20 P RETRAITESDR La coordination de ce supplément est assurée par Annie Clavel et Gérard Niot....

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ÇA FAIT RIEN, ON CHANGE RIEN ! 1993, 2003 : les réformes des retraites ont été présen- tées comme devant favoriser la prolongation de l’activité professionnelle. Rien de cela ne s’est produit et le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites (1) constate que les assu- rés liquident leur retraite le plus tôt possible. Ce qui s’explique aisément par la situation de l’emploi, la stig- matisation des seniors, la pénibilité et la fatigue au travail, l’aspiration à profiter de ce temps libéré. Les défenseurs de ces réformes, en proposant de poursuivre dans cette voie cachent donc leur véritable objectif, la baisse des pen- sions… Ils taisent donc l’heureuse nouvelle des projections actualisées par l’INSEE, celle d’un maintien de la popu- lation active au-delà de 2015 et jusqu’en 2050, alors qu’en 2003 on envisageait sa décroissance. Est-ce vraiment sauver les régimes par répartition que de les décrédibiliser aux yeux de l’opinion et des plus jeunes géné- rations ? Le SNES et la FSU font le choix d’une société solidaire. Dégager des financements nouveaux est à la portée d’un pays qui s’enrichit. La principale question est celle d’une répar- tition équitable de l’effort à faire. Nous devons imposer ce débat. Et poursuivre les actions actuellement engagées pour la défense du pouvoir d’achat des actifs comme des retraités. FRÉDÉRIQUE ROLET cosecrétaire générale ANNE FÉRAY secrétaire nationale (1) 21 novembre 2007. ET L’ESPOIR REVIENT Déterminée, arc-boutée sur ses intérêts, la droite a décidé d’en finir avec la Sécurité sociale, l’idéologue du MEDEF Denis Kess- ler le dit crûment : « il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodique- ment le programme du Conseil national de la Résistance » ! La démolition est organisée : retraites du privé, du public, réforme de l’assurance- maladie, casse de la fonction publique, régimes spéciaux aujourd’hui… et demain nouveau tour de vis pour les retraites ? Toujours le même scénario : sur fond de catastrophisme, des experts envahissent les écrans, de colloques en forums on s’agite, les rapports pleuvent : la faillite est annoncée ! On n’en peut plus d’entendre ces prophéties de malheur et de constater dans le même temps la croissance des profits et richesses, l’augmentation de la pauvreté, et pour nous tous la provocation du racket d’un trop perçu en 2007 qui sera imputé sur nos pen- sions 2008. L’espoir nous vient du réveil des mobilisa- tions : celles de la Semaine Bleue et des luttes avec les actifs qui en appellent d’autres, la plus difficile pour nous, sala- riés comme retraités étant la bataille de l’opinion… Courage donc pour cette fin de trimestre. Bonnes fêtes à tous : nous nous retrouverons bientôt ! Le 28 novembre 2007 ANNIE CLAVEL - ROBERT JACQUIN responsables de la catégorie « retraités » Supplément à L’US n° 660 du 8 décembre 2007 RETRAITÉS RETRAITÉS DR La coordination de ce supplément est assurée par Annie Clavel et Gérard Niot

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ÇA FAIT RIEN,ON CHANGE RIEN !1993, 2003 : les réformes des retraites ont été présen-tées comme devant favoriser la prolongation de l’activitéprofessionnelle.Rien de cela ne s’est produit et le dernier rapport duConseil d’orientation des retraites(1) constate que les assu-rés liquident leur retraite le plus tôt possible. Ce quis’explique aisément par la situation de l’emploi, la stig-matisation des seniors, la pénibilité et la fatigue au travail,l’aspiration à profiter de ce temps libéré. Les défenseursde ces réformes, en proposant de poursuivre dans cettevoie cachent donc leur véritable objectif, la baisse des pen-sions… Ils taisent donc l’heureuse nouvelle des projectionsactualisées par l’INSEE, celle d’un maintien de la popu-lation active au-delà de 2015 et jusqu’en 2050, alorsqu’en 2003 on envisageait sa décroissance.Est-ce vraiment sauver les régimes par répartition que de lesdécrédibiliser aux yeux de l’opinion et des plus jeunes géné-rations ?Le SNES et la FSU font le choix d’une société solidaire.Dégager des financements nouveaux est à la portée d’un paysqui s’enrichit. La principale question est celle d’une répar-tition équitable de l’effort à faire.Nous devons imposer ce débat. Et poursuivre les actionsactuellement engagées pour la défense du pouvoir d’achatdes actifs comme des retraités. �

FRÉDÉRIQUE ROLET cosecrétaire générale ANNE FÉRAY secrétaire nationale

(1) 21 novembre 2007.

ET L’ESPOIRREVIENT

Déterminée, arc-boutée sur ses intérêts, ladroite a décidé d’en finir avec la Sécuritésociale, l’idéologue du MEDEF Denis Kess-ler le dit crûment : « il s’agit aujourd’hui desortir de 1945, et de défaire méthodique-ment le programme du Conseil national dela Résistance » !La démolition est organisée : retraites duprivé, du public, réforme de l’assurance-maladie, casse de la fonction publique,régimes spéciaux aujourd’hui… et demainnouveau tour de vis pour les retraites ?Toujours le même scénario : sur fond decatastrophisme, des experts envahissent lesécrans, de colloques en forums on s’agite, lesrapports pleuvent : la faillite est annoncée !On n’en peut plus d’entendre ces prophétiesde malheur et de constater dans le mêmetemps la croissance des profits et richesses,l’augmentation de la pauvreté, et pour noustous la provocation du racket d’un tropperçu en 2007 qui sera imputé sur nos pen-sions 2008.L’espoir nous vient du réveil des mobilisa-tions : celles de la Semaine Bleue et desluttes avec les actifs qui en appellentd’autres, la plus difficile pour nous, sala-riés comme retraités étant la bataille del’opinion… Courage donc pour cette fin detrimestre.Bonnes fêtes à tous : nous nous retrouveronsbientôt !

Le 28 novembre 2007ANNIE CLAVEL - ROBERT JACQUIN

responsables de la catégorie « retraités »

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La coordination de ce supplément est assurée par Annie Clavel et Gérard Niot

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S O M M A I R EÉDITORIAUX p. 1

SOCIÉTÉLes retraités sont des actifs p. 2

GRÈVEDeux défis majeurs pour le syndicalisme p. 3

AUGMENTATIONDérapage des prix p. 4

COMMUNIQUÉ DE LA SECTIONFÉDÉRALE NATIONALE DES RETRAITÉSDE LA FSUDes retraités trop riches ! p. 4

PRÉLÈVEMENT LIBÉRATOIRELa « bonne surprise » de la loi de finance p. 5

CES RÉGIONAUXLes retraités ont leur place dans lesCES régionaux p. 5

GESTIONSHôpital public et cliniques privées p. 6

NOUVELLES FRANCHISESLes malades paient de plus en pluspour les malades p. 7

SANTÉLe grand flou de la cataracte p. 8

DROITCNSA : quel droit universel p. 9

FGR-APPréparation du congrès 2008 p. 10

ENTRETIEN avec JÉRÔME PELLISSIERCombattre les idées reçues p. 11

EN BREFD’ici, de là et d’ailleurs... p. 13

1789, 1946... 2008 !La « révolution » de la fonctionpublique est une forfaiture p. 15

INTERVIEW de JEAN-PAUL BAILLY,PRÉSIDENT DU GROUPE PUBLICLa Poste du futur p. 16

COLLOQUEL’âge et le pouvoir en question p. 16

COMPÉTENCELe rôle du CNRPA p. 17

DANS LE RESTE DU MONDEQuel pouvoir pour les personnesâgées dans d’autres sociétés ? p. 18

MÉMOIRELa résistance dans la drôme p. 19

COMMÉMORATIONJe connais des Justes, ils m’ont sauvée p. 20

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTÉÉSOCIÉTÉ

Les retraités sont des actifs> >

Les retraités interviennent à deux niveaux danscette logique : leurs pensions, puisqu’elles ne peu-vent être (et ne sont nulle part) le reversement d’in-térêts d’un capital accumulé, sont payées par l’ac-tivité du moment, comme ils ont financé naguèrecelles de la génération précédente. C’est bien celaqui pose problème puisque la logique globale estd’amputer, dans les limites d’acceptation du corpssocial, la part des salariés, actifs ou retraités.

Les retraités sont desconsommateursMais et ce n’est pas un paradoxe, les retraités sontdes consommateurs qui contribuent à l’activitééconomique dans des proportions de plus en plusimportantes, sauf évidemment si l’on envisage froi-dement un arrêt de l’allongement de l’espérance devie. La dépendance même est créatrice d’emploiset tout le secteur des services à la personne, deshôpitaux publics et privés aux maisons de retraite,des médicaments aux prestations mortuaires, contri-buent à la vie économique et à l’enrichissementglobal, sinon bien réparti, du pays.Alors disons-le sans ambages, les retraités sont descitoyens actifs qui doivent être entendus et respec-tés par ceux qui sans eux ne seraient pas ce qu’ilssont. On nous parle de la charge qui attend nosdescendants, mais on oublie que dans le présent ily a nos apports. Étonnant, non ? �

JEAN-PAUL BEAUQUIER

* Titrisation : technique financière qui transforme entitres des actifs non liquides (créances par exemple) etpermet à un vendeur d’en faire commerce.

Lorsque dans un pays une proportion consi-dérable de la population vit plus longtemps, rien nejustifie que cette population qui a vécu et travailléen fonction de sa qualification, de son milieu, de sesrevenus, soit traitée différemment de l’ensembledes citoyens quant à ses droits.Dans une société civilisée, cela signifie que sesconditions de vie, du logement à l’accès aux soins,des loisirs à la participation à la vie de la cité, sontrespectueuses de l’apport que constitue la successiondes âges.

La retraite est un traitementcontinuéCeci posé, la question des retraites en évoque beaucoupd’autres mais une fondamentale d’abord : la retraite estun traitement continué, une rémunération du travaillorsque la physiologie rend la poursuite d’une activitécontrainte pénible ou impraticable. La politique d’ungouvernement sur la question des retraites est signifi-cative de la place qu’il accorde au travail dans larépartition de la plus-value créée dans l’économie engénéral, y compris dans la sphère financière dont ladimension virtuelle pose un problème permanent. Latitrisation* de tout, cf. la crise des subprimes née auxÉtats-Unis, en est le dernier exemple.Les réformes de 1993, 2003 et celle annoncée de2007/2008 marquent une grande continuité dans leprojet de la droite : il s’agit bien dans l’esprit de sesdirigeants d’imposer une refondation sociale, commel’avait définie l’idéologue du Medef, Denis Kessler.Il ne s’agit nullement de revaloriser la valeur travailmais bien au contraire de transférer aux actionnaires,rentiers et managers le maximum de richesses.

HISTOIRE DU SNESLe tome II deL’histoire du SNES, sous la direction d’Alain Dalançon, est en vente (30 euros), vous pouvez le commander en écrivant à l’IRHSESau 46, avenue d’Ivry, 75647 Paris Cedex 13.

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TTÉÉSS RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETT

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GRÈVE

Deux défis majeurs pour le syndicalisme>RR>

que leurs syndicats ont trop mis l’accent sur lesrecrutements et pas assez sur le pouvoir d’achat !Pour avoir toujours lié revalorisation des salaires etdu métier, le SNES est bien placé pour savoir que lesfonctionnaires progressent simultanément sur lesdeux terrains ou reculent simultanément sur les deuxen fonction du rapport des forces. Les années qui ontsuivi 1968 comme celles qui ont suivi 1989 ontconnu simultanément une sensible revalorisation dessalaires et un fort accroissement des recrutementsnécessaires à l’amélioration des conditions de travailet d’emploi. Que n’entendrait-on aujourd’hui si le syndicalismedes fonctionnaires avait sacrifié les recrutements à uneexigence de revalorisation des salaires ! Le gouver-nement aurait sous la main le bouc émissaire duchômage des diplômés et du bourrage des classes !Il y a urgence pour le mouvement syndical à se lan-cer dans cette bataille d’opinion pour rétablir les faits.Elle sera rude car ce n’est pas par hasard si Lagardère,Bouygues, Dassault, Bolloré (tiens ! ça vous rappellequelque chose ?) et autres Arnault se sont donnés lesmoyens de contrôler l’essentiel des médias. Ils enten-dent continuer à se gaver tranquillement de divi-dendes, stock-options et autre sucreries ? Au nom durisque bien sûr, Noël Forgeard en témoigne !

