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Mémoire Vers une société créatrice de confiance
Présenté à la
Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics
dans l’industrie de la construction
Juillet 2014
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
TABLE DES MATIERES
Table des matières ........................................................................................................................... 2
Introduction : mot du président ....................................................................................................... 4
1. L’Institut de la confiance dans les organisations ....................................................................... 5
2. La définition de la confiance ..................................................................................................... 8
2.1 Définition ......................................................................................................................... 8
2.2 Les ingrédients de la confiance à l’interne ..................................................................... 11
2.3 Les ingrédients de la confiance à l’externe .................................................................... 12
3. L’impact de la Commission sur le Québec et sur les Québécois ...............................................13
3.1 La société québécoise .................................................................................................... 13
3.3 Les intervenants majeurs ............................................................................................... 16
3.4 La Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction ...................................................................................................................... 18
3.5 L’après-Commission ....................................................................................................... 19
4. La réflexion de l’ICO et les pistes de solutions .........................................................................21
4.1 Prendre conscience collectivement ............................................................................... 22
4.2 Focaliser sur le long terme et bâtir une société de confiance ....................................... 23
4.2.1 Opter clairement pour une société de confiance .................................................. 23
4.2.2 Le syndrome du court terme versus le long terme : Le danger des solutions miracles …………………………………………………………………………………………………………………………. 25
4.2.3 Mettre en place des structures, mais qu’elles soient enlignées avec la culture .... 27
4.3 Instaurer des mécanismes de gouvernance et de contrôle appropriés ......................... 31
4.3.1 Prendre garde aux lois spontanées et non réfléchies ........................................... 31
4.3.2 La carotte et le bâton ............................................................................................. 35
4.3.3 Instituer des instances permanentes de surveillance ............................................ 37
4.3.4 Améliorer la gestion contractuelle au sein des organismes publics ..................... 38
4.3.5 Instaurer des parcours d’intégrité et de gouvernance sur plusieurs années ......... 39
4.3.6 Intégrer l’intégrité dans l’évaluation des dirigeants et administrateurs ................ 44
4.3.7 Mettre en place des mécanismes de signalement et de surveillance efficaces ..... 45
4.4 Faire preuve de leadership et de responsabilisation ..................................................... 47
4.4.1 Encourager les résistants de l’intégrité et la responsabilité individuelle ............... 47
4.4.2 Développer une responsabilité collective ............................................................. 49
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
4.4.3 Savoir pardonner, d’un pardon mérité .................................................................. 50
4.4.4 Un leadership renouvelé - Encourager les gens et organisations de confiance ..... 51
4.4.5 Briser la culture des affaires et réinventer une nouvelle manière de faire des affaires …………………………………………………………………………………………………………………………. 53
4.4.6 Le privé et le public ne sont pas des ennemis ........................................................ 56
4.4.7 Redevenir de véritables professionnels, pas seulement des hommes d’affaires ... 57
4.4.8 Des médias plus éthiques qui jouent véritablement leur rôle ............................... 60
4.4.9 Encourager et élire des politiciens dignes de confiance ....................................... 62
Conclusion .......................................................................................................................................66
Liste des recommandations .............................................................................................................69
Appendice 1 – Enquête d’opinions sur la confiance au Québec 2013 ..............................................
Appendice 2 – Enquête d’opinions portant sur les sceaux éthiques .................................................
Appendice 3 – Formulaire d'identification CEIC .…………………………………………..………………………………..
Appendice 4 – Brochure ICO .……………………………………………………………………………………..…………………..
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
INTRODUCTION : MOT DU PRESIDENT
Au nom de l’Institut et en mon nom personnel, c’est avec plaisir que je présente le présent Mémoire à la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction. Une Commission qui, selon nous, revêt une importance cruciale et qui sera déterminante pour l’avenir du Québec.
Le titre pouvant être donné à cette « télésérie » maintenant bien incrustée dans le quotidien des Québécois pourrait être « La Commission du déshonneur »… Les Commissaires deviennent en quelque sorte les médecins qui diagnostiquent à quel point l’industrie de la construction au Québec est malade. Cette situation ne date pas d’hier (voir l’image ci-après). Nous nous doutions que notre élite n’était pas sans reproches, mais le défilement au cours des trois dernières années d’élus, de dirigeants, de professionnels et de fonctionnaires corrompus nous illustre que le Québec est atteint par la gangrène. Le résultat est un sentiment d’humiliation collectif et un bris de confiance majeur avec un impact crucial sur notre économie et sur nos vies au quotidien.
Aussi, pour vaincre cette crise, il faut avoir le courage de se regarder et de tenter de changer les choses. Il serait désastreux de baisser les bras et de dire que de toute manière la situation se répétera une fois la poussière retombée. À l’Institut, nous croyons plutôt qu’il faut se responsabiliser individuellement et collectivement comme société pour aller de l’avant. La Commission était un diagnostic partiel de ce qu’est le Québec aujourd’hui et nous avons maintenant le choix d’être passifs et ne rien faire ou de combattre le virus que la commission a révélé. Un virus qui touche plusieurs de nos organisations et qui risque de s’accroître si nous n’y remédions pas en raison des inégalités et iniquités croissantes (je vous invite à lire le livre de Joseph Stiglitz, Prix Nobel de l’économie, Le prix de l’inégalité).
