Post on 27-Mar-2018
1
UNIVERSITÉ PARIS DIDEROT - PARIS 7
FACULTÉ DE MÉDECINE
Année 2016-2017 n° ________
THÈSE
POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT
DE
DOCTEUR EN MÉDECINE PAR
NOM : Boudana Prénom : DanDate et Lieu de naissance : 20/03/1986 Paris XXème
Présentée et soutenue publiquement le : 16/01/17
Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux par le médecin généraliste :
revue de la littérature
Président de thèse : Professeur EXTRAMIANA Fabrice
Directeur de thèse : Dr BOREL-KUHNER Jocelyne
2
DES de médecine générale
Remerciements
Au Professeur Extramiana : qui a accepté de présider ma thèse
Au Docteur Borel-Kuhner : d’avoir été mon chef de service aux urgences lorsque j’étais interne et qui a accepté d’être mon directeur de thèse. Merci de m’avoir guidé pour ce travail
Au Dr Bedzra : qui a été mon « mentor » aux urgences, qui m’a transmis la passion et qui m’a appris la rigueur de ce métier.
A mes parents : qui m’ont permis grâce à leur soutien d’être médecin et d’exercer ma passion
A mon frère et ma sœur : pour leur relecture et leur aide
A ma femme : pour son soutien sans faille au quotidien
Et a tous ceux que j’ai pu croiser durant mes longues études de médecine.
3
PLAN
Introduction……………………………………………………………………………...4
I. Histoire des anticoagulants…………………………………………………………. ..6 I.1. Les premiers anticoagulants.................................................................................6 I.II. Les nouveaux anticoagulants oraux …………………………………………...8
II. Physiologie de la coagulation……………………………………………………......10
III. Pharmacologie des nouveaux anticoagulants (NACO)…………………………...19 III.1. Présentation …………………………………………………………………..19 III.2. Mécanisme d’action ………………………………………………………….20 2.1. Rappel sur les anti-vitamine K (AVK) …………………………………20 2.2. Mode d’action des NACO………………………………………………21 III.3. Pharmacocinétique et pharmacodynamie …………………………………...22 3.1. Apixaban………………………………………………………………...22 3.2. Rivaroxaban…………………………………..........................................23 3.3. Dabigatran …………………………………...........................................23 3.4. Tableau récapitulatif……………………………………………………..24 III.4. Indications et posologie des NACO………………………………………...24 III.5. Effets indésirables ………………………………………………………….31 5.1. Risque hémorragique……………………………………………………31 5.2. Autres effets indésirables ………………………………………………32 III.6. Contre-indications …………………………………………………………..33 III.7. Interactions médicamenteuses……………………………………………….34 III.8. Relais entre anticoagulants…………………………………………………..38 III.9. Surveillance biologique …………………………………………………….41
IV. Matériel et méthode…………………………………………………………………45
V. Résultats ……………………………………………………………………………....48 V.1.Chirurgie urologique…………………………………………………………..48 V.2.Chirurgie plastique et dermatologique………………………………………...75 V.3.Chirurgie oto-rhino-laryngologie……………………………………………...87 V.4.Chirurgie ophtalmologique……………………………....................................95 V.5.Chirurgie abdominale…………………………………………………………103 V.6.Chirurgie orthopédique et actes rhumatologiques…………………………….111 V.7.Actes endoscopiques………………………………………………………….121 V.8.Chirurgie dentaire……………………………………………………………..140
Discussion……………………………………………………………………………….158
4
Conclusion………………………………………………………………………………162
Bibliographie……………………………………………………………………………166
INTRODUCTION
D’après le dernier rapport de l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament et des
produits de santé) sur les anticoagulants datant de 2014 [1], la vente des anticoagulants (tous
confondus) a doublé entre 2000 et 2012 et l’on chiffre à environ 3.12 millions le nombre de
patients ayant reçu au moins une fois un anticoagulant au cours de l’année 2013.
Par ailleurs, l’utilisation des anticoagulants augmente avec l’âge du patient [1]: toujours
d’après l’ANSM, 13.7% des patients de 65 ans et plus ont pris au moins une fois un
anticoagulant au cours de l’année 2013.
Ainsi, nous comprenons facilement que, devant le vieillissement de la population, les
anticoagulants font partie intégrante de la pratique quotidienne du médecin généraliste
notamment dans sa mission de prévention et traitement des maladies thrombo-emboliques.
Depuis 2008, une nouvelle classe d’anticoagulants regroupés sous le terme de « nouveaux
anticoagulants oraux » (NACO) ont fait leur apparition sur le marché. Devant leur plus grande
commodité d’utilisation avec notamment l’absence de surveillance biologique nécessaire, leur
utilisation par les médecins généralistes est de plus en plus fréquente et tend à faire diminuer
la prescription d’anti-vitamines K (AVK). On note d’ailleurs depuis 2013, selon le rapport de
l’ANSM [1], une décroissance de la vente d’AVK s’opposant à une augmentation des
prescriptions de NACO.
Parmi ces patients sous anticoagulants, 10 à 15% nécessitent un arrêt de prise en vue d’une
intervention chirurgicale programmée [2].
En effet, le risque principal associé à l’utilisation des NACO est le risque hémorragique
d’autant plus pour ces anticoagulants devant l’absence d’antidote sur le marché. Il dépend
non seulement de leur mode d’action pharmacologique mais également du terrain du patient :
patients âgés, polypathologie, insuffisance rénale, insuffisance hépatique, faible poids
corporel, interactions médicamenteuses.
5
Ainsi, le médecin de ville a un rôle central dans la gestion de ces molécules et l’évaluation de
la balance bénéfice/risque. D’après une étude américaine publiée en 2016 dans le journal du
collège américain de cardiologie [3] visant à évaluer le rôle de chaque spécialité médicale
dans la gestion péri-opératoire des NACO, le médecin généraliste arrive en 2ème position
derrière le cardiologue et se trouve autant impliqué dans cette gestion que le chirurgien
réalisant l’intervention.
Tout comme pour les AVK avec les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS)
datant de 2008 [4], les recommandations concernant la gestion péri-opératoire des NACO
réactualisée en septembre 2015 par le groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire (GIHP)
[5] distinguent :
- les actes à risque hémorragique faible définis, selon les mêmes termes que ceux de l’HAS en
2008, comme les « actes responsables de saignements peu fréquents, de faible intensité ou
aisément contrôlés, pouvant être réalisés chez des patients anticoagulés à taux
thérapeutiques »
- les actes à risque hémorragique élevé définis par « un geste qui ne peut être raisonnablement
réalisé en présence d'anticoagulant ». Il s'agit donc, comme pour les AVK, de faire une fenêtre
sans anticoagulant pour que l'hémostase du geste soit optimale.
Cependant, il s’agit de recommandations globales et il n’existe pas de recommandations très
précises concernant la gestion péri-opératoire des NACO pour chaque type de chirurgie.
Cette étude consiste à réaliser une revue de la littérature concernant la gestion des NACO en
péri-opératoire des différentes chirurgies programmées auxquelles peuvent être confrontés les
médecins généralistes.
L’objectif principal est d’établir pour les médecins généralistes un plan de gestion des NACO
(poursuite, arrêt, délai d’interruption, relais par héparine) pour chaque grand type
d’intervention chirurgicale programmée selon les résultats des données de la littérature.
L’objectif secondaire est d’évaluer en terme quantitatif et qualitatif le niveau de preuve des
données de la littérature pour chaque type de chirurgie afin d’envisager des recommandations
d’études empiriques à poursuivre dans certaines chirurgies.
6
I. Histoire des anticoagulants
Les anticoagulants sont utilisés depuis plus de soixante-dix ans dans la prévention et le
traitement des maladies thrombo-emboliques.
Afin de mieux comprendre ce qui a conduit à l’apparition des nouveaux anticoagulants oraux,
il convient de rappeler l’histoire des anticoagulants depuis la découverte de l’héparine jusqu’à
l’arrivée des NACO.
I.1. Les premiers anticoagulants
L’héparine non fractionnée (HNF)
Le premier anticoagulant découvert fut l’hirudine, isolé et obtenu en 1884 par Haycraft [6].
Elle fut extraite et isolée à partir de la salive de sangsues.
Cependant, elle ne pouvait pas être utilisée comme anticoagulant jusqu’à sa production
génétique en 1986.
Ainsi, le premier anticoagulant ayant pu être utilisé chez l’homme fut l’héparine, découverte
en 1916 par McLean, un étudiant en médecine, qui s’intéressait, sous la supervision de
Howell, à l’effet coagulant de l’éther brut et l’alcool extraits du cerveau, foie et cœur de
chiens. McLean remarqua que ces extraits et en particulier l’heparphosphatide, après une
exposition longue à l’air, avait une propriété anticoagulante.
En 1918, Howell renomma l’heparphosphatide, héparine.
Quatre ans plus tard, il découvrit l’héparine vraie, un muccopolysaccharide issu du foie de
chien.
McLean et Howell se disputèrent la paternité de cette découverte.
En 1933, Charles et Scott réussirent à produire de l’héparine pure, permettant ainsi son
utilisation chez l’homme, qui débuta réellement en 1935.
La première indication de l’héparine fut la thromboprophylaxie chez les patients opérés.
Ainsi, en 1937, Murray et Crafoord ont publié la première série de patients traités par
héparine.
7
Par la suite, Bauer publia une comparaison historique de patients entre 1926 et 1938 puis
entre 1940 et 1949 qui montra que la mortalité des patients présentant une thrombose
veineuse des membres inférieurs diminuait de 18 à 0.4% après introduction d’héparine.
L’héparine était donc le traitement de référence des thromboses veineuses dans les années
1940.
La durée du traitement était en moyenne de 7-10 jours.
L’arrivée des anti-vitamines K en 1941 a permis de prolonger la durée de traitement.
Les héparines de bas poids moléculaire (HBPM)
Le risque principal lié à l’héparine non fractionnée était le risque hémorragique encouru en
cas de surdosage.
La prévention des accidents thromboemboliques et des accidents hémorragiques nécessitait
une surveillance biologique relativement coûteuse.
L’apparition des HBPM marque un tournant dans la simplification du traitement
anticoagulant.
Connues depuis 1976, ces molécules sont apparues en pratique au début des années 80 par
dépolymérisation de l’héparine non fractionnée [6].
Elles présentent des propriétés permettant de ne les administrer qu’une seule fois par jour
ainsi que de ne pas nécessiter de contrôle biologique (tel que le temps de céphaline activée).
Par ailleurs, en 1996, Levine montra que les HBPM données en ambulatoire étaient aussi
efficaces et sûres que les HNF dans le traitement des thromboses veineuses profondes (TVP).
C’est ainsi que les TVP sont devenues une pathologie ambulatoire.
Les HBPM ont marqué le début d’une nouvelle ère.
Cependant, il persiste deux problématiques : le risque de thrombopénie et la forme injectable
très contraignante pour des patients nécessitant une anticoagulation au long terme.
Une forme orale d’anticoagulation était donc activement recherchée.
Les anti-vitamines K (AVK)
L’histoire des AVK débute dans le Dakota du Nord et la région canadienne de l’Alberta au
début du 20ème siècle (hiver 1920-1921) [6].
A cette époque, une maladie hémorragique décima une partie du bétail local.
En 1921, Schoefield, un vétérinaire canadien, montra que la maladie fut causée par
l’intoxication du bétail par des mélilots gâtés, une plante (trèfle) entrant dans l’alimentation
8
des bêtes. Il montra que l’épidémie pouvait être prévenue en retirant cette plante de
l’alimentation du bétail et qu’elle pouvait être traitée par transfusion de sang.
En 1939, Link du collège d’agriculture de l’université du Wisconsin et ses collègues,
mettaient en évidence une souche de mélilots dépourvue de coumarine, un agent non
pathologique.
Le facteur hémorragique fut finalement isolé par Campbell, collaborateur de Link, qui mit en
évidence que la coumarine était oxydée en dicoumarol dans les baies moisies.
Deux ans plus tard, le dicoumarol était utilisé pour la première fois pour traiter les TVP.
En 1945, alors que la prolifération des rats représentait un problème de santé publique, Link
étudia le comportement des rongeurs et décida de tester le pouvoir anticoagulant du
dicoumarol synthétique pour développer une mort au rat optimale.
Cette trouvaille lui permit de récolter des royalties à la Wisconsin Alumni Research
Foundation (WARF) d’où le nom de warfarine, initialement utilisée en 1948 comme mort
aux rats et considérée comme trop toxique pour l’être humain.
Cependant, la tentative de suicide manquée d’un soldat de la marine avec 567 mg de
warfarine absorbée en 5 jours, montra que cette molécule n’était pas aussi toxique que décrite.
Cela ouvrit la porte à sa commercialisation comme agent thérapeutique en 1954.
Les scientifiques se sont rapidement aperçus que l’héparine et les AVK étaient
complémentaires et que l’héparine délivrée en parentéral avait une efficacité immédiate tandis
que les AVK qui étaient pris oralement permettaient un relais et un traitement au long terme.
I.2. Les nouveaux anticoagulants oraux (NACO)
Depuis les AVK, les recherches scientifiques se sont concentrées sur la mise au point d’une
nouvelle molécule anticoagulante.
En effet, les AVK, bien qu’ayant une efficacité prouvée dans leurs différentes indications,
posent les médecins prescripteurs face à de nombreuses difficultés dans la prise en charge et
le suivi ambulatoire des patients : la nécessité d’une surveillance biologique régulière (INR),
la difficulté à équilibrer le traitement, l’existence d’interactions médicamenteuses et
alimentaires.
9
L’objectif était donc de trouver des substances pouvant, si ce n’est remplacer, au moins
concurrencer les AVK pour des pathologies nécessitant un traitement au long terme tout en
bénéficiant de moins de contraintes pour une prise en charge ambulatoire.
Après l’échec et le retrait du marché du Ximelagatran en 2006 du fait d’une toxicité hépatique
probable [7], les études se sont donc intéressées à l’efficacité de 3 nouveaux anticoagulants
oraux, dans l’ordre chronologique d’apparition sur le marché : le Dabigatran etexilate,
inhibiteur de thrombine, et les inhibiteurs directs du facteur Xa : le Rivaroxaban et
l’Apixaban.
Ces molécules furent d’abord approuvées dans la prévention des TVP en chirurgie
orthopédique.
Puis, leur indication a été élargie grâce notamment à 3 études en particulier qui ont
contribuées à la mise sur le marché et l’expansion de ces 3 médicaments :
-le Dabigatran : fut le premier NACO approuvé en 2008 par l’union européenne puis en 2010
par la Food and Drug Administration (FDA) aux Etats-Unis en se basant sur les résultats de
l’étude RE-LY (randomized evaluation of long term anticoagulant therapy) publiée en
septembre 2009 dans le New England journal of Medicine (NEJM) [8], comparant l’efficacité
et les risques de la warfarine par rapport au dabigatran dans la prévention des accidents
vasculaires cérébraux (AVC) chez des patients anticoagulés pour fibrillation auriculaire (FA)
non valvulaire.
Cette étude a montré que le Dabigatran était plus efficace et moins risqué que la warfarine
dans cette indication.
-le Rivaroxaban : est le deuxième NACO mis sur le marché en 2008 par l’Agence Européenne
de Médecine et par la FDA en se basant sur les résultats de l’étude ROCKET AF (rivaroxaban
versus warfarin in nonvalvular atrial fibrillation) publiée en septembre 2011 dans le NEJM
[9], comparant l’efficacité et les risques de la warfarine par rapport au rivaroxaban dans la
prévention des AVC chez des patients anticoagulés pour FA non valvulaire.
Cette étude a montré que le rivaroxaban était plus efficace et moins risqué que la warfarine
dans cette indication.
- l’Apixaban : est le troisième NACO mis sur le marché et approuvé par la FDA et l’agence
européenne de médecine en se basant sur les résultats de l’étude ARISTOTLE (Apixaban for
10
Reduction in Stroke and Other Thromboembolic Events in Atrial Fibrillation) publiée en
septembre 2011 dans le NEJM [10] , comparant l’efficacité et les risques de la warfarine par
rapport à l’Apixaban dans la prévention des AVC chez des patients anticoagulés pour FA non
valvulaire.
Cette étude a montré que l’Apixaban était plus efficace et moins risqué que la warfarine dans
cette indication.
II. Physiologie de la coagulation
Bien que nous nous intéressons plus particulièrement dans ce travail à l’étape de coagulation
et aux facteurs de coagulation sur lesquels agissent les nouveaux anticoagulants oraux, il
convient d’effectuer un rappel physiologique du processus d’hémostase afin de comprendre le
mécanisme d’action des NACO.
La coagulation est l’étape cible de ces nouveaux anticoagulants oraux car leur action est
dirigée vers deux des principaux facteurs de la coagulation : le facteur IIa et le facteur Xa .
L’hémostase primaire
L’hémostase primaire correspond à l’étape d’activation des plaquettes [11].
Elle s’effectue en trois temps :
1. Le temps vasculaire
Afin de favoriser l’hémostase en cas de brèche vasculaire, l’organisme réagit en entrainant
une vasoconstriction. Celle-ci permet, si ce n’est de stopper l’hémorragie, de diminuer le flux
sanguin et de rassembler l’ensemble des cellules et substances participant au mécanisme
d’hémostase.
2. L’adhésion plaquettaire
Sorties des vaisseaux, les plaquettes vont pouvoir adhérer au sous-endothélium, désormais à
nu du fait de la brèche vasculaire, par l’intermédiaire de la GP Ib qui s’attache à la paroi sous-
endothéliale grâce au facteur de Willebrand servant de point d’ancrage.
Ainsi, ces plaquettes adhérentes vont recruter à leur tour d’autres plaquettes [12].
11
3. L’agrégation plaquettaire
Ainsi, se mettent en place plusieurs couches plaquettaires. Les GP IIbIIIa présents à la surface
des plaquettes vont alors modifier leur structure rendant possible leur fixation au fibrinogène
grâce au calcium.
Ainsi, l’agrégation plaquettaire peut se faire par l’intermédiaire du fibrinogène qui sert de
point d’ancrage entre les plaquettes. Cet ensemble forme un thrombus fragile : on parle
d’agrégation réversible. Par la suite, le caillot va se solidifier du fait de la libération du
contenu granulaire et enzymatique des plaquettes : on parle d’agrégation irréversible.
Se forme alors le thrombus blanc ou « clou plaquettaire » [12].
12
La coagulation
Cependant, le clou plaquettaire est une structure très fragile. Sa consolidation passe par une
étape majeure du processus d’hémostase : la coagulation.
La coagulation désigne un ensemble de réactions enzymatiques se produisant en cascade
ayant pour finalité la conversion du fibrinogène soluble en fibrine insoluble par
l’intermédiaire de la thrombine. La fibrine insoluble associée aux plaquettes va former le
caillot sanguin stable.
Ainsi, la thrombine joue un rôle central dans le processus de coagulation. Mais ce dernier
implique de nombreuses autres protéines et enzymes qui vont agir à la surface des plaquettes
et des cellules endothéliales.
Parmi ces protéines, figurent au premier plan les facteurs de coagulation.
1. Les facteurs de la coagulation
Les facteurs de coagulation sont des glycoprotéines plasmatiques produites par les
hépatocytes. On dénombre au total douze facteurs de coagulation, nommés par des numéros
suivis de la lettre « a » selon qu’ils sont activés ou non. Leur activation peut s’effectuer par
13
l’intermédiaire de deux voies séparées mais permettant toutes les deux l’activation du facteur
X en facteur Xa, ce dernier permettant à son tour d’activer le facteur II dénommé
prothrombine en facteur IIa formant la thrombine, qui, comme nous l’avons vu va permettre
l’activation de la fibrine.
Ainsi, nous distinguons : la voie exogène et la voie endogène [12].
-La voie extrinsèque ou exogène :
Cette voie aboutit à l’activation du facteur X soit directement soit indirectement par
l’intermédiaire du facteur IX.
Cette voie de la coagulation débute par l’activation d’une glycoprotéine membranaire produite
par les fibroblastes constituant l’adventice des vaisseaux : le facteur tissulaire.
En cas de brèche vasculaire, le facteur VII puis le facteur VIIa, produit de l’auto-activation du
facteur VII, va se fixer sur le facteur tissulaire. Le complexe facteur VIIa/facteur tissulaire va
permettre d’activer le facteur IX, constituant la voie indirecte, et le facteur X constituant ainsi
la voie directe. A la surface des membranes plaquettaires, par la voie directe, le facteur Xa va
activer le facteur II. Par la voie indirecte, le facteur IXa va activer le facteur X en Xa.
Les deux voies aboutissent à la formation du facteur IIa : la thrombine. La thrombine va
accentuer sa propre production et va stimuler les plaquettes afin de renforcer le thrombus. Elle
va également activer les facteurs VII et facteur V. Le facteur VIIIa va joueur le rôle de
catalyseur et va permettre d’accélérer l’activation du facteur X par le facteur IXa en présence
d’ions calcium et de phospholipides. Le facteur Va, lui, va former avec le facteur Xa le
complexe prothrombinase permettant d’accélérer l’activation du facteur II.
La thrombine va ainsi être formée. Elle va permettre de transformer le fibrinogène en fibrine
et de former le caillot qui sera stabilisé par le facteur XIIIa. Mais, son rôle ne s’arrête pas là,
puisqu’elle est également capable d’amplifier sa propre formation en activant les facteurs V et
VIII, mais aussi le facteur XI.
Ainsi, la voie exogène comporte deux étapes : la première qui aboutit à la formation de
thrombine, et la seconde qui permet une amplification de la formation de thrombine par la
thrombine elle-même [11].
14
-la voie intrinsèque ou endogène :
Cette voie a également pour finalité l’activation du facteur X mais cette fois-ci par
l’intermédiaire du facteur XI activé. La différence avec la voie extrinsèque est que le facteur
VIIa n’est pas impliqué ici. Tout débute par l’activation par le collagène sous-endothélial du
« système contact » qui comporte le facteur XII, la prékallikréine (KP) et le kininogène de
haut poids moléculaire (KHPM). Lorsque survient une brèche vasculaire, le KHPM et le
facteur XII vont se fixer au niveau du sous-endothélium. La prékallikreine va se transformer
en kallikréine qui va activer le facteur XII. Le facteur XIIa va activer le facteur XI et va
également jouer un rôle rétroactif d’amplificateur en activant la prékallikreine. Le facteur XI
est lui-même, comme nous l’avons vu précédemment, activé de façon rétroactive par la
thrombine. Le facteur XIa va permettre l’activation du facteur IX. Le facteur IXa va
s’associer au facteur VIIIa et rejoindre la même voie que la voie exogène aboutissant à la
formation du caillot stable : c’est la voie finale commune.
Ainsi, nous voyons que le facteur Xa est au centre des voies de coagulation [11]. Chaque
molécule de facteur Xa génère approximativement 1000 molécules de thrombine.
15
Ceci explique la recherche importante de nouvelles molécules agissant directement sur le
facteur Xa.
2. Régulation de la coagulation
Afin d’éviter que les facteurs et protéines impliqués dans la coagulation ne circulent en
permanence dans le sang et ne s’activent spontanément, l’existence d’un système de
régulation et d’un système inhibiteur est essentiel [13].
Ainsi, un équilibre est nécessaire et plusieurs mécanismes permettent une régulation de la
coagulation :
Le contrôle du flux sanguin : l’une des premières étapes de l’hémostase est la
vasoconstriction. En diminuant le débit sanguin, il se produit une stase permettant une
16
augmentation de la concentration en enzyme de la coagulation au niveau de la brèche et donc
l’initiation du processus d’hémostase.
Les facteurs de coagulation : les facteurs activés sont capables de stimuler leur propre
activation par un effet de rétro-activation.
Les inhibiteurs physiologiques : Ils sont présents sur la membrane endothéliale saine. Ces
inhibiteurs vont se fixer au niveau de protéoglycanes, les sulfates d’héparane.
Parmi eux il en existe quatre principaux :
L’antithrombine III (AT) : Les enzymes de la coagulation échappent au contrôle de l'AT
tant qu'elles sont liées aux phospholipides de la membrane plaquettaire. En s’associant aux
sulfates d’héparane, elle va inhiber les facteurs activés de la coagulation, notamment la
thrombine, et les F Xa, Ixa, Xla, Xlla. Le complexe enzyme-AT une fois formé est covalent,
l'inhibition est donc irréversible.
Par la suite, le complexe se détache de l'héparane-sulfate et va se fixer sur un récepteur de
l'hépatocyte pour y être internalisé. L'héparane-sulfate est alors à nouveau libre pour fixer
l'AT. L’effet anticoagulant de l’AT est augmenté de façon très importante par l'héparine
(utilisée comme traitement).
Le système Protéine C-Protéine S : La protéine C (PC) est présente dans le sang sous forme
inactive. Son activation en protéine C activée (PCa) se fait par la fixation de la thrombine sur
un récepteur : la thrombomoduline. Une fois activée, la PC agit en inhibant les facteurs Va et
VIIIa. La proteine S (PS) va augmenter l’effet inhibiteur de la PC. Parmi les atteintes les plus
fréquentes de cette voie inhibitrice, nous trouvons le FV Leiden lié une résistance du FV à
l’activité inhibitrice de la PC secondaire à une anomalie du gène du FV, favorisant la
survenue d’accidents thrombotiques.
L’Inhibiteur de la voie du Facteur Tissulaire(TFPI) : Le TFPI est lié à la membrane des
cellules endothéliales. Le mécanisme d’inhibition est le suivant : tout d’abord, le TFPI se lie
au facteur Xa et l’inhibe. Puis, le complexe facteur Xa-TFPI va se lier au complexe facteur
VIIa-FT. Il se forme ainsi un complexe regroupant le facteur Xa, le facteur VIIa et le facteur
tissulaire qui se retrouvent de ce fait tous inhibés. )
L’α2-macroglobuline : elle inhibe la thrombine et la kallikréine.
17
3. L’exploration de la coagulation
Les tests les plus utilisés en pratique sont le temps de céphaline activée (TCA) et le temps de
Quick (TQ) [11]
TCA : il correspond au temps de coagulation d'un plasma citraté déplaquetté auquel on ajoute
un activateur des facteurs contacts et de la céphaline, substitut du facteur III plaquettaire, puis
après incubation à 37°c du Calcium. Le T.C.A. normal varie généralement de 30 à 40
secondes.
Le temps du malade est comparé au temps d’un témoin. Ainsi, le rapport malade/témoin ne
doit pas dépasser 1.2.
Le TCA permet d’explorer la voie endogène de coagulation (prékallicréine, KHPM, FVIII,
FIX, FXI, FXII, ainsi que la voie finale commune.
18
TQ : il correspond au temps de coagulation du plasma décalcifié, recalcifié in vitro en
présence de thromboplastine tissulaire.
Il permet d’explorer la formation de la thrombine et de la fibrine et donc le FVII et la voie
finale commune.
Les résultats sont rapportés en :
seconde par rapport à un témoin (10 à 14 sec selon la thromboplastine),
pourcentage d'activité par rapport à une droite d'étalonnage (taux de prothrombine : TP,
normal de 70 à 100%),
INR (International Normalised Ratio). INR = [TQ malade/TQ témoin]isi. (ISI : International
Sensitivity Index).
19
III. Pharmacologie des nouveaux anticoagulants (NACO)
III.1. Présentation
En 2015, en France, deux classes de NACO sont disponibles sur le marché [1] :
1) Les inhibiteurs directs du facteur Xa comportant :
- le Rivaroxaban ayant l’AMM depuis septembre 2008 en Europe et commercialisé sous
le nom de Xarelto : disponible sous forme de comprimés dosés à 10, 15 et 20 mg
- l’Apixaban ayant l’AMM depuis mai 2011 et commercialisé sous le nom d’Eliquis :
disponible sous forme de comprimés dosés à 2.5 et 5 mg
20
2) Un inhibiteur direct de la thrombine : le Dabigatran ayant l’AMM depuis mars 2008 et
commercialisé sous le nom de Pradaxa : disponible sous forme de capsules dosées à 110 et
150 mg.
III.2. Mécanisme d’action
2.1. Rappel sur les anti-vitamines K (AVK)
La vitamine K intervient dans la synthèse, au sein des hépatocytes, de quatre protéines de la
coagulation, les facteurs II, VII, IX et X, et de deux inhibiteurs de la coagulation, la protéine
C et la protéine S. Ainsi, les AVK vont diminuer l’activité coagulante de ces protéines en
empêchant la transformation de ces enzymes en formes actives par leur action sur le cycle de
la vitamine K au niveau du foie.
L’absorption des AVK se fait par voie digestive. Elles se lient dans la plupart des cas dans le
plasma à l’albumine (90-99%) et seule la forme libre est active et métabolisée par le foie.
Leur élimination se fait par voie urinaire.
Le délai d’action et la demi-vie des AVK sont résumées dans le tableau ci-dessous [1].
Durée d’action DCI Nom
commercial Demi-vie (h)
Délai d’action (h)
Dose par comprimé (mg)
Posologie moyenne (mg/j)
Courte Acénocoumarol Sintrom®
8 18–24 4 4–8
Acénocoumarol
Minisintrom® 1
Moyenne Fluindione Previscan® 31 24–48 20 20–40
Longue Warfarine Coumadine® 35–45 36 2 ou 5 4–10
La surveillance biologique du traitement par AVK se fait par l’intermédiaire de l’INR
(international normalized ratio) = (temps de Quick du malade/temps de quick du témoin). [14]
L’effet anticoagulant est modifié par la teneur en vitamine K de l’alimentation [15]. Si les
apports alimentaires en vitamine K augmentent, l’effet anticoagulant diminue (aliments riches
en vitamine K : salade, épinards, choux-fleur et brocolis).
21
Par ailleurs, de nombreux médicaments peuvent modifier l’effet des AVK en inhib1ant
(barbituriques) ou au contraire augmentant leur effet.
2.2. Mode d’action des NACO
Contrairement aux AVK, les NACO inactivent de manière sélective un seul et unique facteur
de la coagulation [16] .Ils inhibent de façon directe, réversible et spécifique soit le facteur Xa
(pour le rivaroxaban et l’apixaban) soit le facteur IIa (pour le dabigatran) qu’ils soient libres
ou liés au thrombus pour la thrombine ou dans le complexe prothrombinase pour le facteur Xa
, ce qui réduit leur délai d’action comparé aux AVK. On considère que les NACO ont une
action réversible, car ils n’établissent pas de liaisons covalentes à l’inverse des AVK ou des
héparines.
22
III.3. Pharmacocinétique et pharmacodynamie
3.1. Apixaban
L’apixaban est un inhibiteur direct du facteur Xa (libre ou dans le complexe prothrombinase).
Apres une prise orale, l'apixaban est absorbé au niveau de l'intestin et ne nécessite pas de
conversion hépatique en agent actif [1] [17] [18] . Il présente une biodisponibilité supérieure à
50% et atteint son pic de concentration plasmatique en 3 à 4 heures. La demi-vie de
l’apixaban est de 10 à 14h. Il est métabolisé par la CYP3A4 (cytochrome) et est partiellement
éliminé par les reins (25%) et dans une certaine mesure par des mécanismes hépatiques
indépendants des CYP. Ainsi, l’apixaban n’induit ni n’inhibe les CYP et présente donc moins
de risque d’interaction médicamenteuse.
