2010 12 DOSSIER PEDA PARCOURS CONTE 7bis-12 … conte noir, parcours lleess ddaatteess àà...

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Décembre 2010 DOSSIER PÉDAGOGIQUE Par Frédérique Millet-Grolleau © Le grand R LE GRAND R Scène nationale La Roche-sur-Yon Esplanade Jeannie-Mazurelle Rue Pierre-Bérégovoy – BP 681 85017 La Roche-sur-Yon Cedex Accueil public 02 51 47 83 83 www.legrandr.com

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Décembre 2010

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

Par Frédérique Millet-Grolleau

© Le grand R

LE GRAND R Scène nationale

La Roche-sur-Yon Esplanade Jeannie-Mazurelle

Rue Pierre-Bérégovoy – BP 681 85017 La Roche-sur-Yon Cedex Accueil public 02 51 47 83 83

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LE GRAND R - SCENE NATIONALE – Esplanade Jeannie Mazurelle – Rue Pierre Bérégovoy – BP 681 – 85017 LA ROCHE-SUR-YON cedex Accueil public : 02 51 47 83 83 – Tél. administration : 02 51 47 83 80 – Fax : 02 51 47 83 89 – site web : www.legrandr.com SIRET 394 804 264 000 15 – APE 923 A 2

Le conte noir, parcours llleeesss dddaaattteeesss ààà rrreeettteeennniiirrr

DU THÉÂTRE JEUNE PUBLIC AU GRAND R – SCÈNE NATIONALE LA ROCHE-SUR-YON

La Princesse Sirène Teatro Kismet Opera Mercredi 19 janvier, 18h Séances scolaires : mardi 18 janvier, 14h15 ; jeudi 20 janvier, 10h15 et 14h15

Durée 55 min sans entracte Tout public à partir de 10 ans

Ah ! Anabelle De Catherine Anne, par la compagnie Grizzli Philibert Tambour Mercredi 16 et samedi 19 février, 18h Séances scolaires : lundi 14, mardi 15, jeudi 17 et vendredi 18 février, 10h15 et 14h15

Durée 50 min Tout public à partir de 7 ans

Petit Poucet José Pliya Mercredi 20 avril, 18h Séances scolaires : mardi 19, jeudi 21 et vendredi 22 avril, 10h15 et 14h15

Durée 1h Tout public à partir de 8 ans

UUNNEE EEXXPPOOSSIITTIIOONN DDAANNSS LLEESS MMÉÉDDIIAATTHHÈÈQQUUEESS DDEE LLAA RROOCCHHEE--SSUURR--YYOONN

Ogres, sorcières et grotesques Exposition réalisée par la galerie L'Art à la Page à Paris Du 17 au 29 janvier dans les médiathèques de quartiers Du 1

er au 26 février à la médiathèque Benjamin Rabier

Accessible au public aux heures d'ouverture de la médiathèque

UN FILM AU CINÉMA LE CONCORDE, LA ROCHE-SUR-YON

Krysar, le joueur de flûte d’Hamelin De Jiri Barta - Film tchèque -1985 – Muet Jeudi 3 et vendredi 4 février, 14h30

Durée 53 min Tout public à partir de 8 ans DES ATELIERS À L’ÉCOLE D’ART DE LA ROCHE-SUR-YON

Toutes choses monstrueuses

Du 31 janvier au 22 février, les lundis et mardis matin de 9h30 à 11h30 Les quatre ateliers : Objet représenté : dessin d’observation (carte d’identité) / Objet mis en lumière : jeu d’éclairage, colorisation… / Objet déformé : l’objet et son ombre projetée / Objet détourné : rayographie de l’objet (empreinte de l’objet par la lumière)

Durée 2h

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PPPaaarrrcccooouuurrrsss aaauuutttooouuurrr ddduuu cccooonnnttteee nnnoooiiirrr ::: Frissonner de peur, de plaisir, d’émotion… C’est à

cela que Le grand R vous invite en vous proposant

cette saison un parcours autour du conte noir. Ce

thème trouvera son point d’orgue au moment des

représentations de Ah ! Anabelle puisque ce spectacle

vous conviera à d’autres rendez-vous dans des lieux

culturels de la ville, en amont et en aval : une

exposition à la médiathèque Benjamin Rabier, des

projections de film au cinéma Le Concorde, des ateliers

de pratique artistique à L’Ecole d’art.

Bien sûr, ces événements chez nos partenaires

peuvent aussi être partagés en lien avec les autres

spectacles de la programmation jeune public sur la

thématique du conte : Mon Petit Poucet et La

Princesse Sirène.

Alors bienvenue à vos petits d’homme et à vous-

mêmes, heureux adultes qui ferez partie du voyage, et

ouvrez grands les yeux, les oreilles et les esprits : c’est

parti pour le pays de l’imaginaire, de la création et des

histoires délicieusement effrayantes ou totalement

incroyables. En route pour le pays des contes qui

questionnent le rapport au monde qui nous entoure, qui

donnent aussi aux plus jeunes l’envie de jouer avec les

monstres et de les affronter pour mieux en rire.

LLL’’’aaagggeeennndddaaa

-- DDEESS SSPPEECCTTAACCLLEESS ::

La Princesse Sirène Séance tout public : Mercredi 19 janvier à 18h

Séances scolaires : Mardi 18 janvier à 14h15, Jeudi 20 janvier à 10h15 et

14h15

Durée 55 min - salle du Manège

Ah ! Anabelle Séance tout public : Mercredi 16 février à 18h

Séances scolaires : Lundi 14, mardi 15, jeudi 17 et

vendredi 18 février à 10h15 et 14h15

Durée 50 min – Le Théâtre

Mon Petit Poucet Séance tout public : Mercredi 20 avril à 18h

Séances scolaires : Mardi 19, jeudi 21 et vendredi 22

avril à 10h15 et 14h15

Durée 60 min – Le Théâtre

TARIFS SCOLAIRES Primaires 4 € par élève

Collèges 6,50 € par élève École du spectateur

(Ma journée au Théâtre / Parcours) 6,50 € par élève.

-- UUNN FFIILLMM :: Krysar, le joueur de flûte

d’Hamelin Jeudi 3 et Vendredi 4 février à 14H30

Durée 53 min – Cinéma Le Concorde Tarif 3,50 € par élève

-- UUNNEE EEXXPPOOSSIITTIIOONN :: Ogres, sorcières et grotesques

- du 17 au 29 janvier, exposition partagée

Médiathèques de quartier

- du 1er

au 26 février, exposition complète

Médiathèque Benjamin Rabier Entrée libre

-- DDEESS AATTEELLIIEERRSS DDEE PPRRAATTIIQQUUEE AARRTTIISSTTIIQQUUEE ::

Toutes choses Du 31 janvier au 22 février, les

lundis & mardis de 9h30 à 11h30, quatre ateliers au choix autour de la mise en scène d’objet.

L’Ecole d’art Gratuit dans le cadre du Parcours

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SSOOMMMMAAIIRREE

La Princesse Sirène

Distribution / p 4

La compagnie / p 5

Teresa Ludovico, metteure en scène / p 5

La dédicace de la metteure en scène / p 6

Les pistes de travail proposées par la metteure en scène / p 6

Ah ! Anabelle

Distribution / p 8

La compagnie / p 9

Les pistes de lecture et intentions du metteur en scène / p 9

Les activités proposées par nos partenaires autour du spectacle Ah ! Anabelle

- une exposition dans les médiathèques yonnaises / p 17

- des ateliers de pratique artistique / p 18

- un film : Krysar, le joueur de flûte d’Hamelin / p 19

Mon Petit Poucet

Distribution / p 23

L’auteur et metteur en scène / p 24

La pièce / p 24

Les intentions de l’auteur et metteur en scène / p 25

Des pistes pédagogiques / p 26

Pour se mettre en appétit ou prolonger le festin au pays des ogres

La mise en bouche / p 28

Des ingrédients / p 28

Un ustensile pour la cuisine / p 30

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La Princesse Sirène

Distribution

Dramaturgie et mise en scène de Teresa Ludovico

D’après le conte La Petite Sirène, publié en 1836 par Hans Christian Andersen

Avec Eugenia Amisano

Raffaella Gardon

Daria Menichetti

Paolo Summaria

Valerio Tambone

Scénographie : Luca Ruzza

Lumière : Vincent Longuemare

Projet costumes : Yousuke Tanaka

Développement Luigi Spezzacatene

Collaboration au mouvement Giorgio Rossi

Assistante à la dramaturgie Loreta Guario

Co-production version française : Chateau Rouge, Annemasse

Version originale production de Setagaya Public Theatre, Tokyo

Site de la compagnie : www.teatrokismet.org

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La compagnie

La compagnie italienne Teatro Kismet OperA voit le jour en 1981. Installée à Bari, dans le Sud de

l'Italie, elle engage un travail de théâtre militant : face à la pauvreté sociale et culturelle de la région elle

décide de fédérer institutions et associations pour combattre toute forme d’exclusion. Par le théâtre, elle

invite à lutter contre « la prolifération des divisions [en alimentant] une culture du dialogue, de la parole, du

geste, de l’union1 ». Son travail auprès de personnes handicapées ou de jeunes incarcérés la conduit ainsi à

diversifier les formes de travail pour repenser la création et la rencontre avec chaque spectateur.

