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Ils sont cinq exposant à la Biennale cles antiquaires du 8 au i G septembreChacun différent Dans son style et son genre Tous ont une histoire

Rt un point commun Se donner sans mesure à leur métierL'exacte définition du mot passion PAR PHILIPPE SÊGUY

ANA CHICLANALes secrets du siècle d'or

La Decouvertede la SainteCroix ecole

portugaise vers1500 Ce panneau

en tres bel etatde conservation

faisait partie d untriptyque dont I unedes parties est au

musee d Art antiquede Lisbonne

Le travail raffinedes visages permetd identifier la mamde cet artiste actifdans la peninsule

ibérique auXVIe siecle

Un des chefsd œuvre proposes

par Annedans sa galeriea la Biennale

V oici des fruits des fleurs,des feuilles et des brancheset puis voici un cœur qui,

quatre siècles plus tard, ne bat plus quepour nous ll faut au moins en appelera Verlaine pour traduire l'émotionressentie face a un chef d œuvre total,fleuron de la galerie espagnole de la tresnspiree Ana Chidana Dans un françaisparfait, la ravissante Madrilène évoquela toile de Balthasar van Arp, peintrehollandais Chose rare, le formaten est tres grand Perroquets,coquillages, fleurs, corbeille, fruits,tout ici est symbole Les contemporainsde l'artiste raffolent des tulipes dont lecours dépasse a l'époque celui de l'orLes coquilles renvoient a l'exotismeles porcelaines a ia Chine lointaineet ses fabuleux voyagesFormée a Paris, tant a la Sorbonne qu'al'Ecole du Louvre, Ana a égalementtravaille avec EricTurqum, l'eminentexpert en peintures anciennes« C est chez lui que j'ai appris a regarder,a voir attentivement une touche, adecouvrir un esprit, un style, un support,un détail, a ressentir progressivementla saveur et l'émotion d'un tableau »Engagée ensuite a la galerie deJonckheere, celle du faubourg Saint-Honore, Ana Chiclana fréquente uneclientele internationale de grandsamateurs exigeants « La j ai appris

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Nature morte a la corbeille de fruits bouquets de fleurs, perroquets et coquillesexotiques au premier plan Balthasar van der Ast (1593/1594-1657)

Etude de tête de Cyrus // par Vicente Lopez (1772-1850)

mon metier de galenste, l'exigence etI humilité qu il impose J'ai fonde mapropre galerie a Madrid en 1999 »Dans ce milieu d hommes, volontiersmacho, la jolie femme s est imposéepatiemment traçant son chemin,déployant ses ailes « Je rn efforce deproposer au public des oeuvres encoreinconnues qui n'ont jamais ete exposéesdans les salons ou vendues lors devacations Je mets également l'accentsur la grande peinture espagnole dusiecle d'or, comme Zurbaran, Ribera oules freres Tiepolo qui, bien qu'italiens,ont longtemps travaille a Madrid »Toiles magnifiques tres souvent deprovenance royale ou aristocratique,souvent aussi dè grand format « Veneza Tolède ou a Madrid ' Vous verrezque les maisons qui bordent les palais

royaux, comme celui de la Zarzuela,sont tres vastes L Espagne, a uneepoque, a ete immensément richeet la peinture, justement dans sonformat s en ressent particulièrement »Le pays fut aussi un carrefourartistique entre les Flandres, l'Italieet la France Différents courants,multiples facettes, long mûrissementde génies composites vont donnera I art ce raffinement qui est la griffed'Ana Chiclana Ultime preuve, cevisage bouleversant dû au pinceau tresinspire de Vicente Lopez, proche deFerdinandVII ll représente le roi Cyrus,une esquisse pour une toile immense,hélas disparue dans un incendieet dont ne restent que ce tableau etdes dessins préparatoires Bienvenuedans le monde enchante d'Ana I

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VICTOR GASTOULenfance de l'art

Avec sa barbe de patriarche etsa minceur arachnéenne, il neressemble pas du tout a Obéi ix,

et pourtant, comme le copain d'Astérix,il est tombe dedans quand il était petit 'Le fils travaille donc avec papa, YvesGastou, depuis maintenant plus de dixans Sa spécificité, les annees 1960 et1970, le design qui fleure bon l'Italie,meubles griffes des plus grands, EttoreSottsass, Alessandro Mendini, Gio Ponti,Carlo Mollino, Gaetano Pesce et onen passe et pas des moindres !