Nous voulons combattre et redonner confiance aux Québécois et nous appuyons les démarches de la Commission, croyant qu’elle s’oriente fortement dans cette direction.
Bien à vous,
M. Richard Legault Président du conseil d’administration
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
1. L’INSTITUT DE LA CONFIANCE DANS LES ORGANISATIONS
L’Institut de la confiance dans les organisations est un organisme sans but lucratif, indépendant
d’esprit et indépendant financièrement qui souhaite réunir les forces vives du Québec afin de
construire une société de confiance. Notre Institut est géré par un conseil d’administration doté
d’une base solide de gouvernance et de stratégie et qui compte des administrateurs et des
accompagnateurs renommés et très crédibles. Sa mission est de solidifier la confiance au sein des
organisations et dans la société québécoise.
En bref, l’Institut de la confiance dans les organisations, c’est :
Un énoncé de mission, de vision et de valeurs qui encourage le dépassement et la
confiance comme valeur centrale au cœur de la société (voir encadré 1);
Une structure de gouvernance solide, formée de gens compétents, renommés et érudits
(voir encadré 2);
Des partenaires internationaux pour un développement qui dépasse les frontières et
permet de placer la confiance au rang de valeur universelle (voir encadré 3);
Des axes d’intervention précis et clairs qui témoignent d’un travail en profondeur pour les
organisations accompagnées (voir encadré 4);
Plusieurs éléments distinctifs qui font de l’Institut un organisme unique et à la démarche
personnalisée (voir encadré 5).
Encadré 1 : L’énoncé de mission, de vision et de valeurs de l’ICO
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Encadré 2 : La gouvernance de l’ICO
Encadré 3 : Les partenaires de l’ICO
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Encadré 4 : Les axes d’intervention de l’ICO
Encadré 5 : Les traits distinctifs de l’ICO
(1) Prendre position et faire des recommandations à partir des travaux des groupes de
réflexion émanant du Cercle de Confiance;
(2) Dresser un état des lieux des enjeux de confiance grâce à des évaluations (sondages et
diagnostics globaux, par direction, par clientèle, etc.), de même que proposer des parcours
pour solidifier les niveaux et les cercles de confiance;
(3) Donner des avis et faire des recommandations en regard d’une gouvernance de confiance
et des pratiques d’intégrité correspondant aux attentes des parties prenantes;
(4) Hausser, reconstruire ou consolider la confiance par des formations et des ateliers
(administrateurs, dirigeants, gestionnaires, employés, etc.);
(5) Faire de la recherche, informer et publier de façon à contribuer au rayonnement
scientifique des expertises sur la confiance;
(6) Procéder à des interventions spontanées et spécialisées à titre d’accompagnateurs et
d’experts;
(7) Développer de nombreux outils et sondages grand public (plus large bibliothèque de
documents portant sur la confiance, quotient de confiance, engagements personnels de
citoyens, services de référence pour les citoyens), etc.
Indépendance financière et administrateurs avec une grande indépendance d’esprit;
Organisme à but non lucratif qui vise des standards élevés grâce à un capital d’expertises et
d’expériences élevées de notre équipe;
Un laboratoire de confiance organisationnelle;
Charte de confiance et d’engagement des organisations accompagnées;
Profond désir de solidifier la confiance au Québec.
LES AXES D’INTERVENTION DE L’ICO
QUELQUES TRAITS DISTINCTIFS DE l’ICO
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2. LA DEFINITION DE LA CONFIANCE
2.1 Définition
Nombre d’auteurs admettent que la confiance est une caractéristique psychologique, affective et
cognitive, caractérisée entre autres par les notions d’attentes, d’anticipations et de croyances
positives (Akrout et Akrout, 2010; Carneval et Weschler, 1992; Cummings et Bromiley, 1996; Das
et Deng, 2001; Lewicki et Bunker, 1996; McAllister, 1995; Shockley-Zalabak, Ellis et Winograd,
2000; Whitener, Brodt, Korsgaard et Werner, 1998). Un individu qui fait confiance s’attend au bon
comportement de l’autre individu. S’il fait confiance, c’est parce qu’il n’aura pas de surprises quant
à la conduite de l’autre, mais aussi parce qu’il sait qu’il ne sera pas pris au dépourvu ou déçu. Il
croit en la bonne volonté, la bienveillance, la compétence, l’ouverture ou la fiabilité de l’autre. Les
comportements de celui en qui il accorde sa confiance deviennent alors prévisibles et diminuent
l’incertitude reliée à la décision d’accorder sa confiance.
La confiance se définit selon un large spectre. On distingue habituellement différents niveaux de
confiance (Ford, 2001; Schoorman, Mayer et Davis, 2007; Simon, 2007; Six, 2005; Sydow, 2006;
Thuderoz et coll., 1999), que l’Institut interprète comme des cercles de confiance (voir schéma 1).
Schéma 1 : Les niveaux de confiance
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La confiance à l’interne considère notamment les relations des individus entre eux, par exemple
entre deux collègues, deux gestionnaires, entre un supérieur et son employé ou vice versa. Elle
prend place entre des individus, indépendamment de leur titre ou de leur poste. Cette confiance
repose sur des bases affectives et cognitives. Il s’agit pour Quéré (2001) d’une confiance ponctuelle
qui concernera une situation particulière, un rôle particulier ou un domaine particulier entre deux
acteurs.