Un second défiune stratégie syndicaleMais une seconde faiblesse pèse sur les luttes syn-dicales. Alors que les gouvernements ont de longuedate accordé pour l’essentiel leurs violons sur l’aus-térité pour les salariés, le syndicalisme peine à voirau-delà des frontières nationales. Pourtant c’estdans toute l’Europe que les droits des salariés sontpassés à la moulinette et bien rares sont les initiativesde coordination internationale des luttes.C’est là aussi un travail d’urgence pour le syndica-lisme. De la même manière qu’après avoir sabré lessalariés du privé puis les fonctionnaires, le gou-vernement sabre aujourd’hui ceux du public, lesgouvernements des divers pays d’Europe dégra-dent en permanence la situation de leurs salariés enprenant en référence la situation de ceux qui sontdéjà les plus mal lotis dans les pays voisins.Plutôt qu’à rechercher le moyen d’action miracle, ilest plus efficace de rechercher des plates-formes uni-ficatrices et des batailles d’opinion coordonnées auniveau européen, en veillant à toujours associeractifs et retraités. � PIERRE TOUSSENEL

Des luttes puissantes maiscirconscrites au secteur publicEn ce 21 novembre, au lendemain d’une forte grèvedes fonctionnaires et alors que se poursuit celle de laSNCF et de la RATP, nombre de questions se posent.En 1993, au lendemain d’une sévère défaite électo-rale du parti socialiste, Balladur s’était immédiatementattaqué au régime des retraites des salariés du privé.Le très faible taux de syndicalisation dans ce secteurn’avait pas permis la riposte syndicale qui s’imposait.Les salariés des régimes spéciaux et le syndicalismeen général n’avaient mesuré ni la gravité des mesuresadoptées ni qu’il s’agissait de la première étape d’uneoffensive qu’il fallait enrayer dès l’origine.En 1995 Juppé engageait la deuxième étape. En s’en prenant à l’ensemble des régimes spéciaux età l’ensemble de la protection sociale, il avait sous-estimé les capacités de mobilisation de ces secteurset favorisé une unité d’action dont le lâchage de laCFDT n’avait que partiellement affaibli l’efficacité.La droite a retenu la leçon. En 2003, elle a ciblé sonattaque sur la fonction publique, et les salariés desautres régimes spéciaux n’ont pas mesuré que leurtour viendrait très vite ensuite. Nous y sommesaujourd’hui, et la bataille d’opinion est beaucoupplus difficile qu’en 1995 et plus difficile qu’en 2003.Souhaitons que tous les salariés actifs et retraitéscomprennent qu’au-delà de leur régime de retraitec’est celui de tous les salariés que les grévistes défen-dent. Mais faisons surtout en sorte que le syndicalismese mette en mesure de prendre en charge la défensede tous les régimes de retraite. Renouer les solidari-tés, reconstruire des plates-formes unificatrices est undéfi majeur pour le syndicalisme et un enjeu essen-tiel pour les actifs et les retraités. C’est la conditionnécessaire d’une victoire dans la formidable batailled’opinion qu’il va falloir conduire d’urgence.

Une opinion à reconquérirLe gouvernement est à la manœuvre de longue date.Il fait donner les supplétifs de l’UMP contre les gré-vistes et manie l’intox. André Santini, qui se prend pour un ministre, lance enpâture un salaire de certifié majoré d’un bon millierd’euros. De deux choses l’une, ou la fumée de sescigares lui a définitivement obscurci le jugement ou,hypothèse plus vraisemblable, il ment délibérémentpour jeter le discrédit sur la grève des fonctionnaires.Une autre éminence gouvernementale explique quesi le salaire des fonctionnaires est trop bas c’est parce

SUR LA PAIEDE DÉCEMBRE

Parmi les mesures annon-cées unilatéralement par legouvernement le 23 octo-bre, figure l’extension dela « bonification indemni-taire(1) ». En 2006, celle-cin’a concerné que les fonc-tionnaires au dernier éche-lon du grade le plus élevéde leur corps. À titreexceptionnel, elle sera ver-sée en 2007 aux agentsqui stationnent au dernieréchelon d’un grade inter-médiaire. Le décret est encours d’élaboration maisune circulaire a donné ins-truction aux administra-tions de procéder au man-datement afin que cettebonification soit versée endécembre.La bonification indemni-taire sera donc versée auxcertifiés, COP, CPE, AEayant au moins cinqannées d’ancienneté au11e échelon ou dans le 7e

échelon de la hors classeou du grade de directeurde CIO. Les agrégés ensont exclus, le décret écar-tant les corps dont l’indiceterminal dépasse 798(indice majoré). Le SNESconteste vivement cetteexclusion.Le montant annuel de 700euros est réduit :• si la condition de cinqans d’ancienneté n’a étéremplie que pendant unepartie de l’année. Ainsi, uneancienneté acquise au 1er

septembre ouvre doit autiers de l’indemnité. Lesretraités de 2007 la per-çoivent au pro rata de ladurée pendant laquelle ilsétaient en activité et ontrempli la condition d’an-cienneté ;• comme le traitement encas de temps partiel ou deCPA, de congé maladie àdemi traitement ;• pour service non fait encas de grève.

Anne Féray

1. Décret 2006-778 du 30 juin 2006.

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTAUGMENTATION

Dérapage des prix>

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L’indice des prix a augmenté de 0,2 %en octobre poussé par l’énergie (+ 0,7 % en unmois) et le secteur alimentaire (+ 1,1 % en un mois),la hausse est de 2 % en rythme annuel. Selon ThierrySaniez de l’association de consommateurs CLCV :« les dépenses contraintes ont explosé depuis troisou quatre ans, qu’il s’agisse du fioul domestique, dulogement, des produits alimentaires ou encore desfrais de santé non remboursés ».La flambée des prix de l’énergie (cours du pétrole60 $ en janvier 2007, 90 $ le 30/10/07) alourdit lesfactures de chauffage et renchérit le coût des dépla-cements domicile-travail ; sur un an la hausse est de8,2 % pour les carburants et de 9,7 % pour les com-bustibles liquides.L’augmentation des prix agricoles a fait grimperle prix du pain et va tirer à la hausse les prix des pro-duits laitiers et des produits frais. Ainsi Danoneaugmente de 10,48 % le prix des yaourts à compterdu 21/11/07 après 2,5 % cet été ; Lactalis, n° 1Européen du fromage, s’apprête à augmenter de15 à 17 % ses prix de vente à la grande distribution ;Bonduelle va imposer une hausse minimumde 10 %.Selon Familles rurales, la consommation d’envi-ron 400 g de fruits et légumes par personne et parjour (soit le niveau recommandé par l’OMS – Orga-nisation mondiale de la santé –) représente un bud-

get de 57 euros pour un couple et de 115 eurospour un couple avec deux enfants de plus de dix anssoit entre 5 % et 12 % du SMIC.L’indice des prix à la consommation de l’INSEE, quiaffiche une progression de 1,7 % cette année, n’estplus crédible ; en ne prenant pas véritablement encompte les prix du logement à leur vraie valeur etles « dépenses contraintes », il ne correspond pas àla véritable consommation des ménages. Or c’est surcet indice que sont indexés les retraites, le SMIC etdans une certaine mesure les salaires. Il ne faut pass’étonner que la question du pouvoir d’achat soit lapréoccupation n° 1 des Français !Comment ne pas s’indigner, dans ces conditions,de la limitation de la revalorisation des pensionsà 1,1 % pour 2008 (inflation prévue 1,6 %, tropperçu en 2007 = 0,5 %, donne 1,1 % !), le gouver-nement a bel et bien programmé une diminutiondu pouvoir d’achat des retraités. �

JACKY BRENGOU

DERNIÈRE MINUTE

ZÉROPOINTÉ

L’inflation fin octobreatteint 1,9 %, 2 %sont prévus pour l’an-née 2007 (INSEE).Le gouvernement l’es-timant il y a quelquesjours encore à 1,3 %en avait tiré argumentpour organiser la saisied’un « trop perçu » de0,5 % sur les pensionsdes retraités pour2008. Dossier à réou-vrir de toute urgence !

A. C. - 14 novembre

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COMMUNIQUÉ DE LA SECTION FÉDÉRALE NATIONALE DES RETRAITÉS DE LA FSU

Des retraités trop riches !

> Le projet de loi de financement de laSécurité sociale annonce une revalorisationdes pensions et retraites au 1er janvier 2008 de 1,1 %alors que la hausse des prix prévue pour cette mêmeannée est de 1,6 %.Cette ponction de 0,5 % – une première depuis1993 – est justifiée par le gouvernement par untrop perçu de 0,5 % au titre de l’année 2007 (hausseprévue 1,8 %, hausse constatée 1,3 % estimées parl’indice INSEE). Cette décision est une provocationà l’égard de l’ensemble des retraités dont la baissedu pouvoir d’achat est soulignée par les étudesd’organismes officiels comme le COR et la DRESS.Cette décision augure mal du contenu de la confé-rence sur l’évolution des retraites et pensions pré-vue pour l’automne 2007. Elle marque un mépris

pour le million de retraités et personnes âgées quivivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté etannonce de nouvelles difficultés pour tous. Elles’ajoute aux mesures nouvelles de dérembourse-ment des soins et d’augmentation des restes àcharge pour les personnes contenues dans le mêmeprojet de loi La Section Fédérale des Retraités de la FSU appellel’ensemble de ses adhérents à s’engager totalementdans la préparation des actions prévues dans lecadre de la Semaine bleue ainsi qu’aux côtés desactifs le 18 octobre. Ils manifesteront leur colère etsont déterminés à construire de nouvelles actionsunitaires avec l’ensemble des organisations pourêtre enfin entendus. �

Paris, le 11 octobre 2007

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TTÉÉSS RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETT

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CES RÉGIONAUX

Les retraités ont leur place dans lesCES régionaux(1)

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PRÉLÈVEMENT LIBÉRATOIRE

La « bonne surprise » de la loi de finance 2008

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NOSPENSIONSEN 2008

Suite à nos courrierset interventions auprèsdu cabinet de XavierBertrand, celui-ci nousfait savoir qu’uneconférence sur la reva-lorisation des pensionsdu secteur publicpourrait se tenir –comme cela est prévupar la loi Fillon pour lesecteur privé –, elleaurait à connaîtred’une éventuelle cor-rection des pensionspour 2008…La FSU sera reçue surle sujet avant la tenuede la conférence, laSection Fédérale desRetraités sera de ladélégation.

Cette bonne surprise, elle est pour les actionnaires Le projet de loi de finances institue un prélèvementlibératoire de 18 % (plus 11 % de prélèvementssociaux) sur certains dividendes. Ce mécanisme nes’appliquera que sur option du contribuable, c’est-à-dire lorsque cette imposition lui sera plus favorableque l’imposition au barème de l’impôt sur le revenu(taux de la dernière tranche 40 %).Argument avancé, cette mesure accélérera les rentréesfiscales en 2008, ce qui aidera Bercy à boucler le bud-get ; en effet ceux qui feront le choix du prélèvementlibératoire devront, en 2008, payer à la fois l’impôtsur les dividendes perçus en 2007 (décalage habituel)et sur les dividendes 2008 (prélèvement à la source).En fait, il s’agit encore d’un cadeau fiscal auxactionnaires les plus fortunés, le taux de 18 % estbien plus faible que leur taux marginal (taux de ladernière tranche de revenu).

Par contre, les retraités et personnesâgées ne bénéficieront d’aucunemesure fiscale nouvelleLe plafonnement de 10 % sur les revenus est fixépour 2008 à 3 491 € (par foyer fiscal) contre13 501 € (par part) pour les actifs et la réductiond’impôt dont bénéficient les personnes âgées héber-gées en long séjour reste notoirement insuffisante.

Dernière minuteLe rapporteur du budget a confirmé la suppression,à partir de 2008, de l’exonération de la redevancetélé ; les personnes âgées (+ 65 ans) aux revenusmodestes (non soumis à l’impôt sur le revenu) quiétaient, jusqu’en 2007, exonérées de la redevancetélé de 116 €, y seront soumis à partir de 2008. Cesont les plus pauvres qui vont payer la revalorisationnécessaire de la redevance. �

JACKY BRENGOU

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Les conseils économiques et sociauxviennent d’être renouvelés.La FSU n’a pas obtenu une meilleure reconnaissancede sa représentativité et n’a en général qu’un seulreprésentant dans la plupart de ces assemblées régio-nales ; il y aurait pourtant des possibilités pour lesretraités de se faire entendre.

