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OPERATION «

I 7 Bel : 8,50 € - CH : 15,50 FS - Can : 12,95 S CAN - Esp : 8,20 € -Ita : 8,20 € - GR : 8,20 € - Afrique: 5300 CFA-

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LE MAGAZINE DE L'AERONAUTIQUE MILITAIRE INTERNATIONALE

N° 300 - novembre 2003

Sommaire

L' Aviation navale outre-mer

D'un meridien a l'autre ... par Fn3deric Lert

Aeronautique navale

Les annees soixante:<iix aux antipodes par Alain Crosnier

Les Mousquetaires

de la mer Rouge

L'armee de I'Air a Djibouti par Eric Desplaces et Phlippe Roman

Dans la Corne de I' Afrique

Soixante-dix ans de presence aerienne franc;aise sur le

territoire de l'actuelle republique democratique

de Djibouti par Philippe Roman

Operation « Artemis »

Succes complet pour I'Union europeenne par Jean-Louis Prome

L'Alat en Algerie

De l'observation d'artillerie au transport d 'assaut

par Alain Crosnier

Mais aussi nos rubriques habituelles: Evenements, Simulation (Combat Flight

Simulator 3), Revue de presse et Analyse des nouveautes.

En couvertur" : Mirage 2000C et Mirage 20000 de J'EC 4/33 K Vexin " en patrouille au-dessus de la cöte djiboutienne, a proximite de Godoria (Photo Roman-Desp/aces/ Cockpit Photo).

En incrustation : quatre des cinq Fa/con 200 Gardian de la 25F, une flottil le basee en Polynesie francaise (Photo MT Cavallo). Un C·130 de J'armee de l'Air sur le terrain de Bunia, capitale de la province congolaise d'lturi (Photo C. Amboise/Sirpa air). Vertol H-21 C du GH 2, en manceuvre avec des elements de la 25' OP en Aigerie (Photo J. -J. Bouschon).

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Realise sous I'impulsion du lieutenant-colonel Colas, actuel patron du 3/3, cet ouvrage de 95 pages est entie­rement consacre au groupe " Ardennes ", de sa creation a Rayack en 1943 jusqu'a ses missions recentes sur Mirage 2000D, sans oublier un rappel histo­rique sur la SR 44, troi­sieme escadrille rattachee· a I'escadron depuis 1994.

Prix : 25 € + 4 € de frais de port

Commandes a adresser a : Monsieur I'officier des traditions, EC 3/3 « Ardennes », BA 133, BP 62, 54200 Toul Cedex

Nombreux autres objets de tradition disponibles sur le site de I'escadron : www.ec3-3ardennes.com

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Alat et IHEDN a Mourmelon AI'instar des autres armes,

I'armee de Terre organise chaque annee un grand

show visant a presenter ses capacites aux auditeurs de I'IHEDN et des grandes ecoles et institutions militaires (Centre des hautes etudes de I'armement, Cours interarmees de defense, Ecole d'etat-major, etc) Supervisee par l'Etat-major de forces n° 3 de Marseille, celte de­monstration dynamique, qui a eu lieu du 5 au 8 octobre derniers au camp de Mourmelon, a implique plus de .1 800 militaires. La com­posante aeromobile etait particu­lierement mise en valeur, avec plus de trente helicopteres mobi­lises pendant quinze jours, des

Evenements

re petitions a la presentation. Lea- ~ ;i~~i~~i~~~-~"'-""'~~--'--'::! der du detachement, le 3' RHC ~ Il! d'Etain, commande par le colonel Gammatico, etait renforce par des elements des 1" et 6' RHC respectivement bases a Phals­bourg et a Compiegne. L'Alat a ainsi pu demontrer toutes ses competences en matiere de transport d'assaut et de soutien logistique, du largage de groupes de commandos para­chutistes (GCP) a la depose de fantassins en passant par la mise

en place de plots de ravitaille- >-r---------------!!I-----I'----.'---.., ment. Le ramassage par grappes m

tt' n'a pu EHre realise qu'au cours @

des entrainements, cet exercice ayant ete interdit a la suite d'un accident survenu entre-temps a Djibouti. Par ailleurs, des pa­trouilles de Gazelle Viviane, Hot, Mistral et canon ont pris part a un simulacre de combat haute inten­site aux cates des chars Lee/ere. Leur vol tactique a tres basse alti-

>-m

~~---~ tude a fortement impressionne les spectateurs, y compris les autori­tes de I'armee de l'Air qui avaient ete invitees par le general Tho­mann , commandant la Force d'action terrestre. Sur le site statique, la 4' brigade aeromobile de Nancy avait de­ploye son nouveau poste de commandement articule autour d'un Cougar, de deux Puma ra­dio et de tentes aerotranspor­tables gonflables permeltant un

~ montage tres rapide de I'en­~ semble. Plus d'un grand chef de

I'armee de Terre avait un regard envieux devant ce systeme qui pourrait bien, a I'avenir, etre uti­lise comme PC tactique par d'autres etats-majors de niveau superieur. Apres quelques annees difficiles, l'Alat a prouve qu 'elle avait conserve intact son savoir-faire, un constat rassurant a I'aube de la reception de ses nouveaux materiels - Tigre et NH90 - et a quelques mois de son cinquan­ti8me anniversaire. {>

R. Bily et F. Marsaly

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Plus des trois quarts des echanges mondiaux transitent aujourd'hui par la mer. Deux raisons bien simples a cela : d'une part, le faible coOt de transport maritime

et, d'autre part, la continuite des espaces oceaniques qui permet d'atteindre la plupart des territoires ou se deroulent les activites humaines. Pour I'ensemble de la planete, et notamment pour la France qui real ise envi­ron 56 % de ses importations et pres de "40 % de ses exportations par bateau, la liberte et la securite des echanges mari­times revetent donc une importance primor­diale. On retiendra ici un seul chiffre, a titre indicatif : I'organisation maritime internatio­nale evalue a plus de 25 000 le nombre de pirates en action dans le monde, en particu-

En haut : quatre Fa/con 200 de la 25F en vol simulta­nement, un document exceptionnel ! Ces appareils

passent toute leu r vie operationnelle outre-mer.

Ci -contre : retour de mission sur le parking de Nimes-Garons pour cet equipage de Nord 262E. 11

est peu connu que ces avions participent a la sur­ve illance des approches maritimes de la France

en naviguant loin en Mediterranee.

Page de droite : un Panther en finale sur une fregate furtive. Les approches sont directes de jour,

en se rapprochant du batiment par I'arriene.

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Ci-contre : au travai l ä bord d'un Atlantique. Le pilote est

en place gauche, le comman­dant d'aeronef a droite et le

mecanicien de bord au milieu, face aux comma ndes

moteurs.

En bas : la voilure ä grand allongement de I'Atlantique

procu re des ca racteri stiques de vol rema rquables qui se

traduisent par une tres grande autonomie doublee d'une

etonnante maniabilite.

En bas, a droite : des me ca ­niciens ä I'oeuvre sur une tur­bine Tyne d'ATL 2. Un moteur

exceptionnel qui allie puis­sance et fiabilite et permet

les evolutions loin des cates en toute confiance ...

lier du cöte de la mer de Chine. Espace eco­nomique, es pace strategique, la mer est aussi un champ d'action privileg ie pour les trafics illicites en tout genre. Avec son tres vaste territoire marin , le troisieme du globe, la France detient un enorme capital de res­sources potentielles qu'il convient de pre­server et de faire fructifier. Juste retour des choses, la possession de ces immenses es­paces se traduit par des besoins en con­tröle et en surveillance qui reposent essen­tiellement sur les epaules de la Marine.

Nous n'aborderons pas directement dans cet article les moyens purement maritimes mis en ceuvre par la Marine, notamment le porte-avions dont la capacite operationnelle a largement ete evoquee dans ces co­lonnes, mais uniquement les moyens bases a terre et sur les navires specialises, qu'il

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s'agisse des detachements permanents ou occasionnels. Depuis plus de cinquante ans, la logique des deploiements outre-mer n'a pas change et l'Aviation navale realise toujours, grosso modo, 25 % de ses heures de vol hors de la metropole.

Atlantic et tique ... Des le debut de la 2e GM, les Latecoere,

Glenn Martin et autres Hudson de patrouille maritime ont commence a sillonner les cieux d'outre-mer. Apres-guerre , la defense de I'empire colonial a confirme celte presence et I'a renforcee. Lancaster, hydravions Sunderland, Catalina et Marlin sont alors mis a contribution avant que n'arrivent les pre­miers Neptune, auxquels succederont les Breguet ATL 1 Atlantic. Aujourd'hui , l'Aviation

navale ne dispose plus que de vingt-huit ATL 2 Atlantique, livres a la Marine entre 1989 et 1997, dont sept sont stockes pour des raisons financieres. Sept autres consti­tue nt un volant de fonctionnement, tandis que les quatorze appareils restants equi­pent les floltilles 21 F et 23F respectivement basees a Nimes-Garons et a Lann-Bihoue. Heritier direct de I'ATL 1, qui fit pendant trente-cinq ans le bonheur de la Patmar franr;:aise, I'ATL 2 met sa versatilite au ser­vice des nouvelles missions dictees par un environnement geostrategique tres mou­va nt.

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« La mission de projection est celle qui nous preoccupe /e plus aujourd'hui " explique-t-on Ei la 21 F. Ainsi, deux avions et trois equipages sont detaches en perma­nence depuis plus de deux ans Ei Djibouti dans le cadre de I'operation « Heracles " de lutte antiterroriste, et, en metropole, une machine est prete Ei etre deployee avec un preavis de seulement huit heures. Un autre appareil est base Ei demeure Ei Dakar, d'ou il assure le secours en mer au large des cates senegalaises. Gageons que ses capacites Elint etendues sont egalement mises Ei pro­fit pour servir le renseignement franyais en Afrique de I'Ouest.

Si la cellule et la motorisation de l'At/antique ont peu evolue par rapport Ei son predecesseur, il en va tout autrement du

systeme d'armes et des moyens de naviga­tion, de detection et de traitement des don­nees qui ont ete considerablement modern i­ses pour faire face aux nouvelles menaces. « Dote d'une autonomie importante et d'equipements de communication et de na­vigation tres perfectionnes, /'ATL 2 est par­faitement adapte aux missions en milieu inhospita/ier, comme /a mer ou /e desert " , soulignent les equipages. Sept consoles de travail permettent aux specialistes - sous la supervision d'un CoTAC (coordinateur tac­tique) - de gerer simultanement I'ensemble des systemes de I'avion. Aces equipe­ments de haute technicite s'ajoute le travail irremplayable realise par les observateurs qui disposent de bulles Ei I'avant et sur les cates afin de scruter la mer Ei I'oeil nu ou Ei la

Ci-contre : a 100 ft (30 m) au-dessus de la mer et 250 kts (450 km/h) au badin, I' Atlantique file sur sa proie ...

Au-dessous: ambiance studieuse dans la tranche tactique en cours de mission. A droite, le coordinateur tac­tique place devant son ecran orchestre le travail des autres operateurs.

Ci-dessous : les N 262E sont motorises par des Bastan VI qui entraTnent des helices tri­pales, a la difference des N 262 de I'armee de l'Air. C'est vieux, mais fiable ...

jumelle ... Illustration pratique de I'allonge exceptionnelle du biturbopropulseur, deux At/antique se so nt rendus en 2001 jusqu'en Nouvelle-Zelande dans le cadre d'un exer­cice.

Les 262E Surmar Pour les missions moins lointaines, mais

tout de meme eloignees des cates fran­yaises, la Marine peut egalement compter sur les Nord 262E dont I'emploi dans le rale de surveillance maritime est moins connu. Le « deux-six-deux " est un avion ancien dont le premier vol remonte Ei 1962. Equipe d'un radar de recherche , il a dünne nais­sance au Nord 262E qui est entre en ser­vice dans la Marine nationale au debut des annees 1980. Outre son radar, precisons Ei I'intention des puristes qu 'i l se distingue de son cousin en ligne dans I'armee de l'Air par la presence de turbines Bastan VI entrainant une helice tripale. Une douzaine d'exem­plaires sont aujourd'hui rassembles au sein de la flottille 28F qui conduit sa double acti­vite d'ecole et de surveillance maritime

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Ci-contre : le Nord 262E est equipe d'un radar ORS 32 qui lui permet de remplir son röle de surveillance au large des

cötes. 11 peut egalement conduire des miss ions

ESM simples.

