Actualité - Bremond...treprisessous LBO se sont multipliées au...

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Actualité L e début 2013 révélé compliqué pourlessociétésfran- çaises sous LBO. Après notam- ment le groupe de matériaux Consolis, la chaîne de restaura- tion rapideQuicket lecourtierenassurances Gras Savoye, au tour du fabricant de produits en terre cuite Terreal, détenupar LBOFrance,de discuteravec sescréanciers n de restructurersadette.«Alorsquenous constatons, depuis dernier, une forte progressiondu nombre de restructurations sousLBO,cette tendance accentuéeentre janvier et mars, constate Guilhem Bremond, président de tion pour le retournementdes entreprises. Cettesituation est plus inquiétante poursuivie au début du deu- xièmetrimestre et concernede nom- breusessociétésayant déjàfait aménagementdeleurdette.» le cas,par exemple,de Consoliset de Terreal,dont les dettesont été respectivementrestructurées en 2011eten 2009. Plus de 20 milliards de dettes à nancer 2016 en France A de ces deux groupes, la quasi- totalitédesdossiersen culté portent sur desmontagesremontantà la période2005- 2007.Eneffet,cesderniersont généralement étéréaliséssur la basede leviers mentparticulièrementélevés,comprisentre cinq et sept fois contreune four- chetteactuelle de trois à quatre fois. Or, la criseéconomiquea renduinatteignablesles prévisionsde performancesopérationnelles établies dans les businessplans initiaux, compliquant de factole remboursementdes prêts. Un constat particulièrement inquié- tant car les sociétésfrançaises sous LBO devront nancer,selon Fitch, 21,2 mil- liards dedettes 2016. présent,les créancierssesontmon- trés plutôt conciliants avec les entreprises anticipant des cultés,voire une incapa- cité à rembourserleurséchéances.Eneffet, ils ontgénéralementconcédéun«amend-to- extend», un allongement de la maturité des lignes, moyennant rémunéra- tion. Ainsi, cet assouplissement accom- pagnédu prélèvementde commissionstant au titre du waiver accordé un avenantqui permet de supprimer incluse dansle contratinitial, de er lesmoda- lités de la dette que de de la duréedu nancement.Lesprêteursontéga- lement relevé leurs marges, pouvant avoisiner 200 points debase.Dans Faceà du nombre de restructurations de dettes, les créanciersde sociétés sousLBOacceptentde plus en plus cilement de reporter les échéances. n de limiter leurs pertes, les fonds et les banques pourraient choisir de convertir leurs créancesen capital et, ainsi, de prendre le contrôle desentreprises concernées. TENDANCE Les restructurations de dette LBO se compliquent Tous droits de reproduction réservés Date : 13/05/2013 Pays : FRANCE Page(s) : 12,13,14 Rubrique : Actualité Diffusion : (20000) Périodicité : Hebdomadaire Surface : 275 %

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Actualité

L

e début d’année2013s’estrévélécompliqué pour lessociétésfran-çaises sous LBO. Après notam-ment le groupe de matériauxConsolis, la chaîne de restaura-

tion rapideQuicket lecourtierenassurancesGrasSavoye,c’est au tour du fabricant deproduits en terre cuite Terreal,détenuparLBOFrance,de discuteravec sescréanciersafin de restructurersadette.«Alorsquenousconstatons, depuis l’été dernier, une forteprogressiondu nombre de restructurationsd’entreprisessousLBO,cette tendances’estaccentuéeentre janvier et mars, constateGuilhem Bremond, président de l’Associa-

tion pour le retournementdes entreprises.Cettesituation estd’autant plus inquiétantequ’elle s’est poursuivie au début du deu-xièmetrimestreetqu’elleconcernede nom-breusessociétésayant déjàfait l’objet d’unaménagementdeleur dette.»C’estle cas,parexemple,de Consoliset de Terreal,dont lesdettesont été respectivementrestructuréesen 2011eten 2009.

