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Avant-propos Objectifs de l’étude L’actualité est aussi aux recompositions institutionnelles : avec la loi MAPTAM, le paysage des collectivités en l’Île-de-France se transforme. Le projet ambitieux de transport qui accompagne la création de la Métropole du Grand Paris met les acteurs de la fabrique de la ville face à de nombreux défis. Dans ce contexte, un établissement public foncier unique, l’Etablissement public foncier Île-de- France (EPFIF), a été créé. Il doit constituer la « première pierre du Grand Paris du logement » (Sylvia Pinel, ministre du Logement, 16 juin 2014) et participer à la relance de la construction, tout en luttant contre l’étalement urbain. Inscrite dans ce cadre, notre mission pour l’EPFIF vise à analyser les blocages du renouvellement urbain et à étudier des solutions pour les dépasser, en mobilisant le concept de résilience foncière. Trame urbaine et forme architecturale Marché immobilier Freins politiques et décisionnels Surcoûts liés au recyclage Structure foncière et son statut STRUCTURELS CONJONCTURELS COMMANDITAIRES Pascal DAYRE, Franck BALTZER, Agathe GILLET DIRECTRICE D’ÉTUDE Marie JORIO Traduits sur le plan opérationnel, les blocages rencontrés sont de deux ordres : Le territoire francilien est aujourd’hui frappé par une grave crise du logement. L’enjeu porte à la fois sur la quantité (avec un objectif de construction de 70 000 logements par an) et sur la qualité et l’accès pour tous à un habitat décent. Notre façon de construire a fortement évolué ces dernières années, notamment sous l’impulsion des objectifs de développement durable. Sur le plan de l’aménagement, cette nouvelle éthique se traduit entre autres par des objectifs de maîtrise de l’urbanisation. L’heure est à la reconstruction de la ville sur elle-même. Inscrite dans les politiques publiques par la loi Solidarité et renouvellement urbain en 2000, la mise en oeuvre du renouvellement urbain fait cependant face à de nombreuses difficultés, principalement liées à deux choses : Une fragilisation du modèle classique de la fabrique urbaine Le modèle économique classique repose sur la plus-value créée et sur les subventions publiques. Or, en renouvellement urbain, la création de valeur (économique) n’est pas systématique à cause de coûts d’acquisition et de remise en état du foncier très élevés. La crise des finances publiques ne permet par ailleurs plus aux collectivités d’équilibrer les bilans. Des villes en pleine mutation La révolution numérique transforme notamment les processus urbains en profondeur. De nouveaux entrants, acteurs du numérique, mais aussi citoyens, qui sont de plus en plus impliqués, viennent aussi modifier la façon de produire la ville. Dans ce contexte mouvant, la reconstruction de la ville sur elle-même peine parfois à se concrétiser. MS AMUR Projet de fin d’études 2016

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Avant-propos

Objectifs de l’étudeL’actualité est aussi aux recompositions institutionnelles : avec la loi MAPTAM, le paysage des collectivités en l’Île-de-France se transforme. Le projet ambitieux de transport qui accompagne la création de la Métropole du Grand Paris met les acteurs de la fabrique de la ville face à de nombreux défis. Dans ce contexte, un établissement public foncier unique, l’Etablissement public foncier Île-de-France (EPFIF), a été créé. Il doit constituer la « première pierre du Grand Paris du logement » (Sylvia Pinel, ministre du Logement, 16 juin 2014) et participer à la relance de la construction, tout en luttant contre l’étalement urbain. Inscrite dans ce cadre, notre mission pour l’EPFIF vise à analyser les blocages du renouvellement urbain et à étudier des solutions pour les dépasser, en mobilisant le concept de résilience foncière.

Trame urbaine et forme architecturale

Marché immobilier Freins politiques et décisionnels

Surcoûts liés au recyclage

Structure foncière et son statut

STRUCTURELSCONJONCTURELS

COMMANDITAIRES Pascal DAYRE, Franck BALTZER, Agathe GILLET

DIRECTRICE D’ÉTUDE Marie JORIO

Traduits sur le plan opérationnel, les blocages rencontrés sont de deux ordres :

Le territoire francilien est aujourd’hui frappé par une grave crise du logement. L’enjeu porte à la fois sur la quantité (avec un objectif de construction de 70 000 logements par an) et sur la qualité et l’accès pour tous à un habitat décent.