Ci-dessous : ce Nord 262E de la 28F quitte le parking

de Nlmes-Garons. La faible autonomie de I'appareil est

compensee par le choix judi-cieux d'esca les dans d'autres

pays europeens, dans le cadre des missions Medor.

En bas : vol d'instruction a bord d'un N 262E. Au pre­

mier plan, le poste de naviga­teur avec la tab le cartogra­

phique. Au fond, un eleve au poste de radariste.

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~ (Surmar) au depart de la BAN de NTmes-~ Garons.

" Naus surveillons la Mediterranee de Malte a Gibraltar, confie un pilote. Le N 262 presente plusieurs qualiti9s, au premier rang des quelles tigure le cout de mise en ceuvre, sept tais interieur a celui d 'un avion comme le Breguet Atlantique qui, il est vrai, dispose d'une capacite d 'intervention tres supe­rieure. " Ces missions en Mediterranee (joli­me nt appelees Medor, pour Mediterranee orientale) ont pris un relief particulier apres I'echouage dans le midi de la France d'un bateau charge de plus d 'un millier de Kurdes. Un " remake " stupefiant du livre prophetique de Jean Raspail, Le camp des Saints, qui a souleve quelques questions sur la defense des approches maritimes de la France et que les pouvoirs publics sou­haiteraient dorenavant eviter en pistant les navires suspects jusqu 'au fond de la Mediterranee ..

Du fait de I'autonomie relativement faible du Nord 262E, limitee a un peu plus de trois heures dans le meilleur des cas, les pa­trouilles sont amenagees de fac;:on particu­liere, en prevoyant notamment des escales regulieres en Espagne ou en Italie. En vol de survei llance, le bimoteur embarque un equi­page de six personnes: deux pilotes (dont un commandant d'aeronef qui est egale­ment chef de mission), un mecbo (mecani­cien de bord) , un radio et deux " denae "

~ (detecteurs, navigateurs aeriens) , I'un orga­t nisant la patrouille dans la zone d'evolution ~ choisie, I'autre etant charge de la mise en @ ceuvre du radar ORB 32 loge sous le fuse-

J

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lage. A noter que le N 262 peut EHre equipe d'un appareillage ESM (mesures de rensei­gnements eleetroniques) lui permettant de reperer et d'identifier les radars en fonetion­nement alentour. « L'l3quipage est peu nom­breux et fes systemes embarques assez basiques, mais /'ensemb/e forme un tout coherent pour fes missions de Surmar qui sont confiees a /'avion ", resume-t-on Ei la flottille 28F.

Partout dans le monde

Autres aeteurs importants de l'Aviation navale outre-mer, les Dassault Fa/con 50 de la flotti lle 24F basee Ei Lann-Bihoue. Leur al longe de plus de 6 000 km, leur motorisa­tion seeurisante (trois moteurs) et leur vi ­tesse elevee les designent tout naturelle­ment pour les missions lointaines, de la mer d'lrlande jusqu'Ei la Mediterranee orientale en partant de Franee, et meme jusque dans les DOM-TOM pour des interventions pone­tuelles. En pratique, le trireacteur peut real i­ser un sauvetage Ei 2 000 km de sa base tout en restant plus d'une heure sur zone. Avec un equipage de trois Ei cinq hommes suivant les missions, il est donc parfaitement Ei me me de remplacer un Atlantique, notoi­rement surdimensionne pour les aetivites de service public. Les Fa/con 50 eompletent les ATL 2 dans de nombreuses missions (sur­veillance en Guyane lors des tirs d'Ariane, eontröle des approches maritimes et de la peche, action de l'Etat en mer, lutte contre la

Ci-contre : le Fa/con 50 etale sa puissance. Huit chalnes SAR peuvent iHre emportees dans

I'avion, le panachage de grands et petits modeles etant courant

Ci-dessous: c'est une evidence, I'experience de la maison Dassault en matiere de chasse urs transpa­

ralt dans les lignes tres fluides des Fa/con. ..

pollution , etc) et peuvent etre deployes tres rapidement vers La Reunion.

L'avion est date du radar Thales Ocean Master 100 qui permet la detection d'un chalutier Ei pres de 90 km et celle d 'un radeau de survie Ei 30 km. Ce radar Ei agilite de frequence, ideal pour la surveillanee dis­erete de petites eibles, est eapable de suivre jusqu'Ei trente-deux pistes simultane­ment II est mis en oeuvre par le radariste qui fait egalement fonction de navigateur et s'occupe de la camera infrarouge Ch/io montee sur une tourelle retractable, Ei I'ar­riere du fuselage. Comme tous les autres apparei ls de Surmar, le Fa/con est genereu­seme nt equipe en materiel de communiea­tion , avec un systeme de liaison satellitaire Inmarsat cötoyant deux radios HF/BLU pour les communications Ei grande distance et deux postes VHF/UHF pour les echanges maritimes. Par ailleurs, un dispositif de goniometrie automatique (VHF et UHF) est

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cale sur les frequences de detresse afin de pouvoir rallier faci lement un bateau ou un avion en difficulte. Enfin , huit conteneurs 8AR (ensemble de survie integre dans un radeau gonflable capable de recueillir vingt­cinq personnes) peuvent etre embarques et largues en vol via une trappe situee dans le plancher.

Les Gardian en Polynesie La France possMe dans I'ocean

Pacifique un domaine maritime gigantesque de pres de 6 mi llions de ki lometres carres , soit dix fois la superficie de I'Hexagone ! L'isolement relatif dO a I'eloignement im pose une presence permanente de l'Aviation na­vale. L'ATL 2 etant surdimensionne dans ce röle, la Marine s'est logiquement tournee vers des vecteurs plus petits, les Falcon 200 Gardian. Derives du Falcon 20 et fortement inspires du programme" Guardian" (qui a

don ne aux gardes-cötes americains un avion de survei llance made in France) , cinq bireacteurs de ce type sont aujourd'hui en service au sein de la 25F qui a repris dans le Pacifique sud les missions de la 98 et de la 128 dissoutes le 30 aoOt 2000. Trois sont bases en Polynesie fran9aise, qui abr.ite -aussi I'etat-major de la flotti lle, et les deux autres en Nouvel le-Caledonie. Une te ile repartition geographique ne va pas sans poser quelques problemes en matiere de maintenance. En fai!, I'entretien courant est effectue sur site par des personneis de I'uni-te tandis que les grandes visites, qui inter­viennent tous les deux ans, sont toutes rea­lisees a Tahiti par un contractant civi llocal .

En reg le generale, le Gardian accuei lle un equipage de six personnes : pilote et chef de bord prennent place a I'avant, tandis que la cab ine est occupee par le mecbo, le radio et deux radaristes-navigateurs, le pre­mier en charge du radar et le second de la

Ci -contre : un Fa/con 50 en vol au-dessus des Tles du Ghjnan.· Un paysage familier pou r les equipages de la 24F, mais qui peut rapidement laisser la place ä des theätres d'operations plus tropicaux.

Au-dessous : largage d'une chaTne SAR qui va se deployer automatiquement au contact de I'eau. La petite boule visible ä I'arriere du fuselage est le Flir escamo­table qui olfre ä I'avion d'ex­cellentes capacites de detec­tion et d'identification.

Ci-dessous: les deux sabords du Fa/con 50 sont occupes en permanence par les observa­teurs. A bäbord est installe I'operateur largueur, tandis que la place droite revient ä I'operateur transmissions.

tab le de navigation . A noter que le medani­cien de bord est responsable du largage des chaines 8AR, dont au moins deux exemplaires sont regu lierement embar­quees. Une ouverture dans le plancher per­met leur ejection en plein vol.

Peu nombreux, les equipages ont le deli­cat privi lege de faire face a un vaste even­tai l de missions. A Tah iti, le protocole d'ac­cord existant avec la DGAC (Direction gene­rale de I'aviation civile) les conduit a assurer I'alerte 8AR sur I'ensemble de la superficie couverte par la Polynesie fran9aise. ,; La region est immense, de la taille de /'Europe,

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+

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rappellent les pi lotes, et le Gardian est aux ~ limites de ses capacites quand il s'agit de i

::; patrouiller aux extremites de la zone impar- @ tie. " Les apparei ls participent egalement a la surveillance des approches maritimes, au transport des autorites et aux missions de service public. Toutefois, avec I'arrivee d'operateurs prives, la flottille effectue beau­coup moins d'evacuations sanitaires que par le passe, se recentrant davantage sur le secours en mer qui peut representer cer­taines annees jusqu'au tiers de I'activite des equipages bases a Tahiti . Depuis le debut

Ci-contre : les detachements outre-mer sont tres prises, c'est un euphemisme ... Ce Faleon 200 est

ici photographie sur un aeroport tahitien.

Ci-dessous: I'entretien courant des Gardian s'effec­tuant sur site par les marins, les appareils postes

outre-mer ne rentrent jamais en metropole.

En bas : evolution ä basse altitude pour ces deux avions de la 25F. Vo ler ä 100 ft au-dessus de la mer requiert une qua lification specia le des equipages.

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2001 , la 25F a realise une centaine de mis­sions de ce type et secouru cent soixante­huit personnes.

Sur un plan militaire, le Gardian fai t preuve d 'une grande polyvalence, qu 'il s'ag isse de jouer les plastrons au profit des navires de passage ou de tenir une situation de surface : son radar a compression d'im­pulsion repere sans peine les gros bil.ti ­ments a 120/140 nautiques (250 km envi­ron) . Pour I'identification visuelle ou la re­cherche en mer, il est dote de deux larges hublots - en avant de I'aile - derriere les­quels peuvent prendre place le mecbo et le radio qui font alors office d'observateurs.

Les missions des detachements sont a la fois proches et differentes. Par exemple, le secours maritime prime Ei Noumea, I'alerte SAR etant passee sous la responsabilite de

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I'Australie et de la Nouvelle-Zelande. En Martinique, ou un appareil avait e18 detache jusqu'en mars 2003, une bonne part des vols etait consacree a la lutte contre le nar­cotrafic, avion et equipage etant aussi de­ployes en Guyane a chaque tir d'Ariane afin d'y survei ller la zone de retombee des ele­ments de la fusee europeenne. Lors des operations de l'Onu au Timor oriental , un Gardian a egalement ete uti lise pour realiser de nombreux vols de liaison .

Helicopteres embarques Outre les avions bases a terre , la Royale

peut compter sur ses helicopteres embar-

ques. On citera ici les Lynx presents sur les fregates ASM et a meme d'interven ir au coup par coup outre-mer. Mais, aujourd'hui , ce röle est veritablement tenu par les AS 565 Panther de la 36F, la plus recente des unites de la Marine et qui a atteint son format definitif en 2002 avec dix-sept equi­pages et quinze machines en dotation.

Etablie depuis peu a Hyeres, la 36F si 1-lonne, en fa it, toutes les mers du globe grace aux detachements qu'elle fournit a treize batiments de guerre cinq fregates furtives type La Fayette, deux fregates anti­aeriennes type Cassard et six fregates de surveillance type Floreal. Chaque detache­ment, qui comprend un helico et dix per-

sonnes tout au plus (mecaniciens inclus), est pleinement autonome a bord du navire qui I'accueille. « Pour toutes ces unites mo­dernes qui /'emploient, le Panther n'est pas une piece rapportee posee sur un bout de pont d 'envol ." c'est un prolongement direct du bateau dans la troisieme dimension, explique le capitaine de fregate de Reviers , commandant la flottille. Notre vocation pre­miere etant la lutte antinavire, nous partici­pons non seulement a /'ec/airage et a la sQrete de la flotte, mais egalement a /'acqui­sition et a la designation d 'objectifs. »

Pour remplir cette mission , I'AS 565 dis­pose de son radar ORB 32 et de I'ultime evolution du systeme de gestion tactique Titus, capable de transmettre une situation de tenue de surface a un autre aeronef ou a un navire. La fonction DOR (Designation d'objectif relais) autorise egalement I'equi-

Ci-dessus, ä gauche: au travail sur la console Tttus d'un Panther. La versatilite de I'helicoptE!re lui pe rmet de passer tres rapidement d'un röle guerrier (ici la tenue de situation de surface au profit d'un navire) ä des missions de service public.