Ambiances dans lesquelles baigne le tresjeune Victor Apres s'être abondammentennuyé dans son ecole de commerce,a la suite d'un stage en Chine ou il nefaisait que rentrer des donnees dans unordinateur, il décide de renouer avec sespremieres amours Sans tuer le pere, bienau contraire, la galerie Gastou s'enrichitgrâce à Victor d'une vision moderne etaudacieuse « Travailler ici fut pour moi

Ci-dessus, Boheme, de la serie Antisculpture,carénage de moto en polyester emaille et

peint, piece unique de 1966 Jean DewasnePaire de fauteuils ln Fraise ofEpicurus, bois

colore a l'aniline en rouge, edition BlumHelman, New York, area 1997

un bain de jouvence J avais le sentimentd'être un poisson qui replongeait dansl'eau de l'aquarium i A Yves, j'apporteun regard peut-être plus contemporain,résolument tourne vers l'étrangerJ'ai développe une clienteleinternationale américaine maîs aussichinoise ou du Moyen-Orient »Victor renoue également avecune tradition quelque peu délaisséepar son pere le design Offrira des artistes la possibilité de sortirdes grosses enseignes comme Cassinaou Knoll avec leurs cahiers des chargesdémesures et leur permettre ainsi deretravailler avec des materiaux nobles« Une griffe haute couture en somme,en tres faible quantite, parfois des piecesuniques et somptueuses »Pour ce jeune passionne, dénicherde nouveaux créateurs est une traqued'aventurier, une quête qui permet

finalement de renouer avec l'artiste,apres avoir déchiffre sa signature Ainsiles Gastou pere et fils ont redécouvertFrançois Cante-Pacos qui, au profitde la peinture et de la sculpture, avaitdélaisse sa creation de meubles quiavait tant inspire un certain Pierre Cardin« Nous l'avons rencontre a son atelieret convaincu de travailler avec nous »Ce joyeux mélange d'influences etd'audaces, ce talent éminemmentGastou, apporte a cette biennale desétincelles Crépitement d'amorces pourdes meubles griffes Sottsass ou Irle Avec,suprême signature, la maxime d'YvesGastou « S'attarder sur la beaute partoutou elle est Même une loge de gardienned'immeuble garnie de ses napperonsen dentelle peut-être magnifique »L'insolence est un talent I

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ANTOINE BARRERELe sourire du Bouddha

I baisse les yeux. Regarde ailleurs, fixe unpoint connu de lui seul. Depuis une éternité.Hiératique. Sans dévier de cette douceur

=servee, nee au iet tant de siècles. Antoine Barrière est commece bouddha du Gandhara, évanescent dansses draperies et qui semble voguer sur lesnuages. L'un des objets phares proposés par

la sculpture japonaise, de l'Inde ou du sud-estasiatique, assurent un oeil prodigieux « J'ai eula chance, s'enthousiasme Antoine, d'apprendremon métier auprès d'un homme remarquableet j'ai toujours fonctionné sur un axe immuablede prudence et d'expertise très attentive. La