La rencontre est le maître mot de cette compagnie dont les spectacles sont également le produit du

croisement des cultures. Les créations en résidence dans des théâtres nippons sont l’occasion par exemple

de verser quelques ingrédients de culture asiatique, qui donne à certaines des créations cette esthétique si

particulière. En effet, le Teatro Kismet OperA jouit d’une notoriété mondiale dans le domaine de la création

contemporaine, grâce notamment à ses adaptations scéniques de contes populaires. Après La Belle et la

Bête en 2004 et La Reine des Neiges en 2006, La Princesse Sirène, créé au Japon, est le troisième volet de

la trilogie orchestrée par Teresa Ludovico. Ces trois créations traitent du parcours initiatique de l’enfance à

l’âge adulte. Mélangeant le théâtre, la danse, l’acrobatie et le chant, La Princesse Sirène nous invite chacun,

petit ou grand, à une formidable rencontre esthétique et émotionnelle.

Teresa Ludovico, metteure en scène

Après avoir étudié le jeu dramatique et la dramaturgie, Teresa Ludovico devient metteure en scène et

comédienne. Elle intègre le Teatro Kismet en 1993, où elle donne des cours de théâtre, s’implique dans les

divers projets de la compagnie et notamment ceux concernant les jeunes handicapés mentaux. Intéressée

par l’univers de l’enfance, elle met en scène Peter Pan en 1994.

Après un séjour en Bolivie qui est l’occasion de poursuivre sa réflexion et sa formation artistique, elle

revient en Italie. Elle signe le texte et la mise en scène du spectacle La Belle et la Bête, produit par le Teatro

Kismet. Ce spectacle qui abolit les frontières entre spectacle Jeune public et spectacle pour adultes est

lauréat du prix ETI Stregagatto 2002. C’est un des spectacles les plus représentés du Teatro Kismet à

travers le monde.

En 2004, Teresa Ludovico se tourne à nouveau vers le conte et lance un projet consacré à Hans

Christian Andersen. Le premier spectacle, Le Compagnon de voyage, voit le jour en octobre de cette même

année tandis que l’opéra de Nino Rota, Le Prince porcher, est mis en scène en décembre 2005.

A l’occasion du 200e anniversaire de Hans Christian Andersen, Teresa Ludovica crée La Reine des

neiges pour le Setagaya Public Theatre de Tokyo. Son travail avec l’équipe artistique japonaise aboutira à

une tournée dans tout le pays. Puis le spectacle est récréé en 2006 à Athènes : La Reine des neiges

entame alors une tournée en Italie, France et Angleterre.

En 2007, retour au Japon de Teresa qui crée La Princesse Sirène. La tournée démarre l’année

suivante puis se poursuit en 2009 en Corée. La version française, nourrie des influences japonaises, est

créée en automne de cette même année à l’occasion des représentations à Château Rouge et marque le

début de la tournée française.

1 Cf dossier édité par la compagnie sur le site www.artfactories.net , association qui réunit des comédiens « autour d’un projet commun de transformation de l’action culturelle à

travers la recherche et l’expérimentation de nouveaux rapports entre populations, arts et territoires. »

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La dédicace de la metteure en scène

« Aux pétales de cerisier

dans le vent »… à cette

suspension… à ce souffle

retenu… à cette stupeur avant la

chute… à ce vertige… à cette

promesse de la nouveauté qui

porte en soi désarroi et

émerveillement… à l’écoulement

incessant de la vie.

Chers enfants, n’ayez pas

peur si vos écailles se

transforment douloureusement en

pieds et les pieds en racines et les

racines en eau et l’eau en air et

l’air en nuage, parce qu’au bout

d’un certain temps le nuage

devient pluie et la pluie… de l’eau,

et l’eau… s’écoule…

Les pistes de travail proposées par la metteure en scène

� L’histoire

Sirène vit avec ses deux sœurs aînées et leur vieille grand-mère au fond des mers. Tous les

habitants du monde aquatique sont sous le charme de sa voix merveilleuse. À l’âge de quinze ans, chacune

des sœurs monte sur terre pour en admirer les beautés. Lorsqu’arrive son tour, la petite Sirène se met en

voyage tandis qu’une terrible tempête cause le naufrage du vaisseau d’un prince. Elle parvient à sauver

celui-ci et le ramène jusqu’à la rive.

Une fois de retour chez elle, une tristesse tenace s’empare d’elle, car elle est tombée amoureuse du

prince. Elle décide alors de demander à la sorcière de la transformer en jeune fille, afin de pouvoir vivre sur

terre en compagnie de son bien-aimé. La sorcière exige en échange sa voix sublime et l’avertit qu’elle se

transformera en écume de mer si les noces ne sont pas célébrées. Sirène accepte et se rend au palais du

prince mais, désormais muette, elle ne peut se faire reconnaître de lui. Quant à lui, bien qu’il soit frappé par

la ressemblance entre cette jeune fille et celle qui lui a sauvé la vie et dont il est également tombé

amoureux, il décide d’en épouser une autre.

Les sœurs de Sirène lui apportent alors un poignard pour qu’elle le tue et puisse ainsi se soustraire

à son destin, mais la jeune fille, capable d’aimer mais non de donner la mort, jette le poignard et devient

écume de mer qui se transforme à son tour en vapeur et s’envole dans le ciel.

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� Les personnages :

Cinq artistes, comédiens, chanteurs et/ou danseurs interprètent les neuf personnages présents sur

scène. Quatre font partie de l'histoire initiale : La petite sirène, la grand-mère, le prince et la sorcière des

mers. A ceux-là s'ajoutent d'autres personnages, créés par la metteure en scène Teresa Ludovico pour cette

adaptation : le singe muet, le poisson Léo, le docteur et la candidate. Enfin, la narratrice de l'histoire

intervient également sur scène.

� Les thèmes abordés :

Mi-femme mi-poisson, hybride, la petite Sirène découvre sa diversité lorsqu’elle rencontre l’autre, ce

prince de chair douce qui vit de souffle et d’air. La force d’un amour impossible les unit, et c’est pour ce jeu

interdit que Sirène renonce à sa propre nature. Elle perd son essence et n’est plus reconnaissable, pas

même aux yeux de son bien-aimé. Alors seule une autre mort, une autre transfiguration, peuvent la sauver.

Ainsi, à travers l'histoire de La Princesse Sirène, c’est la question de l’identité et de l’humanité qui

est abordée : qui est-on ? En choisissant cet « ailleurs » qu’est la Terre, en se déracinant, la petite sirène a

perdu son identité et ses repères. Par amour, elle abandonne l'océan et sa famille et consent à de terribles

sacrifices. Mais l'histoire de La Petite sirène met également en exergue l'importance du regard des autres.

Car c'est à travers le regard de ceux à qui nous ne ressemblons pas et qui nous rejettent que l'on prend

conscience de ses différences. Que faire alors, et jusqu'où aller pour être reconnu par autrui ?

La pièce interroge également sur la question de l’autre. Qui est-il ? Comment être reconnu par celui

qui est si différent ? car La Petite sirène aborde le problème de la rencontre de deux mondes

fondamentalement différents, opposés même : celui de l’eau et celui de la terre ; celui où les sirènes, êtres

immortels, n'ont pas de jambes et celui des terriens qui en ont mais sont mortels. Comment survivre à ce

choc des cultures ? Peut-on vivre côte à côte en gardant son identité ?

Mais c’est aussi la question du passage de l’enfance à l’âge adulte qui est posée : l’angoisse du

corps qui se transforme, les envies et les besoins qui changent, le désir de l’autre et le risque de la perte de

soi. La petite Sirène sacrifie sa queue pour celui qu'elle aime : pour grandir et être femme elle doit souffrir.

C’est aussi la perte qu’il faut endurer : celle de sa voix. Mais le bouleversement est aussi psychologique :

elle ne peut revenir en arrière et est marquée à jamais par cette expérience.

Ainsi, l’histoire invite à une réflexion sur la question de la vie et de ce qui lui est intimement lié : la

mort. Parce qu’elle ne peut vivre avec celui qu’elle aime, la petite Sirène choisit celle-ci pour la délivrer de

son tourment. Mais cette mort n’est pas forcément un évènement négatif : c’est une transformation en autre

chose, comme s’il y avait un prolongement à la vie, un au-delà. La petite sirène se transformant en écume

des mers s'évapore dans les airs, gagnant ainsi une âme éternelle.

Cette histoire est ainsi le reflet de nos perpétuelles métamorphoses et nous console des pertes

douloureuses en nous apportant la conscience du cours fluctuant de l’existence. La philosophie de ce récit

est inscrite dans l’acceptation de la mort afin de célébrer la vie qui se cache dans ses cendres. Une histoire

qui ne se termine pas par la formule « Ils vécurent heureux et contents », mais par une chute telle qu’elle

devait être, unique, comme toute chose dans la nature.

Source : dossier de la compagnie du Teatro Kismet OperA

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Ah ! Anabelle

Distribution

Mise en scène : Christophe SAUVION

D’après le texte Ah ! Anabelle, de Catherine ANNE, L’Ecole des Loisirs, 1995.

