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SOMMAIRE 1.Principes directeurs du droit de l’économie 2.Concurrence et régulation 3. Propriétés publiques 4. Contrats publics 5. Droit administratif général 6. Urbanisme et environnement Actualité du droit public économique Fin novembre Début décembre 2017

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Sarah Assayag, Inès Madi, Anne-Sarah Seguret

Pauline Caussade, Myriam Gal, Sandrine Lebel

SOMMAIRE

1.Principes directeurs du droit de l’économie

2.Concurrence et régulation

3. Propriétés publiques

4. Contrats publics

5. Droit administratif général

6. Urbanisme et environnement

Actualité du droit public

économique

Fin novembre – Début décembre 2017

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1. PRINCIPES DIRECTEURS DU DROIT PUBLIC DE L’ÉCONOMIE

————————————————————————————————————————

PROJET DE LOI POUR UN ETAT AU

SERVICE D’UNE SOCIETE DE

CONFIANCE

Ce projet de loi adopté le 27 novembre par l’Assemblée

nationale, reprend le projet initial dit « Droit à l’erreur » ;

marquant donc la volonté de mettre en place un Etat

bienveillant et ouvert. Une des premières mesures est

d’inscrire dans le Code des relations entre le public et

l’administration (CRPA) le droit à l’erreur et le droit au

contrôle.

Le droit à l’erreur permet à la personne en état

d’infraction de régulariser sa situation de son propre chef

ou après une demande de l’administration, permettant

d’éviter une sanction. Toutefois, ce principe ne s’applique

pas pour les sanctions mises en œuvre par le droit de

l’Union européenne concernant la santé publique et

l’environnement. Le droit à l’erreur n’est pas non plus

invocable en cas de sanction émanant d’une autorité de

régulation. Notons que dans un avis, le Conseil d'Etat a

émis des craintes en considérant que ce dispositif du droit

à l’erreur pourrait entraver le bon fonctionnement de

l’administration en raison de son manque de moyen. En

effet, le gouvernement en mettant en place ce mécanisme

souhaiterait que les personnes morales ou physiques

demandent un contrôle volontaire de l’administration

devant intervenir dans un délai raisonnable.

On notera enfin que, contrairement à ce qui avait été

annoncé, le texte ne codifie pas la jurisprudence

Danthony. Le gouvernement a été, semble-t-il, convaincu

par le Conseil d’État qui a jugé cette mesure

« inopportune, en ce qu’elle prive le juge de la possibilité

de lui apporter les amendements nécessaires ».

Il est prévu d’instaurer un rescrit général, ou un certificat

d’information, dans le CRPA dans différents domaines

devant être définis par décret. Les citoyens pourront, en

cas d’indécision, demander une précision dans les

domaines listés. Autres documents dont l’opposabilité

aux administrations est généralisée : les circulaires et

instructions, avec là aussi la réserve de la santé, de la

sécurité, de l’environnement et des droits des tiers.

Le droit au contrôle donne lieu à la possibilité de

permettre à l’auteur ou au bénéficiaire d’une décision en

matière d’expropriation, d’urbanisme ou d’insalubrité de

demander au tribunal administratif de se prononcer sur la

légalité externe de celle-ci. Rendue publique pour

permettre aux intéressés d’intervenir, cette demande

suspend l’examen des recours contre la même décision.

Si le tribunal constate la légalité externe de la décision,

aucun moyen tiré de cette cause juridique ne peut plus être

invoqué devant le juge par voie d’action ou d’exception.

Le projet de loi insiste sur les modes alternatifs de

règlement des différends avec la mise en place de comités

qui analysent et valident les projets de transaction.

Une autres avancée notable prônée par le projet de loi est

la dématérialisation des démarches administratives pour

2022. Cette dématérialisation ne concerne cependant pas

la délivrance de papiers d’identité. Une expérimentation

en la matière a été mise en place dans quatre départements

pour une durée de 18 mois.

Dans les domaines de la construction et de logement, les

constructeurs sont autorisés à déroger aux règles en la

matière dès lors qu’ils parviennent à un résultat

équivalent. Il y a aussi une volonté de mettre en place des

énergies vertes avec le développement de projets éoliens

en mer ou géothermiques.

Actualité du droit public économique – Fin novembre – Début décembre 2017

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2. CONCURRENCE ET RÉGULATION

———————————————————————————————————————— RÈGLEMENTATION

GAZ – Les tarifs réglementés de vente de

gaz d’Engie augmentent de 0,97% au 1er

décembre 2017

Délibération n°2017-254 de la CRE du 16 novembre

2017 portant vérification de la conformité du barème

des tarifs réglementés de vente de gaz proposé par

Engie pour le mois de décembre 2017

Communiqué de presse de la CRE du 30 novembre

2017

Les tarifs réglementés de vente en distribution publique

d’Engie sont encadrés par les articles L. 445-1 à L. 445-

4 et R. 445-1 à R. 445-7 du code de l’énergie.

En application de l’article R. 445-5 du code de l’énergie,

la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a été

saisie par Engie le 6 novembre 2017, d’une proposition

de barème pour ses tarifs réglementés de vente de gaz

naturel en distribution publique pour le mois de

décembre 2017. Par rapport au barème en vigueur,

applicable depuis le 1er novembre 2017, cette

proposition répercute l’évolution du coût

d’approvisionnement d’Engie depuis cette date, estimée

par le fournisseur à +0,5 €/MWh. Cette évolution se

traduit par une hausse de 0,97 % du tarif moyen.