alerie fêtera ainsi l'année prochaineson cinquantième anniversaire ! »Dans un marché parfois hystérique où les fauxabondent, où le naïf se voit vendre au prix dela pépite une pièce made in Taiwan, il est bonde prendre son temps et de forger son oeil. « Ànous d'assurer à nos clients comme à l'amateurune tracabilité de la pièce et un travail fondé surl'authenticité grâce à l'ensemble des moyensde comparaison qui sont à notre disposition.Lorsqu'on a étudié trois cents bodhisattva, letrois cent unième peut nous paraître suspect etnous décèlerons vite le petit "truc" qui ne va pas.Je conseille à vos lecteurs cette petite astucetoute simple mais o combien efficace. Un peud'eau sur une pierre peut faire immédiatementapparaître les fractures anciennes, masquées parun vendeur indélicat. Les tests de carbone 14 oude thermoluminescence sont aussi très précieuxafin de déceler l'âge réel d'un bois ou d'un ivoiregrâce au premier et, grâce au second, la datede cuisson d'une terre.» Chaque objet passéau crible provient des meilleures collections,marchands, confrères, de France comme dumonde entier. «D'ailleurs, je recommande àceux qui voudraient commencer une collectionde fréquenter d'abord les musées, de regarderattentivement "le top" proposé, de s'exercerl'œil. » Puis de venir à la galerie Jacques etAntoine Barrère ! Qui présente plusieurschefs-d'œuvre de qualité muséaîe. Comme cebodhisattva en granit décoré d'une petite fleurde lotus sculptée. Rarement la bienveillance,la sérénité et la lumière tranquille auront à cepoint fait étmceler un visage de pierre.

Bouddha debout,Afghanistan/Pakistan,art gréco-bouddhiqu<

du Gandhara,I I I ' - IV siècle.Dimensions

46,7x17x7 cm.Tète de bouddha,alliage cuivreux,

Thaïlande,école Sukhothai,

XIV siècle. Dimensions27x16x18cm.

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C 'est une jolie fille,surdouée infatigable, ala voix fraîche comme

une fontaine Brûlante depassion Immergée totalementdans ce qu'elle appelle « le plusbeau metier du monde » Avant unelicence en droit, obtenue sans grandenthousiasme, Helene parte New Yorkaccomplit un stage chez Sotheby'sLa, absolu coup de foudre pour VanDongen, « toujours aujourd'hui un demes chouchous » Et puis impossible derésistera un puissant ADN familial avecun grand-père et un oncle commissaires-pnseurs et un beau-père qui n'est autreque Felix Marcilhac, un des grandsspécialistes de l'Art decoHélène Bailly embrasse la profession,avec une force et une exigencestupéfiantes « Je voyage, je coursles salons, j'expose Beaucoup Lemarche a énormément change , ilexiste des modes, un peu comme enhaute couture et je sais que le publicdes collectionneurs ou des amateurs aaujourd'hui la possibilité de s'informersur les oeuvres Maîs, en franchissantle seuil de ma galerie, c'est mongoût qu'ils vont partager et j'ose direque bon nombre de mes clients sontdevenus des amis C'est l'aboutissementde mon metier offrir aussi et surtoutune vision totale, globale, d'un chef-d'œuvre, définir son historicité, préciserle lieu ou a ete peinte la toile, lesraisons profondes de l'artiste, sonvécu, les différents courants picturauxqui l'ont influence J'ai consacre mamaîtrise d'histoire de l'art aux dessinspréparatoires du XVIIe au XIXP siecle,car rien n'est plus essentiel a mes yeuxque de remonter cette filiation, decomprendre les mécanismes et leursubtilité Enfin, j'ai toujours pratiquedes marges raisonnables et la dizaine

HELENE BAILLYMARCILHACÉloge dè la couleur

En haut, de gauche a droite, La Baie de Tunis, Albert Marque!, Natuie mode d la lampe, signe ettitre au dos E L Kirchner, dans son cadre d'origine, Nature morte au lierre, fusain et estompe surpapier, signe a droite Henri Matisse 1915 « Mon dessin au trait est la transcription la plus pure de

mon émotion», assurait l'immense artiste Ci-dessus, Les Fa/a/ses de la Bouille, Paul Gauguin, 1884