Avec Odile BOUVAIS

Nicole TURPIN

Jean-Claude GAUTHIER

Scénographie : RODOFF

Création lumière : Pascal GAUDILLIERE

Costumes : Audrey DEVESA SAUVION

Production Grizzli Philibert Tambour

Aide à la création : DRAC des Pays de la Loire ; conseil régional des Pays de la Loire ; Ville de La Roche-sur-Yon

Partenaires techniques : Le grand R – Scène nationale La Roche-sur-Yon, Ville de Saint-Jean-de-Monts

Site de la compagnie : http://www.theatre-grizzli.fr/index.php

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La compagnie

Installée depuis 20 ans à La Roche-sur-Yon, la compagnie Grizzli Philibert Tambour poursuit son

action de création et de diffusion de spectacles vivants. L’équipe artistique, pluridisciplinaire, se compose de

professionnels du spectacle vivant mais également des arts visuels. Christophe Sauvion en est le Directeur

artistique et y exerce également les fonctions de metteur en scène et comédien. L’équipe s’élargit volontiers

pour accueillir de nouveaux artistes porteurs de projets artistiques : la compagnie leur offre alors

l’opportunité d’un soutien artistique, logistique et financier.

Par ailleurs, depuis 1995, la compagnie Grizzli Philibert Tambour développe une

activité supplémentaire : le « théâtre sur mesure ». Ludique et innovante, cette forme artistique à pour

ambition d’initier un réel travail de médiation culturelle et s’adresse à tous, structures, associations,

particuliers.

La compagnie est par ailleurs engagée dans la formation au jeu dramatique en direction d’un large

public. Elle a mis en place depuis 2000 les z’ateliers, qui accueillent petits, et grands autour du même

objectif : jouer.

Les pistes de lecture et intentions du metteur en scène

« Deux femmes effondrées dans un grand fauteuil. L’air sent la cannelle. Un carillon retentit. Les

femmes se redressent. Entre un homme.

Ainsi commence le texte de Ah ! Anabelle.

Une situation. Un élément de décor. Une odeur. Un son. Une action.

En quelques vocables, Catherine Anne aiguise les sens du lecteur.

Quelques indices laconiques créent une atmosphère, une ambiance que la machine à rêver du

lecteur a tôt fait de transformer en un univers fantasmatique.

Dès les premiers mots, une tension dramatique s’installe, qui ne nous lâchera qu’à la toute fin du

texte.

Entre ces deux extrémités, l’écriture alerte et vive, les dialogues débridés et incisifs nous entraînent

dans une histoire où le vaudeville côtoie le conte, où la farce mélange dans une même recette aux rires

grinçants les quiproquos les plus cocasses aux coups de théâtre les plus intrigants.

Ainsi, l’atmosphère et l’univers de Ah ! Anabelle suggérés dès les premières lignes, les caractères

forts des personnages, l’expressivité des corps, des gestes et des mimiques qui émanent de leurs propos

trouvent un écho dans les partis-pris esthétiques et dramatiques des films expressionnistes allemands du

début du XXème siècle.

L’exagération de l’esthétique expressionniste me semble être la forme artistique adaptée au

traitement de l’univers de Ah ! Anabelle. Dans la même ligne, elle peut servir le grotesque des personnages

tout en laissant émerger la peur liée au déroulement de l’intrigue, aux caractères des personnages ainsi

qu’aux situations.

Il s’agit, pour moi, de provoquer une rencontre, un choc entre l’esthétique du film muet et un texte

volubile. »

Christophe Sauvion

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• La pièce

Louis Beaugosse est heureux. C’est le jour de son mariage. Il a rendez-vous chez

Anabelle : c’est aujourd’hui qu’il la conduit devant monsieur le Maire.

Anabelle n’est pas là… Mais ses deux sœurs, que Louis ne connaissait pas, oui…

Elles sont laides, vraiment laides, et bizarres, très bizarres.

Louis est paniqué.

Les sœurs d’Anabelle le dévorent des yeux…

Agathe et Anastasie n’aiment pas les prétendants de leur jeune sœur. Tous les précédents

ont subi le même sort entre leurs mains…

C’est parce que Anabelle a découvert le terrible secret que ses sœurs l’ont enfermée et lui

ont donné à boire une fiole mystérieuse.

Pour Agathe et Anastasie, Anabelle n’existe plus. Ce nouveau prétendant se révèle donc

bien embarrassant ; mais il n’y a plus de raison de le faire disparaître.

Pris entre les griffes acérées des deux ogresses, Louis Beaugosse parviendra-t-il à sa

quête amoureuse ?

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• De multiples emprunts aux contes populaires

En venant chercher sa promise, Louis Beaugosse se retrouve aux prises avec les deux sœurs

d’Anabelle.

Duo angélique soucieux de préserver l’innocence et la vertu de la benjamine, ou cerbère à deux

têtes prompt à dévorer sur place l'imprudent prétendant?

Par leur truculence et leur verve implacable, les deux sœurs d’Anabelle, Anastasie et Agathe,

cristallisent les personnages féminins des contes populaires. C’est ainsi qu’elles empruntent les caractères

et les agissements des sœurs de Cendrillon, jalouses de la beauté et du pouvoir de séduction de la plus

jeune.

Mais si leur méchanceté et leur cruauté sont édulcorées par le comique exagéré de leurs

comportements et de leur langage, il n’en reste pas moins que l’intrigue nous révèle par petites touches

toute la palette de leurs agissements les plus sordides. Un ultime coup de théâtre nous révèle qu’Anastasie

et Agathe ont éliminé tous les prétendants d’Anabelle… Par une ingénieuse inversion, Catherine Anne

donne ainsi aux deux sœurs d’Anabelle les traits d’un Barbe Bleue en jupons, et à Louis Beaugosse le

statut d’un Petit Chaperon rouge bientôt dévoré par le loup.

Ce couple criminel trouve aussi un écho contemporain dans les sœurs Papin, duo sordide qui

propulse les fantasmes des contes populaires dans le fait divers le plus dramatique.

Les nombreuses références culinaires et les odeurs qui ponctuent le texte renvoient

immanquablement les personnages d’Anastasie et d’Agathe à l’ogresse d’ Hansel et Gretel, Beaugosse

endossant le rôle de la victime prisonnière de la séduisante maison de pain d’épice.

Louis Beaugosse, quant à lui, est le type même du héros des histoires merveilleuses. La

construction dramaturgique d’Ah ! Anabelle suit la trame classique des contes qui voit le héros déterminé

à poursuivre sa quête. Le graal amoureux de Louis Beaugosse est semé d’épreuves incarnées par l’avidité

possessive et dévoratrice d’Anastasie et Agathe qui le « cuisinent » au sens figuré, dans l’espoir avéré de le

faire revenir à feu doux avec des oignons coupés en tout petits morceaux... au sens propre… L’ironie

dramatique conduit ainsi le lecteur à prendre naturellement fait et cause pour Louis, à l’encourager dans sa

mission. Mais une fois encore, Catherine Anne détourne les codes pour transformer la figure héroïque de

Louis Beaugosse : l’image du héros pur se lézarde quand Louis avoue être tabou, c'est-à-dire ressortissant

de Tabouanie ! Exilé ? Apatride ? Emigré ? Personnage emblématique d’une race honnie ? Qui est vraiment

Louis Beaugosse ? Pourquoi veut-il se marier avec Annabelle ? Louis Beaugosse est-il héros ou antihéros ?

Par l’ambiguïté du personnage et le retournement de situation lié à la révélation de l’identité de Louis, le

conte ancestral trouve une contemporanéité inattendue.

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• Ah ! Anabelle,,,, ou les ressorts de l’écriture comique

Anastasie

Vous êtes demeuré ?

Louis

Non, non, j’arrive à l’instant

� Le vaudeville

Dès les premières pages, le lecteur de Ah ! Anabelle identifie les ressorts de l’écriture comique :

jeux de mots, quiproquos, enchaînements rapides, voire effrénés, de répliques courtes, incisives et

efficaces dans leur expression spontanée. Si l’on ajoute à cette remarque langagière la présence d’un trio

qui associe un couple – en l’occurrence un duo féminin - à un troisième personnage – l’amant d’Annabelle

convoité par ses deux sœurs - nous avons ici réunis tous les ingrédients du vaudeville.

La comédie amoureuse peut se jouer entre ces trois composantes, sous les regards morts des

prétendants dont les têtes reposent dans le placard ! Souvent triangulaire, la relation entre les personnages

se renouvelle habilement par quelques duos qui permettent d’explorer les facettes inattendues des deux

personnages féminins.

Dans son Dictionnaire encyclopédique du Théâtre, Michel CORVIN définit l’esthétique du

vaudeville par la mise en évidence de procédés invariants propres à créer une grille de lecture pertinente

pour la lecture de Ah ! Anabelle :

« Montées une à une, les répliques se suffisent à elles-mêmes, sans silence, sans intervalle, sans

psychologie immédiate. Chaque réplique est un accident imprévu, et pas seulement un moment, dans le

parcours du personnage. Ignorant ce qu’il fera après la réplique, il ne sait pas ce qu’il faisait avant qu’elle ne

lui échappe. Sans passé, innocent de ce qu’il enclenche, en réaction, chez les autres, le personnage est

pleinement en acte ce que la réplique contient en puissance : un cri, un mot d’esprit, une exclamation, une

injure, une douleur, un éclat de rire. Sans autre projet.

Le vaudeville présente la conception de rencontres inattendues et détonantes, de rapprochements

de situations incompatibles, d’affrontements de personnages, enchaînés aux répliques, qui, l’instant

précédent, ne se connaissaient pas. De ces coïncidences apparemment fortuites, néanmoins habilement

agencées par l’auteur, naissent des entrées et sorties foudroyantes, des dérèglements du comportement,

des poursuites minées d’embûches et de chausse-trapes dans lesquelles s’engouffre le personnage qui a

oublié le but de sa précipitation excitée. Epuisé, exténué, meurtri, il endure l’accumulation d’aventures et de

coups qu’il ne maîtrise pas. »

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� La farce

Le vaudeville est un avatar moderne de la farce médiévale. Il convient donc de lire Ah ! Anabelle à

la lumière des composantes de ce genre majeur. C’est d’ailleurs de ses procédés que Catherine ANNE use

le plus abondamment, affiliant son texte aux sources mêmes de l’écriture comique :

Anastasie

Je vais le faire revenir.