Ci-dessus: les Lynx de lutte ASM ne sont pas postes outre-mer. Mais, les deploie­ments des navires sur les­quels ils sont embarques peu­vent les conduire ä intervenir tres loin de la metropole.

Ci-contre : image classique d'un Panther en mission de surveillance, contrö lant un navire marchand. L:h eli co peut etre arme tout au plus d'une arme automatique en sabord, mais il saurait, le cas echeant, mettre ä profit la puissance de feu de son navire d'accueil. ..

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page a designer, par transmission de don- ~ nees cryptees, une cible au profit des MM40 .~ Exocet de son bateau porteur. ~

Mais le Panther sait aussi rentrer ses 8)

griffes. En moins de trente minutes, la console Titus peut etre demontee et rempla­cee par une classique banquette plus adap­tee au transport ou aux evacuations sani­taires. " Notre r61e secondaire etant le se­cours en mer, nous sommes toujours sus­ceptibles d'etre detournes vers un sauve­tage en cours de mission, expliquent les pilotes de la 36F. C'est pour cette raison que les Mlicopteres sont en permanence equi­pes de leur treuil. Par ailleurs, le Panther offre d'excellentes qualites de vol, notam­ment un taux de roulis digne d 'un chasseur, et dispose d'une tres bonne voilure qui le rend particulierement confortable et peu sujet aux vibrations. "

Dans un cadre plus tactique, les AS 565 peuvent assurer la police maritime, comme cela a ete le cas pendant I'operation

" Heracles " ou ils detectaient les navires au radar avant de proceder a leur contr61e visuel . Le Panther peut embarquer jusqu'a cinq commandos venant s'ajouter a I'equi­page habituel compose de deux pilotes et d'un troisieme homme en charge soit du treuil (chef cargo) soit de la console Titus (tacticien, alias operateur lutte antinavire). " Le Panther est un M/icoptere avec lequel nous avons realise quantite de missions tres variees au gre des embarquements, re­sume-t-on a Hyeres, de la lutte contre le nar­cotrafic dans les Caraibes jusqu 'a la police des peches aux Kerguelen, en passant par

~ /'evacuation de ressortissants dans le golfe .§' de Guinee ou au Timor. "

En haut: autre image de la versatilite du Panther, qui est

ici utilise dans une mission de ravitaillement avec le trans­

port de charges sous elingue.

Ci-dessus : largage de commandos a partir de

deux Panther, a une hauteur mesuree a I'aide d'une radio­sonde : ni trap haut pour que cela reste acceptable par les

plongeurs, ni trop bas pour que les pilotes ne soient pas

genes par les embruns.

Ci-contre : pilotes et plongeur posent avec leur

materiel d'intervention. Pour illustrer la mission guerriere

de I'helicoptere, les pilotes ont revetu leurs gilets pare-eclats

et exhibent la mitrailleuse de 7,62 mm qui peut etre

montee en sabord.

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~ Avec relativement peu de moyens, <i. 8) l'Aviation navale parvient donc a remplir

avec succes ses missions aux quatre coins du monde. S'il n'est malheureusement pas dans les plans actuels de renforcer ses capacites, sans doute pourra-t-on assister a des adaptations du dispositif dans les mois a venir. Et notamment, peut-etre, a la mise en place d'un detachement permanent a La

. Reunion. La question se pose moins pour les Antilles, qui restent quand meme Ei por­tee de fusil de l'Europe. La Marine est aujourd'hui la seule Ei pouvoir intervenir en haute mer et I'on n'imagine pas la France renoncer Ei cette capacite , d'autant que I'en­semble des territoires et departements d'outre-mer so nt eux-memes tres deman­deurs de la presence des aeronefs porteurs de la cocarde Ei hame<;:on. 0

FJ°ederic LERT

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Ci-contre : trois Mirage 2000C ROI en patrouille au-dessus des rives de la mer Rouge, I'un des points geostrategiques les plus chauds du globe. A gauche, en bas : « assis » sur le moteur, becs sortis, ce Mirage 20000 en configuration lourde bibidon et POLCT double a 150 nceuds le Fennec de I'ETOM 88 a bord duquel a pris place le photographe d'Air Fan. A I'arriere-plan, le galle de Tadjoura. En bas : emmenee par le Lcl Montaigu, actuel patron du « Vexin », cette patrouille mixte illustre le nouveau dispositil chasse mis en place a I'escadron. Mirage 2000C et 20000 ont succede aux Mirage F1 C.

S ur le parking de I'aeroport d'Ambouli , bien qu'il ne soit que 6 h 55 locales, la chaleur est deja etouffante. Avec 35°C et pres de 98 % d'humidite, le climat djiboutien est particulierement eprou­

vant pour l'Europeen peu habitue a un tel taux d 'hygrometrie. Mais a I'EC 4/33 " Vexin ", les mecaniciens, dont certains en sont a leur se­conde annee d'affectation, savent se " hater lentement " autour des Mirage. Chaque appa­reil est stationne sous une hangarette betonnee ou une astroarche offrant une protection mini­male contre le soleil et la poussiere, omnipre­sents sur ce territoire de la Corne de l'Afrique. Quelques instants encore et le mugissement des reacteurs M53-P2 dechire I'air. Alors que la premiere patrou ille du jour, deux 2000C en configuration 6F (canons armes, bidon ventral supersonique de 1 300 I et missile Magie d'exercice), emprunte le taxiway, un C-135FR

s'elance sur la piste 09/27 Venu convoyer une releve de deux 2000C affectes a I'escadron , ce tanker a ete mis a la disposition des pilotes de Djibouti pendant deux jours afin qu 'ils puissent s'entra7ner au ravitaillement en vol.

Alignes en 09, les deux chasseurs decollent a dix secondes d 'intervalle, puis rassemblent en formation de manceuvre offensive (FMO) a 100 m, avant d'emerger au-dessus de la brume seche tout en contournant la ville de Djibouti par I'es!, verticale la mer et les premiers 710ts coralliens. Montee a 400 nceuds, sous controle radar franyais, afin de rejoindre le C-135 orbi­tant a 15000 pieds plus au nord , sur le trait de cote au niveau de Godoria. Apres avoir chacun realise deux contacts et pris 1,5 t de petrole, les pilotes redescendent a 5 000 pieds, cap au nord, pour effectuer une mission de surveil­lance face au Yemen et a l'Erythree - portant jusqu 'a 70 nautiques, le radar RDI offre une

\ ... . 1 I I

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o

Ci-contre : emergeant dans le ~ soleil implacable de Ojibouti, ~;o:

ce 2000C quitte son astroarche pour une mission d'entralne- ~~

ment standard, soit une '" heure de val en .moyenne. ~

Ci-dessous : comme la plupart des chasseurs bases a Ambouli, ce 20000 beneticie d'un station­nement sous abri permettant de

proteger ses parties sensibles du soleiI, notamment I'electro­

nique, mais aussi de faire bais-ser la temperature en cabine, au grand bonheur des equipages",

En bas : pilote issu du 2/3 « Champagne » de Nancy,

le capitaine Benassis entame sa sec'onde annee a Ojibouti

en tant que chef des operations de I'EC 4/33.

26 AIR FAN

~ ~ 0:

detection notablement plus importante que le eyrano IV du F1 C, et I'interrogateur IFF permet de lever le doute rapidement en cas de rencontres. Puis, longeant I'impression­nant mont Moussa'Ali , volcan qui culmine a plus de 2 000 m, il s se preparent a inter­cepter une autre patrouille composee d'un 20000 et d'un 2000C en mission d'assaut basse altitude a 500 pieds dans le relief tourmente des hauts plateaux desertiques de I'ouest djiboutien. C'est le 20000 qui na­vigue en tete, suivi en colon ne par le mono­place de defense aerienne. Une derniere ligne de crete franchie trois quarts dos et les deux avions basculent dans le" tobog­gan " , longue val lee encaissee au cap 160°

~ et qui debouche sur le mythique lac Assal :;0:0. (150 m sous le niveau de la mer, une eau

d'un vert presque phosphorescent et d'im-'-' ~ menses etendues de sei d'un blanc in-~ tense) , puis filent vers la grande barriere ~ rocheuse de la rive sud derriere laquelle se ~ trouve leur objectif. L'attaque a lieu en cabre

~-=~IIioIi""::I @ aux alentours de 5 000 pieds avec largage simule d'une bombe lisse en pique a 30°. C'est sur le trajet retour qu'ils se font cueil lir par les 2000C. Grace au detecteur Serval, ils reussissent neanmoins a eviter le tir d'un Super 5300 en realisant une evasive bru­tale de presque 90° Mais les intercepteurs, les poursuivant a vue, parviennent a placer un tir Magie 2 a la distance maximale avant de devoir mettre le cap sur I'aeroport, au petroie minimum. Au total , la sortie aura dure pres de 1 h 20 mn pour chacune des deux patroui lles. Vers 10 h 00, les avions redecolleront pour realiser des tirs canon air-sol reels sur le champ de tir de Godoria

Sur la base aerienne 188, le travai l com­mence t6t, a 6 h 15. Et, ici, point besoin de reveil ! Avec I'appel a la priere diffuse par les mosquees avoisinantes et la reprise des nombreux chantiers de construction, tout le personnel est debout des 5 h 00. En dehors du vendredi, ferie pour les musulmans, les mi litaires pratiquent la journee continue jus-

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qu'a 13 h 15. Ensuite, c'est la sieste obl igatoire, car, le soir, la cha- ~

leur est teile qu'il est impossible de dormir avant minuit. Ancien Territoire fran<;:ais des Afars et des Issas devenu indepen­

dant le 27 juin 1977, la republique democratique de Ojibouti couvre 23000 km2 (soit la moitie de la superficie de la Suisse) et compte 600000 habitants. Bordee par l'Erythree, l'Ethiopie et la Somalie, et faisant face au Yemen , elle est une des plus importantes places strategiques de la planete. Oe par sa situation au cceur du detroit de Bab el-Mandeb (debouche sud de la mer Rouge) , elle voit passer un tiers du trafic mondial d'hydrocarbures. Par ailleurs, son port par­faitement securise, qui plus est le seul en eau profonde de la region , est devenu le poumon de l'Ethiopie depuis que cet immense pays a perdu ses acces a la mer lors de la proclamation de I'indepen­dance de l'Erythree en 1993. Malgre cela, elle reste un Etat particu­lierement pauvre dont la population d'origine nomade se concentre majoritairement dans la capitale.

Point d'appui fran<;:ais historique pour contrer I'influence sovie­tique dans I'ocean Indien, Ojibouti se retrouve aujourd'hu i au centre de la lulle mondiale contre le terrorisme. Oepuis avril 2002, les Americains s'y sont en effet installes, implantant leur base -Ie camp Lemonier - juste au sud de la piste de I'aeroport d'Amboul i. Outre I'etat-major interarmees pour les operations dans la Corne de l'Afrique (CJTF-HOA), ce camp accuei lle plus de mille deux cents GI ainsi que des elements des forces speciales et des detachements de Marines venus s'entrainer en ambiance desertique.

Les FFDJ et la BA 188 Actuel lement commandees par le general Pons, officier de I'ar­

mee de l'Air, les FFDJ (Forces fran<;:a ises de Ojibouti) comptent deux mille neuf cents militaires, soit le plus gros contingent fran<;:ais deploye dans le monde. A proximite du detachement aerien, I'armee de Terre aligne deux unites majeures, la 13e demi-brigade de la Legion etrangere et le 5e reg iment interarmes d'outre-mer. Ouant a la Marine, etablie dans la presqu'lle du Heron , elle beneficie d'infra­structures portuaires importantes et dispose de navires de debar­quement ainsi que du commando marine" Arta ".