De plus, à l’interne, la confiance organisationnelle traite des relations de confiance qu’un individu
manifeste envers son groupe ou son organisation donc envers un système et elle est construite sur
la base d’une présomption selon laquelle l’organisation est honnête et bienveillante (Hadj Khalifa
et Kammoun, 2013). Elle se produirait quand les membres d’une organisation choisissent de
s’engager dans une action collective (Simon, 2007). C’est pour bâtir et consolider cette confiance
organisationnelle que l’Institut accompagne les organisations.
Quant aux relations avec l’externe, il est crucial que l’organisation puisse entretenir des relations
de confiance avec ses parties prenantes, qu’il s’agisse des fournisseurs, des clients, des donneurs
d’ouvrage, de la communauté, bref, de la société (voir à cet effet le texte de Garcia, OCDE, 2013).
Compte tenu de ces éléments, pour nous, la confiance est :
« l’état psychologique d’un individu prenant un risque en acceptant de devenir vulnérable
relativement à son organisation, soit à travers des individus la représentant, soit en
s’identifiant à des normes crédibles, légitimes et justifiées, envers lesquels il a des attentes,
bien qu’incertaines, que les intentions, les comportements et les attitudes de ses
représentants soient positifs, bienveillants à son égard et dignes de confiance » (Émilie
Deschênes, 2014).
Plus concrètement encore, l’Institut fonde sa démarche sur plusieurs valeurs et caractéristiques de
la confiance (voir encadré 6) :
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Encadré 6 : Définition, valeurs et caractéristiques de la confiance, fondements de l’Institut
Pour conclure, selon l’Institut, notamment grâce aux recherches qu’il a effectuées, la confiance
devient bien plus qu’un élément faisant partie des valeurs de l’organisation au même titre que les
autres : elle devient l’objectif à atteindre avec l’aide des autres valeurs. Elle n’est ni une valeur ni
un comportement, elle est « LA » méta-valeur et « LE » méta-comportement. Ce sont en fait les
efforts pour mettre en application les valeurs et les comportements qui construisent la confiance
et leur absence qui la détruit. L’important est de continuellement investir des efforts dans les
différentes composantes de la confiance afin de bâtir un capital de confiance.
Jean-Claude Deschênes, ex-sous-ministre pendant plusieurs années et administrateur de l’Institut,
formule une très bonne analogie de la confiance en la comparant à l’huile d’un moteur. Imaginez
la voiture de vos rêves, une Ferrari par exemple. Imaginez le moteur de cette voiture composé des
meilleures pièces. Imaginez maintenant ce qui arriverait s’il n’y avait pas d’huile dans ce moteur ?
Il étoufferait ou, pire, brûlerait. La confiance est en quelque sorte cette huile entre les gens que
l’on ne voit pas, mais qui est pourtant si essentielle. L’intégrité est bien entendu une composante
incontournable de la confiance, mais il y en a bien d’autres, notamment le courage, l’authenticité
et la compétence. Ainsi, la confiance comporte plusieurs ingrédients.
« La confiance organisationnelle est essentiellement un sentiment d’assurance et de sécurité partagé par une majorité des personnes qui forment l’organisation et qui assurent la poursuite de
sa finalité. Elle vise à mettre en résonnance les multiples intérêts au sein d’une organisation et entre l’organisation et ses parties prenantes de façon à développer une communion d'intérêts
transcendant les intérêts individuels et de groupes.
L’étude de la confiance organisationnelle permet d’identifier la carte identitaire des organisations, le contrat invisible ou tacite qui unit les gens. À l’instar d'une personne physique, chaque organisation a sa vie propre qui sera parsemée d’événements heureux et d’autres moins heureux, tels que des conflits, crises, grèves, fusions, etc. La confiance n’est pas statique, elle est dynamique et évolutive. Une démarche de confiance organisationnelle permet de retracer et de mettre en place les éléments clés qui mobiliseront l’organisation et ses parties prenantes, soit les
valeurs, les paroles, les comportements, les attitudes et les expériences. La confiance organisationnelle mène à l’engagement, à l’investissement, à la mobilisation collective, à une meilleure qualité de vie au travail et ultimement, à la poursuite de la finalité de l’organisation
avec une efficacité accrue.
Les organisations ont la capacité de développer et de solidifier les fils de la confiance. Cependant, pour y parvenir, elles doivent croire en une telle démarche, miser non seulement sur les structures, mais aussi sur un changement de leur culture : il faut le courage d’identifier les
freins, les craintes, les inhibitions et la rugosité dans les relations humaines. Grâce à un rôle actif des porteurs de confiance, il est alors possible de mettre en place des parcours et des actions qui
permettront de hausser cette confiance, de renforcer les différents cercles de confiance et de mettre les gens en résonnance. »
Me Donald Riendeau, Directeur général et fondateur, ICO
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2.2 Les ingrédients de la confiance à l’interne
Nos recherches nous ont permis d’identifier les différentes composantes ou ingrédients clés de la
confiance. En tête de liste viennent l’éthique, l’intégrité, l’honnêteté et les pratiques de saine
gouvernance, mais il y a bien plus encore. Le schéma suivant présente la méthodologie principale
développée par l’Institut. On y constate qu’autour du cœur, ce sont les actions et les expériences
qui permettront à la confiance de naître et de survivre, mais aussi les paroles, les écrits, les contacts
répétés et l’instinct, vue comme une caractéristique individuelle qu’il faut savoir écouter. Suivront
les 12 ingrédients sur lesquels l’Institut oriente ses actions dans ses accompagnements, tels que
présentés dans le schéma 2.