Agathe

Tu crois ?

Anastasie

A feu doux !

Agathe

Oh non !

Anastasie

Avec des oignons coupés en tous petits morceaux, minuscules.

Agathe

Avec une pincée de gingembre

Anastasie

Hum ! Je mangerai sa fesse gauche avec un plaisir !

La farce médiévale est l’espace de tous les excès, tant dans l’écriture que dans les situations. Au

sens premier, c’est un bourrage qui se décline en plusieurs vocables : farci, fourré, farcé. La référence

originelle est donc culinaire. En l’élevant au rang de genre littéraire, les écrivains de l’époque joignent

l’univers dramatique et l’univers culinaire.

Dans la farce médiévale, les images du banquet sont liées au corps grotesque, plein de

protubérances. Le comique est un comique des entrailles, encore appelé le rire du bas. Le manger, le

boire et le consommer sont des pulsions élémentaires, instinctives. Est montré ce qui d’ordinaire est caché ;

est dit ce qui d’habitude est tu. A l’image du carnaval, fête associée à la farce, les êtres sont libres de

toute inhibition : les grossièretés

langagières, les nigauderies et les

obscénités sont autorisées.

La farce transgresse.

Elle établit comme règle le

renversement des valeurs. C’est

pourquoi les rôles sont inversés :

les femmes sont vulgaires, voire

obscènes. Elles revendiquent une

place bien différente du rôle dans

lequel les hommes les cantonnent

ordinairement. Les lois du

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mariage sont donc mises à mal. Le sentiment amoureux est proscrit ; l’amour est « consommé » au sens

propre. Chaque relation sexuelle, chaque adultère est symbolisé par un repas prélude à toute aventure : les

paroles échangées ont une double interprétation qui donne à la farce le statut de parade érotique.

La farce abolit la notion de couple. Quand les couples existent, ce sont des êtres monstrueux qui

s’associent contre les autres personnages.

Catherine ANNE ancre son texte dans cette tradition farcesque. Le couple Agathe-

Anastasie est un couple de femmes qui transgresse l’ « ordre » établi : telles des ogresses, elles tuent les

prétendants d’Anabelle, enferment la benjamine dans sa chambre, courtisent effrontément le nouvel

arrivant. Autant de marques du comique cruel qui singularisent la farce.

Unies par la « sororalité », les deux femmes constituent ce couple monstrueux précédemment

évoqué qui se ligue contre Louis Beaugosse. Ces deux femmes n’en font qu’une, enfermées dans une

monovalence qui vole en éclat lorsque chacune d’elle se retrouve seule avec Louis. Le comique de

situation entérine les contradictions des personnages qui n’existent que par les tensions qui les

habitent.

Les propos d’Agathe et Anastasie sont émaillés de métaphores culinaires à double sens. Par les

jeux de mots ou les lapsus, le comique des mots prend les personnages à leur propre piège.

• Partis-pris de mise en scène

L’atmosphère et l’univers de Ah ! Anabelle suggérés dès les premières lignes, les caractères forts

des personnages, l’expressivité des corps, des gestes et des mimiques qui émanent de leurs propos

trouveront un écho dans les partis-pris esthétiques et dramatiques des films expressionnistes allemands

du début du XXème siècle.

L’exagération de l’esthétique expressionniste me semble être la forme artistique adaptée au

traitement de l’univers de Ah ! Anabelle. Dans la même ligne, elle peut servir le grotesque des

personnages tout en laissant émerger la peur liée au déroulement de l’intrigue, aux caractères des

personnages ainsi qu’aux situations.

Il s’agit, pour moi, de provoquer une rencontre, un choc entre l’esthétique du film muet et un

texte volubile.

� Le réalisme expressionniste

Par le terme « réalisme expressionniste », on qualifie le kammerspiel film, un drame intime avec

peu de personnages. Le terme allemand kammerspiel, qui signifie « jeu de chambre » ou « théâtre de

chambre », est apparu au théâtre pour désigner des pièces à la mise en scène intimiste destinées à des

petites salles. Dans les années 1920, l’usage du mot est étendu au cinéma pour désigner des films à la fois

réalistes en ce qu’ils renvoient à des milieux sociaux précis, et « expressionnistes » par leur style (axes de

prises de vues, mouvements de caméra), l’atmosphère très travaillée grâce au soin apporté aux décors de

studio et aux éclairages en ombres et lumières, les gestes expressifs des acteurs… Le kammerspiel

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respecte la règle des trois unités (temps, lieu, action) en enfermant les personnages dans un huis clos

oppressant où ils sont soumis à leur destin.

� Solutions pour la scène

L’expressionnisme ne cherche pas à rendre la réalité objective, mais l’expérience de la

dimension expressive des objets. C’est à cette ligne directrice de ce courant artistique majeur que je

souhaite emprunter les codes esthétiques nécessaires au traitement de toutes les composantes de

la mise en scène d’Ah ! Anabelle.

Ainsi, du côté des personnages, l’accent sera mis sur

la distorsion des corps (silhouettes et costumes) et les comédiens

dans leurs mouvements utiliseront des gestes expressifs non

naturalistes. Une attention toute particulière sera portée sur le travail

de maquillage afin de s’approcher du traitement des personnages

dans les films expressionnistes : souligner les ombres, accentuer le

contraste noir et blanc et les traits du visage (lignes, angles…).

Les costumes seront inspirés à la fois de l’époque des films

expressionnistes et en même temps de l’expressionnisme allemand lui-même:

ils doivent permettre d’accentuer l’expressivité afin de développer le jeu

burlesque des personnages ou a contrario, enfermer les lignes du corps dans

une rigidité anguleuse, à l’image du costume-camisole de Nosferatu (ci-

contre).

Mais il m’a semblé intéressant aussi de jouer sur l’ambiguïté et le

pseudo jeu de séduction des deux sœurs face à un homme qu’elles ne

veulent pas laisser partir. Ainsi, plutôt que d’annoncer d’emblée leur intention « dévorante » par des

costumes et un maquillage austères, il semble plus opportun de les imaginer simplement chez elles, vêtues

de robes d’intérieur ou de robes de chambre de l’époque des années 30, mais dans un esprit clinquant

mauvais goût.

De même, du côté de la scénographie, nous

imaginons un espace chaotique aux angles accentués et

aux lignes brisées, sans perspective, avec des décors

déformés ou démesurés. Ceci concerne par exemple le

fauteuil de la première didascalie.

Cet espace doit suggérer une atmosphère étrange,

fantastique, étouffante. Le décor, constitué de deux

panneaux articulés, sera modulable. L’articulation permet

ainsi d’ouvrir ou de fermer l’espace à volonté, de créer des

lignes de fuite ou, au contraire, un enfermement ; ces deux situations structurant la trame de l’intrigue et le

parcours des personnages.

Le Cabinet du docteur Caligari , film expressionniste muet allemand de Robert Wiene, 1919.

Nosferatu, une symphonie de la terreur, film muet allemand de 1922, réalisé par Friedrich W. Murnau.

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L’éclairage vise quant à lui à rechercher « l’effet d’image » du film muet (bildlichkeit) : une image

composée, construite, stylisée. La lumière sera donc pensée de façon à proposer comme une

succession de plans cinématographiques, jouant sur les contrastes forts entre les zones obscures et

les zones éclairées, accentuant les ombres marquées. La création lumière s’inspirera donc de certains

effets d’éclairage du film expressionniste : lumières diffuses, éclairages très atténués, halos de lumière

autour des visages…

Par ailleurs, l’entremise des ombres projetées permettra les apparitions récurrentes d’Anabelle,

personnage central qui cristallise les trois autres mais qui reste invisible... Au fil de l’intrigue, on est en

droit de se demander si ce personnage est toujours en vie. Beaugosse en parle comme d’une image

fantasmée, tandis qu’Agathe et Anastasie l’évoquent comme s’il n’existait déjà plus…

Enfin, il s’agit d’élaborer une trame olfactive reliée à l’espace et qui ponctue les différents temps

de la construction dramaturgique…

• Bibliographie

Dictionnaire encyclopédique du théâtre, Michel CORVIN, ed. Bordas

Le Théâtre, Daniel COUTY et Alain REY, ed. Bordas

Lire la Comédie – Michel CORVIN – Dunod

L’écriture comique et le rire – Daniel LEMAHIEU (cours I ET PARIS III)

Totem et Tabou – Sigmund FREUD – Petite Bibliothèque Payot

Le Cinéma Expressionniste Allemand de Caligari à Tim Burton – Jacques AUMONT et Bernard

BENOLIEL – Presses Universitaires de RENNES

Le Cinéma Expressionniste Allemand – Catalogue de l’exposition de la Bibliothèque du Film

Les Théâtres d’Ombres – Denis BORDAT et Francis BOUCROT – L’Arche

La Question Feydeau – Cahiers Renaud-Barrault – Julliard

Fritz Lang, le Meurtre et la Loi – Michel CIMENT – Découvertes Gallimard

• Filmographie

Le Cabinet du Docteur Caligari – Robert WIENE

Metropolis – Fritz LANG

M le Maudit – Fritz LANG

Le Testament du Docteur Mabuse – Fritz LANG

Les Chasses du Comte Zaroff – Irving PICHEL

et Ernest B. SCHOEDSACK

Le Dernier des Hommes – Friedrich Wilhelm

MURNAU

Nosferatu – F. W MURNAU

Tabou – F.W MURNAU

Le Troisième Homme – Carol REED

Edward aux Mains d’Argent – Tim BURTON

Vincent – Tim BURTON

A Nightmare before Christmas – Tim BURTON

Noces Funèbres –Tim BURTON

Textes, analyses et documents proposés par Christophe Sauvion,

metteur en scène, compagnie Grizzli Philibert Tambour

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Les activités proposées par nos partenaires autour du spectacle

Une exposition dans les médiathèques yonnaises :

Ogres, sorcières et grotesque

L' Art à la Page est une Galerie parisienne née en 1990 dont le but

est de faire connaître des artistes qui font aussi des livres. Elle

propose entre autre des expositions itinérantes pour des musées, des

centres culturels, des salons. Mais l’exposition Ogres, sorcières et

grotesque qui vous est proposée en janvier à La Roche-sur-Yon est

inédite. En effet, c’est à l’initiative de la Médiathèque Benjamin Rabier

que l’exposition a été constituée.