Notre façon de construire a fortement évolué ces dernières années, notamment sous l’impulsion des objectifs de développement durable. Sur le plan de l’aménagement, cette nouvelle éthique se traduit entre autres par des objectifs de maîtrise de l’urbanisation. L’heure est à la reconstruction de la ville sur elle-même. Inscrite dans les politiques publiques par la loi Solidarité et renouvellement urbain en 2000, la mise en oeuvre du renouvellement urbain fait cependant face à de nombreuses difficultés, principalement liées à deux choses :

• Une fragilisation du modèle classique de la fabrique urbaineLe modèle économique classique repose sur la plus-value créée et sur les subventions publiques.Or, en renouvellement urbain, la création de valeur (économique) n’est pas systématique à cause de coûts d’acquisition et de remise en état du foncier très élevés. La crise des finances publiques ne permet par ailleurs plus aux collectivités d’équilibrer les bilans.

• Des villes en pleine mutation

La révolution numérique transforme notamment les processus urbains en profondeur. De nouveaux entrants, acteurs du numérique, mais aussi citoyens, qui sont de plus en plus impliqués, viennent aussi modifier la façon de produire la ville.

Dans ce contexte mouvant, la reconstruction de la ville sur elle-même peine parfois à se concrétiser.

MS AMURProjet de fin d’études 2016

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Résilience foncière

Démarche

Rappelons qu’au-delà des blocages rencontrés, la ville est en constante évolution. Nos systèmes urbains et nos modes de vie se transforment rapidement, notamment sous l’impulsion du numérique. Ces éléments progressent à une telle vitesse qu’il semble impossible de prédire à quoi ressemblera la ville de demain. Ils nous obligent donc à raisonner et à construire avec l’incertitude. Ils impliquent par ailleurs de penser des objets urbains plus flexibles et adaptables dans le temps.

Au-delà du renouvellement urbain se pose donc la question du méta-renouvellement urbain : ce que l’on construit aujourd’hui sera-t-il mutable demain? Comment éviter de re-créer des blocages ?

Aller vers un système foncier plus résilient, c’est permettre aux villes de s’adapter aux changements, et donc fluidifier le renouvellement urbain aujourd’hui et le méta-renouvellement demain.

Face à un contexte en profonde mutation, la mise en oeuvre du renouvellement urbain est confronté à de nombreux blocages. Comment s’adapter à ce nouveau contexte et développer la résilience du système foncier ?

Pour apporter des pistes de réponse à cette question, nous avons suivi la démarche suivante :

En Île-de-France, l’intervention de l’EPF s’inscrit dans des contextes variés. Les trois thématiques choisies, les Grands ensembles, le Rural et périurbain et les Zones d’activités recouvrent des enjeux divers de renouvellement urbain : logements et activités, zone tendue et marché lâche, ...

Résilience foncièreMutation du Foncier

PerturbationsImpératifs de développement durable, Révolution numérique,Transformation des modes de vie

...

Mutation duFoncier

Choix de trois thématiques

Illustration des blocages et

problématique

Cas d’étude qui ont

dépassé ces blocages

Champs d’investigation

pour la résilienceQuel rôle pour

l’EPF ?

Grands ensembles

Rural et périurbain

Zones d’activités

La notion de résilience

Emprunté au domaine de la métallurgie, la résilience désigne « la capacité d’un système à absorber un changement perturbant et à se réorganiser en intégrant ce changement »1. Utilisé dans de nombreux domaines, dont celui de l’urbain, nous proposons d’appliquer le concept de résilience au champ du foncier.

Définition de la résilience foncière :

Capacité du « système foncier »2 à s’adapter à des perturbations pour continuer à assurer la transformation et la mutation du foncier et la fabrique de la ville.

1. Hopkins R. 2008. The Transition handbook 2. Le système foncier désigne à la fois le foncier lui-même (avec les usages et le droit qui y sont associés) et tous les acteurs interagissant avec lui (qui ont leur stratégies propres)

Résilience foncière et « méta-renouvellement urbain »

Foncier non bâti/friches...

Tissu urbain vivant

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Thématiques

Malgré la diversité des espaces périurbains et ruraux en Île-de-France, ceux-ci partagent des difficultés communes pour mettre en oeuvre le renouvellement urbain. Ces communes sont majoritairement résidentielles, et ont parfois du mal à maintenir une activité économique locale. De plus, la diminution démographique et/ou l’inadaptation du bâti entraîne une désertification des centres-bourgs. Face à un marché peu attractif, les acteurs de la construction sont souvent frileux à l’idée d’investir dans ces endroits.