3.2. Rivaroxaban
Le rivaroxaban est un inhibiteur direct du facteur Xa libre ou au sein du complexe
prothrombinase. Le rivaroxaban est absorbé dans l'intestin et, comme l'apixaban, il ne
nécessite aucune activation métabolique [1] [17] [18]. Contrairement aux autres anti-Xa
directs, l'absorption du rivaroxaban est affectée par la consommation d’aliments : la prise
d'aliments augmente l'absorption du médicament. Son pic de concentration plasmatique est
atteint environ 3h après ingestion orale. Sa demi-vie est de 4 à 9h. Sa biodisponibilité orale est
supérieure à 80%. Environ 2/3 est métabolisé par le foie via la CYP3A4. Le tiers restant du
rivaroxaban ingéré par voie orale est éliminé par les reins.
3.3. Dabigatran
Le dabigatran est un inhibiteur spécifique et direct de la thrombine libre ou liée au thrombus.
Il est administré sous forme inactive, le dabigatran etexilate (prodrogue) , qui est rapidement
convertie, après métabolisme hépatique par des carboxylesterases, en dabigatran [1] [17] [18].
L'absorption intestinale du dabigatran etaxilate dépend de la p-glycoprotéine (P-gp), un
transporteur transmembranaire situé au niveau des cellules intestinales. Le pic de
concentration plasmatique est atteint environ 1.5h après ingestion orale. Cette molécule
présente une demi-vie de 14 à 17h. Sa biodisponibilité est de 7.2%. Bien que le métabolisme
soit hépatique, la cytochrome p450 n’est pas impliquée dans ce mécanisme.
L’élimination du dabigatran se fait principalement dans les reins (80%).
23
3.4. Tableau récapitulatifMédicament Classe Biodisponibilité Niveau
plasmatique maximal
Métabolisme Excrétion Volume de distribution
t ½
Dabigatran19 Inhibiteur direct de la thrombine
7 % (car l'agent actif est un promédicament)
½ -2 h Hépatique (très faible)
Rénale (85 %)Importance de la P-GP
60-70 l 12-14 h
Rivaroxaban20 Inhibiteur réversible facteur Xa
66 % (sans nourriture) > 80 % (avec de la nourriture)
2-4 h Hépatique via CYP3A4
Rénale (33 % sous forme inchangée et 33 % métabolite inactif) Fécale (33 %)
~ 50 l 7-11 h (mais les effets sur le facteur Xa durent 24 h)
Apixaban21 Inhibiteur réversible facteur Xa
50 % 3-4 h Hépatique via CYP3A4
Rénale (27 %) Fécale (50 %)
~ 17-26 l 13 h
III.4. Indications et posologie des NACO
Indications
24
Arrivés sur le marché en France en 2008 initialement dans la prévention des événements
thrombo-emboliques veineux en chirurgie programmée de la hanche et du genou [1], les
indications des NACO ont été élargies en 2011 et 2012 au traitement des accidents thrombo-
emboliques et à la prévention des accidents vasculaires cérébraux (AVC) et des embolies
systémiques chez les patients adultes avec fibrillation auriculaire non valvulaire ayant un ou
plusieurs facteurs de risque vasculaire associés.
Ainsi, les grandes indications validées par l’HAS en France en 2014 sont les suivantes [19]
[20] [21] [22] :
- Prévention primaire des événements thrombo-emboliques veineux chez les patients
adultes ayant bénéficié d’une chirurgie programmée pour prothèse totale de hanche
ou de genou.
- Traitement des accidents thrombo-emboliques (thromboses veineuses profondes,
embolies pulmonaires) : d’après la commission de transparence de l’HAS datant de
2014, seul le rivaroxaban dispose de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le
traitement des thromboses veineuses profondes (TVP), des embolies pulmonaires (EP)
non grave et dans la prévention de leur récidive chez l’adulte
- Prévention de l’AVC et de l’embolie systémique chez les patients adultes présentant
une fibrillation atriale non valvulaire associée à un ou plusieurs facteurs de risques.
En janvier puis en septembre 2015, la Commission de Transparence de la HAS a réévalué les
trois NACO [23], notamment dans la prévention des accidents vasculaires cérébraux et
embolies systémiques chez les malades ayant une fibrillation atriale non valvulaire.
Principalement devant l’absence d’antidote sur le marché, l’HAS a décidé de placer les
NACO en deuxième intention après les AVK qui constituent le traitement de 1ère ligne.
Ainsi, les NACO sont laissés aux situations suivantes :
difficultés à équilibrer l’INR malgré une bonne observance des AVK
contre-indication ou intolérance aux AVK
difficulté d’observance dans la surveillance des INR
Posologies
25
Les posologies actuellement recommandées par l’HAS, en fonction des indications et du
terrain du patient, sont les suivantes :
[20] :
En prévention de l'accident vasculaire cérébral (AVC) et de l'embolie systémique chez
les patients atteints de fibrillation atriale non valvulaire:
La posologie recommandée actuelle est de 5 mg deux fois par jour .
Adaptations posologiques :
Le moment de la prise par rapport à l’alimentation ne modifie pas son efficacité.
Insuffisance rénale :
- aucun ajustement posologique n'est nécessaire chez les patients présentant
une insuffisance rénale légère ou modérée.
- créatinine sérique >133µmol/l) et âge ≥ 80 ans ou poids corporel ≤ 60 kg :
2,5 mg deux fois par jour.
- devant l’absence de données et d’expérience clinique chez les patients ayant
une clairance de la créatinine < 15ml/min, ou chez les patients dialysés, l’apixaban
n’est pas recommandé dans ce contexte.
Insuffisance hépatique: avant de débuter un traitement par apixaban, il est nécessaire
d’évaluer la fonction hépatique.
- en cas d’atteinte hépatique avec coagulopathie associée : l’apixaban est
contre-indiqué.
- en cas d’insuffisance hépatique sévère, l’apixaban n’est pas recommandé.
Apixaban (Eliquis)®)
26
- en cas d’insuffisance hépatique légère ou modérée, aucune adaptation
posologique n’est nécessaire.
Poids corporel, sexe : aucune adaptation posologique n’est nécessaire
Interactions médicamenteuses : la dose doit être réduite à 2,5 mg chez les patients qui
prennent de puissants inhibiteurs doubles des systèmes de la CYP3A4 et de la P-gp (le
kétoconazole, l'itraconazole, le ritonavir, la clarithromycine)
[21] :
Patients bénéficiant d’une chirurgie programmée pour prothèse totale de genou :
La posologie recommandée de dabigatran est de 220 mg par jour, soit 2 gélules de 110 mg en
une fois par jour. Il est recommandé d’instaurer le traitement par voie orale à la posologie
d’une seule gélule 1 à 4 heures après la fin de l'intervention chirurgicale puis de poursuivre à
la posologie de 2 gélules en une prise par jour pour une durée totale de traitement de 10 jours.
Patients bénéficiant d’une chirurgie programmée pour prothèse totale de hanche :
La posologie recommandée de dabigatran est de 220 mg par jour, soit 2 gélules de 110 mg en
une prise. Il est recommandé d’instaurer le traitement par voie orale à la posologie d’une seule
gélule 1 à 4 heures après la fin de l'intervention chirurgicale puis de poursuivre à la posologie
de 2 gélules en une prise par jour pour une durée totale de traitement de 28 à 35 jours.
Adaptations posologiques
Pour les groupes de patients suivants, la posologie recommandée de dabigatran est de 150 mg
par jour, soit 2 gélules de 75 mg en une prise :
• patients présentant une insuffisance rénale modérée (clairance de la créatinine, ClCr 30-50
mL/min)
• patients traités de façon concomitante par le vérapamil, l’amiodarone, la quinidine (des
inhibiteurs faibles à modérés de la P-glycoprotéine)
Dabigatran (Pradaxa
27
• patients âgés de 75 ans ou plus.
En prévention des AVC/ES chez les patients ayant une FANV :
La dose quotidienne recommandée de dabigatran est de 300 mg, soit une gélule de 150 mg
deux fois par jour. Le traitement doit être poursuivi au long cours.
Adaptations posologiques :
Pour les deux groupes de patients suivants, la dose recommandée de dabigatran est de 220 mg
par jour, soit 1 gélule de 110 mg deux fois par jour :
• patients âgés de 80 ans ou plus
• patients traités de façon concomitante par du vérapamil
Pour les groupes suivants, la dose quotidienne de dabigatran de 300 mg ou 220 mg doit être
choisie selon le risque thromboembolique et le risque de saignement :
• patients âgés de 75 à 80 ans
• patients présentant une insuffisance rénale modérée
• patients présentant une gastrite, une œsophagite ou un reflux gastro-œsophagien
• autres patients présentant un risque augmenté de saignement
[22] :
Le rivaroxaban doit être pris avec des aliments afin d’optimiser sa biodisponibilité.
En prévention des événements thromboemboliques veineux en chirurgie programmée
La dose recommandée est de 10 mg de rivaroxaban en une prise orale quotidienne. La dose
initiale doit être prise 6 à 10 heures après l'intervention.
Concernant la durée du traitement:
- en cas d’intervention chirurgicale majeure de la hanche, une durée de traitement de 5
semaines est recommandée.
Rivaroxaban (Xarelto®) ®)
28
- en cas d’intervention chirurgicale majeure du genou, une durée de traitement de 2 semaines
est recommandée.
En prévention des accidents vasculaires cérébraux et des embolies systémiques liés à
la fibrillation atriale non valvulaire :
La dose recommandée est de 20 mg en une seule prise par jour. Le traitement par rivaroxaban
doit être poursuivi aussi longtemps que le bénéfice en termes de prévention des AVC et des
embolies systémiques prévaut sur le risque de saignement.
En traitement et prévention des récidives des thromboses veineuses profondes et des embolies pulmonaires :
La dose recommandée pour le traitement initial des TVP ou des EP en phase aiguë est de
deux prises par jour de 15 mg pendant les 3 premières semaines, puis de 20 mg en une seule
prise par jour pour la poursuite du traitement et la prévention des récidives sous forme de
TVP et d'EP.
La durée du traitement est de trois à six mois.
Adaptations posologiques :
Dans toutes les indications :
Insuffisance rénale :
- aucun ajustement posologique n'est nécessaire chez les patients atteints d'insuffisance
rénale légère (clairance de la créatinine de 50 à 80 ml/min).
- en cas d'insuffisance rénale modérée (clairance de la créatinine de 30 à 49 ml/min)
ou sévère (clairance de la créatinine de 15 à 29 ml/min), les posologies recommandées sont
les suivantes :
o Pour la prévention des AVC et des embolies systémiques chez les patients
atteints de fibrillation atriale non valvulaire, la dose recommandée est de 15 mg en une
seule prise par jour.
o Pour le traitement des TVP, le traitement des EP et la prévention des
récidives sous forme de TVP et d'EP : la posologie du rivaroxaban est de deux prises
29
par jour de 15 mg pendant les 3 premières semaines. Ensuite, la dose recommandée est
de 20 mg en une seule prise par jour. Une diminution de la dose de 20 mg en une seule
prise par jour à la dose de 15 mg en une seule prise par jour doit être envisagée si le
risque de saignement du patient prévaut sur le risque de récidive sous forme d'EP et de
TVP
- en cas d’insuffisance rénale très sévère (clairance de la créatinine est < 15 ml/min) : le
rivaroxaban n’est pas recommandé.
Aucun ajustement posologique n’est préconisé selon l’âge, le poids ou le sexe.
Tableau récapitulatif
Médicament Indications Posologie Modifications i>mportantes de posologie du médicament
Apixaban Fibrillation atriale
5 mg deux fois par jour
Diminuer la dose à 2,5 mg si deux ou plusieurs des éléments suivants sont présents :-Âge ≥ 80 ans - Poids corporel ≤ 60 kg - Créatinine sérique ≥ 133 micromol/l - Contre-indiqué si ClCr < 15 ml/min- Diminuer la dose à 2,5 mg avec le kétoconazole - Éviter d'utiliser avec la rifampicine
Traitement de TVP et de l'embolie pulmonaire
5 mg deux fois par jour pendant 7 jours puis 5 mg deux fois par jour
Rivaroxaban Fibrillation atriale
20 mg par jour Utiliser 15 mg si ClCr 15-50 ml/min- Ne pas utiliser si ClCr < 15 ml/min - Éviter avec les inducteurs de la P-gp et les inhibiteurs et inducteurs puissants du CYP3A4 (kétoconazole, fluconazole, ritonavir, clarithromycine, érythromycine)
Traitement de TVP et de l'embolie pulmonaire
30 mg par jour pour 3 semainespuis20 mg par jour
- 15 mg par voie orale deux fois par jour pendant 21 jours puis 15 mg par jour si ClCr 15-50 ml/min - Éviter avec les inducteurs de la P-gp et les inhibiteurs et inducteurs puissants du CYP3A4 (kétoconazole, fluconazole, ritonavir, clarithromycine, érythromycine)
30
Dabigatran Fibrillation atriale
150 mg deux fois par jourou 110 mg deux fois par jour
- Posologie de 110 mg deux fois par jour est approuvée par l'EMA, mais pas par la FDA- Peut être considéré si ClCr est de 30-50 ml/min et le patient est sous inhibiteur puissant de la P-gp- Contre-indiqué si ClCr < 30 ml/min ou si le patient est sous hémodialyse
III.5. Effets indésirables
5.1. Risque hémorragique
Le principal risque lié aux NACO est, comme pour les AVK, le risque hémorragique. Celui-ci
peut apparaitre sous plusieurs formes [1] :
- hémorragies graves : hémorragie ou hématome intracérébral, hématome du psoas,
hémorragie intra-abdominale, hémorragie intra-articulaire.
- hémorragies non graves : hématome, épistaxis, gingivorragie
Plusieurs situations sont susceptibles d’accroitre le risque hémorragique, notamment : l’âge
du patient (patients âgés), des pathologies associées, une insuffisance rénale, une insuffisance
hépatique, le poids du patient (faible poids corporel), d’éventuelles interactions
médicamenteuses, une association avec d’autres traitements anticoagulants ou agents
antiplaquettaires, des interventions associées à un risque hémorragique.
Les différents essais cliniques réalisés ont montré que les incidences des événements
hémorragiques étaient comparables entre les NACO et la warfarine [20] [21] [22]. Cependant,
il a été observé que les NACO étaient associés à des taux d’hémorragies intracrâniennes plus
faibles que la warfarine, mais des taux d’hémorragies gastro-intestinales plus élevés
Gestion des hémorragies sous NACO :
31
Aucun antidote spécifique au rivaroxaban et à l’apixaban n’est actuellement disponible sur le
marché.
Une gestion des hémorragies pour ces deux NACO est proposée par le Goupe d’Interêt en
Hemostase Périopératoire [24] :
Concernant le dabigatran, depuis 2016, il existe un antidote : le PRAXBIND [25,26].
Son principe actif, l'idarucizumab, est un fragment d'anticorps monoclonal humanisé (Fab)
présentant une très forte affinité avec le dabigatran dont il est capable de neutraliser l'effet
antithrombotique. Après avoir bénéficié d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU),
Praxbind est désormais commercialisé dans les hôpitaux français. Son utilisation est réservée
à l'usage hospitalier et en situation d'urgence. En pratique, le Praxbind est administré à la dose
de 5 g sous forme de 2 perfusions intraveineuses consécutives de 5 à 10 minutes chacune, ou
sous forme de bolus IV. Une deuxième dose de Praxbind peut être nécessaire dans certaines
situations.
5.2. Autres effets indésirables
Indépendamment du risque hémorragique, d’autres effets indésirables [1] [20] [21] [22] ont
été mis en évidence avec les NACO au cours des essais cliniques et après leur mise sur le
marché :
Effets gastro-intestinaux
Des nausées ont été fréquemment rapportées avec le dabigatran, le rivaroxaban et
l’apixaban.
Des diarrhées et les douleurs abdominales ont été fréquemment rapportées avec le
dabigatran.
32
Des cas d’ulcère de l’œsophage associés à une mauvaise administration du produit
(ouverture des gélules, administration avec une faible quantité d’eau) ont été rapportés
avec le dabigatran. Ainsi, les gélules doivent être avalées entières avec un verre d’eau,
afin de faciliter la délivrance au niveau gastrique et la tolérance gastro-intestinale.
Effets hépatiques
Des anomalies de la fonction hépatique ont été observées avec le dabigatran, le rivaroxaban et
l’apixaban, avec des fréquences différentes, respectivement fréquentes, rares et peu
fréquentes. Des augmentations des ALAT et des ASAT ont été fréquemment observées avec
le rivaroxaban et peu fréquemment observées avec la dabigatran et l’apixaban. Ces produits
font l’objet d’un suivi renforcé de pharmacovigilance concernant les atteintes hépatiques.
Quelques cas d’hépatites cholostatiques ont été rapportés avec le rivaroxaban.
Thrombopénie
Les cas de thrombopénies ont été peu fréquemment rapportés avec le dabigatran, le
rivaroxaban et l’apixaban.
Effets cutanés
Des cas de prurit/éruption cutanée ont été peu fréquemment rapportés avec le
rivaroxaban.
De rares cas d’angiœdèmes et de réactions anaphylactiques ont été rapportés avec le
dabigatran. Quelques cas d’hypersensibilité à type de DRESS, vascularite, ainsi que
des réactions anaphylactiques et anaphylactoïdes ont été rapportés. Ces effets
indésirables font actuellement l’objet d’un suivi renforcé de pharmacovigilance.
Insuffisance rénale
Des cas d’insuffisance rénale ont été peu fréquemment rapportés avec le rivaroxaban et avec
le dabigatran. Ces derniers étant peu documentés, le lien de causalité entre la prise du
dabigatran et la survenue de ces atteintes ne peut être établi à l’heure actuelle, mais ce risque
est étroitement surveillé.
III.6. Contre-indications
33
Contre-indications générales :
- Hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients
- Saignement évolutif cliniquement significatif
- Atteinte hépatique associée à une coagulopathie et à un risque de saignement cliniquement
significatif.
- Traitement concomitant par tout autre traitement anticoagulant
- Insuffisance rénale avec une clairance de la créatinine selon la formule de Cockroft
<30ml/min pour le Dabigatran et <15ml/min pour le rivaroxaban
Contre- indications communes au rivaroxaban et au dabigatran
- Grossesse et allaitement : Les études de phase II, réalisées sur l’animal, ont en effet mis en
évidence une toxicité sur la reproduction, ainsi qu’un passage dans le lait maternel. Le
traitement par apixaban n’est pas recommandé dans ces indications, par mesure de prudence
et en l’absence de données disponibles.
- Risque significatif de saignement majeur, telle qu’un ulcère gastro-intestinal récent, tumeurs
malignes à haut risque de saignement, lésion cérébrale, chirurgie cérébrale, rachidienne ou
ophtalmique récente, varices œsophagiennes, malformations artérioveineuses, anévrysmes
vasculaires.
Contre-indication spécifique au dabigatran (et reste une non indication pour les autres
molécules)
La prévention de l’AVC chez un patient porteur d’une valve cardiaque mécanique : l’étude
REfALIGN a été stoppée prématurément après un surcroît de morbidité par accidents
hémorragiques et thromboemboliques (AVC et thrombose de valve). Cette étude comparait le
dabigatran 150mg 2 fois par jour voire 300mg 2x/jour à la warfarine chez les patients ayant
bénéficié d’une chirurgie de remplacement de valve mécanique cardiaque.
III.7. Interactions médicamenteuses
34
Différentes protéines sont impliquées dans les interactions médicamenteuses avec les NACO
[1] :
La P-gp
Les NACO ont des caractéristiques pharmacocinétiques stables et prévisibles. Cependant, la
pharmacocinétique peut être sensiblement modifiée par les traitements concomitants. Il peut
en résulter des concentrations insuffisantes ou excessives du médicament. Les protéines de
transport, situées sur les membranes cellulaires, sont essentielles pour déterminer à la fois les
taux systémiques et intracellulaires du médicament. La P-glycoprotéine (P-gp) est un
transporteur dont l'effet sur les niveaux de nombreux médicaments cardiovasculaires a été
prouvé. La P-gp se trouve dans de nombreux organes mais les transporteurs dans les systèmes
entérique, rénal et hépatique sont les plus pertinents pour la pharmacocinétique des NACO.
La P-gp dans le système gastro-intestinal limite l'absorption des médicaments en transportant
ces médicaments hors des cellules vers la lumière intestinale. Les transporteurs de P-gp dans
le foie et les tubules rénaux facilitent l'élimination des médicaments. Par conséquent, dans les
systèmes rénaux ou hépatiques, les inhibiteurs de la P-gp (amiodarone, vérapamil, quinidine,
kétoconazole et clarithromycine) peuvent augmenter les concentrations de médicaments,
tandis que les inducteurs de la p-gp (rifampicine, millepertuis et carbamazépine) peuvent
diminuer les niveaux des médicaments et leur efficacité .Ces effets vont cependant dépendre
de l'intensité de la modulation d'activité de la p-gp lors de la prise du traitement concomitant.
De même, l'influence de la p-gp est plus ou moins importante entre les NACO. Ceci explique
qu'un même médicament n'a pas toujours la même influence sur tous les NACO.
Les cytochromes
Le système hépatique joue un rôle majeur dans l'inactivation et la clairance de nombreux
médicaments. Le métabolisme des médicaments se fait par les enzymes de foie appartenant
notamment au système des cytochromes P450. Ce système comporte un certain nombre
d'enzymes de dégradation, appelées cytochromes (CYP), qui peuvent métaboliser plusieurs
composés exogènes ou endogènes. Les médicaments peuvent aussi affecter le niveau
d'activité des CYP par leur inhibition ou leur induction. Certains inhibiteurs d'enzymes CYP
(par exemple, dronédarone, agents antifongiques azolés, rifampicine) diminuent la clairance
des NACO métabolisés dans le foie. Pour les traitements anticoagulants, une diminution de la
clairance peut augmenter le degré d'anticoagulation, et donc le risque de complications
hémorragiques. En revanche, les médicaments qui induisent les enzymes CYP peuvent
35
augmenter la clairance des NACO métabolisés par le foie, ce qui diminue le degré
d'anticoagulation et donc le risque de complications thrombotiques.
Impact sur le CYP3A4 : Un médicament peut être un substrat, un inhibiteur ou un inducteur
du CYP 3A4. Tous les NACO sont des substrats du CYP3A4 mais l’affinité diffère selon la
molécule (degré d’affinité pour le CYP 3A4 : dabigatran < rivaroxaban = apixaban). Plus un
autre médicament agit comme inhibiteur ou inducteur enzymatique du CYP 3A4, plus
l’interaction avec le NACO sera importante et plus l’impact sur les concentrations
plasmatiques sera significatif
En pratique, le Dabigatran ne devrait pas etre prescript en association avec des médicaments
qui sont de forts inducteurs ou inhibiteurs de la P-gp (comme la quinine, kétoconazole). Les
inhibiteurs du FXa ne devraient pas être prescrits en association avec les médicaments qui
sont de forts inducteurs ou inhibiteurs de la P-gp et dy CYP3A4 et évités en association avec
des inhibiteurs modérés de la CYP3A4.
Ci-dessous, un tableau synthétisant les principales interactions médicamenteuses [1].
36
37
Couleurs : Rouge = contre-indiqué ; Orange = déconseillé ; Jaune = Prudence et adaptation posologique
Inhibiteurs de la P-gp
Amiodarone Clarithromycine Kétoconazole Quinidine Vérapamil
Inducteurs de la P-gp
Carbamazépine Rifampine Millepertuis
III.8. Relais entre anticoagulants
Dans certaines situations, un relais entre classes d’anticoagulants peut être nécessaire.
Une anticoagulation continue adéquate doit être assurée lors du relais de tout anticoagulant
par un autre anticoagulant, pour éviter tout risque de sur-anticoagulation (risque
hémorragique) ou de sous anticoagulation (risque thrombotique) [27] [28].
Relais NACO-AVK
Pour le rivaroxaban et l’apixaban
Le traitement par NACO doit être poursuivi pendant au moins 2 jours après le début du
traitement par AVK. Après 2 jours de co-administration de l’AOD et de l’AVK, l’INR est
mesuré à distance maximale de la dernière dose d’AOD (soit juste avant la prise suivante
d’AOD). La co-administration est poursuivie jusqu’à obtenir un INR ≥ 2,0.
Pour le dabigatran
Le traitement par AVK est débuté selon la fonction rénale :
-ClCr ≥ 50 mL/min : les AVK doivent être débutés 3 jours avant l’arrêt du dabigatran
-30 ≤ ClCr < 50 mL/min : les AVK doivent être débutés 2 jours avant l’arrêt du
dabigatran.
38
Le dabigatran pouvant contribuer à l’augmentation de l’INR, avant toute mesure de l’INR, un
délai d’au moins deux jours doit être respecté après la dernière prise de l’AOD.
39
Relais AVK-NACO
Le traitement par un AVK doit dans un premier temps être arrêté. Le traitement par NACO est
initié dès que l’INR est :
- < 2,0 pour l’apixaban et le dabigatran dans la prévention des AVC et des embolies
systémiques
- < 2,5 pour le rivaroxaban dans le traitement des TVP, EP et en prévention des
récidives
- < 3,0 pour le rivaroxaban dans la prévention des AVC et des embolies systémiques.
L’INR doit être mesuré juste avant la prise suivante d’AOD pendant la période de co-
administration doit être remesuré 24 heures après la dernière prise d’AOD (c’est-à-dire au
début du traitement par AVK seul) pour s’assurer d’une anticoagulation adéquate.
NACO vers anticoagulant parentéral
Le passage d’un AOD à un anticoagulant par voie parentérale peut se faire à l’heure prévue
de la dose suivante du NACO
Anticoagulant parentéral vers NACO
Chez les patients recevant un anticoagulant parentéral, le traitement par NACO doit être
débuté à l’heure prévue pour l’administration suivante du médicament parentéral (héparines
de bas poids moléculaire par exemple) ou au moment de l’arrêt du médicament parentéral en
cas d’administration continue (héparine non fractionnée intraveineuse par exemple).
40
Passage d’un NACO à un autre
Le passage d’un NACO à un autre peut se faire à l’heure prévue de la prise du premier.
III.9. Surveillance biologique
L’utilisation du dabigatran, du rivaroxaban et de l’apixaban ne requiert pas de suivi de l’activité
anticoagulante en routine. Cependant, dans certaines situations, la mesure de l’anticoagulation liée à
ces molécules peut être utile [24] [29].
Les principales indications d’une surveillance biologique de l’activité coagulante des NACO sont les
suivantes :
41
la prise en charge des complications hémorragiques graves et de la chirurgie en urgence chez
les patients recevant un anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct.
la prise en charge des chirurgies et actes invasifs chez les patients traités au long cours par un
anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct
récurrence d’épisodes thrombotiques ou hémorragiques
avant toute procédure d’urgence
avant l’instauration d’un traitement fibrinolytique pour AVC ischémique
en cas de relais d’un anticoagulant par un autre
chez les patients présentant des facteurs de risque âge, insuffisance rénale et/ou
hépatique, interactions médicamenteuses)
chez les patients avec un poids corporel extrême poids < 50 kg et > 120 kg)
chez les patients avec un risque hémorragique élevé
contrôle des tests de laboratoire chez les patients recevant un traitement antagoniste
contrôle de compliance.
Les tests:
Tests spécifiques :
Il existe des tests d’hémostase spécifiques permettant de mesurer en urgence la concentration
plasmatique des AOD [18] [24] [29]. Ces tests (Hémoclot, Biophen DTI ; ECA-T,
Diagnostica Stago pour le dabigatran ; Biophen-DiXal, Hyphen Biomed ; STA Liquid anti-
Xa, Diagnostica Stago pour le riva-roxaban) mesurent le taux plasmatique de ces
anticoagulants, exprimé en concentration pondérale (ng/ml). Ils sont adaptés à la mesure des
concentrations dans un domaine de valeurs entre 500 et 50 ng/ml comprenant la concentration
maximale moyenne (Cmax, deux à quatre heures après la prise orale du médicament) et la
concentration résiduelle moyenne (Cmin juste avant la prise suivante).
On distingue
les tests quantitatifs spécifiques au Rivaroxaban et à l’Apixaban : l’anti-Xa
chromogénique.
les tests quantitatifs spécifiques au Dabigatran :
- temps de thrombine modifié
- l’anti-IIA direct
Tests non spécifiques :
42
Les tests usuels sont également modifiés par les NACO mais ne peuvent être utilisés pour leur
surveillance.
Tableau des différents tests biologiques et leurs modifications selon le NACO [24] [29] :
43
Tableau indicatif des valeurs de la Cmax en fonction des NACO et des indications :
Tableau indicatif des conduites à tenir selon le résultat des concentrations des NACO avant
une intervention
44
IV. Matériel et méthode
Recueil de données
Nous avons utilisé les bases de données Pub Med et Cochrane.
La recherche s’est faite en français et en anglais.
Concernant les champs de recherche, nous avons utilisé les termes suivants en combinaison :
-NACO/new oral anticoagulant
-Rivaroxaban
-Apixaban
-Dabigatran
-Chirurgie/Surgery
-Gestion péri-opératoire/ peri-operative management
Puis, selon la chirurgie, nous associerons ces mots clés avec les noms des procédures les plus
fréquentes et auxquelles les médecins généralistes sont le plus susceptibles d’être confrontés :
Chirurgie urologique
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « urology », « prostate biopsy », et
« transurethral resection of the prostate ».
Chirurgie plastique et dermatologique
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « plastic surgery », « dermatology »,
« cutaneous surgery » et « cutaneous biopsy ».
Chirurgie ORL
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « ear neck throat surgery » et
« tonsillectomy ».
Chirurgie ophtalmologique
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « ophtalmology », « cataract»,
« glaucoma» et « occuloplastic surgery ».
45
Chirurgie orthopédique et les actes de rhumatologie
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « orthopedic surgery »,
« arthroplasty », « knee replacement », « hip replacement », « rhumatology » et
« infiltration».
Actes d’endoscopie
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « endoscopy », « coloscopy » et
« Endoscopic retrograde cholangiopancreatography».
Chirurgie dentaire :
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « dental procedures », « dental
implant » et « dentist ».
Chirurgie digestive :
Nous avons utilisé l’association de ces mots clés avec « gastrointestinal surgery », « bariatric
surgery », « cholecystectomy», « gastroenterology » et « gastroenterologist ».
Nous nous sommes intéressés aux publications depuis 2008 (date de mise sur le marché en
France des NACO) jusqu’à juin 2016.
Population
Critères d’inclusion :
Patients traités par NACO à dose curative pour les indications suivantes ayant l’AMM et
validées par l’HAS en France en 2014:
- Traitement des accidents thrombo-emboliques (TVP, EP) :
- Prévention de l’AVC et de l’embolie systémique chez les patients adultes présentant
une fibrillation atriale non valvulaire associée à un ou plusieurs facteurs de risques.
ET
Patients devant subir une chirurgie programmée quelque soit le niveau de risque
hémorragique.
46
Critères d’exclusion :
Nous avons exclu de nos recherches bibliographiques les chirurgies cardiaques et chirurgies
neurologiques car il s’agit de domaines très spécialisés dont la gestion des anticoagulants est
en principe organisée par le cardiologue et le neurologue et à laquelle le médecin généraliste
n’est que très rarement confronté en ambulatoire.
