« Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette...

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« Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais » Cynthia Dautel

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« Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais »

Cynthia Dautel

7.5 531705

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 100 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,055 mm) = 7.5 ----------------------------------------------------------------------------

« Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais »

Cynthia Dautel

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La veille du départ

J’étais dans un bar, entourée de mes amis, à boire un verre à l’occasion de mon futur voyage. Je partais avec deux copines et mon sac à dos à l’aventure. Pas d’hôtel, pas de plan, juste un billet d’avion. On me l’avait déconseillé si souvent pourtant : « Trois filles seules au Maroc, tu ne te rends pas compte ! », « Partir comme ça ce n’est pas de l’aventure, c’est de l’inconscience ! ». Quelques heures auparavant j’avais préparé mon sac : trois tee-shirts, deux shorts, de la lessive à main, quelques affaires de toilette, de l’argent, un carnet et un stylo, mon sac de couchage, mon passeport et mon billet d’avion. Plus les heures passaient et plus mon assurance quant au bon déroulement de ce voyage diminuait. En fait, ce qui m’inquiétait le plus, ce n’était pas le fait de vivre de mauvaises expériences, c’était le fait d’avoir menti à mes parents. En effet, j’avais bien évoqué le fait que je partais au Maroc. Cependant, ils pensaient que je rejoignais, avec mes deux amies, un groupe

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humanitaire et que nous resterions à Marrakech le mois entier, afin de travailler dans un centre pour enfants. C’était le seul moyen, même si je n’en étais pas fière, que j’avais trouvé pour pouvoir vivre pleinement cette expérience. J’avais vingt ans, mais ils auraient refusé. J’aurais protesté. Eux aussi. Il était donc de mon devoir de mentir, afin de préserver la paix familiale.

Dans le bar où nous étions, l’ambiance était à son comble. Nous nous déhanchions, ne pensant qu’à rire. De temps en temps, nous venions nous rasseoir pour commander une nouvelle boisson. Tous, étaient très heureux et excités de mon futur voyage. Ils me posaient beaucoup de questions, auxquelles bien souvent je ne savais pas répondre. Certains me trouvaient sidérante de ne pas en savoir plus. D’autres, trouvaient ça « fun ». D’autres, angoissant. Ils me faisaient rire. J’aurais voulu les emmener avec moi. Mais, nous avions tous des chemins différents. En buvant une gorgée de mon cocktail, je me rappelais ce qui me fit prendre la décision de m’engager dans cette aventure. Une philosophie de vie. Ma préférée. « Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais » Oscar Wilde. A ce moment, mon angoisse disparue pour le restant de la soirée. J’oubliais que j’avais menti, et je priais très fort pour ne plus jamais avoir à le faire.

Après plusieurs heures de danse, de rire et de fête, nous quittions le bar. Dans six petites heures, je serai dans l’avion. Il était temps d’aller me coucher.

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J’embrassais très fort mes amis. On me salua, m’embrassa. On me dit toutes sortes de choses touchantes, comme si j’allais mourir demain. Ils me faisaient vraiment rire.

Arrivée dans ma chambre, j’observais mon sac et je me jetais sur mon lit. Je me sentais bien, prête pour ce voyage, pour un rêve qui allait se réaliser. Fière de mon choix. Prête, plus que jamais, à toucher, rencontrer et appréhender l’inconnu. Alors que mes paupières se fermaient, je me suis mise à penser au fait que nous ne nous étions même pas procuré une carte du Maroc. « Nous en trouverons une sur place » pensais-je en me moquant de moi-même. Instantanément, je tombais dans un profond sommeil.

Le premier jour

J’étais dans la voiture de mon père qui roulait à destination de l’aéroport. Nous passions prendre mes deux amies. Sur le trajet, j’eus envie à plusieurs reprises d’avouer la vérité. A chaque fois, je me ressaisissais en me disant que « ça ne ferait qu’aggraver leur angoisse. Le mois va être terrible pour eux. ». Je leur avais donné l’adresse d’une association que j’avais trouvée sur internet.

