien-nent des « compensations poli-tiques » pour ces relationsd’oppression (elles ont desfemmes de ménage, ils côtoientdes hauts fonctionnaires, etc.),mais en aucun cas elles ressou-dent le problème structurel dupatriarcat. Aborder le problèmede l’oppression avec une vision

étroite « de classe » dissout laquestion spécifique qui touche lagrande majorité des femmes ex-ploitées et opprimées et conduit àun programme réductionnistequi laisse de côté le 90 % desluttes réels du mouvement fémi-niste dans des cas de violencesexiste, de meurtres de femmes,de l’avortement et un long etce-tera.

C’est clair qu’on peut niertout cela et dire que le mouve-ment féministe « n’existe pas »,mais pas parce que c’est vrai,mais parce que d’une façon sec-taire et opportuniste à la fois onne fait pas partie des luttes quoti-diennes qui construit le mouve-ment, et c’est cela qui arrive auPTS.L’obtention de « profitspratiques » au détrimentdes perspectives géné-rales

L’expression et le résultat dece qui précède est l’obtention de« profits pratiques » au détri-ment des perspectives géné-rales, l’autre des mécanismestraditionnels de dérive opportu-niste.

Dans un autre texte, nousavons souligné la tension dialec-tique pressant aujourd’hui dans lesens des gains pratiques. D’unepart, le faible niveau encore dedéveloppement et de politisationde la nouvelle génération, qui,dans les conditions d’un redémar-rage historique mais avec unecrise d’alternative, ne croit passouvent dans les perspectives ré-volutionnaires et a une idée « ra-baissée » de la politique. Cettecirconstance subjective survientdans un contexte objectif : unepériode générale caractérisée pardes rébellions et sa résorption ré-formiste, où règne la démocratiebourgeoise, au-delà de déborde-

Le constraste entre les affiches du PTS et du Nouveau MAS. Danscelui du MAS, nous lisons: «Cristina, Massa et Stolbitzer gouver-nent pour les capitalistes. Contre l’impôt sur les salaires ». Danscelui du PTS on ne dit que «Cristian Castillo Député Provincial»

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ments ici et là.Dans ces conditions, renon-

cer à se pour battre pour les po-sitions qui peuvent être obtenues,serait tomber dans un sectarismecriminel et idiot, un ultra gau-chisme que nous rejetons abso-lument. Nous ne critiquons pasl’intention d’obtenir des postes deresponsabilité au niveau syndical,étudiant et électorale, que tousles courants révolutionnaires doi-vent apprendre à mener à bien.Ces postes signifient des placeset des représentations d’ensem-ble qui permettent agir, créer hé-gémonie et diriger et tout courantqui se considère révolutionnaire,si elle renonçait à eux, renonce-rait également à la possibilité dediriger des secteurs de plus enplus importants des exploités etdes opprimés, c’est-à-dire secondamnerait elle-même à êtreune secte minoritaire sans impor-tance. Cela signifie que pour lesrévolutionnaires il y a des pres-sions sur les deux côtés : l’oppor-tunisme, mais aussi le sectarismeinfantile (ou sénile) des sectes.

Or, ce qui ordonne ce pro-blème est la perspective avec la-quelle ces postes et cesreprésentations s’obtiennent : s’ils’agit des fins en soi, ou s’ils sontmis dans la perspective de trans-formation sociale et l’élévationpolitique et l’organisation indé-pendante de la classe ouvrière.Ils sont, évidemment, deux ap-proches très différentes. Et quandle Nouveau MAS critique le FIT, lePO et le PTS pour leur soif de« gains pratiques », nous necontestons pas l’expectative légi-time d’obtenir des élus au parle-ment (dont l’obtention serait uneconquête qui peut aider à élargirle poids politique de la gauche ré-volutionnaire vers des secteursplus larges), mais le réduction-nisme opportuniste avec le-quel la lutte pour ces élus estmenée.

Nous rappelons ici, parexemple, l’appel voilée (ou pas)d’Altamira, candidat à présidentpour le FIT en 2001, à voter Cris-tina pour la présidence mais voterle FIT pour les députés.

La proposition opportunistedu PTS de « profiter des pri-maires », seulement pour reculerplus tard avec des argumentspeu clairs, qui a démontré l’inco-hérence de sa politique, était pré-cisément une capitulation devantles mécanismes du régime, toutpour régler un combat interne surdes candidatures.