Présentation des résultats
Nous avons présenté les résultats en les classant par type de chirurgie et pour chaque chirurgie
nous avons organisé les différentes publications selon le grade de recommandation et de
niveau de preuve scientifique en se basant sur le classement proposé par l’HAS [30] :
V. Résultats
Grade des recommandations Niveau de preuve scientifique
A Niveau 1 :
Preuve scientifique établie -essais comparatifs randomisés de forte puissance -méta-analyse d’essais comparatifs randomisés
-analyse de décision fondée sur des études bien menées
B Niveau 2 : - essais comparatifs randomisés de faible puissance Présomption scientifique - études comparatives non randomisées bien menées - études de cohortes
C Niveau 3 : - études cas-témoins.
Faible niveau de preuve scientifique Niveau 4 :
- études comparatives comportant des biais importants - études rétrospectives - séries de cas - études épidémiologiques descriptives
D Niveau 5 : -avis d’experts
47
V. Résultats
V.1.Chirurgie urologique
La recherche bibliographique retrouve au total 23 articles faisant référence à la gestion des
NACO en péri-opératoire.
20 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont les chirurgies urologiques, tandis que 3 publications s’intéressent spécifiquement à
l’urologie : 2 concernaient l’urologie en général et 1 s’intéressait aux biopsies de prostate à
travers une revue de littérature.
Parmi ces 23 publications, nous retrouvons :
- 18 publications fondées sur des recommandations de sociétés savantes ou avis d’experts
constituant des recommandations grade D
- 1 étude de cas constituant une recommandation grade D
- 4 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par ordre de
recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
- European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications
[31,32,33,34,35,36,37,38,39,40,41] se basent sur les avis de cette société savante.
Les recommandations de l’EHRA concernant la gestion péri-opératoire des NACO se fondent
sur une classification du risque hémorragique. Elles distinguent :
- les interventions ne nécessitant pas systématiquement l’arrêt des NACO
- les interventions à risque hémorragique bas
- les interventions à risque hémorragique élevé
La chirurgie urologique apparait explicitement dans ces recommandations à travers 4 actes ou
interventions :
48
- les biopsies de prostate : classées dans les interventions à risque hémorragique bas
- les biopsies vésicales : classées dans les interventions à risque hémorragique bas
- les biopsies rénales : classées dans les interventions à risque hémorragique haut
- la résection trans-uréthrale de prostate (RTUP) : classées dans les interventions à risque
hémorragique haut
Ainsi, en utilisant les recommandations retrouvées au sein des ces publications reprenant
celles de l’EHRA, un schéma type de gestion péri-opératoire des NACO pour ces
interventions urologiques est proposé.
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
Actes urologiques à risque hémorragique bas :
-Biopsies de prostate-Biopsies vésicales
Actes urologiques à risque hémorragique haut :
-Biopsie rénale-Résection trans-uréthrale de prostate (RTUP)
Interruption des NACO
Clairance Dabigatran Apixaban Rivaroxaban Dabigatran Apixaban Rivaroxaban(ml/min)>80 >24h >24h >24h >48h >48h >48h
50-80 >36h >24h >24h >72h >48h >48h30-50 >48h >24h >24h >96h >48h >48h 15-30 Non indiqué >36h >36h Non indiqué >48h >48h<15 Non indiqué Non indiqué Non indiqué Non indiqué Non indiqué Non indiqué
Intervention Intervention
Reprise du NACO à 48-72h Reprise du NACO à 48h
49
- College of Chest Physician (ACCP) : plusieurs publications [31, 36, 38,42, 43] s’appuient
sur les recommandations de l’ACCP sur la gestion des NACO se fondant sur :
1. les propriétés pharmacologiques des NACO
2. la fonction rénale du patient
3. le risque thrombo-embolique du patient (évalué par le score CHADS2, les antécédents
thrombo-emboliques et la sévérité de troubles de la coagulation éventuels)
4. le risque de saignement des différentes chirurgies.
Ainsi, la question d’un relais par héparine se pose en fonction du risque thrombo-embolique
propre à chaque patient, du délai d’interruption du NACO et de la balance/bénéfice risque.
Concernant l’urologie, trois types d’interventions sont cités :
- la biopsie de prostate : considérée à risque modéré de saignement
- la biopsie rénale : considérée à haut risque de saignement
- la RTUP : considérée à haut risque de saignement
Ainsi, un algorithme de gestion péri-opératoire des NACO est proposé concernant ces 3
gestes en urologie.
50
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
Biopsie de prostate = risque modéré Biopsie rénale / chirurgie urologique =risqué élevé
CrCl >80mL/min
-Dabigatran : 24h (J-1)
-Apixaban : 24h (J-1)
-Rivaroxaban : 24h (J-1)
CrCl >80mL/min
-Dabigatran : 48h (J-2)
-Apixaban : 48h (J-2)
-Rivaroxaban : 24h (J-1)
Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
CrCl 50–80 mL/min 72h (J-3) 48h (J-2) 24h (J-1)
CrCl 30–50 mL/min 96h (J-4) 72h (J-3) 24h (J-1)
CrCl 15–30 mL/min 120h (J-5) Non indiqué 48h (J-2)
Risque thrombo-embolique
Risque bas à modéré Risque élevé
-CHADS2 < ou égal à 4 -CHADS2=5-6-pas d’antécédent d’AVC/AIT/TVP/EP dans les 3 -AVC/AIT/EP/TVP dans les 3 derniers mois derniers mois -anomalies sévères de la coagulation -anomalies non sévères de la coagulation (proteine C , S , antithrombines : anormales (FV Leyden hétérozygote/ mutation gène de la syndrome des antiphosoholipides)Prothrombine)
Risque bas à modéré Risque élevé
Délais d’interruption des NACOs <96h
Délais d’interruption des NACOs >96h
Pas de relais par Héparine
Bénéfice/risqué d’un relais par Héparine
Risque>Bénéfice Risque<Bénéfice
Relais par Héparine
INTERRUPTION DES NACOs
CHIRURGIE
Reprise des NACO à H+6 ou H+8 (si hémostase bien controlée)
Reprise des NACO à H+48 ou H+72
51
- Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) : plusieurs publications [31, 39,
44, 45, 46] reprennent le protocole de gestion péri-opératoire des NACO proposés par ce
groupe d’experts.
Ainsi, Charles-Marc Samama, Gilles Pernod, Pierre Albaladejo et al dans une publication de
2011, dans les Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation, intitulée « Chirurgies et
actes invasifs chez les patients traités au long cours par un anticoagulant oral anti-Iia et anti-
Xa direct », proposent un schéma de gestion péri-opératoire des NACO en s’appuyant,
comme ils l’affirment, sur celui proposé par l’HAS pour la gestion des AVK.
Les auteurs distinguent donc :
- Les « Chirurgies ou actes invasifs programmés à faible risque hémorragique : il s’agit des
actes pour lesquels une hémorragie, si elle survient, sera de faible abondance, non-critique par
sa localisation et/ou facilement contrôlable par des mesures simples d’hémostase mécanique.
Ces éléments doivent être appréciés en fonction de la nature de l’acte, du type d’anesthésie,
des possibilités de surveillance postopératoire et des conditions propres au patient, en
particulier la prise d’autres médicaments pouvant interférer avec l’hémostase. »
-Les « Chirurgies ou actes invasifs programmés à risque hémorragique élevé ou modéré : il
s’agit de tous les actes pour lesquels la probabilité d’un saignement cliniquement significatif
ne peut pas être exclue ou, a fortiori, toute chirurgie habituellement hémorragique ou pour
laquelle le risque hémorragique serait inacceptable. »
Ainsi, la chirurgie urologique est citée dans les chirurgies à risque hémorragique modéré sans
précision quant au type exact d’intervention.
Dans ce contexte, un arrêt des NACO à j-5 (dernière prise à 20 h) est proposé de façon
empirique sans distinction entre les NACO.
Pendant la fenêtre thérapeutique, le GIHP propose pour les chirurgies à risque hémorragique
modéré, et donc pour les chirurgies urologiques, un relais par héparine selon l’importance du
risque thrombotique pour chaque patient.
Chez les patients à risque thrombotique élevé (patients ayant un antécédent récent (< 3 mois)
de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV
récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un
antécédent cardio-embolique) : une fenêtre thérapeutique de plusieurs jours est risquée. Un
relais est impératif, par les HBPM ou l’héparine non fractionnée en cas de contre-indication à
52
celles-ci, à dose curative, administrées en deux injections sous-cutanées par jour, suivant les
modalités recommandées pour les relais des AVK.
Le traitement par une héparine sera initié 12 heures après la dernière prise du NACO, si celui-
ci est administré deux fois par jour, ou 24 heures après si celui-ci est administré 1 fois par
jour. Le traitement par héparine sera interrompu en préopératoire (dernière administration
d’HBPM 24 heures avant la chirurgie, dernière administration d’héparine sous-cutanée
12 heures avant la chirurgie) et repris en postopératoire lorsque le risque hémorragique sera
considéré comme contrôlé.
Lorsque le NACO pourra être repris sans risque, la première dose orale sera administrée
12 heures après la dernière administration sous-cutanée d’HBPM. Du fait de l’action très
rapide des NACO , ceux-ci ne devront jamais être administrés simultanément à une héparine,
quelle que soit la dose de celle-ci. Contrairement aux AVK, il ne doit donc y avoir aucun
chevauchement entre le traitement par l’héparine et le NACO.
Chez les patients à risque thrombotique modéré : le relais préopératoire par une héparine peut
être considéré comme optionnel. Si le traitement par NACO ne peut être repris rapidement du
fait de l’indisponibilité de la voie orale pour plusieurs jours, le relais par une héparine à dose
curative est conseillé, dès que le risque hémorragique est contrôlé.
La reprise postopératoire du traitement AOD à dose curative est conditionnée par la
disponibilité de la voie orale et surtout par le risque hémorragique postopératoire, chirurgical
ou lié à la technique anesthésique. Les auteurs proposent une reprise à 72h des NACO.
Les auteurs précisent qu’il s’agit de recommandations basées sur des avis d’experts et donc de
faible niveau de preuve et sujettes à de nombreuses controverses.
53
Algorithme de gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies urologiques selon le GIHP
Chirurgie urologique programmée : risqué hémorragique modéré
Arrêt des NACO à J-5
Risque thrombotique faible ou modéré
Risque thrombotique élevé
antécédent récent (< 3 mois) de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un antécédent cardioembolique
Relais par héparine :
-12h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 2 prises
-24h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 1 prise
Relais par héparine optionnel, si indisponibilité de la voie orale pendant plusieurs jours
-Reprise du NACO à H72 post-opératoire
-Dernière injection d’HBPM H12 avant reprise du NACO
54
Etude de cas :
La recherche bibliographique retrouve également une étude de cas [47] concernant la gestion
du Dabigatran en particulier en péri-opératoire d’interventions chirurgicales dont une
chirurgie urologique et plus précisément l’orchidectomie.
La publication d’Elizabeth Travis et Jane Strang intitulée « Peri-opérative management of
Dabigatran : the Nelson experience to date » , datant d’août 2012 et publiée dans le New
Zealand medical journal, rapporte une étude de cas réalisée entre le 1er juillet 2011 et le 12
décembre 2012 au sein des hôpitaux Nelson et Wairau en Nouvelle-Zélande .
Les auteurs ont recherché, en utilisant la liste de dispensation des médicaments par la
pharmacie hospitalière, les patients sous Dabigatran et sélectionné ceux ayant subi une
intervention chirurgicale.
Le but était d’évaluer la façon dont était gérée le NACO en péri-opératoire.
Les critères de jugements principaux étaient : les complications post-opératoires
(principalement le saignement) et le délai d’arrêt et de reprise du Dabigatran.
Ainsi, 27 patients sous Dabigatran avaient séjourné au sein des deux hôpitaux.
Parmi eux, 4 patients avaient nécessité une intervention chirurgicale.
Parmi ces 4 patients, 1 était opéré d’une orchidectomie.
Le Dabigatran a été arrêté 24h avant l’intervention et repris à 24h post-opératoire.
Le suivi post-opératoire ne montrait pas de complication.
Il s’agit là d’une étude de cas dont le niveau de preuve est très faible.
Aucune indication n’est donnée quant au risque thrombotique intrinsèque au patient ni quant à
sa fonction rénale. Par ailleurs, la durée du suivi post-opératoire n’est pas indiquée et nous se
savons pas si seul le risque hémorragique post-opératoire immédiat a été étudié ou sur une
période plus longue.
Il conviendrait de réaliser une étude concernant un nombre significatif de patients et beaucoup
plus précise.
Recommandations grade B :
La recherche bibliographique retrouve 4 grandes études de cohorte concernant la gestion péri-
opératoire des NACO pour les chirurgies de façon générale et citant la chirurgie urologique.
55
Dans une étude de cohorte [48] publiée en 2014 dans l’European Heart Journal
intitulée « Peri-interventional management of novel oral anticoagulants in daily care:
results from the prospective Dresden NOAC registry », Jan Beyer-
Westendorf, Vera Gelbricht , Kati Förster et al se sont intéressés, au sein d’une
population de patients, à la gestion des NACO en péri-opératoire.
En effet, cette étude prospective large, réalisée dans le district de Dresden (Saxony) en
Allemagne, a impliqué plus de 230 médecins, généralistes et hospitaliers, qui ont sélectionnés
des patients sous NACO entre le 1er octobre 2011 et le 15 mai 2013.
Les critères d’inclusion dans l’étude étaient :
-une indication à un traitement par NACO incluant : fibrillation auriculaire, TVP, EP et autres
indications
-traitement anticoagulant pour au moins 3 mois
-âge>18 ans
-consentement écrit
-disponibilité pour un suivi par téléphone
Les patients étaient suivis par des « visites » téléphoniques 30 jours après l’inclusion puis tous
les trimestres pour recueillir les informations sur l’efficacité, la sureté et la gestion des NACO
dans les soins quotidiens.
Pour tous les patients ayant subi une intervention chirurgicale pendant le suivi, le médecin
généraliste et le chirurgien étaient contactés.
Les compte-rendus, dossiers hospitaliers, résultats biologiques, certificats de décès et tous les
documents en rapport avec l’acte chirurgical étaient collectés.
Par ailleurs, plusieurs informations relatives à l’acte chirurgical et à la gestion des NACO
étaient également collectés et notamment :
-type, jour et heure de la dernière prise du NACO avant la chirurgie
-type, jour et résultats de la chirurgie
-type d’anti-coagulation avant la chirurgie et dosage (si relais par Héparine)
-jour et heure exacte de reprise des NACO après l’intervention (si le NACO était arrêté)
-taux, sévérité et gestion des évènements cardio-vasculaires majeurs et saignements péri-
opératoires jusqu’à J+30 +/- 5 jours.
56
Concernant la classification des types de chirurgies, les auteurs ont repris les 3 catégories
d’interventions définies par l’ACCP et l’EHRA selon la sévérité du traumatisme tissulaire et
le risque de saignement péri-opératoire, à savoir :
- les chirurgies à risque minimal (petit traumatisme tissulaire)
- les chirurgies à risque mineur (petit traumatisme tissulaire mais risque significatif de
saignement)
- les chirurgies à risque majeur (traumatisme tissulaire significatif et haut risque de
saignement).
Ainsi, à travers une annexe décrivant en détails les différentes chirurgies, la chirurgie
urologique apparait à travers 2 interventions :
- la circoncision : classée dans les chirurgies à risque minimal (2 interventions réalisées)
- la RTUP : classée dans les chirurgies à risque mineur (36 interventions réalisées)
Au total, 2179 patients ont été inclus. Parmi eux, 595 patients (27.3%) ont subi au total 863
interventions chirurgicales avec parmi elles 135 (15.6%) chirurgies minimales dont 2
circoncisions, 641 (74.3%) chirurgies mineures dont 36 interventions transuréthrale ou
transvaginales, et 87 (10.1%) chirurgies majeures.
Le profil des patients étaient comparables dans chaque groupe d’interventions, mais les
patients devant subir une intervention chirurgicale majeure étaient plus susceptibles d’avoir
des antécédents coronariens et d’avoir un traitement anti-agrégeant associé.
La plupart des chirurgies étaient réalisées chez des patients sous Rivaroxaban (76%), suivi du
Dabigatran (23.5%) et de l’Apixaban (0.5%).
L’indication première des NACO était la prévention des AVC sur ACFA (81.1%), suivie de la
TVP (17.1%) et des autres indications (1.7%).
Le principal critère d’efficacité était la non survenue d’un évènement cardio-vasculaire dont :
-syndrome coronarien aigu (SCA), incluant angor, SCA ST+ et SCA ST-
-AVC ou AIT ou embole systémique
-TVP ou EP
Le principal critère de jugement de la sécurité de la gestion du NACO était le taux de
saignement majeur selon la définition de la société internationale de thrombose et
d’hémostase caractérisé par :
57
- une transfusion documentée d’au moins 2 CGR
- une baisse de l’Hb >2g/l
- une reprise chirurgicale due au saignement
-saignement dans une région critique (intracranien,intra-oculaire, intra-articulaire,
rétroperitoneal, gastro-intestinal)
- saignement fatal
Le taux d’évènements était évalué jusqu’à J+30 +/-5 post-opératoire.
Plusieurs interventions sur un même patient étaient évaluées séparément.
Sur un total de 863 chirurgies chez les patients sous NACO, 9 évènements cardiovasculaires
majeurs se sont produits jusqu’à J+30 +/-5 post-opératoire avec 4 AVC, 1 AIT, 2 EP, 1 TVP
proximale et 1 mort subite sans cause retrouvée chez un patient VTE.
5 des évènements cardiovasculaires majeurs sont arrivés chez des patients ayant subi des
interventions mineures, les 4 autres sont arrivées après des chirurgies majeures.
Les évènements cardiovasculaires majeurs sont arrivés significativement plus souvent chez
des patients ayant subi une chirurgie majeure (CI 95%, 4.6%) par rapport à ceux ayant subi
une chirurgie minimale (0%, CI 95%, p=0.046) ou une chirurgie mineure (0.8%, CI 95%,
p=0.030).
Jusqu’à J30 +/-5 post-opératoire, les saignements majeurs sont arrivés après 10 interventions
sur 863 et étaient associés à une chirurgie mineure dans 3 cas et une chirurgie majeure dans 7
cas.
Ainsi, un saignement majeur survenait de façon significative plus souvent après une chirurgie
majeure (8%) par rapport à une chirurgie minimale (0%) et mineure (0.5%).
Au total, 46 complications hémorragiques ont été observées, 14 après une chirurgie majeure,
29 après une chirurgie mineure et 3 après une chirurgie minimale.
Les chirurgies majeures ont engendré plus de complications hémorragiques (mineures et
majeures) (16.1%) par rapport aux chirurgies mineures (4.5%) et minimales (2.2%).
Enfin, pas de différence significative n’a été observée quant aux critères d’efficacité et de
sureté entre les patients sous Rivaroxaban ou Dabigatran.
Concernant la gestion péri-opératoire des anticoagulants lors des 863 interventions, les NACO
ont été poursuivis dans 187 cas (21.7%) , interrompus sans relais héparine dans 419 cas
58
(48.6%) ou interrompus avec relais par héparine à dose prophylactique dans 63 cas (7.3%) ou
curative dans 194 cas (22.5%).
En cas d’interruption du NACO, la durée moyenne d’arrêt était de 2 jours avant l’intervention
et la reprise se faisait en moyenne à J1 post-opératoire (arrêt au total de 3 jours).
L’utilisation d’un relais héparine augmentait significativement avec la sévérité de la chirurgie
(10.4% ; 27.8% ; 74.7% respectivement pour les chirurgies minimales, mineures et majeures).
Ainsi, le taux d’événements cardiovasculaires majeurs était similaire pour les patients sans
relais héparine (0.8%) et avec relais héparine (1.6%).
Les taux de saignements mineurs étaient similaires pour les patients avec ou sans relais
héparine.
Au contraire, les complications hémorragiques majeures étaient significativement plus
fréquents chez les patients ayant subi un relais par Héparine (2.7% vs 0.5% sans relais) ce qui
a engendré par corrélation à un taux plus élevé de saignements majeurs après une chirurgie
majeure.
Une analyse a été menée pour évaluer les facteurs de risques potentiels des évènements
cardiovasculaires d’abord et des complications hémorragiques majeures ensuite.
Seuls un antécédent de diabète et une chirurgie majeure étaient les facteurs de risque
indépendant des évènements cardiovasculaires. Le relais par héparine n’affectait pas
significativement le risque.
Concernant les saignements majeurs, les chirurgies majeures et le relais héparine étaient les
seuls facteurs de risque indépendants. Si les chirurgies majeures et non majeures étaient
étudiées séparément, le relais héparine n’était pas un facteur de risque indépendant de
saignements majeurs.
Selon les auteurs, le fait que les patients subissant des chirurgies majeures avaient
significativement plus de pathologies coronariennes et donc de traitements antiagrégants
associés que les patients subissant des chirurgies non majeures, peut expliquer le taux
d’évènements plus important chez les patients subissant des interventions majeures.
Par ailleurs, les NACO n’étaient pas interrompus dans 22% des cas notamment pour les
chirurgies mineures.
59
30% des procédures étaient réalisées avec un relais Héparine.
Selon les auteurs, leur publication constitue la 1ère étude prospective recommandant l’arrêt des
NACO sans relais héparine quelque soit le type de chirurgie.
En effet, aucune différence dans le taux d’évènements cardiovasculaires n’était retrouvé
tandis que les taux complications hémorragiques majeures étaient significativement plus
importants chez les patients ayant subi un relais par héparine, surtout dans les cas de
chirurgies majeures.
Les auteurs comparent les résultats de cette étude à une méta-analyse réalisée sur la sureté du
relais par héparine chez des patients sous AVK mettant en évidence que le relais devait être
évités notamment chez les patients qui ne sont pas à risque thrombotiques élevés et qui
subissent une chirurgie majeure et affirment que ce résultat peut s’étendre aux NACO.
Concernant la chirurgie urologique dans cette étude, les résultats montrent qu’un évènement
hémorragique majeur (hémorragie intraoculaire) a été constaté à J2 chez un homme de 86 ans
ayant subi une RTUP. Le schéma de gestion des NACO a été le suivant : arrêt 4 jours avant
l’intervention, relais par HBPM à dose prophylactique. Aucune précision n’est donnée quant
au délai de reprise.
La population de cohorte semble significative et donne une puissance importante à cette
publication. Par ailleurs, comme le précisent les auteurs, la combinaison des critères de
jugement d’efficacité (risque d’événements cardiovasculaires) et de sureté (taux d’évènements
hémorragiques sévères) contribuent à augmenter la puissance de cet article.
Cependant, peu de patients sous Apixaban ont été inclus ce qui donne des résultats peu
significatifs concernant ce NACO.
En conclusion, concernant la chirurgie urologique, celle-ci est citée à travers 2 interventions :
la circoncision et la RTUP. La 1ère est considérée comme une chirurgie à risque minimal
tandis que la seconde constitue une chirurgie à risque mineur.
Dans les deux cas, cette publication expose que les NACO ne doivent pas être arrêts en pré-
opératoire d’une circoncision mais doivent être arrêtés en pré-opératoire d’une RTUP et qu’un
relais par héparine quelque soit le terrain du patient n’est pas recommandé car il augmente les
risques de saignement majeur.
60
La 2ème publication, intitulée « Perioperative Management of Dabigatran: A
Prospective Cohort Study », datant de juillet 2015 et publiée dans l’American Heart
Association Journal, est une étude prospective de cohorte s’intéressant spécifiquement
à la gestion péri-opératoire du Dabigatran.
Dans cette étude multicentrique canadienne menée par la Heart and Stroke Fundation of
Canada, Sam Schulman , Marc Carrier , Agnes Y.Y. Lee et al, au sein de différentes cliniques
entre mai 2012 et avril 2014, ont été inclus les patients sous Dabigatran au long cours
quelque soit l’indication et qui doivent subir une intervention chirurgicale programmée
nécessitant un arrêt du NACO.
Les patients ayant une cathéterisation ou ablation éléctrophysiologique cardiaque ont été
exclus afin de ne pas inclure trop d’interventions à bas risque hémorragique.
Les patients inclus étaient vus environ 1 semaine avant l’intervention programmée afin de
noter les caractéristiques spécifiques du patient, les traitements anti-thrombotiques en cours,
le type de chirurgie programmée. Par ailleurs, un bilan biologique était réalisé avec
notamment une créatinine et un débit de filtration rénale selon la formule de Cockroft-Gault.
Des instructions orales et écrites concernant le délai d’interruption et de reprise du Dabigatran
ont été distribués aux patients ainsi qu’aux médecins/chirurgiens au sein de l’unité de soins où
l’intervention était prévue.
Le protocole de gestion du Dabigatran utilisé par les auteurs dépendait de la fonction rénale
mais également du type d’intervention chirurgicale et de son risque hémorragique selon les
données de l’étude RE-LY et une étude s’intéressant à la pharmacologie du Dabigatran.
61
Le protocole était le suivant :
Fonction rénale (Cockroft)
Risque hémorragique standard Risque hémorragique élevé (=hémostase complète nécessaire)
>80 ml/min 24h 48h
50-80 ml/min 24h 48h
30-50 ml/min 48h 96h
<30 ml/min 96h 144h
La classification selon le risque hémorragique des différentes chirurgies était cependant
laissée à la libre évaluation du chirurgien selon des considérations anatomiques individuelles
et des circonstances propres à chaque intervention.
Aucun relais par héparine n’a été réalisé.
Le choix d’arrêter ou poursuivre un éventuel traitement par aspirine était laissé au chirurgien.
Concernant la reprise du Dabigatran, le protocole de l’étude donnait une liste des
recommandations selon les interventions chirurgicales.
Pour les procédures mineures, la reprise du Dabigatran se faisait le soir même de
l’intervention à posologie réduite soit 75mg en augmentant à la posologie habituelle (110 ou
150mg 2 fois par jour) le lendemain matin.
Pour les procédures avec un risque élevé de saignement, la reprise du Dabigatran était
retardée de 48 à 72h après la chirurgie en commençant à la dose habituelle.
Les patients étaient contactés après 1 semaine et 1 mois et les évènements intercurrents furent
rapportés.
Le principal critère de jugement était la survenue ou non d’un saignement majeur selon la
définition de la Société sur les Thromboses et Hemostase (saignement fatal ou touchant un
organe critique, saignement d’un site autre que le site opératoire avec une diminution de 2 g/l
de l’hémoglobine ou nécessitant une transfusion de 2 culots globulaires, saignement sur le site
chirurgical nécessitant une seconde intervention).
Délai d’interruption du Dabigatran
62
Le deuxième critère de jugement était la survenue ou non d’un événement thrombotique
artériel majeur : survenue d’un AVC ou embole systémique, ou mineur : survenue d’un AIT.
Ainsi, entre mai 2012 et avril 2014, 552 patients dans 7 centres ont été recrutés.
11 patients ont vu leur chirurgie annulée.
Les 541 patients restant ont été inclus dans l’analyse.
60% des chirurgies étaient à risque standard et 40% à haut risque de saignement.
Pour 89% des patients, le Dabigatran a été arrêté selon le protocole fourni : à 24h (46%), 48h
(37%) et 96h (6%).
Pour 5% des cas, ce dernier a été arrêté en moyenne 48h avant le délai préconisé.
Pour les 4% restants, le Dabigatran a été arrêté en moyenne 24h après le délai préconisé.
Pour 77% des patients, le Dabigatran a été repris dans le délai proposé par le protocole.
Pour 3% des patients, ce dernier a été repris en moyenne 48h avant le délai préconisé.
Pour les 14% restants, le Dabigatran, a été repris en moyenne 24h après le délai préconisé.
Dans 40% des cas, le NACO a été repris à la posologie de 75mg le soir après l’intervention.
Ainsi, 10 patients ont présenté un évènement hémorragique majeur chacun (1.8%).
Parmi ces 10 patients, 9 n’avaient aucun risque de saignement à l’inclusion mais 8 ont subi
une intervention à haut risque hémorragique.
28 patients (5.2%) ont présenté au total 35 événements hémorragiques mineurs jusqu’au 30ème
jour post-opératoire.
Chez ces 28 patients, 21 saignements concernaient le site chirurgical, sous forme
d’hémorragie active (15 cas) ou hématome (6 cas).
8 des 15 hémorragies actives du site opératoire sont survenues après une intervention
urologique.
Les 7 autres saignements concernaient des sites extra chirurgicaux (hématurie, hémoptysie,
épistaxis).
Au niveau des événements thrombotiques, seul 1 AIT (0.2%) fut constaté.
4 patients sont décédés d’une cause autre qu’un saignement ou un événement thrombotique.
Ainsi, d’après les auteurs, le protocole proposé, basé sur des données pharmacologiques et
adapté au risque hémorragique de chaque chirurgie, semble sûr et efficace et ne nécessite pas
de relais par héparine.
63
Un intervalle de 24 à 96h, selon la fonction rénale du patient, entre la dernière dose de
Dabigatran et la chirurgie est suffisant pour la grande majorité des patients.
La reprise du Dabigatran entre 0-48h montrait peu d’événement hémorragique majeur (1.8%)
contrairement à une autre revue citée par les auteurs qui concernait la gestion péri opératoire
des AVK dont les résultats mettaient en évidence un risque de saignement post-opératoire
deux fois plus important (2.94%).
Par ailleurs, les auteurs établissent également une comparaison du résultat de leur étude avec
celui d’une revue systématique réalisée au même moment qui concernait la gestion peri-
opératoire des AVK et qui mettait en évidence un nombre d’événements hémorragiques
majeurs beaucoup plus important après relais par HBPM (4.3%).
Les auteurs affirment donc que leur étude montre que durant la courte interruption du
Dabigatran proposée dans leur protocole, aucun relais par héparine n’est recommandé devant
le faible taux de survenue d’événement thrombotique.
Concernant les limites de cette étude, et comme le précisent les auteurs, celle-ci n’a pas été
réalisée sous forme d’une étude contrôlée randomisée.
La puissance aurait effectivement été plus importante.
Par ailleurs, il aurait été judicieux d’effectuer une comparaison avec un autre type de
protocole de gestion péri-opératoire du Dabigatran.
Cependant, il s’agit de la seule étude retrouvée dans la littérature qui étudie un protocole de
gestion à la fois pré et post-opératoire d’un NACO pour les différentes chirurgies.
Concernant la chirurgie urologique, celle-ci apparait clairement au sein de cette publication.
En effet, 5 interventions urologiques sont concernées par cette étude et toutes classées parmi
les interventions à haut risque hémorragique :
- la cystoscopie
- la prostatectomie radicale
- la chirurgie rénale (sans précision)
- la RTUP
-la résection trans-urethrale de tumeur de vessie
Ainsi, à travers cette étude dont la puissance est relativement forte, nous pouvons en déduire
un schéma de gestion péri-opératoire du Dabigatran pour ces 5 interventions :
64
CHIRURGIE
Les deux autres grandes études de cohorte sont des publications dérivées des études
randomisées RE-LY et ARISTOTLE qui sont à la base de la mise sur le marché
respectivement du Dabigatran et de l’Apixaban.
