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  • 69AUTEURS VINCENT GOULEY, DIDIER LAURENS, PATRICK MASSONI

    COMMUNICATION FINANCIRE DE LA COMMUNICATION FINANCIRE AU MARKETING FINANCIER FOCUS MTIERS

    De la communication financire au marketing financier

    i la communication finan-cire a comme objectif dadapter ses messages

    aux attentes de ses diffrentes cibles, lanalyse de la perception des socits cotes par les inves-tisseurs reste un exercice peu dvelopp. La tche est dautant plus complique que les investis-seurs sont sujets des biais com-portementaux qui ont t mis en vidence par de nombreux travaux de recherche (cadrage mental, heuristiques de dcision et autres biais cognitifs). Ces biais s'ex-pliquent notamment par l'absence de feedback immdiat du march sur leur dcision individuelle d'in-vestissement, par la ncessit de prendre cette dcision sous forte contrainte de temps et sans pou-voir exploiter toute l'information disponible compte tenu de sa masse. De plus, ces biais compor-tementaux ne sont pas l'apanage des analystes et investisseurs dbutants ; ils npargnent aucun oprateur de march, et sont mme parfois aggravs chez les

    s

    Dans un environnement conomique heurt et indcis, la sophistication et la diversification croissante des investisseurs ont rendu ces derniers de plus en plus htrognes et discriminants dans leurs attentes envers les metteurs. Face ces volutions, les socits cotes se doivent de passer de l're de la communication financire celle du marketing financier. Cette volution saccompagne logiquement de lmergence doutils adapts cette fonction, qui intgrent les spcificits des relations entre les socits cotes, les investisseurs et les diffrents intermdiaires.

    FROM FINANCIAL COMMUNICATION TO FINANCIAL MARKETING

    Systematic analysis of listed companies perception by the financial community remains underdeveloped. Some solutions provide an effective way to monitor the issuers market perception through the editorial content of brokerage research notes and press articles (so called Soft Information). A systematic and relevant analysis of these contents helps investor relations professionals to understand share price evolutions and to adjust pro-actively messages delivered to the financial community.

    Vincent Gouley, Didier Laurens,

    Patrick Massoni, Watchowahwww.revueanalysefinanciere.com

    professionnels plus expriments par un excs de confiance li leur degr d'expertise.

    DE LIMPORTANCE DES TUDES DANALYSTE DANS LA PERCEPTION DES SOCITS COTESUn marketing efficace repose, entre autre, sur lcoute des consomma-teurs, la capacit les comprendre et correctement apprhender leur perception des produits ou services proposs, afin dajuster si besoin les messages et la communication. Il en va de mme pour le marke-ting financier dont le sujet princi-pal, l'entreprise, a la particularit dvoluer dans des environnements divers (sphre dactivit, marchs financiers, concurrence) et mi-nemment complexes. Pour un res-ponsable du marketing financier, il importe alors danalyser la percep-tion de sa socit dans lcosys-tme des marchs financiers. Cette analyse systmatique est rendue difficile par la diversit, lhtrog-nit et laccessibilit des cibles.

    VINCENT GOULEY EST PRSIDENT DE WATCHOWAH, socit qui a dvelopp une solution innovante de business intelligence destine aux professionnels des relations investisseurs. Aprs avoir commenc sa carrire chez Oddo en tant quanalyste financier, Vincent a poursuivi sa carrire comme responsable des relations investisseurs et de la trsorerie, dabord chez Wanadoo puis chez PagesJaunes Groupe. Durant ces annes, il a montr un intrt constant dans la recherche en conomie et en finance. En particulier, il a concentr ses recherches dans le domaine de la finance comportementale, une nouvelle branche de recherche o il a identifi des opportunits pour amliorer la comprhension des processus de dcision des investisseurs.Vincent Gouley est diplm de lUniversit de Toulouse et possde un Master en Finance de lEM Lyon.

    DIDIER LAURENS EST DIRECTEUR GNRAL DE WATCHOWAH ET ADMINISTRATEUR DE LA SFAF. Il possde une exprience tendue des marchs financiers, de lanalyse financire et de la valorisation dactifs. Avant de rejoindre Watchowah en 2012, il a travaill pour Socite Gnrale Corporate Investment Bank depuis 2005. Il tait responsable du secteur Energies renouvelables depuis 2007 - rgulirement class dans le Top 3 des analystes du classement Extel. Il tait auparavant co-responsable de la recherche Mid & Small Caps. De 1999 2005, il a travaill pour Oddo & Cie comme responsable de la recherche Valeurs moyennes chez Oddo Midcap, aprs avoir dbut comme analyste financier couvrant les valeurs pharmaceutiques europennes. Didier Laurens a occup divers postes dans lindustrie pharmaceutique. Docteur en Pharmacie de lUniversit Paris XI et diplm du CFAF, il est aussi co-responsable de la commission valuation de la SFAF.

