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Page 1: Axe2–Fiche2: Lepérimètredudroit de préemption · PDF file51 Axe2–Fiche2: Lepérimètredudroit de préemption desSafer 1–Etat du droit en vigueur. – Aux termes de l’articleL.143!1duCRPM,

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Axe 2 – Fiche2 :Le périmètre du droit de préemption des Safer

1 – Etat du droit en vigueur. – Aux termes de l’article L. 143!1 du CRPM, qui définit le champ matérield'application du droit de préemption de la Safer : « Il est institué au profit des sociétésd'aménagement foncier et d'établissement rural un droit de préemption en cas d'aliénation à titreonéreux de biens immobiliers à utilisation agricole

13 et de biens mobiliers qui leur sont attachés ou deterrains à vocation agricole, quelles que soient leurs dimensions (…) / Ce droit de préemption peutégalement être exercé en cas d'aliénation à titre onéreux de bâtiments d'habitation faisant partied'une exploitation agricole ou de bâtiments d'exploitation ayant conservé leur utilisation agricole.(…) ».

Aux termes de l’article R. 143!2 du même code : « Sont considérés comme fonds agricoles ou terrains

à vocation agricole14, pour l'application de l'article L. 143!1 : / 1° Les immeubles non bâtis susceptibles

de faire l'objet d'une opération d'aménagement foncier prévue par l'article L. 121!1 ou compris dansun espace naturel et rural, à l'exception :a) De ceux qui, avant la date prévue pour leur aliénation, sontle support d'un équipement permanent en usage ou d'une activité, sans rapport avec une destinationagricole ou forestière ; (…) / 2° Les bâtiments d'habitation faisant partie d'une exploitation ou lesbâtiments d'exploitation ayant conservé une vocation agricole ou forestière, lorsque l'activitéforestière est l'accessoire de l'activité agricole / 3° Les biens mobiliers tels que cheptels mort ou vif(…) ».

Aux termes de l’article R. 143!4 du code précité : « Lors d'une vente, d'un échange ou d'un apport ensociété portant sur un fonds agricole ou un terrain à vocation agricole situé dans une zone où lasociété d'aménagement foncier et d'établissement rural est autorisée à exercer le droit de préemption,le notaire chargé d'instrumenter est tenu, deux mois avant la date envisagée pour cette aliénation, defaire connaître à ladite société la consistance du bien, sa localisation, le cas échéant la mention de saclassification dans un document d'urbanisme, s'il en existe, le prix et les conditions demandés, ainsique les modalités de l'aliénation projetée (…). ».

13 Dans le premier alinéa de l'article L. 143!1 du CRPM, les mots : « fonds agricoles » ont été remplacés par les mots :« biens immobiliers à utilisation agricole et biens mobiliers qui leur sont attachés » par un amendement decoordination juridique (en raison de la création du fonds agricole à l’article L. 311!3 du CRPM) présenté par M. CÉSARau nom de la commission des affaires économiques et du plan dans le cadre de la discussion du projet de loid’orientation agricole de 2006.

14 A noter qu’il n’y a pas, de façon générale, de définition légale consacrée à cette notion de terrain ou d’immeuble« à vocation agricole », bien que le législateur l’emploie dans de nombreux autres textes (V. parmi d’autres : art. L.164 du Livre des procédures fiscales ; art. L. 411!67 et L. 136!1 du code rural et de la pêche maritime). Le législateurutilise également les termes d’immeubles « à destination agricole » (V. notamment : art. 793 et 885 Q du codegénéral des impôts ; art. L. 3211!8 du code général de la propriété des personnes publiques ; art. 832!1 du code civil ;art. L. 135!1 du code rural et de la pêche maritime) ou encore, mais plus rarement, les termes « à utilisationagricole » (art. L. 731!15 du code rural et de la pêche maritime ; L. 133!8 du code forestier).Il est donné, dans le dictionnaire Larousse, la définition suivante du mot : vocation (« Destination privilégiée dequelque chose (…) du fait de sa nature, de ses caractéristiques »), destination (« but, usage, affectation de quelquechose, ce à quoi quelque chose est destiné) et utilisation (« Action ou manière d’employer quelque chose ; usage »).Or, on sait que la modification de l'affectation (ou de l’utilisation) donnée à un bien immobilier, qu’il ait une vocationagricole, commerciale ou d’habitation, n'a pas nécessairement pour effet de modifier sa vocation.La vocation naturelle d’un bien est entièrement indépendante de son utilisation, sauf bien entendu le cas d’unchangement complet de destination par la réalisation de travaux important de transformation. Il est de jurisprudenceconstante que la transformation d’un bâtiment agricole en bâtiment d’habitation constitue un tel changement dedestination (CE, 25 mars 1998, Mme Raufie, n° 167430, aux Tables, p. 1227). Il en va de même de la transformationd’un bâtiment agricole en siège social d’une association (Cass. crim., 2 décembre 2003, n° 02!88351).