Aux missions traditionnelles de protection des approches mari­times et aeriennes du territoire s'ajoutent celles de securisation aux

Ci-dessus : compte tenu de la chaleur qui devient vite insupportable durant les mois d'ete, pilote et mecanicien apprennent ä se häter lente­ment lors du tour avion ...

Ci -c ontre : les avions de defense aerienne evoluent generalement avec tous leurs pyl6nes lance-missiles mon­tes, un Magie 2 d' exercice et un bidon ventral de 1 300 I.

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I Ci-contre : I'un des trois ~~

Mirage 20000 du 4/33, au rou- '" lage en configuration de com- ~ bat aerien, A I'arriere-plan, le ~

camp americain Lemonier. ~

Au-dessous: la Marine nationale maintient un deta­

chement permanent d'Atlan­tique a Ojibouti, principale­

ment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme en appui de la Task Force 150.

Ci-dessous: passage de relais dans le ciel djiboutien,

Oeux Mirage 2000C operation­nels depuis deja deux ans au

« Vexin » accueillent un avion ·encore aux couleurs de

I'EC 2/12.

32 AIR FAN

0:

<9

Irontieres terrestres - en collaboration avec I'armee djiboutienne -pour controler les afflux de relugies pousses hors de leurs pays par la lamine et les conllits ethniques, comme c'est notamment le cas en Somalie.

La BA 188 dispose de tout le personnel d'une base aerienne nor­male. Organisee en plate-Iorme de soutien a vocation interarmees, elle abrite aussi I'etat-major des FFDJ ainsi qu'une importante es­cale de transit air. Le colonel Charaix, pilote de chasse et patron de la BA depuis I'ete 2002, insiste sur le role londamental que joue le site d'Ambouli au sein des FFDJ' . D'autant que I'aeroport presente une solide capacite d'accueil de renlorts, qu'il s'agisse de gros por­teurs militaires ou d'avions de combat. C'est ainsi qu 'i l rer;:oit regu­lierement la visite de trois ou quatre chasseurs et d'un C-135FR, voire d'appareils embarques sur le porte-avions Charles-de-Gaulle lorsque celui-ci opere dans la zone.

Outre I'ETOM 88 (escadron de transport outre-mer) et le 4/33, la base heberge deux detachements de patrouille maritime, I'un de l'Aviation navale avec un ATL 2 (present, en lait, depuis de nom­breuses annees a Djibouti) , I'autre de l'Ejerc ito dei Aire espagnol

~ avec un P-3C Orion. Engages dans I'operation " Liberte im­I muable", ces avions epaulent les Atlantic de la marine allemande ~~ deployes a Mombasa (Kenya). Tous participent au controle du tralic '" maritime en appui de la Task Force navale 150. Pour le detache-]-~ ~ 0:

<9

1. Oepuis 1990, fes FFOJ disposent aussi d'une piste de secours construite par fa France a Chabelley, a quefques kifometres au sud-ouest d 'Amboufi, qui feur est reservee.

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ment franc;:ais, cela represente une mission C 160, avec un moniteur. Une opportunite de patrouille tous les trois jours. rare appreciee autant par le Lcl Rigaut que

Dotee d'une piste balisee de 3 150 m, par son adjoint Au total, I'unite compte qu'elle partage avec I'aeroport civil, I'avia- quatre pilotes, deux navigateurs et trois me-tion militaire djiboutienne et les aviateurs caniciens navigants (mecnav) pour le sec-americains, la BA 188 a subi de nombreux teur C 160, et six pilotes (tous titulaires de la travaux ces dernieres annees. Les parkings double qualification Puma et Fennec) , cinq ont ete agrandis et, aux deux hangarettes mecnav et cinq plongeurs sauveteurs pour d'alerte betonnees, se sont ajoutees huit le secteur helicos. astroarches. En attendant la construction L'escadron realise deux types de mis-d'un nouveau hangar technique, un pole de sion: soutien et aerotransport des forces maintenance temporaire Mirage a ete instal- stationnees dans le pays d'une part, et SAR le avec des ateliers dans des Aigeco clima- sur I'ensemble du territoire (y compris en tises, deux hangarettes en dur et deux abris mer) d'autre part Outre les eventuel les eva-soupies pour avion , Oll sont realises les cuations de ressortissants et les Evasan, le visites d'entretien. Quant a I'ancien hangar, il Transall sert principalement au transport permet toujours d'accuei llir deux aeronefs, logistique intratheatre, mais aussi vers les bien qu'il ne soit plus de toute premiere jeu- Etats voisins. " En cas de crise, nous nesse. Contrairement aux F1C, leurs prede- sommes en mesure de projeter des 13/13-cesseurs, les Mirage 2000 ne restent plus ments d'intervention sur diverses regions du

territoire grace ades pistes sommaires, ou de parachuter troupes et materiel en atten­dant /'arrivee d'autres avions-cargos tac­tiques en provenance de France ", ex­plique-t-on a I'escadron. Les zones a couvrir etant a moins de 100 nautiques (185 km) d'Ambouli , les deux Puma du " Larzac " sont aussi parfaitement a m§me d'executer une partie de ces missions. Identifiables a leurs ballonnets de train plus hauts, les ma­chines de I'armee de l'Air emportent 2 250 I de carburant en interne, leur conferant un rayon d'action de 350 km contre 150 km pour celles de I'armee de Terre.

Toutefois, le role principal de I'ETOM 88 reste le SAR, qu 'il assure de jour comme de nuit pour le compte des avions de combat et de I'OACI, ainsi que le secours en mer (Samar) qu'il partage avec le detachement Alat L'un des deux Puma est maintenu en

en plein s~eil I ~te, m§me s'ils supportent 0 ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ plutot bien le climat local. ~

I Helices et rotors ~ t:::::;;:;:;:::;;;;;;IiII.

Comme c'est souvent le cas outre-mer, I I'ETOM 88 " Larzac " met en ceuvre des ~ aeronefs a voilure fixe et a voilure tournante. Longtemps equipe de Nord 2501 Norat/as, il evolue depuis 1983 sur C 160, tandis que les Alouette III ont cede la place a deux Puma et a un Fennec. Cette dotation mixte entraine une structure d'encadrement speci­fique : le commandant d'escadron est gene­ralement pilote de Transall et son adjoint pilote d'helicoptere. Tous deux possMent en plus la qualification " echo " leur per­mettant de voler en mission simple respec­tivement en place droite du Fennec et du

Ci-contre : ce Puma SAR de I'ETOM 88 a re~u d'imposants filtres a sable, imperatifs pour realiser

des vols stationnaires en zone desertique.

Ci-dessous : pose sur un piton de roche vo lcanique, ce Fennec vient de debarquer I'officier de tir sur le

champ de tir de Godoria.

~ er: ©

alerte en permanence, a 1 h lors de I'activi­te chasse et a 3 h en heu res non ouvrables. Equipes d'un coupleur de pilote automa­tique pour le vol stationnaire de nuit au­dessus de la mer jusqu'a 100 pieds (30 m) et du systeme de localisation des bal ises de detresse, ces helicos peuvent accueill ir quatorze passagers ou six blesses cou­ches. En mission SAR, I'equipage se com­pose des deux pilotes, d'un mecnav res-' ponsable du treuil et d'un plongeur (amica­lement surnomme le " plouf " au sein du personnei). Les pilotes volent parfois avec des jumelles de vision nocturne, un equipe­ment qui peut faciliter I'acquisition visuelle d'un bateau ou d'un naufrage en mer, mais egalement autoriser un poser terrestre sans balisage lumineux au plus pres d'un resca­pe. Si necessaire , jusqu'a quatre reservoirs

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Ci-contre : vue partie lle de la BA 188, prise a tra ­vers le cockpit d'un Mirage parque sous I'un des

abris equipant desormais la base d'Ambouli.

Au-dessous : tout n'est pas desertique a Djibouti, comme le prouve cette mangrove survolee a

basse altitude par un Mirage 2000C RDI.

Ci-dessous: herite de I'ERC IV/561, le « Mousquetaire noir » de la deuxieme escadri lle a ete peint sur les derives, sous la bande tigree rap­

pelant I'origine cambresienne des intercepteurs.

supplementaires peuvent etre instal les en cabine, une conliguration limitant d'autant les places disponibles. ~

Dote lui aussi d'un treuil , le Fennee est jo cependant plutot reserve aux vols de liaison ~

u ainsi qu'a la mission de ratissage. Les FFDJ 1 disposant de trois champs de tir (sol-sol, air- ~

sol ou mer-sol), cet helico - parfois rempla- '% ce par une Gazelle de l'Alat - a pour tache ~ d'eloigner les eventuels nomades presents @ _____ ....... __ -...:;~ __ ~ ..... _ ..... ~;;;;;.J ......... ... oIJJI!., ..... 'W;SO~ ..... ~~_ ........................ _---"...I

sur les zones. C'est aussi lui qui, lors des tirs Mirage, depose I'officier charge d'autoriser I'ouverture du leu et d'annoncer les resul­tats.

Chaque annee, I'ETOM 88 effectue 800 h de vol en moyenne, soit 400 h sur Transall, 250 h sur Puma et 150 h sur Fennee.

Mirage sur Tadjoura Heritier des traditions des ERC 111 /561 et

ERC IV/561, I'EC 4/33 " Vexin " est comple­tement operationnel sur Mirage 2000 depuis I'ete 2002. Le deploiement des deltas dans la Corne de l'Afrique s'est deroule en trois temps : arrivee de cinq 2000C RDI au cours de I'ete 2001 , remplacement des quatre derniers F1 C devolus a la reconnaissance

2. Oe juilfet 1998 a mars 2001, /'operation « Khor Angar " s 'etait traduite par une augmentation des regimes d 'alerte pour les Mirage F1C et par un renfor­cement de la presence navale ainsi que des moyens de detection et äe defense sol-air

par trois 20000 en juillet 2002, et, enfin, mise en place de deux 2000C supplemen­taires au mois de septembre 2003. Avec ses dix chasseurs , I'escadron est aujourd 'hui notablement plus performant. II faut dire que, depuis le retrait du service du missile Super 530F, les F1 C ne disposaient plus que de la capacite Magie 2 en combat aerien, se retrouvant un peu demunis face aux inter­cepteurs voisins du Yemen (MiG-29 et F-5E), de l'Ethiopie (MiG-23 et Su-27) et de l'Erythree (MiG-29) D'autant plus que, a I'epoque, le conflit entre ces deux derniers pays faisait peser le risque d'un raid aerien erythreen sur la vi lle de Djibouti2

.

Le role principal des chasseurs franyais est de garantir la securite de I'espace aerien djiboutien en protegeant tout particuliere­ment le port et I'aerodrome. Les 2000C (au standard S52C, le plus performant) sont a meme de realiser tout I'eventail des mis­sions de defense aerienne, de la police du ciel a I'escorte d'un dispositif de transport

tactique ou d'hel icopteres en passant par la couverture de zone (CAP).

Depourvus de reelle aptitude a la recon­naissance photographique (mais dotes quand meme d'une capacite de detection), , les 20000 ont, en revanche, propulse le " Vexin " dans I'ere du bombardement de nuit et de la frappe laser de precision. La recherche et la neutralisation d'un navire n'ont plus qu'un lointain rapport avec ce qui se pratiquait du temps des F1C. La nacelle Atlis (de jour) ou le PDLCT permettent d 'ob­server de loin et amenent confort et securite lorsqu'il s'agit de surveiller des zones sen­sibles comme les 71es Amish , au nord de la republique de Djibouti , qui font I'objet d'un accord de demilitarisation international. Toutefois , I'EC 4/33 a conserve son labora­toire photo argentique et peut donc traiter les films rapportes par I'ATL 2, mais aussi ceux des Mirage IV en cas de deploiement temporaire de ces vecteurs. Les 2000 etant ravitaillables en vol , les projections rapides

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Ci-dessus : en virage sur la cote cora llienne, le capitaine

« Marly » Lim ar nous pre­sente la decoration de son

appareil arborant desormais les codes et I'insigne

de I'EC 4/33.