«Ogresses, ogres, sorcières, fées maléfiques. Noms communs ô combien évocateurs de contes et

d’histoires, de personnages aux noms terribles, aux images marquantes, grotesques, qui donnent le

frisson, qui prêtent à rire, qui définissent une ambiance, un univers.

De nombreux illustrateurs les « portraitisent » dans leurs albums ; depuis ceux, très colorés, tracés au

pinceau, jusqu’à la sorcière directement issue de l’univers pictural de Jerôme Bosch, une autre histoire se

raconte… celle des illustrateurs et de leur façon de s’approprier ces personnages connus de la littérature

enfantine et de les traiter. Ainsi est-il intéressant de comparer l’ogre du Petit Poucet vu par Isabelle

Chatellard, Eric Battut, ou celui au crayon noir de Loren Capelli ; d’entrouvrir le cabinet de curiosités

d’Elzbieta imagé sur du papier japon parcheminé ; d’aborder les images de Mette Ivers dont les ogres,

cyclopes et gnomes - lavis, crayon - seraient frères d’une certaine imagerie anglaise du 19ème

; de

découvrir la galerie de personnages « grotesques » de Natali Fortier, quand expressionnisme et humour

s’entrecroisent.

Ainsi, l’exposition chemine au travers des visions, des techniques et des formats de ces artistes dont

le seul point commun est d’être ici au service du livre. »

Annick Charton, responsable du département jeunesse, Médiathèque Benjamin Rabier

Vous pourrez découvrir lors de votre visite différentes œuvres d’illustrateurs

renommés de la littérature jeunesse. L’exposition sera partagée entre les

Médiathèques de quartier du 17 au 29 janvier et sera présentée complète à la

Médiathèque Benjamin Rabier du 1er

au 26 février (Ouverture aux horaires

habituels ; entrée libre). Et bien sûr, le service de prêt met à votre disposition quantité

d’ouvrages sur le thème du conte noir et de ses personnages.

Isabelle Chatellard

Le cinéma le Concorde, L’Ecole d’Art et les Médiathèques yonnaises s’associent au

Grand R pour offrir aux écoles un parcours autour de la programmation de Ah !

Anabelle : ateliers artistiques, exposition, film…. Demandez le programme !

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Des ateliers de pratique artistique

Du 31 janvier au 22 février, les lundis et

mardis de 9h30 à 11h30, quatre ateliers vous

sont proposés, au choix, autour de la mise en

scène d’objet.

« Chaque atelier est construit en écho avec la

pièce de théâtre Ah ! Anabelle mise en scène par

Christophe Sauvion. Tout en s’inspirant des procédés

scéniques et esthétiques utilisés dans cette création,

l’Ecole d’Art propose deux heures autour de la mise en

scène d’objets et de leurs ombres projetées afin de

constituer un dictionnaire visuel des choses du

quotidien animés par la lumière.

Comme Tim Burton avec ses héros, dans cet

atelier, nous mettrons en lumière les dessous cachés,

les fragilités et les défauts d’objets du quotidien, pour

faire d’eux les héros d’un livre ...

La séance est organisée en 4 ateliers tournants

qui utilisent ou abordent, dans leur technique de

réalisation, la lumière. Animés par deux artistes

intervenants, ils se déclinent ainsi :

• Objet représenté : dessin d’observation (carte

d’identité)

• Objet mis en lumière : jeu d’éclairage,

colorisation…

• Objet déformé : l’objet et son ombre projetée

(silhouette déformée)

• Objet détourné : rayographie de l’objet

(empreinte de l’objet par la lumière) »

Hélène Galdin, directrice de L’Ecole d’Art

La participation aux ateliers est gratuite dans

le cadre du Parcours autour du spectacle de

Ah ! Anabelle.

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Du spectacle au film et du film au spectacle

Le choix de proposer Krysar, le joueur de flûte d’Hamelin dans le cadre de ce parcours a été une

évidence pour Julie Auzou, responsable de la Coordination jeune public et scolaires du Cinéma Le

Concorde : car l'esthétique choisie par le réalisateur n'est pas sans rapport avec celle du metteur en scène :

« La compagnie de théâtre Grizzly Philibert Tambour invite à s'immerger dans le courant culturel de

l'expressionisme allemand du début du XXème siècle à travers le spectacle Ah! Annabelle. Soucieux de

permettre aux enseignants intéressés d'exploiter au mieux les thèmes abordés par cette pièce, le Concorde

propose de découvrir le film Krysar, le joueur de flûte d'Hamelin, de Jiri Barta, véritable bijou de l'animation

par marionnettes du cinéma tchèque, afin de pouvoir appréhender en image ce courant si particulier et d'en

donner à chaque enfant une vision d'ensemble ».

En effet, l'esthétique des deux œuvres évoque ce mouvement artistique par leurs décors aux lignes

aigües et déformées, par l'exploitation si particulière de la lumière et des jeux d'ombre, par la gestuelle

volontairement non-naturaliste des personnages. L'usage de l'objet-marionnette permet à Jiri Barta de

poursuivre plus loin encore l'exploitation de cette esthétique : les visages sont déformés à l'excès et les

corps ont la rigidité des âmes.

D’autres similitudes entre les techniques peuvent être relevées. Ainsi par exemple l'utilisation de la

couleur, rare, s'extrayant violemment du monochrome ambiant pour interpeller le spectateur sur l'importance

du nouvel élément introduit : le rouge du sang envahissant le banquet d'Hamelin ou donnant sa couleur aux

escarpins d'Anabelle, par exemple.

On relève par ailleurs plusieurs thématiques communes : dans les deux œuvres est évoqué le temps

qui passe, même si la signification diffère : pour Jiri Barta, le personnage du Joueur de flûte symbolise le

destin, la Mort. Et pour souligner cet aspect fatal de l’histoire, on remarque à l'écran la « répétition du motif

Un film : Kryzar, le joueur de flûte d’Hamelin

Film tchèque de Jiri Bata - 1985 - 53 min - muet - Cycle 3.

Au Moyen-âge, dans une ville allemande où règnent

méchanceté, jalousie et avarice... Les rats envahissent

soudain les sous-sols, puis les maisons, mangent la

nourriture et volent les bijoux. C'est alors qu'un mystérieux

joueur de flûte surgit de nulle part et propose ses services

aux habitants, promettant de les débarrasser des rats en

échange d'une récompense... Une légende allemande

brillamment adaptée en film d'animation par Jiri Barta qui

s'inspire clairement de l'expressionnisme allemand.

Séances : Jeudi 3 et Vendredi 4 février à 14H30

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de la machine servant à mesurer le temps » (cf l’interview de Jiri Barta ci-dessous).

Pour Louis Beaugosse, héros de Ah ! Anabelle, la course contre le temps ne revêt pas le même

tragique a priori : Louis est juste impatient de se marier, mais il semble tout de même lutter contre un compte

à rebours infernal, comme si passé un certain délai tout était fichu. Plus de mariage, donc, pour ce fiancé

pressé au-delà d'un temps défini qui correspondrait à la durée effective de la pièce. Mais quel autre vrai

danger menace ce Tabou, si le mariage ne se fait pas ?

Cependant, si le film et la pièce appartiennent tous deux au genre du conte noir, chacun exploite un

ton différent : à la noirceur des personnages du premier répond l’humour impertinent du second.

Pour en savoir plus…

Les Films du Paradoxe, maison de production de Krysar, le joueur de flûte d’Hamelin, rappelle le

travail phénoménal qu'a représenté la création de ce film d'animation :

« Il a nécessité la construction de 14 poupées de bois, de plus de 140 décors, de dizaines de

figurants sculptés en relief et de miniatures de mobilier et d’accessoires. Il a fallu près de deux ans à Jiri

Barta pour achever le Joueur de flûte. Un an d’abord de préparation : modèles et fabrication des

marionnettes, construction du décor, scénarisation technique. Le tournage et le montage ont, à leur tour,

demandé une nouvelle année, en occupant une équipe de vingt-cinq personnes, soutenues par dix

collaborateurs extérieurs (anciens collègues de l’école des Arts et Métiers, par où était passé Jiri Barta).