Schéma 2 : Les ingrédients de la confiance interne
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2.3 Les ingrédients de la confiance à l’externe
L’organisation et ses membres, comme ses dirigeants, travaillent au quotidien en étroite
collaboration avec plusieurs parties prenantes externes que sont les donneurs d’ouvrage, les
fournisseurs, les autorités réglementaires, les médias et la population. Il est primordial aujourd’hui
de construire et de solidifier la confiance avec ces entités également, en plus de la confiance à
l’interne. Pour ce faire, l’organisation doit mettre en place et faire la démonstration d’actions, de
comportements et d’attitudes qui le permettent précisément. Ces ingrédients (présentés dans le
schéma 3 suivant) sont autant de clés de réussite pour les organisations vers l’atteinte de la
confiance organisationnelle.
Schéma 3 : Les ingrédients de la confiance externe
Pour conclure, qu’il s’agisse de la confiance à l’interne ou de la confiance à l’externe, les
organisations font face à de nombreux défis – surmontables. Il est vrai de dire que ce sont les
aspects liés à l’intégrité et à la gouvernance qui sont les plus mis à mal dans notre société
actuellement, mais au-delà de ces ingrédients cruciaux se retrouvent plusieurs autres aspects
organisationnels qu’il faut savoir identifier, mettre en valeur lorsqu’ils vont bien et en être fiers
comme membres de l’organisation et comme membres de la société accueillant ces organisations.
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3. L’IMPACT DE LA COMMISSION SUR LE QUEBEC ET SUR LES QUEBECOIS
Ce mémoire de l’Institut est le résultat de recherches effectuées par l’Institut et de ses expériences.
De plus, pour le réaliser, l’Institut a sondé ses membres et a questionné son réseau de
professionnels érudits et spécialistes dans différents domaines. Cet exercice nous a permis de
comprendre davantage l’impact des travaux de la Commission sur l’octroi et la gestion des contrats
publics dans l’industrie de la construction, sur la population du Québec, mais également sur le
Québec lui-même, aux niveaux économique, social et parfois politique.
Dans cette section du mémoire, nous répertorions les paroles et commentaires recueillis selon de
grands thèmes principaux que nous subdivisons ensuite en sous-thèmes. Il s’agit donc ici d’un
exercice de synthèse qui présente sous forme de texte plusieurs observations faites par les
individus sondés. Il est possible de tirer quelques grandes conclusions de ces observations, la
première étant que plusieurs énoncés convergent dans la même direction.
3.1 La société québécoise
Une grande hypocrisie collective mise à jour
La population québécoise voulait cette enquête. Elle se doutait bien de l’existence des manœuvres
douteuses et des gestes malhonnêtes, elle supposait bien que des entrepreneurs s’achetaient des
contrats et que des politiciens étaient prêts à vendre ces mêmes contrats. D’ailleurs, n’a-t-on pas
souvent entendu que « c’est comme ça que ça se passe ». Toutefois, nous avons pu sentir
l'exaspération de constater de nouveaux méfaits toutes les semaines, de nouvelles immoralités et
des gestes non intègres commis par toujours plus d’individus. Quelle déception de voir que ceux
en qui on avait placé notre confiance ont en définitive été malhonnêtes et qu’ils jouent le plus
sérieusement du monde la carte du « je jure que je ne savais pas », du « j’ai été trahi » ou « je n’ai
jamais dit ou fait cela ».
On se doutait fort bien qu’il existait des arrangements concernant les soumissions et que l’usage
des prête-noms était courant pour financer les partis politiques provinciaux. Ce qui est nouveau
est que le tout est devenu officiel et public: on a interrogé et entendu les personnes qui étaient les
acteurs du système.
La permanence de cette pression de l’argent doit nous inspirer dans la recherche de balises et de
garde-fous. Des garde-fous qui doivent eux-mêmes être périodiquement évalués, et ce, de façon
transparente. C’est justement la transparence qui, par définition, est la meilleure parade à
l’occultisme qui inspire les profiteurs des manipulations. Cet occultisme est l’équivalent
de « l’omerta ».