Ci-contre : deux equipages de Nancy so nt en renfort

tournant a Djibouti, ce qui leur permet de profiter d'un

terrain d'entralnement hors du commun.

sont desormais possibles autour de Ojibouti, voire plus loin pour assurer notamment la couverture aerienne de La Reun ion, une mis­sion secondaire de I'escadron qui s'y rend generalement une fois par an lors de I'exercice " Geranium ".

Mousquetaires polyvalents Cote personnel navigant, le 4/33 compte sept pilotes et un navi­

gateur affectes pour deux ou trois ans, cet effectif etant complete par des renforts tournant tous les deux mois, generalement trois pilotes de 2000C (Cambrai ou Orange) et deux equipages de 20000 (Nancy) . Seuls le patron de I'escadron, le chef des opera­tions et le commandant d'escadri lle volent sur les deux types d'avion.

L'entrainement des pilotes est oriente vers la recherche d'une polyvalence elargie. Ainsi , les chasseurs purs consacrent 30 % de leurs missions a I'assaut (Ieur role secondaire) tand is que les equi­pages de 20000 effectuent un tiers de leurs vols en defense ae­rienne. Chacun dispose d'une importante allocation annuelle de munitions, soit, pour I'air-sol, vingt bombes lisses F4 inertes, deux Mk.82 bonnes de guerre et la quantite d'obus d'exercice neces-

36 AIR FAN

Golft··""", ocLiN INDIEN

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sai re a douze passes de tir canon (d ix-huit pour I'air-air) En mai 2003, I'escadron a ainsi realise une campagne de tir autonome sur cible electro-acoustique TAC 100 tractee par un Mirage 2000C au-dessus de la zone de ti r en mer, a I'est de I'aeroport. Pour I'air­sol (canon et bombes), les aviateurs fran­<;:ais utilisent le champ de tir de Oamerjog, juste au sud de la piste (en bord de mer) ainsi que celui de Godoria, au nord, tres caracteristique avec son axe de tir entre deux pitons rocheux et cinq vieux chars en guise de cibles . Le dernier champ de ti r, Marian Koron, est situe a I'ouest de la ville, dans une zone de desert caillouteux. II ne sert que pour les exercices d'appui feu au profit des forces terrestres. C'est la qu 'un Mirage 20000 s'est ecrase au printemps dernier, lors d'une mission de nuit. Cet acci­dent a durement frappe le 4/33 qui a perdu son navigateur affecte et un pilote en renfort de I'EC 1/3" Navarre »

Entrainement exceptionnel Ojibouti offre aux pilotes et navigateurs

fran<;:ais un eventai l de missions remar­quable. Le trafic civil etant limite , I'espace aerien est pratiquement libre et ils peuvent y evo luer en changeant rapidement de tranche d'altitude, jusque tres bas dans un relief varie parfaitement adapte au vol tac­tique, sans lignes a haute tension ni trop grosses concentrations d'oiseaux, du moins si I'on evite les zones des lacs et les man­groves. Outre les missions de defense ae­rienne ou d'assaut, ils pratiquent regul iere­me nt I'appui aerien avec guidage depuis le sol ou un Atlantique en vol, la reconnais-

En haut : lance a pleine charge postcombustion, ce 2000C s'arrache sans difficulte de la piste

d'Ambouli.

Ci -contre : photographie devant la porte des locaux de I'escadron, le personnel navigant du

« Vexi n » present lors du reportage d'Air Fan, avec les deux equipages en renfort de Nancy.

sance tactique, I'attaque de bateaux et meme la penetration en suivi de terrain (sur 20000). Des corr~dors ont ete traces a cet effet, qui evitent les quelques villages ou regroupements nomades, mais leur emploi de nuit acependant du etre suspendu, car le risque etait grand de croiser des helicop­teres des forces speciales americaines en vol d'entra'lnement tous feux eteints et non

mentionnes dans le planning d'activite. Culte du secret oblige !

La presence a la fois d'intercepteurs et de bombard iers tactiques permet de mixer les cultures et de faire travailler tout le monde ensemble. A I'occasion, les pilotes du 4/33 " Vexin » se frottent a d'autres adversaires de passage, chasseurs embarques a bord des porte-avions de I'US Navy en transit dans la mer Rouge ou AV-8B des Marines

~ deployes sur des batiments porte-helicop­- teres. Tous attendent avec impatience le t retour du PAN Charles-de-Gaulle pour se l mesurer aux Rafale et aux Super Etendard. ~ Les pilotes ne volent pas plus qu'en ~ France, soit 180 heures par an , mais la qua­~ lite des missions et une remuneration majo­@ ree compensent largement les conditions

de vie difficiles et font de Oj ibouti une affec­tation exotique recherchee. O'autant que survoler les paysages extraordinaires qu'offre le pays, avec des lieux mythiques comme le golfe de Tadjoura, les 'Ilots coral­liens des Sept Freres, la passe du Ghoubet, le desert du grand Barra ou les lacs Assal et Abbe, est un privilege que I'on savoure a chaque instant. 0

Eric DESPLACES et Philippe ROMAN

AIR FAN 37

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Pour la premiere fois de son existence, I'Union europeenne a conduit cet ete une intervention militaire en totale autonomie. Qui plus est en Ituri, un district de la republique democratique du Congo, c'est-a-dire bien loin de ses frontieres naturelles. Une intervention qui a exige la projec­tion a 6 500 km d'une force terrestre dotee de blindes et de nombreux vehicules. « Artemis »,

puisque tel est le nom de code attribue a cette operation europeenne, a donc vu la mise en place de ponts aeriens, mais aussi de moyens aeriens de combat importants. Son succes doit cependant beaucoup a la France, nation-cadre, qui a fourni le plus gros des forces et moyens de commandement. A I'heure ou Washington s'enferre dans I'apres-guerre en Irak, « Artemis »

a demontre le savoir-faire europeen en matiere de retablissement et de maintien de la paix. Des competences durement acquises dans les annees 1990 en ex-Yougoslavie. 38 AIR FAN

" J.:~ ~ ,;;,;--." ~ .. '

I

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-

A erodrome de Bunia, capitale de la province congolaise d'lturi, EI I'aube du 6 juin 2003. Dans le lointain, un C-130H-30 se presente en approche sous

un fort angle de 10°, volets sortis en grand. 11 descend depuis le niveau 180 EI raison de 1 000 pieds par nautique, donnant verita­blement le sentiment de vouloir pionger droit vers le sol. C'est assez impressionnant pour les passagers. Mais il s'agit d'eviter une

A gauche, en haut: I'armee de l'Air a montre une nouvelle fois, dans le cadre d'« Artemis », sa capa­cite a projeter rapidement a de grandes distances un module operationnel de Mirage 20000 ; des appareils quasi immediatement disponibles pour participer a d'eventuelles missions de combat

En haut: ce F1 CR base a Entebbe se rapprache de la nacelle qu'un Transall ravitailleur laisse trainer derriere lui. Evoluant le lang de la frontiere separant l'lturi congolaise de l'Ouganda, le C 160, lui-meme base a Entebbe, apportait aux F1 la capacite arester plus longtemps sur zone en cas de necessite operationnelle.

Ci-contre: c'est un C-130 de I'armee de l'Air qui a effectue le premier atterrissage europeen a Bunia.

longue approche au cours de laquelle I'ap­pareil pourrait etre vulnerable EI d'eventuels tirs venant du sol. L'equipage est coutumier de ces conditions d'emploi non optimales. En effet, I'avion, qui porte les cocardes fran­r;:aises, vole dans le cadre de la DOS (Di­vision des operations special es de I'armee de l'Air) au profit du COS, le commande­ment franr;:ais des operations speciales.

Le COS ouvre la porte Le C-130 touche enfin la petite piste de

1 800 m de long sur 30 de large, EI peine assez longue pour permettre une« accele­ration-arret " au decollage. A I'evidence, ainsi que I'avaient indique au prealable le colonel franr;:ais Daniel Vollot (commandant le detachement de Casques bleus urugua­yens en place EI Bunia) et la petite equipe de neuf militaires envoyee en reconnaissance des le 20 mai, le revetement asphalte n'est pas parfait. 11 est meme tres mince et en mauvais etat. Le pilote sent les plis du gou­dron au travers des vibrations du manche. 11 s'en inquiete aupres du copilote, craignant pour I'integrite des pneus. Les helices tour-

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nant maintenant en pas inverse ralentissent tres fortement I'avion qui s'arrete enfin. La rampe arriere s'abaisse et des soldats tout en armes et revetus de gilets pare-balles bondissent a I'exterieur, se precipitant aux alentours pour s'assurer du controle des points cles de I'aeroport, notamment des abords de la piste, du parking et de la pe­tite tour de controle provisoire montee sur un systeme de ciseaux et installee la par la Monuc, la Mission des Nations unies au Congo. Aussi etonnant que cela puisse sembier puisque Bunia est bien loin de tout littoral maritime, les soldats en question sont des marins. Ils appartiennent au commando marine base aArta, en republique de Djibouti. Autrement dit, ce sont, eux aussi, des hommes du COS.

" L'ouverture de la porte ", ainsi que le COS aime a surnommer les operations d'en­tree de theatre, se deroule sans anicroche. Pas de reaction de la part des miliciens

pourtant bien visibles a proximite. L'effet de surprise a manifestement pleinement joue son role. Strictement franyaise et menee sous le commandement direct du COS par le colonel Rastou il , chef de corps du 1er RPIMa de Bayonne, I'operation " Mam­ba Noir " peut donc se poursuivre.

Chevauchee fantastique a Bunia Deux Transall et un autre C-130 arrivent

ainsi a Bunia le meme jour avec des ele­ments du 1er RPIMa et quelques jeeps P4. Au soir du 6 juin, une centaine de soldats du COS ont deja pris position sur I'aeroport desormais securise. Les hommes du GFS (Groupement de forces speciales) s'instal­lent pour la nuit, prets atout. Le lendemain et le surlendemain , le pont aerien se pour­suit entre Entebbe, en Ouganda, et Bunia. Les avions franyais acheminent les premiers elements du GTIAM (Groupement tactique

interarmes multinational) de la force euro­peenne " Artemis " en charge de la securi­sation de Bunia. Le 8 juin au soir, on de­nombre deja sur place quelque 357 soldats franyais. Ainsi, parallelement au GFS, le GTIAM commence a prendre forme avec pour noyau une compagnie du 3e RIMa.

En ville, a la suite des combats intermi­lices qui ont fait une trentaine de morts (en sus des 400 comptabilises en mai) et seme a nouveau la panique au sein de la popula­tion civile reduite a une centaine de milliers de personnes sur 230 000 (Ie solde a fui ou a ete tue), le colonel Rastouil, le patron du GFS, decide, le 8 juin, de realiser une demonstration de force et, donc, de pene­trer dans Bunia pourtant encore entierement aux mains des miliciens. C'est ainsi que, a bord de P4, une soixantaine de commandos du COS effectuent une premiere reconnais­sance armee dans la capitale de la pro­vince congolaise. 11 faut imaginer ces sol­dats, s'engageant dans I'avenue principale et progressant precautionneusement, tous les sens en alerte, prets a tirer au Famas et a la mitrailleuse au moindre signe hostile, entre deux haies de 400 miliciens en armes, pour la plupart des adolescents, voire des gamins de douze ans, quasi incontrolables.

Malgre les risques et la disproportion des forces en presence, celte veritable chevau­chee fantastique reussit. En effet, face a la determination des militaires franyais, les jeunes miliciens decident finalement de les

Ci-contre : les aeroports de Bunia et d'Entebbe se trouvant al 000 m d'altitude, les Transall, ici un appareil de 1'« Anjou », ne pouvaient emporter que 7 t maxi de fret (plus 5 t de carburant : 3,6 pour le trajet aller-retour et 1,4 en vue d'un eventuel derou­tement vers I'aerodrome tanzanien de Mwanza, sur la rive meridionale du lac Victoria) contre 13 t pour les Hercules. Ce qui explique le recours quasi sys­tematique aux C-130, notamment pour le transport des blindes (10 t environ pour un VAB).