Les CES se composent de trois collègesUn collège « employeurs », dominé par le MEDEF ;un collège « syndical » dont les sièges sont répar-tis entre les cinq confédérations reconnues, en fonc-tion de leur représentativité ; les représentants de laFSU et de l’UNSA complètent ce collège. Dans letroisième collège, figurent les représentants desorganismes et associations qui « participent à lavie régionale » ; le flou de la formulation donne auxpréfets de Régions chargés de procéder aux dési-gnations toute latitude dans leur choix. Ils ont aussiune totale liberté pour désigner « les personnalitésqualifiées », en général au nombre de trois, quicomplètent les CES. Lors du présent renouvelle-

ment, ils ont usé, et pour tout dire abusé, de cedroit, en donnant une coloration élyséenne à cettepartie des CES, quitte à « recycler » des battus dusuffrage universel, les installant dans un mandatdurable, une anticipation du Grenelle de l’environ-nement !

Les retraités n’ont plus leur placedans le troisième collège ?Précédemment, de nombreux préfets avaient nommé,au titre des associations participant à la vie de laRégion, et après accord des CODERPA concernés, unreprésentant des retraités et pensionnés. Cette possi-bilité a, semble-t-il, partout été abandonnée, Mes-sieurs les préfets jugeant, sans doute, que les repré-sentants des retraités n’avaient plus leur place auxcôtés des porte-parole, d’associations de locataires, deparents d’élèves, aux côtés des responsables des mou-vements œuvrant pour la jeunesse, la vie culturelle oula protection de la nature et aux côtés des représentantsde la mutualité, de la recherche ou de l’Université.Certes les CES, assemblées consultatives placéesauprès des conseils régionaux, traitent des missions queles lois successives de décentralisation ont déléguées

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTaux Régions : fonctionnement, construction et entre-tien des lycées, formation professionnelle et appren-tissage, formation des demandeurs d’emploi, transportpublic en particulier transport ferroviaire, économie etemploi,... mais les exécutifs régionaux ont, depuisfort longtemps et par nécessité, débordé ce cadrepourtant déjà large et se sont intéressés à la culture, àl’Université et à la recherche, à la santé, au cadre devie ou encore à l’économie sociale et solidaire.

Alors, qui relaie les préoccupationsdes retraités et personnes âgées ?Les représentants des retraités ès qualité ont touteleur place dans le troisième collège : les Régions ontfait une large place aux seniors dans les différentsschémas régionaux qu’ils viennent d’élaborer :schémas de développement économique et social,des transports, du développement touristique,… ilsfigurent aussi dans les préoccupations des schémasdes formations ; les Régions viennent en effet derécupérer la maîtrise complète des formations sani-taires et sociales qui peuvent déboucher sur desprofessions dont l’essor est pour une part liée àl’augmentation de l’espérance de vie. Des ConseilsÉconomiques et Sociaux ont, d’ailleurs, conduitune réflexion sur ces sujets en la centrant sur l’offrede soins en milieu rural, comme en Franche-Comté

ou sur l’accessibilité au logement, ou encore laqualification des emplois pour l’aide à la personnedans d’autres Régions.

Plaidoyer pour le développement dusyndicalisme des retraités : les SFRdoivent être reconnuesL’intervention des retraités organisés syndicalementest indispensable tant en direction des exécutifs régio-naux que des préfets ; elle passe, certes, par une pré-sence dans des instances du type CES, mais elle estavant tout fonction de notre capacité à nous organiseren tant que retraités syndiqué(e)s à la FSU, dans desSections Fédérales de Retraités et à nous faire entendreen tant que FSU auprès de l’opinion publique, auprèsdes autorités régionales, dans les CODERPA, dans uncadre intersyndical et à l’intérieur de la FGR. Il ne fautpas oublier que ce sont les départements qui ont encharge l’essentiel du financement des actions liées àl’âge, de la petite enfance à l’âge le plus avancé, quimettent en place, de manière informelle, des conseilsconsultatifs constitués à l’image des CES : raison deplus pour nous structurer en SFR départementale etnous faire reconnaître comme telle auprès des conseilsgénéraux. � JEAN-PIERRE BILLOT

(1) Conseils Économiques et Sociaux.

LES RETRAITÉS ONT LEUR PLACE DANS LES CES RÉGIONAUX (suite)

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L’hôpital public entre dans un nouveau « dia-logue de gestion » avec de nouvelles pratiques, denouvelles normes et une nouvelle culture. Désor-mais, le financement des activités d’un établissementse fera sur la base d’une tarification de l’activitérépertoriée et conditionnée par une nouvelle clas-sification commune des actes médicaux pour traiterdes pathologies des patients. Cette tarification àl’activité pour les actes de médecine chirurgicale etobstétrique est déjà en vigueur depuis 2005 dans lesétablissements privés. Un des enjeux de cetteréforme est une plus grande équité entre les éta-blissements publics et privés ! Le lien entre l’ac-tivité de l’hôpital et son financement a pour consé-quence la responsabilité des acteurs qui ontdorénavant l’obligation de produire une informationmédicale fiable et de qualité, d’être en quelque sorterentable. Une des conséquences directes est qu’unétablissement non rentable se trouvera en situation

de faillite potentielle. Il semblerait que les deuxtiers des établissements de santé soient déficitaires.Quand cela arrive dans le secteur privé, une spé-cialisation des établissements se met en réseau afinde répondre à toutes les pathologies. Et bien qu’àcela ne tienne, copions le privé, et utilisons la mêmelogique dans le secteur public ! La réforme de l’hô-pital qui se dessine est bien une nouvelle visionavec priorité accordée à la maîtrise des dépenses desanté et à une meilleure valorisation des recettes. Oùsont les missions du service public de la santé ?

Mais qu’en est-il de la gestion descliniques privées ?Un certain nombre de cliniques privées, en difficultéfinancière ou à rendement financier insuffisant ouvoulant se développer, ont été reprises par legroupe VITALIA. Ce groupe a été créé enavril 2006 par le Dr Christian le Dorze, cancérologue

GESTIONS

Hôpital public et cliniques privées>

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et ancien cadre dirigeant à la Générale de Santé de1993 à 2006. Le groupe possède déjà plus de 40 cli-niques surtout dans l’ouest de la France. La dernièreen voie d’acquisition est une clinique réputée deStrasbourg qui veut s’agrandir. La stratégie de crois-sance de ce groupe est basée sur le rôle majeurdans le système français des cliniques privées (85 %des soins de chirurgie ambulatoire, 60 % des inter-ventions chirurgicales lourdes, 50 % de la cancé-rologie...) sans toujours avoir les moyens de sedévelopper. Ce développement rapide a été rendupossible par l’association conclue dès le départavec le fonds d’investissement américain « Blacks-tone Group », coté en bourse à New York. Inutilede préciser que Blackstone agit comme une banqueauprès de VITALIA, à l’image d’autres fonds d’in-vestissement auprès des groupes de santé. Ce ne sont

pas des philanthropes ! Si les retours sur investis-sements n’arrivent pas, que se passera-t-il ?Faut-il rappeler que la médecine dite privée est enFrance largement financée par la Sécurité socialelaquelle est alimentée par nos cotisations et quenous subissons, depuis quelques mois, différentesmesures contribuant à la réduction voire la sup-pression de certains remboursements, en dernierlieu les « fameuses » franchises médicales.Peut-on imaginer un seul instant que le rachat descliniques privées par un fonds d’investissementaméricain soit la solution pour enfin réussir à équi-librer les comptes de la Sécu autrement qu’au détri-ment des malades ?Où risque de nous mener le libéralisme à laSarkozy dans le cadre d’une prochaine réforme del’hôpital public ? � FRANÇOISE GROSMANN>NOUVELLES FRANCHISES

Les malades paient de plus en plus pour les malades

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Le gouvernement minimise l’impactdes nouvelles franchises votées par l’Assembléenationale. Outre qu’elles tournent le dos au principede solidarité, elles s’ajoutent aux nombreux reculsenregistrés ces dernières années. C’est ce que montrele rapport Bartoli. On peut noter le peu d’empres-sement médiatique à relayer les conclusions decette mission. On en comprendra les raisons à la lec-ture de la note qui suit.

EXTRAITS DE LA MISSION BARTOLIGénéralités« L’ensemble des dépassements d’honoraires repré-sente deux milliards d’euros dont les deux tierspèseraient directement sur les ménages. Après laprise en charge des couvertures complémentaires lereste à charge est constitué pour l’essentiel dedépassements d’honoraires. »

Une couverture faible et mal connue« Les informations sur les dépassements d’hono-raires sont parcellaires, un tiers des contrats seu-lement les prendraient en charge mais dans desconditions variées (de 0 à 100 %). Les couverturescomplémentaires sont largement diffusées mais les garanties mal connues. »

Une banalisation des dépassementsDe 1993 à 2004 la part des dépassements dans leshonoraires est stable pour les généralistes (envi-ron 6 %). Mais elle « augmente pour la plupart

des spécialités (16 % en 1993 pour les chirurgiens,29 % en 2004). Le montant des dépassements (parrapport aux honoraires de base) des spécialistesexerçant en secteur à honoraires libres est passé de25 % à 47 % de 1990 à 2004.Les dépassements augmentent beaucoup plus viteque les revenus moyens libéraux alors que le tauxdes charges reste globalement stable. »

Une injustice aggravée suivant les lieux de résidence« Les taux de dépassements varient selon les Régions– 25 % en Poitou-Charentes, Limousin ou Bretagnepour le secteur 2.– 43 % pour le Nord-Pas-de-Calais, 53 % en Rhône-Alpes, 57 % en Alsace et 68 % en Ile-de-France.Les dépassements d’honoraires sur les consultationsconcernent parfois les bénéficiaires de la CMU :1,6 % de l’ensemble des consultations, mais 13 %en chirurgie générale ou urologie et un tiers àParis dans ces spécialités. »

Des montants souvent élevés« L’étude... établit qu’une majorité de patients estaujourd’hui confrontée à des dépassements dont lesmontants peuvent être élevés. La comparaison desdépassements totaux entre les deux secteurs, publicet privé amène trois remarques :– les effectifs de patients concernés par un dépas-sement au titre de l’activité libérale des praticienshospitaliers sont très faibles ;

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITT– cependant lorsqu’ils existent, les dépassementsfacturés sont plus élevés dans le secteur publicqu’en clinique ;– ils sont généralement le fait d’un seul praticien àl’hôpital public alors qu’en clinique privée ils sontle fait de plusieurs praticiens. »Quelques chiffres records peuvent donner une idéede l’ampleur du phénomène : « – 588 euros pour un accouchement ;– 945 euros pour un opéré du cristallin ;– 2 500 euros pour une prothèse de la hanche. »

La conclusion du rapportAinsi, « les dépassements conduisent à une difficultéde l’accès aux soins si le secteur public n’existe paset dans les régions à faible densité médicale et/oules honoraires libres augmentent ».Conclusion limpide : « les dépassements d’hono-raires peuvent conduire à un recul de la solidariténationale. »

Les propositions et interrogationsdu rapport« – mieux connaître l’activité et les revenus despraticiens et les garanties des couvertures sociales– moduler les possibilités de dépassements en fonc-tion de l’offre du secteur 1 ;– plafonner les dépassements en volume et/ou envaleur : supprimer le secteur 2, le remplacer par unsecteur optionnel aux règles précises et strictes ?

– supprimer en totalité ou partiellement la possibilitéde dépassements ;– modifier le mode de rémunération ? »

Si les dépassements d’honoraires ne participent pasaux dépenses de l’assurance maladie, ils jouent unrôle important dans le reste à charge des assurés(1).Ils contribuent à l’installation d’une médecine àdeux vitesses en tournant le dos au principe de soli-darité. Cette situation ne peut aller qu’en s’aggravantsi nous n’arrivons pas à mettre un terme à la poli-tique mise en place.Il suffit, pour s’en assurer, de lire l’éditorial deKessler, ancien numéro 2 du MEDEF dans la revue« Challenges », « il y a une profonde unité à ce pro-gramme – celui du gouvernement –.... il s’agitaujourd’hui... de défaire méthodiquement le pro-gramme du Conseil National de la Résistance ».C’est en informant les assurés de la dramatisationfaite sur le trou de l’assurance maladie et en faisantconnaître nos propositions que nous pourrons créerles conditions d’un retour vers une assurance mala-die Universelle. �

JEAN-CLAUDE LANDAIS

(1) Le reste à charge par personne et par an est estimé à240 euros pour les dépenses de soins. Il atteint les1 000 euros pour près d’un million de personnes. Ceci sanscompter les pratiques délictueuses qui consistent à deman-der de l’argent de la main à la main.