Le premier article [50] datant de juillet 2012 est une publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
Reprise du Dabigatran à 48-72h
- Cystoscopie
- Prostatectomie radicale- Chirurgie rénale
- Résection transuréthrale de prostate- Résection transuréthrale de tumeur de vessie
65
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis, Healey,
Eikelboom et al dans le journal Circulation.
Il s’agit d’une publication reprenant l’étude randomisée RE-LY datant de 2009. Cette dernière
a constitué une étude de non infériorité ayant concerné plus de 18.000 patients présentant une
FA et donc à risque d’accident ischémique cérébral assignés de façon randomisée dans deux
groupes : un groupe de patients bénéficiant d’un traitement par Dabigatran à 110 ou 150 mg
deux fois par jour et un groupe de patients traités par Warfarine.
Le principal critère de jugement était la survenue d’un AIT/AVC ou embole systémique.
Les résultats, à la base de la mise sur le marché du Dabigatran, avaient montré que chez les
patients en FA, le Dabigatran administré à la dose de 110 mg deux fois par jour était lié à
moins de risque d’hémorragie majeure et un risque d’évènement thrombotique similaire au
traitement par Warfarine.
Administré à la dose de 150 mg, le Dabigatran était lié à un risque d’AIT/AVC moindre et un
risque d’hémorragie majeure similaire au traitement par Warfarine.
La publication qui nous intéresse a consisté à suivre tous les patients inclus dans le protocole
RE-LY devant subir une intervention depuis le 22 décembre 2005 jusqu’au 31 mars 2009.
Les chirurgies ont été classées majeures si elles duraient plus d’une heure.
La gestion péri-opératoire de la warfarine était réalisée selon la pratique du médecin.
Concernant le NACO, entre le 22 décembre 2005 et le 7 août 2008, le protocole RE-LY
recommandait l’interruption du dabigatran 24h avant une intervention chez tous les patients.
En se basant sur une meilleure compréhension de la pharmacologie de ce NACO, une
modification du protocole de gestion a été réalisée par les auteurs entre le 7 août 2008 et la fin
de l’étude le 31 mars 2009. Le nouveau schéma proposait un arrêt du dabigatran 24h avant
une intervention à faible risque hémorragique et, pour les chirurgies à haut risque
hémorragique, le dabigatran devait être arrêté 2 à 5 jours avant la chirurgie selon la fonction
rénale. Dans tous les cas, le dabigatran était repris une fois l’hémostase complète.
66
Schéma de gestion du dabigatran après le 7 aout 2008 :
La période péri-opératoire était définie comme la période allant de 7 jours avant l’intervention
jusqu’à 30 jours post-opératoires.
Les critères de jugement étaient les mêmes que dans l’étude RE-LY : le principal critère de
jugement était la survenue d’une hémorragie majeure définie par une diminution de
l’hémoglobine d’au moins 2 points, une transfusion d’au moins 2 culots globulaires ou un
saignement symptomatique au niveau d’une zone ou un organe critique.
Le second critère de jugement était la survenue de complications thrombo-emboliques : AIT,
AVC , embole systémique , embolie pulmonaire , infarctus du myocarde , mort.
Durant un suivi de 2 ans en moyenne, 4591 patients dans l’étude RE-LY ont dû interrompre
au moins une fois leur anticoagulant pour subir une intervention chirurgicale ou invasive.
Parmi eux, 24.7% des patients étaient sous dabigatran à 110mg, 25.4% étaient sous dabigatran
150mg et 25.9% étaient sous warfarine.
Les chirurgies les plus fréquentes étaient l’implantation d’un pacemaker ou défibrillateur, les
procédures dentaires, la chirurgie de la cataracte , la coloscopie , les actes à but diagnostique ,
et les chirurgies de prothèse orthopédique. Les autres interventions étaient moins représentées.
Un relais péri-opératoire avec HNF ou HBPM était utilisé chez 15.3% des patients sous
dabigatran 110mg, 17% des patients sous dabigatran 150mg et 28.5% des patients sous
warfarine.
Les résultats ne montraient pas de différence significative dans la survenue d’événements
hémorragiques majeurs entre les patients sous warfarine (4.6%) et ceux sous dabigatran
110mg (3.8%) et dabigatran 150 mg (5.1%).
Pour tous les autres types d’événements hémorragiques (mineurs notamment) les résultats
étaient les mêmes.
Clairance(ml/min) Intervention à risque Intervention à risque hémorragique élevé hémorragique standard
50-80 2-3 jours 24h
30-50 4 jours >48h
<30 >5 jours 2-4 jours
Interruption du Dabigatran
67
La survenue d’événements thrombo-emboliques étaient bas et sans différence significative
entre les groupes.
En incluant toutes les interventions chirurgicales, et non uniquement les premières, subies par
les patients durant l’étude RELY, soit 2485 interventions pour les patients sous dabigatran
110mg, 2635 interventions pour les patients sous dabigatran 150mg et 2517 interventions
pour les patients sous warfarine, les résultats concernant les critères de jugement principal et
secondaire étaient similaires.
53% des chirurgies étaient classées comme majeures.
Dans tous les cas, la survenue d’un saignement majeur était plus fréquent pour une chirurgie
majeure que pour une chirurgie mineure (6.1% vs 1.9% pour le dabigatran 110mg ; 6.5% vs
3.2% pour le dabigatran 150mg ; 7.8% vs 1.8% pour la warfarine).
Cependant, il n’y avait pas de différence entre les 3 groupes de traitement anticoagulant pour
les chirurgies mineures ou majeures.
Malgré le changement de protocole de gestion du Dabigatran durant l’étude RE-LY, il n’y
avait pas de différence significative dans la survenue d’événements hémorragiques majeurs
entre avant et après le changement de ce protocole quelque soit la posologie du dabigatran.
L’arrêt des anticoagulant a été réalisé 48h avant la chirurgie chez 46% des patients sous
dabigatran 110mg, 46% des patients sous dabigatran 150mg et 11% des patients sous
warfarine.
En comparant à la warfarine, les deux posologies de dabigatran étaient associées à un risque
de saignement péri-opératoire plus bas lorsque l’anticoagulant était arrêté 48h avant la
chirurgie.
Ainsi, cette étude a comparé la gestion péri-opératoire du dabigatran avec la warfarine et a
permis de montrer que les deux posologies de dabigatran et la warfarine étaient associées à
des taux similaires de saignement péri-opératoire et de complications thrombo-emboliques
même en cas de chirurgie majeure.
Par ailleurs, les auteurs précisent que bien que l’étude RELY n’était pas spécifiquement
construite pour évaluer le saignement péri-opératoire, le caractère randomisée et le nombre
important de patients inclus dans l’analyse permettent de considérer les résultats de cette
analyse comme significatifs.
Ainsi, environ la moitié des patients de RELY ayant subi une chirurgie ont interrompu
l’anticoagulation 48h avant soit 4 fois plus que parmi les patients sous warfarine. Lorsqu’une
intervention chirurgicale était réalisée durant cette période, les patients traités par dabigatran
68
avaient un taux significativement plus faible de survenue d’évènements hémorragiques par
rapport à ceux sous warfarine.
La limite principale soulignée par les auteurs est que le protocole de gestion péri-opératoire
du dabigatran proposé a été introduit relativement tardivement et a donc été testé au sein
d’une population faible.
.Concernant la chirurgie urologique, celle-ci est citée à travers deux interventions classées
parmi les chirurgies à risque hémorragique standard :
- les biopsies de prostate
- cystoscopie
Le protocole de gestion du dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour la
chirurgie urologique est le suivant :
-Biopsies de prostate
-Cystoscopie
Clairance(ml/min) Intervention à risque hémorragique standard
50-80 24h
30-50 >48h
<30 2-4 jours
Interruption du Dabigatran
69
Le deuxième article [51] publié également en décembre 2014 est lui dérivé de l’étude
ARISTOTLE datant de 2011.
Cette dernière constitue un essai randomisé en double aveugle comparant l’efficacité et la
sûreté de l’Apixaban et la Warfarine. ARISTOTLE avait pour objectif de tester la non
infériorité de l’Apixaban et la supériorité dans la survenue d’AVC/AIT et la survenue
d’événements hémorragiques.
Cette étude a concerné plus de 18000 patients sous Apixaban et Warfarine dans un contexte
d’ACFA.
Le critère de jugement principal était la survenue d’évènements ischémiques ou emboliques et
la survenue d’événements hémorragiques majeurs.
La durée de suivi moyenne des patients était de 1.8 ans.
Cette étude a démontré que l’Apixaban était supérieur à la warfarine dans la prévention des
accidents ischémiques et emboliques, que les évènements hémorragiques et la mortalité
étaient moins importants qu’avec la warfarine.
En utilisant les données d’ARISTOTLE , Garcia, Alexander , Wallentin et al , dans leur étude
intitulée «Management and clinical outcomes in patients treated with apixaban vs warfarin
undergoing procedures » publiée dans le Journal Of The American Society Of Hematology,
ont répertorié tous les patients devant subir une intervention chirurgicale nécessitant un arrêt
des anticoagulants.
Les auteurs ont classé les interventions en interventions « majeures » (définies comme
nécessitant une anesthésie générale) et « non-majeures ».
Seuls les patients sous anticoagulant (1 prise au moins 7 jours avant l’intervention) ont été
inclus.
Pour chaque patient, les données suivantes ont été répertoriées : si et dans quel délai les
anticoagulants ont été arrêtés avant l’intervention, si un relais par héparine a été fait, et un
évènement ischémique, embolique, un décès, ou un évènement hémorragique majeur, sont
survenus dans les 30 jours post-opératoires.
Selon le délai d’interruption des anticoagulants, chaque intervention était classée soit dans le
groupe « pas d’interruption » si l’anticoagulant n’était pas arrêté ou était arrêté le jour même
de l’intervention, soit dans le groupe « interruption » si l’anticoagulant était arrêté entre 1 et 7
jours avant l’intervention.
Un protocole de gestion des anticoagulants était proposé : pour les chirurgies non majeures, le
protocole suggérait, pour les patients à bas risque thrombo-embolique, de ne pas effectuer de
70
relais par héparine, et pour les patients à risque thromboembolique intermédiaire à élevé
d’effectuer un relais par héparine.
Cependant, les auteurs précisent qu’au final, la décision finale concernant la gestion de
l’anticoagulant était laissée à l’investigateur local.
Parmi les 18201 patients de l’étude Aristotle, 5924 (32.5%) ont suivi au moins 1 intervention
chirurgicale et 5439 (88.3%) ont été inclus dans cette publication.
Sur 9260 interventions réalisées, 943 (10.2%) étaient majeures et 8317 (89.8%) étaient non-
majeures.
Les interventions les plus représentées étaient les actes dentaires (14.6%), la coloscopie
(9.9%), la chirurgie ophtalmologique (8%), l’endoscopie haute (7.6%), l’implantation de
pace-maker (3.5%), la cystoscopie (3.2%) et l’angioplastie percutanée (2.8%).
L’anticoagulant était poursuivi dans 37.5% des interventions.
Pour les 62.5% de patients qui ont interrompu les anticoagulants, le délai d’interruption était
comparable entre les patients sous apixaban et ceux sous warfarine.
Parmi tous les patients et toutes les procédures, 11.7% ont subi un relais par héparine avant ou
après l’intervention.
Parmi les patients qui ont interrompu les anticoagulants, 38.1% les ont repris le jour d’après
l’intervention, 57.8% les ont repris 48h après et 17.1% ne les ont repris que dans les 8 jours
après l’intervention.
Parmi les 2465 patients sous aspirine, plus de 90% ont poursuivi ce traitement.
Dans les 30 jours post-opératoires, un évènement ischémique ou embolique était constaté chez
16 sur 4624 (0.35%) patients sous apixaban et 26 sur 4530 patients (0.57%) sous warfarine.
Un saignement majeur a été constaté après 74 sur 4560 (1.62%) interventions réalisées chez
les patients sous apixaban et après 86 sur 4454 (1.93%) interventions réalisées chez les
patients sous warfarine.
Le risque de décès dans les 30 jours post-opératoires chez les patients sous apixaban et les
patients sous warfarine était similaire.
Ainsi, les auteurs affirment que l’analyse des taux d’évènements parmi les patients sous
apixaban devant subir une intervention chirurgicale montre que de nombreux patients sous
71
anticoagulants peuvent subir des interventions chirurgicales à bas risque sans interruption des
anticoagulants.
Pour ceux qui doivent les interrompre, les résultats suggèrent que le risque dans les 30 jours
post-opératoires de survenue d’évènements thrombo-emboliques est faible (<1%).
Par ailleurs, 1 à 2% des patients sous warfarine ou apixaban ont subi un événement
hémorragique majeur dans les 30 jours post-opératoires et ce chiffre est d’après les auteurs,
relativement faible.
Le taux d’événement hémorragique majeur n’était statistiquement pas différent entre les
patients sous warfarine et ceux sous apixaban et ces résultats tendent, d’après les auteurs, à
nous rassurer devant l’absence d’antidote pour l’apixaban.
Cependant, comme le soulignent les auteurs, la limite principale de cette étude repose sur le
nombre faible de patients subissant des interventions majeures.
Devant le taux d’évènements similaires entre les patients ayant bénéficié d’un relais par
héparine et ceux n’ayant pas bénéficié de ce relais, le relais par héparine n’est pas
recommandé d’après les auteurs.
Enfin, ils précisent que le schéma de gestion péri-opératoire du NACO était très variable d’un
intervenant à l’autre et que cette étude ne permettait pas de donner des recommandations
fermes concernant le délai péri-opératoire d’interruption de l’apixaban.
Cependant, selon eux, l’étude confirme que les recommandation américaines de la gestion de
l’apixaban en péri-opératoire , à savoir leur interruption 24-48h avant une intervention, sont
raisonnables.
En conclusion , les auteurs affirment que :
- le risque d’événements thrombo-emboliques et de saignement majeur dans les 30 jours post-
opératoires était faible et statistiquement non différent que le patient soit sous apixaban ou
warfarine
- un relais par héparine n’est pas nécessaire chez les patients sous apixaban
- le délai d’interruption de l’apixaban dépend du risque hémorragique et du risque thrombo-
embolique de chaque individu, mais les recommandations d’interruption à 24-48h d’une
intervention semblent raisonnables.
Cette étude concerne un nombre significatif de patients et le niveau de preuve des résultats
exposés semble élevé.
72
Cependant, la plupart des interventions sont représentées par des actes à risque hémorragique
relativement faible et les actes à risque élevés sont faiblement représentés.
La conduite à tenir est donc peu précise concernant ces chirurgies à haut risque.
En outre, les informations concernant le profil et le risque thrombo-embolique des patients
inclus n’est pas très bien précisé et la question du relais par héparine en péri-opératoire
dépend justement de ce risque.
Il aurait donc fallu effectuer une étude spécifique pour chaque type de chirurgie : chirurgies à
risque hémorragique faible et chirurgie à risque hémorragique élevé. Puis, pour chaque étude
inclure des patients à risque thrombo-embolique faible et à risque thrombo-embolique élevé et
comparer les taux de survenue d’évènements hémorragiques et thrombo-emboliques selon un
schéma type de gestion du NACO (avec ou sans relais par héparine notamment).
Concernant la chirurgie urologique dans cette publication, celle-ci est citée à travers une
intervention : la cystoscopie.
En conclusion, nous notons que, concernant l’urologie, la littérature comporte très peu
d’études scientifiques basées sur des cas ou cohortes. Les seules études ne comprennent que
peu de patients et peu d’interventions urologiques et leur puissance reste limitée.
Concernant les recommandations, les sociétés savantes présentent quelques divergences
concernant l’urologie et peu d’actes d’urologie sont détaillés.
Ces résultats montrent la nécessité de réaliser des études plus poussées et plus puissantes.
En regroupant l’ensemble des données retrouvées dans la littérature nous pouvons établir un
schéma de gestion des NACO en péri-opératoires des principales interventions réalisées en
urologie :
73
Schéma de gestion péri-opératoire des NACO en chirurgie urologique :
CHIRURGIES UROLOGIQUES A RISQUE MINEUR :
-Circoncision
CHIRURGIES UROLOGIQUES A RISQUE MODERE:
-Cystoscopie-Biopsie de prostate / vessie
CHIRURGIES UROLOGIQUES A RISQUE ELEVE:
-Biopsie/chirurgie rénale-RTUP -Prostatectomie totale-Resection transuréthrale de tumeur de vessie
POURSUITE DES NACO
CrCl (ml/min) Apixaban Rivaroxaban Dabigatran
>80 ml/min 24h 24h 24h
50-80ml/min 24h 24h 24h 30-50 ml/min 48h 48h 48h
15-30 ml/min 48h 48h 96h
INTERRUPTION DES NACO (H pré-opératoire)
Apixaban Rivaroxaban Dabigatran
48h 48h 48h
48h 48h 48h 48h 48h 96h
48h 48h 144h
CHIRURGIE CHIRURGIE
Reprise des NACO à 48h Reprise des NACO à 72h
74
V.2.Chirurgie plastique et dermatologique
La recherche bibliographique retrouve au total 21 articles relatifs aux NACO et à la chirurgie
plastique et dermatologique.
17 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont les chirurgies plastiques et dermatologiques, tandis que 4 publications s’intéressent
spécifiquement à la chirurgie plastique dont 3 publications évoquant la chirurgie plastique et
dermatologique en général et 1 publication traitant de la gestion du Dabigatran et du
Rivaroxaban dans les chirurgies cutanées.
1 publication apparue lors de la recherche dont le titre était « Perioperative management of
novel oral anticoagulants in skin surgery: a national survey. » a été exclue de la revue de
littérature.
En effet, il s’agissait d’une enquête publiée en juin 2016 dans le Journal Britannique de
Dermatologie par Chiang , Al-Naimi et co, sous forme d’un questionnaire visant à répertorier
les différentes pratiques des chirurgiens plastiques et dermatologues en péri-opératoire chez
des patients sous NACO et à évaluer leur connaissance des différentes recommandations.
Cette publication montre tout de même que la gestion des NACO en péri-opératoire reste très
floue et sujette à controverses, notamment en chirurgie plastique et dermatologique comme
nous allons le voir dans l’analyse de la littérature.
Parmi les 21 publications, nous retrouvons :
- 18 publications s’appuyant sur les avis de groupes d’experts ou sociétés savantes
constituant des recommandations grade D
- 1 étude rétrospective constituant une recommandation grade C
- 2 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Ainsi, nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par
ordre de recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
75
-European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications [31, 32, 33, 34,
35, 36, 37, 38, 52] se basent sur les avis de cette société savante.
La chirurgie dermatologique et plastique est citée dans les recommandations de l’EHRA
concernant la gestion des NACO à travers 2 interventions classées parmi les actes ne
nécessitant pas nécessairement l’interruption des NACO :
- les incisions d’abcès
- les petites excisions dermatologiques
Ainsi, en utilisant les recommandations retrouvées au sein des ces publications reprenant
celles de l’EHRA, un schéma type de gestion péri-opératoire des NACO pour ces
interventions plastiques et dermatologiques peut être proposé.
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
-American College of Chest Physician (ACCP): plusieurs publications [31, 36, 38, 42, 43, 53]
reprennent les recommandations de cette société savante.
L’ACCP cite explicitement la chirurgie plastique et dermatologique à travers plusieurs
interventions :
- Incisions d’abcès-Petites excisions dermatologiques
Arrêt des NACO 18-24h avant l’acte
Acte
Reprise des NACO 6h après
76
- les chirurgies cutanées superficielles comportant : les incisions d’abcès, biopsies cutanées,
ganglionnaires et mammaires, excision de tumeurs cutanées, regroupées dans les chirurgies à
bas risque hémorragique
- les chirurgies de cancer du sein (tumorectomie, mastectomie) classées dans les chirurgies à
haut risque hémorragique
- les chirurgies plastiques reconstructives et abdominoplasties : classées dans les chirurgies à
haut risque hémorragique
Ainsi, en utilisant les recommandations de cette société savante retrouvées au sein de ces
publications, l’algorithme suivant de gestion péri-opératoire des NACO en chirurgie plastique
et dermatologique peut être proposé :
77
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
Bas risque hémorragique :
Chirurgies cutanées superficielles :-incisions d’abcès-biopsies cutanées/ganglionnaires/mammaires-excision de tumeurs cutanées
Haut risque hémorragique :
-Chirurgies reconstructives et abdominoplasties
-Chirurgies de cancer du sein (tumorectomie, mastectomie)
POURSUITE DES NACO INTERRUPTION DES NACO
Clairance (ml/min) Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
>80 ml/min 48h 48h 24h
50-80 ml/min 72h 48h 24h
30-50 ml/min 96h 72h 24h
15-30 ml/min 120h Non indiqué 48h
Risque thrombo-embolique
Risque élevé
-CHADS2=5-6-AVC/AIT/EP/TVP dans les 3 derniers mois-anomalies sévères de la coagulation(proteine C , S , antithrombines anormales,syndrome des antiphosoholipides)
Risque bas à modéré
-CHADS2 < ou égal à 4-pas d’antécédent d’AVC/AIT/TVP/EP dans les 3 derniers mois-anomalies non sévères de la coagulation (FV Leyden hétérozygote/ mutation gène de la Prothrombine)
Bénéfice/risque d’un relais par héparine
Risque>bénéfice Bénéfice<Risque
Pas de relais Héparine Relais Héparine
Interruption des NACO>96h
Interruption des NACO<96h
Pas de relais héparine
CHIRURGIE
CHIRURGIE
Reprise des NACO à H+48 ou H+72
78
- Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) : plusieurs publications [31, 39,
44, 45, 46, 52, 54] reprennent le protocole de gestion péri-opératoire des NACO proposé par
ce groupe d’experts.
Concernant la chirurgie plastique, la classification du GIHP distingue :
- les chirurgies cutanées : à faible risque hémorragique
- les chirurgies reconstructrices : à moyen risque hémorragique
Seules ces deux types d’intervention sont citées.
Il s’agit d’une classification peu précise et très schématique.
Ainsi, l’algorithme de gestion des NACO proposé par le GIHP adapté à la chirurgie plastique
est le suivant :
79
Algorithme péri-opératoire proposé par le GIHP
CHIRURGIES CUTANEES = risque hémorragique faible
Arrêt du NACO à J-1 (la veille au soir de l’intervention)
Pas de relais Héparine
Reprise du NACO à J+1
Chirurgie
CHIRURGIES RECONSTRUCTRICES = risque hémorragique modéré
Arrêt des NACO à J-5
Risque thrombotique élevé
antécédent récent (< 3 mois) de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un antécédent cardioembolique
Risque thrombotique faible ou modéré
Relais par héparine optionnel, si indisponibilité de la voie orale pendant
plusieurs jours
Relais par héparine :
-12h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 2 prises
-24h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 1 prise
-Reprise du NACO à H72 post-opératoire
-Dernière injection d’HBPM H12 avant reprise du NACO
80
Recommandations grade C :
La littérature, concernant spécifiquement la chirurgie plastique et dermatologique, retrouve
une étude rétrospective [55].
Ainsi, dans une publication datant de 2015 publiée par la société américaine de dermatologie,
intitulée « Complications With New Oral Anticoagulants Dabigatran and Rivaroxaban in
Cutaneous Surgery » , Timothy W, Chang, Arpey et al , présentent une étude rétrospective
cherchant à déterminer la fréquence et la sévérité des complications en péri-opératoires des
chirurgies cutanées chez des patients sous Rivaroxaban ou Dabigatran.
Cette étude, réalisée à la Mayo-Clinic de Rochester dans le Minnesota, a consisté à recenser
tous les patients sous Dabigatran ou Rivaroxaban ayant subi une chirurgie de Mohs, chirurgie
cutanée d’exérèse de tumeur (carcinome baso-cellulaire : CBC, mélanome notamment) entre
le 1er janvier 2010 et le 1 septembre 2013.
Les auteurs ont relevé l’âge, le sexe, les doses de NACO, la date d’intervention, le site
chirurgical, le diamètre des lésions, les complications per-opératoires.
Au total, 27 patients ayant subi 41 interventions cutanées sous Dabigatran ont été inclus (20
hommes et 7 femmes).
Leur âge moyen était de 78.8 ans.
Les patients étaient sous Dabigatran pour prévention des AVC sous ACFA.
Les sites opératoires étaient : la face (8), les oreilles (7), le nez (6), le front (5), le tronc (4),
extrémité supérieure (4), la lèvre (3), extrémité inferieure (3), le cou (2).
Un léger saignement a été constaté chez un patient de 73 ans sous Dabigatran à la dose de 150
mg deux fois par jour associé à de l’Aspirine, opéré pour un CBC nodulaire sur la joue.
Pendant 2 jours en post-opératoire, le patient a présenté un saignement intermittent au niveau
du site opératoire contrôlé par pression locale pendant 3 jours.
Aucune complication ne fut constatée par la suite.
Par ailleurs, 4 patients sous Rivaroxaban ont subi 5 interventions cutanées d’un CBC. Ces 4
patients étaient sous NACO pour prévention d’AVC sur ACFA ou traitement d’une EP.
Un patient était sous Aspirine 81mg par jour.
Aucune complication hémorragique ne fut constatée.
Ainsi, aucun patient sous Dabigatran ou Rivaroxaban n’a présenté d’hémorragie sévère dans
les suites des chirurgies cutanées. Seul un patient sous Dabigatran et Aspirine a présenté un
léger saignement rapidement contrôlé.
81
D’après les auteurs, cette étude permet d’affirmer que la poursuite de ces deux NACO en per-
opératoire d’une chirurgie cutanée est sans danger.
Cependant, chez les patients sous Aspirine, la gestion péri-opératoire du Dabigatran et du
Rivaroxaban se doit d’être prudente et les auteurs précisent qu’il est nécessaire de réaliser des
études plus poussées (étude multicentrique) concernant le risque hémorragique chez des
patients sous NACO + aspirine en per-opératoire d’une chirurgie cutanée.
Il s’agit là de la seule étude d’un niveau de preuve relativement correct qui s’intéresse
spécifiquement à la chirurgie plastique. Cependant, nous notons que la puissance de cette
étude n’est pas extrêmement importante car elle ne concerne que peu de patients au sein d’un
seul établissement de soins. Il aurait été utile d’effectuer une étude similaire mais
multicentrique avec un recrutement de patients plus important.
Recommandations grade B :
La recherche bibliographique retrouve 2 études de cohorte concernant la gestion péri-
opératoire des NACO pour les chirurgies de façon générale et citant la chirurgie plastique et
dermatologique.
La première publication est l’étude prospective DRESDEN [48] décrite
précédemment.
Dans cette étude, la chirurgie plastique est représentée par les chirurgies cutanées : biopsies
cutanées et résections de tumeurs cutanées, classées dans les chirurgies à risque minimal et
ayant concerné 63 patients dans l’étude.
Ainsi, aucun évènement cardio-vasculaire ni hémorragique n’est survenu chez ces patients
malgré la poursuite des NACO.
Exérèse de tumeurs cutanéesPoursuite du Dabigatran et du Rivaroxaban
82
Les auteurs recommandent donc la continuité des NACO en cas de chirurgie cutanée.
La deuxième publication [49] datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal est l’étude multicentrique canadienne menée par la Heart and
Stroke Fundation of Canada, Sam Schulman, Marc Carrier et al vue précédemment et
qui concerne la gestion péri-opératoire du Dabigatran.
Concernant la chirurgie plastique et dermatologique, celle-ci apparait clairement au sein de
cette publication.
En effet, 2 interventions sont concernées par cette étude et classées de la façon suivante :
- chirurgie cutanée superficielle : risque hémorragique standard
- tumorectomie du sein : risque hémorragique élevé
Ainsi, à travers cette étude dont la puissance est relativement forte, nous pouvons en déduire
un schéma de gestion péri-opératoire du Dabigatran pour ces 2 interventions :
-Biopsies cutanées-Exerèse de tumeurs cutanées Poursuite des NACO
83
Tumorectomie du sein
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
Reprise du Dabigatran à 48-72h
Chirurgie cutanée superficielle
Intervention
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Intervention
Reprise du Dabigatran le soir de l’intervention à 75mg puis 150mg deux fois à partir du lendemain matin
84
En conclusion, nous notons que, concernant la chirurgie plastique, la littérature comporte peu
d’études scientifiques basées sur des cas ou cohortes. La plupart des études scientifiques
s’intéresse principalement à la chirurgie dermatologique cutanée (exérèse de tumeur cutanée).
La chirurgie plastique et reconstructrice est peu étudiée. Par ailleurs, les seules études ne
comprennent que peu de patients et peu d’interventions et leur puissance reste limitée.
Concernant les recommandations, les sociétés savantes présentent quelques divergences
concernant les chirurgies cutanées et peu d’actes de chirurgies plastiques pures sont détaillés.
Ces résultats montrent la nécessité de réaliser des études plus poussées et plus puissantes.
Néanmoins, avec les éléments à disposition dans la littérature et en regroupant l’ensemble des
données nous pouvons établir un schéma de gestion des NACO en péri-opératoire des
principales interventions réalisées en chirurgie plastique et dermatologique :
85
Schéma de gestion péri-opératoire des NACO en chirurgie plastique et dermatologique :
Chirurgies cutanées superficielles :-incisions d’abcès-biopsies cutanées/ganglionnaires/mammaires-chirurgies de Mohs : excision de tumeurs cutanées
=bas risque hémorragique
Interruption du Rivaroxaban et Apixaban à 24h
-Chirurgies reconstructives et abdominoplasties
-Chirurgies de cancer du sein (tumorectomie, mastectomie)
=haut risque hémorragique
Clairance (ml/min) Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
>80 ml/min 48h 48h 24h
50-80 ml/min 72h 48h 24h
30-50 ml/min 96h 72h 24h
15-30 ml/min 144h Non indiqué 48h
Interruption des NACO
Chirurgie
Reprise du NACO à 72h
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Chirurgie
Reprise du NACO le soir de l’intervention
86
V.3.Chirurgie oto-rhino-laryngologie
La recherche bibliographique retrouve au total 12 articles faisant référence à la gestion des
NACO en péri-opératoire.
Parmi ces 12 publications, nous retrouvons :
- 10 publications fondées sur des recommandations de sociétés savantes ou avis d’experts
constituant des recommandations grade D.
- 1 étude de cas constituant une recommandation grade D
- 1 étude de cohorte constituant une recommandation grade B
Nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par ordre de
recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
-l’European Heart Rythm Association (EHRA) et American College of Chest Physicians :
aucune publication se basant sur les avis de ces groupes d’experts ne mentionne la chirurgie
ORL spécifiquement.
- le GIHP : plusieurs publications [31, 39, 44, 45, 46] reprennent le protocole de gestion
péri-opératoire des NACO proposés par ce groupe d’experts.
Concernant la chirurgie ORL , la classification du GIHP distingue :
- les chirurgies ORL sous endoscopie (sans précision) : à faible risque hémorragique
- les chirurgies ORL en général : à moyen risque hémorragique
Seules ces deux types d’intervention sont citées.
Il s’agit d’une classification peu précise et très globale.
Il semble donc très difficile d’établir un schéma de gestion des NACO en péri-opératoire des
chirurgies ORL en se basant sur les recommandations des groupes d’expert.
87
- Société Allemande d’ORL : une opinion d’expert spécifique à l’ORL est retrouvée dans la
littérature [56].