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laisser entrer en ville et mettre - provisoire­me nt - un terme a leurs exactions sous les acclamations de joie de la population jus­qu 'alors terrorisee.

Des Mirage 20000 tres mena{ants Entre-temps, le 4 juin, cinq Mirage 20000

de I'EC 3/3 et deux C-135FR ont quitte Istres pour rejoindre d'une seule traite I'aeroport tchadien de N'Ojamena, venant completer le dispositif deja present sur place et consti­tue de deux F1 CR et trois F1 Cl Oe la, equi­pes de leur nacelle de designation de cible POLCT-S et de bombes a guidage laser, les 20000 assurent, des les premiers jours de I' installation des forces europeennes a Bunia, une presence dissuasive au-dessus de la zone en effectuant de frequents sur­vols au ras des toits de la ville. Le message est tres clair. Les chasseurs pourraient aise­ment frapper avec une extreme precision les milices, notamment leurs chefs - on

appelle cela des frappes de decapitation -, si jamais la situation a I'egard de nos troupes au sol devait se degrader.

A partir du 10 juin , le general fran<;ais Jean-Paul Thonier, commandant de theatre pour " Artemis " , prend le controle des ope­rations interarmees. Oe son cote, le GFS continue, en etroite collaboration avec I'etat­major d'" Artemis ", ses patrouilles et recon­naissances offensives dans un rayon d'une trentaine de kilometres autour de Bunia, contr ibuant ainsi a I'acquisition du rensei­gnement.

Les jours suivants , la montee en puis­sance du dispositif " Artemis " se poursuit avec, notamment, le debarquement, les 12 et 13 juin , d'une deuxieme compagnie du 3" RIMa et de quatre blindes de combat ERC 90 Sagaie du 1"' regiment de hussards parachutistes (1 "' RHP) Les moyens dispo­nibles se revelent des lors suffi sants pour pouvoir commencer a operer a I'exterieur de I'aeroport, partir a la recherche d'informa-

!; Ci-contre: dans les premiers ~ jours de I'arrivee a Bunia de la .g force « Artemis », au moment ~ Oll elle Mait le plus vulnerable, @ les frequents survols de la

ville au ras des toits par les Mirage 20000 dotes de pods POLCT-S et de bombes a gui­dage laser ont ind en iab lement marque les esprits de la popu­lation locale, et surtout des milices et de leurs chefs sou­cieux de possib les frappes de decapitation a leu r encontre au cas Oll des so ldats euro­peens auraient ete tues.

Au-dessous: les 20000 disposaient a N'Ojamena d'un petit stock de bombes a guidage laser. Le trio 20000/ POLCT-S/BGL a ainsi demon­tre avec un plein succes que la dissuasion, pour jouer, n'a pas besoin d'etre nucleaire.

tions, voire intervenir pour aider les popula­tions locales, sans porter atteinte a la secu­rite de la plate-forme.

Premiers accrochages Ainsi, le vendred i 13 juin 2003, les

Fran<;ais - une patrouille d'une cinquantaine d 'hommes du COS - realisent sans malleur premiere intervention dans un vi llage soi­disant attaque par des miliciens lendus. 11

n'en va pas de meme le lendemain. La patrouille du GFS se fait , en effet, accrocher au mil ieu de la matinee, a six kilometres de Bunia, au cours d'une reconnaissance sur le vi llage de Oele. La colonne, forte de quinze vehicules tout terrain et d 'un ERC 90, tombe dans une veritable embuscade. Onze obus de mortiers encadrent les veh icules egale­me nt pris a partie par des ti rs de mitrail­leuses et d'armes legeres. Les 70 soldats fran<;ais ripostent aussitot. Les echanges de tirs durent une bonne vingtaine de minutes. Assez vite, des Mirage 20000 survolent la zone des combats ; leur presence se re­vele dissuasive. Heureusement, aucune vic­time n'est recensee d'un cote comme de I'autre a I'issue de cet affrontement. Mais cela demontre bien que les milices tatent la determination des militaires fran<;ais .

Oeux jours plus tard , le 16 juin, une pa­trouille fran<;aise intervient a proximite du Iycee Chem-Chem a la suite de renseigne­ments fournis par la population faisant etat de miliciens violant des enfants. Oe tres jeunes combattants hemas de I'UPC (Union des patriotes congolais) , a I'evidence ivres et drogues, prennent alors pour cibles les mil itaires. Lesquels ripostent aussit6t, fai­sant deux morts chez les agresseurs. Selon le colonel Oubois, porte-parole de la force " Artemis " : " Lorsque /'on nous tire des­sus, nous ne procedons pas ades tirs d 'avertissement. Nous exigeons la liberte de

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Ci -dessus : I'armee de I'Air avait insta lle a Entebbe une station sol SAlM d' interpretation d'images per­mettant un traitement rapide des photos ramenees par les F1CR. Lutilisation des Mirage, de I'ATL 2 et

I'acquisition par le cas de renseignements humains ont suffi aux militaires europeens, malgre I'absence

de drones, a se faire une idee assez precise du dispo­sitif des milices et de ses evolutions au fil des jours.

Ci-contre : la Mecanique du detachement CAS-Reco avait installe a Entebbe un abri provisoire permettant

d'assurer I'entretien courant de ses Fl CR.

circulation pour aller 18. ou nous voulons aller. "

Le message est c1air. Et entendu. Et comme les moyens d'" Artemis " continuent a s'etoffer (mi-juin, les effectifs deployes a Bunia atteignent les 500 hommes), le gene- .~

ral Thonier, commandant de theatre de la ~

force europeenne, peut se permettre, lors 1 de sa rencontre le 21 juin avec Thomas ~ Lubanga, le dirigeant de la milice UPC ~ hema qui contr61e Bunia, de lui fixer un ulti­matum exigeant que plus aucun milicien arme ne soit visible a partir du 24 juin dans la vi lle.

Bunia enfin sous contr6/e Et le 24, le seu l pont a 30 km en amont

donnant acces au nord de la capitale de l'lturi est saisi par les hommes de la 2e com­pagnie du 3e RIMa qui tiennent ainsi un point strategique. Vehicules, pietons et cycl istes souhaitant entrer en vi lle sont desormais soumis au detecteur de metaux. A peine quelques jours auparavant, les snipers des milices s'amusaient encore a faire du tir au pigeon sur les civi ls traversant ce pont. Le 25 juin, c'est au tour du point d'entree sud de la ville de passer sous le contr61e des militaires frangais. Des lors, ces derniers commencent a patrouiller en vil le et les Sagaie font leur effet sur les miliciens.

Au fil des jours, le GTIAM prend de I'am­pleur. Ainsi, debut jui llet, il atteint sa tai lle

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nominale d'un peu plus de 800 hommes, rassemblant un escadron mixte blinde du 1e, RHP (fort de huit ERC 90 et de quatre VBL d'investigation), deux compagnies d'in­fanterie du 3e RIMa (une trentaine de VAB, quatre VBL, des P4 et des camions), une section du 11 e RAMa (quatre mortiers de 120 mm), un detachement du genie de l'Air (vehicules specialises), une antenne chirur­gicale et une autre de triage (une dizaine de blindes sanitaires Pandur belges), sans oublier divers moyens de soutien et de com­mandement (PC, transmissions, etc.).

Le 5 juillet, les soldats d'" Artemis " s'em­parent du point d'acces nord-est de Bunia. Le 8, ils parviennent a maitriser une mani­festation melant miliciens armes de I'UPC et civils. Le surlendemain, le general Thonier impose a Thomas Lubanga des conditions tres strictes sur les deplacements et I'arme­ment de ses gardes du corps. Le 11 juillet, au cours de la prise de contr61e d'un camp de I'UPC, a Miala (nord-est de Bunia), un

echange de coups de feu fait encore trois morts chez les miliciens.

La determination sans fail le de la force eur9peenne est des lors parfaitement per­gue par les dirigeants des milices. La situa­tion se calme et la vie economique reprend petit a petit en vil le. Parallelement apparait tres rapidement le besoin d'une reconnais­san ce photo aerienne pour cartographier Bunia et ses environs, mais aussi acquerir un renseignement completant celui, force­me nt parcellaire, recueilli par les forces spe­ciales au sol.

Bien loin de N'Djamena Les deux F1CR du 1/33 " Belfort "

deployes, comme les 20000, a N'Ojamena operent donc des la mi-juin au-dessus de la capitale de l'lturi. Toutefois , I'aeroport tcha­dien etant situe a 2 000 km de Bunia, ces missions (I'equivalent de raids aeriens qui seraient menes sur Istanbul depuis Nancy)

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s'averent lourdes a organiser, notamment pour les rencontres avec les tankers qui exi­gent une navigation et un timing d 'une ex­treme precision. Elles sont aussi tres fati­gantes pour les equipages, car excessive­me nt longues. Ainsi, afin d'assurer une pre­sen ce sur zone de moins de deux heu res, les 20000 doivent-ils rester en I'air pendant sept heu res. Oe leur cote , les F1 CR doivent tenir I'air cinq heures pour moins de 45 mn de vol au-dessus de Bunia. Et tous ont besoin de ravitail ler plusieurs fois lors de la mission. Quatre C-135FR, deux bases a N'Ojamena et deux a libreville (Gabon), jouent ainsi les bons samaritains ou, plus prosa·iquement, les stations-service. Tout cela s'avere donc complexe a coordonner et bien coOteux en heures de vol. Ainsi , pour accomplir les 70 sorties qui leur seront cre­ditees au cours d '" Artemis " , les cinq 20000 vont devoir accumuler en trente jours, jusqu 'au 6 juillet, pas moins de 362 h de vol. Quant aux quatre tankers concernes, c'est un total de 665 h de vol qu 'ils vont pa- .~

rallelement effectuer en 115 sorties. u; ~ Si cet effort s'avere acceptable de fac;;onö E ponctuelle , il devient neanmoins excessif «

lorsque I'action s'inscrit dans la duree, ~ Oebut juillet, le dispositif est donc modifie. Trois des cinq 20000 rentrent en France, les deux autres restant en reserve a N'Ojamena avec les trois F1 CT de Colmar. les deux F1 CR sont, eux, renforces par deux appa­reils du 2/33 " Savoie " en provenance de Reims et s'installent les 7 et 8 juillet sur I'ae­roport d'Entebbe (precedes le 2 juillet par la Mecanique et le soutien technique corres­pondant, soit 70 tonnes de materiels et d'equipements, dont une station SAlM d'in­terpretation d 'images). Ils y resteront jusqu 'a la mi-septembre. Des lors, I'emploi des Mirage de reconnaissance se revele plus efficace. Sur alerte, il ne leur faut plus que 45 mn a peine pour rejoindre Bunia. le temps de presence sur zone est egalement legerement accru , tandis que la duree des

missions passe de cinq heures precedem­ment a moins de deux. Par ailleurs, le poten­tiel des quatre appareils est consomme plus lentement et les six pilotes se fatiguent moins. le maintien a Entebbe d'un Transall ravitailleur leur permet, en outre, de tenir I'air plus longtemps soit sur zone soit dans I'at­tente de meilleures conditions meteo sur Entebbe. Globalement, tout au long d'" Ar­temis ", c 'est-a-dire jusqu 'au retrait a la mi­septembre du dispositif deploye en Ougan­da, ce C 160 aura realise quarante sorties de ravitaillement au profit des F1CR ; quelque 210 t de carburant eta nt ainsi distri­buees en vol.

Un ATl 2 de la Marine se trouve egale­ment base a Entebbe depuis le 26 juin Mis en ceuvre par une vingtaine de marins, il realise de nuit comme de jour des missions de surveillance, et surtout d'interception d'echanges radio. Grace a sa tres grande autonomie, il peut rester jusqu'a quatre

heu res sur zone. Ce qui en fait un excellent relais de transmissions et un PC volant de coordination des activites aeroterrestres pour le guidage des Mirage lors des mis­sions d 'appui feu.