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Après la visite de 358 hôpitaux et cli-niques, un constat s’impose : connaître avantl’acte le montant précis à payer pour une interven-tion chirurgicale est ardu.

L’arrêté du 11 juin 1996 oblige les médecins libérauxà afficher « de manière lisible et visible dans leursalle d’attente » leur secteur d’activité. Ils sont aussitenus d’afficher leurs honoraires et le montant d’aumoins cinq prestations les plus couramment prati-quées. Les médecins de secteur 2 doivent « donnerpréalablement toutes les informations sur les hono-raires qu’ils comptent pratiquer ». Et le code dedéontologie (R 4127-53 du code de la santé publique)précise « qu’un médecin doit répondre à toutedemande d’information préalable et d’explicationssur ses honoraires ou le coût d’un traitement ». Parailleurs, l’article L. 1111-3 du code de la santépublique stipule que « toute personne a droit à sa

demande, à une information, délivrée par les éta-blissements et services de santé publics et privés, surles frais auxquels elle pourrait être exposée à l’oc-casion d’activités de prévention, de diagnostic et desoins et les conditions de leur prise en charge ». L’as-surance maladie a aussi une mission générale d’in-formation sur les professionnels de santé au regardde leur secteur d’exercice, sur les tarifs d’honoraireshabituellement demandés... (art. L. 162-1-11 ducode de la Sécurité sociale). Selon les établisse-ments visités, deux cas de figure se sont présentés :soit ils avaient une unité d’ophtalmologie permanenteavec un ou plusieurs chirurgiens ophtalmologistes enexercice, soit ils ne disposaient pas d’une telle unitémais un ou plusieurs chirurgiens ophtalmologistesavaient des vacations au sein de l’établissement.Quel que soit le mode de fonctionnement choisi,l’information des patients doit être effective. �

QUE CHOISIR N° 453

SANTÉ

Le grand flou de la cataracte>

LES MALADES PAIENT DE PLUS EN PLUS POUR LES MALADES (suite)

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avec pour chacun l’élaboration d’un plan person-nalisé ne se « bornant pas à l’application d’uneclassification ».Exit donc la grille AGGIR qui permet la hiérarchi-sation des handicaps, grille imparfaite c’est sûr,mais remplacée par quoi ? S’il est effectivementimportant de tenir compte des situations particulièresil faut garder une référence commune, garante del’égalité de traitement de tous, égalité dont seréclame le rapport, tout en précisant qu’il faudraorienter les financements publics vers les plusmodestes.

Le panier de biens et de servicesViennent les financements : plusieurs pistes sontévoquées dont celle du financement par la solidaritépublique de l’ensemble de tous les biens et ser-vices récapitulés dans la prestation compensatoire,mais revient avec insistance l’idée de combiner unepart de solidarité publique et de prévoyance col-lective ou personnelle, ou encore une couverturecomplémentaire (refrain connu entonné par lePrésident et repris en chœur par les assureurs privésqui ont assuré le « spectacle » lors des premièresjournées parlementaires consacrées à la dépendancede ce même mois de novembre).Réapparaît aussi dans ce texte la notion de « bienset services identifiés comme nécessaires » et plusclairement encore le « panier de biens et de ser-vices » : qui définirait alors ce qui est nécessaire ?Autre sujet d’inquiétude, dans le plan global per-sonnalisé qu’évoque le rapport, la CNSA se propose– par délégation de l’assurance-maladie – de régu-ler aussi les dépenses médico-sociales.On le voit, la CNSA, si elle se prétend simple opé-rateur, a d’autres ambitions tout en se réfugiantderrière « l’État stratège » et le Parlement auquel ilrevient depuis quelques années de définir lesréponses financières à apporter, shuntant ainsi le rôledévolu aux partenaires sociaux dans la logique de laSécurité sociale.

De nouvelles pistes de financementTout en réaffirmant que n’entre pas (encore ?) dansson champ de compétences le financement de laprotection sociale, le conseil évoque des pistes,parmi lesquelles l’inclusion des revenus de rem-placements dans l’assiette de la cotisation solidaritéautonomie, l’alignement du taux de la CSG desretraités sur celui des actifs, l’évolution de la part de

Créée en 2005 par le gouvernementRaffarin pour gérer la « contribution solidarité dessalariés (le lundi de Pentecôte travaillé), la CaisseNationale Solidarité Autonomie est rapidement pas-sée du statut de caisse enregistreuse à celui de ges-tionnaire de l’ensemble des fonds liés à la perted’autonomie et au handicap, interlocuteur des dépar-tements, commanditaire d’études...

Un plaidoyer pro domoLe premier rapport de son conseil (2006) souli-gnait le rôle pivot qu’elle entendait jouer et le posi-tionnement qu’elle adoptait en tant que superstruc-ture incontournable, anticipant la décision prévisiblede création d’un « nouveau champ de protectionsociale ».Réuni ce 21 novembre le secteur Protectionsociale du SNES a consacré une partie importantede ses travaux à l’étude critique du nouveau rapportdu conseil de la CNSA (2007).Dans ce rapport, s’appuyant sur son expertise, sescompétences de plus en plus étendues en particulieren matière de gestion des flux financiers, sa com-position très large laissant une place aux par-tenaires sociaux – pas encore la FSU – la CNSAaffiche clairement sa volonté de construire le« nouveau champ de protection sociale ».Véritable plaidoyer pro domo, le rapport après avoirexaminé les difficultés rencontrées par les handi-capés, les personnes âgées dépendantes et leursfamilles, conclut à la création d’« un droit univer-sel de compensation pour l’autonomie » dont elleserait l’opérateur et plus encore ; la convergenceentre les situations de handicap et de perte d’auto-nomie quel que soit l’âge pouvant tout à fait releverde traitements différents dans une même structure.Sur l’analyse de la situation rien à dire d’autantque le rapport, tout comme celui de HélèneGisserot, affirme qu’il n’y a pas de « vague défer-lante » des personnes concernées – dont acte –.

Le nouveau champ de solidaritécollectivePeu à peu se dessine le nouveau champ de « soli-darité collective » ; on tourne autour du mot pour nepas dire la chose.Ce droit universel de compensation pour l’autono-mie se situera au-delà des soins et des dépenses dela vie courante, au-delà de l’assurance-maladie ; ils’agira d’une logique de situation et pas de public, ���

DROIT DES« AFFAIRES »Dans un discours de-vant le MEDEF, Nico-las Sarkozy a appeléà « dépénaliser ledroit des affaires », lagarde des Sceaux s’yemploie.Dans une interview,Eva Joly, anciennejuge d’instruction, quia suivi entre autresl’affaire Elf, dit « je necomprends pas unpays qui responsabi-lise ses enfants et sesfous(1) et déresponsa-bilise ses élites. Celame paraît une graveerreur et surtout uneabsence de compré-hension de ce queveut dire la criminalitéorganisée et écono-mique (...). Aujourd’hui,la spéculation politiqueautour de l’émotionsuscitée par certainsfaits divers balaye toutsur son passage ?Venger les victimes,c’est une posturepeut-être électorale-ment payante, maisqui est dangereusepour la démocratie. »

Jacky Brengou

(1) Abaissement de l’âgede la responsabilitépénale et projet de juge-ment des aliénés.

DROIT

CNSA : quel droit universel ?>

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTla CSG dédiée à la perte d’autonomie, la créationd’une CSA spécifique « autonomie ».D’autres financements seront mobilisés, ou mis àl’étude, notamment l’impact des projets sur la fis-calité locale – traduction : la prise en charge deplus en plus importante des financements liés auvieillissement, l’APA entre autres – la taxation deniches fiscales (ah ! la redevance payée par tous...),le redéploiement de la dépense publique…

Un signal d’alerte et d’inquiétudeCe texte, a estimé le secteur protection sociale,constitue pour nous un nouveau signal d’alerte etd’inquiétude après les propos de Nicolas Sarkozydébut septembre.Il légitime qu’on en éclaircisse encore plus préci-sément les tenants et aboutissants, c’est le sens dela demande d’audience faite par la FSU, ElizabethLabaye en charge de ce dossier, auprès de X. Ber-trand et V. Létard pour faire entendre notre point devue, nos propositions et aussi cerner avec plus deprécisions les projets gouvernementaux.La consultation annoncée sur le sujet devrait sedérouler sur une partie du premier semestre 2008 :il nous revient d’avancer des propositions offensivesen rupture avec les projets gouvernementaux, etaussi de mener une campagne d’opinion montrantque d’autres choix sont possibles.Avant de conclure, quelques chiffres : le bud-get 2007 de la caisse s’élève à 15,3 milliards d’eu-ros, 11,5 provenant de l’assurance-maladie, 2,7 dela contribution « solidarité autonomie », 2,2 desfonds de la journée de solidarité.Il faut savoir aussi que la CNSA a un excédent de600 millions (2006) qui se cumule avec les765 millions de 2007 ; ceci freine le transfert descrédits de l’assurance-maladie vers les handicapéset personnes dépendantes et conduit dans la loi definances de la Sécurité sociale à faire payer par laCNSA des travaux de mises aux normes, de moder-nisation de locaux à la grande surprise de l’as-semblée des départements de France et des conseilsgénéraux ! �

ANNIE CLAVEL, ELIZABETH LABAYE

CNSA : QUEL DROIT UNIVERSEL ? (suite)

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>FGR-FP

Préparation du congrès 2008

Les textes desmotions du congrèsFSU de Marseille sontadressés en nombredans les sectionsdépartementales oùon peut les trouver.

La FGR-FP, au niveau national a adressé àtoutes ses sections départementales copie de la motionrevendicative 2006 ; elle est présentée de manière àfaciliter le travail préparatoire, elle inclut par endroits,en caractères gras des synthèses qui ont été réaliséesau moment de la campagne présidentielle.Ce document est disponible dans toutes les sec-tions départementales qui doivent proposer une pre-mière série d’amendements avant la commissionexécutive des 22 et 23 janvier 2008 ; les groupes detravail nationaux se réuniront en février et de nou-velles propositions seront envoyées aux sectionsdépartementales.

Ce sont les AG de printemps qui à nouveau exa-mineront ces propositions, les réamenderont sinécessaire, avant que le congrès (en commission puisen séance plénière) ne parachève ce travail.De leur côté les syndicats nationaux effectuent cemême travail (pour le SNES nous nous référons ànos principes syndicaux, à nos motions de congrès,de CA, lorsqu’elles couvrent les champs revendi-catifs en débat et à notre réflexion collective pour desdonnées nouvelles ou récentes).Pensez à nous informer de votre travail et de lapréparation du congrès. �

AC

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L’US : Petit retour en arrière sur les élections : les« vieux » de 60 ans ont élu Sarkozy, ils n’ont que cequ’ils méritent !Jérôme Pellissier : Le problème n’est pas de consta-ter qu’il peut y avoir des tendances. Par exemple, unpeu plus de 55 % des électeurs de plus de 60 ans ontvoté Sarkozy aux présidentielles de 2007 ; ou, autreexemple, la majorité des électeurs de Le Pen au pre-mier tour des présidentielles de 2002 avaient moins de35 ans… Le problème est d’en tirer des soi-disant« vérités sociologiques » type : « les jeunes sont fas-cistes » ou « les vieux sont réactionnaires » ! Il faut seméfier de tout discours centré sur l’âge ou sur « lesvieux ». « Les plus de 60 ans », ça ne dit qu’unechose : qu’ils ont plus de 60 ans ! Il existe autant dediversité (et de diversité politique) entre deux per-sonnes de plus de 60 ans qu’entre deux personnes de20 ou de 40 ans.On sait aussi que la plupart d’entre nous sommes, entrenos 50 ans et nos 70 ans par exemple, assez fidèlespolitiquement. Les personnes de plus de 60 ans ayantvoté Sarkozy votaient, pour la très grande majoritéd’entre elles, déjà « à droite » 10 ou 20 ans auparavant.Et les cinquantenaires qui votaient socialiste dans lesannées 80 sont, pour la majorité d’entre eux, dessexagénaires ayant voté socialiste dans les années2000. On le saurait si, soudain, à 60 ou à 70 ans, onchangeait brutalement d’opinions et de convictions.