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Le cynisme de la population
Impact important, le cynisme est présent un peu partout chez les citoyens. Malgré le sentiment de
fierté et de satisfaction d’avoir enfin vu les stratagèmes malhonnêtes débusqués et en partie
contrés, les Québécois sont amers face à l’ampleur des révélations et des délais mis à rendre
justice. En effet, la longueur des travaux de la Commission, un électrochoc qui aura duré près de 3
ans maintenant, nous amène à nous poser les questions suivantes : est-ce que tous les efforts
dispensés et les ressources investies changeront quelque chose ? La société québécoise peut-elle
changer ? Est-ce qu’elle s’améliorera ou s’enlisera encore davantage ? Est-ce que tout
recommencera une fois la poussière retombée? Y aura-t-il des suites véritables aux conclusions du
rapport de la Commission? Le sentiment ambiant partagé par plusieurs est que la Commission a
permis de calmer le jeu temporairement et que ceux qui en étaient autrefois maîtres sont
maintenant en attente de se réinventer…
Aussi, la population devient-elle inerte, désabusée et désengagée sur le plan de la vie politique
(sauf pour quelques causes qui les touchent, dont l’environnement, le taux de chômage, etc.). La
vie politique tout comme la vie syndicale ne mobilisent en effet qu’une petite minorité. Il y a peut-
être beaucoup de coupables, mais encore plus de victimes non consentantes que de bienfaiteurs.
Le désengagement
Un des impacts graves est que bien des individus fort compétents et intègres qui seraient bien
utiles dans la vie politique active refusent de s’impliquer dans cette vie publique si difficile et de
plus en plus ingrate. Cette perte est un grave effet délétère pour la démocratie. Cette situation de
désenchantement et de désengagement de la population a pour effet d’augmenter de plus la
marge de manœuvre des individus, des entreprises et des personnages politiques véreux.
Manque de responsabilisation et d’imputabilité
Au plan collectif, notre société semble favoriser plutôt le collectif que l’individuel, donc de remettre
la responsabilisation aux autres plutôt qu’à soi (taux élevé de syndicalisation, propension à toujours
demander plus d’implication du gouvernement face au moindre problème, à la méfiance envers le
secteur privé, à l’aversion eu égard au profit, à la méconnaissance des grands systèmes et projets
complexes en société, à la méfiance de ce qui n’est pas étroitement de « chez nous », au poids
omniprésent de l’influence exercée par les médias, etc.).
Un avenir incertain
Il en résulte pour plusieurs d’un avenir incertain qui pousse plusieurs à prendre des chemins
incertains et illégaux pour se créer un destin.
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3.2 La corruption et la façon de faire des affaires
Le niveau de corruption et la cupidité au Québec
Le niveau de corruption de notre société est à ce point important que d’aucuns se demanderont
probablement si c’est le chemin le plus court vers le succès ou, et de façon plus alarmante, si les
autres chemins valent la peine d’être considérés.
Un fait marquant demeure la gestion de la société québécoise à ce point corrompue, surtout en
temps d’austérité, où nous devons sortir des fonds afin de déterrer des argents sales, et ce, sans
pour autant connaître le dénouement de ces déterrements. La corruption est pire encore dans une
époque comme celle-ci où nous manquons collectivement d’argent pour financer des services
essentiels comme l’éducation, la santé, etc.
On sent la cupidité devenir maîtresse de beaucoup trop de professionnels. La Commission a permis
de voir à quel point la collusion est ancrée dans le mode de gestion des contrats publics. Nous
devons y voir une leçon morale.
L’argent est devenu la valeur première
L’argent est le point central de tout ce qu’on a entendu à la Commission. Dans cette société où
nous avons tellement entendu nos parents et nos grands-parents se plaindre que la vie était dure,
et qu’il fallait se crever au travail pour une bouchée de pain, probablement que certains ont intégré
cet état de fait pour acquérir le respect à travers l’argent, beaucoup d’argent, mais surtout en le
montrant par la possession de biens. L’impression qui en ressort est que le côté sombre de la
nature humaine a repris le haut du pavé.
La leçon à en tirer pourrait-elle être que le souci majeur à retenir des révélations devant la
Commission n’est pas « le fait marquant » ni le « plus gros problème », mais plutôt que l’avidité
pour l’argent et le pouvoir est, a été et sera toujours une menace pour la démocratie et la saine
administration de fonds publics? Il s’introduit, malgré les mécanismes démocratiques et
procéduriers, une ploutocratie et une apparence de démocratie, mais une réalité de manipulations
diverses à l’avantage des tricheurs et au détriment des contribuables. Pour illustrer le caractère
permanent de la lutte en ce domaine, il faudrait se souvenir de nombreux rapports historiques (par
exemple le Rapport Salvas au temps de l’Union Nationale).
Des structures inefficaces
Il semble que les mesures et les codes d’éthiques soient perçus comme ne voulant plus rien dire,
peut-être mis en place seulement pour l’apparence par ceux qui avaient eux-mêmes quelque chose
à se reprocher.
Selon les sondés, un problème majeur est, d’une part, l’occultisme et l’absence de mécanismes
internes efficaces permettant à des individus honnêtes de signaler les malversations et les fraudes
apparentes (en préparation ou réalisées) et, d’autre part, l’absence de sanctions proportionnées
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pour les dirigeants fraudeurs, collusionnaires ou corrupteurs et leurs complices de méfaits.
Probablement que des instances à caractère permanent, indépendant et transparent de contrôle
et d’examen sont nécessaires. Il nous faut développer de nouveaux mécanismes qui permettront
d’assurer l’attribution éthique des fonds publics. Nous devons être extrêmement prudents quant
aux moyens et il faut conserver des « chiens de garde » comme l’UPAQ pour « voir au grain »,
comme on dit.