Parce que dans la perspec-tive générale que nous avons si-gnalé nous incluons,évidemment, l’éducation politiquede l’avant-garde. Et les justifica-tions opportunistes du PTS surles primaires ne parviennent qu’àdépolitiser la base de son parti,ou à les éduquer sur les critères

capricieux qui se retournentcontre eux, comme sous-produitde sa subjectivité et des erreursd’appréciation en ce qui concerneles proportions réelles deschoses.L’incapacité du PTS àconstruire hégémonie

Un autre cas grave de la si-tuation est l’approche du PTSdans les Plenaires Ouvriersconvoqués par le Syndicat desTravailleurs de Pneus de l’usineFATE contre la taxe sur les sa-laires. Il s’agit, de part des cama-rades de FATE, d’une initiativeextraordinaire au-delà de ses li-mites, qui est politique et nonseulement économique (bienque le PO essaye de les presserdans ce sens, suite à sa concep-tion selon laquelle ce sont les par-tis qui font de la politique, et lesouvriers ne luttent que pour des« revendications économiques »).Mais pour le PTS, une initiativequi vient du FATE ne tombe pasbien, parce qu’ils ont calomniécette extraordinaire expérience,en disant des bêtises comme que« les travailleurs de FATE ne lut-tent pas ».

Maintenant que la réalité lesa frappé, plutôt que de se corri-ger, ils ont fait une tournure sec-taire typique du PTS : ne prendreen compte d’abord la réalitédes choses, les expériencesréelles et développer une poli-tique révolutionnaire à partir deces expériences.

La réalité est qu’un secteur

d’avant-garde de la classe ou-vrière a essayé de faire un pasen avant, petit mais réel, dansun sens indépendant, qui remeten question un aspect central dela politique de Kirchner. Il s’agitd’une revendication qui avait étédéfendue à l’époque par laConfédération Générale du Tra-vail de Moyano, mais qui,comme c’est toujours le casavec les bureaucrates, s’estperdu derrière leurs prétentionsélectorales.

Le problème est que, quandun secteur réel fait un pas enavant, qui vaut plus que milleprogrammes, comme le disaitMarx, il s’agit d’essayer d’allerplus loin (ce que les militants duNouveau Mas voulons faire), etpas de se placer pratiquementcontre cette initiative. Ce n’estpas la première fois que le PTSagit comme ça. Il avait une posi-tion similaire par rapport aux As-semblées de Chômeurs, dansce cas parce que c’était le POqui était hégémonique ; il a re-fusé d’accompagner l’expé-rience de la campagne pour lajournée de travail de six heures,lancée par les camarades dusyndicat du métro (à ce moment-là c’était encore une directionsyndicale indépendante) ; ils onttotalement refusé d’appuyer l’ex-

périence de la liste 5, lutte declasse et antibureaucratique dansles élections de la Centrale desTravailleurs de l’Argentine, impul-sée par une assemblée généralede FATE, et maintenant ils sontaussi contre cette nouvelle expé-rience qui est mandatée par enbas par les travailleurs de l’usine.

En somme : dans chaqueexpérience réelle qui vient d’nbas et où ils ne jouent pas unrôle centrale, au lieu de soutenircette expérience pour ensuite lut-ter politiquement avec les autrestendances, ils s’opposent, mêmesi en faisant cela ils rejettent unpas en avant du mouvement réel.

Il s’agit d’un problème fonda-mental du PTS, lié à un aspect desa conception du parti : son inca-pacité à construire l’hégémo-nie. C’est un problème sérieux desecte croire qu’on est seuls, qu’iln’y a pas d’autres forces poli-tiques et sociales dans la réalitéavec lesquelles se mesurer etqu’il faut prendre en compte lorsde l’élaboration des politiques.

Le concept d’hégémonierenvoi exactement à cela : àl’existence d’autres forces so-ciales et politiques qui doiventêtre influencés pour faire pro-gresser les objectifs révolu-tionnaires. Ce n’est pas possiblesi on les nie de manière sectaire.Par conséquent, le PTS n’a au-cune idée du front unique. Biensûr, les autres organisations poli-tiques ou syndicales sont des ri-vaux ; c’est pourquoi nous

construisons nos propres organi-sations ou nous voulons que nospolitiques dans le mouvement ou-vrier, des étudiants ou féministegagnent de l’influence. Mais uneautre chose est d’ignorer leurexistence, une absurdité quiaboutit à quelque chose qui arrivehabituellement au PTS : resterdans la stérilité sectaire etl’auto-proclamation.