L’US : Les retraités actuels notamment les ensei-gnants sont des « nantis » !J. P. : Les retraités sont des nantis ? Il faut alorscacher certains chiffres ! 50 % des femmes actuelle-ment à la retraite ont une retraite inférieure à 825 eurosmensuels, seuls 10 % des hommes retraités perçoiventune retraite supérieure à 2 100 euros. Quant au patri-moine, il faut alors oublier de dire que plus de 60 %du patrimoine total détenu par les retraités appartientà moins de 10 % d’entre eux !Là aussi, restons nuancés : il existe des jeunes et desvieux pauvres, comme il existe des jeunes et desvieux aisés. Il n’y a pas un âge, une génération, où toutle monde serait pauvre ou aisé !Le croire fait naître une vision totalement faussée dela réalité sociale, où les « générations » peuvent deve-nir ennemies.

L’US : Retraités-Personnes âgées : un retraité estune personne âgée ?J. P. : Il n’existe pas « d’âge de la vieillesse » objec-

tif : il existe de très nombreuses différences entre despersonnes du même âge, certaines personnes se sen-tent vieilles longtemps avant d’autres.On vieillit d’autant moins tous pareil, au même rythme,que certains métiers, par exemple, sont usants et pro-voquent des vieillissements précoces de certainesfonctions. Les différences d’espérance de vie (presque10 ans entre un enseignant et un manœuvre) se retrou-vent aussi en différences face à la vieillesse.Il y a un décalage entre ce que ressentent et disent nosconcitoyen(ne)s quand nous les interrogeons, ilssituent l’entrée dans la vieillesse vers les 75 ans et cer-tains discours, études, – y compris de l’INSEE ou del’INED –, qui continuent de prendre l’âge de 60 ans(ou de 65 ans) comme « âge de la vieillesse ».Le regard de la société est essentiel : de nombreusespersonnes, de 60 ou 70 ou 80 ans, se sentent« vieilles », non à cause de leur âge, mais parce quenotre société a de la retraite, du vieillissement, unevision négative.

L’US : Le départ à la retraite, s’il représente unénorme soulagement est vécu aussi, parfois, commeun traumatisme.J. P. : Il n’y a pas de règle valable pour tout le monde.Certaines personnes profitent de leur retraite pourréaliser des projets ou pratiquer des activités pourlesquel(le)s le temps leur manquait avant.D’autres s’étaient tellement investies dans leur travailque, soudain, tout ce temps libre, « vide », devant eux,les paralyse.L’important est de tenter d’éviter les ruptures brutales,de trouver des moyens de transition, de mettre enplace avant les graines des projets d’après, de garderaprès des liens avec des activités liées au travaild’avant. Moins il y a rupture brutale, moins il y a deruptures en même temps (retraite + déménagement parexemple), plus il sera facile de trouver un nouveléquilibre.

L’US : Handicap, invalidité, perte d’autonomie, desmesures sont annoncées, se mettent en place : l’idéeest de traiter « en convergence », dans la mêmelogique les personnes âgées et les jeunes ?J. P. : Il est important de ne pas créer en effet des bar-rières, dues à l’âge : il est aberrant qu’une personnesouffrant d’un handicap, d’une maladie, n’ait pasaccès aux mêmes soins, aux mêmes aides, selonqu’elle a 57 ans ou 62 ans ! Il ne faut pas que l’âge soitun élément discriminatoire. ���

ENTRETIEN AVEC JÉRÔME PELLISSIER

Combattre les idées reçues>

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Jérôme Pellissier estécrivain, chercheur engérontologie.

Parmi ses ouvrages :Les Insensés (roman),éditions Joëlle Losfeld.La nuit, tous les vieuxsont gris (essai), éditionsBibliophane.La guerre des âges(essai), éditions ArmandColin.

Son site Internet :www.jerpel.fr

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTD’où la réflexion sur un « 5e risque », un risque han-dicap-maladie-chronique-invalidité..., indépendantde l’âge.Indépendant de l’âge ne veut pas dire ne pas tenircompte des différences de situations qui peuvent êtreliées à l’âge : il serait aberrant de proposer les mêmesaides, à la suite d’un handicap dû à un accident parexemple, à un homme de 35 ans, en activité, père dedeux jeunes enfants, et à un homme de 90 ans, dispo-sant de sa retraite. Situation différente, plan d’aide etd’accompagnement différent. Pas moins bon. Différent,parce qu’adapté à chaque situation particulière.Second point, qui nous rend soucieux : il faudrait quece « 5e risque » ne sorte pas du champ de la « sécu-rité sociale », de la solidarité nationale. Or, nousvoyons se profiler le recours aux assurances privéespour couvrir ce risque. Avec à la clef des personnes,vieilles ou non, malades et/ou handicapés, qui n’au-ront pas les moyens d’être correctement aidées etsoignées.

L’US : Notre syndicat se préoccupe de toutes cesquestions, il syndique les « actifs » et les « retraités »dans la même structure – c’est vrai aussi pour notrefédération, la FSU – ; comment voyez-vous l’avenirrevendicatif des retraités ?J. P. : Vous avez dit l’essentiel : ne pas créer de rup-tures. Notre société tient, entre autres, grâce aux liensentre générations, entre jeunes et vieux, etc. Il serait d’autant plus absurde d’opposer les intérêts desactifs et des retraités que les actifs sont de futurs retrai-tés... et que ce qui concerne un retraité aujourd’huiconcernera un actif demain ! Certains « réformateurs »profitent de cela : ils font passer des pilules parce queles jeunes actifs ne se ren-dent pas compte queladite pilule les rendramalades dans 20 ou30 ans seulement... Ilappartient donc aux retrai-tés d’aujourd’hui de lesaider, pédagogiquement,à penser à long terme.Il y avait de très nom-breux vieux pauvresdans la France desannées 1960. Il y en amoins aujourd’hui (plusde deux millions quandmême !). Mais de nom-breux indicateurs per-mettent de voir quedemain risque de res-

sembler à hier et que les vieillesses pauvres serontde nouveau nombreuses dans la France des années2020-2030. Cela, ça nous concerne tous, que nousayons 40 ou 70 ans !

L’US : Dans tout cela on a besoin d’humour ! lesshadoks ! les champignons... Voilà qui parle à nossouvenirs...J. P. : Oui, sur mon site Internet (www.jerpel.fr), jeme sers souvent des shadoks ou des « champignons »pour illustrer certaines mœurs actuelles.Les « champignons » sont une référence au PetitPrince de Saint-Exupéry :« – Je connais une planète où il y a un Monsieur cra-moisi. Il n’a jamais respiré une fleur. Il n’a jamaisregardé une étoile. Il n’a jamais aimé personne. Il n’ajamais rien fait d’autre que des additions. Et toute lajournée il répète comme toi : “Je suis un hommesérieux ! Je suis un homme sérieux !” et ça le faitgonfler d’orgueil. Mais ce n’est pas un homme, c’estun champignon ! »Les champignons, ce sont ceux pour qui seuls leschiffres comptent, au mépris de l’humain. Ce sont deschampignons, par exemple, qui votent pour que lemontant du minimum vieillesse (autour de 600 euros)soit juste au-dessus du seuil limite pour avoir droit àla CMU... Avec votre minimum vieillesse, vous pou-vez bien vous payer une mutuelle privée !Les shadoks, eux, ces bestioles créées par JacquesRouxel, sont totalement absurdes, illogiques. Enfin,avec une logique à eux qui peut les conduire à affir-mer que « quand il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’ya pas de problème ».Alors, des raisonnements shadoks, on en voit pas

mal aujourd’hui. Lesimple fait de dire que,face au « trou de laSécu », il faut diminuerles dépenses de santé…est un raisonnement sha-dok. S’il y a plus de per-sonnes malades et/ouhandicapées qu’autrefois,si elles sont mieux soi-gnées et aidées qu’autre-fois, alors ça impliqueune augmentation de cesdépenses. Il faut donctrouver les moyens de lafinancer. Mais pas lesdiminuer ! �

ENTRETIEN

RÉALISÉ PAR A. C.

COMBATTRE LES IDÉES REÇUES (suite)

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La vie des sections de retraitésL’actualité locale, les contacts(rencontres) et les projets

Quelques échos de la Semaine bleue Elle a été l’occasion pour les SFR-FSU des retraités, dansles réunions de préparation de cette semaine, de fairepréciser des revendications de l’appel national etd’assurer la présence de la FSU aux côtés des UCR et dela FGR-FP.

Cette liste ne représente qu’une partie des activités de nos sec-tions départementales et académiques. Au cours de cettesemaine revendicative spécifique des retraités, dans uncontexte de politique de régression, de nombreux retraités sesont mobilisés pour revendiquer une revalorisation des pen-sions, une prise en charge de la dépendance par la Sécuritésociale, un hébergement de qualité à des tarifs accessibles àtous...

Du Var : Organisation d’une manifestation le jeudi 18octobre à Toulon, de délégations auprès de la députée varoiseresponsable « personnes âgées », d’une conférence de pressele lundi 15 devant le conseil général au cours de laquelle noscollègues ont dénoncé la dégradation du pouvoir d’achat, lesatteintes à la protection sociale, les tarifs trop élevés desmaisons de retraites, et ont réclamé l’augmentation du nombredes personnels soignants.

Du Val-de-Marne : Mise en place d’une semaine revendi-cative avec rendez-vous le mardi 16 octobre devant la pré-fecture où des délégations ont été reçues.

Du Nord-Pas-de-Calais : Manifestation régionale avec ras-semblement à la mairie de Lille et manifestation en directionde la préfecture.

De Haute-Savoie : Rassemblement-débat devant la Boursedu Travail le mercredi 17 octobre à Annecy.

De la Loire : Rassemblement des retraités à Saint-Étienne età Roanne le mardi 16 octobre.

Du Pays-de-Loire (Académie de Nantes) : Une conférencede presse le lundi 15 dans la Sarthe, des rassemblements lemardi 16 dans le Maine-et-Loire, le jeudi 18 en Loire-Atlan-tique, une réunion de tous les retraités de la FSU en Mayenneet pour tous ces départements un appel à participer à la mani-festation générale avec distribution de tracts retraités.

De l’Hérault : Participation à la manifestation générale du18 octobre le matin et rassemblement des retraités devant lapréfecture l’après-midi.

De Paris : Rassemblement et délégation à la préfecture le16 octobre, distribution d’un tract et participation à la mani-festation du 18.

Des SectionsDu SNES Caen : Compte-rendu de l’activité 2006-2007,le 14 juin réunion du collectif académique FSU-Retraités quise transforme en une SFR, son bureau est désigné.

Assemblée académique d’automne le 15 novembre à Bayeux.Deux douzaines de retraités ont débattu de la mise en placed’équipes-relais pour une plus grande présence syndicale surdes « micro-territoires » (aller vers les camarades en difficultéen particulier), de l’avenir des retraites, des atteintes à la pro-tection sociale dans le nouveau contexte politique et social.Après un repas gastronomique au lycée (pas hôtelier) Arcissede Caumont, visite guidée de la cathédrale et du Vieux Bayeux.

Du SNES Corrèze : Participation des retraités du SNES, dela FSU et de la FGR-FP au rassemblement contre les franchisesmédicales le 29 septembre, puis à la manifestation à Brive le18 octobre, contre la remise en cause des régimes spéciaux ;le 24 octobre : régionale d’automne de la FGR-FP et le26 octobre présence à la préfecture de Tulle pour leur pouvoird’achat, contre les franchises et pour la prise en charge de ladépendance.