Il s’agit d’un article allemand intitulé “Hemostatic management of patients undergoing ear-
nose-throat surgery” publié en 2015 par T.Thiele, H.Kaftan, W.Hosemann et al, dans le
journal de la German Society of Oto-Rhino-Laryngology.
Il s’agit d’une revue de la littérature des différentes publications concernant la gestion péri-
opératoire des anticoagulants en général (anti-agrégants, AVK, NACO) et d’avis des
différents experts de la société allemande d’ORL.
Tout d’abord, les auteurs ont établi une stratification du risque hémorragique pré et post-
opératoire en fonction d’une liste exhaustive des différentes chirurgies ORL.
Ainsi, ils distinguent les chirurgies ORL à bas, moyen et haut risque en fonction de plusieurs
critères :
- leur expérience personnelle
- le risque de saignement per-opératoire évalué par les auteurs selon l’étendue des dommages
tissulaires réalisés, la localisation de la chirurgie (proche d’un nerf, d’un réseau vasculaire
principal ou d’un organe important) et la perfusion du tissus.
-le risque de saignement post-opératoire évalué par :
* l’état de la plaie post-opératoire (ouverte/fermée)
* les dommages tissulaires
* les conséquences possibles d’un saignement post-opératoires
* les résultats d’une étude de cohorte publiée en 2013 dans le JAMA (american
journal association) intitulée « Incidence of venous thromboembolism in otolaryngology-head
and neck surgery » et réalisée par Garritano FG, Lehman EB, Andrews GA et al , qui
s’intéresse au risque de TVP après les chirurgies ORL et présente dans ses résultats le nombre
de saignements post-opératoires en fonction des chirurgies réalisées.
88
Les auteurs précisent que ce risque peut varier en fonction de l’expérience personnelle et
propre à chaque centre médical.
Ainsi, une classification du risque per et post-opératoire en fonction de chaque type de
chirurgie ORL est présentée.
Par ailleurs, les risques hémorragiques et thrombotiques sont également évalués pour chaque
patient.
Le risque hémorragique est évalué en fonction des antécédents hémorragiques du patient.
Ainsi, un patient sans antécédent hémorragique est considéré à bas risque de saignement et
peut, selon les auteurs, être candidat à la chirurgie ORL sans examen complémentaire
préalable. Si le patient a un antécédent de saignement la chirurgie est considérée à haut risque
et ce dernier doit se soumettre à différents bilans biologiques de coagulation.
Le risque thrombotique est, lui, évalué selon les indications pour lesquelles les patients sont
sous anticoagulants, le score CHADS pour les patients en ACFA et le type de chirurgie ORL,
Risque hémorragique Intervention ORL
-Exérèse d’une tumeur du larynx
HAUT -Amygdalectomie -Thyroidectomie -Glomus jugulaire
-Parotidectomie -Laryngectomie
MODERE -Chirurgie des sinus -Chirurgie de fracture de la face -Sous-mandibulectomie -Chirurgie de neurinome de l’accoustique
-Chirurgie d’implant cochléaire -Tympanoplastie
BAS -Chirurgie de conduit auditif externe -Exérèse ganglionnaire -Trachéostomie -Excision cutanée
89
d’après plusieurs critères déterminants cités par les auteurs: un antécédent de thrombose,
cancer actif, âge > 60 ans ou chirurgie ORL > 45min.
Ainsi, en prenant en compte ces différents critères pré et post-opératoires, la
pharmacocinétique, et les recommandations de l’European Heart association concernant les
chirurgies en général, les auteurs proposent un schéma de gestion des NACO.
Concernant les NACO les auteurs rapportent qu’un relais par héparine en pré-opératoire n’est
pas nécessaire du fait de la demi-vie relativement courte de ces anticoagulants.
L’arrêt des NACO doit s’effectuer 24h avant une chirurgie à bas risque hémorragique et 48h
avant une chirurgie à haut risque. Cependant, il est nécessaire de contrôler la fonction rénale
car en cas d’insuffisance rénale, un arrêt plus précoce des NACO devra se faire. En effet, pour
le dagibatran, un arrêt plus de 96h avant la chirurgie à haut risque peut être nécessaire.
Du fait de leur action rapide, la reprise des NACO en post-opératoire devra être prudente.
Les auteurs proposent en post-opératoire d’une chirurgie ORL à haut risque, la reprise des
NACO à la dose thérapeutique à J7 et d’utiliser une HBPM préventive en attendant à débuter
à H+24 si aucun saignement n’a été significatif. Pour les chirurgies à bas risque
hémorragique, les auteurs affirment que les NACO pourront être repris avant sans préciser à
quel moment.
Nous notons que cette étude traite de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies
ORL en se fondant sur des critères pharmacologiques mais également sur des avis d’experts
très subjectifs.
La classification du risque hémorragique des interventions en ORL est détaillée et plusieurs
types de chirurgies sont cités.
Cependant, le schéma de gestion des NACO proposé est peu précis.
Etude de cas :
Un article américain [57] intitulé « Tonsillectomy on rivaroxaban » publié en 2015 dans
l’American Journal Of Otolaryngology – Head And Neck Medicine And Surgery par Alok T.
Saini, Victor J. Schorn et al , et basé sur un cas clinique réalisé par le Department of
Otolaryngology, Head and Neck Surgery du Mount Sinai Hospital New York, New York a
été retrouvé dans la littérature. Celui-ci s’intéresse à la chirurgie des amygdales chez un sujet
90
sous Rivaroxaban. En effet, d’après les auteurs, il s’agit d’une des chirurgies les plus
pratiquées en ambulatoire et les plus à risque de saignements per et post-opératoires qui
peuvent être dévastateurs. L’hémorragie post-amygdalectomie est appelée primaire lorsqu’elle
survient durant les 24h post-opératoires et secondaire lorsqu’elle arrive après 24h post-
opératoires. L’hémorragie après une amygdalectomie survient entre 0.2 et 2% des cas mais
peut être fatale lorsqu’elle arrive. Ainsi, la gestion des anticoagulants, et donc des NACO, est
essentielle.
Cet article se fonde sur le cas clinique d’une patiente de 38 ans, aux antécédents d’asthme et
de deux épisodes de TVP et un épisode d’EP, actuellement sous Rivaroxaban et qui est
adressée en ORL dans le Department of Otolaryngology, Head and Neck Surgery du Mount
Sinai Hospital à New York dans l’Etat de New York, devant des angines à répétition : 4 à 5
angines par an pendant les 4 à 5 dernières années. Ainsi, l’indication d’une amygdalectomie a
été posée.
La gestion péri-opératoire concernant le Rivaroxaban qui lui a été proposée a été la suivante :
ne pas prendre l’anticoagulant le matin de l’intervention puis le reprendre à J1 post-
amygdalectomie.
Ainsi, 2 mois plus tard, la chirurgie est réalisée : amygdalectomie par éléctrocautérisation et
aspiration/cautérisation pour adenoidectomie. La perte de sang en per-opératoire a été estimée
à 5 mL. La patiente est retournée à domicile le jour même et a repris son Rivaroxaban dès J1.
Elle s’est présentée aux urgences à environ 1 semaine post-opératoire pour des douleurs de
gorge. Elle ne nécessitait pas d’hospitalisation et est retournée à domicile avec des
antalgiques. Elle a été suivie sur une période d’un mois. La patiente n’a présenté aucun
évènement hémorragique.
Il s’agit, d’après les auteurs, du premier cas publié d’amygdalectomie chez un patient sous
NACO, en l’occurrence ici sous Rivaroxaban, pris pour le traitement d’une maladie thrombo-
embolique veineuse. Ainsi, cet article présente un nouveau mode de gestion péri-opératoire du
Rivaroxaban chez des patients subissant une amygdalectomie avec un résultat concluant.
En effet, comme le précisent les auteurs, les recommandations sont basées sur la
pharmacocinétique et les avis d’experts plutôt que sur des expériences cliniques. Il y a donc
une certaine part d’incertitudes concernant les risques des NACO en péri-opératoire.
91
Cependant, il s’agit là d’une étude de cas, donc de niveau de preuve très faible, et, comme
l’avouent les auteurs, de futures recherches doivent être réalisées afin de comparer l’efficacité
et la sûreté des recommandations actuelles concernant la gestion NACO en période péri-
opératoire avec d’autres protocoles de gestion.
Schéma proposé en péri-opératoire d’une amygdalectomie :
Recommandations grade B :
Une étude de cohortes [49] citant la chirurgie ORL est retrouvée dans la littérature.
La publication intitulée « Perioperative Management of Dabigatran A Prospective Cohort
Study », datant de juillet 2015 dans l’American Heart Association Journal, est l’étude
prospective de cohorte s’intéressant spécifiquement à la gestion péri-opératoire du Dabigatran
vue précédemment.
Concernant la chirurgie ORL, celle-ci apparait au sein de deux groupes de chirurgies :
- les chirurgies de l’oreille : classées parmi les chirurgies à risque hémorragique standard
- les chirurgies du cou : classées parmi les chirurgies à risque hémorragique élevé
Nous constatons qu’il s’agit la d’une classification très globale et peu précise des chirurgies
ORL.
Arrêt du Rivaroxaban à J-1 Amygdalectomie Reprise du Rivaroxaban à J+1
92
Les recommandations proposées sont les suivantes :
En conclusion, nous constatons qu’il existe très peu de données dans la littérature concernant
la gestion des NACO en ORL.
Cette chirurgie est souvent séparée entre les interventions intéressant l’oreille et les
interventions du cou. Par ailleurs, une seule étude de cas sur l’amygdalectomie présentant un
faible niveau de preuve a été retrouvée.
Ainsi, en recoupant les données de la littérature, le schéma suivant de gestion des NACO en
péri-opératoire des chirurgies ORL les plus rencontrées par le médecin généraliste semble le
plus approprié :
Chirurgies des oreilles
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Chirurgie du cou
Délai d’interruption du Dabigatran
48h
48h
96h
144h
Reprise du Dabigatran le soir de l’intervention à 75mg puis 150mg deux fois à partir du lendemain matin
Reprise du Dabigatran à 48-72h
93
Schéma de gestion péri-opératoire des NACO en chirurgie ORL :
Chirurgies de l’oreille:
-tympanoplastie-cholestéatome-implant cochléaire
=bas risque hémorragique
Arret du Rivaroxaban et Apixan à H-24
Chirurgie
Reprise des NACO le soir de l’intervention
Chirurgie du cou :
-glomus jugulaire -thyroidectomie-amygdalectomie-laryngectomie-parotidectomie
Chirurgie des sinus
=risque hémorragique élevé
Chirurgie
Reprise des NACO à 48h
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Délai d’interruption du Dabigatran
48h
48h
96h
144h
Arret du Rivaroxaban et Apixan à H-48
94
V.4.Chirurgie ophtalmologique
La recherche bibliographique retrouve au total 20 articles relatifs à la gestion péri-opératoire
des NACO en ophtalmologie.
19 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont les chirurgies ophtalmologiques, tandis qu’une publication s’intéresse spécifiquement à
la chirurgie oculoplastique.
Parmi ces 20 publications, nous retrouvons :
-16 publications fondées sur des recommandations de sociétés savantes ou avis d’experts
constituant des recommandations grade D.
- 4 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par ordre de
recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
- European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications [31, 32, 33, 34,
35, 36, 37, 38] font référence aux recommandations de cette société savante.
Concernant l’ophtalmologie, celle-ci est citée à travers 2 interventions classées dans les actes
ne nécessitant pas nécessairement une interruption des NACO :
- la chirurgie de la cataracte
- la chirurgie de glaucome
Ainsi, en utilisant les recommandations retrouvées au sein des ces publications reprenant
celles de l’EHRA, un schéma type de gestion péri-opératoire des NACO pour ces
interventions ophtalmologiques peut être proposé.
95
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
- American College of Chest Physician (ACCP) : plusieurs publications [31, 36, 38, 42, 43] reprennent les recommandations de cette société savante.
Concernant la chirurgie ophtalmologique, celle-ci est citée à travers le terme « ophtalmologie » (sans précision) et est classée dans les chirurgies à bas risque hémorragique.
Il s’agit donc de recommandations très peu précises.
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
-Chirurgie de la cataracte-Chirurgie du glaucome
Arrêt des NACO 18-24h avant l’acte
Acte
Reprise des NACO 6h après
Ophtalmologie
Pas d’interruption des NACO (prévoir intervention entre 2 doses)
96
- Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) : plusieurs publications [31, 39,
44, 45, 46] reprennent le protocole de gestion péri-opératoire des NACO proposé par ce
groupe d’experts.
Charles-Marc Samama, Gilles Pernod et al dans une publication de 2011 dans les Annales
Françaises d’Anesthésie et de Réanimation, intitulée Chirurgies et actes invasifs chez les
patients traités au long cours par un anticoagulant oral anti-Iia et anti-Xa direct, proposent un
schéma de gestion péri-opératoire des NACO en s’appuyant, comme ils l’affirment, sur celui
de la gestion des AVK proposé par l’HAS.
Ainsi, la chirurgie ophtalmologique est citée à travers la chirurgie de la cataracte. Celle-ci est
classée parmi les chirurgies à faible risque hémorragique.
Le GIHP propose donc le schéma de gestion suivant :
Algorithme péri-opératoire proposé par le GIHP :
- Dans une publication [58] intitulée « New oral anticoagulants and oculoplastic surgery »
publiée par Edsel Ing, James Douketis et al, en 2014 dans le journal Canadien
d’ophtalmologie, les auteurs s’intéressent, en se basant sur leur avis propre d’expert, à la
gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies oculoplastiques : chirurgies de la
paupières et chirurgies orbitaires. D’après les auteurs, la chirurgie oculoplastique est une
chirurgie qui concerne une zone très vascularisée et il est nécessaire d’établir la balance entre
Chirurgie de la cataracte programmée
Arrêt du NACO la veille au soir
Intervention
Reprise du NACO à J+1
97
le risque thrombo-embolique relatif à l’arrêt des NACO et le risque de menace pour la vision
d’une hémorragie rétrobulbaire. Selon eux, le risque de cécité est faible, <1%, le risque
d’épistaxis après une dacryocystorhinostomie est d’environ 3% (quelque soit la voie d’abord
endonasale ou externe). Cependant, contrairement aux autres types de chirurgies ou le
saignement peut être contrôlé par une compression, l’hémorragie orbitaire ne peut être
contrôlée. Ainsi, il convient d’être très prudent.
Les auteurs établissent des recommandations selon leur propre avis d’expert concernant 3
grands types de chirurgies oculoplastiques : la dacryocytorhinostomie (destinée à traiter les
sténoses lacrymonasales irréductibles), la chirurgie orbitaire et la blépharoplastie.
Ces interventions sont classées parmi des chirurgies à haut risque hémorragique.
Le schéma proposé est le suivant :
Chirurgie occuloplastique :
-blépharoplastie- dacryocytorhinostomie-chirurgie orbitaire
Interruption des NACO
Rivaroxaban Apixaban Dabigatran
Cl>80 ml/min 48h
48h 48h
50<Cl<80 ml/min 72h
30<Cl<50 ml/min 96h
Intervention
Reprise des NACO à 48-72h
98
Recommandations grade B :
La recherche bibliographique retrouve 4 grandes études de cohorte concernant la gestion péri-
opératoire des NACO pour les chirurgies de façon générale et citant la chirurgie urologique.
La première publication [48] est l’étude de cohorte publiée en 2014 dans l’European
Heart Journal intitulée « Peri-interventional management of novel oral anticoagulants
in daily care: results from the prospective Dresden NOAC registry », réalisée par
Jan Beyer-Westendorf, Vera Gelbricht, Kati Förster et al, vue précédemment.
La chirurgie ophtalmologique y est citée à travers la chirurgie de la cataracte classée parmi les
chirurgies mineures.
Cette publication tend à confirmer qu’un relais par héparine n’est pas indiqué en péri-
opératoire des ces interventions.
La deuxième publication [49] datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal est l’étude multicentrique canadienne menée par la Heart and
Stroke Fundation of Canada, par Sam Schulman, Marc Carrier et al vue précédemment
et qui concerne la gestion péri-opératoire du Dabigatran.
La chirurgie ophtalmologique apparait de manière générale (sous le terme « eye surgery ») et
concerne 21 patients. Celle-ci est classée parmi les chirurgies à risque standard.
Ainsi, le protocole de gestion du Dabigatran proposé est le suivant :
99
Le troisième article [50] datant de juillet 2012 est la publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis, Healey,
Eikelboom et al dans le journal Circulation, vue précédemment.
La chirurgie ophtalmologique est représentée par une intervention : la chirurgie de la
cataracte, classée parmi les chirurgies à risque hémorragique standard.
Ainsi, le protocole de gestion du dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour la
chirurgie ophtalmologique est le suivant :
Chirurgie ophtalmologique
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Reprise du Dabigatran à 24h
Intervention
100
Le quatrième article [51] est celui dérivé de l’étude ARISTOTLE : intitulé
«Management and clinical outcomes in patients treated with apixaban vs warfarin
undergoing procedures » , publié en décembre 2014 par Garcia, Alexander, Wallentin
et al, dans le Journal Of The American Society Of Hematology et dont les résultats
ont été vus précédemment.
La chirurgie ophtalmologique y est citée sous le terme « chirurgie ophtalmologique »
sans détail quant au type d’intervention.
En conclusion, les auteurs affirment que :
- le risque d’événements thrombo-emboliques et de saignement majeur dans les 30 jours post-
opératoires était faible et statistiquement non différent que le patient soit sous apixaban ou
warfarine
- un relais par héparine n’est pas nécessaire chez les patients sous apixaban
- le délai d’interruption de l’apixaban dépend du risque hémorragique et du risque thrombo-
embolique de chaque individu, mais les recommandations d’interruption à 24 - 48h d’une
intervention semblent raisonnables.
Chirurgie de la cataracte
Interruption du Dabigatran
Clairance(ml/min)
50-80 24h
30-50 >48h
<30 2-4 jours
101
En conclusion, nous notons que, concernant la chirurgie ophtalmologique, la littérature
comporte peu d’études scientifiques basées sur des cas ou cohortes. Concernant les
recommandations, les sociétés savantes et les avis d’experts ne mentionnent que les chirurgies
de la cataracte et de glaucome, et seules les chirurgies oculoplastiques font l’objet d’une
publication spécifique.
Ces résultats montrent la nécessité de réaliser des études plus poussées et plus puissantes.
Néanmoins, en regroupant l’ensemble des données de la littérature nous pouvons établir un
schéma de gestion des NACO en péri-opératoires des principales interventions réalisées en
chirurgie ophtalmologique :
CHIRURGIES OPHTALMOLOGIQUES A RISQUE HEMORRAGIQUE FAIBLE :
-Chirurgie de la cataracte
-Chirurgie du glaucome
CHIRURGIES OPHTALMOLOGIQUES A RISQUE HEMORRAGIQUE ELEVE :
-Chirurgies orbitaires
-Chirurgies oculoplastiques : blépharoplastie/dacryocytorhinostomie
Interruption du Dabigatran (avant intervention)
Clairance (ml/min)
>80 24h
50-80 24h
30-50 48h
<30 96h
Interruption du Rivaroxaban et de l’Apixaban : 24h avant intervention
Intervention
Reprise des NACO à 24h
Interruption du Dabigatran (avant intervention)
Clairance (ml/min)
>80 48h
50-80 72h
30-50 96h
<30 144h
Interruption du Rivaroxaban et de l’Apixaban : 48h avant intervention
Intervention
Reprise des NACO à 48-72h
102
V.5.Chirurgie abdominale
La recherche bibliographique retrouve au total 20 articles relatifs aux NACO et à la chirurgie
abdominale.
18 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont les chirurgies abdominales, tandis que deux publications s’intéressent spécifiquement à
cette chirurgie.
Parmi ces 20 publications, nous retrouvons :
- 17 publications fondées sur des recommandations de sociétés savantes ou avis d’experts
constituant des recommandations grade D.
- 3 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par ordre de
recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
- European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications [31, 32, 33, 34,
35, 36, 37, 38] se basent sur les avis de cette société savante.
La chirurgie abdominale est citée sans précision dans les chirurgies à haut risque
hémorragique. La biopsie hépatique apparait également dans cette catégorie.
Nous notons donc que concernant cette chirurgie, les recommandations sont très globales et
vagues puisqu’aucune chirurgie abdominale spécifique n’est citée.
L’algorithme de gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies abdominales proposé par
l’EHRA est le suivant :
103
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
- American College of Chest Physician (ACCP): plusieurs publications [31, 36, 38, 42, 43] reprennent les recommandations de cette société savante.
Ce groupe d’expert évoque, dans ses recommandations concernant la gestion péri-opératoire des NACO, la chirurgie abdominale en citant deux types d’interventions classées parmi les actes à haut risque hémorragique : la « chirurgie abdominale majeure » (sans précision) et la biopsie hépatique.
Tout comme les recommandations de l’EHRA, celles-ci sont très globales et peu détaillées.
Le schéma de gestion des NACO proposé par l’ACCP est le suivant :
-Biopsie hépatique
- Chirurgie abdominale
Clairance Dabigatran Apixaban Rivaroxaban(ml/min)>80 >48h >48h >48h
50-80 >72h >48h >48h30-50 >96h >48h >48h 15-30 Non indiqué >48h >48h<15 Non indiqué Non indiqué Non indiqué
Interruption des NACO
Intervention
Reprise du NACO à 48-72h
104
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
-Chirurgie abdominale majeure (sans précision)
-Biopsie hépatique
INTERRUPTION DES NACOs
Clairance (ml/min) Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
>80 48h (J-2) 48h (J-2) 24h (J-1)
50-80 72h (J-3) 48h (J-2) 24h (J-1)
30-50 96h (J-4) 72h (J-3) 24h (J-1)
15-30 120h (J-5) Non indiqué 48h (J-2)
Risque thrombo-embolique
Risque bas à modéré Risque élevé
-CHADS2 < ou égal à 4 -CHADS2=5-6-pas d’antécédent d’AVC/AIT/TVP/EP dans les 3 -AVC/AIT/EP/TVP dans les 3 derniers mois derniers mois -anomalies sévères de la coagulation -anomalies non sévères de la coagulation (proteine C, S , antithrombines : anormales (FV Leyden hétérozygote/ mutation gène de la syndrome des antiphosoholipides)Prothrombine)
Risque bas à modéré
Délais d’interruption des NACOs <96h
Délais d’interruption des NACOs >96h
Pas de relais par Héparine
CHIRURGIE
Reprise des NACO à H+48 ou H+72
Risque élevé
Bénéfice/risqué d’un relais par Héparine
Risque>BénéficeRisque<Bénéfice
Relais par Héparine
105
- Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) : la chirurgie abdominale et
digestive n’apparait pas clairement dans les recommandations du GIHP concernant la gestion
péri-opératoire des NACO mais selon la classification de ce groupe d’experts, qui reprend
celle de l’HAS concernant les AVK, cette chirurgie est à risque hémorragique modéré , au
minimum, voire haut [31, 39, 44, 45,46, 59] .
Dans ce contexte, l’algorithme des gestions péri-opératoire des NACO en chirurgie
abdominale proposé par le GIHP est le suivant :
Algorithme péri-opératoire proposé par le GIHP
CHIRURGIE ABDOMINALE PROGRAMMEE
Arrêt des NACO à J-5
Risque thrombotique faible ou modéré
Risque thrombotique élevé
antécédent récent (< 3 mois) de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un antécédent cardioembolique
Relais par héparine optionnel, si indisponibilité de la voie orale pendant
plusieurs jours
-Reprise du NACO à H72 post-opératoire
-Dernière injection d’HBPM H12 avant reprise du NACO
Relais par héparine :
-12h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 2 prises
-24h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 1 prise
106
Recommandations grade B :
La première publication [48] est l’étude prospective DRESDEN décrite
précédemment.
La chirurgie abdominale est citée dans cette étude par l’intermédiaire de deux
interventions :
- la cure de hernie : classée parmi les chirurgies à risque hémorragique mineur
-« la chirurgie abdominale ouverte » (par laparoscopie, sans précision) : classée parmi les
chirurgies à haut risque hémorragique
La deuxième publication [49] datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal est l’étude multicentrique canadienne menée par la Heart and
Stroke Fundation of Canada, par Sam Schulman, Marc Carrier et al vue précédemment
et qui concerne la gestion péri-opératoire du Dabigatran.
Concernant la chirurgie abdominale, celle-ci apparait clairement au sein de cette publication.
En effet, 28 interventions sont concernées par cette étude.
Cependant, la chirurgie abdominale est citée de manière globale sans détail donnée quant au
type d’intervention. Celle-ci est classée, pour la plupart des actes, dans les chirurgies à risque
hémorragique élevé.
Ainsi, à travers cette étude, nous pouvons en déduire un schéma de gestion péri-opératoire du
Dabigatran pour la chirurgie abdominale :
107
Le troisième article [50] datant de juillet 2012 est la publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis, Healey,
Eikelboom et al dans le journal Circulation vue précédemment.
La chirurgie abdominale et viscérale est représentée par trois interventions classées parmi les
chirurgies à risque hémorragique élevé :
- la cure de hernie inguinale
- la cholecystectomie sous coelioscopie
- la colectomie (partielle ou totale)
Ainsi, le protocole de gestion du dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour la
chirurgie abdominale et viscérale est le suivant :
Chirurgie abdominale (sans précision)
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
Intervention
Reprise du Dabigatran à 48-72h
108
En conclusion, nous notons que, concernant la chirurgie abdominale, la littérature comporte
peu d’études scientifiques basées sur des cas ou cohortes et très peu (une seule) de
publications s’intéressant spécifiquement à la gestion des NACO en péri-opératoire de cette
chirurgie.
Concernant les recommandations, les sociétés savantes présentent des divergences notamment
dans les délais d’interruption des NACO mais également concernant la question de
l’utilisation ou non d’un relais par héparine. Par ailleurs, il n’apparaît que le terme très vague
de « chirurgie abdominale » sans détail des actes.
Seule la biopsie hépatique est citée à plusieurs reprises.
Ces résultats montrent la nécessité de réaliser des études plus poussées et plus puissantes.
Il est donc très difficile d’établir une conduite à tenir très précise .
-Cure de hernie inguinale
-Cholecystectomie sous coelioscopie
-Colectomie (partielle ou totale)
Interruption du Dabigatran
Clairance (ml/min) Intervention à risque hémorragique élevé
50-80 2-3 jours
30-50 4 jours
<30 >5 jours
109
Néanmoins, en regroupant l’ensemble des données de la littérature nous pouvons établir un
schéma de gestion des NACO en péri-opératoires d’une biopsie hépatique ou d’une chirurgie
abdominale majeure :
Risque hémorragique élevé :
-Biopsie hépatique
-Chirurgie abdominale majeure : *Cure de hernie inguinale*Cholecystectomie sous coelioscopie*Colectomie (partielle ou totale)
Clairance (ml/min) Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
>80 48h 48h 24h
50-80 48h 48h 24h
30-50 96h 72h 24h
15-30 144h Non indiqué 48h
INTERRUPTION DES NACO
Chirurgie
Reprise du NACO à 48-72h
110
V.6. Chirurgie orthopédique et actes rhumatologiques
La recherche bibliographique retrouve au total 21 articles faisant référence à la gestion des
NACO en péri-opératoire.
20 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont les chirurgies orthopédiques et les actes rhumatologiques, tandis qu’une publication
s’intéresse spécifiquement à la chirurgie orthopédique.
Parmi ces 21 publications, nous retrouvons :
- 17 publications fondées sur des recommandations de sociétés savantes ou avis d’experts
constituant des recommandations grade D.
- 1 étude de cas constituant une recommandation grade D
- 3 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par ordre de
recommandation en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D :
Avis d’experts et sociétés savantes
- European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications [31, 32, 33, 34,
35, 36, 37, 38] se basent sur les avis de cette société savante.
La chirurgie orthopédique est citée à travers le terme « chirurgie orthopédique majeure » (sans
précision) et est classée dans les chirurgies à haut risque hémorragique.
Ainsi, en se basant sur les publications reprenant les recommandations de l’EHRA, nous
pouvons établir l’algorithme suivant de gestion péri-opératoire des NACO pour la chirurgie
orthopédique :
111
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
-American College of Chest Physician (ACCP) : plusieurs publications[31,36,38,42,43,60]
reprennent les recommandations de cette société savante.
Concernant la chirurgie orthopédique, celle-ci apparait comme une chirurgie majeure avec
lésions tissulaires importantes et donc à haut risque de saignement. La chirurgie citée est
l’arthroplastie (sans précision quant à la localisation).
Ainsi, un algorithme de gestion péri-opératoire des NACO est proposé concernant cette
chirurgie :
Chirurgie orthopédique majeure
Interruption des NACO
Clairance Dabigatran Apixaban Rivaroxaban(ml/min)>80 >48h >48h >48h
50-80 >72h >48h >48h30-50 >96h >48h >48h 15-30 Non indiqué >48h >48h<15 Non indiqué Non indiqué Non indiqué
Intervention
Reprise du NACO à 48-72h
112
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
Arthroplastie =risque hémorragique élevé
INTERRUPTION DES NACO
Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
CrCl >80 mL/min 48h(J-2) 48h(J-2) 24h(J-1)
CrCl 50–80 mL/min 72h (J-3) 48h (J-2) 24h (J-1)
CrCl 30–50 mL/min 96h (J-4) 72h (J-3) 24h (J-1)
CrCl 15–30 mL/min 120h (J-5) Non indiqué 48h (J-2)
Risque thrombo-embolique
Risque bas à modéré Risque élevé
-CHADS2 < ou égal à 4 -CHADS2=5-6-pas d’antécédent d’AVC/AIT/TVP/EP dans les 3 -AVC/AIT/EP/TVP dans les 3 derniers mois derniers mois -anomalies sévères de la coagulation -anomalies non sévères de la coagulation (proteine C , S , antithrombines : anormales (FV Leyden hétérozygote/ mutation gène de la syndrome des antiphosoholipides)Prothrombine)
Risque bas à modéré
Délais d’interruption des NACOs <96h
Délais d’interruption des NACOs >96h
Risque élevé
Bénéfice/risqué d’un relais par Héparine
Risque>Bénéfice Risque<Bénéfice
Relais par Héparine
CHIRURGIE
Pas de relais par Héparine
Reprise des NACO à H+48 ou H+72
113
- Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP): plusieurs publications [31, 39,
44, 45, 46] reprennent le protocole de gestion péri-opératoire des NACO proposé par ce
groupe d’experts.
Dans la classification du GIHP qui s’appuie sur celle de l’HAS pour les AVK [61], la
chirurgie orthopédique et la rhumatologie apparaissent au sein des trois groupes
d’interventions selon le risque hémorragique:
- les actes rhumatologiques mineurs : à faible risque hémorragique
-les actes rhumatologiques à risque hémorragique modérés
- les chirurgies orthopédiques majeures : à haut risque hémorragique
Il s’agit d’une classification relativement précise et de nombreux actes de rhumatologie y sont
décrits.