Il faut partir du constat qued’autres organisations existent etque notre art est de les gagnerou les « pousser » vers notrepolitique. Pour y parvenir laseule solution est de faire des ac-cords ou de gagner la lutte poli-tique par en bas, mais il fautcommencer pour reconnaitrequ’ils existent. Et c’est plus vraieencore quand il s’agit d’expé-riences indépendantes de l’avant-garde de la classe ouvrière,au-delà des traits centristes qu’ilsont (quelque chose qui estpresque inévitable s’ils sont desexpériences réelles et pas de la-boratoire).

L’incapacité du PTS deconstruire hégémonie provient deson incapacité à faire des frontsuniques : parvenir à des ac-cords qui permettront de déve-lopper la lutte, en même tempsque nous continuons la critiqueenvers les organisations aveclesquelles nous faisons ces ac-cords. Considérer ces instancescomme indispensables pour lalutte ne signifie pas accepter lesversions opportunistes du frontunique : la prétention que tout soitgrâce à des accord et desconsensus et pas un sous-pro-duit, en fin de compte, d’une luttequi a toujours comme un supportfondamental la lutte par la base,ainsi que la construction du partiet de ses groupements.

Il s’agit d’éviter autant l’op-portunisme que le sectarisme :sans front uniques et sans recon-naître la place des autres interlo-cuteurs sociaux et politiques,c’est impossible de construire hé-gémonie et de surmonter la stéri-lité sectaire.La conception du parti

Enfin, tout cela convergedans une conception du parti quele PTS traduit dans une interven-tion quotidienne capricieuse etautoproclamatoire. En l’absenced’un bilan historique du XXe siè-cle, le PTS a une idée du parti ab-solument unilatérale, qui perd devue les perspectives d’élévationpolitique et d’auto émancipationdu prolétariat. Le Parti révolution-naire devient l’alpha et l’omégadu cours des événements uni-quement lorsque toutes les au-tres conditions objectives sontprésentes : c’est la plume qui finitpar basculer l’équilibre de la luttedes classes dans un sens socia-liste quand toutes les autres

Le PTS ne voit quece qui va du partivers l’avant-garde etla classe, et pas celaqui vient de l’avant-garde et de la classevers le parti. Le partine peut avancer ques’il se nourrit et s’ilapprend de l’expé-rience de la lutte declasses elle-même, del’expérience que lestravailleurs et leuravant-garde mènent,et s’il ne s’appuie passur cette expériencepour avancer. «L’édu-cateur lui-même a be-soin d’être éduqué»,disait Marx dans sesfameuses Thèses surFeuerbach

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conditions sont réunies (condi-tions, il ne faut pas oublier, dontle parti contribue aussi dans laconstruction, même s’ils ne sontpas encore les conditions déci-sives). C’est le sens indiqué parTrotski sur le rôle de Lénine dansla révolution russe lorsqu’il appré-cie le rôle central de la personna-lité dans des conditionshistoriques déterminées.

Mais cette même définitionmontre que le parti n’est pas leseul élément du mécanisme de lasubjectivité de la classe ouvrière,mais seulement le plus importantet décisif, en particulier dans lessituations révolutionnaires. LePTS n’a pas une compréhensioncorrecte de cela : il ne voit quecela qui va du parti vers l’avant-garde et la classe, et pas celaqui vient de l’avant-garde et dela classe vers le parti. Il a uneconception presque artificielle,non dialectique de ces relationsd’enrichissement mutuel, commesous-produit, entre autres, de sonmanque de bilan du XXe siècle.Si on étudie Lénine et Trotski onverra que, Lénine depuis toujours(voir sa lutte contre les « hommesde comité » en 1905) et Trotskidepuis qu’il a mûri son idée departi après la révolution russe, in-diquent tous les deux qu’il s’agitd’une relation qui compte deuxtermes et pas juste un. Parceque le parti ne peut avancerque s’il se nourrit et s’il ap-prend de l’expérience de lalutte de classes elle-même, del’expérience que les travail-leurs et leur avant-garde mè-nent , et s’il ne s’appuie pasdans cette expérience pouravancer. « L’éducateur lui-mêmea besoin d’être éduqué », disaitMarx dans ses fameuses Thèsessur Feuerbach.

Parce que le PTS entretientdans cela une logique souvent ar-tificielle : il confond le fait de pro-pagandiser certaines expériencesde son militantisme avec les limi-tations et les batailles qui se po-sent pour que ces expériencesréelles arrivent à se développer.En même temps, il est une de sespratiques habituelles d’ignorer lesexpériences réelles, quand ils neles dirigent pas, au lieu de lesprendre comme un point d’appuipour l’action et pour développersa politique en les faisant avan-cer.