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Aux termes de l’article R. 143!10 du même code : « Toute personne chargée de dresser un acte

d'aliénation à titre onéreux d'un fonds agricole ou d'un terrain à vocation agricole au sens de l'article

R. 143!2, situé dans une zone où une société d'aménagement foncier et d'établissement rural peut

exercer le droit de préemption, est tenue de rappeler aux parties les dispositions du présent chapitre et

d'indiquer dans l'acte que ces dispositions ont été observées. ».

2 – Constat. – Les Safer sont constituées pour contribuer, en milieu rural, « à la mise en œuvre du

volet foncier de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire rural » (C. rur.,art. L. 141!1).

L’aménagement du territoire désigne l’action publique s’efforçant de répartir géographiquement lapopulation et les activités économiques, soit pour homogénéiser le territoire, soit pour accélérer ouréguler le développement, soit pour améliorer les positions du pays dans le jeu des concurrencesinternationales. En France, c’est une politique définie et mise en œuvre par des autorités politiques(centrales ou locales) pour réduire les déséquilibres entre les différents espaces géographiques del’État, voire d’une région.

L’activité agricole, avec toute la reconnaissance de ses valeurs économiques, spatiales et paysagères,a toujours eu une place significative dans l’aménagement du territoire. Elle a été prise en compte trèstôt par les politiques publiques, notamment dans le cadre de l’élaboration et de la délimitation dezonages (zone agricole protégée créée en application de l'article L. 112!2 du code rural et de la pêchemaritime, périmètre délimité en application de l'article L. 143!1 du code de l’urbanisme, zone agricoleou zone naturelle et forestière délimitée par un document d’urbanisme).

Or, on constate que, malgré la définition de politiques territoriales en faveur de l’agriculture, le droitde préemption de la Safer ne peut aujourd’hui s’exercer, sauf dans les communes et parties decommunes de montagne, que sur des biens immobiliers « à utilisation agricole » ou sur des bâtimentsd’exploitation ayant conservé « leur utilisation agricole ».

Le Conseil d’Etat a déjà pu juger qu’un « terrain à usage agricole ou forestier » est un terrain « affectéà une exploitation agricole ou forestière effective » (CE, 29 juillet 1983, Société alsacienne d'Audit et

de Conseils, n° 34579, publié au Recueil Lebon). En d’autres termes, il s’agit de terrains affectées àl’exercice d’une activité agricole définie à l’article L. 311!1 du code rural et de la pêche maritime,duquel il ressort que : « sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à

l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs

étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant

agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation

(…) ».

Il en résulte qu’à défaut d’être utilisés à des fins exclusivement agricoles (par exemple, le faitd’entreposer des caravanes sous un hangar), certains biens immobiliers peuvent ainsi échappés audroit de préemption de la Safer, alors même qu’ils pourraient servir utilement à l’installation dejeunes agriculteurs notamment et qu’ils sont compris dans un espace naturel et agricole.