Au 1er décembre 2017, les tarifs réglementés de vente

hors taxes d'Engie augmentent en moyenne de 0,97 %

par rapport au barème en vigueur en novembre 2017.

Cette hausse est de 0,3 % pour ceux qui utilisent le gaz

pour la cuisson, de 0,6 % pour ceux qui ont un double

usage cuisson et eau chaude et de 1 % pour les foyers

qui se chauffent au gaz.

TRANSPORT - Homologation de la

décision n° 2017-101 de l’Autorité de

régulation des activités ferroviaires et

routières (ARAFER)

Publication au Journal officiel le 4 décembre 2017

La ministre des transports, Elizabeth Borne, a

homologué les règles de séparations comptables

proposées par l’ARAFER aux entreprises ferroviaires

(voyageurs et fret), aux gestionnaires d’infrastructures

et exploitants d’installations de service. Le 24 janvier

2017, l’ARAFER, pour des raisons de distorsion de la

concurrence, a rejeté les règles de séparation comptable

proposée par la SNCF. L’autorité, en utilisant son

pouvoir règlementaire supplétif, a mis en place de

nouvelles règles comptables qui s’appliqueront à partir

du 1er janvier 2018. Cette règlementation comptable a

pour objectif d’éviter les subventions croisées et les

distorsions de concurrence entre des entreprises

concurrentes et la SNCF gérant à la fois un monopole

ainsi que des activités concurrentielles. L’autorité

souhaite que les comptes des activités soient présentés

de façon indépendante et que la comptabilité réponde à

des objectifs de « stabilité dans le temps, d’application

homogène aux différentes activités de l’entreprise,

d’imputation directe à l’activité concernée des éléments

de bilan et de compte de résultat pour lesquels il existe

une relation d’affectation immédiate et unique ».

JURISPRUDENCE

ENTENTES – Validation d'une clause

interdisant la vente de produits de luxe sur

une plate-forme internet tierce

CJUE, 6 décembre 2017, Coty Germany GmbH /

Parfümerie Akzente GmbH, aff. C-230/16

Coty Germany est une entreprise qui vend des produits

cosmétiques de luxe en Allemagne. Elle commercialise

certaines de ses marques par l’intermédiaire d’un réseau

de distribution sélective (les distributeurs sont agréés)

afin de préserver leur image de luxe. Dans le cadre de ce

réseau, plusieurs contraintes sont imposées aux

distributeurs. Ils ont notamment l’interdiction de vendre

en ligne les produits par l’intermédiaire de plateformes

tierces qui fonctionnent de manière visible à l’égard des

consommateurs.

L’un de ses distributeurs ne respectant pas cette clause

contractuelle, l’entreprise Coty Germany l’a assigné

devant le juge allemand. Le tribunal régional supérieur

de Francfort a des doutes sérieux quant à la licéité de

l’interdiction imposée par le fournisseur de produits de

luxe. Il interroge alors la Cour de justice sur ce point.

Dans son arrêt, la Cour de justice commence à rappeler

sa jurisprudence constante (CJCE, 18 novembre 2011,

Pierre Fabre, aff. C-439/09) selon laquelle un système

de distribution sélective de produits de luxe qui vise à

préserver son image ne constitue pas une entente au sens

du droit de l’Union européenne dès lors qu’il remplit

Actualité du droit public économique – Fin novembre – Début décembre 2017

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deux conditions cumulatives : le choix des revendeurs

doit s’opérer en fonction de critères objectifs de

caractère qualitatif, fixés d’une manière uniforme à

l’égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de

façon non discriminatoire ; et les critères définis ne

doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire.

En l’espèce, la clause imposée par le fournisseur de

produits de luxe à ses distributeurs agréés pour leur

interdire la vente de produits sur une plate-forme

internet tierce (telle qu’Amazon) ne va pas à l’encontre

du droit de la concurrence de l’Union européenne dès

lors que cette clause a pour but de préserver l’image de

luxe des produits concernés, qu’elle est fixée d’une

manière uniforme et appliquée d’une façon non

discriminatoire et qu’elle est proportionnée au regard de

l’objectif poursuivi.

Ainsi, par principe, un fournisseur de produits de luxe

peut interdire à ses distributeurs agréés de vendre les

produits sur une plateforme internet tierce si cette

interdiction est appropriée et ne va pas au-delà de ce qui

est nécessaire pour préserver l’image de luxe des

produits.

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3. PROPRIÉTÉS PUBLIQUES

______________________________________________________________________________

RÈGLEMENTATION

TITRES D’OCCUPATION DU DOMAINE

PUBLIC – Précision de la délivrance des

titres domaniaux de courte-durée pour les

fêtes foraines et les cirques

Circulaire du 19 octobre 2017 publiée le 20 novembre

“application des dispositions de l’ordonnance n°2017-

562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des

personnes publiques - délivrance de titres d’occupation

de courte durée - un cas d’application : les fêtes

foraines et les cirques”

L’ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 relative à la

propriété des personnes publiques impose aux personnes

publiques de précéder la délivrance des titres

d’occupation du domaine public par une procédure de

sélection et de publicité préalable à partir du 1er juillet

2017. L’ordonnance revient alors sur la jurisprudence

Association Jean Bouin de 2010 du Conseil d’État (CE, 3

décembre 2010, Association Jean Bouin, n° 338272).