La maison de production évoque également les origines de l'histoire : « Cela fait plus de 700 ans

que cette sombre légende d’Allemagne du Nord se transmet de bouche à oreille. Cette version est un film de

marionnettes. De l’éclat magique de ce Mythe ancien a surgi l’image du mélancolique chasseur de rats au

visage Impénétrable et émacié. C’était un mystérieux joueur de flûte, qui avait jadis débarrassé des rats une

ville opulente. Après s’être brouillé avec les conseillers de la ville à propos du montant de sa récompense, il

conduisit, au son de sa flûte, les habitants à la ruine.”

ENTRETIEN AVEC JIRI BARTA

Qui est le Joueur de flûte ?

A l’origine, le Joueur de flûte d’Hamelin est une légende allemande du

Xllème siècle, qui a connu au cours des âges de multiples interprétations. En

Tchécoslovaquie, il est surtout célèbre par la nouvelle de Victor Dyk. Cette

nouvelle a un caractère lyrique assez appuyé... Personnellement, je vois le

Joueur de flûte comme un personnage magique, d’apparence humaine mais

doué d’une force surnaturelle. Le Joueur de flûte, c’est le destin, c’est la Mort. Il

pénètre donc dans la ville d’ Hamelin pour la punir de ses vices et de sa

corruption. Cet aspect fatal de l’histoire, j’ai tenté de le souligner par la répétition

du motif de la machine servant à mesurer le temps, le mécanisme horloger, ou

encore par le dialogue muet entre le Joueur de flûte et le dieu du temps, Saturne. Dans cette ville d’Hamelin

en proie à la perversité, deux personnages seulement y échappent.

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La Jeune Fille et le Vieux Pêcheur : La Jeune Fille qui s’appelle Agnès dans la version de Dyk,

représente la pureté de l’âme et la naïveté.

Le Vieux Pêcheur, qui, dans la nouvelle de Dyk, est le fou Jörgen, figure ici, dans le sens

évangélique : « heureux les pauvres d’esprit, car le Royaume des cieux

leur appartient... ». Il sauve donc un enfant - symbole de la vie nouvelle

-, quitte la ville morte et se fond dans un paysage imaginaire (à la Van

Eyck), un paysage plein de paix et d’amour.

Le Joueur de flûte est donc l’histoire du crime et du châtiment,

du bien et du mal, de l’amour et de la mort. Avant la réalisation de mon

film, on m’avait proposé un scénario de Kamil Pixa. Il était fondé sur la

conception lyrique de Victor Dyk et LES FILMS DU PARADOXE

accentuait les scènes amoureuses entre le Joueur de flûte et Agnès. Cela ne me semblait pas correspondre

à un film d’animation. J’ai cherché une autre solution : un scénario technique, attentif au côté expressif de la

stylisation plastique... et cela m’a beaucoup aidé, en retour, à résoudre le problème de la narration...

Précisément, il s’agit d’un conte : on attend la voix off d’un récitant. Et pas du tout ! On a une texture

musicale dans laquelle prennent très justement place des onomatopées.

C’est cela. Le scénario de Kamil Pixa s’appuyait sur des dialogues. Cela ne correspondait pas à ce

que j’entrevoyais. Ce qui devait accompagner la stylisation plastique, c’était un prolongement sonore, un

langage artificiel et stylisé lui aussi. Ce langage est influencé, dans le film, par des textes allemands

dadaïstes. Il a été dit par des acteurs - qui étaient aussi les musiciens -, qui savaient garder le rythme et le

style onomatopéique de l’expression. Cette langue artificielle et la musique ont été conçues par le jeune

compositeur Mickael Kocab, dont le style monumental correspondait bien à ma conception. Je crois que sa

traduction musicale de l’image - d’une grande sensibilité - a permis à plusieurs scènes d’acquérir leur

monumentalité.

Il est merveilleux, à propos de petites marionnettes de bois, de pouvoir parler de monumentalité. La

doit-on, cette monumentalité, à la rigidité des uns, au réalisme des autres (les rats) ou à l’angélisme

de la Jeune Fille ? Quel est le point de départ de cette symphonie sculptée ?

Dans mon esprit, à chaque personnage devait correspondre

une expression plastique particulière, tant du point de vue de la forme

et de la proportion que des couleurs. Ce qui est plus notable, c’est

d’avoir pris le parti de traiter le Moyen Age de manière

expressionniste. C’est selon cette conception initiale que j’ai

commencé à créer, d’une part, le décor et, de l’autre, les modèles de

marionnettes. Partant des modèles sculptés en bois de noyer par mes

collaborateurs, j’ai réalisé des marionnettes de 20 à 50 centimètres de

hauteur. C’est ainsi qu’ont été créées, par exemple, les principales marionnettes - à trois dimensions - des

bourgeois de la ville, proches dans leur plastique du cubisme «dur» allemand.

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Aux personnages principaux se sont ensuite joints ceux de la foule anonyme : des marionnettes en

relief seulement, dont la taille s’échelonnait de 2 à 20 centimètres. Au Joueur de flûte, personnage principal -

et la plus grande marionnette, qui mesurait 50 centimètres -, j’ai donné le visage de la Mort. Les figures

d’Agnès et du Vieux Pêcheur ont été imaginées différemment : sans les traits tourmentés des autres

marionnettes. Enfin, pour porter à son paroxysme le contraste entre le mécanisme dur, de bois, d’un cabinet

de marionnettes et sa lutte contre le monde, de chair, des rats, pour induire le choc que je voulais que les

spectateurs ressentent, j’ai, pour cette raison et pour des raisons esthétiques, conservé l’apparence animale,

réelle, vivante, impitoyable des rats.

Je crois que le spectateur est d’autant plus fasciné

et effrayé par cet univers que le décor, dans sa naïveté

baroque, ciselée, précaire, s’inscrit comme un fragile

contrepoint au fléau qui, on le pressent, va le détruire... J’ai

essayé de provoquer cette atmosphère par un coloris

sombre et monochrome du décor, sur lequel se reflétaient

les métaux précieux comme autant de points lumineux. Les

différents matériaux utilisés, les fourrures, les étoffes, les

éléments - feu, eau - et les détails réels – herbe, œufs,

nourriture - avaient pour fonction de produire un effet

semblable. La mise en lumière des plans, qui devait

souligner l’atmosphère lourde, susciter des clairs-obscurs, était assurée par deux cameramen, Vladimir

Malik et Ivan Vit. Si les mouvements des marionnettes et des rats se sont déroulés classiquement, selon le

plan préétabli de l’animation, le décor, lui, était très particulier. Il consistait en espaces sculptés et jouait sur

l’imbrication de petits décors en relief de 30 centimètres sur 50 et de grands décors en trois dimensions

pouvant mesurer jusqu’à 4 mètres.

L’étrangeté et le «ton» moyen-âgeux étaient accentués par la déformation expressive de ces

espaces, d’autant plus que j’ai respecté les lois de la perspective et des proportions appliquées dans les

représentations peintes et sculptées du Moyen Age. Donc ce qui était principal était grand, ce qui était

accessoire était petit. Ainsi ont surgi des combinaisons grotesques et des visions oniriques. Il y avait une

contrainte, évidemment, à ce choix : ces perspectives déformées n’étaient utilisables que sous un seul angle

de vue. Pour chaque prise à angle de vue différent, il fallait donc procéder à une reconstruction complète de

la scène.

Source : site internet de Les films du paradoxe, http://www.filmsduparadoxe.com/krysar.html

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Mon Petit Poucet

Distribution

Texte et mise en scène de José Pliya

D’après le conte Le Petit Poucet de Charles Perrault

Avec : Dieudonné Kabongo et Sophia Leboutte

Lumière : Philippe Catalano

Création sonore : Brice Cannavo

Costumes : Maylis Duvivier

Scénographie : Anne Guilleray

Assistanat à la mise en scène : Danielle Vendé.

Un spectacle de la Caravelle Diffusion Production Internationale

et du Théâtre Varia, Centre Dramatique de la Communauté française Wallonie-Bruxelles

en coproduction avec la Maison de la Culture de Bourges,

Le Gallia Théâtre / Scène conventionnée de Saintes

et le Théâtre de l’Agora / Scène nationale d’Evry et de l’Essonne.

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L’auteur et metteur en scène

Né en 1966 à Cotonou au Bénin, José Pliya a obtenu en 2003, le

Prix du jeune théâtre André Roussin de l’Académie Française pour Le

Complexe de Thénardier et l’ensemble de son œuvre. Auteur, il a écrit une

vingtaine de pièces de théâtre traduites et créées sur les cinq continents.

Il est metteur en scène de nombreuses pièces créées en Afrique,

dans les Caraïbes et aux Etats-Unis. En France, il a dirigé les comédiens de

la troupe de la Comédie Française dans sa pièce Les effracteurs au studio

théâtre en 2004 et mis en scène le discours De la race en Amérique de

Barack Obama au théâtre du Rond Point (janvier 2009).

Il dirige depuis 2005, l’Archipel, Scène Nationale de la Guadeloupe.