    OCTOBRE NOVEMBRE DCEMBRE 2013 ANALYSE FINANCIRE N 49

  • 70 FOCUS MTIERSAUTEURS VINCENT GOULEY, DIDIER LAURENS, PATRICK MASSONI

    COMMUNICATION FINANCIRE DE LA COMMUNICATION FINANCIRE AU MARKETING FINANCIER

    PATRICK MASSONI EST DIRECTEUR ASSOCI DE WATCHOWAH. DE 2007 2012, IL A T RESPONSABLE DE LA COMMUNICATION FINANCIRE ET DES RELATIONS INVESTISSEURS DE POWEO, loprateur nergtique alternatif franais. Il a mis en uvre la fonction, dvelopp la couverture analyste, accompagn la socit dans ses multiples oprations financires ainsi que les volutions actionnariales. Patrick a dmarr sa carrire comme analyste financier chez Ernst & Young, rejoignant successivement Altus Finance en tant que contrle financier, puis le CDR Entreprises, structure de dfaisance du Crdit Lyonnais, en tant que gestionnaire dactifs. En 1999, il devient Deputy Head of Corporate Finance chez Bull, o il a contribu, entre autres, la restructuration financire du groupe. Il a ensuite pris en charge les relations investisseurs du groupe, accompagnant sa renaissance sur les marchs financiers.Patrick Massoni est diplm de Sciences Po Paris, section conomie & Finance.

    Nanmoins, il existe un vecteur dimage important dans la forma-tion et lvolution de la perception dune socit cote : les tudes publies par les analystes finan-ciers. Or ce vecteur d'information, indispensable aux marchs finan-ciers, chappe aujourd'hui une analyse systmatique et rigoureuse de la part des acteurs du marketing financier. Cette analyse se limite bien souvent au suivi des recom-mandations dachat ou de vente dune part, et du consensus sur les rsultats financiers attendus dautre part. Ltude de ces composantes est indispensable mais insuffisante pour une comprhension fine, en termes de thmes sous-jacents et de dynamique, de la perception de la socit par les marchs.Les rapports danalystes offrent pourtant une mine d'information ingalable pour qui souhaite com-prendre la perception des marchs, et constituent de ce fait une source dinformation de premier plan pour tout responsable du marketing financier. Et ce dautant plus que moins de 40 % de la valorisation des metteurs est fonde sur les prvisions de rsultats des ana-lystes financiers (source : Baruch Lev Wining Over Investors, 2012). Lessentiel de leur jugement repose sur ces donnes qualitatives, ou contenu rdactionnel, que lon peut qualifier de soft information, par opposition aux prvisions finan-cires (hard data). Le marketing finan cier doit systmatiquement sy intresser, mme si elle est par nature trs diffuse, et ncessite des mthodes sophistiques afin de neutraliser les biais inhrents ses origines.

    VERS UNE EXPLOITATION INTELLIGENTE DE LA SOFT INFORMATIONLes progrs des outils danalyse smantique permettent aujourdhui dexploiter la soft information de faon structure. Il est en effet devenu possible de dcomposer la perception entre diverses thma-tiques, quelles soient gnriques ou spcifiques la socit et/ou son industrie, comme la performance oprationnelle, la croissance, lenvi-ronnement concurrentiel, la struc-ture financire, etc.Pour tre efficace, le traitement de la soft information doit toutefois reproduire aussi fidlement que possible la faon dont les investis-seurs traitent linformation trans-mise par les analystes dans leurs rapports. Les tudes montrent que le traitement des signaux par les individus se fait gnralement sous deux dimensions : leur poids et leur intensit (source : James Montier - Behavioural Investing, 2007, John Wiley & Sons, Ltd). Les grants et analystes ne faisant pas excep-tion, il convient danalyser chaque thmatique suivant ces deux axes : centre dintrt (ou importance du thme dans largumentaire) et per-ception (tonalit globale du thme). Cette mthode prsente le double intrt de neutraliser les biais de subjectivit de lanalyste et de reproduire le traitement de linfor-mation tel quil est effectu par les destinataires de ces rapports, les investisseurs. Lagrgation de la perception de tous les analystes permet enfin dtablir un consensus de perception, qui prsente dans la plupart des cas une forte corrlation au cours de bourse ou la perfor-

    mance relative du titre. Lanalyse des composantes de la perception doit permettre de comprendre lori-gine de la sous-performance bour-sire dun titre, et ventuellement dy remdier en ajustant les mes-sages dlivrs par lmetteur la communaut financire.

    SQUIPER DOUTILS ADAPTSUn outil danalyse adapt peut donc confrer une grande valeur cette masse dinformation dont disposent les metteurs, mais qui reste lar-gement sous-exploite lheure actuelle. De plus, il permet dali-menter la dmarche itrative propre toute activit de marketing : en premier lieu dterminer et segmen-ter judicieusement les messages dlivrs la communaut financire lors dune confrence investisseurs ou de toute autre annonce au mar-ch, puis valider la pertinence ex post partir des rapports dana-lystes et des feedbacks de march, enfin oprer les ajustements nces-saires pour les road shows ou en vue de la prochaine communication.Par ailleurs, un tel outil serait par-faitement complmentaire et, dans certains cas, substituable ceux dj utiliss par les responsables de la relation avec les marchs, tels que le suivi du consensus ou encore les enqutes de perception ad hoc. Dans le premier cas, il peut per-mettre didentifier des divergences entre soft information et hard data quil sera utile dexploiter pour am-liorer les messages stratgiques et calibrer au mieux les guidances. Dans le second cas, il peut per-mettre dorienter plus finement les questionnaires investisseurs sur les

    sujets qui mritent un approfondis-sement et doptimiser ainsi le rap-port cot/rsultats de ces enqutes.

    En conclusion, lmergence dune nouvelle gnration de solu-tions couplant outils et mthodes danalyse adapts au nouvel envi-ronnement des marchs doit per-mettre aux metteurs dentrer de plain-pied dans lre du marketing financier 2.0. n

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    OCTOBRE NOVEMBRE DCEMBRE 2013 ANALYSE FINANCIRE N 49