Le PTS a écrit assez sur le «modèle soviétique », mais cen’est pas sûr qu’il le comprennevraiment, ou au moins d’une ma-nière non réductionniste. Parceque le « modèle soviétique » estune dialectique entre trois par-ties, dont l’ignorance nous rap-pelle l’approche unilatérale deMoreno. Dans l’années 1980 ondisait que la « stratégie des révo-lutionnaires sont deux : mobiliserles masses et construire le

parti », en oubliant les organes dupouvoir et la démocratie ou-vrière3. Quelques années plustôt, dans le Morenazo de 1973, ilpolémiquait avec Mandel avec unangle unilatéral : contre le carac-tère purement propagandiste deMandel, Moreno allait dans lesens inverse, en défendant l’idéeque la conscience de classe estfournie par le parti comme « l’as-pirine à un patient », sans que laclasse elle-même fasse un pro-cessus de développement pro-pre.4 Nous ne disons pas que lePTS ait les positions de Moreno,mais qu’il a développé un autretype de réductionnisme où le partiest tout et les masses et l’avant-garde rien.

Le PTS a une somme d’ap-proches incorrects: par rapport xujustes relations entre les massesouvrières, l’avant-garde et le parti; de la démocratie socialiste ; parrapport aux leçons du XXe siècle,qui ont marqué que la révolutionsocialiste ne peut être que le tra-vail de la classe ouvrière, de sesorganisations et de ses partis,une classe ouvrière qui doit fairedes pas de géant vers une ap-proche consciente et démocra-tique des problèmes ; par rapportà que le parti se construit dans cemétabolisme avec la classe ou-vrière, à laquelle il offre pendantle développement des expé-riences des travailleurs eux-mêmes(pas «du dehors», commele croyait Kautsky, mais, encoreune fois, en métabolisme intimeavec elle) la conscience socialistede l’ensemble des relations ; quele parti apprend des expériencesindépendants que la classe ou-vrière elle-même construit, et ils’appuie sur elles. Et cette ap-proche incorrecte ou cetteconception erronée, se manifesteaussi lorsqu’il évalue l’importancede la politique révolutionnaire.La réduction de la poli-tique à la manœuvre

Le PTS a développé une

conception totalement réductricede la politique révolutionnaire. Il adéveloppé récemment un débatinterne sur la tactique et la straté-gie, et il a écrit quelque chose surce point. C’est très bien et ce de-vrait être un antidote contre le ré-formisme.

Mais le PTS a réduit le débatà une sorte d’école sur les ma-nœuvres. Avec cela, nous nevoulons pas dire que les manœu-vres ne sont pas essentiels pourles révolutionnaire, non seule-ment dans la lutte contre les en-nemis de classe, mais mêmedans la lutte de tendances socia-listes, dans lequel chaque cou-rant cherche à se faire respecter,et qui fait partie intangible de ladémocratie prolétarienne. Cecipeut être vu à chaque étape, régipar une loi politique objective duplus fort, de la survie du plusapte et le déplacement et/oudécadence des autres ten-dances.

Mais quelque chose de trèsdifférent est de perdre la densitéet le contenu politique des com-bats et tout ramener aux manœu-vres, souvent capricieuses, sansaucune justification objective.Parce que si la politique est unoutil d’intervention dans unchamp objective de possibilités etd’alternatives de classe ; maispour des raisons capricieuses ousubjectives on ne part pas de laréalité de la lutte de classes, cequi est dévaluée est la politiqueelle-même. Le PTS semble faireici, plusieurs fois, une inversion:il perd de vue que les manœu-vres sont finalement un moyend’imposer une fin particulière, lapolitique révolutionnaire, et il lestransforme en fin en soi, capri-cieux et vidé de contenu.

La réduction de la politiqueet la stratégie à des simples ma-nœuvres est un autre trait d’uneorganisation éloignée des ba-tailles politiques objectives et,comme on voit de plus en plusdans les pratiques du PTS, abou-

tit finalement, de plus en plus, surl’opportunisme.

1 Comme un exemple de l’erreur que si-gnifie diluer des considérationsconcrètes dans des généralités, nousrappelons l’Allemagne des dernièresdécennies du XIX siècle, un régime bo-napartiste avec des formes parlemen-taires –en plus de l’existence del’Empire et du Kaiser- qui finalement asous Bismarck interdit directement lasocial-démocratie. Quelque chosebeaucoup plus grave que les primaires,et incomparable avec elles. Maisl’exemple est utile quand même: imagi-nons les arguments abstraits de type“de toute façon, c’est antidémocratiquecomme toute régime parlementaire”. Aucontraire, la social-démocratie alle-mande s’est renforcé dans la luttecontre son interdiction, dans un périoderévolutionnaire.