3.3 Les intervenants majeurs
Le monde politique et les gens d’affaires
Les politiciens semblent apparaître soit les marionnettes, soit les maîtres du jeu. Depuis 50 ans, ils
demanderaient de l’argent pour leur campagne, mais toujours sans trop se mouiller. La
Commission semble avoir démontré qu’ils avaient sollicité de l’argent, mais sans jamais avoir la
preuve de promesses de contrats. Le message semblait être à ce moment que si tu donnes de
l’argent, tu auras une chance, mais que si tu n’en donnes pas, tu n’en auras pas… Sans pouvoir
prouver leur culpabilité, ils ont exacerbé le côté sombre des entrepreneurs voulant gagner des
contrats.
Aussi, selon certains, le désintéressement général par rapport au monde municipal est une des
raisons fondamentales du pourquoi de ces malversations. Si les élus fautifs s’étaient sentis suivis,
questionnés, soumis à de vraies redditions de compte, ils se seraient peut-être moins rendus
coupables de ces malversations. C’est d’ailleurs l’effet immédiat de la Commission: sachant qu’il y
aura davantage de visibilité, les élus non intègres seront plus prudents. On aura aussi tendance à
élire les gens que nous estimons les plus intègres.
L’hypocrisie du monde du financement politique depuis les années 60 fait beaucoup parler.
Collectivement, il semble que nous ayons toujours nié que le financement politique et le monde
des affaires étaient connectés. Pourtant, un tango se danse à deux. Dans les années 60, la tendance
semblait être: « tu es rouge, tu obtiens tous les contrats, tu es bleu, tu attends ton tour ». Un
entrepreneur à la retraite de 80 ans nous disait que ces arrangements ont été présents de tout
temps et qu’il trouve bizarre aujourd’hui que tout le monde joue à l’autruche, comme si la situation
avait cessé. René Lévesque avait sans doute de bonnes intentions avec sa loi sur le financement
politique, mais cela n’a rien changé. C’est probablement à ce moment-là que l’hypocrisie a
commencé. Tous auraient fait semblant de respecter les règles, mais la réalité était possiblement
tout autre.
Cabinet d’avocats, cabinets de comptables, firmes d’ingénieurs et entrepreneurs se faisaient
solliciter et auraient compris que s’ils ne donnaient pas, ils risquaient de ne rien avoir. Certains
moins intègres auraient alors institué des systèmes de collusion afin d’obtenir une plus grande part
du pactole. Avec la puissance, cela devenait facile, quelques firmes, quelques fonctionnaires à
l’éthique fragile et voilà qu’un système de collusion voyait le jour. Cependant, il fallait le protéger
et l’entretenir. Peut-être seulement 37 personnes ont été accusées de corruption et de
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
gangstérisme à Laval, mais probablement que 200 autres à l’époque rêvaient de faire partie de ce
club select pour bénéficier d’un système ou l’argent coulait à flots. Selon certains, la proximité
entre les politiciens et les hommes d’affaires est devenue trop grande. Selon d’autres, mentir
effrontément devant les caméras en disant qu’on ne savait pas que le financement était sectoriel
et que les prête-noms étaient monnaie courante constitue une insulte à l’intelligence des
Québécois.
Pour plusieurs, il est malheureux que l’on ait peu touché aux politiciens pendant la Commission.
Possiblement qu’il est difficile de les toucher puisqu’ils auraient créé ce système dont ils auraient
bénéficié sans trop se mouiller. Ils auraient demandé de l’argent aux firmes d’ingénieurs, d’avocats
et de comptables sans rien leur promettre. En même temps, ils auraient lancé le message que s’ils
ne donnaient pas, les chances d’obtenir des contrats étaient moins grandes. Aucun ne voulait
prendre le risque. Le milieu des affaires serait maintenant fâché envers les politiciens, car c’est le
milieu des affaires qui sort le plus meurtri de la Commission qui a révélé au grand jour la corruption,
la collusion ainsi que le favoritisme. Or, le politicien, selon toute vraisemblance, s’en sort
relativement bien.
Les personnalités publiques mêlées à cette commission sont des représentants de l’ordre public.
Pour certains, leur corruption présumée insinue à la population que les politiciens ne seraient pas
là pour défendre leurs intérêts, mais bien pour assurer le maintien d’un système de collusion et
d’enrichissement individuel transgressant ainsi les règles morales et éthiques qu’il faut posséder
pour avoir le droit à un poste comme celui de représentant des citoyens.
Un impact de cette situation est la perte de crédibilité des mécanismes démocratiques (par
exemple la faible participation électorale), notamment chez les jeunes qui pourtant sont les
premiers concernés par l’avenir de la société. Ce décrochage entraîne une survalorisation de
l’individualisme, tel que mentionné plus haut, et une crise de confiance envers l’État lui-même. Le
cynisme remplacerait-il le civisme?