Plus de 20 milliards d’euros de dettesà refi nancer d’ici 2016 en FranceA l’image de ces deux groupes, la quasi-totalité desdossiersen diffi culté portent surdesmontagesremontantà la période2005-

2007.Eneffet,cesderniersont généralementétéréaliséssur la basede leviersd’endette-mentparticulièrementélevés,comprisentrecinq et sept fois l’Ebitda– contreune four-chetteactuelle de trois à quatre fois. Or, lacriseéconomiquea rendu inatteignableslesprévisionsde performancesopérationnellesétablies dans les businessplans initiaux,compliquant de facto le remboursementdesprêts. Un constat particulièrement inquié-tant car les sociétésfrançaises sous LBOdevront refi nancer,selon Fitch, 21,2 mil-liards d’eurosdedettesd’ici2016.Jusqu’àprésent,les créancierssesontmon-trés plutôt conciliants avec les entreprisesanticipant desdiffi cultés,voire une incapa-cité à rembourserleurséchéances.En effet,ils ont généralementconcédéun «amend-to-extend»,c’est-à-direun allongement de lamaturité deslignes, moyennant rémunéra-tion. Ainsi, cetassouplissements’estaccom-pagnédu prélèvementde commissionstantau titre du waiveraccordé–un avenantquipermet de supprimer l’interdiction, inclusedansle contratinitial, demodifier lesmoda-lités de la dette – que de l’extension de laduréedu financement.Lesprêteursont éga-lement relevé leursmarges,l’augmentation

pouvant avoisiner 200 points debase.Dans

Faceà l’augmentation du nombre de restructurations de dettes, lescréanciersde sociétéssousLBOacceptentde plus en plusdiffi cilement de reporter les échéances.Afin de limiterleurs pertes, les fonds d’investissement et lesbanques pourraient choisir de convertirleurs créancesen capital et, ainsi, de prendre le contrôle desentreprises concernées.

TENDANCE

Les restructurations de

dette LBO se compliquent

Tous droits de reproduction réservés

Date : 13/05/2013Pays : FRANCEPage(s) : 12,13,14Rubrique : ActualitéDiffusion : (20000)Périodicité : HebdomadaireSurface : 275 %

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le cadrede cetteprocédure,il estégalementarrivé que les créanciers réclament uneinjection de liquidités de la part desaction-naires,comme pour Materis,l’an dernier.

Une multiplication des misesen redressement judiciaireMais si le recoursà de tellessolutions reste,encoreaujourd’hui,assezfréquent,il devraitdiminuer dans les prochains mois pour selimiter à une cible restreinte : les sociétésprésentant pour l’essentiel un ratio dettenette sur Ebitda inférieur à 4,5 fois et, sur-tout, celles n’ayant jamais bénéficié d’un

report de leur échéancier.«Lesrééchelon-nements de maturité réalisésdepuis 2009se sont parfois révélésinsuffisants dans lamesureoù le rebond desperformancesopé-rationnelles attendu ne s’est pas produit,témoigne Thibéry Gleizes,responsableleve-ragefi nanceFrancechezCréditAgricoleCIB.En raison de la situation dégradéed’un cer-tain nombredesociétéssousLBO,un nouvelamend-to-extend serait, à nouveau, inef-fi cace.»Un sentimentpartagé par de nom-breux prêteurs,qu’il s’agissede fonds obli-gatairesou debanques.«Afin des’adapterauralentissementéconomique,au début de lacrise,les sociétéssousLBOont optimisé leurgestion et réaliséde nombreuseséconomies,signaleCédricColaert,associéen chargedel’équipe restructuring au sein du cabinetEight Advisory. Aujourd’hui, il ne restepasun postebudgétairesur lequel ellespeuventréduire les coûts.»Commela sortiede crisene sedessinepas, lesprêteurspeuvent doncdouter,danscertainscas,du potentield’amé-

lioration dela rentabilitéet, donc,de l’intérêt

d’un amend-to-extend.Or, en l’absenced’un tel accord, les alter-natives restent peu nombreuses.Pour lessociétés se trouvant dans l’incapacité, àcourt ou moyen terme, d’honorer leurséchéances,les solutions adoptéespar les

créanciers ont ainsi parfois été radicales.«Lesmisesen redressementjudiciaire d’en-

treprises sous LBO se sont multipliées aucoursdesdernièressemaines,faute d’accord

entre les actionnaireset les prêteurset, sur-tout, compte tenu du montant de la dette,constateCaroleDessus,avocat,directeurdupôle entreprises en diffi culté/restructuringchez CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon.Dansla régionlyonnaise,par exemple,l’an-cienne fi liale du groupe Lapeyre,Oxxo, aété placéeen redressementjudiciaire avecl’objectif d’une cession judiciaire. Le plan

de cession a tendance à devenir de plusen plus une solution de restructuration del’entreprise.»