Cependant, l’imprécision du texte sur la mise en œuvre de

la nouvelle procédure et son inadaptation à quelques

secteurs ont provoqué de fortes critiques, notamment de

la part du monde forain.

La circulaire du 19 octobre 2017, mise en ligne le 20

novembre 2017 (et donc opposable à partir de cette date),

vient préciser les modalités de délivrance des titres

d’occupation du domaine public de courte durée dans le

cas particulier des fêtes foraines et des cirques.

Si la circulaire rappelle le fait que l'autorité compétente

doit toujours apprécier les enjeux économiques de

l'occupation du domaine public avant de choisir le type de

publicité auquel elle aura recours pour que le respect du

principe de libre concurrence soit assuré, elle admet que

les personnes publiques puissent recourir à l’article L.

2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes

publiques (CG3P) pour les titres destinés au monde

forain. En effet, cet article dispose que « lorsque

l’occupation ou l’utilisation autorisee est de courte duree

ou que le nombre d’autorisations disponibles pour

l’exercice de l’activite economique projetee n’est pas

limite, l'autorite competente n’est tenue que de proceder

a une publicite prealable a la delivrance du titre, de

nature a permettre la manifestation d’un interet pertinent

et a informer les candidats potentiels sur les conditions

generales d’attribution ». La mise en œuvre d’une telle

procédure simplifiée a, selon la circulaire, « vocation a

s’appliquer notamment aux fêtes foraines et aux cirques

dont la présence s'inscrit la plupart du temps dans un

contexte d'animation locale festive traditionnelle ». Les

collectivités pourront donc se fonder sur cette disposition

pour délivrer les titres d’occupations aux cirques et

forains.

L’ordonnance du 19 avril 2017 ne précise pas les

modalités de publicité dans le cadre d’une procédure

simplifiée. La circulaire recommande donc aux autorités

compétentes « de se limiter a une publication annuelle

des conditions générales d’attribution de leur domaine

public aux fins de porter a la connaissance de tous les

espaces ouverts a l’utilisation privative et ceux qui

éventuellement en sont exclus » et d’indiquer le service

compétent, le montant de la redevance d’occupation du

domaine public ou ses modalités de calcul. Cette publicité

pourra être réalisée par un affichage en mairie, par la mise

en ligne de l'information sur le site internet de la

commune, ou par la publication « dans un quotidien à fort

tirage ».

La circulaire du 19 octobre 2017 s’appuie également sur

le nouvel article L. 2122-1-3 du CG3P qui prévoit un

régime spécifique d’attribution des autorisations

d’occupation du domaine public lorsque l’organisation de

la procédure de sélection préalable s’avère « impossible

ou non justifiée ». L’article énumère alors cinq cas dans

lesquels l’autorisation peut être délivrée à l’amiable.

Cette liste n’étant pas exhaustive selon la circulaire, il est

possible pour l’autorité compétente de se fonder sur cet

article pour délivrer l’autorisation à l’amiable dès lors que

la sélection préalable est « non justifiée » du fait des

faibles enjeux économiques et enjeux en termes de

respect de la concurrence. Cependant, dans ce cas, il est

important que l’autorité compétente rende publiques les

considérations de droit et de fait ayant motivé sa décision.

Enfin, la circulaire se fonde sur une jurisprudence

constante du Conseil d'État (CE, 22 juin 1951, Daudignac

; CE, 5 février 1960, commune de Mougins ; CE, 4 mai

1984, n° 49153) pour rappeler aux préfets que « toute

mesure d'interdiction générale et absolue des cirques et

fêtes foraines doit faire l'objet d'une attention

particulière » puisqu’elle risque la censure du juge

administratif. La circulaire invite alors les préfets à s’y

opposer au titre du contrôle de légalité qu’ils opèrent.

Ainsi, la circulaire du 19 octobre 2017 est la preuve que

le gouvernement a pu dialoguer avec le monde forain au

moment où le fameux marché de Noël des Champs-

Elysées n’a pas été renouvelé cette année.

Actualité du droit public économique – Fin novembre – Début décembre 2017

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JURISPRUDENCE

MARCHE DE NOEL – Rejet, pour

irrecevabilité, de la requête en référé-

suspension, présentée par la société Loisirs

Associés.

Tribunal administratif de Paris, 16 novembre 2017,

Sociétés Loisirs Associés, n°1716925

La ville de Paris accueille chaque annee, depuis 2008,

pour environ deux mois a compter de la mi-novembre, un marché de Noël sur la partie basse de

l’avenue des Champs-Elysées, lequel fait l’objet d’autorisations d’occupation du domaine public. Le 12 octobre 2015, la ville de Paris et la société Loisirs

Associés (ayant pour gérant M. Campion) ont conclu une convention d’occupation du domaine public permettant la mise en place de ce marché de Noël

pour les éditions 2015-2016 et 2016-2017. Cependant, par un courrier du 3 juillet 2017, la ville

de Paris a indiqué à la société qu’elle avait décidé de ne pas renouveler cette convention d’occupation du domaine public pour l’édition 2017-2018 au motif

qu’elle souhaitait « varier les modalités d’animations de l’espace public et intégrer, dans l’équilibre économique des prochaines occupations des lieux, les

contraintes de sécurité qui s’y imposent ».