2 Des classiques du marxisme commeL'origine de la famille de la propriété pri-vée et de l'Etat, de Engels, et les tenta-tives de Marx d'être au jour par rapportaux études anthropologiques de sonépoque, y compris sur le patriarcat,semblent "ne pas exister" pour le PTSet d'autres forces de la gauche en Ar-gentine.débats)

3 Cela arrivait à Moreno aussi dans letexte La dictature du Prolétariat, où il al-lait trop loin avec l’idée que les sovietset les organismes de pouvoir ouvrierétaient seulement “tactiques”, ce qui aété démenti par l’histoire du XX siècle,puisque l’affaiblissement des soviets aamené, aussi, à la liquidation du partibolchevique.

4 Il s’agissait d’une analogie incorrecte:la critique à Mandel qui semblait exigeraux travailleurs “tout connaitre”, commedes étudiants universitaires, pour arri-ver à la conscience de classe était cor-recte; mais Moreno allaitunilatéralement dans l’autre senslorsqu’il réduisait le processus com-plexe de la conscience de classe à unesorte de “aspirine” apportée par le partien dehors du processus réel de laclasse.

Mobilisation contre l’impôt sur le salaire appelée par le Plenaire Ouvrier impulsé par lescamarades du syndicat antibureaucratique de FATE

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La campagne du Nouveau MAS

Nous avons installé les droits desfemmes dans l’agenda nationaleAprès une longue et épui-

sante campagne électorale,où les camarades du Nou-

veau MAS et de l’organisation fé-ministe Las Rojas sont alléesjusqu’au bout dans la bataille poli-tique pour faire entendre la voixdes femmes, des jeunes et destravailleurs. Après des semainesde parcourir les quartiers, avecdes tables pour diffuser nos idéeset parler avec des milliers de per-sonnes, avec les camarades quiont collé des milliers d’affichesdans toute la Capitale Fédérale,contre les appareils des partis pa-tronaux. Après une journée épui-sante de dimanche où lesmilitants, sympathisants et amisont défendu nos voix dans le scru-tin. Avec une immense joie pouravoir réussi à nous faire connaitredans les rues avec tous lesmoyens que nous avons eu ànotre disposition. Avec le résultatdans les mains, il est temps de ré-fléchir tranquillement sur les ensei-gnements que cette expériencefructueuse nous a laissé et lesétapes à venir.

Commençons par le fait leplus objectif : la liste du NouveauMAS et Las Rojas a obtenu autourdu 1%, c’est-à-dire, plus de 18 000voix. C’est une base politiqueénorme et un point d’appui impor-tant pour avancer encore plus.Quand nous avons lancé notrecampagne pour les droits desfemmes tout l’arc politique dedroite à gauche (oui, à gauche!!)nous disait que nous étions dessuicides, que c’était fou de parlerdu droit à l’avortement dans lesélections. Que cela nous ferait per-dre des voix, que cela n’était pas àl’ordre du jour et que c’était hors dela réalité, que ce n’était pas possi-ble de parler des droits desfemmes avec un Pape argentin,qu’avec François I, cette revendi-cation était enterrée.

Nous ne nous avons paslaissé impressionner, nous nenous avons pas laissé entrainerpar la marée cléricale qui a influétout le monde, de droite à gauche(oui, encore une fois, à gauche!).Nous avons décidé de parler clai-rement aux femmes, aux travail-leurs et aux jeunes. Ni Cristina nila soutane de François I n’allaientnous taire ; nous n’allions pas tom-ber sur le crétinisme de ne pas deparler de la tragédie qui signifie lasituation des femmes en Argen-tine, la massacre quotidienne pro-duite par la clandestinité à laquelleon condamne des jeunes femmes:

il y a des centaines qui meurentchaque année, des centaines quisont enlevés avec la complicité del’État par les réseaux de proxéné-tisme, il y a des milliers qui viventterrifiées dans un climat de vio-lence, il y a des millions qui viventune double ou triple exploitation autravail qui las condamne quotidien-nement.