Au-dela de leur fonction quotidienne de reconnaissance (jusqu'a quatre sorties quo­tidiennes), les F1 CR assurent egalement, avec leur unique canon de 30 mm, un role d'appui aerien rapproche (CAS) au profit des troupes stationnees a Bunia. En fait, des que le GFS conduit une patrouille de recon­naissance armee ou qu'un avion de trans­port tactique se dirige sur la ville, un ou deux F1 CR sont pi aces en alerte au sol, prets a decol ler pour assurer le CAS. O'ailleurs, les equipes du GFS comptent toujours un TACP, a savoir un homme des commandos parachutistes de l'Air (CPA 10), forme pour garder le contact direct avec les avions reco et les guider sur d'eventuelles cibles, ainsi qu'un pilote de chasse. Ce der-

Ci-dessus: les Atlantique se reve lent en terres africaines tout aussi indispensables que les Atlantic d'antan. l.'ATL 2 deploye ä Entebbe a ete tres apprecie de tous du fait de ses moyens d'interception radio, de localisation, de gestion de I'appui feu et de survei llanc e, et de sa duree de presence sur zone restee inegalee par les autres moyens aeriens eng ag es sur le theatre des operations.

Ci-contre : quatre C-135FR ont participe ä « Artemis» : deux ä

: partir de N'Ojamena et deux ~ depuis Libreville (Gabon). Le ~ dispositif permettait d'assurer ~ aux 20000 operant ä partir de :5 N'Ojamena la garantie de trou­@ ver un tanker pour ravitailler.

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nier, integre dans la patrouille des forces speciales, consei lle le TACP pour I'ut ili sation des F1 CR en appui feu. Et, c'est vrai, les mi liciens sont impressionnes par I'intervention des chasseurs en radada, qui n'auront jamais a fai re usage de leur canon.

Les helicos s'installent a Bunia Depuis la mi-juin, le general Thonier a aussi a sa disposition ,

sur I'aeroport de Bunia, un duo de Gazelle canon de l'Alat armees par des equipages detaches du 5e RHC de Pau. Ces deux machines etant sur place, elles profitent d'un delai de reaction tres court et peuvent assurer I'eclairage de la patrouille ou sa couverture ades endroits apriori propices ades embus­cades. Leur canon de 20 mm, d'une grande precision, constitue une arme particulierement indiquee en cas d'affrontements Oll les combattants des deux bords sont tres imbriques. Ce qui s'avere moins ai se pour les F1 CR dont I'emploi du canon n'in­tervient que pour des cibles eloignees d'au moins 400 m des troupes amies au sol.

Egalement presents depuis la mi-juin, d'abord a Entebbe, puis a Bunia a partir du debut juillet, deux Puma Resco du 1/67 « Pyrenees " de Cazaux en charge de la recuperation - even­tuellement de vive force - de tout equipage ami en perdition. Ces deux machines blindees, armees et dotees de moyens d'autoprotection efficaces, sont mises en oeuvre par un deta­chement commande par un marin et qui rassemble 42 per­sonnes, dont trois equipages complets de huit hommes (deux pilotes, un mecanicien embarque responsable des turbines, de I'aide a la navigation , de I'emploi du detecteur d'arrivee missile Oamien et des lance-Ieurres, un chef de soute s'occupant de I'helitreuillage, un plongeur sauveteur servant d'arme et trois paras des CPA 20 et 30).

Une Resco type s'effectue a deux Puma, I'un assurant la conduite de la mission proprement dite et I'autre la navigation. Parvenu au-dessus de la zone de recuperation, le leader

Ci-dessous : initialement bases a Entebbe, les deux Puma Reseo de I'armee de l'Air ont rejoint Bunia des I'extension par le Genie de I'helistation loeale. Prevu pour reeuperer tout equipage ayant a abandonner son avion, le duo s'est surtout essaye a la proteetion des Oryx et au soutien des hommes du COS .

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Ci-contre : les Puma Resco sont lourdement blindes,

armes d'une mitrailleuse de 12,7 mm tirant en sabord et

d'un ensemble complet d'au­toprotection. En operations,

ils fonctionnent en duo: I'un assurant la protection rappro-

chee de I'autre pendant la depose DU la recuperation

des commandos et/ou de I'equipage ejecte.

Ci-dessous: Pretoria avait attribue ä « Artemis " deux

Oryx. 11 s'agit de Puma remo­torises avec des turbines Makila, celles-Ia memes qui equipent les Cougar.

Autrement dit, les Oryx, qui n'emportaient aucun arme­

ment ni blindage, beneti­ciaient d'une reserve de puis­sance qui, en ces zones mon­

tagneuses, aurait certaine-ment ete fort appreciee des equipages des Puma Resco.

Neanmoins, ils se sont limites au transport de VIP.

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embarque I'equipage en perdition tand is que le second le couvre avec son arme de sabord. Au cours d' " Artemis ", une seule sortie· Resco aura ete realisee, sans succes d'ailleurs, au profit du pilote" caucasien " d'un MiG-21 ougandais crashe dans le lac Victoria, tout proche d'Entebbe.

En fait, le gros de I'activite de ces deux Puma aura surtout consiste dans I'accom­pagnement des deux Oryx sud-africains (Puma surmotorises avec des turbines Makila de Cougar, mais non blindes et non armes), bases respectivement a Entebbe et a Bunia, et utilises pour le transport de per­sonnalites. Ils ont aussi beau coup ceuvre pour le compte des forces speciales du GFS (infiltration/exfiltration de commandos

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de ses infrastructures tres modestes et rus­tiques, est loin d'etre optimal pour recevoir les avions du GTO (groupe de transport operationnel) en provenance d'Entebbe, af­fectes au pont aerien. Ainsi , comme le ra­conte le lieutenant-colonel Luc de Rancourt, commandant le GTO, " il a fallu partager la plate-forme de Bunia avee les gros porteurs des Nations unies [qui assuraient paraliele­ment la montee en puissance de la force locale de Casques bleus, la Monuc 11], mais aussi .avee les Antonov An-12 affeetes au World Food Program et les appareils plus

. ' ~ legers des diverses ONG travaillant sur ~ plaee. " Toujours selon le chef du GTO, ~ " avee trois avions sur le parking, /'arrivee

. ~ -, ~ d 'un quatrieme . aurait bloque /'usage de

a la recherche de renseignements , eclai­rage et couverture de patrouilles terrestres, etc), realisant au total quelque 95 sorties durant " Artemis ", soit 131 heures de vol.

Afin de gerer I'activite aerienne tactique au-dessus de Bunia, et central iser I'appui aux forces terrestres , un petit centre de coordination des operations aeriennes, fort de quatre pilotes dotes' de postes UHF et VHF les rel iant aux avions et au PC avance, sera mis en place sur I'aeroport.

Un aeroport apartager Simultanement se pour~u it un autre com­

bat, quotidien celui-Ia. En effet, I'aeroport de Bunia, terme plutöt grandi loquent en regard

/'aeroport. Je me suis done entendu avee les responsables de la Monue ' pour ne jamais y faire stationner plus d 'un de mes C-130 ou C 160, eelle-ei s'engageant de son eote a en faire autant. Ce qui laiSsait un ereneau pour un appareil du World Food Program ou des ONG. Pour une meilleure eoordination, j'ai egalement mis en plaee un offieier de liaison aupres de /'etat-major de la Monuea Kinshasa, d 'ou deeollaient les avions de.)'Onu "

En plus de la contrainte du parking, il ya celle de la piste dont le revetement et I'as­sise ne correspondent pas vraiment aux standards usuels. Incapable d'accepter les gros porteurs, elle se deteriore tres vite, se craquelle et se plisse. Ce qui peut se reve­ler dangereux pour les pneus. En outre, I'in­suffisante capacite de transport des Transall

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oblige tres vite le GTO a se recentrer sur les Hereules qui abTment encore davantage le revetement, notamment a I'endroit de I'im­pact a I'atterrissage ou lors des virages au sol a pleine charge.

(

Refaire la piste chaque nuit Dans un premier temps, I'activite aerienne

totale de I'aeroport est limitee a douze rota­tions quotidiennes. Puis, decision est prise d'acheminer des moyens du genie de l'Air afin d'entreprendre la refection de la piste. Des le 8 juin, cinq specialistes debarquent a Bunia pour estimer son etat et prevoir les equipements necessaires aux travaux. En­su ite, un detachement de 23 sapeurs, venus des bases aeriennes d'Avord et de Metz avec leurs materiels, est expedie sur place. 11 est pleinement operationnel le 23 juin.

Des lors, chaque nuit, car il ne faut pas e. interrompre I'activite aerienne diurne, les ~ sapeurs franc;ais , aides par une vingtaine ~ d'ouvriers locaux embauches par l'Onu, se ~

@

Ci-contre : le GTD assurant le pont aerien entre Entebbe et Bunia a profite de la presence de deux C-130 Hereules bresiliens et d'un autre detachement similaire ca na­dien. Bien que non membres de I'Otan, les Bresiliens se sont parfai­tement integres au pont aerien, les procedures etant, en fait, tres proches. En outre, un membre du GTO fran~ais parlait le portugais ...

Ci-dessous: la Monuc des Nations unies est restee a Bunia tout au long de I'operation « Arte­mis ». Son objectif consistait a per­mettre un accroissement signifi­catif de la force de Casques bleus deployee a Bunia et dans ses alen­tours. Elle disposait, entre autres, d'un Mi-26 (notre photo) ainsi que de deux Mi-25 Hind indiens.

lancent avec ardeur dans la refection des tron<;:ons de piste les plus endommages (reperes lors de la visite d'inspection journa­liere) , a la lumiere de puissantes lampes halogenes, essuyant plusieurs tirs de sn i­pers qui les obligent a porter le Famas tout en travaillant. Faute de beton et d'enrobe, ils comblent les trous avec des ma!8riaux 10-caux, voire de la resine pour les petites sur­faces. Cela dit, il ne s'agit pas de remettre la piste a neuf, mais simplement de la rafisto­ler afin de permettre au pont aerien de se poursuivre. D'ailleurs, ce sont bien souvent les memes portions qu'il faut reparer plu-

Ci-contre : mise a mal par les trains monotraces .~ des pesants Hercules, la piste de Bunia etait repa­~ ree toutes les nuits. Le travail devait se faire en ~ I'absence de materiaux (asphalte notamment) et '0 ~ alors que des miliciens s'amusaient a tirer sur u les equipes du Genie. Les sapeurs devaient @ donc travailler avec leur Famas sur le dos !

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sieurs jours de suite. Un vrai travail de Sisyphe.

Au total, le genie de l'Air, epaule Ei partir de la mi-juillet par seize sapeurs britan­niques (Iesquels ameneront sur place, Ei bord d'un C-130 de la RAF, un gros vehi­cule specialise de 16 t) , va ainsi assurer la remise en etat de 680 m' de piste, mais aussi creer une plate-forme de 2 100 m' pour les helicopteres, construire une exten­sion de parking de 7 600 m' et effectuer I'amenagement de la zone vie.

Une infrastructure rustique S'agissant du controle aerien local , il est

confie des le depart Ei deux controleurs de I'armee de l'Air venus de la BA 112 de Reims, qui se relaient de 7 h 30 Ei parfois minuit ou une heure du matin lors des pics d'activite. Dans les premiers jours, ils ope­rent avec des equipements rudimentaires et

en subissant bourrasques de vent et de terre , perches sur un mirador servant egale­me nt aux commandos parachutistes de I'air pour assurer la surveillance et la protection du parking. Jusqu'alors confines Ei la ges­tion du trafic du GTO, ils reprennent Ei leur compte le trafic civil Ei partir du 16 juin . Puis, en recuperant le 8 jui llet la petite mais effi ­cace tour de controle de l'Onu (montee sur un mat extensible Ei ciseaux), ils se retrou­vent en charge de I'ensemble des mouve­ments de I'aeroport, y compris ceux des

Au-dessus: vision d'ensemble des installations aeroportua ires plutöt rustiques de la plate-forme

de Bunia. On aper~oit la tour sur ciseaux

avions des Nations unies. Du fait de la rusti­cite des lieux et des equipements, du stress et de la fatigue qui en decoulent, les contro­leurs effectuent des sejours limites Ei quatre journees · consecutives avant de rentrer Ei Entebbe Oll leur travai l consiste alors en un role de consei l et de liaison aupres des controleurs ougandais. Les deux equipes alternent ainsi leurs sejours Ei Bunia et Ei Entebbe.