La pièce

Le petit poucet a disparu. Il est rentré de ses glorieuses aventures, il a mangé, il a bu, il s’est assis

puis, il a disparu. C’est son père, Guillaume le bûcheron qui le prétend. Il le cherche partout et ne le trouve

pas. Pourtant il aimerait bien savoir la vérité, la véritable histoire de son fils parce que tout ce qu’on raconte

sur lui, son fils, il ne le croit pas. Il ne croit pas son fils, « son pou, son sale petit pou », capable de tous ces

exploits. Pourquoi ? Parce qu’il est son père et qu’il le connaît mieux que personne. Alors avant de partir à

sa recherche il nous raconte sa famille : son propre père célèbre bûcheron, sa femme, ancienne

bûcheronne, ses six fils futurs bûcherons, et son fils, le pou, qui lui ne sera jamais bûcheron…

Extrait

GUILLAUME : Mon fils a disparu. J’étais parti pour le chercher. Le ramener à la maison. Je ne le trouvais

pas. Lorsque je suis rentré, il était là, rentré tout seul comme un grand.

Je me suis lavé. Le voyage a été long. Je me suis assis, là, pour manger. Nous avons mangé,

tous les deux, mangé. En silence. Nous avions faim et soif. Nous avons bu, moi de la bière, lui de

l’eau, beaucoup d’eau. Et puis tous les deux, nous nous sommes encore assis, là, près du feu.

En silence. Il avait plein d’histoires à me raconter. Lui, qui est parti depuis si longtemps. Lui, qui

paraît-il a vécu plein d’aventures. Je voulais qu’il me raconte, qu’il me raconte tout. Je voulais

savoir si tout ce qu’on dit de lui est vrai. Si tout ce qu’on raconte d’incroyable sur lui, mon fils,

c’est la vérité. (…)

Je me suis assis par terre, en tailleur. La chaleur du feu me faisait du bien. J’avais mangé, j’avais

bu et avant d’aller me coucher, avant d’aller me reposer de ce long voyage où j’étais parti le

chercher sans le retrouver, je l’ai regardé. Il était devant moi, face à moi, dans mon fauteuil. Le

fauteuil, mon vieux fauteuil, est doux et moelleux. Il y était assis, confortablement. Il ne disait rien,

ou pas grand-chose, à peine un murmure. Mon fils n’a jamais beaucoup parlé.

C’est lui, c’est bien lui, mon fils. Il n’a pas changé. J’ai demandé : « fils, raconte-moi ton histoire».

J’étais bien, impatient juste ce qu’il faut, mais surtout très fatigué. Il ne disait toujours rien, ou pas

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grand-chose, à peine un murmure, assis, perdu dans le grand fauteuil, avec juste ses yeux qui

dépassent.

Je me disais : « Il était parti, je suis allé le chercher, il est revenu, de lui-même revenu. Tout va

bien. On a tout le temps maintenant, on a tout le temps ». Une deuxième fois j’ai commencé :

«Fils, raconte-moi ton histoire ». (Temps)

« Fils, raconte… ». Et c’est là, d’un seul coup d’un seul, blip ! Que j’ai dû m’assoupir… Oh ! Pas

longtemps, ça c’est sûr, pas longtemps puisque le feu brûle encore. J’ai fermé les yeux. Je les ai

ouverts. Il a disparu.

J’ai regardé dans le fauteuil : personne. J’ai regardé dans leur chambre, la chambre des garçons:

personne. J’ai demandé à ses frères, ses six frères : personne ne l’a vu. J’ai demandé à sa mère,

sa mère qui sait tout, elle m’a répondu : « Il a disparu et puis voilà ! ». De nouveau disparu. Je ne

comprends pas. Je ne sais pas ce qui s’est passé.

Les intentions de l’auteur et metteur en scène

« Le père que je suis a des enfants, qui comme tous les enfants adorent qu’on leur raconte des

histoires. Des histoires ‘’inventées’’ comme ils préfèrent. N’ayant jamais eu grande imagination en matière

d’histoires dites ‘’jeune public’’, je m’inspire souvent de contes existants que je brode, transforme, réinvente

à ma façon. C’est ainsi qu’est né Mon petit poucet.

De tous les contes de mon enfance c’est l’un de ceux qui m’a le plus profondément marqué. Mon

père me le racontait. Il était le bûcheron, j’étais le petit poucet. Me réappropriant l’histoire pour la dire à mes

enfants, j’ai commencé ainsi : ‘’Il était une fois un père qui avait décidé d’abandonner ses sept enfants...’’. Et

j’ai cru voir dans leurs yeux endormis que j’étais ce père et qu’ils étaient ces enfants.

Comment un père – et une mère – en arrivent-ils à prendre la décision d’abandonner, une fois, deux

fois, ses sept garçons ? Quel monstre ou quel ogre faut-il être pour faire, froidement, en toute conscience,

un tel choix ? De quelle lignée antique - Abraham, le Dieu du Nouveau Testament, Agamemnon…- doit-on

descendre pour survivre à ça ? C’est quoi être père ?

Mon petit poucet pointe du doigt – du pouce ? – le vertige de la question. Il n’y apporte pas de

réponse. Il montre simplement les conséquences de la faute des pères : famine, guerre, désolation, enfants

soldats, enfants sorciers… Il montre aussi aux enfants comme aux parents qu’il n’y a pas de fatalité et qu’il

suffit parfois d’un mot, ou mieux d’un geste, pour, comme le disent les contes, espérer ‘’vivre heureux’’ en

ayant beaucoup d’enfants…

Pour les petits comme pour les grands, la morale de ce conte ne sera pas les traditionnelles

retrouvailles, mais plutôt, l’émancipation qui est le commencement du pardon et de la réconciliation avec soi-

même ».

José Pliya

« Le théâtre est le premier sérum que l’homme ait inventé pour se protéger de la maladie de l’angoisse.»

Jean-Louis Barrault

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Des pistes pédagogiques

• Le Petit Poucet, contextualisation

Le Petit Poucet, conte faisant partie de la tradition orale, a été pour la première fois publié en 1697

par Charles Perrault dans son recueil Les contes de ma mère l’Oye. Perrault est donc dans un premier

temps lui-même « adaptateur » en faisant passer le récit de la tradition orale à la tradition littéraire.

Bien que la misère du petit peuple soit un fait indéniable à travers les âges, ce conte est mis à l’écrit

pendant une période où la France connaît des grandes famines. Il met plus particulièrement l'accent sur la

précarité de la vie paysanne et sur la condition de l'enfant, qui était généralement le premier sacrifié en cas

de malheur.

Un fait indéniable, lorsque l’on s’intéresse à la question du conte, est qu’il est souvent anonyme et

d’une origine impossible à déterminer. « Les contes semblent n’appartenir à personne : c’est un bien collectif

que chacun pourrait s’approprier afin qu’il continue à se transmettre de génération en génération »2. C’est à

ce caractère collectif que le conte sera un genre rencontrant un grand succès et qui fera l’objet de

nombreuses d’adaptations (littéraires, cinématographiques, théâtrales).

C’est ce qu’il nous semble intéressant de mettre en évidence dans les différentes exploitations de la

pièce : chaque nouvelle version du conte est interprétation de la personne qui l’adapte.

Dès la fin du 17ème siècle, on observe un engouement considérable pour la féerie au théâtre qui se

développera au 18ème. A cette époque, les publics sont avides de spectacles et ont un goût prononcé pour

le merveilleux3. Il suffit de consulter les dictionnaires de théâtre pour se persuader de l’abondance des

pièces à sujet merveilleux.

Les pièces s’inspirent de nombreux récits de contes publiés à ce moment. Il s’agit d’adaptations ou

de dramatisations. Le conte, alors considéré comme genre mineur, alimente le répertoire des théâtres

populaires et innovants comme les théâtres Italiens ou les théâtres de Foire qui laissent une grande place à

l’expérimentation théâtrale4.

La scène du conte se développe sous forme de comédies, opéras-comiques, pantomimes, ballets et

offre une nouvelle oralité à ces récits féeriques. Nous pouvons citer quelques auteurs d’adaptations

théâtrales de contes comme Sedaine (Raoul Barbe Bleue), Anseaume (Cendrillon), Carmontelle (Le Petit

Poucet), etc.

A l’époque, et pour les auteurs cités, les adaptations se font à partir de contes de Perrault et ce, en

France.

2 SERMAIN J.-P., Le conte de fées du Classicisme aux Lumières, Paris, Desjonquères, 2005, p.7

3 Ibid. p.35 4 RAMOND C., Le merveilleux sur les planches : l’adaptation théâtrale de quelques contes de fée au 18ème siècle, p. 256

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Les thématiques abordées dans le conte et dans la pièce

Les thématiques, dans le conte de Perrault, se retrouvent dans la pièce de Pliya, il va néanmoins les

nuancer. Il peut être intéressant d’en discuter avec vos élèves et de mettre en évidence ces sujets avec eux.

� Surmonter le stade oral, la voracité5

A la lecture du conte de Perrault et également dans la version de Pliya, la thématique de la faim, de

la voracité et donc, du stade oral saute aux yeux.

Il est intéressant de voir comment le personnage du Petit Poucet dépasse ce stade par son côté futé

et inventif : il se retient de ne pas finir son bout de pain pour l’utiliser pour retrouver son chemin. Les parents,

quant à eux, sont des anticipations des personnages de l’ogre et sa femme incarnant totalement cette

voracité.

� Le cadet rabaissé dans la fratrie

Alors que le Petit Poucet dans le conte est décrit comme « pas plus grand qu’un pouce », dans la

version de Pliya, il est totalement dénigré par son père : pour celui-ci, son fils cadet n’est bon à rien.

Cependant, il va sauver ses frères au cours des péripéties, il trouvera même un moyen pour que sa famille

s’en sorte.