Construits entre les années 1960 et le milieu des années 1970, les grands ensembles renvoient à un type de forme urbaine conçue pour accueillir un grand nombre d’habitants. Peu après leur réalisation, des problèmes sont apparus dans les grands ensembles et se sont multipliés avec le temps : enclavement, coupure urbaine, inachevement des quartiers, absence de mutabilité, absence de délimitation public-privé et problèmes socio-économiques. Les interventions sur les grands ensembles ont débuté dès les années 1980. Pourtant les blocages persistent.

Pont-Péan, renouvellement local, stratégie globale

L’attractivité renouvelée de la commune de Pont-Péan (35) tient notamment au projet de territoire de Rennes Métropole autour du concept de ville archipel.La mise en place d’une ZAC multi-sites au niveau communal a par ailleurs contribué à limiter l’étalement urbain (mécanisme de compensation entre opérations d’extension et de renouvellement urbain).

BIMBY aux Essarts-le-Roi

La commune des Essarts-le-Roi, dans les Yvelines, utilise le BIMBY (Build in My BackYard) pour favoriser une densification réfléchie et adaptée de ses tissus pavillonnaires. Dans cette démarche, l’habitant devient maître d’ouvrage tandis que les élus portent le projet d’ensemble, en adaptant notamment le PLU de la commune. Ce renversement des rôles des acteurs permet de contourner le manque d’attractivité du marché immobilier.

Statut juridique de la dalle, Villejean

A Villejean, le statut de division juridique de la dalle avec une imbrication des propriétés a constitué le principal blocage de l’opération. La maîtrise foncière de la copropriété commerciale a été nécessaire pour redécouper les propriétés. Elle a par ailleurs influencé les autres étapes du projet (dessin final de la dalle, pilotage du projet, gestion sur le long-terme...)

Maîtrise publique et baux emphytéotiques sur le grand ensemble de Bijlmermeer

Le réaménagement du grand ensemble de Bijlmermeer, à Amsterdam, révèle les enjeux liés à une maîtrise publique du foncier.Cette particularité du statut foncier, associée à une volonté politique forte et à l’utilisation de baux emphytéotiques, a facilité le renouvellement urbain du quartier.

Cas d’étude

Cas d’étude

RURAL et PERIURBAIN

GRANDS ENSEMBLES

Difficulté à attirer les acteurs de la construction et du renouvellement urbain

Forme architecturale rigide et peu adaptée au contexte urbain actuel

Une politique d’aménagement qui incite à l’étalement urbain plutôt qu’à la réhabilitation des tissus existants

Imbrication des statuts juridiques

Contexte socio-économique peu favorable.

Blocages

Blocages

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Les zones d’activités économiques (ZAE), qui concentrent des activités sur un périmètre donné, sont aujourd’hui confrontées au risque de l’obsolescence : en petite couronne, un tiers du parc a été créé avant 1980. Vieillissantes et parfois dégradées, les ZAE font donc face à un réel enjeu de requalification. Devant la restructuration de l’activité productive et à la pression urbaine et foncière, ces zones d’activités mono-fonctionnelles sont amenées à muter et à accueillir davantage de mixité fonctionnelle. Leur intégration à la ville pose cependant la question du maintien d’activités en zone dense, la cohabitation avec les activités productives n’étant pas toujours facile.

ZAC d’incitation de Massy Atlantis

Dans le projet de Massy Atlantis, la ZAC d’incitation permet, en échange d’une participation au financement des équipements publics, aux foncières privées de garder la maîtrise de leurs parcelles et aménager elles-mêmes leurs terrains. Ceci a permis de conserver les entreprises du site, et de créer une mixité fonctionnelle à l’échelle de la parcelle, sans maîtrise publique du foncier.

Péréquation de la ZAC de Landy-Pleyel

La ZAC de Landy-Pleyel utilise le principe de péréquation afin de financer les programmes les moins rentables (activités audiovisuelles) par des programmes plus rentables (tertiaire et logements). L’intervention sur un foncier pollué a par ailleurs nécessité une négociation des prix en fonction des coûts de dépollution et une adaptation du plan d’implantation, selon le niveau de pollution acceptable pour un programme donné.