Les fonctionnaires
Des personnes questionnées, plusieurs diront que les fonctionnaires auraient été peureux et
incapables de résister à de petits avantages. Le courage est sans doute la plus grande vertu d’un
dirigeant. Malheureusement, pour certains, se tenir debout ne semblait pas naturel pour les
participants à la Commission, avec quelques exceptions. Il est aberrant pour plusieurs de constater
que des fonctionnaires seraient prêts à favoriser des contrats en échange de quelques dîners,
parties de hockey, voyages et argent comptant.
ll y aurait probablement lieu de contrer le silence apeuré des fonctionnaires. Par leur rôle et leur
statut, ceux-ci sont les mieux placés pour déceler les approches mafieuses, mais encore faut-il qu’ils
aient le courage de dénoncer, ce qui par ailleurs implique une certaine protection en de tels cas.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Les professionnels
Plusieurs se questionnent quant à l’intense couverture médiatique qui a focalisé sur les dîners et
les repas plutôt que sur le véritable problème selon eux : l’avidité des firmes de professionnels, que
ce soient les firmes d’ingénieurs qui étaient prêtes à tout pour des contrats ou les firmes d’avocats,
de comptables et de relations publiques qui les auraient assistés pendant tant d’années en sachant
tout ce qui se passait. Aujourd’hui, posons-nous la question à savoir s’il est normal de voir ces
mêmes firmes leur vendre des services pour être plus « éthiques ».
Les liens entre le crime organisé et de trop nombreux hommes d’affaires et professionnels
semblent être devenus de plus en plus naturels. À une certaine époque, le professionnel était vu
comme une sommité qui pouvait « aiguiller la société ». Aujourd’hui, il est de plus en plus perçu
comme étant à la solde et comme cherchant des stratagèmes pour permettre aux entrepreneurs,
hommes d’affaires et mafieux de contourner les règles. Pour appuyer ce propos, considérons
l’exemple de l’ingénieur qui a avoué écouter les demandes de sa direction malgré le fait qu’elles
étaient illégales, et ce, plutôt que de bien agir et de résister en conseillant l’organisation de faire
autrement.
Une pénurie de vrais leaders; ceux qu’on a le goût de suivre
Il revient dans les commentaires l’impression d’être mal dirigé, par de piètres leaders. Imaginons
la nouvelle génération qui voit ses leaders. On peut se demander ce qu’elle fera : est-il légitime de
penser qu’elle trichera encore davantage en devenant encore plus maligne ou aura-t-elle le
courage de réinventer les règles du jeu ?
Cette perte de confiance de la population envers ses leaders devient un problème de taille auquel
fait face le Québec. L’Institut rencontre régulièrement des chefs d’entreprise qui manquent de
confiance en eux et en leur capacité de devenir ce dont ils ont toujours rêvé d’être et de faire.
Pourtant, plusieurs sont précisément là où ils voulaient être. Les défis accomplis sont rarement vus
comme des victoires. On trouve d’autres défis plus grands et la peur de ne pas les actualiser
réapparaît comme s’ils n’avaient pas réussi dans leur vie. Au fond, peut-être sommes-nous en face
d’une difficulté majeure voire une incapacité, non seulement sur le plan individuel, mais aussi sur
le plan social, de reconnaître le vrai leadership.
3.4 La Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie
de la construction
La longueur de la Commission et sa raison d’être
Un ex-dirigeant d’une grande banque nous avait relaté un an après la crise financière des prêts à
haut risque (ou subprimes) que malheureusement, la crise n’avait pas été suffisamment longue…
Selon lui, cette crise n’aura été qu’un « hoquet » pour les banquiers et professionnels gravitant
autour de ceux-ci, si bien que les pratiques n’auront pas changé. Quelques années plus tard, on
peut penser qu’il avait raison.
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La Commission Charbonneau a été longue, trop longue pour certains, mais sa longueur aura eu
l’avantage de faire réaliser l’ampleur du mal, de faire réfléchir les gens, de les faire parler de cette
problématique dans leur vie sociale ou familiale, de faire changer des pratiques au sein de
nombreuses organisations, etc. La Commission a eu un effet pédagogique important et un impact
sur notre façon de voir le Québec, certains voudront que la société change, d’autres se cacheront
davantage qu’auparavant et n’accepteront plus les invitations sur des bateaux…
Une Commission permanente ?
Est-il opportun de parler d’une éventuelle Commission permanente ? Pour plusieurs, la question
est plus que pertinente. Peut-être ne l’est-elle pas dans l’industrie de la construction, mais
pourquoi ne pas faire le tour des industries, à commencer par le secteur de l’informatique? Les
interrogations sont trop importantes depuis bon nombre d’années. Les grands projets
informatiques dans divers ministères, le grand pouvoir discrétionnaire de plusieurs dirigeants
informatiques, les relations questionnables des firmes de placement de ressources, les sommes
extraordinaires en recherche et développement reçues par les firmes de placement de ressource,
les raisons expliquant pourquoi les organismes publics sont parmi ceux au monde qui développent
le plus de « solutions maison » plutôt que d’acheter des solutions commerciales éprouvées à
moindre prix, etc. Plusieurs ont dit que si nous avions davantage de courage, nous irions plus loin
voir du côté de divers professionnels, avocats et comptables ou d’autres secteurs qui ont été en
proie par le passé à la corruption et à la collusion.