Lescréanciers prêts à enregistrerdes pertes partiellesMême si cette tendancepourrait s’intensi-

fier tout au long de l’année, elle ne devraittoutefois pas dominer. «Afin de limiter ladégradationde leur bilan, lesfonds d’inves-

tissementet les banquesne peuvent pas sepermettred’enregistrerdes pertes sur tousles dossiersà restructurer»,explique CédricColaert.La meilleure solution pour les prê-teurs consisterait donc à solder les lignesconcernées.Mais le contexte est peu favo-rable. Alors que Bâle 3 rend les fi nance-mentsoctroyés par les établissementsban-cairesdans le cadrede montagesà effet delevier plusconsommateursen fondspropres,ceux-ciétant plus risqués,un refinancementdescréditsactuelsparde nouvellesbanquesdemeure peu plausible, ces dernièrespré-férant conserver leurs liquidités pour desdossiersqui présententune probabilité dedéfaut moindre. L’option d’un rachat desentreprisesconcernées,qui permettrait leremboursementdesdettes,parde nouveauxactionnairessembleégalementpeuprobablecomptetenu de l’atoniedesfusions-acquisi-tions.Enfin, lemarchédela dettesecondairedécotéeserévèle tout aussipeu dynamiqueen raison essentiellement d’une liquiditéinsuffisante.

Ruptures de covenants : qui sontles profi ls à risque ?

S

i la criseéconomiquea bouleversélesbusinessmodelsdel’ensembledesentreprisessousLBO,certainesd’entre ellesprésententdavantagede risquesenmatière debris

de covenants.Dansuneétude réaliséeauprèsde 160sociétésde toutes taillesayant faitl’objet d’un montageà effet de levierentre 2006et 2010que vient desortir la Banquede France,cettedernièresouligneen effet que laprobabilité de rupture declausesintégréesdanslesdocumentationsbancairesa augmentéenfonction :

• de lataille desentreprises: alorsque 25,8% despetites et destrèspetites entre-prisesn’ont pasrespectéleurscovenants,cettepart s’estélevéeà40 % en cequiconcernelesmoyennesstructureset lesETI;

• du secteurd’activité : 71% dessociétéssousLBOopérant dans lecommercededétail et 50 % de cellesexerçantdans lecommercede grosont fait l’objet d’un brisdecovenant.Une situationqui, enrevanche,affecte peu ledomaine de la construction(12,5 %) ;

• de l’historique desentités enmatière de financement: seulement20% desgroupesfaisant l’objet d’un LBOprimaire ont rompu leur covenant.Maiscechiffreestpratiquement le double dansle cadrede montages secondairesou tertiaires(37,50%).

«Les restructurationsde sociétés sous LBO

concernent de nombreusesentreprises ayant déjà faitl’objet d’un aménagement

de leur dette.»

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Dans l’attente d’uneamélioration descondi-tions de marché,attendue par les plus opti-mistes dèsle second semestre,les banqueset les fonds spécialisésn’ont donc d’autre

choix que de patienter. Une situation quiimplique toutefois d’enregistrer, dans lemeilleur des cas, des pertes partielles. «Sinous ne voulons pas perdre l’intégralité denotre participation, noussommesconscientsqu’un redressementdesrésultatsdessociétésest impératif, reconnaît un banquier. Afind’offrir aux dirigeantsdavantage de margesde manœuvrepour y parvenir, le principallevier consiste à annuler une partie de ladette, ce que les prêteurs,tant seniors quejuniors, sont aujourd’hui prêts à entendre.»Lors de la restructuration de Consolis, lemois dernier, cesderniers ont, parexemple,diminué de plus de moitié l’endettement dugroupe. Sadette nette esten effet passéede760 à 300 millions d’euros.