Cas d’étudeZONES D’ACTIVITES

Difficulté à concilier mixité fonctionnelle et conservation des entreprises du territoire

Difficultés financières à faire muter d’anciens sites industriels, notamment à cause de la pollution des sols

Blocages

SynthèseLes exemples précédents montrent que la mise en œuvre du renouvellement urbain dépend de catalyseurs, du jeu d’acteurs, et de la mobilisation d’outils innovants. Contrairement à la chaîne classique de l’aménagement, la production de la ville actuelle n’est plus un processus linéaire dont la première étape est la maîtrise du foncier. Celle-ci reste parfois nécessaire, mais de nouveaux modes de faire apparaissent. Au-delà de la maîtrise foncière en amont, il s’agit plutôt de réussir à mobiliser le foncier pour un projet. L’urbanisme de projet, et les recompositions à l’œuvre sur la chaîne de l’immobilier - avec une intégration croissante des acteurs - sont une adaptation au nouveau contexte et aux difficultés de maîtrise du foncier.

Chaîne classique de l’aménagement

Chaîne actuelle de l’aménagement

L’analyse transversale des différents cas d’étude nous donne des pistes quant à la façon de réaliser des opérations de renouvellement urbain et de s’adapter aux changements de contexte. Les champs d’investigation identifiés pour favoriser la résilience foncière sont : la prise en compte du déjà-là, la co-production, la dissociation, la péréquation, l’optimisation et l’anticipation.

Thématiques

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L’arrivée de nouveaux entrants dans la chaîne de l’aménagement amène les acteurs classiques à co-fabriquer la ville. Ces différentes formes d’aménagement partenarial associant acteurs publics et privés sont perçues comme des leviers de développement des projets.On distingue principalement deux catégories de nouveaux entrants : les habitants et les acteurs privés tels que les entreprises et les industries.

Les partenariats public-privé

Acteurs publics et privés sont de plus en plus amenés à collaborer. Il faut réussir à aligner leurs intérêts, parfois contradictoires : - pour le public : notamment amélioration de la qualité de vie (objectifs de mixité sociale, fonctionnelle et impératifs environnementaux).- pour les privés : principalement objectifs de rentabilité économique et de marge financière.

CO-PRODUCTION

DÉJÀ-LÀ

Bimby : le foncier est aux mains des habitants et peut se renouveler selon une «filière courte», sans passer ni par des aménageurs ni par des promoteurs.

Qui dit renouvellement urbain dit intervention sur un tissu déjà constitué. Dans ce cadre, il est primordial de prendre en compte l’existant et de composer avec le “déjà-là”. Plusieurs concepts peuvent être mobilisés : Le foncier au cœur de la conception du projet

Du fait des difficultés qu’il pose - liées par exemple à son statut ou à ses caractéristiques physiques - le foncier est bien souvent au coeur de la conception du projet et doit être intégré bien en amont.

L’action foncière légère

Pendant foncier de l’architecture douce, l’action foncière légère cherche à maîtriser les parcelles stratégiques, qui permettent de peser sur l’émergence d’un projet. Il s’agit de trouver les parcelles qui auront un effet d’entraînement sur d’autres parcelles identifiées comme difficilement mutables.

Stratégie d’acquisition d’un îlot : identification des points durs (en bleu), achat des parcelles les plus mutables (en noir), qui pourront déclencher par la suite la mutation des parcelles voisines jugées au départ peu mutables.

Parcelles les plus mutablesPoints durs (copropriétés, indivisions...)

Articuler aménagement et développement économique : la MODUE

La MODUE (Maîtrise d’œuvre urbaine et économique) est un dispositif qui permet d’accompagner une opération de renouvellement sur un territoire à dominante “activités”. Il s’agit de réaliser un diagnostic précis de la situation des entreprises présentes, pour guider la conception du projet et aider à sa mise en œuvre en accompagnant les mouvements des entreprises.

La co-production avec les habitants

Dans les petites communes rurales, le pouvoir de l’habitant est fort et proche du maire. Pour ces territoires, l’implication des habitants dans les projets urbains est une alternative prometteuse qu’il faut savoir maîtriser. Entre concertation, budget participatif, BIMBY ou encore autopromotion, ces démarches vont vers un modèle de création de la ville «bottom up».

Champs d’investigation

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DISSOCIATION

PEREQUATIONLe renouvellement urbain a tendance à favoriser les activités les plus rentables, allant à l’encontre de ses objectifs de mixité. La péréquation est donc un mécanisme de redistribution important. C’est un outil permettant d’atteindre l’équilibre financier d’une opération tout en favorisant la mixité fonctionnelle, sur un périmètre donné. Selon le périmètre d’intervention et les acteurs impliqués, les objectifs recherchés peuvent être très différents.