Ainsi, l’algorithme de gestion des NACO proposé par le GIHP adapté aux actes
rhumatologiques et à la chirurgie orthopédique est le suivant :
114
Algorithme de gestion des NACO en péri-opératoire des actes rhumatologiques et des chirurgies orthopédiques selon le GIHP
Actes rhumatologiques mineurs:
-infiltrations péri-articulaires-ponction/infiltration des articulations périphériques hors coxo-fémorales-biopsie des glandes salivaires accessoires
Arret des NACO la veille au soir
Intervention
Reprise des NACO à J+1
Actes rhumatologiques à risque modéré:
-ponction/infiltration des articulations coxo-fémorales-infiltration canalaire profonde-tenotomie percutanée-ponction/infiltration rachidienne-biopsie synoviale-biopsie osseuse -infiltration sacro-iliaque
Arret des NACO à J-5
Risque thrombotique élevé
antécédent récent (< 3 mois) de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un antécédent cardioembolique
Risque thrombotique faible ou modéré
Relais par héparine optionnel, si indisponibilité de la voie orale pendant
plusieurs jours
Relais par héparine :
-12h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 2 prises
-24h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 1 prise
-Reprise du NACO à H72 post-opératoire
-Dernière injection d’HBPM H12 avant reprise du NACO
Intervention
Chirurgies orthopédiques majeures
115
Etude de cas :
La recherche bibliographique retrouve également l’étude de cas [47] au sein de l’article
d’Elizabeth Travis et Jane Strang et al intitulé « Peri-opérative management of Dabigatran :
the Nelson experience to date », datant d’août 2012 et publié dans le New Zealand medical
mentionné précédemment et concernant la gestion péri-opératoire du Dabigatran en
particulier.
La chirurgie orthopédique est mentionnée à travers 1 cas d’arthrodèse d’un orteil.
Dans ce contexte, l’arret du Dabigatran s’est fait H-24 avant l’intervention et la reprise à
H+24. Le patient n’a présenté aucun évènement hémorragique notable.
Il s’agit d’une étude présentant une puissance et un niveau de preuve extrêmement faible et
concernant une chirurgie peu fréquente.
Recommandations grade B
La recherche bibliographique retrouve 3 grandes études de cohorte concernant la gestion péri-
opératoire des NACO pour les chirurgies de façon générale et citant la chirurgie orthopédique
La première publication [48] est l’étude de cohorte publiée en 2014 dans l’European
Heart Journal intitulée « Peri-interventional management of novel oral anticoagulants
in daily care: results from the prospective Dresden NOAC registry », Jan Beyer-
Westendorf, Vera Gelbricht , Kati Förster et al , vue précédemment.
La chirurgie orthopédique y est citée à travers plusieurs interventions :
-l’arthroscopie , classée parmi les chirurgies à risque hémorragique mineur
-les infiltrations paravertébrales ,classée parmi les chirurgies à risque hémorragique mineur
-les chirurgies de prothèse de hanche et genou ou fractures : classées parmi les chirurgies à
risque hémorragique majeur
Arthrodèse métatarsienne Arrêt du Dabigatran
à H-24
Intervention Reprise du Dabigatran à H+24
116
Cette publication tend à confirmer qu’un relais par héparine n’est pas indiqué en péri-
opératoire des ces interventions.
La deuxième publication [49] datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal, est l’étude multicentrique canadienne menée par la Heart and
Stroke Fundation of Canada, réalisée par Sam Schulman, Marc Carrier et al et vue
précédemment qui concerne la gestion peri-opératoire du Dabigatran.
Concernant la chirurgie orthopédique , celle-ci apparait clairement au sein de cette
publication.
En effet , plusieurs interventions sont concernées par cette étude et classées de la façon
suivante :
-chirurgies de la hanche/genou/cheville/épaule : risque hémorragique élevé
-laminectomie : risque hémorragique élevé
-chirurgie de la main ou du poignet : risque hémorragique standard
-infiltrations articulaires : risque hémorragique standard
Ainsi, à travers cette étude dont la puissance est relativement forte, nous pouvons en déduire
un schéma de gestion péri-opératoire du Dabigatran pour ces interventions :
117
.
Le troisième article [50] datant de juillet 2012 est la publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis , Healey ,
Eikelboom et al dans le journal Circulation vue précédemment.
La chirurgie orthopédique est representée par deux interventions : l’arthroplastie de hanche et
l’arthroplastie de genou, classées parmi les chirurgie à risque hémorragique élevé.
-Chirurgies de la hanche/genou/cheville/épaule
-Laminectomie
-Infiltrations articulaires
-Chirurgies de la main ou poignet
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
Reprise du Dabigatran à 48-72h
Délai d’interruption du Dabigatran
24h
24h
48h
96h
Reprise du Dabigatran le soir de l’intervention à 75mg puis 150mg deux fois à partir du lendemain matin
118
Ainsi, le protocole de gestion du dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour la
chirurgie orthopédique est le suivant :
En conclusion, concernant la chirurgie orthopédique, il n’existe aucune étude spécifique à
cette spécialité s’intéressant à la gestion des NACO en péri-opératoire. Les études de cohortes
évoquent l’orthopédie et les actes rhumatologiques mais ne concernent que peu de patients et
sont peu précises. Seules les recommandations des sociétés savantes ou groupes d’experts
sont nombreuses mais peu précises hormis celles du GIHP reprenant la stratification des
risques hémorragiques des actes rhumatologiques de l’HAS.
Néanmoins, en regroupant l’ensemble des données de la littérature nous pouvons établir un
schéma de gestion des NACO en péri-opératoires des principales interventions réalisées en
chirurgie orthopédique et actes rhumatologiques :
-Arthroplastie totale de hanche
-Arthroplastie totale de genou
Interruption du Dabigatran
Clairance(ml/min) Intervention à risque hémorragique élevé
50-80 2-3 jours
30-50 4 jours
<30 >5 jours
119
Chirurgies orthopédiques à risque hémorragique élevé :
-chirurgies de la hanche/genou/cheville/épaule
-laminectomie
Chirurgies orthopédiques et actes rhumatologiques à risque modéré:
-ponction/infiltration des articulations coxo-fémorales-infiltration canalaire profonde-tenotomie percutanée-ponction/infiltration rachidienne-biopsie synoviale-biopsie osseuse -infiltration sacro-iliaque -Chirurgies de la main/poignet
Actes rhumatologiques mineurs:
-infiltrations péri-articulaires-ponction/infiltration des articulations périphériques hors coxo-fémorales-biopsie des glandes salivaires accessoires
INTERRUPTION DES NACOs
Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
CrCl >80 mL/min 48h(J-2) 48h(J-2) 48h(J-2)
CrCl 50–80 mL/min 72h (J-3) 48h (J-2) 48h (J-2)
CrCl 30–50 mL/min 96h (J-4) 72h (J-3) 72h (J-2)
CrCl 15–30 mL/min 144h (J-5) 72h 72h (J-2)
Arret des NACO la veille au soir
Intervention
Reprise des NACO à 24h Reprise du NACO à 72h
CrCl (ml/min) Apixaban Rivaroxaban Dabigatran
>80 ml/min 24h 24h 24h
50-80ml/min 24h 24h 24h 30-50 ml/min 48h 48h 48h
15-30 ml/min 48h 48h 96h
Reprise du NACO à 48h
120
V.7.Actes endoscopiques
La recherche bibliographique retrouve au total 27 articles relatifs aux NACO et aux actes
endoscopiques.
19 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des interventions en
général dont les actes endoscopiques, tandis que 8 publications s’intéressent spécifiquement à
ces actes.
Parmi ces 27 publications, nous retrouvons :
-22 publications s’appuyant sur les avis de groupes d’experts ou sociétés savantes constituant
des recommandations grade D
-1 étude rétrospective constituant une recommandation grade C
-5 études de cohortes constituant des recommandations grade B
Ainsi, nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par
ordre de recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D
Avis d’experts et sociétés savantes
-European Heart Rythm Association (EHRA) : de nombreuses publications
[31,32,33,34,35,36,37,38,64,65,66] se basent sur les avis de cette société savante.
Les actes d’endoscopie apparaissent clairement au sein des recommandations et sont séparés
en :
-actes endoscopiques sans biopsie : classé dans le groupe des actes ne nécessitant pas
systématiquement l’arrêt des NACO
-actes endoscopiques avec biopsie : classés dans le groupe des actes à risque hémorragique
bas
Ainsi, en se basant sur les publications reprenant les recommandations de l’EHRA, nous
pouvons établir l’algorithme suivant de gestion péri-opératoire des NACO pour les actes
d’endoscopie :
121
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
-American College of Chest Physician (ACCP): plusieurs publications [31, 36, 38, 42, 43, 62,
63] reprennent les recommandations de cette société savante.
Les actes d’endoscopies apparaissent au même titre que dans les recommandations de
l’EHRA selon :
-les endoscopies sans biopsie : classées dans les chirurgies à bas risque hémorragique
-les endoscopies avec biopsie(s) : classées dans les chirurgies à risque hémorragique moyen
Endoscopie sans biopsie Endoscopie avec biopsie(s)
Arrêt des NACO 18-24h avant l’acte
Acte
Reprise des NACO 6h après
Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
CrCl> 80mL/min 24h 24h 24h
CrCl 50–80 mL/min 36h 24h 24h
CrCl 30–50 mL/min 48h 24h 24h
CrCl 15–30 mL/min Non indiqué 36h 36h
Interruption des NACO
Acte
Reprise des NACO à 48-72h
122
Ainsi, en utilisant les recommandations de cette société savante retrouvées au sein de ces
publications, l’algorithme suivant de gestion péri-opératoire des NACO en chirurgie plastique
et dermatologique peut être proposé :
123
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
Endoscopies avec biopsie(s) Endoscopies sans biopsie
CHIRURGIE
Relais par Héparine
Risque<BénéficeRisque>Bénéfice
Délais d’interruption des NACOs <96h
Délais d’interruption des NACOs >96h
Pas de relais par Héparine
Bénéfice/risqué d’un relais par Héparine
Risque thrombo-embolique
Risque bas à modéré Risque élevé
-CHADS2 < ou égal à 4 -CHADS2=5-6-pas d’antécédent d’AVC/AIT/TVP/EP dans les 3 -AVC/AIT/EP/TVP dans les 3 derniers mois derniers mois -anomalies sévères de la coagulation -anomalies non sévères de la coagulation (proteine C , S , antithrombines : anormales (FV Leyden hétérozygote/ mutation gène de la syndrome des antiphosoholipides)Prothrombine)
Dabigatran Apixaban Rivaroxaban
CrCl>80mL/min 24h (J-1) 24h (J-1) 24h(J-1)
CrCl 50–80 mL/min 72h (J-3) 48h (J-2) 24h (J-1)
CrCl 30–50 mL/min 96h (J-4) 72h (J-3) 24h (J-1)
CrCl 15–30 mL/min 120h (J-5) Non indiqué 48h (J-2)
INTERRUPTION DES NACOsPas d’interruption des NACO
Reprise des NACO à H+6 ou H+8 (si hémostase bien contrôlée)
124
-Le Groupe d’intérêt en Hémostase Péri-opératoire (GIHP) : plusieurs publications [31, 39,
44, 45, 46] reprennent le protocole de gestion péri-opératoire des NACO proposé par ce
groupe d’experts.
Concernant les actes d’endoscopie, le GIHP se fonde sur la classification de l’HAS
concernant les AVK elle-même basée sur les recommandations de la société française de
gastro-entérologie et l’European Academy of Gynaecological Surgery qui distingue :
-les actes endoscopiques à faible risque hémorragique : endoscopies oeso-gastro-duodénales
avec biopsies, coloscopies avec biopsies, écho-endoscopies diagnostiques,
cholangiopancréatographies rétrogrades (CPRE) sans sphincterotomie, enteroscopies sans
surtube
-les actes endoscopiques à risque hémorragique élevé : polypectomies, dissections sous
muqueuses, écho-endoscopies ponction/drainage, CPRE avec sphincterotomie, dilatations
digestives et prothèses.
Ainsi, le GIHP recommande l’algorithme suivant des gestions péri-opératoires des NACO en
cas d’actes endoscopiques :
125
Algorithme péri-opératoire proposé par le GIHP
- Endoscopies OGD avec biopsies
- Coloscopie et biopsies, - Echoendoscopie diagnostique- CPRE sans sphincterotomie- Enteroscopie sans surtube
Arrêt du NACO à J-1 (la veille au soir de l’intervention)
Pas de relais Héparine
Actes endoscopique
Reprise du NACO à J+1
- Polypectomie - Dissection sous muqueuse- Echoendoscopie ponction/drainage- CPRE avec sphincterotomie- Dilatations digestives et prothèses
Arrêt des NACO à J-5
Risque thrombotique élevé
antécédent récent (< 3 mois) de thrombose veineuse proximale avec ou sans embolie pulmonaire, ou une MTEV récidivante idiopathique, ou de patients porteurs d’une FA à haut risque du fait d’un antécédent cardioembolique
Risque thrombotique faible ou modéré
Relais par héparine :
-12h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 2 prises
-24h après dernière prise du NACO si celui-ci administré en 1 prise
Relais par héparine optionnel , si indisponibilité de la voie orale pendant
plusieurs jours
-Reprise du NACO à H72 post-opératoire
-Dernière injection d’HBPM H12 avant reprise du NACO
Actes endoscopique
126
- Sociétés allemandes et américaines de gastro-entérologie : une publication [67]
s’intéressant spécifiquement à la gestion des actes endoscopiques est retrouvée dans la
littérature. Intitulée « The periprocedural management of anticoagulation and platelet
aggregation inhibitors in endoscopic interventions » et publiée en février 2016 dans la revue
allemande internationale Deutsches Azterblatt par Christian M Lange , Stephan Fichtlerer et
al , cette publication constitue une revue de la littérature et une synthèse des avis d’experts
notamment des sociétés allemandes et américaines de gastro-entérologie et d’endoscopie.
Concernant les NACO, les auteurs utilisent les recommandations de ces deux sociétés
savantes basées sur la pharmacologie de ces molécules, la fonction rénale du patient et leur
classification des différents actes d’endoscopie selon le risque hémorragique.
Dans ce contexte, les auteurs proposent la classification suivante :
-interventions endoscopiques à faible risque de saignement (<1.5%) : endoscopies
diagnostique avec ou sans biopsie, CPRE sans sphincterotomie, capsules endoscopiques.
-interventions endoscopiques à haut risque hémorragique (>1.5%) : polypectomies, CPRE
avec sphincterotomie, traitement des varices oesophagiennes, résections de muqueuse,
gastropexies, gastrostomies percutanées endoscopiques, biopsies du foie.
Ainsi, en prenant en compte la fonction rénale du patient ainsi que la pharmacologie propre à
chaque NACO, les sociétés allemandes et américaines de gastro-entérologie et d’endoscopie
proposent le schéma de gestion péri-interventionnel suivant :
127
Algorithme péri-opératoire proposé par les sociétés allemandes et américaines de gastro-entérologie
Actes endoscopiques à faible risque hémorragique
-Endoscopie diagnostique (avec/sans biopsie)
-CPRE sans sphinctérotomie
-Capsule endoscopique
Actes endoscopiques à haut risque hémorragique
-Polypectomie-CPRE avec sphinctérotomie -Traitement des varices oesophagiennes-Gastropexie-Gastrostomie percutanée endoscopique
Clairance (ml/min) Dabigatran
>80 24h
50-80 24-48h
30-50 48-72h
Clairance (ml/min) Rivaroxaban Apixaban
>50 24h 24h
30-50 24-48h 24-48h
15-30 48-72h 48-72h
Clairance (ml/min) Dabigatran
>80 48h
50-80 48-72h
30-50 4-5j
Clairance (ml/min) Rivaroxaban Apixaban
>50 48h 48h
30-50 3-5j 3-4 j
15-30 4-7 j 4-5j
Acte endoscopique
Reprise du NACO à H24
Acte endoscopique
Reprise du NACO à H48
128
Les auteurs précisent qu’il s’agit de recommandations de niveau de preuve scientifique très
faible.
-Une publication [68] intitulée « New anticoagulants and antiplatelet agents : a primer for
the clinical gastroenterologist “ parue en 2014 dans l’American Journal of Gastroenterology ,
constitue à travers une revue de la littérature , un résumé des « meilleures pratiques » de
gestion des NACO pour les gastroentérologues. Selon eux, les auteurs ont extrait des
différentes publications retrouvées dans la littérature, les informations les plus pertinentes
concernant la gestion péri-procédurale des NACO pour les praticiens réalisant des actes
endoscopiques.
D’après leur méthode utilisée afin de réaliser cette revue de la littérature, les auteurs ont
rassemblé les articles des sociétés savantes, de groupes d’experts et les articles relevant des
propriétés pharmacologiques des NACO, pour présenter un schéma de gestion des NACO.
Ainsi, ils proposent le schéma suivant pour l’ensemble des NACO en péri-interventionnel des
actes endoscopiques :
Nous voyons qu’il s’agit la de recommandations peu précises, de niveau de preuve très faible. Les auteurs ne font aucune distinction entre les NACO et ne précisent ni le type d’intervention endoscopique dans leur classification, ni le délai de reprise des NACO.
ClCr ml/min Acte à risque hémorragique Acte à risque hémorragique élevé standard
>80 24h 2-4 jours
50-80 24h 2-4 jours
30-50 >48h >4 jours
<30 48-120h >5 jours
Délai d’interruption des NACO
129
-Dans une publication [69] d’août 2013 intitulée « Novel oral anticoagulants in
astroenterology practice » dans le journal Gastrointestinal Endoscopy, J.Desai, C. B Granger
et al, reprennent les recommandations de la société américaine d’endoscopie ainsi que les
recommandations canadiennes concernant la gestion des anticoagulants dans les actes
endoscopiques.
Comme ils l’affirment, des études plus poussées doivent être menées car ces
recommandations sont d’un niveau de preuve relativement faible.
Par ailleurs, une liste peu exhaustive des actes endoscopiques est mentionnée et il s’agit de
recommandations globales.
Leurs recommandations, basées également sur la fonction rénale du patient, les propriétés
pharmacologiques des NACO et le risque de saignement propre à chaque acte endoscopique,
sont les suivantes :
Algorithme péri-opératoire proposé par les sociétés américaines et canadiennes d’endoscopie
Actes endoscopiques à faible risqué hémorragique :
Endoscopie ou coloscopie avec biopsie
Actes endoscopiques à haut risque hémorragique :
-Polypectomie -Gastrostomie percutanée endoscopique-CPRE avec sphincterotomie
Arrêt des NACO la veille au soir et le matin de l’acte (si en 2 prises)
-Si Dabigatran + Clcr 30-50 ml/min : arrêt 3-5 jours avant l’acte
-Autres cas : arrêt à 24-48h
Reprise du NACO le soir même
Acte endoscopiqueActe endoscopique
Reprise du NACO à 24-48h
130
Les auteurs précisent que si une interruption du NACO plus longue semble nécessaire (sans
en préciser le contexte), un relais par Héparine peut être envisagé (sans précision quant aux
modalités).
Par ailleurs, une particularité concernant les NACO dans les actes endoscopique est
mentionnée dans cette publication à travers la référence à une revue systématique et méta
analyse (réalisée par Holster IL, Valkhoff VE, Kuipers EJ et al intitulée « New oral
anticoagulants increase risk for gastrointestinal bleeding: a systematic review and meta-
analysis. Gastroenterology »), à savoir que pour le Dabigatran et le Rivaroxaban , du fait de
leur action sur le tractus gastro-intestinal (vue dans leur description pharmacologique) ces
derniers tendent à augmenter le risque hémorragique et qu’il s’agit d’être plus prudent dans la
gestion de ces deux NACO en péri-opératoire des actes endoscopiques.
Nous constatons une fois de plus qu’il s’agit la de recommandations de groupes d’experts de
faible preuve.
-Une publication [70] intitulée « Endoscopy in patients on antiplatelet or anticoagulant
therapy, including direct oral anticoagulants: British Society of Gastroenterology (BSG) and
European Society of Gastrointestinal Endoscopy (ESGE) guidelines », publiée en 2016 dans
le journal Endoscopy par Andrew M Veitch, Geoffroy Van biervelt et al, rapporte les
recommandations de la société britannique et la société européenne d’endoscopie.
Comme pour les autres sociétés savantes, celles-ci fondent leurs recommandations sur les
propriétés pharmacologiques propres à chaque NACO , la fonction rénale du patient et la
classification des risques hémorragiques pour chaque acte endoscopique.
Ainsi, l’algorithme de prise en charge suivant est proposé :
131
Algorithme péri-opératoire proposé par les sociétés britanniques et européennes d’endoscopie :
Recommandations grade B
La recherche bibliographique retrouve 5 études de cohorte concernant la gestion péri-
opératoire des NACO dans les actes endoscopiques. 1 étude concernent spécifiquement ces
actes tandis que les 4 autres les mentionnent mais concernent les chirurgies de façon générale.
Dans l’étude de cohorte [48] publiée en 2014 dans l’European Heart Journal intitulée
« Peri-interventional management of novel oral anticoagulants in daily care: results
Actes endoscopiques à faible risque hémorragique :
-Endoscopie diagnostique +/- biopsie
-Pose de stent biliaire ou pancréatique
-Enteroscopie sans polypectomie
Actes endoscopiques à haut risque hémorragique :
-Traitement des varices oesophagiennes-Pose de stent oesophagien/entéral/colique-Acte de dilatation -CPRE avec sphincterotomie -Enteroscopie avec polypectomie
Arrêt du NACO le matin de l’intervention
Dabigatran + ClCr 30-50 : arrêt 72h avant l’intervention
Autres cas : arrêt du NACO 48h avant l’intervention
Acte endoscopiqueActe endoscopique
Reprise du NACO à H24 Reprise du NACO à H48
132
from the prospective Dresden NOAC registry »vue précédement, les actes
endoscopiques sont mentionnés.
En effet, 172 patients ont subi un acte d’endoscopie. Parmi ces actes, sont cités la fibroscopie
gastrique et la coloscopie.
Les auteurs ont classé ces interventions dans le groupe des actes à risque hémorragique
mineur (avec traumatisme tissulaire minime mais risque de saignement significatif).
La plupart de ces actes ont été réalisés après un arrêt des NACO 24h avant et une reprise à
48h.
L’étude des évènements hémorragiques met en évidence un seul saignement survenu chez un
patient ayant subi une CPRE avec extraction d’un calcul, qui a présenté une hémorragie
gastro-intestinale avec déglobulisation.
Ainsi, d’après les auteurs, cette étude montre que la plupart des actes chirurgicaux dont les
actes endoscopiques peuvent être réalisés avec une interruption totale moyenne des NACO de
3 jours sans augmenter significativement le risque hémorragique et en l’absence de tout relais
par Héparine.
Il s’agit comme nous l’avons vu d’une étude dont le niveau de preuve est relativement élevé
(d’autant plus pour les actes endoscopiques qui concernent un nombre important de patient
dans l’étude).
La deuxième publication [49] , datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal , est l’étude prospective de cohorte multicentrique canadienne
menée par la Heart and Stroke Fundation of Canada, Sam Schulman , Marc Carrier et
co s’interessant spécifiquement à la gestion péri-opératoire du Dabigatran et vue
précédemment.
Dans cette étude, les actes endoscopiques apparaissent au sein de deux classes d’intervention :
-les polypectomies et les endoscopies avec biopsies multiples, classées dans les procédures à
haut risque hémorragique et concernant 34 patients dans l’étude
-FOGD -Coloscopie Arrêt des NACO à H-24 Acte Reprise des
NACO à H+48
133
-les autres actes endoscopiques (sans biopsie) : classés dans les procédures à risque
hémorragique standard et concernant 84 patients
Comme nous l’avons vu dans l’analyse de cette étude, la survenue d’évènements
hémorragiques était relativement faible.
Le protocole de gestion péri-opératoire du Dabigatran proposé par les auteurs semblait donc
approprié et efficace.
Ainsi, en adaptant ce schéma aux actes endoscopiques nous pouvons, en se basant sur cette
publication, proposer l’algorithme suivant :
Actes endoscopiques à haut risque hémorragique :
-biopsies multiples-polypectomie
Délai d’interruption du Dabigatran
24h
24h
48h
96h
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
Actes endoscopiques à risque hémorragique standard :
endoscopie sans biopsie
Reprise du Dabigatran à 48-72h
Reprise du Dabigatran le soir de l’intervention à 75mg puis 150mg deux fois à partir du lendemain matin
134
La revue de la littérature retrouve une étude de cohorte [71] spécifique à la gestion des
anticoagulants en général, dont un NACO, le Dabigatran , en péri-interventionnel
d’endoscopies gastro-intestinales avec biopsies.
Cette étude intitulée « Safety of gastrointestinal endoscopic biopsy in patients taking
antithrombotics » , publiée en 2015 dans la revue Digestive endoscopy (issue du journal de la
société japonaise de gastro-entérologie) par Nihon Shōkaki Naishikyō Gakkai, et al , est une
étude rétrospective réalisée entre aout 2012 et aout 2013 au sein d’un hôpital de Kawasaki.
Les patients sous antithrombotiques et anticoagulants (AVK et NACO) devant subir un acte
endoscopique (fibroscopie gastrique ou coloscopie) avec biopsie pour diagnostic/depistage de
cancer et/ou exploration d’une anémie ont été retenus. Les autres indications ont été exclues
tout comme les patients ayant arrêté les antithrombotiques et/ou les anticoagulants et/ou ayant
fait un relais par Héparine avant les actes endoscopiques.
Par ailleurs , l’hémostase spontanée était évaluée après la biopsie et confirmée durant
l’endoscopie, sinon une hémostase endoscopique était réalisée.
Les évènements rapportés par les patients ainsi que les évènements hémorragiques gastro-
intestinaux (méléna, hématémèse, anémie) étaient évalués rétrospectivement.
Au total, parmi les 7939 patients qui ont subi une endoscopie gastro-intestinale et une
coloscopie durant la période étudiée, 1034 ont reçu des antithrombotiques dont : l’aspirine
(48.8%) , la warfarine (34.7%) , plavix (16.1%) , cilostazol (10.3%) , dabigatran (4.8%).
Parmi les 7939 patients, 3671 ont subi une biopsie.
Parmi eux, 206 patients étaient sous antithrombotiques dont : 105 patients sous aspirine
(51%), 47 patients sous Warfarine (22.8%), 28 patients sous clopidogrel et
thienopyridine(13.6%), 27 patients sous cilostazol (13.1%), 5 patients sous Dabigatran (2.4%)
et 15 patients sous autres antithrombotiques (7.3%).
La réalisation d’une hémostase endoscopique a été nécessaire pour 3 patients (1.5%) parmi les
206 recevant des antithrombotiques et 34 patients (0.98%) parmi les 3465 patients restant
(contrôle) ne prenant pas d’antithrombotique.
Il n’y avait donc pas de différence significative (p<0.51) entre les deux groupes dans le taux
d’hémostase endoscopique nécessaire.
135
Chez les patients sous antithrombotiques ayant nécessité une hémostase endoscopique, 2
patients (66.7%) étaient sous warfarine et 1 patient (33.3%) prenait de l’aspirine.
Par ailleurs, il n’y avait pas de complication significative (pas de saignement digestif
notamment).
D’après les auteurs, cette étude permet de conclure que la poursuite des antithrombotiques et
anticoagulants dont le Dabigatran, n’augmenterait pas le risque hémorragique lors de la
réalisation d’une endoscopie digestive avec biopsie.
Concernant les NACO, la puissance de cette publication semble relativement faible car elle ne
concerne que 5 patients sous Dabigatran. Par ailleurs, elle se limite aux biopsies et n’évoque
pas les autres actes plus invasifs.
Les deux autres grandes études de cohorte sont des publications dérivées des études
randomisées ARISTOTLE et RE-LY qui sont à la base de la mise sur le marché
respectivement de l’Apixaban et du Dabigatran.
Le premier article [50] datant de juillet 2012 est la publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis, Healey,
Eikelboom et al dans le journal Circulation vue précédemment.
Les actes endoscopiques sont représentés par une intervention : la coloscopie , classée parmi
les chirurgie à risque hémorragique standard.
-FOGD avec biopsies -Coloscopie avec biopsies
Poursuite du Dabigatran
136
Ainsi, le protocole de gestion du dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour les
actes endoscopiques est le suivant :
Le deuxième article [51] est celui dérivé de l’étude ARISTOTLE : intitulé
«Management and clinical outcomes in patients treated with apixaban vs warfarin
undergoing procedures » , publié en décembre 2014 par Garcia, Alexander, Wallentin
et al, dans le Journal Of The American Society Of Hematology et dont les résultats
ont été vus précédemment.
Les actes d’endoscopie sont cités à travers 2 interventions : les actes d’endoscopie haute et la
coloscopie.
En conclusion, nous notons que, pour les actes endoscopiques, la littérature comporte plus de
données que pour la plupart des chirurgies concernant la gestion des NACO en péri-
interventionnel. Les différents actes endoscopiques sont plus détaillés que les autres
interventions.
Coloscopie
Interruption du Dabigatran
Clairance (ml/min)
50-80 24h
30-50 >48h
<30 2-4 jours
137
Cependant, hormis quelques études de cohortes dont la puissance reste encore très limitée car
ne comportant qu’une population limitée de patients, les conduites à tenir se fondent sur les
recommandations de groupes d’experts ou sociétés savantes.
Concernant ces recommandations, les sociétés savantes présentent quelques divergences dans
la gestion des NACO, notamment dans les cas d’insuffisance rénale.
Ces résultats montrent la nécessité de réaliser des études plus poussées et plus puissantes.
En regroupant l’ensemble des données de la littérature nous pouvons établir tout de même un
schéma de gestion des NACO en péri-opératoires des principaux actes endoscopiques :
138
Actes endoscopiques à faible risque hémorragique :
-Endoscopie diagnostique sans biopsie (coloscopie/ FOGD)
-CPRE sans sphinctérotomie
-Capsule endoscopique
-Echo-endoscopie diagnostique
Actes endoscopiques à haut risque hémorragique :
-FOGD/Coloscopie avec biopsies multiples
-Polypectomie
-CPRE avec sphinctérotomie
-Traitement des varices oesophagiennes
-Gastropexie
-Gastrostomie percutanée endoscopique
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Clairance(ml/min) Rivaroxaban Apixaban
>50 24h 24h
30-50 24h 24h
15-30 48h 48h
Reprise des NACO à 24h
INTERRUPTION DES NACO (H pré-opératoire)
Acte endoscopique
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Dabigatran
>80 ml/min 48h
50-80 ml/min 48h
30-50 ml/min 96h
<30 ml/min 144h
INTERRUPTION DES NACO (H pré-opératoire)
Rivaroxaban / Apixaban : 48h (quelque soit la clairance)
Acte endoscopique
Reprise des NACO à 48h
139
V.8.CHIRURGIE DENTAIRE
La recherche bibliographique retrouve au total 38 articles relatifs aux NACO et aux chirurgies
et actes dentaires.
18 publications traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des chirurgies en général
dont, tandis que 20 publications s’intéressent spécifiquement aux interventions dentaires.
6 études de cohortes, 1 étude comparative et 31 publications relatives aux recommandations
de groupes d’experts ou sociétés savantes , sont retrouvées.
Ainsi, nous allons décrire les différents résultats retrouvés au sein de ces publications par
ordre de recommandations en allant du niveau le plus faible au niveau le plus élevé.