Quant aux infrastructures d'approche et de piste, el les sont reduites Ei un balisage Miskit (Mini-operating standard kit) beige, pratique quoique sommaire, et Ei une re­morque de feux " Papi " stationnee sur le cote gauche de la piste. Ce systeme permet d 'indiquer au pilote s'il arrive trop long (quatre lampes blanches), trop court (quatre rouges) ou comme il faut (deux blanches et deux rouges). Les equipages des avions de transport beneficient aussi d'un balisage SAT en bord de piste, generant un echo

appartenant a l'Onu. .~ t;:;;;==~~~~.",

Ci-contre : la montee en puissance de la Monuc 1 a genere, parallelement a « Artemis », un intense E

trafic aerien que les responsables du GTO :; europeen ont dG prendre en compte. @

radar sur I'ecran du pilote qui voit ainsi s'il se trouve ou non dans I'axe. L'ensemble est rustique, certes, mais off re le minimum indispensable pour garantir la securite des atterrissages.

Des le 15 juin, le cap des 1 000 t de fret acheminees sur Bunia est franch i. Et, Ei la fin du pont aerien, le 13 juillet, ce sont quelque 252 rotations d'avions de transport tactique qui ont ete effectuees depuis Entebbe, rota­tions ayant permis I'envoi sur place de pres de 2 000 t de fret et de 1 800 militaires. Par la suite, et jusqu'au 1" aoOI, date de demar­rage du desengagemenl, le rythme se re­duit Ei un simple flux d'entretien (ravitai lle­ment en nourriture, eau et rechanges) de la force" Artemis " . Ce qui permet de relacher un peu la pression sur les equipages de transport et les mecaniciens detaches EI Entebbe.

Bunia est securisee Parallelement, le GFS se transforme. La

cinquantaine d'hommes du commando ma­rine present au debut de I'operation quitte la scene, remplacee nombre pour nombre par des commandos parachutistes de I'air (CPA 20 et 30) constituant une cellule Rapace. Une bonne partie de ces derniers demeure Ei Entebbe afin de securiser les installations de la base de soutien EI voca­tion interarmees (BSVIA) ou participer aux operations Resco.

Quant aux hommes du 1e, RPIMa, ils sont rejoints EI la mi-juillet, EI Bunia, par 80 soldats des forces speciales suedoises. Un renfort nordique apriori inattendu en ces lieux, mais neanmoins fort apprecie du colonel Rastouil (commandant du GFS), notamment du fait de leur professionnalisme et de la richesse de leurs equipements. Le GFS dis­pose ainsi d'un contingent de pres de 180 mi litaires hautement entraines qui, jusqu'EI la

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fin de la presence europeenne, va assurer la securite de la BSVIA d'Entebbe (une ving­taine d 'hommes) et continuer ses pa­trouilles autour de Bunia et ses reconnais­san ces offensives visant a acquerir du ren­seignement humain (Humint). Tout en constituant une force de reaction rapide au profit du general Thonier.

De son cote, le GTIAM poursuit la securi­sation de Bunia en controlant ses points d'entree et en realisant, de nuit comme de jour, a pied ou avec des vehicules, des patrouilles incessantes dans ses rues. En fait , la determination des soldats et du com­mandement d'" Artemis " , I'importance des moyens mis en ceuvre, font que les incidents deviennent rares. Les miliciens abandon­nent la ville et ses alentours aux militaires europeens. Le 16 aoOt, les Franc;ais trans­ferent meme la responsabilite d'un point de controle a I'entree de Bunia aux Casques bleus de la Monuc. Quant a I'omnipresence des avions de combat de I'armee de l'Air, elle a pour effet de reduire a presque rien I'activite jusqu 'alors incessante de petits appareils utilitaires qui acheminaient depuis .~ les pays voisins des armes et des munitions ~ aux milices locales. o

E

L'Europe quitte Bunia Le desengagement de la force " Arte­

mis " va donc pouvoir debuter. D'autant que, des le 11 juillet, ont commence a de­barquer les premiers elements de Casques bleus bangladeshis destines a renforcer les 700 Uruguayens toujours en place a Bunia. Car, a terme, debut septembre, les effectifs de la brigade Ituri de la Monuc 2 devraient atteindre les 3 800 hommes (principalement des Pakistanais et des Bangladeshis), avec

Au-dessus : I'un des deux Hereules de la RAF. Chaque

force aeri enne off ra nt ses spe­eifi eites, le Lei de Raneourt,

responsa ble du GTO franvais ä Entebbe, a done dO en tenir

eompte. Ainsi, par exemple, a-t-il dee ide que tous les eq ui­pages de C-130, quelle que soit

leur nationalite, ea lqueraient leur methode de ca leu I pour les temps de repos sur eelle

des Britanniques, ä savoir un jour de repos par semaine. Exeeption faite des Belges

qui benetieiaient d'un jour de re pos pour einq d'aetivite.

Ci-eontre : ä quelques repri ses, le parking « Artemis », sur I'ae­

roport d'Entebbe, vit passer des « oiseaux » peu eoutu­miers de teiles latitudes. le i,

un Hereules suedois qui servit .0;

ä aeheminer su r plaee le deta- ~ ehement des forees speeiales ~

attribue ä I'operation par ·0

Stockholm. ~ u @

50 AIR FAN

« u @

meme en sus deux helicopteres d'attaque Mi-25 Hind indiens.

Ainsi , le 1"' aoOI, parallelement a la mon­tee en puissance de la brigade Ituri , debute le po nt aerien visant a reacheminer de Bu­nia a Entebbe I'ensemble des vehicules, materiels, equ ipements divers et militaires europeens. Dans un premier temps, il s'agit essentiellement de rapatrier le fret non prio­ritaire, puis, le 1er septembre, c'est au tour des vehicules et du personnel. En cours de reduction de format, " Artemis " entre alors dans une phase de vulnerabi lite. C'est pour­quoi il est demande au GTO de consentir un effort supplementaire. Ainsi, d'une moyenne de sept rotations par jour en aoOt, le rythme passe a quatorze les 3 et 4 septembre. La plupart des avions effectuent trois rotations quotid iennes. Le 3 septembre, le C-1 30 bri­tannique en realise meme quatre. Ainsi le pont aerien Bunia-Entebbe de desengage­ment d'" Artemis " peut-il se conclure des le 6 septembre au soir, soit une huitaine de jours avant la date initialement fixee. 11 aura

necessite pas moins de 221 rotations (450 heures de vol) pour rapatrier 1 500 passa­gers et 1 800 t de freI. 11 reste alors a orga­niser le desengagement d'Entebbe. Lequel s'etalera du 24 aoOt au 25 septembre.

L'Europe, acteur militaire autonome En definitive, quelles lec;ons peut-on tirer

de I'operation " Artemis" ? Tout d'abord , et c'est certainement le plus important, que l'Union europeenne est pour la premiere fois intervenue militairement hors de son espace geographique naturei , parvenant a projeter une force mecanisee particulierement cre­dible a 6 500 km de distance de maniere totalement autonome, sans avoir a s'ap­puyer sur des moyens americains. C'est le succes de la formule de la nation-cadre qui prevoit que certains pays membres de I'UE pu issent, en I'absence d'etat-major opera­tionnel europeen permanent du type du Shape otanien, initier une intervention mili­taire et la souteni r en fournissant par

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exemple des moyens de commandement et de transmissions, auxquels peuvent venir s'agreger des contingents de forces venus d'autres pays. Et celte intervention , parfaite­ment cadree dans le temps et dans ses objectifs, s'est revelee un indeniable succes en permeltant de pacifier la capitale de l'lturi durant la montee en puissance de la force de Casques bleus. 11 n'y a eu aucun debor­dement, ni enlisement. Pas de pertes cote europeen et tres peu chez les miliciens.

A I'echelle de la region des Grands Lacs, I'image de I'UE - et il faut bien le reconnaitre de la France - en sort etonnamment renfor­cee. Un autre enseignement tient a la reac­tivite, dont d'aucuns doutaient, de la chaine de commandement politico-militaire euro­peenne dans laquelle s'inscrivait I'operation " Artemis ", et qui , malgre ses indeniables faiblesses, a fonctionne sans a-coups et avec une bien plus grande celerite et effica-

Ci-dessous: le Transall, ici le tanker fran~ais base a Entebbe, ne souffre pas des travers du

C-130. En revanche, il emporte une charge mar­chande nettement moindre. A noter que les

C 160NG ravitailleurs en vol presentent une tres mauvaise visibilite vers I'arriere. Contrairement ace

qui se passe avec les C-135FR, qui disposent dans la queue du fuselage d'un specia liste surveillant

I'operation de ravitaillement en vol, I'equipage du Transall, quasi aveugle, doit se contenter d'un

simple periscope dirige vers I'arriere.

cite que ne le croyaient possible nombre d'observateurs. La France, en initiant I'inter­vention, puis en s'acquiltant avec compe­tence de son role de nation-cadre, a donc parfaitement demontre I'effet multiplicateur que peut jouer I'UE au profit des puissances moyennes europeennes sur la scene inter­nationale.

L'UE sort egalement gagnante de celte operation realisee dans une totale transpa­rence, avec ses seuls moyens et dans la plus totale legalite onusienne. Malgre ses actuelles limitations structurelles, elle s'af­fiche desormais comme un acteur militaire credible sur la scene mondiale. Encore bien modeste, certes , mais promelteur. Les autres Etats membres ne s'y sont pas trom­pes qui, deja, envisagent d'aller plus loin , notamment dans la gestion commune des moyens de transport aeriens militaires. L'actuelle EACC (European Airlift Coor­dination Cell) d'Eindhoven, qui permet aux forces aeriennes de la France, de l'Alle­magne, du Royaume-Uni, de l'ltalie, de l'Es­pagne, des Pays-Bas et de la Belgique d'optimiser les trajets de leurs tankers et de leurs avions de transport en s'echangeant des capacites d'emport de fret ou de car­burant, pourrait ainsi prendre davantage d'ampleur. Aujourd'hui a I'etude, une hypo­these verrait I'EACC se muer - peut-etre des I'ete prochain - en un European Airlift Center

e-~ Ci-contre: ce C-130 beige '0 souligne les deux grands ~ defauts du Hereules par u rapport au Transall. A savoir @ le train principal monotrace

de part et d'autre du fuselage avec des raues equipees de pneus haute pression, ce qui n'est pas I'ideal pour I'emploi a partir de pistes somma ires ; et I'etrang lement de la soute au niveau des nacelles du train principal, etranglement qui reduit a cet endrait la largeur disponible avec des consequences indeniables pour certains frets vo lumineux.

aux objectifs neltement plus ambitieux. A terme, la formation et I'entrainement des equipages, sans oublier la logistique, pour­raient meme etre europeanises par parcs d'avions : A400M , C-130 Hercules, Transall, CN 235 ...

Enfin, s'agissant du futur A400M, " Arte­mis " a demontre plus que jamais sa neces­site. Toutefois , et les operationnels en conviennent, son arrivee permeltra certes de doper les capacites de transport tac­tique et operatif, mais elle n'apportera tou­jours pas une veritable solution au besoin de transport strategique. Autrement dit, pour celte intervention en Ituri, la chance a voulu que les An-124 soient disponibles. Mais cela aurait pu ne pas etre le cas. L'UE aurait alors ete bien en peine, meme avec des A400M (Iesquels transportent quatre fois moins de fret qu'un An-124) , de realiser aussi rapidement une teile mise en place a grande distance. 11 est encore trop tot pour en parler, de crainte que cela puisse causer du tort au programme A400M a peine lance, mais il est quasi certain que I'UE - voire la France a I'egal du Royaume-Uni avec ses quatre C-17 - devra a moyen terme envisa­ger de se doter en propre d'une capacite de transport aerien strategique. Et cela pourrait passer par I'acquisition d'un lot de Globemaster 111 ... 0

Jean-Louis PROME

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