Le 6 novembre 2017, la société Loisirs Associés a formé un référé-suspension sur le fondement de

l’article L.521-1 du Code de justice administrative, devant le juge des référés du tribunal administratif de

Paris, afin de demander la suspension de cette décision. Cet article permet au juge des référés, si la requête est recevable, d’ordonner la suspension de

l’exécution d’une décision lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer,

en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

Le juge des référés constate que la ville de Paris a pris la décision de ne pas renouveler la convention

d’occupation du domaine public conclue avec la société Loisirs Associés alors que cette convention était encore en cours. Cette décision est ainsi

intervenue dans le cadre de cette relation contractuelle et, conformément à la jurisprudence, sa suspension ne peut pas être demandée au juge des

référés après l’expiration du contrat. Or, le juge des référés a considéré, au vu des éléments qui lui étaient

soumis, que la convention d’occupation du domaine public concernant le marché de Noël, signée le 12 octobre 2015, est arrivée à expiration le 12 octobre

2017. La société Loisirs Associés ayant présenté sa demande de suspension après cette date, sa requête ne pouvait qu’être rejetée comme étant irrecevable. En

effet, la suspension de la décision ne peut pas être demandée après l’expiration du contrat. La recevabilité de ce référé s’est donc jouée sur une

question de date.

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4. CONTRATS PUBLICS

________________________________________________________________________________

JURISPRUDENCE

REFERE PRECONTRACTUEL –

Annulation de la procédure de passation

d’une concession provisoire pour absence de

mise en concurrence

Tribunal administratif de Paris, ordonnances du 5

décembre 2017, Somupi, n°1717601 et n°1717558

Par une délibération du 22 novembre 2017, la Ville de

Paris a désigné comme attributaire d’une concession de

services provisoire relative à l’exploitation de mobiliers

urbains d’information à caractère général ou local

supportant de la publicité à titre accessoire la Somupi

(Société des mobiliers urbains pour la publicité et

l’information), filiale de la société JCDecaux et de

Publicis, et ce sans publicité ni mise en concurrence.

Les sociétés Clear Channel France et Exterion Média ont

présenté une requête en référé précontractuel auprès du

tribunal administratif de Paris en demandant l’annulation

de la procédure de passation de la concession.

Le juge des référés a annulé la procédure de passation de

ce contrat en considérant qu’en l’espèce, la ville de Paris

ne pouvait déroger à ses obligations de publicité et de

mise en concurrence en invoquant des motifs d’urgence,

des considérations d’intérêt général ou des raisons

techniques.

Cette nouvelle annulation survient après celle confirmée

par le conseil d'Etat le 18 septembre dernier pour non-

respect du règlement de publicité à Paris.

Rejet du recours contre les « clauses

d’interprétariat » prévues dans un marché

public de travaux

Conseil d’Etat, 4 décembre 2017, Ministre d’Etat,

Ministre de l’Intérieur contre Région Pays de la Loire,

n°413366

Dans un arrêt du 4 décembre 2017, le Conseil d’Etat a

rejeté un recours contre les « clauses d’interprétariat »

prévues par un marché public de travaux.

Le 28 avril 2014, la région Pays de la Loire a lancé un

avis d’appel public à la concurrence en vue de la passation

d’un marché public de travaux pour un lycée situé à

Laval. Les documents du marché imposaient aux

entreprises qui entendaient se porter candidates de prévoir

le recours à un interprète pour exposer les droits sociaux

dont disposent les travailleurs et les règles de sécurité

qu'ils doivent respecter sur le chantier. Il est important de

souligner que ces « clauses d’interprétariat » ne doivent

pas être confondues avec les clauses « Molière », qui

visent à imposer l’usage exclusif du français sur les

chantiers.

Estimant que les « clauses d’interprétariat » prévues par

la région constituaient une entrave à la libre concurrence,

le Préfet de région a demandé au juge des référés du

tribunal administratif de Nantes d’annuler la procédure de

passation.

Le juge des référés du tribunal administratif a rejeté cette

demande. Le ministre de l’intérieur s’est pourvu en

cassation contre cette décision.

Par une décision du 4 décembre 2017, le Conseil d’État

rejette le pourvoi en cassation du ministre de l’intérieur.

Dans un premier temps, la Haute juridiction rappelle le

cadre juridique applicable au litige. D’une part, l’article

L.1262-4 du Code du travail impose aux employeurs

détachant temporairement des salariés sur le territoire

français de se soumettre à la législation française en

matière de droit du travail, notamment en matière de santé

et de sécurité au travail et de protection sociale. D’autre

part, l’article 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015

relative aux marchés publics interdit aux personnes

publiques de prévoir des clauses relatives aux modalités

d’exécution du marché qui ne présenteraient pas un lien

suffisant avec l’objet de ce marché.

Dans un second temps, le Conseil d’Etat applique ce cadre

juridique aux deux « clauses d’interprétariat » dont il est

saisi. Tout d’abord, il relève que la clause prévoyant le

recours à un interprète pour exposer les droits sociaux et

la clause prévoyant le recours à un interprète pour exposer

les règles de sécurité qui doivent être respectées sur le

chantier présentent un lien suffisant avec l’objet du

marché de travaux public litigieux. Aussi, la Haute

juridiction juge que ces deux clauses s’appliquent

indistinctement à toute entreprise quelle que soit sa

nationalité. Ainsi, ces clauses ne sont pas discriminatoires

et ne constituent pas une entrave à la libre circulation.

Enfin, le Conseil d’Etat met en évidence que ces deux

clauses poursuivent un objectif d’intérêt général et

qu’elles permettent d’atteindre cet objectif sans aller au-

delà de ce qui est nécessaire. Par conséquent, le pourvoi

du ministre de l’intérieur doit être rejeté.