Mixité fonctionnelle en milieu urbain

La ZAC définit un cadre d’opération propice à l’utilisation de la péréquation. Cet outil permet de jouer sur le prix du foncier et rend possible la construction de certains programmes moins rentables tels que le logement social ou les locaux d’activités. Ainsi, la péréquation permet de mobiliser du foncier et de répondre à des impératifs de mixité.

Multi-sites en communes rurales ou périurbaines

La péréquation peut aussi être utilisée dans des opérations multi-sites par des communes rurales ou périurbaines qui manquent de moyens pour faire du renouvellement urbain.

Champs d’investigation

Péréquation en multi-sites : les opérations d’aménagement en extention urbaine financent celles de renouvellement urbain plus coûteuses. Cela suppose un double prérequis : un périmètre de ZAC commun et un seul et même aménageur.

Extension urbaineRenouvellement urbain

Volume bâti

Bail à construction / Bail à réhabilitation / Bail emphytéotique / BRILO / BRS / Division en volume ...

Principaux objectifs recherchés

- Alléger le bilan des opérations d’aménagement en évitant la mise de fonds initiale liée au foncier. - Fluidifier le marché et la construction de logements sociaux.- Conserver la propriété foncière aux mains des établissements publics pour une politique foncière et urbaine d’anticipation.

Face à la situation préoccupante du logement en Île-de-France, les acteurs de la production de la ville recherchent de nouveaux systèmes pour faciliter la mobilisation du foncier et la construction de logements. La dissociation du bâti et du sol semble être une alternative intéressante puisqu’elle permet de différer le prix du foncier et donc de faciliter la production de logements. Cet outil, qui connaît dernièrement un regain d’intérêt en France, est déjà bien ancré dans les politiques foncières de certains pays comme les Etats-Unis avec le Community Land Trust, ou encore aux Pays-Bas à Amsterdam.

En France, la mise en place du Bail réel immobilier relatif au logement (BRILO) en 2014 et celle du Bail réel solidaire (BRS) en 2016 ont pour objectif de replacer la dissociation au cœur des enjeux fonciers actuels, et d’ouvrir vers de nouvelles opportunités de création de logements.Les outils de la dissociation:

Emprise foncière

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En renouvellement urbain, la question de l’anticipation se pose de manière accrue. L’enjeu de l’anticipation est le renouvellement des différentes strates du territoire dans le temps. Elle doit être pensée à l’échelle de la ville mais aussi à celles du quartier et du bâti.

Ville et territoire / Stratégie foncière

À l’échelle urbaine, la maîtrise des coûts du foncier est en enjeu crucial. Cependant, les coûts élevés d’acquisition foncière dans les tissus urbains rendent les politiques d’anticipation compliquées. Les promoteurs immobiliers et les bailleurs sociaux sont souvent favorables à une action foncière publique forte, visant à mobiliser plus facilement les terrains. Cette problématique fait écho à l’actualité de l’Île-de-France, avec l’avènement de la Métropole du Grand Paris et du Grand Paris Express (GPE). Différents outils ont été mis en place pour anticiper et accompagner la transformation des quartiers de gare.

L’optimisation foncière est déja mobilisée pour identifier des gisements fonciers (dents creuses, foncier mutable) et les densifier. Toutefois, dans un contexte de renouvellement urbain, la distinction entre le foncier et le bâti est moins évidente.

Par ailleurs, si la construction de logements neufs est nécessaire, il faut également prendre en compte ce qui est déjà-là. Il existe en effet un fort gisement de locaux - logements et bureaux - vacants.

Optimisation des espacesPour optimiser le bâti, il faut une flexibilité des statuts de propriété et une adaptabilité des surfaces bâties aux différents usages. La collecte de données numériques relatives aux usages favorise l’optimisation immobilière dans le temps.

Optimisation Immobilière et numérique

Les démarches d’optimisation des espaces relèvent de :

- L’adaptation de la surface à l’évolution des besoins ;- L’optimisation du rendement de plan (par exemple, via la réduction des surfaces de parkings dans les milieux bien desservis par les transports en commun);- La mutualisation d’espaces existants plutôt que les constructions nouvelles (transformation de parties de logements inoccupées en chambres touristiques de type Airbnb par exemple).