Ce qui nous guide n’est pasun sondage d’opinion, mais lesproblèmes réels auxquels sontconfrontés les exploités et les op-primés tous les jours. C’est un mé-rite dont nous en sommes fiers :nous étions la seule voix qui s’estélevé dans ce tsunami clérical. Àcontre-courant, souffrant le boycottabsolu et avoué des médias télé-visuels, qui nous ont dit clairementqu’ils ne voulaient pas nous inviteraux émissions télé, parce qu’ils nevoulaient pas donner la parole auxrevendications que nous défen-dions.

Notre entêtement de parler dece que personne ne veut parlernous a fermé les portes de ceuxd’en haut, mais nous a ouvert ununivers par en bas. Les démons-trations de soutien à notre candi-dature ont été une constantependant toute la campagne. Lesgens sont venus à nos tablesd’agitation, ils parlaient avec nous,ils nous ont reconnu la bravourede la revendication. Cela nouslaisse un grand enseignement.Les secteurs exploités et oppriméssavons par notre expérience quo-tidienne, que pour défendre nosrevendications, nous devons faireface à toutes les institutions du ré-gime politique, et pour cela, nousavons seulement deux armes, lapolitique et l’organisation. C’estnotre politique organisée ce que

nous a permis de surmonterquelques obstacles (pas tous en-core). Être claires, honnêtes etparler sur la réalité quotidienne (etpas sur les délires de comité), par-ler à haute voix et sans hésiternous a permis d’être respectées,d’être entendues.

Nous avons obtenu que cer-tains secteurs qui se considèrenttoujours kirchneristes, mais qui nesont pas d’accord avec le courscléricale et misogyne de la poli-tique de Cristina, nous ouvrentleurs microphones. Nous avonsobtenu l’appui de certains journa-listes, comme c’est le cas de CarlaConte et Elizabeth Vernaci. Si toutcela a été possible dans ces condi-tions défavorables, c’est parce quele Nouveau MAS et Las Rojas ontnon seulement une fermeté poli-tique qui se distingue dans le cli-mat opportuniste qui a caractériséla campagne, mais parce qu’il aaussi des militants dévoués, quiont pris dans leurs mains cettelutte politique, qui se sont organi-sés et ont amené cette campagneaux quatre coins de la Capitale Fé-dérale. Si nous avons réussi à re-cueillir ces soutiens, c’est parceque tout d’abord nous avons ap-pris à nous faire entendre.

Bien sûr, qu’avec l’immensejoie de savoir que nous avons faitune campagne extraordinaire,nous savons qu’il y a encore desobstacles à surmonter. Les Pri-maires ont rempli sa mission, ilsont réussi cette fois à laisser cesrevendications hors des électionsnationales d’Octobre : nousn’avons pas obtenu le 1,5% requispour participer aux élections géné-rales. Mais c’est aussi une leçon :lorsque nous disons que les Pri-maires sont un piège du gouverne-

ment contre les secteurs popu-laires, nous dénonçons cette réa-lité. Et en cela, nous sommes fierségalement d’être le seul parti degauche qui a été à la hauteur descirconstances. Là où tout le mondes’est tu, nous avons élevé nosvoix, mais pas en solitude: il y a eu18 000 personnes, qui ont élevéleurs voix avec nous. Un capitalpolitique que nous allons défendreet que nous avons le défi consoli-der et de multiplier à partir demaintenant.

Les perspectives que nousavons sont immenses. Nousn’avons pas commencé ce combatil y a deux mois. Las Rojas et leNouveau MAS sommes, peut-être,le courant politique qui plus obsti-nément et de la façon la plus co-hérente défend ces drapeaux tousles jours. C’est pourquoi nous invi-tons tous les camarades, les amiset les sympathisants qui ont ac-compagné ce combat à discuter lebilan et les résultats de cette cam-pagne et à nous joindre pour conti-nuer cette bataille.

Notre liste, pour très peu devoix, n’a pas obtenu le 1,5% requisaux Primaires, mais les échos denos voix résonnent toujours dansl’agenda politique national. Ceséchos résonneront encore plus aurythme des tambours de LasRojas. La voix des femmes conti-nuera à s’entendre dans les rues.Parce ils ne vont pas nous taire,nous organisons déjà une grandemobilisation pour le droit à l’avor-tement ce 28 septembre, la jour-née pour la dépénalisation del’avortement en Amérique latine etles Caraïbes. Nous avons le défide nous organiser et de multiplierles voix et les forces pour cette re-vendication.

Cortège de l’organisation féministe Las Rojas dans la mobilisation pour l’avortementlégale du 1er Novembre 2012

Par Manuela Castañeira