Relevons, à titre d’exemple, que n’est pas soumise au droit de préemption de la Safer,l’aliénation d’un jardin d'agrément, garni d'un potager et d'arbres fruitiers trentenaires destinés à laconsommation personnelle de ses propriétaires (Cass. 3ème civ., 28 sept. 2011, n° 10!14004, Bulletin2011, III, n° 160) ou encore, d’une parcelle plantée d'arbres divers et sur laquelle est édifié unbungalow construit en dalle et parpaings de béton couvert en tôle ondulée (Cass. 3ème civ., 4 mars2009, n° 08!11281, Bulletin 2009, III, n° 59).

En outre, des bâtiments d'habitation ou d'exploitation inoccupés et laissés à l'abandon depuis denombreuses années, ou qui apparaissent vétustes et peu entretenus, ne sont pas préemptables (V. CAPau, 1re ch., 28 juin 2004 : JCP N 2006, 1268, p. 1506, note Fr. Roussel). Ces bâtiments, faute depouvoir être préemptés pour des objectifs agricoles ou environnementaux (art. L. 143!2 du CRPM)seront acquis par des non agriculteurs, contribuant ainsi au mitage de l’espace rural.

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3 – Dispositif proposé. – Il a pour objet de modifier les termes de la loi pour permettre à la Safer depouvoir éventuellement préempter, outre les biens immobiliers à utilisation agricole, tous les terrainsou les bâtiments d’exploitation à vocation agricole situés dans une zone agricole protégée (ZAP) crééeen application de l'article L. 112!2 du présent code ou à l'intérieur d'un périmètre délimité enapplication de l'article L. 143!1 du code de l’urbanisme (PAEN) ou dans une zone agricole (zone A) ouune zone naturelle et forestière (Zone N) délimitée par un document d’urbanisme ou bien, enl'absence d'un tel document, situés dans les espaces qui sont à vocation agricole ou qui sontcompatibles avec l’exercice d’une activité agricole. Ce dispositif a pour but de limiter la consommationdes espaces agricoles et de mieux contribuer à l’installation en agriculture.

Proposition. Il pourrait être envisagé :

- de remplacer dans la première phrase du premier alinéa de l’article L. 143!1 du code rural etde la pêche maritime le mot « vocation » par le mot « utilisation » ;

- d’insérer au premier alinéa de ce même article une deuxième phrase ainsi rédigée : « Ce droitde préemption peut également s’appliquer en cas d'aliénation à titre onéreux de terrains à

vocation agricole situés dans une zone agricole protégée créée en application de l'article L.

112!2 du présent code ou à l'intérieur d'un périmètre délimité en application de l'article L. 143!1 du code de l’urbanisme ou dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière

délimitée par un document d’urbanisme ou bien, en l'absence d'un tel document, situés dansles espaces qui sont à vocation agricole ou qui sont compatibles avec l’exercice d’une activité

agricole. » ;

- et d’ajouter, dans le deuxième alinéa du même article, après les mots « partie d’une

exploitation agricole » les mots « ou qui sont cédés avec des terrains à vocation agricole d’unesurface totale supérieure au seuil fixé pour l’application du statut du fermage conformément à

l’article L. 411!3, » et, après les mots « leur utilisation agricole » les mots suivants : « ou qui

sont situés dans les zones ou espaces mentionnés au premier alinéa de cet article et qui sont à

vocation agricole, pour leur rendre un usage agricole ».

Exercice du droit de préemption :

Terrains Bâtiments d’exploitation Bâtiments d’habitation

!Terrains à utilisation agricole(sans distinction du zonage)

Bâtiments ayant conservé leurutilisation agricole

Bâtiments faisant partie d'uneexploitation agricole

!Terrains à vocation agricole(dans les zones agricoles)

Bâtiments situés dans leszones agricoles et qui sont àvocation agricole, pour leurrendre un usage agricole

Bâtiments cédés avec desterrains à vocation agricoled’une surface totalesupérieure au seuil fixé pourl’application du statut dufermage.

!Terrains à vocation agricolecompatibles avec l’exerciced’une activité agricole (horsdocument d’urbanisme)

Possibilité de dissocier le foncier du bâti(Cf. Axe 2 Fiche 10 du Livre blanc (page 73)