Observatoires : des marchés fonciers et immobiliers, des quartiers de gareLa Foncière commune : permet de réaliser un portage long terme de foncier en milieu urbain. La Foncière Commune a vocation à acquérir des biens de type immobilier d’activité, à fort rendement locatif. L’exploitation, par la conclusion de baux commerciaux, permet de rentabiliser l’achat, et de limiter les coûts du foncier lors de la revente future à un opérateur.

Outils

Quartier et bâti / Cycles de vie

Les penseurs de la ville durable doivent s’interroger sur son devenir. Lors de la conception de morceaux de ville, les choix du montage de l’opération (architecturaux, juridiques, financiers) conditionnent en effet la faisabilité et l’évolution future du projet. En renouvellement urbain, l’anticipation consiste à penser l’évolution d’une ville, en prenant en compte différentes échelles et temporalités. Il s’agit de réfléchir à toutes les étapes du cycle de vie du quartier, du bâti. Par exemple, le renouvellement urbain pourrait être facilité en prévoyant les coûts de mutation du bâti en amont. La flexibilité des outils paraît aussi importante pour permettre l’évolution future des constructions.

ANTICIPATION

OPTIMISATIONChamps d’investigation

Optimisation foncièreOptimisation immobilière

Marché tendu

Di�us

Opération d’ aménagement

Long terme

Marché non tendu

Type de marché

Filière de mutation

DISSOCIATION :bail emphytéotique bail à construction, BRILO...Coop foncier

COPRODUCTION :BIMBY / urbanisme participatif DÉJÀ-LÀ :action foncière légère

PÉRÉQUATION:ZAC multi-sites

COPRODUCTION :conventions avec acteurs privés PÉRÉQUATION:ZAC (équilibre financier) DÉJÀ-LÀ :action foncière légère / MODUE ANTICIPATION :Foncière Communecoordination de l’action foncière DÉJÀ-LÀ :MODUE

OPTIMISATION

/

DÉJÀ-LÀ

Au-delà de l’EPF, les acteurs de la production de la ville pourraient eux-aussi se pencher sur ces champs d’investigation, les étudier, les explorer, les croiser, ainsi qu’en défricher de nouveaux - même si plusieurs d’entre eux le font déjà. Ces champs d’investigation visent en effet à faciliter la mobilisation foncière en renouvellement urbain, à dépasser les blocages actuels et à en éviter d’autres dans le futur.

On peut cependant s’interroger sur certains d’entre eux : avec la coproduction notamment, les actes de vente impliquent un nombre croissant d’acteurs et sont de plus en plus compliqués. N’est-on pas en train de créer une matière foncière ultra-complexe et difficilement mutable, par exemple avec les macro-lots ? Se saisir du concept de résilience est donc primordial pour penser dès à présent l’après. Les changements technologiques et sociétaux rapides, qui contrastent avec les temporalités plus longues de l’aménagement, constituent en effet un défi de taille pour nos villes. Dans un contexte d’incertitude et de risque d’obsolescence accélérée, la capacité d’adaptation et de flexibilité sont des qualités que les acteurs devraient rechercher en priorité.

L’EPFIF et la résilience foncière Ces champs d’investigation sont autant de pistes pour améliorer la résilience du système foncier et dépasser les blocages rencontrés lors de la mise en oeuvre du renouvellement urbain. L’EPFIF a un rôle important à jouer pour qu’ils soient appropriés par tous. Étant donné qu’il n’agit jamais seul mais toujours sous forme de partenariat (principalement avec les communes), il se doit à la fois de sensibiliser ses partenaires à ces enjeux, et de se saisir lui-même de ces outils relatifs à la mobilisation foncière.

Le tableau ci-dessous, non exhaustif, explique le positionnement que pourrait avoir l’EPFIF vis-à-vis des différents outils analysés. Certains outils seront plus pertinents que d’autres, selon le marché et la filière d’intervention considérés. Il ressort de ce tableau des pistes d’actions permettant à l’EPFIF d’élargir son champ d’intervention et de conforter son rôle-clé dans la mise en oeuvre du renouvellement urbain.

ANTICIPATION

DEJA-LA

DISSOCIATION

COPRODUCTION

PEREQUATION

Outils que l’EPFIF utilise déjà

Outils dont l’EPFIF pourrait se saisir

Conclusion

Équipe projet

Jean-Baptiste CHENGIngénieur

[email protected]

Maëlle COMBEIngénieur

[email protected]

Julia MASEcole de commerce

[email protected]

Catherine PERRINArchitecte

[email protected]

Claire RAGUÉArchitecte

[email protected]