Lesactionnaires réticents à denouvelles augmentations de capitalS’il s’agit d’une bouffée d’oxygènepour lesentreprises, ce modus operandi se révèlenéanmoins contraignant. Outre le fait qu’il

implique de longues négociations,pouvantdurer plus de six mois, les clausesassortiesau nouveau contrat sont en effet astrei-gnantes.Ellespeuvent, parexemple,prévoirla cessionde certains actifs ou une revalori-sation despénalités en casde bris de cove-nants. En outre, une telle mesure apparaît,le plus souvent, insuffi sante. En manquede liquidités, la plupart dessociétésen dif-ficulté nécessitentdesfonds nouveaux. Unbesoinqui, cependant,estrarement satisfait.«Il est de plus en plus diffi cile d’obtenir del’argent frais de la part desbanques commedes fonds», constate ainsi Carole Dessus.

Selon de nombreux consultants, les fondsde retournement sont même, à l’exception

d’Oaktree, relativement absents. Du côtédes actionnaires majoritaires, la situationest identique. Certes,danscertains dossiers,ces derniers acceptent de procéder à uneaugmentation de capital. Pour Consolis,LBO France,qui détient 83 % du capital, aapporté45 millions d’euros,aprèsavoir déjàréinjecté,en 2011,35 millions d’euros.

Pour autant, les actionnaires sont de plusen plus réticents à le faire, soit parcequ’ilsn’enont plus les moyens,soit parcequ’ils nele souhaitent pas compte tenu du caractèreinextricable de la situation de l’entreprise.

Dèslors,pour éviter le dépôtde bilan, leder-nier recours possible des créanciers reposesur la prise de contrôle de la société. Finfévrier, le fonds britannique spécialisédansla dette mezzanine Intermediate CapitalGroup (ICG)a, par exemple, pris les com-mandes du loueur de camions ViaLocation,alors détenu par Weinberg Capital Partners.Une opération qui a pu êtreconcrétiséeà lasuite d’une conversion des créancesd’ICGen capital ainsique de l’injection, parceder-nier, de nouvelles liquidités pour permettreau groupe d’assurersonactivité.

Du côté des banques, cette mesure, lourdedu point de vue tant fi nancier qu’opéra-

tionnel – ces derniers doivent, dès lors,assurerla gestion de l’entité –, a rarementété employée (voir encadré).Toutefois, ellesemble aujourd’hui gagner en intérêt ausein des établissementsbancaires français.«Afin de récupérer leur investissement, lesbanques regardent les différentes optionspossibles et sont en particulier prêtes,aujourd’hui, à prendre les clés d’une entre-prise si cela est nécessaire,dans l’optique

de lui trouver une sortie industrielle le plusrapidement possible», confirme ThibéryGleizes.Cetteoption seraitactuellementpri-vilégiée par lesprêteursde Terrealet ceux duspécialistede l’eau Saur, en pleinesdiscus-sionsavec lesactionnaires. Q

Arnaud Lefebvre

Conversion de créances bancaires en ca-pital : un réfl exe davantage anglo-saxon

M

ême sidesbanques françaisesont déjàpris le contrôle de sociétésà l’issued’uneconversionde leurs créancesen actions,comme lorsde la restructuration de

ladette du fabricant de toitures Monier en 2009,de tels exemplesrestent limités.«Historiquement, cettedémarcheconstitue davantage un réflexe du monde anglo-saxon,constate Paul-AntoineConti, directeur associéleveragedfi nancechez FitchRatings.Encomparaison, lesétablissementsbancairesfrançaisont en effet souventété réticentsà le faire.»Cetteréserves’expliqueprincipalement par les risquesencourusen casde défaut delasociété.Sila gestion et la gouvernancede la sociétésont généralement déléguéespar lesbanques, lecaséchéant, à deséquipes externes,c’estbienla responsabilitédesactionnairesqui reste engagée.«Dansle cadred’une liquidation de l’entreprise, lescréanciersancienset nouveauxpourraient décider de seretourner contre les banques,devenuesactionnaires,en casde mauvaisegestion, cequi toucherait le compte derésultat de cesdernières,explique un spécialistede la restructuration d’entreprises.

Comptetenu de la taille relativement limitée destickets investisparchaque établis-sementen tant que prêteur senior,cerisqueparaît démesuréau regard de laperte àenregistrer.»

«Afi n de récupérerleur investissement,

les banques regardentles différentes options

possibles et sont enparticulier prêtes,

aujourd’hui, à prendreles clés d’une entreprise

si cela est nécessaire»

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