Actualité du droit public économique – Fin novembre – Début décembre 2017

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Le recours à une clause Molière ne saurait

être justifié par des considérations de santé

ou de sécurité des salariés.

TA de Lyon, 13 décembre 2017, Préfet de la région

Auvergne-Rhône-Alpes, n° 1704697

Par une délibération en date du 9 février 2017, le Conseil

régional d’Auvergne-Rhône-Alpes a approuvé le

dispositif régional de lutte contre le travail détaché. Cette

délibération prévoit notamment en annexe des

modifications aux cahiers des clauses administratives

particulières des marchés de travaux de la région. Afin de

lutter contre le recours au travail détaché sur les chantiers

de la région, l’annexe à la délibération prévoit

l’introduction d’une « clause de langue française » au

terme de laquelle « le titulaire du marché s’engage à ce

que tous ses personnels, quel que soit leur niveau de

responsabilité et quelle que soit la durée de leur présence

sur le site, maîtrisent la langue française ».

Par un déféré enregistré le 26 juin 2017, le préfet de la

région Auvergne-Rhône-Alpes demande au tribunal

d’annuler cette délibération.

Le Conseil d’État juge que la délibération en cause ne

peut être justifiée par la protection de la santé et de la

sécurité des salariés contrairement à ce que soutient la

région. Ayant été adoptée avant tout pour « exclure les

travailleurs détachés des marchés publics régionaux et

favoriser les entreprises régionales », elle n’entre pas

dans les objectifs poursuivis par le I de l’article 38 de

l’ordonnance du 23 juillet 2015. Dès lors, elle doit être

annulée comme entachée de détournement de pouvoir.

Rejet d’un recours contre les clauses

d’interprétation prévues par un marché

public

Conseil d’Etat, 4 décembre 2017 Ministre d’Etat,

Ministre de l’Intérieur contre région Pays de la Loire N°

413366

En l’espèce, la région Pays de la Loire a lancé une

procédure en vue de la passation d’un marché public de

travaux pour un lycée de Laval. Deux clauses

d’interprétariat du cahier des clauses administratives

particulières énonçaient que les entreprises qui désiraient

se porter candidates à l’attribution du marché devaient

prévoir un interprète afin d’expliquer aux salariés

étrangers les droits dont ils disposent ainsi que les règles

de sécurité à respecter sur le chantier. Le préfet a saisi le

tribunal administratif de Nantes d’un référé pré

contractuel estimant que ces clauses d’interprétariat

constituaient une entrave à la libre prestation de service.

Le juge des référés a rejeté la demande du préfet. Le

ministère de l’intérieur a donc décidé de se pourvoir en

cassation.

Le Conseil d’Etat, à l’encontre des conclusions du

rapporteur public, a rejeté le pourvoi du ministère. Il

précise, tout d’abord, que les articles du Code du travail

qui transposent la directive européenne 96/71/CE relative

aux travailleurs détachés sont applicables en l’espèce.

Ensuite, la clause litigieuse est examinée à l’aune de

l’article 38 de l’ordonnance marchés publics du 23 juillet

2015 qui énonce que les conditions d’exécution du

marché doivent être liées à son objet. Le Conseil juge

« qu’une telle clause d’interprétariat présente un lien

suffisant avec l’objet du marché de travaux publics. » Il

relève que ces dernières ne doivent pas être confondues

avec les clauses dites « Molière » qui proscrivent le

recours aux salariés étrangers dans les contrats de marché

public. En effet, les clauses d’interprétariat ne sont pas

contraires au droit de l’Union Européenne puisqu’elles

sont justifiées par un but d’intérêt général et sont

proportionnées au but poursuivi, l’interprète pouvant être

un salarié qui parle différentes langues.

Application de la jurisprudence Bézier I au

contrat d’assurance

Conseil d’Etat 6 déc. 2017, req. n° 396751

En l’espèce, le syndicat intercommunal pour les

transports urbains de la région de Valenciennes

(SITURV), maître d’ouvrage d’un marché public, a

souscrit une assurance auprès d’AXA afin de prévenir

tous les risques de chantiers relatifs à la construction de la

première ligne de tramway de l’agglomération

valenciennoise. À l’issue d’un sinistre survenu sur le

chantier, la SITURV demande une indemnisation à

l’assurance. Celle-ci refuse au motif qu’elle n’a pas été

informée d’une modification du programme de travaux.

La cour administrative d’appel de Douai a estimé que

cette modification n’avait pas changé l’objet du risque et

n’en avait pas diminué l’opinion pour l’assureur.

Le Conseil d’Etat applique la jurisprudence Bézier I au

contrat d’assurance en considérant qu’ « il appartient au

juge administratif, saisi d’un moyen en ce sens, de

rechercher si, lors de la conclusion du contrat, une

réticence ou une fausse déclaration intentionnelle de

la part de l’assuré a été de nature à avoir changé l'objet

du risque ou à en avoir diminué l'opinion pour l'assureur,

alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré

a été sans influence sur le sinistre ; que, si tel est le cas,

il lui revient d’écarter l’application du contrat litigieux ».

Il estime que la Cour d’appel n’a pas fait d’erreur de droit

en jugeant que cette modification contractuelle ne

constituait pas un changement d’objet ou du risque pour

l’assureur.

RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES -

La politique immobilière du ministère de la

Justice : mettre fin à la fuite en avant

Rapport du 13 décembre 2013

Depuis ces quinze dernières années, le Ministère de la

Justice a eu recours à des contrats de partenariats public-

privé (PPP) afin de renouveler son parc immobilier

vieillissant en construisant 14 prisons et deux tribunaux

9

(TGI de Paris et de Caen). L’attractivité de ce modèle

contractuel réside dans la maitrise d’ouvrage privée et

dans la pratique du paiement différé qui permet de faire

lisser dans le temps le paiement de ces immeubles par la

personne publique. Cependant, pour la Cour des

Comptes, les PPP se révèlent peu adaptés aux besoins

immobiliers du Ministère de la Justice. Le recours à ce

financement privé constitue « une véritable fuite en avant

dont les effets sur les marges budgétaires se font sentir de

façon croissante ».

À titre d’exemple, le Ministère verse près de 90 millions

d’euros de redevances par an pour les tribunaux de Caen

et de Paris alors qu’il a budget de 900 millions d’euros

annuel de dépenses immobilières. Les taux d’intérêts sont

cinq fois supérieurs à ceux que l’Etat aurait pu avoir s’il

avait fait un prêt à moyen terme pour payer un marché

public.

Par ailleurs, les surcoûts liés aux modifications afin

d’adapter l’immeuble aux services publics ainsi que les

charges de maintenance sont plus importantes que ceux

d’un contrat de marché public en raison de la rigidité de

ce choix contractuel.

La Cour recommande au Ministère de ne plus recourir aux

PPP dans la construction ou l’entretien de son parc

immobilier. Elle l’incite à approfondir la connaissance

des coûts et à privilégier les contrats de conception

réalisation.

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5. DROIT ADMINISTRATIF GÉNÉRAL

________________________________________________________________________________

JURISPRUDENCE

POUVOIRS DE POLICE – Incompétence

du maire à prendre un moratoire sur

l’installation des compteurs Linky

Tribunal administratif de Montreuil, 7 décembre 2017,

Commune de Saint-Denis, n°1700278

Le maire de la commune de Saint-Denis a pris un arrêté

instituant un moratoire sur l’installation des compteurs

dits “intelligents” Linky sur le territoire de cette

commune. Le préfet défère alors cet arrêté devant le

tribunal administratif de Montreuil considérant

notamment que le maire n’était pas compétent pour

prendre un tel arrêté.

Le tribunal administratif de Montreuil commence par

rappeler que le service public de l’électricité se rattache

à la politique nationale de l’énergie et a pour objet de

garantir l’approvisionnement en électricité sur

l’ensemble du territoire national. Il constitue donc une

compétence de l’Etat, conformément aux dispositions

des articles L. 100-1 et L. 121-1 du code de l’énergie.

Ce code prévoit notamment le développement de

dispositifs de comptages dits « intelligents » qui doivent

être déployés sur le territoire national conformément au

référentiel de sécurité approuvé par le ministre de la

transition écologique et solidaire, en charge de l’énergie.

Ainsi, seuls les services de l’Etat disposent d’un niveau

d’expertise pertinent et d’informations pour apprécier

les risques pour la population résultant de son exposition

aux champs électromagnétiques.

De plus, le tribunal rappelle que les maires, agissant en

vertu de leur pouvoir de police générale, ne peuvent

faire obstacle à cette police spéciale de l’Etat sauf s’il

existe un trouble localisé à l’ordre public. Or, en

l’espèce, aucun trouble à l’ordre public n’est caractérisé.

En effet, la commune de Saint Denis ne s’appuie sur

aucune étude scientifique ou aucun élément local

permettant de mettre en évidence un risque particulier

pour la population de la ville autorisant un moratoire sur

le déploiement des compteurs.

Dès lors, l’arrêté litigieux est annulé par le tribunal

administratif de Montreuil.

Rejet par le Conseil d’Etat l’annulation de la

circulaire portant sur l’intervention

économique des départements

Conseil d’Etat 13 décembre 2017, req. n° 406563

L’association des départements de France (ADP) a

demandé devant le Conseil d’Etat l’annulation de la

circulaire du 3 novembre 2016 sur les possibilités

d’intervention des départements en matière

économique. Elle soutient en premier lieu, que

l’interdiction pour la région de déléguer aux

départements l’octroi d’aides aux entreprises est

contraire à l’article L.1111-8 du CGCT. Le Conseil

d’Etat rejette ce moyen au motif que selon l’article

L.1511-2 du CGCT « Le conseil régional, seul

compétent pour définir les régimes d’aides et pour

décider de l’octroi des aides aux entreprises dans la

région, ne peut déléguer l’octroi de tout ou partie de ces

aides aux départements ».

Par ailleurs, l’ADF conteste également l’obligation pour

les départements de se retirer des syndicats mixtes

chargés des aides à l’immobilier.

Actualité du droit public économique – Fin Novembre 2017

11

6. URBANISME ET ENVIRONNEMENT

________________________________________________________________________________

JURISPRUDENCE

ENVIRONNEMENT – Précision de la

portée de l’obligation faite aux communes

ou EPCI de délimiter une zone

d’assainissement collectif et d’exécuter,

dans un délai raisonnable, les travaux de

raccordement des habitations situées dans

une telle zone

Conseil d’Etat, 3ème et 8ème chambres réunies, 24

novembre 2017, Commune de Rigny-Ussé, n°396046

M. B., propriétaire de parcelles situées dans la zone

d'assainissement collectif de la commune de Rigny-

Ussé, a sollicité à de nombreuses reprises le

raccordement de ses propriétés au réseau

d'assainissement collectif de la commune. La demande

adressée au maire de la commune, le 31 janvier 2012,

est restée sans réponse. Par une délibération du 6 juin

2012, le conseil municipal de la commune de Rigny-

Ussé a refusé d'engager la dépense correspondant aux

travaux de raccordement des propriétés de M. B. au

réseau d'assainissement collectif.