Du SNES Créteil : Une circulaire « Retraités rackettés,oubliés, rappelons-nous aux bons souvenirs de tous ! » analysela situation des retraités face aux augmentations du coût de lavie et de la poursuite de la mise en place des franchises, à laponction de 0,5 % en ce qui concerne la revalorisation des pen-sions ; de plus, les retraités, pensionnés ont été oubliés le18 octobre dans les actions : nous devons nous imposer le20 novembre car les solidarités intergénérationnelles doiventfonctionner dans tous les domaines y compris dans l’action syn-dicale.Lors de leur AG, les retraités de Créteil, ont réaffirmé leur sou-tien au mouvement pour la défense des régimes spéciaux deretraites, et leur engagement dans cette bataille. Ils se sontexprimés sur leur place et leur activité dans l’organisation syn-dicale à tous ses niveaux syndicaux et fédéraux. Après unematinée d’échanges, suivie du repas « au petit resto proche duS3 » une première sortie culturelle les a conduits, accompa-gnés de l’agent du patrimoine, dans une passionnante visite his-torique d’Arcueil qui leur a dévoilé les charmes trop mécon-nus d’une ville de banlieue.

Du SNES Hérault : L’AG d’automne de la FGR-FP à Grais-sessac a permis d’aborder tous les points de l’actualité. Le15 novembre, c’était l’assemblée générale des retraités duSNES à Cessenon : trente-deux personnes sur les questions dela retraite, du pouvoir d’achat, de la santé. Convivialité, repaset visite étaient au rendez-vous.

Du SNES Isère : Assemblée des retraités de la FSU (SNEP,SNES, SNUIPP) pour fonder la SFR et élire son bureau.

Du SNES Bordeaux : « Satisfaisant mais peut mieux faire » ���

EN BREF

D’ici, de là et d’ailleurs...>

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTun article dans la revue du S3 : le taux de syndicalisation sesitue au niveau de celui du taux national, le taux de renou-vellement de l’adhésion au moment du départ à la retraite restestable à environ 50 %, non-renouvellement d’adhésion aprèsun ou deux ans essentiellement des collègues féminines. Il estnécessaire d’en connaître les raisons.

Dans les départements de l’Aude et de la Gironde, installationde SFR/FSU qui ont mis en place un calendrier de réunions.

Du SNES Savoie : Organisation par le bureau les 24/09et 23/10, de la journée SNES-Retraités du 4 décembre à Saint-Genix-sur Guiers : situation dans l’Éducation nationale et lafonction publique, place des retraités dans la mobilisation etl’action ; matinée annoncée passionnante suivie d’un repas etd’une visite du secteur.

Du SNES Pays-de-Loire : Régionale d’automne de la FGR-FP le 11 octobre, une trentaine de participants, dont des retrai-tés FSU ; débat sur l’ensemble des sujets de l’actualité poli-tique et sociale. Ensuite, une analyse de situationdépartementale montre qu’elle n’a guère évolué en ce quiconcerne les CODERPA.

Les SFR-FSU de quatre départements de l’académie de Nantessont ou sur le point d’être mis en place, à prévoir pour le cin-quième ; la section fédérale régionale des retraités a décidéd’une réunion par trimestre sur le recrutement et la formationdes personnels intervenant auprès des personnes âgées.

Présence importante de retraités dans les manifestations et...accélération des rentrées de cotisations !

Du SNES Var : Nouvelles infos sur le conseil général, inter-vention de la SFR/FSU sur l’accès aux services publics, sur saprésence au CODERPA. Réunion de la section des retraitésSNES prévue le 30 novembre à Toulon.

Du SNES Paris : AG des retraités le 16 octobre sur les pro-blèmes de retraites, de protection sociale. Régionale de laFGR-FP, les rapports présentés par les représentants nationauxont donné lieu à discussion, des retraitésdu SNES y ont activement participé.

À signaler : une lettre d’AMP (84) quiexprime sa satisfaction de lire dans L’USRetraités n° 656 un article qui rappellenotre présence dans le syndicat et trouveque le spécial-retraités est toujours inté-ressant à lire, mais elle regrette l’insuffi-sance d’articles dans L’US pour rappeleraux actifs l’existence d’un syndicalismeretraités, pour faciliter la syndicalisation,une fois la retraite arrivée.

Du SNES Aix-Marseille : Le 25 octobre,trente-cinq personnes à Gap, présence dequelques camarades du SNUIPP, débatdynamique sur la nécessité de résister, des’en donner les moyens, de continuer à

convaincre autour de nous, en particulier les plus jeunes, etaussi de faire des propositions offensives. Le problème du finan-cement des retraites c’est la traduction de la remise en cause dela rémunération du travail... (voir article de J.-P. Beauquier dansce numéro).

De la FSU des Ardennes : À Charleville, en présence de A.Clavel, débat sur la nécessité du syndicalisme « retraités » etla responsabilité de la FSU dans le contexte actuel. Savoir s’op-poser aux décisions prises comme aux menaces, faire vivre laSFR/FSU et trouver sa place dans la FGR-FP. Le défi est à rele-ver, l’énergie est là, encore convient-il de la mobiliser. Lescamarades vont s’organiser en ce sens.

De Talence, Gironde : Avec la présence de P. Toussenel :débat sur la situation des retraités, la perte de leur pouvoird’achat et la mise en cause de la mesure avec l’indice INSEE ;dénonciation des mesures de « racket » que prend le gouver-nement pour les pensions 2008 ; volonté de luttes conver-gentes avec celles des actifs pour revenir au code des pensions,contre les franchises, pour d’autres remboursements des soins.La création de la SFR arrive opportunément pour assurer lelien avec les actifs et avec les retraités des autres syndicats, ellepourra s’appuyer sur une organisation par zones géogra-phiques. D’autres projets de structure étaient aussi en débat ;l’important est de se mobiliser ; c’est vrai aussi pour la FGRdans laquelle militent des camarades en y faisant avancer nosanalyses et propositions. Une équipe d’animation est consti-tuée pour la SFR.

De L’Indre-et-Loire : Réunion des retraités FSU, décision departiciper aux manifestations aux côtés des actifs, de s’expri-mer dans le Pour-info, de se voir trois fois dans l’année. Peuà peu les choses avancent, la structuration en SFR sera vue dansquelque temps.

Du trésorier du Pas-de-Calais qui propose pour les néos-retraités une « offre promotionnelle » d’adhésion : ils ignorent

souvent le montant de leur pension endébut d’année et notre camarade penseque cela constitue un frein... et permet des’installer dans la « non-adhésion ».

Rencontre avec les retraités de l’Aude,à Carcassonne en présence de PierreToussenel : échanges sur la situationdes retraités, le projet de la SFR et lanécessité de la mobilisation

De Toulouse : Réunion académique desresponsables retraités des départementsautour de Jean-Louis Viguier, ex-secré-taire académique. Les SFR sont en ordrede marche et les retraités sont représen-tés au niveau régional. �

ROBERT JACQUIN

D’ICI, DE LÀ ET D’AILLEURS... (suite) >���

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>1789, 1946... 2008 !

La « révolution » de la fonction publiqueest une forfaiture PAR ANICET LE PORS

pouvoir politique ou le rouage impersonnel de lamachine administrative.C’est cette histoire et cette conception française duservice public et de la fonction publique qui faitqu’en France la corruption y est réduite à l’extrêmeet que son efficacité est reconnue dans le monde.Le président de la République, à l’évidencedépourvu de cette culture, a entrepris de la mettreà bas. Il n’a pas été mandaté de quelque manièreque ce soit à cette fin, contrairement à ce qu’ilaffirme en ce domaine et en d’autres, comme si sonélection lui avait délivré un blanc-seing sur toutequestion qu’il se réserverait le droit d’évoquer.

Le contrat contre le concoursLe statut général des fonctionnaires a déjà subi degraves atteintes. C’est ainsi que la loi Galland du13 juillet 1987 a réduit la comparabilité de la fonc-tion publique de l’État et de la fonction publiqueterritoriale, et par là les possibilités de mobilité del’une à l’autre. À la même époque, la troisième voied’accès à l’ENA, ouverte à des syndicalistes, desdirigeants d’associations et des élus locaux ayantfait la preuve de leur attachement à l’utilité com-mune, a été supprimée ; le droit de grève des fonc-tionnaires a été placé sous des contraintes restric-tives ; le recours aux personnels contractuels a étéélargi en infraction au statut général dans uncontexte de privatisation et de déréglementation quin’a pas cessé depuis.L’entreprise annoncée aujourd’hui est autrementgrave. En dénonçant le « carcan du concours » eten le mettant en balance avec le contrat, à l’instarde ce qui a été fait à La Poste, à France Télécomou au GIAT avec les résultats que l’on sait (bureau-cratie, division du personnel, financiarisation desobjectifs), en prônant l’individualisation des rému-nérations pour mieux esquiver les demandes derevalorisation de l’ensemble des organisationssyndicales et encourager le clientélisme partisansous prétexte de reconnaissance du mérite, enencourageant les départs de la fonction publique aubénéfice d’un humiliant « pécule », le Présidentengage une véritable « contre-révolution cultu-relle » sans mandat du peuple français. Cela s’ap-pelle une forfaiture. �

Le Monde 26/09/07

L’intérêt général est en France unecatégorie noble, éminente, distincte de la sommedes intérêts particuliers. Il s’ensuit une distinc-tion franche entre le public et le privé, que maté-rialise dans notre pays un service public impor-tant, fondé sur des principes spécifiques (égalité,continuité, adaptabilité, laïcité), et une fonctionpublique qui en est le cœur.

C’est dans cet esprit qu’a été élaboré à la Libéra-tion le premier statut général des fonctionnairesdémocratiques, institué par la loi du 19 octo-bre 1946, et qu’a été mise sur pied en 1983-1984une fonction publique « à trois versants » (État, col-lectivités territoriales, établissements publics hos-pitaliers) faisant relever du statut général 5,2 mil-lions d’agents publics, soit près du quart de lapopulation active, placés, en raison de leur serviced’intérêt général, dans une position statutaire,réglementaire et non contractuelle.Trois principes ont présidé à cette construction. Leprincipe d’égalité, fondé sur l’article 6 de la Décla-ration des droits de l’homme et du citoyende 1789 : « Tous les citoyens étant égaux sontégalement admissibles à toutes dignités, placeset emplois publics, selon leur capacité, et sansautre distinction que celle de leurs vertus et deleurs talents. » Nous en avons déduit que seul leconcours permet, en droit, d’assurer l’égalité d’ac-cès des citoyens à la fonction publique.Le principe d’indépendance, conduisant à distin-guer le grade, propriété du fonctionnaire, de l’em-ploi, à la disposition de l’administration, afin deprotéger l’agent public (et par là le service de l’in-térêt général) de l’arbitraire administratif et despressions politiques partisanes. C’est ce que l’onappelle le système de la carrière opposé au systèmede l’emploi en vigueur dans nombre de pays anglo-saxons.Le principe de responsabilité, fondé aussi sur laDéclaration de 1789, qui dispose en son article 15que : « La société a le droit de demander compteà tout agent public de son administration. » Ils’ensuit que le fonctionnaire, parce qu’il est sou-mis à cette obligation de service du bien com-mun, doit avoir la plénitude des droits et devoirs ducitoyen et non être regardé comme le sujet du

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Q. : La réorganisation de La Poste s’accélère envue de la libéralisation du courrier en 2011. Où enêtes-vous de l’allégement du réseau de bureaux ?R. : Je m’étais engagé à maintenir 17 000 points decontact sur le territoire. Cet engagement sera tenu,grâce aux partenariats avec les mairies et les commer-çants. Nous venons d’inaugurer le 5 000e bureau enpartenariat et pas une plainte ou réclamation n’a étéenregistrée. Cette réorganisation nous permet d’assurerune présence territoriale moins coûteuse et de meilleurequalité. Le service public postal n’en souffre pas, il estplus efficace.

Q. : Mais La Poste reste critiquée pour ses filesd’attente...R. : L’amélioration de l’accueil des clients sera aucoeur de notre plan « Performances et confiance » pour2008-2012. C’est là que l’on verra se dessiner La

Poste du futur. Nous allons ainsi prendre l’engagementque, d’ici à 2010, le temps d’attente pour réaliser desopérations courantes ne dépassera pas cinq minutes.