Recommandations grade D
Sociétés savantes
-EHRA : plusieurs publications [31 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 72] reprennent les
recommandations de cette société savante.
L’EHRA cite spécifiquement et en détail les différents actes de chirurgie dentaire.
Ainsi, ceux-ci sont classés parmi les interventions « ne requérant pas nécessairement pas
l’arrêt des anticoagulants ».
Nous constatons donc que les recommandations de cette société savante sont plus précises
pour cette chirurgie.
Concernant les actes dentaires, l’algorithme de gestion péri-opératoire des NACO préconisé
par l’EHRA est le suivant :
140
Algorithme péri-opératoire proposé par l’EHRA
- ACCP : la chirurgie dentaire est également citée [31, 36, 38, 42, 43] dans les
recommandations de cette société savante.
En effet, l’ACCP évoque les actes dentaires « mineurs » sans précision et les incisions
d’abcès, qu’elle classe dans les chirurgies à bas risque hémorragique.
Les recommandations de cette société savante sont moins précises que celles de l’EHRA.
Ainsi, l’agorithme suivant de gestion péri-opératoire des NACO concernant les actes dentaires
est proposé par l’ACCP :
Algorithme péri-opératoire proposé par l’ACCP
Actes de chirurgie dentaire :
-extraction dentaire : 1 à 3 dents-chirurgie parodontale-incision d’abcès-implant dentaire
Intervention à programmer 18-24h après la dernière prise du NACO
Intervention
Reprise du NACO possible 6h après l’intervention
-Actes dentaires mineurs
-Incision d’abcès
Pas d’interruption des NACO
Intervention à prévoir entre 2 prises de NACO
141
-GIHP : les recommandations [31, 44, 45, 46] de cette société savante nt clairement les actes
de chirurgie dentaire.
Ces actes sont cités parmi « un certain nombre d’interventions réalisées sans interruption des
AVK et qui doivent très probablement pouvoir être aussi réalisés sous NACO ou après une
interruption de 24h ».
Ainsi, nous notons tout d’abord que cette société savante propose une conduite à tenir
approximative, mimant celle recommandée par l’HAS elle-même fondée sur celle de la
société française de chirurgie orale (SFCO).
Par ailleurs, aucun acte précis n’est cité mais les auteurs du groupe de travail nous renvoient
vers les actes évoqués par SFCO.
Il s’agit donc de recommandations peu précises, basées sur des hypothèses pharmacologiques,
de niveau de preuve très faible.
L’algorithme pouvant être proposé en s’inspirant des recommandations du GIHP, et donc de
l’HAS et de la SFCO, est le suivant :
142
Algorithme péri-opératoire proposé par le GIHP
Actes dentaires à risque hémorragique élevé :
-avulsions dentaires multiples
-implants dentaires multiples
-greffe gingivale
-chirurgie des kystes et tumeurs osseuses >3 cm
-chirurgie pré-implantaire
Actes dentaires à risque hémorragique faible :
-détartrage
-avulsion dentaire simple
-extraction dentaire
-pose d’implant dentaire simple
Poursuite des NACO
Risque thrombotique faible Risque thrombotique élevé
Arrêt des NACO la veille et le jour de l’intervention(fenetre thérapeutique de 48h)
Arrêt des NACO à J-5 et relais par Héparine
143
Avis d’experts
Hormis les publications reprenant les recommandations des grandes sociétés savantes, nous
retrouvons de nombreux articles basés sur des avis d’experts s’appuyant sur les propriétés
pharmacologiques des NACO et s’intéressant aux actes dentaires.
Ces avis d’experts [73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83] citent deux grandes
publications :
- “Dabigatran etexilate – a novel, reversible, oral direct thrombin inhibitor: Interpretation of
coagulation assays and reversal of anticoagulant activity” publiée en Juin 2010 dans le
Journal Thrombosis par J. van Ryn , J. Stangier , S. Haertter et al, expose et rappelle les
différentes propriétés pharmacologiques du Dabigatran [84] .
En s’appuyant sur ces caractéristiques pharmacologiques, Cette publication offre des
recommandations de gestion du Dabigatran en péri-opératoire de chirurgies en général dont
les chirurgies dentaires.
Par ailleurs, dans leur publication [85] “ Beyond warfarin: the new generation of oral
anticoagulants and their implications for the management of dental patients” datant de 2012 ,
John Firriolo et al extrapolent ce schéma de gestion du Dabigatran dans les chirurgies
dentaires au Rivaroxaban et proposent d’adapter les recommandations aux actes dentaires.
Cependant, la classification des actes dentaires est peu détaillée et très peu précise.
144
Le schéma de gestion proposé est le suivant :
-“Anti-Thrombotic Therapy: Implications for Invasive Outpatient Procedures in Dentistry”
est une publication parue en 2013 dans le Journal Of Blood Disorders and Transfusion. Dans
cet article [86], Hong CH, Islam I et al s’intéressent spécifiquement à la gestion des NACO
dans les actes dentaires en utilisant également les données pharmacologiques retrouvées dans
la littérature sur ces molécules.
La classification des actes dentaires est beaucoup plus précise que la publication précédente et
de nombreuses interventions sont citées.
Actes dentaires (risque hémorragique bas) Chirurgie orale et maxillofaciale (risque hémorragique standard)
Pas d’interruption du Dabigatran/ Rivaroxaban Interruption des NACO
Clairance (ml/min) Dabigatran/ Rivaroxaban
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min >48h
15-30 ml/min 2-5 jours
Reprise du Dabigatran/Rivaroxaban à 24-48h
145
Cependant, la fonction rénale du patient n’est pas un facteur pris en compte dans la gestion
péri-interventionnel des NACO.
Le schéma de gestion proposé est le suivant :
Nous constatons donc que ces deux grandes publications sont très globales soit concernant le
NACO et ses propriétés pharmacologiques soit concernant le type d’acte dentaire.
Dans les deux cas, il s’agit d’avis d’experts et donc de recommandations de niveau de preuve
faible.
Actes dentaires à risque hémorragique bas ou moyen :
-extraction dentaire <5 dents
-biopsie tissulaire <1cm
-bridge dentaire
-détartrage
-traitement de canal dentaire
-appareillage dentaire
-placement d’un implant dentaire
Actes dentaires à risque hémorragique élevé :
- extraction dentaire >5 dents
- biopsie tissulaire >1cm
-biopsie osseuse
-placement d’implants dentaires multiples
-chirurgie parodontale
-chirurgie endodentaire avec manipulation osseuse (greffe)
Poursuite des NACO Interruption des NACO 24h avant l’acte
Intervention
Reprise des NACO à H24
146
Enfin, deux revues [87, 88] de la littérature reprennent l’ensemble des avis d’experts retrouvés
dans la base de données PubMed, se fondent sur les deux publications vues ci-dessus mais
également s’étendent à d’autres avis publiés dans les journaux et sites internets d’autres
groupes ou sociétés savantes (notamment anglo-saxonnes).
Ces recommandations présentent un niveau de preuve faible.
Recommandations grade B :
Etudes de cohortes
Deux études de cohortes spécifiques à la gestion des NACO péri-interventionnelle des
chirurgies et actes dentaires sont retrouvées et concernent toutes les deux la chirurgie
d’implant dentaire, l’une pour le Dabigatran et l’autre pour le Rivaroxaban.
- “Dental implant surgery in patients in treatment by dabigatran” est une publication [89] de
janvier 2016 dans le journal Clinical Implant Research dans laquelle Gomez-Moreno et al
s’intéressent à la survenue d’évènements hémorragiques après une chirurgie d’implant
dentaire chez une population de patients traitées par Dabigatran.
71 patients devant subir une chirurgie d’implant dentaire ont été séparés en deux groupes : 29
étaient sous Dabigatran (150mg deux fois par jour, groupe Dabigatran) et 42 autres patients
n’étaient pas sous anticoagulant (groupe contrôle).
Tous les patients ont subi une chirurgie d’implant dentaire : concernant le groupe Dabigatran,
la chirurgie était réalisée 12h après la dernière dose d’anticoagulant et le Dabigatran était
repris 8h après l’acte chirurgical et à la posologie habituelle (deux fois par jour) le lendemain.
2 patients sous Dabigatran et 2 patients du groupe contrôle ont présenté un discret saignement
le lendemain de l’intervention.
Aucune différence significative n’était retrouvée dans la survenue d’événement hémorragique
entre les deux groupes (p=0.542, risque relatif 0.675).
Ainsi, le schéma de gestion du Dabigatran proposé par les auteurs et considéré comme sans
risque dans les chirurgies d’implants dentaires est le suivant :
147
-“Dental implant surgery in patients in treatment with the anticoagulant oral rivaroxaban”
est une publication [90] de juin 2016 dans le journal Clinical Implant Research réalisée par les
mêmes auteurs que l’article précédent.
Gomez-Moreno et al se sont intéressés à la survenue d’évènements hémorragiques après une
chirurgie d’implant dentaire chez une population de patients traitées par Rivaroxaban sans
interruption du NACO.
57 patients devant subir une chirurgie d’implant dentaire ont été séparés en deux groupes : 18
étaient sous Rivaroxaban et 39 autres patients n’étaient pas sous anticoagulant (groupe
contrôle).
Tous les patients ont subi une chirurgie d’implant dentaire sans interruption des
anticoagulants.
1 patient qui était sous Rivaroxaban a présenté un saignement modéré le lendemain et le
surlendemain de l’intervention.
Aucune différence significative n’était retrouvée dans la survenue d’événement hémorragique
entre les deux groupes (p=0.688 , risque relatif 0.688).
Ainsi, les auteurs considèrent que la poursuite du Rivaroxban présente un risque de
saignement peu significatif dans les chirurgies d’implants dentaires.
Chirurgie d’implants dentaires Arrêt du
Dabigatran à H-12
Reprise du Dabigatran à H+8
Chirurgie d’implants dentaires Poursuite du Rivaroxaban
Intervention
148
Ces deux études de cohortes présentent une puissance relativement bonne puisqu’ils
concernent un nombre significatif de patients pour une chirurgie donnée.
Cependant, deux points constituent des limites à ces études.
Tout d’abord, la fonction rénale des patients n’est pas détaillée et n’est pas prise en compte
dans le schéma de gestion et nous ne savons pas dans quel contexte l’évènement
hémorragique est survenu dans les deux études.
Par ailleurs, les évènements thromboemboliques ne sont pas recensés et la balance
bénéfice/risque du schéma de gestion des NACO n’est pas présentée.
Les quatre autres études de cohortes traitent de la gestion des NACO en péri-opératoire des
chirurgies en général, dont les chirurgies actes dentaires :
Dans l’étude de cohorte [48] publiée en 2014 dans l’European Heart Journal intitulée
« Peri-interventional management of novel oral anticoagulants in daily care: results
from the prospective Dresden NOAC registry » vue précédemment, les actes dentaires
sont mentionnés à travers deux interventions :
-les « traitements dentaires sans extraction » : classés parmi les interventions à risque
hémorragique « minimal » et qui ont concernés 25 patients dans l’étude.
-les extractions et implants dentaires : classés parmi les interventions à risque hémorragique
« mineur » et qui ont concernés 116 patients.
Pour les actes dentaires sans extraction, pour la majorité des patients, les NACO ont été
poursuivis.
Pour les extractions dentaires et les implants, si les NACO ont été interrompus , cette
interruption était relativement courte : arrêt 48h avant et reprise 24h après l’acte.
Dans tous les cas, aucun évènement hémorragique ou thromboembolique n’est survenu chez
ces patients quelque soit le schéma de gestion des NACO qui a été utilisé et quelque soit le
NACO.
Ainsi, cette étude, qui semble présenter une puissance élevée (surtout concernant les actes
dentaires avec une population relativement significative de patients), n’est pas très précise
quant aux différents actes concernés.
149
Cependant, elle permet de proposer le schéma de gestion suivant :
La deuxième publication [49], datant de juillet 2015 dans l’American Heart
Association Journal, est l’étude prospective de cohorte multicentrique canadienne
menée par la Heart and Stroke Fundation of Canada, Sam Schulman , Marc Carrier et
al s’intéressant spécifiquement à la gestion péri-opératoire du Dabigatran et vue
précédemment.
Dans cette étude, la chirurgie dentaire apparait de manière très globale sous le terme « d’acte
dentaire » et concerne 9 patients.
Parmi eux, 7 patients ont subi des actes dentaires classés parmi les interventions à risque
hémorragique standard tandis que 2 patients ont subi des actes dentaires classés parmi les
interventions à haut risque hémorragique
Comme nous l’avons vu dans l’analyse de cette étude, la survenue d’évènements
hémorragiques était relativement faible.
Le protocole de gestion péri-opératoire du Dabigatran proposé par les auteurs , selon le risque
hémorragique , semblait donc approprié et efficace.
Actes dentaires sans extraction
Poursuite des NACO
Extractions et implants dentaires
Arrêt des NACO à H-48
Intervention
Reprise des NACO à H+24
150
Cependant, nous constatons que l’interprétation de cette étude pour les actes dentaires est très
difficile et limitée par deux éléments : le très faible nombre de patients concernés et la
classification très imprécise des actes dentaires.
Cette étude permet de proposer un algorithme très global de gestion du Dabigatran en péri-
opératoire d’une intervention dentaire :
Le troisième article [50] datant de juillet 2012 est la publication intitulée
“Periprocedural Bleeding and Thromboembolic Events With Dabigatran Compared
With Warfarin Results From the Randomized Evaluation of Long-Term
Anticoagulation Therapy (RE-LY) Randomized Trial” publiée par Douketis, Healey ,
Eikelboom et al dans le journal Circulation vue précédemment.
Actes dentaires à risque hémorragique standard
Actes dentaires à haut risque hémorragique
Délai d’interruption du Dabigatran
48h
48h
96h
144h
Fonction rénale (Cockroft ml/min) Délai d’interruption du Dabigatran
>80 ml/min 24h
50-80 ml/min 24h
30-50 ml/min 48h
<30 ml/min 96h
Reprise du Dabigatran le soir de l’intervention à 75mg puis 150mg deux fois à partir du lendemain matin Reprise du Dabigatran à 48-72h
Intervention Intervention
151
La chirurgie dentaire est citée de manière globale sous le terme « d’intervention dentaire » et
était classée dans les chirurgies à risque standard. Elle a concerné 10% des patients inclus
dans cette étude et donc une population de patients relativement significative.
Cependant, la description de cette chirurgie apparait encore une fois très globale car aucun
acte n’est détaillé , et aucune précision quant au délai de reprise du NACO n’est donnée.
Le protocole de gestion du Dabigatran adapté au schéma proposé par cette étude pour les
actes dentaires est le suivant :
Le quatrième article [51] est celui dérivé de l’étude ARISTOTLE : intitulé
«Management and clinical outcomes in patients treated with apixaban vs warfarin
undergoing procedures » , publié en décembre 2014 par Garcia, Alexander ,
Wallentin et al , dans le Journal Of The American Society Of Hematology et dont les
résultats ont été vus précédemment.
La chirurgie dentaire est citée à travers les extractions dentaires et la chirurgie orale et
concernait une grande population de l’étude (1435 patients soit 14.6% des patients inclus).
Acte dentaire
Interruption du Dabigatran
Clairance(ml/min)
50-80 24h
30-50 >48h
<30 2-4 jours
152
La puissance de cette étude est donc d’autant plus élevée pour les actes dentaires et renforce
les résultats retrouvés à savoir que :
-le risque d’événements thrombo-emboliques et de saignement majeur dans les 30 jours post-
opératoires était faible et statistiquement non différent que le patient soit sous apixaban ou
warfarine
-un relais par héparine n’est pas nécessaire chez les patients sous apixaban
-le délai d’interruption de l’apixaban dépend du risque hémorragique et du risque thrombo-
embolique de chaque individu, mais les recommandations d’interruption à 24-48h de
l’intervention semblent raisonnables.
Etude comparative
La littérature, concernant la gestion des NACO en péri-interventionnel des actes dentaires,
comprend 1 étude comparative [91].
La publication intitulée « Management of anticoagulated patients in implant therapy ; a
clinical comparative study » parue en novembre 2015 dans le journal Clinical Oral Implant
Research, constitue une étude prospective comparative ayant pour objectif principal de
comparer le risque de saignement post-opératoire chez les patients subissant une chirurgie
d’implant ou de greffe osseuse dentaire sans interrompre leur traitement anticoagulant (dont
les NACO) par rapport aux patients subissant la même intervention et qui ne sont pas sous
anticoagulant .
Dans leur méthode, R. Clemm, F. W. Neukam, B. Rusche et al ont sélectionné les patients
dans le département de chirurgie orale et maxillo-faciale de l’université de Erlangen-
Nuremberg en Allemagne, devant subir une intervention programmée d’implants dentaires
entre janvier 2012 et janvier 2014.
Les critères d’inclusion comportaient : un âge >18 ans, l’absence de parodontite chronique, et
une bonne hygiène dentaire (au moins 2 détartrages par an).
Les critères d’exclusion étaient : une sinusite chronique, une parodontite chronique, une
mauvaise hygiène dentaire, un tabagisme ou alcoolisme chronique, un trouble de coagulation,
un trouble auto-immun, une grossesse en cours.
153
Les patients étaient divisés dans les différents groupes selon le type et le caractère invasif de
la chirurgie dentaire subie (7 groupes au total).
Puis, selon leur traitement anticoagulant, les patients de chaque groupe étaient divisés en
sous-groupes :
1-Groupe contrôle sans anticoagulation
2-Groupe test avec un anticoagulant :
a) Anti-aggrégants plaquettaires
b) AVK
c) AVK relayés par HBPM
d) NACO
Les patients sous anti-agrégants plaquettaires et sous NACO ont poursuivi leur traitement.
Pour les patients sous AVK, certains ont arrêté leur médicament sans relais tandis que
d’autres ont subi un relais par HBPM et l’INR était controlé 1h avant l’intervention.
Une antibioprophylaxie était mise en place sous forme de dose unique 1h avant l’intervention.
Les paramètres suivants étaient enregistrés avant l’intervention :
- le type d’anticoagulation
- l’INR
- l’indication de l’anticoagulation
Les paramètres suivants étaient enregistrés en per-opératoire :
- saignement per-opératoire (faible, modéré, sévère)
- réalisation ou non d’une incision périostale (invasive)
Les paramètres suivants étaient enregistrés en per-opératoire :
- la survenue d’un saignement précoce (< 24h post-opératoire)
- la survenue d’un saignement tardif (>24h post-opératoire)
- la région spécifique du saignement (si un saignement est survenu)
- la sévèrité du saignement (si un saignement est survenu)
1) Faible : contrôlable par compression
2) Modéré : si un geste hémostatique local est nécessaire
3) Sévère : saignement artériel, nécessitant un geste hémostatique supplémentaire
- le type de geste hémostatique réalisé si un saignement est survenu
- le suivi post-opératoire
L’examen post-opératoire était réalisé 1 jour et 10 jours après l’intervention.
154
Au total, 564 patients ont participé à l’étude.
117 (20.7%) des patients étaient sous anticoagulants.
Parmi eux, 16 patients étaient sous NACO (6 sous Dabigatran, 8 sous Rivaroxaban, 2 sous
Apixaban).
63 patients étaient sous anti-agrégants, 30 sous AVK et 8 ont subi un relai AVK-HBPM.
Aucun événement thromboembolique n’est survenu durant toute la durée de l’étude.
Aucune complication per-opératoire n’est survenue.
Un faible risque de saignement post-opératoire était constaté pour l’ensemble des groupes
(1.2%).
7 patients ont connu un saignement local post-opératoire : 3 dans le groupe contrôle et 4 dans
le groupe de patients anticoagulés : 2 chez les patients sous AVK, 1 chez les patients ayant
subi un relais par HBPM et 1 chez les patients sous anti-agrégants.
Aucun patient sous NACO n’a connu de saignement post-opératoire.
Ainsi, au total, un faible risque de saignement post-opératoire était constaté chez l’ensemble
des patients (1.2%).
Le risque de saignement était de 0.6% dans le groupe contrôle, de 3.4% dans le groupe de
patients anticoagulés.
Aucune différence statistiquement significative n’était donc retrouvée entre les deux groupes
dans la survenue de saignement post-opératoire mais également entre chaque sous groupe
d’anticoagulants.
Aucune différence significative n’était retrouvée également pour chaque sous groupe d’acte
dentaire.
Concernant les NACO, aucun saignement post-opératoire n’a été constaté suggérant, comme
l’affirment les auteurs, que le risque de saignement chez les patients sous NACO était très
faible.
Les auteurs concluent donc que : la survenue d’événements hémorragiques est très faible dans
la chirurgie d’implants dentaires lorsqu’un traitement anticoagulant est poursuivi, et d’autant
plus chez les patients sous NACO.
Ils recommandent donc la poursuite de ces anticoagulants dans ce contexte.
155
Plusieurs limites sont cependant constatées dans cette publication :
- le faible nombre de patients sous NACO , qui ne donne pas une puissance très élevée .
- l’antibioprophylaxie pré-opératoire : qui peut interagir avec les anticoagulants
Par ailleurs, aucune distinction n’est faite entre les NACO et la fonction rénale des patients
sous NACO n’est pas précisée.
En conclusion, concernant la chirurgie dentaire, celle-ci est l’une des chirurgies la plus citée
dans la littérature dans la gestion des NACO en péri-opératoire.
De nombreuses recommandations de sociétés savantes et avis d’experts plus ou moins précis
sont retrouvés.
Les chirurgies d’implants dentaires semblent être sujettes à controverse puisque plusieurs
publications s’y intéressent.
Cependant, la majorité des publications présentent un niveau de preuve relativement faible et
la réalisation d’études plus puissantes est nécessaire.
A travers les différents résultats, un schéma synthétisant la gestion des NACO en péri-
opératoires des actes et chirurgies dentaires peut être proposé :
Implants dentaires et greffe osseuse Poursuite des NACO
156
Actes dentaires à faible risque hémorragique :
-Incision d’abcès-Implant dentaire unique -Détartrage-Avulsion dentaire simple-Extraction dentaire <5 dents -Biopsie tissulaire <1cm-Bridge dentaire-Traitement de canal dentaire-Appareillage dentaire
Poursuite des NACO
Actes dentaires à haut risque hémorragique :
-Avulsions dentaires multiples-Implants dentaires multiples -Greffe gingivale-Chirurgie des kystes et tumeurs osseuses >3 cm - Extraction dentaire >5 dents - Biopsie tissulaire >1cm-Biopsie osseuse -Implants dentaires multiples -Chirurgie parodontale - Chirurgie endodentaire avec manipulation osseuse (greffe)-Chirurgie orale et maxillofaciale
Clairance(ml/min)
>80 24h
50-80 24h
30-50 >48h
<30 2-4 jours
Interruption de Dabigatran (H pré-opératoire)
Interruption du Rivaroxaban/ Apixaban à H-24
Intervention
Reprise des NACO à H+24
157
DISCUSSION
Les différents résultats retrouvés dans la littérature et exposés dans ce travail permettent
d’établir un schéma de gestion péri-opératoire des NACO pour les principales interventions
rencontrées par le médecin généraliste du fait de leur diversité quantitative et malgré le faible
niveau qualitatif.
L’étude de la littérature nous permet de mettre en évidence qu’en terme quantitatif, les
publications traitant de la gestion péri-opératoire des NACO sont nombreuses de manière
générale mais plus ou moins riches selon le type de chirurgie.
En effet, par exemple, nous constatons que la gestion des NACO en péri-opératoire des
chirurgies et des actes dentaires comportent de très nombreuses références dans la
bibliographie que cela soit au sein de publications générales mais également à travers des
publications spécifiquement consacrées à ces actes. Il en est de même pour les actes
endoscopiques, les actes rhumatologiques et les petites chirurgies ophtalmologiques
(cataracte et glaucome).
Nous pouvons émettre plusieurs hypothèses pour expliquer ce résultat.
De prime abord, ces interventions sont probablement les plus fréquentes et les plus
rencontrées en ambulatoire chez les patients sous NACO et le besoin de recommandations
plus spécifiques et plus précises ainsi que d’études plus poussées est plus important,
notamment pour le médecin généraliste.
Par ailleurs, si peu d’études scientifiques de grande puissance ont pu être réalisées, la plupart
des recommandations pour ces actes se fondent voire miment celles déjà très nombreuses,
claires et précises de l’HAS en France ou des autres sociétés savantes aux Etats-Unis
concernant la gestion des AVK en péri-opératoires des actes dentaires, des interventions
endoscopiques et des actes rhumatologiques.
Pour les autres chirurgies, la richesse de la littérature est très inégale.
La chirurgie urologique est bien représentée et citée dans la littérature à travers trois grandes
interventions programmées les plus fréquemment rencontrées en ambulatoire et pouvant
permettre de guider le médecin généraliste : la biopsie de prostate, la biopsie vésicale, la
RTUP.
Le même constat est fait pour la chirurgie plastique et dermatologique qui est mentionnée
dans un bon nombre de publications qui offrent au médecin généraliste de nombreuses
158
données quant à la gestion d’actes auxquels il est très fréquemment confronté : les chirurgies
cutanées superficielles (exérèse de tumeurs cutanées ou biopsies cutanées).
Les références concernant la gestion des NACO en péri-opératoires des chirurgies ORL se
limitent principalement à une intervention : l’amygdalectomie. L’explication la plus logique
est qu’il s’agit d’une chirurgie connue pour son risque hémorragique important et très variable
selon les patients mais également car il s’agit d’une des interventions les plus fréquentes et
dont la gestion péri-opératoire est habituellement ambulatoire et donc laissée au médecin
généraliste.
La chirurgie abdominale est la moins représentée probablement parce qu’il existe une très
grande diversité d’interventions et qu’il est très difficile d’établir une règle générale de
gestion des NACO.
Nous constatons donc qu’en terme quantitatif, le médecin généraliste trouve dans la littérature
des données relativement riches et variées concernant la gestion des NACO en péri-opératoire
des interventions auxquelles il est le plus souvent confronté.
En terme qualitatif, l’étude de la littérature offre moins de diversité et de puissance pour le
médecin généraliste.
En effet, la très grande majorité des publications concernant la gestion péri-opératoire des
NACO repose sur les recommandations de trois sociétés savantes ou groupes d’experts :
l’EHRA, l’ACCP et le GIHP.
Ces recommandations sont fondées sur les données pharmacologiques des NACO et prennent
en compte la fonction rénale du patient, le risque hémorragique des différentes chirurgies et le
risque thrombo-embolique des patients à travers une classification le plus souvent très
subjective et très variable d’un groupe d’expert à l’autre. Ainsi, par exemple, une même
chirurgie peut être classée dans les interventions à risque hémorragique modéré ou à risque
hémorragique sévère selon la classification du groupe d’expert que l’on consulte. Nous
comprenons donc que le schéma de gestion des NACO varie, parfois de manière significative,
selon la société savante.
Le GIHP, lui, mime également les recommandations déjà établies pour la gestion des AVK en
péri-opératoire. Nous pouvons donc supposer qu’il s’agit d’approximations conséquentes.
Nous constatons donc que la plupart des données de la littérature, en se basant sur les
recommandations de ces sociétés savantes, constituent un niveau de preuve très faible.
La revue de littérature retrouve cependant quelques études scientifiques.
159
Une étude de cas est retrouvée pour la chirurgie ORL concernant la gestion du rivaroxaban en
péri-opératoire d’une amygdalectomie.
Il en est de même pour le dabigatran en chirurgie urologique.
Cependant, il s’agit là encore d’études présentant un niveau de preuve faible.
Cinq études de cohorte d’une puissance et d’un niveau de preuve plus élevé sont retrouvées
dans la littérature.
Une étude rétrospective cherche à determiner la fréquence et la sévérité des complications en
péri-opératoires des chirurgies cutanées chez des patients sous Rivaroxaban ou Dabigatran.
La deuxième est une étude rétrospective incluant un nombre significatif de patients, concerne
la gestion des NACO en péri-opératoire de nombreuses chirurgies et s’intéresse au risque
hémorragique d’un protocole de gestion défini et à la nécessité ou non d’un relais par
héparine.
La troisième étude concerne la gestion du dabigatran en péri-opératoire de différentes
chirurgies chez un nombre significatif de patients.
Les deux autres publications utilisent les données et les patients des études RE-LY et
ARISTOTLE afin de comparer les bénéfices et les risques d’un relais par héparine en péri-
opératoire d’interventions chirurgicales diverses ou de proposer un schéma-type de gestion
des NACO chez les patients respectivement sous dabigatran et apixaban.
Nous notons donc que peu d’études scientifiques probantes ont été publiées et que les seules
études d’un niveau de preuve correct sont spécifiques à des interventions particulières ou à un
NACO particulier.
Nous pouvons supposer que, du fait de la commercialisation relativement récente de ces
molécules (2008) et de leur entrée encore plus récente dans la pratique des médecins, le recul
est insuffisant et qu’il a été pour l’instant difficile de réaliser des études de puissance
suffisante pour être publiées au sein de revues médicales internationales.
Cependant, la limite principale de cette étude réside dans les langues dans lesquelles la
recherche a été faite.
En effet, seules les publications en français et en anglais ont été inclues. Or, nous pouvons
imaginer qu’il existe des études scientifiques d’une puissance et donc d’un niveau de preuve
plus élevés réalisées dans d’autres langues et à travers d’autres régions du monde notamment
en Asie. L’étude de cohorte issue du journal de la société japonaise de gastro-entérologie et
concernant la gestion du Dabigatran en péri-interventionnel des actes endoscopiques, incluse
dans notre revue de la littérature car traduite en anglais, nous laisse penser que d’autres
160
publications de ce type, qui seraient intéressantes pour notre pratique mais qui n’ont pas pu
être traduites, existent.
Ainsi, un effort de traduction et une coopération internationale concernant les différentes
conduites à tenir dans la gestion péri-opératoire des NACO serait la bienvenue.
Cette étude a donc permis de mettre en évidence les lacunes existant dans la littérature
concernant la gestion péri-opératoire des NACO, les types d’interventions qui méritent la
réalisation d’études plus poussées pour aider le médecin généraliste dans sa pratique
quotidienne et constitue un appel à différents groupes de chercheurs à explorer la question de
la gestion des NACO.
161
CONCLUSION
Les NACO sont des molécules dont la pharmacologie reste encore peu connue et que les
médecins généralistes ne sont pas habitués à manier dans leur pratique quotidienne. Or,
paradoxalement, ces médicaments sont de plus en plus prescrits et leurs indications ont eu au
fil du temps tendance à s’élargir. Par ailleurs, devant notamment le vieillissement de la
population, les patients sous anticoagulant et sous NACO sont de plus en plus nombreux .
Ceux-ci présentent pour la plupart un terrain clinique lourd et nombreux sont ceux qui devront
subir une intervention chirurgicale.
Dans ce contexte, les praticiens de ville sont et seront de plus en plus confrontés à la gestion
des NACO en péri-opératoire de différentes chirurgies programmées.
Or, cette gestion reste très controversée et relativement floue pour plusieurs raisons que nous
avons pu souligner dans ce travail.
En effet, de prime abord, cette revue de littérature met en évidence le fait que, pour la plupart
des chirurgies, il n’existe que très peu de publications basées sur des études scientifiques
concrètes (aucune méta-analyse, quelques études de cohortes). Les seules études retrouvées
sont des études de cas ou des études de cohorte dont le niveau de recommandation et de
preuve scientifique est relativement bas. L’hypothèse est que les NACO sont des molécules
récentes (sorties en 2008) et que le recul est encore faible.