de collaborateurs dont je m'entoureassurent une synergie tres appréciable »En exclusivité pour Point de Vue,Helene Bailly nous donne a contemplercette toile de Gauguin, presente a laBiennale, Les Falaises de la Bouille,qui date de 1884 Elle côtoie dans cetterecherche infatigable de l'excellenceune toile majeure d'Ernst Kirchner, geniede l'expressionnisme allemand « Une

oeuvre fondamentale, tres forte, issuedu Berlin de 1912, rude, violente, quasitribale, retraçant toute l'atmosphèred'une epoque qui va bientôt basculerdans l'horreur » Plus tendre, undessin de Matisse, ce bouquet defleurs de 1915, grande feuille traitée aufusain et a l'estompe Si délicate, qu'enfermant les yeux, son parfum se poseraitpresque sur la bouche I

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n n'entre pas chez luipar hasard. Lespritde Philippe Perrin

s'apprivoise avec lenteur. Avanttout, une émotion, légère, furtive, lesentiment pourtant bien réel d'êtreface à une manière de miracle.« À mes yeux, j'oserais dire quepeu importe le meuble, sa qualitésuprême, son absence totale dedéfauts. Certes, tout ceci comptemais, plus encore, je recherchece qui me touche, moi, Philippe.Les véritables collectionneurs, lesgrands amateurs connaissent cetétat de grâce. C'est cela qui me faitlever le matin. Cette émotion que jedois pouvoir transmettre. » Secondepar Jean de Piepape, le décorateuravec qui il travaille depuis unedizaine d'années, Philippe Perrinva à l'essentiel de l'esprit. Riend'ostentatoire. Pour cette Biennale,les deux hommes ont privilégiél'ivoire, le gris pâle. Et dans leurstand, cinq mètres sous plafond.Une atmosphère, si particulière,propice aux rencontres.« J'en suis arrive è cette étape parceque je vivais déjà comme cela. Moinsde pièces présentées et la volonté derevenir à l'objet, è sa quintessence.En somme, je pense d'abord àmoi ! Parfois, j'obtiens ce que j'aisouhaité. Parfois, je me trompe,parce qu'il manque une pièce ouque l'architecture du lieu prévupour tel ou tel salon où j'exposaisne fonctionnait pas. Eh bien je prendsce risque... C'est un équilibre trèsfragile. Mais fascinant. »Nulle inquiétude. Philippe Perrin,

pour cette édition 2018, présenteà ceux qui savent voir et commepièces maîtresses, deux bibliothèquesbasses de Boulle. La synergie entreles bois d'acajou, l'écaillé de tortue,l'ébène, les vernis et les bronzesdorés est telle qu'elle procure legrand frisson. Il n'existe de par levaste monde que six autres pairescomparables à celle-ci. Une auLouvre. Une à la Wallace Collection, àLoni ' ~Philippe, voici une dizaine d'années.Leur provenance ? Le Palais Rosedu fameux et délicieux Boni deCastellane, prince-collectionneurinspire de la BelleÉpoque. Lademeure mythique,située avenuede l'Impératrice,aujourd'huiavenue Foch,amalheureusementété détruite.À La galerie Perrin souffle l'espritdivin du XVIir siècle. Le débutde tout. « Le commencement dudesign. D'ailleurs, les grands artistescontemporains le savent, le sentent.L'un d'eux, dont je tairai le nom, m'aacheté récemment plusieurs meubles,dont une commode estampilléede l'ébéniste Migeon, des fauteuilsLouis XV, en bois doré ! Un granddécorateur me confiait récemment :"il n'y a qu'eux qui osent." » Manièrefulgurante de boucler la boucle, sansopposer stupidement les époquesou faire grimper artificiellement lescours. Il est bon parfois de revenirà l'essence même du style. I

PHILIPPE PERRINLétat de grâce

cire patinée sur plâtre,datée 1889 sur la base.Eugène Delaplanche

(1836-1891). Le marbreest aujourd'hui conserve

au musée d'Orsay.Paire de bibliothèques

époque Louis XVI, parJean-Louis Faizelot

Delornne,ancienne

collection Bonide Castellane

et Anna Gould.