Le long du voyage jusqu’à l’aéroport, j’étais rongée par l’envie de dire la vérité pendant plusieurs secondes, puis rattraper par la raison de ne pas le faire. La vérité. Non, mentir. Non, dire la vérité. Mentir. VE-RI-TE. Le plus long trajet de ma vie. Une

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guerre interne qui me parus durer une éternité. Finalement, aujourd’hui, je ne regrette pas mon choix. J’embarquais avec les épaules lourdes d’un gros mensonge, mais j’embarquais.

Le premier août, trois heures de vol plus tard, nous atterrissions à Marrakech. Il faisait extrêmement chaud. On s’empressa de sortir de l’aéroport. Des palmiers, du soleil, et des gens qui grouillaient dans tous les sens. Les taxis nous assaillaient : « Viens prendre taxi, 50 dirhams ». Les klaxons résonnaient de partout. Danielle et Laurie me proposèrent de consulter le « Guide du routard » que Danielle avait emporté. Après concertation, nous décidions à l’unanimité qu’il serait plus économique de prendre le bus pour rejoindre le centre-ville. En effet, nous n’avions pas beaucoup d’économies. Nos petits boulots d’étudiantes ne suffisaient pas à se payer des vacances de luxe. De toute façon, ce n’était pas le but de ce voyage.

Nous avons donc embarqué dans le bus qui nous ramenait dans le centre-ville. Nous sommes restées un long moment sur la place Jamel Efna, à observer les femmes qui proposaient aux touristes des dessins de henné sur le corps, les hommes qui arboraient serpents et singes sur les épaules. Tous, prêts et prêtes, à chaque instant, à gagner quelques dirhams de plus. Ici, les enfants n’ont pas peur de parler aux inconnus. « N’accepte pas de bonbons de quelqu’un que tu ne connais pas. Ne parle pas aux inconnus ». Vous avez

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déjà entendu ou prononcé vous-même ces phrases ?! Au Maroc, ce sont les enfants qui viennent vers vous afin de vous soutirer bonbons, argent, stylo ou toute chose qui pourrait remplir leurs poches. Ou souvent celles de leurs parents ! Nous nous perdions dans les zouks, c’était magnifique. Des couleurs, des odeurs, des saveurs, des sons, tous mes sens étaient en éveil. Lorsque je pensais avoir vu une chose plus merveilleuse que la précédente, j’en voyais une autre encore plus majestueuse quelques minutes après. Lorsqu’un commerçant me faisait goûter une olive, je me disais ne jamais n’en avoir mangé d’aussi bonne, puis quelques minutes plus tard j’en mangeais une autre, encore meilleure. Vers cinq heures de l’après-midi, nous décidions de nous installer à la terrasse d’un café. Les chaises n’étaient pas positionnées autour de la table, mais toutes du même côté, face à la place. Je commandais un thé à la menthe. « Délicieux ! », pensai-je. J’étais bien au début de mes émerveillements gustatifs. Danielle, sortit de son sac un bout de papier avec un nom et un numéro de téléphone. Elle avait pris contact avant de partir, avec un collègue à son père, qui a construit un gîte dans l’Atlas. Il y vit six mois dans l’année. Laurie et moi étions enjouées qu’elle bénéficie de ce contact.

Nous nous rendions à la gare dans l’optique de partir le plus vite possible vers le gîte de l’Atlas. Notre contact nous avait expliqué au téléphone, qu’il avait créé ce gîte afin que les touristes ou randonneurs, s’y