� La maltraitance des parents

Quel genre de parents en vient à abandonner ses enfants ? La question de la maltraitance enfantine

est soulevée par la pièce de Pliya. La misère sociale peut-elle justifier violence et abandon ? Pliya place les

êtres face à leur responsabilité d’humains. L’entraide et le soutien mutuel favorisent la réussite et la survie.

� Parallèle avec la mythologie

Il est intéressant de faire le parallèle entre le conte du Petit Poucet et d’autres récits tirés de la

Mythologie ou d’autres contes, à découvrir avec les enfants :

- le parcours du Petit Poucet avec ses petits cailloux à mettre en parallèle avec l’histoire de Thésée qui sort

du labyrinthe grâce au fil d’Ariane ;

- Thésée abat le Minautore alors que le Petit Poucet trompe l’Ogre ;

- Dédale quitte sa triste condition par les airs alors que le Petit Poucet s’élève socialement ;

- les thématiques similaires sont également rencontrées dans le conte d’Hansel et Gretel parfois connu sous

le nom de Jeannot et Margot.

Extraits du dossier proposé par le Théâtre Varia, coproducteur du spectacle

Dossier complet sur http://www.varia.be/upload/relations-publiques-2010-

2011/MonpetitpoucetdossierpEdagogiquedoc.pdf

5 Bettelheim, Psychanalyse des contes de fée, p. 243

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Pour se mettre en appétit ou prolonger

le festin au pays des ogres…

La mise en bouche

Parce que se faire raconter des histoires est un plaisir toujours immense, parce que l’imaginaire

aime être toujours plus nourri, parce que se sentir riche de références est une grande fierté même chez les

jeunes enfants, la meilleure des préparations avant les spectacles pourrait être d’entendre les contes : et

pour commencer, dans les versions traditionnelles. En effet, celles-ci sont souvent méconnues, au profit des

versions tronquées de Walt Disney…

Mais qu’est-ce que le conte a encore à dire aux enfants d’aujourd’hui ? « Si nous voulons être

conscients de notre existence au lieu de nous contenter de vivre au jour le jour, notre tâche la plus urgente

et la plus difficile consiste à donner un sens à sa vie», affirmait Bruno Bettelheim6. Or justement, la fonction

de la littérature, et a fortiori du conte, est d’apporter à l’enfant la « connaissance du sens plus profond de la

vie et de ce qui est significatif pour lui au niveau de développement qu’il a atteint. »

Pour les trois spectacles proposés, les contes qui s’imposent sont bien entendu La Petite Sirène de

Hans Christian Andersen et Le Petit Poucet de Charles Perrault ; mais pour savourer pleinement Ah !

Anabelle, la (re)découverte de Cendrillon, Barbe Bleue, Le Petit Chaperon rouge, Hansel et Gretel ne

manquera pas… de sel.

Des ingrédients

� Autour de La Princesse Sirène et Mon petit Poucet

En littérature jeunesse, nombreux sont les ouvrages qui proposent les versions variées des contes :

traditionnelles, mais aussi adaptations, réécritures, voire parodies. Vous trouverez sur le site du CRDP de

Créteil une bibliographie très dense, mais également des pistes de travail intéressantes pour des

prolongements en classe : http://www.crdp.ac-creteil.fr/telemaque/comite/contes.htm

L’idée développée notamment est « de montrer aux élèves qu'une adaptation ou une transposition

n'est pas nécessairement réductrice, mais au contraire, participe souvent d'un choix créateur ». Cette

réflexion s’avère tout à fait pertinente en lien avec le(s) spectacle(s) vu(s).

Des travaux sont donc proposés autour des réécritures, éventuellement dans les autres genres

littéraires (comme le théâtre), ou autour des parodies et détournements. De nombreuses références sont

également données pour permettre une réflexion sur l’intertextualité : les « salades de contes » foisonnent

en littérature jeunesse, et l’humour qu’elles recèlent ne manquera pas de séduire les enfants. Le site

propose ainsi de retrouver les personnages, d’inventer d’autres suites au conte, etc. Et pourquoi pas, de les

mettre en scène à son tour ?

6 Cf Psychanalyse des contes de fées, Bruno Bettelheim, éditions Robert Laffont, 1976

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� Autour de Ah ! Anabelle

La pièce Ah ! Anabelle est particulièrement propice aux réflexions autour de l’intertextualité.

L’académie de Reims par exemple offre sur son site un jeu amusant pour initier les enfants à ces repérages.

A partir de la lecture du conte Barbe Bleue et de la pièce Ah ! Anabelle, les enfants doivent identifier le bon

ogre à partir du portrait-robot :

http://www.ac-reims.fr/datice/ecole/ia08/cycle_3/rencontres_finales/2004_2005/anabelle/temoignage_portrait_robot.pdf

Une séquence de lecture autour de la pièce vous est proposée par ailleurs sur le site du CDDP de

Reims : http://www.crdp-reims.fr/ressources/lib/produits/pdt128_sommaire.htm. Elle exploite largement les

effets comiques, les jeux de mots liés à l’homonymie ou à la polysémie, invite à la réflexion sur les niveaux

de langue… Bref, propose de travailler la grammaire de façon plutôt amusante.

En ce qui concerne le nom des personnages, le site mentionne que les enfants seront à même de

trouver l’aspect comique des noms d’ Anabelle ou de Louis Beaugosse, des sous-entendus qu’ils recèlent.

Mais savez-vous que les noms d’Agathe et Anastasie ne sont pas neutres non plus ?

En effet, Anastasie est dans l’Histoire de France le nom donné à la censure : or c’est celle dans la

pièce qui empêche de dire la vérité, qui guette les risques de trahison de sa sœur qui s’avère quelque peu

« gaffeuse » et qui risquerait de tout révéler à Louis. D’ailleurs,

dès qu’elle a le dos tourné, Agathe semble libérée et cherche

le rapprochement avec Louis, quitte à trahir.

On note également que la censure est représentée par

une vieille fille avec des grands ciseaux, comme on peut le voir

ci-contre. Alors Louis n’a qu’à bien se tenir, surtout quand

Anastasie propose à celui qui porte le nom d’un roi guillotiné

« une petite coupe » (p 48)… D’ailleurs, page 44, l’une des

ogresses fait remarquer qu’ « une tête de plus, une de

moins… ».

On remarquera également le jeu de mot d’Agathe :

« Anastasie, non ! Pas ta scie … », p 38.

Une recherche du côté de l’histoire religieuse nous

révèle que le prénom d’Agathe était porté par une sainte qui

s’était refusée à un puissant consul. Pour punition, celui-ci lui avait tranché les deux seins avant de la faire

tuer. Vous ne voyez pas le rapport ? Peut-être. Mais quand page 16 Agathe s’écrit « ça fait mal aux seins »

en guise de protestation, cela devient vraiment comique…

De nombreuses pistes de travail peuvent encore être proposées autour du texte de Ah ! Anabelle,

car le texte regorge de petits trésors. Et puisque nous parlions d’intertextualité, voici un petit indice culturel

qui peut être donné aux enfants pour le plaisir : le « Mais pour être Tabou, je n’en suis pas moins homme »

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de Louis Beaugosse, page 58, est une référence amusante au célèbre « Ah ! Pour être dévot, je n’en suis

pas moins homme » du Tartuffe de Molière !

Un ustensile pour la cuisine

Autour de la thématique du conte et du théâtre, le CDDP de la Vendée rend disponible au prêt « La

malle à théâtre ». Destinée aux écoles du département, celle-ci propose plusieurs adaptations théâtrales

ainsi que de nombreux albums sur des contes célèbres. Et bien sûr, les versions traditionnelles.

Côté textes théâtraux, vous trouverez notamment dans la malle, autour du conte Barbe-Bleue, les

pièces suivantes :

- Castan Bruno, Coup de Bleu, Editions théâtrales, 2001

- Rivais Yak , L’affaire Barbe Bleue, Edition Retz, 2000

- Anne Catherine, Ah ! Anabelle, Ecole des Loisirs, théâtre, 2003

Sur le thème des ogres, trois autres pièces sont fournies :

- Papin Nathalie, Mange-moi, L'école des loisirs, Théâtre, 2004

- Lebeau Suzanne, L'Ogrelet, Théâtrales jeunesse, 1997

- Bernard Fred et Roca François, La comédie des ogres, Editions Albin Michel, 2002

Côté récits, plusieurs albums et recueils sont proposés dont, à propos des réécritures et parodies :

- DAHL Roald et BLAKE Quentin, Un conte peut en cacher un autre, Gallimard.

- DUMAS Philippe et MOISSARD Boris, Contes à l'envers, L'école des loisirs, Joie de lire.

- UNGERER Tomi, Le géant de Zéralda, L'école des loisirs

On trouve également dans la malle du matériel pour faire du théâtre en classe. De multiples

ouvrages vous sont proposés pour vous guider dans cette pratique autour du conte. Vous trouverez toutes

les informations nécessaires sur place ou grâce au lien suivant :

http://cddp85.crdp-nantes.fr/actions.asp?dep=VE&IDinfos=1693

« Il ne s’agit pas de faire des élèves spectateurs mais il s’agit surtout de leur

permettre de faire l’expérience de la créativité, de les aider à être des

protagonistes poétiques donc des protagonistes bénéfiques de la société. »

Ariane Mnouchkine, à propos de l’opportunité de conduire les enfants, via l’école, au théâtre.

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Contact Jackie Brisson chargée des relations publiques - jeune public / vie scolaire Tél. 02 51 47 83 82 Courriel : [email protected]

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