Saisi par M. B., le tribunal administratif d’Orléans a fait

droit à sa demande d’annulation de la décision de rejet

implicite de sa demande du 31 janvier 2012 et de la

délibération du 6 juin 2012. Cependant, la Cour

administrative d’appel de Nantes a annulé le jugement

et rejeté la demande de M.B. Ce dernier a donc formé

un pourvoi devant le Conseil d’Etat.

S’appuyant sur les dispositions de l’article L. 2224-10

du CGCT, le Conseil d’État indique que les communes,

ou les établissements publics de coopération

intercommunale compétents, disposent d’un large

pouvoir d’appréciation pour délimiter les zones

d’assainissement collectif et d’assainissement non

collectif en tenant compte de la concentration de la

population et des activités économiques productrices

d’eaux usées sur leur territoire, de la charge brute de

pollution organique présente dans les eaux usées, ainsi

que des coûts respectifs des systèmes d’assainissement

collectif et non collectif et de leurs effets sur

l’environnement et la salubrité publique. Cependant,

une fois que la zone d’assainissement collectif a été

délimitée, les communes, ou les établissements publics

de coopération intercommunale compétents, sont

tenues, tant qu’elles n’ont pas modifié cette

délimitation, d’exécuter dans un délai raisonnable les

travaux d’extension du réseau d’assainissement collectif

afin de le raccorder aux habitations qui sont situées dans

cette zone et dont les propriétaires en ont fait la

demande.

Ainsi, cette décision met en évidence qu’il ne suffit pas,

pour une commune ou pour des établissements publics

de coopération intercommunale, de délimiter une zone

d’assainissement collectif. En effet, une fois la zone

délimitée, il est nécessaire qu’il soit procédé aux travaux

d'extension du réseau d'assainissement collectif pour

permettre le raccordement des habitations situées dans

la zone quand le propriétaire en fait la demande.

Une fois l'obligation de raccordement dans les zones

d'assainissement collectif instaurée, le Conseil d’Etat a

résolu la question du délai dans lequel les travaux

d'extension doivent être réalisés. En effet, la Haute

juridiction énonce que ce délai doit être « raisonnable ».

Les contraintes techniques liées à la situation

topographique des habitations à raccorder, le coût des

travaux à effectuer, le nombre et l’ancienneté des

demandes de raccordement sont des éléments à prendre

en compte pour apprécier ce délai.

Dès lors, en jugeant que ces dispositions de l’article L.

2224-10 du CGCT ne mettaient pas à la charge des

collectivités une obligation d’exécuter, dans un délai

déterminé, les travaux d’extension de leur réseau

d’assainissement collectif afin de le raccorder à une

propriété, alors même qu’elle est située dans une zone

d’assainissement collectif, la cour administrative

d’appel de Nantes a commis une erreur de droit. Le

Conseil d’État annule l’arrêt et lui renvoie l’affaire.

URBANISME – La cristallisation des

moyens prononcée en première instance

joue en appel

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 30

novembre 2017, n°15BX01869

Dans un arrêt rendu le 30 novembre 2017, la cour

administrative d’appel de Bordeaux juge que la règle de

cristallisation des moyens spécifique aux litiges en

matière d’urbanisme continue à produire des effets

devant le juge d’appel.

La cour administrative d’appel de Bordeaux était saisie

d’un litige, portant sur un permis de construire, pour

lequel le premier juge avait fait usage de ce pouvoir de

cristallisation des moyens.

Dans un premier temps, la cour administrative d’appel

de Bordeaux rappelle la règle de procédure issue des

Actualité du droit public économique – Fin novembre – Début décembre 2017

12

dispositions de l’article R. 600-4 du code de

l’urbanisme, alors applicable au litige. Cet article

dispose que « saisi d'une demande motivée en ce sens,

le juge devant lequel a été formé un recours contre un

permis de construire, de démolir ou d'aménager peut

fixer une date au-delà de laquelle des moyens nouveaux

ne peuvent plus être invoqués ».

Dans un second temps, la cour déduit de ces dispositions

et de leur finalité que le requérant n’est pas recevable à

invoquer en appel un moyen présenté tardivement en

première instance dès lors qu’il a été soulevé

postérieurement à la date indiquée dans l’ordonnance

prise sur le fondement de l’article R. 600-4 du code de

l'urbanisme.

Pour des raisons d’accélération des procédures et de

sécurité juridique des opérations d’urbanisme, la cour

administrative d’appel de Bordeaux n’admet pas la

recevabilité en appel de moyens intervenus

postérieurement à une mesure de « cristallisation des

moyens ».

Ainsi, cette lecture fait exception au principe selon

lequel l’effet dévolutif de l’appel autorise un requérant

à soulever pour la première fois en appel un moyen se

rattachant à une cause juridique invoquée en première

instance avant l’expiration du délai de recours.

Si l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme a été abrogé

par le décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016, son

esprit a été étendu à tous les contentieux par la création

par le même décret de l’article R. 611-7-1 du code de

justice administrative.