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arrêtent dans leurs étapes. Il avait donné sa responsabilité à une famille du village. Ce qui leur procurait une petite source de revenu. Ces habitants sont des Berbères. Ce sont les premiers habitants du pays. Ils parlent le berbère, ce qui diffère de l’arabe. Ces petits rendements peuvent les aider pendant des mois. Ils vivent dans des montagnes reculées des autres civilisations, et n’ont, bien souvent, pas accès à l’école, à l’eau, à la ville. Ils vivent de leur autoproduction en pleine montagne. Cette vallée où nous nous rendions s’appelle Anergi. Nous étions extrêmement pressées d’y arriver. Nous savions cependant que le trajet allait être très long. Mais nous ne nous étions pas imaginées qu’après dix-huit heures les bus, de la compagnie que nous devions prendre pour ce trajet, ne voyageaient plus. Nous devions donc passer la nuit à Marrakech. J’étais un peu déçue, car même si c’est une très belle ville, je ne m’y sentais pas très à l’aise. En effet, j’avais la sensation que l’on s’intéressait plus à nous pour notre statut d’Européen (et donc notre argent !) que pour autre chose. Nous feuilletions le guide du routard pour trouver un hôtel à bas prix. Mais comme ce n’était que notre premier jour de voyage, nous ne voulions pas gaspiller notre argent dans des dépenses inutiles. Nous avons donc décidé, presque à l’unanimité, car il a fallu convaincre longuement Laurie, de dormir à la gare et de prendre le premier bus du matin. Une fois cette décision prise, j’allais me laver comme je pouvais dans les toilettes de

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la gare, puis je lavais mes vêtements de la journée et je les étendais sur les bancs afin de les faire sécher. Nous nous installions dans nos sacs de couchage. Mes amies s’endormirent assez rapidement. Moi, je préférais rester éveillée encore un peu pour écrire. J’avais emporté avec moi un carnet qui me permettait d’écrire chaque soir ou lorsque j’en avais envie. Je suis sortie devant la gare fumer une cigarette. Les chauffeurs de taxi m’accostèrent immédiatement. Je refusais, pour la énième fois de la journée, leur offre. Je fumais ma cigarette tranquillement mais je sentais bien que des regards inquisiteurs se posaient sur moi. En effet, au Maroc, les femmes ne fument pas. Je retournais donc dans mon sac de couchage.

Cette journée s’achevait et je sentais le sommeil venir. Je dois tout de même préciser qu’avant de partir j’avais fait un pacte avec mes parents : je devais leur envoyer un message chaque jour. J’envoyais donc le premier message du voyage. J’oubliais que j’avais mentis, j’avais le sentiment que tout allait bien se passer.

NOUVEAU MESSAGE : « Nous sommes bien arrivées. Ils nous ont bien accueillis. Bonne nuit, je suis crevée du voyage, à demain bisous. ENVOYE !

(Même si personne ne nous attendait à l’aéroport, le Maroc nous a bien accueilli, ce n’est pas vraiment

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un mensonge. Il faut savoir rester vague dans certaines circonstances, non ?! )

Le deuxième jour

Nous nous sommes réveillées à cinq heures du matin. C’était l’heure de prendre le bus. Et c’était également le premier jour du Ramadan. Cette coutume religieuse interdit aux musulmans de manger, de boire, de se maquiller, de fumer, d’avoir des rapports sexuels du lever au coucher du soleil. Dans le bus, qui nous emmenait jusqu’à Beni Mellal, j’observais toutes ces femmes voilées. J’avouais à Laurie : « Je ne comprends vraiment pas pourquoi elles sont obligées de se cacher ainsi. ». Elle me répondit : « Beaucoup de mes amis sont musulmans. J’ai déjà eu cette conversation avec eux. Tu sais, on m’a souvent répondu que dans le Coran, il n’était pas inscrit de mettre un voile. C’est plus un choix. Et un jour un ami m’a dit que c’était comme s’il avait un très beau trésor et qu’il ne voulait pas que tout le monde le voit par peur qu’on lui pille. » Cette vision des choses m’a un peu apaisé quand à ce que je prenais, à ce moment-là, pour une injustice.

Le bus était en très mauvais état. Nous trouvions toutes les trois très drôle, le fait que sur la façade extérieure du bus une pancarte annonçait « votre sécurité et votre confort sont notre priorité ». En effet, à l’intérieur, il manquait la moitié des sièges, c’était délabré. Mais nous nous en fichions, cela nous faisait