Q. : La Poste du futur sera-t-elle compétitive ? L’Étatactionnaire est-il satisfait des réformes engagées ?R. : Dans trois ans, La Poste disposera d’un des outilsles plus modernes d’Europe et sera en mesure d’ygagner des parts de marché. Nous aurons rattrapé leniveau de rentabilité des meilleurs réseaux européens.Nos résultats vont progresser durablement, notammentgrâce à l’accord trouvé avec l’État sur les retraites,approuvé par Bruxelles. Pour la première fois cetteannée, l’État percevra un dividende équivalent à 15 %de nos bénéfices. Dès 2009, nous n’aurons plus besoinde nous endetter pour financer notre développement. Eten 2012, il y aura à La Poste autant de salariés de droitprivé que de fonctionnaires. �

INTERVIEW DE JEAN-PAUL BAILLY, PRÉSIDENT DU GROUPE PUBLIC

La Poste du futur>

COLLOQUE

L’âge et le pouvoir en question>« Intégration et exclusion des personnesâgées dans les décisions publiques et privées », tel étaitle sous-titre du colloque qui s’est récemment tenu à laSorbonne*.Les programmes de recherche sociologique sur les per-sonnes âgées sont très nombreux, français, belges, cana-diens, suisses ; beaucoup de chercheurs s’y intéressent.L’augmentation de l’espérance de vie s’accompagne del’augmentation du poids des personnes âgées, que d’au-cuns n’hésitent pas à considérer comme une chargeque la société a de plus en plus de mal à supporter.Quel est donc le pouvoir des personnes âgées dans lasociété ? Y-a-t’il régression, minoration ou altération deleurs droits à partir du moment où elles sont classées« vulnérables » ? Quel est leur pouvoir vis-à-vis deservices de santé ? des services sociaux ? Quel est leurpouvoir dans une institution où les grilles de fonction-nement sont souvent bien loin de leurs aspirations ?

La participation sociale des seniorsPlutôt qu’aux « retraités », on s’intéressa d’abord aux« seniors », de 55 à 75 ans. Très présents dans les asso-ciations, ils ont des motivations diverses allant de la« recherche d’action sur la société » à 1a défense desdroits et intérêts en passant par la convivialité.En milieu rural français, leur engagement dans la vielocale est important.Au Québec, les retraités, grâce au bénévolat, sont desacteurs sociaux très actifs avec beaucoup de profes-

sionnalisme. Les initiatives intergénérationnelles, encoremal étudiées, ouvrent des perspectives intéressantespour la participation sociale des retraités.Le traitement de l’enfance considérée comme « uninvestissement dans le capital humain » est peu remisen cause alors que les « coûts » induits par la vieillessesont une charge. Pourtant une chercheuse de la CNAVa affirmé qu’une protection sociale élevée aide aussibien enfants que vieillards ; c’est une situation desolidarité et pas de « vase communicants ». Le pro-blème des retraites est au passage abordé : répartition ?capitalisation ?Le droit de vieillir fait partie des droits de vivre : droitde vieillir au travail, droit de participer aux mouve-ments sociaux, droit de réfléchir à la prise en charge deson propre vieillissement.

Le pouvoir des personnes âgéesfragilesLe deuxième jour, nous avions vieilli et la réflexion futplutôt : quel pouvoir pour les personnes âgées fragiles,voire pour le grand âge ? S’interroger sur la dépendance (économique, affec-tive, sociale) et l’autonomie (capacité de choisir sonmode de vie).Apparaît chez les personnes âgées un sentiment d’in-quiétude, de vulnérabilité, de perte de l’estime de soientraînant régression et besoins infantiles. L’objectifdes soignants devrait être de leur permettre de s’adap-

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ter à leur quotidien tout en assurant sécurité et bien-être par la reconstruction d’une routine dans l’espaceet dans le temps. Les personnes très âgées deviennent invisibles, leurplace dans l’espace public est dominée par les inéga-lités sociales (pas d’anciens ouvriers de plus de 85 ans)et de genre (prédominance des femmes). Elles accep-tent mal la tension créée par leur éloignement dumonde et leur désir de s’y maintenir ; la conscience deleur « finitude » les amène souvent à renoncer.L’OMS a produit une classification à partir delaquelle un plan d’aide par des professionnels peutêtre établi, le montant d’une allocation pour dépen-dance restant un choix politique, les solidaritésvariables selon les sociétés. Il ne faut pas accepter quele traitement de la dépendance se limite aux actesessentiels de la vie…Au Canada, la classification de l’OMS a conduit à unclassement des personnes dépendantes auxquelles leservice rendu est prédéterminé par les services payeurs ;ce sont les aidants-naturels, bien souvent épuisés, quisont considérés comme des producteurs de soin.

En France, une étude de la dépendance en institutionmontre qu’une perte d’autonomie entraîne la dépen-dance et, par là, une perte de pouvoir, lui-même limitépar le pouvoir de l’institution. Cependant la perted’autonomie de la personne âgée dépend de sa tra-jectoire de vie, de son appartenance sociale, profes-sionnelle, géographique et du contexte institutionnel. L’épreuve du grand âge est vécue différemment selonles ressources personnelles – santé, culture, carac-tère, histoire personnelle – et aussi en fonction del’entourage social.Peut-on dire que vieillir c’est aussi avoir consciencede son propre vieillissement ? �

GENEVIÈVE DUBUT ET MARIE-LOUISE BILLY

* Colloque organisé par :REIACTIS : réseau international d’étude sur l’âge, lacitoyenneté et l’intégration socio-économique.GEPECS : groupe d’étude pour l’Europe de la culture et dela solidarité.AFS : association française de sociologie.AISLF : association internationale des sociologues de languefrançaise.

Les retraités découvrent parfois avec surprisele champ nouveau de compétences du Comité Natio-nal des Retraités et Personnes Agées (CNRPA). Les organisations syndicales dont le SNES, les fédé-rations dont la FSU, les confédérations revendiquentpour les retraités et personnes âgées l’accroissementde leur pouvoir d’achat, des pensions revalorisées,des conditions de vie et de santé convenables pourtous. Dans tous les domaines, des organisations regrou-pant les représentants de l’État, des professionnels, desreprésentants syndicaux et associatifs lorsqu’elles ontun rôle consultatif, accompagnent ces demandes.Le rôle consultatif nouveau, les nouvelles responsabi-lités confiées au CNRPA par le décret du 26 mai 2006sont très importants pour la mise en lumière des besoinset des attentes. Ainsi le décret assigne au Comité Natio-nal « la participation des retraités et personnes âgées àl’élaboration et à la mise en œuvre de la politique desolidarité nationale les concernant ».Les évolutions et la place des retraités au sein de la sociétéC’est le titre du rapport qui présente les aspects du rôleconsultatif du CNRPA, les missions qui lui sont dévo-lues et ses propres initiatives. Depuis sa création en 1985, le Comité a émis des

avis à propos de plans et projets gouvernementaux.Quelques projets sont à citer : les mesures concernantles aidants familiaux où le Comité a fait remarquer« que ces aidants ne peuvent en aucun cas se substi-tuer aux professionnels » et propose d’ajouter l’as-cendant à la liste des aidants familiaux.Le congé de soutien familial, la prise en compte defrais de transport ont été examinés également commeles mesures concernant les établissements. Dix pro-jets de textes lui ont été soumis de décembre 2006 àmars 2007. Les observations faites sur le projet quitraitait du comité de vigilance et de lutte contre la mal-traitance et de l’élargissement de son champ d’actionau secteur des personnes handicapées ont été toutesreprises.Les enjeuxLe rapport souligne plusieurs aspects positifs appor-tés par le décret du 26 mai 2006 : la reconnaissance durôle consultatif du comité, à propos des projets detextes, des contacts plus réguliers avec la directiongénérale de l’action sociale (DGAS). Mais il metaussi en évidence la nécessité d’aller plus loin. Lareprésentation dans une quinzaine d’instances ne suf-fit pas à couvrir l’ensemble des questions qu’il a à trai-ter comme l’habitat, l’exclusion, la pauvreté, les trans-ports, l’aménagement du territoire, et la représentation

>COMPÉTENCE

Le rôle du CNRPA

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HABITATLa question de l’habi-tat pour les personnesavançant en âge sepose de diverses fa-çons, selon le lieud’habitation, le type delogement, le nombrede personnes concer-nées, le niveau de res-sources.Les organisations deretraités posent sou-vent la question lorsd’audiences au mo-ment de la semainebleue. Même si ungrand nombre de re-traités ou personnesâgées sont proprié-taires, les locataires re-traités sont encorenombreux. Certainssouhaitent un loge-ment plus petit sanspayer plus cher ce quiest rarement possibleen zone urbaine. Laquestion d’aménage-ment du logement lorsde l’avancée en âgese pose aussi. La loiDALO (droit au loge-ment opposable) sus-cite d’autres questionspour les retraités. Encas de vente de loge-ments sociaux vouluepar les pouvoirs pu-blics, que deviendrontles personnes âgées ?Les obligations impo-sées aux collectivitésgestionnaires d’OP-HLM menacent-ellesles retraités ? Les or-ganisations de retrai-tés dans les départe-ments et les Régionsont à se préoccuperde ces situations.Soyons attentifs à cequi se prépare.

M. L.

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RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTdes usagers, alors même que l’agrément du 31 mai2005 l’exclut de fait des instances du champ sani-taire.

Quelques interrogations.Les rapports entre les CODERPA (comité départe-mental des retraités et personnes âgées) et le CNRPAse sont précisés. Le rapport fait état des enquêtes lan-cées par le Comité. La dernière concerne « lesimmigrés vieillissants ». Mais le fonctionnementdépartemental ne se prête pas aisément à un élar-gissement des préoccupations départementales.Transmettre au CNRPA la situation, les modes de viede la population avancée en âge, c’est enrichir saconnaissance et appuyer ses initiatives. Cela devientde plus en plus indispensable. Une autre interrogationsubsiste. Le décret prévoit la création de commissionsrégionales (22) constituées et animées par le Comiténational. Cela ne va pas sans difficultés, en particu-lier là où une structure régionale est en place commeen Ile-de-France depuis 1987. La concertation sepoursuit mais la situation est complexe.Une autre préoccupation : le Conseil sera d’autant

plus efficace et ses démarches comprises qu’ilregroupera l’ensemble de toutes les composantesretraitées des organisations. Se retrouve-là la ques-tion de la représentation des organisations.

Connaître – travailler – agirensembleLe Comité, ses commissions ont fait un travail consi-dérable : citons au fil des années l’analyse des res-sources des retraités, l’érosion de leur pouvoir d’achat,la question du logement, des logements-foyers, lanécessité de mettre en œuvre une politique active deprévention et d’éducation pour la santé, l’enquêtesur la place et le rôle des retraités dans la cité.La FGR-FP informe régulièrement (CE, bulletinspécial) des travaux du CNRPA, de ses représentantsChristiane JOURNEAU, Bernard BASSOT.Chacun doit se préparer à ce nouveau rôle consul-tatif. Le SNES, la FSU poursuivent un travail de réflexion,un travail revendicatif à mieux reconnaître. À nousde nous saisir ainsi de ce rôle consultatif nouveau duCNRPA. � MADELEINE LAGANE>DANS LE RESTE DU MONDE

Quel pouvoir pour les personnes âgéesdans d’autres sociétés ?*

LE RÔLE DU CNRPA (suite)

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L’Étude du problème sous l’angle africain aété limité, les intervenants universitaires de Côte-d’Ivoire et du Burkina Faso n’ayant pas pu êtreprésents.

Le savoir n’est plus l’apanage des vieuxLa présidente de la table ronde a rappelé la situationtraditionnelle des sociétés d’Afrique subsaharienne :des sociétés rurales où le savoir est basé sur la tra-dition orale, transmis par étape tout au long de la vie.Seuls les « vieux » détiennent la totalité de ce savoirce qui leur donne du pouvoir, une place reconnuedans la société, valorisée par une image positive etdes privilèges. Toutefois cette gérontocratie a vu sonpouvoir réduit par une cascade d’évolutions.Dès le début du XXe siècle, l’État colonisateur et sonadministration réduisent le poids du système tribaldominé par les anciens. Après l’indépendance, l’ac-tion des nouveaux États continue à réduire les soli-darités claniques, en particulier par sa politique de

scolarisation : le savoir n’est plus l’apanage des« vieux ». L’urbanisation enfin suscite des valeursplus individualistes. Le pouvoir des anciens est deplus en plus renvoyé à la seule sphère familiale etdans un sens bien plus étroit que précédemment.