En outre, la très grande majorité des publications font référence et se fondent sur les
recommandations des grands collèges spécifiques à chaque chirurgie ou à des sociétés
savantes ou avis d’experts. Il s’agit donc encore de recommandations de niveau de preuve le
plus faible.
Ces recommandations sont basées sur plusieurs facteurs associés : les caractéristiques
pharmacologiques de chaque NACO, le risque hémorragique propre à chaque type de
chirurgie ainsi que le risque thrombo-embolique pour chaque patient.
Nous constatons tout de même une grande disparité et de nombreuses contradictions entre les
avis de ces groupes d’experts que cela soit dans la classification des risques hémorragiques de
tel ou tel type de chirurgie ou la gestion même des NACO. Par exemple, certains
recommandent un relais par HBPM en cas d’arrêt des NACO sur une longue période chez des
patients à haut risque thromboembolique tandis que d’autres bannissent l’utilisation d’un
162
relais par héparine qui pourrait augmenter le risque hémorragique sans pour autant protéger
plus d’un évènement thromboembolique.
Nous comprenons donc que, même pour les spécialistes, la question de la gestion des NACO
reste un chantier et qu’il s’agit là de trouver un consensus basé sur des éléments scientifiques
probants.
Ainsi, il semble nécessaire et indispensable que des études de niveau de preuve scientifique
plus élevé voient le jour.
Cependant, en s’appuyant sur l’ensemble des données retrouvées dans la littérature, nous
avons pu établir un schéma de gestion péri-opératoire type en fonction de chaque chirurgie et
pour chaque NACO afin de guider le médecin généraliste dans sa pratique.
163
Synthèse du risque hémorragique et du schéma de gestion des NACO par chirurgie
Tableau-synthèse de gestion péri-opératoire des NACO Acte invasif/ intervention chirurgicale Risque hémorragique Schéma de gestion (Ordre alphabétique) des NACO
-Abdominoplastie Elevé page 86-Amygdalectomie Elevé page 94-Appareillage dentaire Faible page 157-Arthroplastie (hanche/genou/cheville/épaule) Elevé page 120-Avulsion dentaire simple Faible page 157-Avulsions dentaires multiples Elevé page 157-Biopsie cutanée Faible page 86-Biopsie de prostate Modéré page 74-Biopsie de vessie Modéré page 74-Biopsie des glandes salivaires accessoires Faible page 120-Biopsie ganglionnaire Faible page 86-Biopsie hépatique Elevé page 110-Biopsie mammaire Faible page 86-Biopsie osseuse Modéré page 120-Biopsie synoviale Modéré page 120-Biopsie/chirurgie rénale Elevé page 74-Blépharoplastie Elevé page 102-Bridge dentaire Faible page 157-Canal dentaire (traitement) Faible page 157-Capsule endoscopique Faible page 139-Cataracte Faible page 102-Chirurgie reconstructrice Elevé page 86-Chirurgies orbitaires Elevé page 102-Cholangio-pancréatographie rétrograde sans sphinctérotomie Faible page 139-Cholangio-pancréatographie rétrograde avec sphinctérotomie Elevé page 139-Cholecystectomie (coelioscopie) Elevé page 110-Cholestéatome Faible page 94-Circoncision Faible page 74-Colectomie (partielle ou totale) Elevé page 110-Cystoscopie Modéré page 74-Dacryocytorhinostomie Elevé page 94-Detartrage Faible page 157-Echo-endoscopie diagnostique Faible page 139-Endodentaire (chirurgie) avec manipulation osseuse (greffe) Elevé page 157-Endoscopie diagnostique sans biopsie (coloscopie/ FOGD) Faible page 139-Extraction dentaire <5 dents Faible page 157-Extraction dentaire >5 dents Elevé page 157-Fibroscopie oeso-gastro-duodénale/Coloscopie avec biopsies Elevé page 139 multiples -Gastropexie Elevé page 139-Gastrostomie percutanée endoscopique Elevé page 139
164
Bibliographie
Acte invasif/ intervention chirurgicale Risque hémorragique Schéma d’interruption (ordre alphabétique) des NACO-Glaucome Faible page 102-Glomus jugulaire Elevé page 94-Greffe gingivale Elevé page 157-Hernie inguinale (cure) Elevé page 110-Implant cochléaire Faible page 94-Implant dentaire unique Faible page 157-Implants dentaires multiples Elevé page 157-Incision d’abcès dentaires Elevé page 157-Infiltration canalaire profonde Modéré page 120-Infiltration des articulations coxo-fémorales Modéré page 120-Infiltration des articulations périphériques Faible page 120(hors coxo-fémorales)-Infiltration rachidienne Modéré page 120-Infiltration sacro-iliaque Modéré page 120-Infiltrations péri-articulaires Faible page 120-Kystes dentaires (chirurgie) Elevé page 157-Laminectomie Elevé page 120-Laryngectomie Elevé page 94-Main/poignet (chirurgie) Modéré page 120-Mastectomie Elevé page 86-Parodontale (chirurgie) Elevé page 157-Parotidectomie Elevé page 94-Polypectomie intestinale endoscopique Elevé page 139 -Prostatectomie totale Elevé page 74-Resection transuréthrale de prostate Elevé page 74-Resection transuréthrale de tumeur de vessie Elevé page 74-Sinus (chirurgie des) Elevé page 94-Tenotomie percutanée Modéré page 120-Thyroidectomie Elevé page 94-Tumeurs cutanées (exerèse) Faible page 86-Tumeurs osseuses dentaires >3 cm Elevé page 157-Tumorectomie du sein Elevé page 86-Tympanoplastie Faible page 94-Varices oesophagiennes (traitement Elevé page 139endoscopique)
165
BIBLIOGRAPHIE
[1] Site web de l’ANSM.Avril 2014. Disponible sur internet
<http://ansm.sante.fr/content/download/61981/795269/version/2/file/ANSM-
rapport_NACOs-avril+2014.pdf>
[2] Mar PL, Familtsev D, Ezekowitz MD, et al. Periprocedural management of
anticoagulation in patients taking novel oral anticoagulants: Review of the literature and
recommendations for specific populations and procedures. Int J Cardiol. Janvier 2016 , Vol
202, p.578-85
[3] Greg C. Flaker, Paul Theriot, Lea G. Binder, et al. Management of Periprocedural
Anticoagulation A Survey of Contemporary Practice. Journal of the American college of
cardiology. Novembre 2016. Vol 68, n°2
[4 Site web de l’HAS. Septembre 2008. Disponible sur internet :
<http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-09/
surdosage_en_avk_situations_a_risque_et_accidents_hemorragiques__synthese_des_recomm
andations_v2.pdf>
[5] Site web de la société française de réanimation. Septembre 2015. Disponible sur internet :
<http://sfar.org/wp-content/uploads/2015/09/Reactualisation-GIHP_AOD_actes-
programmes_Septembre-20151.pdf>
[6]CHAST F. Histoire contemporaine des medicaments. Edition La Decouverte & Syros.
Paris, 2002. 420 p. La Découverte Poche / Sciences humaines et sociales.
ISBN : 9782707136664
[7] Site web de l’ANSM. Fevrier 2006. Disponible sur internet : <http://www.ansm.sante.fr/S-
informer/Presse-Communiques-Points-presse/Retrait-du-marche-de-l-anticoagulant-
melagatran-ximelagatran>
166
[8] Stuart J. Connolly, M.D., Michael D. Ezekowitz et al. Dabigatran versus Warfarin in
Patients with Atrial Fibrillation. New England Journal Of Medicine, Septembre 2009, vol
361, p.1139-1151
[9] Manesh R. Patel, M.D., Kenneth W. Mahaffey, M.D et al. Rivaroxaban versus Warfarin in
Nonvalvular Atrial Fibrillation. New England Journal Of Medicine, Septembre 2011, vol 365,
p.883-891
[10] Christopher B. Granger, M.D., John H. Alexander et al. Apixaban versus Warfarin in
Patients with Atrial Fibrillation. New England Journal Of Medicine, Septembre 2011, vol
365, p.981-992
[11] Site Web Université Médicale Virtuelle Francophone. Campus Cerimes [en ligne]. Unf3s
[consulté le 23 novembre 2013]. Disponible sur internet :
<http://campus.cerimes.fr/semiologie/enseignement/esemio5/site/html/7_2.html>
[12] De Moerloose P., Boehlen F., Hemostase . Genève : Service d’Angiologie et Hémostase
des Hôpitaux Universitaires et Faculté de Médecine de Genève [en ligne]. 2005. Disponible
sur Internet :
<http://www.medecine.unige.ch/enseignement/apprentissage/module2/circ/apprentissage/
intranet/pb2/hemostase_polycop.pdf>
[13] Site Web Université de Medecine Montpellier-Nimes. Physiologie de l’hémostase [en
ligne]. Disponible sur internet :
<http://www.med.univ-montp1.fr/enseignement/cycle_1/PCEM2/mod-base/
MB7_Bio_Med/Ressources_locales/HEMATO/H3_Hemostase-v2.pdf>
[14] UMVF. Item 175 : Prescription et surveillance d’un traitement
antithrombotique.2010-2011 p.11-5.
[15] Prescrire. Interactions des antivitamines K avec des aliments et des médicaments. Rev
Prescrire. 2013;33(353):193-4.
167
[16] Hulot J-S. Ce qu’il faut retenir de la pharmacocinétique des
anticoagulants Internet]. 2015 Février. Disponible sur internet :
<http://medscape.org/viewarticle/838477>
[17] Ageno W. Oral Anticoagulant Therapy: Antithrombotic Therapy and Prevention of
Thrombosis, 9th ed: American College of Chest Physicians Evidence-Based Clinical
Practice Guidelines.CHEST J. Février 2012. Vol 141 suppl2.
[18] Heidbuchel H, Verhamme P, Alings M, et al. European Heart Rhythm Association
Practical Guide on the use of new oral anticoagulants in patients with non-valvular atrial
fibrillation. Europace.Mai 201. Vol 15, p.625-51.
[19] HAS. Guide parcours desoins fibrillation atriale. Février 2014.
[20] Site internet de l’HAS. Commission de la transparence : Eliquis. [Internet]. Janvier 2012
Disponible sur internet: < http://www.bmsfrance.fr/nos-medicaments/Documents/ ELIQUIS
%C2%AE/AT_eliquis_18012012.pdf>
[21] Site internet de l’HAS. Commission de la transparence : Pradaxa. [Internet]. Décembre
2014. Disponible sur internet : < www.has-sante.fr/portail/upload/docs/evamed/CT-
13190_PRADAXA_PIC_RI_REEV_Avis3_CT13190.pdf>
[22 Site internet de l’HAS. Commission de la transparence Xarelto. [Internet]. Décembre
2014. Disponible sur internet : < http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/evamed/CT-
13565_XARELTO_PIC_RI_REEV_Avis3_CT13565.pdf>
[23 Site internet de l’HAS. Communiqué de presse janvier 2015 [Internet]. Janvier 2015.
Disponible sur internet : < http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2008955/fr/les-naco-
anticoagulants-d-action-directe-n-ont-pas-tous-demontre-la-meme-efficacite>
168
[24] Pernod G, Albaladejo P, Godier A, et al. Prise en charge des complications
hémorragiques graveset de la chirurgie en urgence chez les patients recevant un
anticoagulant oral anti-IIa ou anti-Xa direct. Propositions du Groupe d’intérêt en Hémostase
Périopératoire (GIHP)- Mars 2013. Annales Françaises d’Anesthésie et Réanimation.
Octobre 2013. Vol 32, p.691-700.
[25] Site internet de l’HAS. Avis de la HAS portant sur l'identification d'alternatives
thérapeutiques prises en charge des spécialités PRAXBIND / Idarucizumab. Novembre 2015
[Site Web]. Disponible sur internet: <http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2581868/en/avis-
n-2015-0089/ac/sem-du-4-novembre-2015-du-college-de-la-haute-autorite-de-sante-portant-
sur-l-identification-d-alternatives-therapeutiques-prises-en-charge-par-les-regimes-
obligatoires-de-securite-sociale-des-specialites-praxbind-/-idarucizumab-article-l-162-16-5-2-
du-code-de-la-securite-sociale>
[26] Chu S, Boucher M, Spry C. et al. Le traitement par antidotespour neutraliser l’effet des
anticoagulants oraux directs. L’agence canadienne des médicaments et des technologies de la
santé. Juin 2015. Disponible sur internet: <https://www.cadth.ca/fr/le-traitement-par-
antidotes-pour-neutraliser-leffet-des-anticoagulants-oraux-directs>
[27] Pierre Albaladejo, Fanny Bonhomme, Normand Blais, Jean Philippe Collet, David
Faraoni, Pierre Fontana, Anne Godier, Juan Llau, Dan Longrois, Patrick Mismetti,
Emmanuel Marret, Nadia Rosencher, Stéphanie Roullet, Charles Marc Samama, Pierre Sié,
Jean François Schved, Annick Steib, Sophie Susen et le Groupe d'Intérêt en Hémostase
Périopératoire. Gestion des Anticoagulants Oraux Directs pour la chirurgie et les actes
invasifs programmés : propositions réactualisées du Groupe d'Intérêt en Hémostase
Périopératoire (GIHP)-Septembre 2015- [Site web] Disponible sur internet :
<http://sfar.org/wp-content/uploads/2015/09/Reactualisation-GIHP_AOD_actes-
programmes_Septembre-20151.pdf>
[28]Observatoire des médicaments Dispositifs médicaux Innovations Thérapeutiques
(Omédit). Centre Val de Loire. Avril 2015. [Site web]. Disponible sur internet : <
http://www.omedit-centre.fr/NeverEventAOD_web_gen_web/co/Recommandations_pour_les
_relais_de_traitements_anticoagulants.html>
169
[29] A. Tamigniau, J. Douxfils, J.-B. Nicolas et al. Pourquoi, quand et comment doser les
nouveaux anticoagulants oraux ? , Rev Med Suisse 2014, 416, p.326-333
[30] HAS Site web de l’HAS : Haute autorité de santé [En ligne] Avril 2013. Niveau de
preuve et gradation des recommandations de bonnes pratiques. Disponible sur internet :
<http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-06/
etat_des_lieux_niveau_preuve_gradation.pdf>
[31] Dincq AS, Lessire S ,Douxfils J et al. Management of non-vitamin K antagonist oral
anticoagulants in the perioperative setting
Biomed Research International. 2014;2014:385014. doi: 10.1155/2014/385014. Epub 2014
Sep 3
[32] Jeffrey I. Weitz, Daniel J. et al. Periprocedural management and approach to bleeding in
patients taking dabigatran. Circulation. 2012. Vol 126, p.2428-2432
[33] Hein Heidbuchel, Peter Verhamme, Marco Alings et al. EHRA Practical Guide on the
use of new oral anticoagulants in patients with non-valvular atrial fibrillation: executive
summary. European Heart Journal. Avril 2013. P.2094-2106
[34] Schlitt A, Jámbor C, Spannagl M,et al. The perioperative management of treatment with
anticoagulants and platelet aggregation inhibitors. Dtsch Arztebl Int. Août 2013. Vol 110,
p.525-32
[35] Krishnamoorthy A, Sherwood MW, Lopes RD, et al. The periprocedural management of
novel oral anticoagulants in patients with nonvalvular atrial fibrillation: rationale and a
summary of the available evidence from phase 3 clinical trials. Am Heart J. Mars 2015. Vol
169, p. 315-22.
[36] Fontana P, Robert-Ebadi H, Bounameaux H, et al. Direct oral anticoagulants: a guide for
daily practice. Swiss Med Wkly. Mars 2016. Vol 10.
[37]Hein Heidbuche, Peter Verhamme , Marco Alings et al. EHRA practical guide on the use
of new oral anticoagulants in patients with non-valvular atrial fibrillation. Site web de
l’EHRA. Mai 2013 : Disponible sur internet :
https://www.escardio.org/static_file/Escardio/Subspecialty/EHRA/Publications/NOAC/slide-
set-noac.pdf>
170
[38] Mar PL, Familtsev D, Ezekowitz MD et al. Periprocedural management of
anticoagulation in patients taking novel oral anticoagulants: Review of the literature and
recommendations for specific populations and procedures. Int J Cardiol. Janvier 2016. Vol
202, p.578-85.
[39] Coscarella M, Viart L, Nguyen P et al. New oral anticoagulants and prostate biopsy:
Which usual precaution should we use?. Progrès en Urologie. Juillet 2015. Vol 25, p.510-5.
[40] Ellis G, John Camm A, Datta SN, et al. Novel anticoagulants and antiplatelet agents; a
guide for the urologist. BJU Int. Novembre 2015. Vol 116, p.:687-96.
[41] John A, Michel MS, et al. Rivaroxaban, dabigatran and apixaban: new anticoagulants in
operative urology.Urologe A. Juin 2014. Vol 53, p.893-902
[42] Spyropoulos AC, Douketis JD. Et al . How I treat anticoagulated patients undergoing an
elective procedure or surgery. Blood. Octobre 2011. Vol 120, p.2954-62.
[43] Barnes GD, Eagle KA, Froehlich JB et al. Perioperative management of oral
anticoagulants: a focus on target-specific oral anticoagulants. Hosp Pract Août 2014. Vol 42,
p.62-7.
[44] Sié P, Samama CM, Godier A, et al. Surgery and invasive procedures in patients on long-
term treatment with oral direct thrombin or factor Xa inhibitors. Ann Fr Anesth Reanim.
Septembre 2011. Vol 30, p.645-50.
[45] Ferrandis R, Castillo J, de Andrés J et al. The perioperative management of new direct
oral anticoagulants: a question without answers. Thromb Haemost. Septembre 2013. Vol 110,
p.515-22.
171
[46] Samama CM, Pernod G, Albaladejo P et al. Perioperative management of new oral
anticoagulants. Presse Med. Juin 2014. Vol 43, p.637-44.
[47] Elizabeth Travis, Trainee Intern et al. Perioperative management of dabigatran: the
Nelson experience to date . The new Zealand Medical Journal . Août 2012, Vol 125 n° 1360
[48] Beyer-Westendorf J, Gelbricht V, Förster K, et al. Peri-interventional management of
novel oral anticoagulants in daily care: results from the prospective Dresden NOAC registry.
Eur Heart J. Juillet 2014. Vol 35, p.1888-96.
[49] Schulman S, Carrier M, Lee AY et al. Perioperative Management of Dabigatran: A
Prospective Cohort Study. Circulation. Juillet 2015. Vol 132, p.167-73
[50] Jeff S. Healey, John Eikelboom, James Douketis et al. Periprocedural bleeding and
thromboembolic events with dabigatran compared with warfarin: results from the
Randomized Evaluation of Long-Term Anticoagulation Therapy (RE-LY) randomized trial.
Circulation. Juillet 2012. Vol 126, p.343-8.
[51] Garcia D, Alexander JH, Wallentin L et al. Management and clinical outcomes in
patients treated with apixaban vs warfarin undergoing procedures. Blood. Décembre 2014.
Vol 124, p.3692-8.
[52] Munson CF, Reid AJ et al. Novel oral anticoagulants in plastic surgery.
J Plast Reconstr Aesthet SurgMai 2016. Vol 69, p.585-93.
[53] Callahan S, Goldsberry A, Kim G, et al. The management of antithrombotic medication
in skin surgery. Dermatol Surg. Septembre 2012. Vol 38, p.1417-26.
172
[54] Brown DG, Wilkerson EC, Love WE et al. A review of traditional and novel oral
anticoagulant and antiplatelet therapy for dermatologists and dermatologic surgeons. J Am
Acad Dermatol. Mars 2015. Vol 72, p.524-34.
[55] Chang TW, Arpey CJ, Baum CL,et al. Complications With New Oral Anticoagulants
Dabigatran and Rivaroxaban in Cutaneous Surgery. Dermatol Surg. Juillet 2015. Vol 41,
p.784-93.
[56] Thiele T, Kaftan H, Hosemann W, et al. Hemostatic management of patients undergoing
ear-nose-throat surgery. GMS Curr Top Otorhinolaryngol Head Neck Surg. Décembre 2015.
Vol 14.
[57] Saini AT, Schorn VJ, Lin FY et al. Tonsillectomy on rivaroxaban. Am J Otolaryngol.
Mars-Avril 2015. Vol 36, p.280-2.
[58] Ing E, Douketis J et al. New oral anticoagulants and oculoplastic surgery. Can J
Ophthalmol. Avril 2014. Vol 49, p.123-7.
[59] Degirmenci SE, Steib A et al. Peri-operative management of anticoagulation and
antiplatelet therapy in gastrointestinal surgery. J Visc Surg. Avril 2014. Vol 151, p.125-35.
[60] Shamoun FE, Saadiq RA, Money KS et al. Periprocedural Management of Chronically
Anticoagulated Patients: A Practical Approach to Use of Novel Anticoagulants in Orthopedic
Surgery. Am J Orthop (Belle Mead NJ). Mai-Juin 2016. Vol 45, E161-6.
[61] Site internet de l’HAS : Surdosage en avk situations à risque et accidents hemorragiques
recommandations. 2008. Disponible sur internet : <
http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-09/
173
surdosage_en_avk_situations_a_risque_et_accidents_hemorragiques_-
_recommandations_v2.pdf>
[62] Desai J, Granger CB, Weitz JI, et al. Novel oral anticoagulants in gastroenterology
practice. Gastrointest Endosc. Août 2013. Vol 78, p.227-39.
[63] Parekh PJ, Merrell J, Clary M et al. New anticoagulants and antiplatelet agents: a primer
for the clinical gastroenterologist. Am J Gastroenterol. Janvier 2014. Vol 109, p.9-19.
[64] Fuchs ES, Jakobs R et al. Novel oral anticoagulants in gastroenterology routine. Dtsch
Med Wochenschr. Septembre 2014. Vol 139, p.1784-6.
[65] del Molino F, Gonzalez I, Saperas E et al. Management of new oral anticoagulants in
gastrointestinal bleeding and endoscopy. Gastroenterol Hepatol. Octobre 2015. Vol 38, p.501-
10.
[66] Pannach S, Beyer-Westendorf J et al. New oral anticoagulants and endoscopy--what do
you have to consider? Dtsch Med Wochenschr. Août 2015. Vol 140, p.1227-30.
[67] Lange CM, Fichtlscherer S, Miesbach W et al. The Periprocedural Management of
Anticoagulation and Platelet Aggregation Inhibitors in Endoscopic Interventions. Dtsch
Arztebl Int. Février 2016. Vol 113, p.129-35.
174
[68] Parekh PJ, Merrell J, Clary M et al. New anticoagulants and antiplatelet agents: a primer
for the clinical gastroenterologist. Am J Gastroenterol. Janvier 2014. Vol 109, p.9-19.
[69] Desai J, Granger CB, Weitz JI et al. Novel oral anticoagulants in gastroenterology
practice. Gastrointest Endosc. Août 2013. Vol 78, p.227-39.
[70] Veitch AM, Vanbiervliet G, Gershlick AH et al. Endoscopy in patients on antiplatelet or
anticoagulant therapy, including direct oral anticoagulants: British Society of
Gastroenterology (BSG) and European Society of Gastrointestinal Endoscopy (ESGE)
guidelines. Endoscopy. Avril 2016. Vol 48, p.385-402.
[71] Fujita M, Shiotani A, Murao T et al. Safety of gastrointestinal endoscopic biopsy in
patients taking antithrombotics. Dig Endosc. Janvier 2015. Vol 27, p.25-9.
[72] Tsolka P et al. Dental Procedures in Patients with Atrial Fibrillation and New Oral
Anticoagulants. Arrhythm Electrophysiol Rev. Août 2014. Vol 3, p.85-9.
[73] van Diermen DE, Hoogstraten J, van der Waal I et al. Dental procedures for patients
using oral anticoagulation: new insights. Ned Tijdschr Tandheelkd. Avril 2008. Vol 115,
p.225-9.
[74] Firriolo FJ, Hupp WS.et al. Beyond warfarin: the new generation of oral anticoagulants
and their implications for the management of dental patients. Oral Surg Oral Med Oral Pathol
Oral Radiol. Avril 2012. Vol 113, p.431-41.
[75] Rider OJ, Rider EB et al. The changing face of oral anticoagulants. Br Dent J. Juillet
2013. Vol 215, p.17-20.
175
[76] Davis C, Robertson C, Shivakumar S,et al. Implications of Dabigatran, a direct thrombin
inhibitor, for oral surgery practice. J Can Dent Assoc. 2013. Vol 79
[77] Curtin C, et al. Dental implications of new oral anticoagulants for atrial fibrillation. Dent
Update. Juillet-Août 2014.
[78] Scott A1, Gibson J, Crighton A.et al. The management of dental patients taking new
generation oral anticoagulants. Prim Dent J. Novembre 2014. Vol 3, p.54-8.
[79] Breik O, Cheng A, Sambrook P, et al. Protocol in managing oral surgical patients taking
dabigatran. Aust Dent J. Septembre 2014. Vol 59, p.296-301.
[80] Lopez-Galindo M, Bagán JV et al. Apixaban and oral implications. J Clin Exp Dent.
Octobre 2015. Vol 7.
[81] Johnston S.et al . A New Generation of Antiplatelet, and Anticoagulant Medication and
the Implications for the Dental Surgeon. Dent Update. Novembre 2015. Vol 42, p.840-2, 845-
6, 849-50.
[82] Thean D, Alberghini M et al. Anticoagulant therapy and its impact on dental patients: a
review. Aust Dent J. Juin 2016. Vol 61, p.149-56.
[83] Costantinides F, Rizzo R, Pascazio L et al. Managing patients taking novel oral
anticoagulants (NOAs) in dentistry: a discussion paper on clinical implications. BMC Oral
Health. Janvier 2016. Vol 16.
176
[84] van Ryn J, Stangier J, Haertter S, et al. Dabigatran etexilate--a novel, reversible, oral
direct thrombin inhibitor: interpretation of coagulation assays and reversal of anticoagulant
activity. Thromb Haemost. Juin 2010. Vol 103, p.1116-27.
[85] Firriolo FJ, Hupp WS et al. Beyond warfarin: the new generation of oral anticoagulants
and their implications for the management of dental patients. Oral Surg Oral Med Oral Pathol
Oral Radiol. Avril 2012. Vol 113, p.431-41
[86] Hong CH, Islam Intekhab et al. Anti-Thrombotic Therapy: Implications for Invasive
Outpatient Procedures in Dentistry. J Blood Disord Transfus . 2013. Vol 4:166
[87] van Diermen DE, van der Waal I, Hoogstraten J et al. Management recommendations for
invasive dental treatment in patients using oral antithrombotic medication, including novel
oral anticoagulants. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol. Décembre 2013. Vol 116,
p.709-16.
[88] Johnston S et al. An evidence summary of the management of patients taking direct oral
anticoagulants (DOACs) undergoing dental surgery. Int J Oral Maxillofac Surg. Mai 2016.
Vol 45, p.618-30.
[89] Gómez-Moreno G, Fernández-Cejas E, Aguilar-Salvatierra A et al.
Dental implant surgery in patients in treatment by dabigatran. Clin Oral Implants Res. Janvier
2016.
[90] Gómez-Moreno G, Aguilar-Salvatierra A, Fernández-Cejas E et al.
Dental implant surgery in patients in treatment with the anticoagulant oral rivaroxaban.
Clin Oral Implants Res. Juin 2016. Vol 27, p.730-3.
[91] Clemm R, Neukam FW, Rusche B et al. Management of anticoagulated patients in
implant therapy: a clinical comparative study. Clin Oral Implants Res. Octobre 2016. Vol 27,
p.1274-1282.
177
Gestion péri-opératoires des nouveaux anticoagulants oraux par le médecin généraliste : revue de la littérature.
INTRODUCTIONDepuis 2008, une nouvelle classe d’anticoagulants regroupés sous le terme de « nouveaux anticoagulants oraux » (NACO) ont fait leur apparition sur le marché. Le médecin généraliste a un rôle central dans la gestion de ces molécules notamment en péri-opératoire. L’objectif principal de cette étude est d’établir pour les médecins généralistes un plan de gestion des NACO (poursuite, arrêt, délai d’interruption, relais par héparine) pour chaque grand type d’intervention chirurgicale programmée selon les résultats des données de la littérature.L’objectif secondaire est d’évaluer en terme quantitatif et qualitatif le niveau de preuve des données de la littérature pour chaque type de chirurgie afin d’envisager des recommandations d’études empiriques à poursuivre dans certaines chirurgies.
MATERIEL ET METHODERecueil de données : Nous avons utilisé les bases de données Pub Med et Cochrane. La recherche s’est faite en français et en anglais.Les articles ont été obtenus par une recherche par mots clés en combinaison : NACO/new oral anticoagulant/Rivaroxaban/Apixaban/Dabigatran/Chirurgie/Surgery/Gestion péri-opératoire/ Peri-operative management. Puis, selon la chirurgie, nous avons associé ces mots clés aux noms des procédures les plus fréquentes et auxquelles les médecins généralistes sont le plus susceptibles d’être confrontés. Nous nous sommes intéressés aux publications depuis 2008 (date de mise sur le marché en France des NACO) jusqu’à juin 2016.Population : Critères d’inclusion : Patients traités par NACO à dose curative pour les indications ayant l’autorisation de mise sur le marché et devant subir une chirurgie programmée quelque soit le niveau de risque hémorragique. Critères d’exclusion : Nous avons exclu de nos recherches bibliographiques les chirurgies cardiaques et chirurgies neurologiques car il s’agit de domaines très spécialisés pour lesquels la gestion des anticoagulants est en principe organisée par le cardiologue et le neurologue.
RESULTATS Objectif principal : Nous avons établi sur la base des éléments trouvés dans la littérature un schéma synthétisant la gestion des NACO pour chaque grand type de chirurgie. Des résultats discordants sont retrouvés dans la classification des risques hémorragiques pour chaque chirurgie : par exemple, certaines études portant sur les biopsies de prostate concluent à un risque bas tandis que d’autres concluent à un risque modéré. Les résultats sont également discordants dans le schéma de gestion de chaque NACO notamment en cas d’insuffisance rénale.Objectif secondaire : Nous avons inclus et analysé au total 57 articles. Nous avons présenté les résultats par type de chirurgie et pour chaque chirurgie nous avons classé les publications selon le grade de recommandation. L’étude de la littérature retrouve : 7 études de cohortes (recommandation grade B), 1 étude comparative (recommandation grade B), 2 études de cas (recommandation grade D), 47 publications fondées sur des avis d’experts ou sociétés savantes (recommandations grade D).
CONCLUSIONIl apparait que, concernant la gestion péri-opératoire des NACO, la littérature est quantitativement riche mais qualitativement inégale. La très grande majorité des publications se fonde sur les recommandations des grands collèges spécifiques à chaque chirurgie ou sur celles des sociétés savantes ou avis d’experts, de faible niveau de preuve. Ainsi, il semble nécessaire que des études de niveau de preuve scientifique plus élevé voient le jour.
Mots-clés : nouveaux anticoagulants oraux, chirurgie , gestion péri-opératoire , Rivaroxaban, Apixaban , Dabigatran