URBANISME - Compétence du juge

judiciaire pour connaitre d’un litige né de

l’exécution des contrats passés entre une

société ayant conclu entre convention

d’aménagement avec une commune et les

sociétés assurant la réalisation des travaux

de construction dans la zone

d’aménagement

Tribunal des conflits, 11 décembre 2017, n°4103

En l’espèce, la commune de Capbreton (Département

des Landes) confie par contrat à un prestataire privé, la

société d’aménagement des territoires et d’équipement

des Landes, le soin de réaliser des aménagements.

Le contrat entre la commune et la société avait pour

objet l’acquisition de terrains par la société, la mise en

œuvre d’un programme immobilier et la réalisation

d’équipements publics, dont un parc de stationnement

souterrain comportant un ouvrage formant brise-lames.

Pour satisfaire les exigences contractuelles, la société a

eu recours à des intervenants externes. Ainsi,

l’aménageur este en responsabilité contre les

constructeurs du fait du désordre affectant l’ouvrage

construit.

Le tribunal administratif de Pau, saisi du litige, a sursis

à statuer et renvoyé la question de compétence au

Tribunal des conflits.

Le Tribunal des conflits ainsi saisi rappelle sa

jurisprudence Port Croisade SARL, du 15 octobre 2012

qui affirmait que le titulaire d’une convention conclue

avec une collectivité publique pour la réalisation d’une

opération d’aménagement ne saurait être regardé

comme un mandataire de cette collectivité ; « il ne peut

en aller autrement que s’il résulte des stipulations qui

définissent la mission du cocontractant de la collectivité

publique ou d’un ensemble de conditions particulières

prévues pour l’exécution de celle-ci, telles que le

maintien de la compétence de la collectivité publique

pour décider des actes à prendre pour la réalisation de

l’opération ou la substitution de la collectivité publique

à son cocontractant pour engager des actions contre les

personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats,

que la convention doit en réalité être regardée, en partie

ou en totalité, comme un contrat de mandat, par lequel

la collectivité publique demande seulement à son

cocontractant d’agir en son nom et pour son compte,

notamment pour conclure les contrats nécessaires ».

Par suite, le Tribunal des conflits conclut que ni la

définition des missions confiées à l’aménageur, ni les

conditions prévues pour leur exécution ne permettent de

regarder la convention comme ayant en réalité pour

objet de lui confier le soin d’agir au nom et pour le

compte de la commune. Ainsi, les contrats passés par

cette société pour les opérations de construction au sein

de la zone d’aménagement, « qu’elles aient ou non le

caractère d’opérations de travaux publics », sont des

contrats de droit privé. Les litiges nés de leur exécution

relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire.

PERMIS DE CONSTRUIRE - L’autorité

administrative compétente pour délivrer le

permis de construire doit tenir compte des

prescriptions édictées au titre de la police

des ICPE ou susceptibles de l’être

Conseil d’Etat, 6èmes et 1ères chambres réunies, 6

décembre 2017, n° 398537

Le maire de Bazouges-la-Pérouse a accordé un permis

de construire en vue de l’édification d’un bâtiment

d’élevage de porcs destiné à regrouper sur un seul site

les installations de son titulaire. Les requérants

soutiennent que le permis litigieux est entaché d’erreur

manifeste d’appréciation au regard de l’article R. 111-

15 du Code de l’urbanisme, dès lors qu’il ne comporte

pas de prescriptions spéciales destinées à limiter les

incidences de l’exploitation de l’installation sur

l’environnement.

Le Conseil d’État relève qu’il résulte des dispositions de

cet article qu’il n'appartient pas à l’autorité

administrative compétente « d'assortir le permis de

construire délivré pour une installation classée de

prescriptions relatives à son exploitation et aux

nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner, il lui

13

incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte

des prescriptions édictées au titre de la police des

installations classées ou susceptibles de l'être ». Or, à la

date de délivrance du permis litigieux, une demande

d’autorisation de regroupement d’installations

d’élevage au titre de la police des installations classées

pour la protection de l’environnement était en cours

d’instruction devant l’autorité compétente.

Ainsi, la Haute juridiction ne fait pas droit à la demande

d’annulation du permis de construire formulée par les

requérants.

URBANISME - Notification des recours en

matière d'urbanisme aux membres d'une

indivision

Conseil d'État, 2e et 7e chambres réunies, 4 décembre

2017 – n° 407165

Le maire d'Eclance a accordé, par arrêté, un permis de

construire pour la réalisation d’un bâtiment agricole à

une indivision. Le Conseil d’Etat, dans sa jurisprudence

Lesotri du 5 mars 20141 a jugé que la notification d’un

recours contre un permis de construire délivré à

plusieurs bénéficiaires doit être effectuée à l’égard de

chacun de ses bénéficiaires. Cependant, il vient apporter

une précision dans cet arrêt du 4 décembre 2017 « qu'en

particulier, dans le cas où le permis est délivré aux

membres d'une indivision, la notification doit être faite

à ceux des coindivisaires qui ont présenté la demande

de permis et dont le nom, comme l'adresse, figure dans

l'acte attaqué ou, lorsque les coindivisaires ont désigné

un mandataire, à ce dernier à l'adresse figurant dans

l'acte attaqué ». En l’espèce, les coindivisaires ne

pouvaient pas se prévaloir du défaut de notification du

recours étant donné qu’ils avaient nommé un mandataire

et que ce dernier a bien reçu la notification.

1 CE, 5 mars 2014, n° 370552

Actualité du droit public économique – Fin Novembre 2017