Un riche exposé sur l’Argentine a misen lumière des évolutions contradictoires quimontrent que toute avancée n’est jamais un acquisdéfinitif.Les années 50 à 70 ont été marquées par de sensiblesprogrès de la situation des personnes âgées avec lamise en place d’un système de retraite pour tous lestravailleurs qui a permis aux anciens d’échapper àla dépendance vis-à-vis de leurs enfants et qui leura donné la capacité d’agir de manière autonome.Cependant dès les années 70, dans un contexte deforte inflation, leur pouvoir d’achat a commencé à seréduire fortement. Le krach de 2001-2002 a trans-formé cette évolution négative en catastrophe. Inca-pables de subvenir désormais à leurs besoins, les

L’âge du capitaine et le pouvoir des personnes âgées sur la société.Regards croisés : Afrique, Amériques, Asie.

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Page 19: 20 P RETRAITESDR La coordination de ce supplément est assurée par Annie Clavel et Gérard Niot. ... 2 - Retraités, supplément à L’US n° 660 du 8 décembre 2007 ... Bouygues,

TTÉÉSS RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTpersonnes âgées sont redevenues totalement dépen-dantes de leurs enfants alors que ceux-ci étaienteux-mêmes très touchés par la crise. Dans les années80-90, des mouvements de retraités s’étaient consti-tués pour revendiquer la revalorisation des pensions.Le choc de 2001 a été si profond qu’il a fait dispa-raître actuellement toute capacité de se révolter.

La présentation de la situation desplus âgés en Coréemontre une autre facette des limites au pouvoir desseniors. En Corée, la tradition valorise l’âge, dansla société comme dans la famille. Mais les trans-formations sociales, le poids des contraintes éco-nomiques ont provoqué une véritable rupture etmis en relief le problème des « jeunes vieux »encore au travail.Dans le courant des années 90, la Corée du booméconomique a été touchée par une grave crise. Lesentreprises ont dû réduire leurs activités et ontlicencié massivement les travailleurs les plus âgés,dès 50, voire 45 ans. Ces chômeurs commencent

alors une deuxième carrière, puis une troisième,voire une quatrième en cas de licenciements suc-cessifs. À chaque fois les conditions de travail et derémunération sont dégradées. Vers l’âge de 68 ansseulement ils peuvent accéder à la retraite. Cettevéritable exclusion des « jeunes vieux » est consi-dérée comme une norme sociale rendue inévitablepar la crise.Il en est résulté des conditions de vie difficiles pources catégories de travailleurs qui ont de plus encharge les très âgés – sans retraite et dépendants deleurs enfants – et les jeunes en étude. Il en estrésulté aussi une image de soi très dégradée, dansune société traditionnellement patriarcale oùl’homme doit apporter l’essentiel des revenus dufoyer. Pour toutes ces raisons, les personnes âgéeset les travailleurs « âgés » ont peu de pouvoir et peude possibilité et d’énergie pour revendiquer desaméliorations. �

GENEVIÈVE DUBUT ET MARIE-LOUISE BILLY

* Colloque L’âge et le pouvoir en question.

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MÉMOIRE

La résistance dans la Drôme>Les recherches ont débuté en octobre2002 dans la Drôme, dans le cadre d’une opéra-tion nationale lancée par d’anciens résistants. Elleconsiste à réaliser un cédérom ou un dévédérom surla Résistance par département et constituer unebanque de données sur la période 1939-1945.Le travail le plus conséquent a été réalisé par unedizaine de rédacteurs auxquels d’autres ont apportéleur concours. Ce sont des enseignants actifs ouretraités (trois sont au SNES*), des militaires, desRésistants.1 400 fiches évoquent la prise de conscience pro-gressive de la population, un temps leurré par le gou-vernement de Pétain, la naissance et le développe-ment des réseaux, la création des maquis, la relationdes faits, des sabotages, des accrochages, de laBataille de Montélimar, les exactions des troupesallemandes ou des miliciens, le drame du Vercors,des témoignages sont souvent inédits. La vie desDrômois dans un pays dirigé par un gouvernementà la solde de l’occupant est largement traitée, avecles difficultés de ravitaillement, le besoin d’infor-mations autres que la propagande vichyste... Uneétude très poussée de la mémoire de cette périoderecense la plupart des monuments dans la quasi-tota-lité des communes. Des interviews, des discours, desextraits de films illustrent les textes ainsi que plus

de 3 000 photos.Ce dévédérom est disponible dans les librairies dudépartement et dans quelques « tabac-presse ». Onpeut s’adresser aussi aux auteurs. �

[email protected]

* Alain Coustaury - Jean Sauvageon – Michel Seyve.

Ici le feu s’allume Ici l’eau vagabonde Ici l’eau se raréfie Ici la vérité se terre Pour veiller sur la vie La déesse des passions

des désirs et des airs veille sur le palais de l’éther Le roi des sujets vit dans

l’errance Qu’est devenue la tolérance Où sont les colonnades

festonnées Et la lumière de l’orée Nos pas s’enfoncent dans

le sable Sur nos cheveux une

poussière argentée Et les traces se perdent

aux abords du rivage Une flamme charbonneuse

éclaire le message l’État sera dompté Et la masse torrentielle

pleure Ultime sanglot disloqué

de la curée Au temps de l’exode muet Immense plaine Espaces sans interdits Jeunes sources sonores À l’origine de rythmes

légers Nous étions Patience Et tolérance des mots Dociles indociles entre nos

doigts Nous buvions des vins

ivres de vie Nous écoutions des

musiques Vocables sonores Exubérances verbales Hautbois de plein air

patience Nous partagions les aspirations populaires les lendemains étaient

infidèles À la veille je traduis mal cette nostalgie Ce mouvement d’anémones Ce désordre cette angoisse Ce cri sourd des peuples en

rupture Cet appel de la continuité Nous ne sommes libres

qu’en agissant.Michèle Farey

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ÉLÉMENTS DE RECHERCHES

Page 20: 20 P RETRAITESDR La coordination de ce supplément est assurée par Annie Clavel et Gérard Niot. ... 2 - Retraités, supplément à L’US n° 660 du 8 décembre 2007 ... Bouygues,

L’Université Syndicaliste, suppl. au no 660 du 8 décembre 2007, hebdomadaire du Syndicat national des enseignements de second degré (FSU)46, avenue d’Ivry, 75647 Paris Cedex 13 – Directeurs de la publication : Serge Chatelain ([email protected]), Gérard Anthéaume ([email protected])

Compogravure : CAG, Paris – Imprimerie : SIPE (75) – No CP 0108 S 06386 – ISSN no 0751-5839

Contacts retraitésSNES

46, avenue d’Ivry, 75647 Paris Cedex 13(en précisant le nom

du destinataire)Tél. : 01 40 63 29 12

Secrétairesde catégorie :Annie Clavel

([email protected])Jacky Brengou

Trésoriers :Gérard Niot

Geneviève Dubut([email protected])

Secrétaire :Bénédicte Guigard

Tél. : 01 40 63 29 12

Renseignementssur les retraites

Secteur rémunérationsCourriel :

[email protected]

RREETTRRAAIITTÉÉSS RREETTRRAAIITTCOMMÉMORATION

Je connais des Justes, ils m’ont sauvée>Cette année, avec mon amie Denise Faille,nous sommes allées en Sicile, en voyage organisé. L’ac-compagnatrice nous a demandé depuis quand nous nousconnaissions : « Depuis près de 70 ans ». Et, c’est vrai.Nous habitions en 1937, 4, villa Gagliardini, près de la rueHaxo (20e) Denise au premier, moi au troisième. Nousétions toujours ensemble.Viennent la guerre, l’exode. Mon père, polonais, s’estengagé dans l’armée française. Après sa démobilisationà Montauban, nous sommes rentrés à Paris. Le 13 mai 41,il a été interné à Pithiviers, puis déporté le 25 juin 1942à Auschwitz ; il est mort en août de la même année.Dès le 15 juillet, des rumeurs circulent : la police françaiseaurait ordre d’arrêter tous les juifs, y compris les femmeset les enfants.Ma mère a demandé asile pour la nuit du 15 au 16 juilletaux parents de Denise, elle a pu échapper à la rafle du 16juillet 1942.Moi j’étais dans la Sarthe, placée chez une « nourrice »et m’appelais Gostan.Résistante, ma mère faisait partie de la MOI (main-d’œuvre immigrée). Tour à tour agent de liaison, infir-mière, transportant aussi des explosifs, elle logeait dansune « planque », rue Compans où Monsieur Faille allaitde temps en temps prendre de ses nouvelles. Moi je cir-culais entre la Sarthe et Paris.Elle a été arrêtée le 3 juillet 43 avec une partie de ses cama-rades par la 2e brigade spéciale de renseignements (Ges-tapo française), ils étaient « filés » depuis plus de 2 moispar des inspecteurs français. Les autres ont pu échapperà l’arrestation, ils avaient une « planque », au Perreux.J’étais dans la Sarthe, chez une nouvelle nourrice. C’estma mère qui m’a appris son arrestation, elle a réussi à mefaire parvenir une lettre grâce à un inspecteur gaulliste,qu’on a d’ailleurs revu après la Libération. Je pleurais sansarrêt ; je savais ce qu’elle encourait : j’avais 10 ans.Quelques jours plus tard je vois au bout du champ un cha-peau, un homme : M. Faille !Ayant appris l’arrestation de ma mère, il me cherchait, enparcourant la Sarthe, d’une nourrice à l’autre. Il m’a pro-posé de repartir avec lui ; je n’ai pas hésité, la nourrice aaccepté. Elle avait peut-être peur de ne pas être payée...Réfractaire au STO, il n’habitait plus Paris mais Château-Thierry, chez son frère. Aussitôt, nous avons pris le trainpour Paris mais arrivés trop tard pour celui de Château-Thierry, nous sommes allés dormir villa Gagliardini dansl’ancienne maison.Le lendemain matin à 6 heures je suis réveillé parM. Faille : « Ne t’inquiète pas Lili ! »Je vois deux inspecteurs soulevant les lattes du parquet àla recherche de tracts. Comme ils ne trouvaient rien, ils

nous ont emmenés à la conciergerie de la préfecture depolice.Je suis arrivée dans une grande salle dans laquelle étaitinterrogée ma mère ; ils voulaient à tout prix savoir oùétaient les camarades qu’ils n’avaient pas encore pu arrê-ter et la pressaient de les dénoncer sinon, ils menaçaientde me livrer aux Allemands et de me déporter.Ma mère me croyait alors dans la Sarthe.Tout à coup elle se retourne et me voit ; elle explose enYiddish : « Je ne sais rien, tu ne sais rien ! ». Les inspec-teurs n’ont pas compris ce qu’elle disait : c’étaient desFrançais ; ils ignoraient que je connaissais la planquedes résistants. Je suis restée près d’elle, entourée par sescamarades.C’est dur de parler de ces moments-là...Le visage de ma mère, me voyant prise au piège, mehante 65 ans après les faits. Monsieur Faille a été relâchéet ma mère a demandé qu’il puisse m’adopter.« Adopter un enfant – j’entends encore la réponse del’inspecteur – c’est une grosse responsabilité » mais êtredéportée chez les Allemands ?…Ma mère a écrit la lettre puis a été déportée à Auschwitzsans savoir ce que j’étais devenue. J’ai été placée àl’Assistance Publique.Au bout d’une dizaine de jours on m’appelle au parloir :M. et Mme Faille qui n’avaient de cesse d’obtenir magarde venaient me recueillir !Nous sommes repartis à Château-Thierry rejoindre leursenfants, Denise et Lucette. Je m’appelais dorénavantLiliane Faille, j’avais un oncle, une tante, des cousines.Nous y sommes restés jusqu’à la libération.Ils m’ont gardée jusqu’à ce que ma mère revienne dedéportation, le 15 mai 45. Elle avait été libérée par lesSoviétiques le 27 janvier 45 ; il a fallu attendre la fin dela guerre ! Elle est revenue par Odessa.Je suis repartie avec elle, puis la vie a repris son cours avecGilbert, ancien commandant FTP, avec qui elle s’estremariée ; c’est pour cela que j’ai un frère Jean-Louis quia 15 ans de moins que moi.Avec mon mari, Alain, nous avons fondé une famille,avons eu des petits-enfants : c’est ma fierté et ma revanchecontre les exterminations nazies.J’écris cela maintenant pour rendre hommage à M. etMme Faille, justes parmi les Justes.Le racisme, l’antisémitisme survivent. Au ParlementEuropéen, les néofascistes ont pu constituer un groupe ITS(Identité Traditionnelle et Souveraineté) présidé par lenégationniste Gollmisch.Plus que jamais, le devoir de mémoire s’impose. �

LILYA RAJCHMAN ALIAS FAILLE

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