Puisque plusieurs sont d’avis qu’il s’agit d’un phénomène sociétal, probablement que ce qui nous
a été présenté à la Commission n’est qu’un fragment de tout ce qui aurait pu l’être. Par
conséquent, possiblement que plusieurs autres acteurs importants de notre société qui ont soit
participé ou fermé les yeux sur ces pratiques devraient sans doute être interrogés.
L’avantage d’une Commission permanente, à l’instar de New York, serait de démontrer aux
déviants qu’ils sont surveillés.
3.5 L’après-Commission
Le danger du balancier
Selon plusieurs, il est inutile de devenir trop purs sur papier et d’interdire le financement politique,
les dîners, etc. Cela porterait atteinte aux relations humaines et entraînerait des contournements
sophistiqués. Par exemple, le problème chez une grande firme d’ingénierie largement citée durant
les audiences de la CEIC n’était probablement pas les dîners des employés avec des partenaires,
mais plutôt l’abus de quelques-uns et la corruption de quelques hauts dirigeants. Or, cette
organisation a depuis mis en place des structures qui permettent de scruter tout dîner qu’un
employé peut avoir avec un fournisseur ou un client, notamment. Cette façon de faire les choses
brise selon nous la relation de confiance entre l’employé et l’employeur et ne garantit rien.
Par ailleurs, n’est-il pas ironique de constater que ce sont ceux qui se sont fait reprocher de graves
manquements qui deviennent les plus stricts dans les encadrements à mettre en place, notamment
par l’abolition complète des privilèges comme les cadeaux et les dîners.
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Le citoyen ne doit pas oublier
Il est important selon l’Institut de s’assurer que les impacts de la Commission demeurent dans la
conscience collective des Québécois; il ne faut pas oublier ou faire comme si l'on n’avait rien
entendu. Il faut souhaiter que les citoyens et les médias soient alertes pour surveiller les suites que
les autorités politiques donneront aux recommandations de la Commission.
Un possible renouveau et espoir
Nous sommes heureux de constater le travail réalisé par la Commission : la révélation de plusieurs
tours de forces et d’hypocrisies collectives présents depuis des décennies. Aussi, il faut relativiser
la situation du Québec par rapport à ailleurs. Dans l’ensemble, notre système fonctionne avec
moins de manœuvres douteuses que dans la plupart des autres pays. Ne dit-on pas qu’il est dans
la nature humaine d’inventer toujours le moyen de s’ajuster ou de contourner un système? Vous
faites des règlements, vous en faites davantage. Jusqu’à un certain point, ça vaut la peine, mais il
est illusoire de penser que l’élaboration des règles donne davantage de vertu ni à ceux qui les
mettent en place ni à la population. Nous vivons au Québec dans un climat d’intégrité croissante,
si on compare par exemple à il y a cinquante ou soixante ans. Si on créait une Commission sur le
travail au noir et qu’on faisait défiler citoyens et fournisseurs qui font affaire ensemble dans
l’illégalité, on aurait bien du monde. Pourtant, le montant des pertes de ce travail du point de vue
fiscal pour le Québec est important. Cette entorse à l’intégrité « désirée par le public » est tolérée
parce qu’elle n’est pas vue et parce qu’elle arrange bien des gens, sans en incommoder d’autres.
On pourra éviter les situations révélées par la Commission d’enquête en élevant le niveau global
et personnel d’intégrité. La Commission va très vraisemblablement y contribuer, dans un secteur
en particulier, mais ce ne sera pas la fin de ce genre de malversations. Toutefois, notons l’espoir
de plusieurs que les choses changent enfin, que cette commission permette la prise de conscience
selon laquelle il est temps de changer nos comportements.
Il semble qu’une pression collective de même que de nouvelles lois et règlements aient réduit
significativement les activités de collusion et de corruption dans l’industrie de la construction au
Québec. En effet, par son travail, la Commission a ouvert les yeux à tous et permis de comprendre
les mécanismes utilisés par divers milieux. Comprendre est la première étape et elle sera suivie par
d’éventuelles recommandations.
Enfin, nous sommes d’avis qu’il ne faut pas se décourager et baisser les bras. Nous ne méritons pas
de vivre dans une société vivant de collusion et de corruption comme nous en avons été témoins
avec les révélations de la Commission. Qu’adviendra-t-il si nous ne faisons rien? Quels legs pour les
générations futures? Regardons le tout d’une manière positive, la difficile première étape est
achevée : celle de nous regarder nous-mêmes et d’avouer ce que nous sommes devenus
collectivement. Peut-être certains auront eu honte, mais les récents événements, espérons-le, leur
auront donné envie de changer. Si la volonté est présente, mais surtout devient contagieuse, nous
pouvons collectivement redresser les choses et, qui sait, dans dix ans, le Québec sera peut-être vu
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
comme un modèle pour le reste du Canada et du monde. Il faut que chaque Québécoise et
Québécois comprennent que le Québec s’appauvrit de plus en plus dans une société au sein de
laquelle il y a de plus en plus de corruption et de plus en plus de méfiance.
4. LA REFLEXION DE L’ICO ET LES PISTES DE SOLUTIONS
L’Institut ne prétend pas avoir toutes les solutions à un problème de société si important.
Cependant, notre expertise en confiance, en intégrité et en gouvernance, ainsi que notre
expérience permettent la présentation de certaines pistes de réflexion et de certaines solutions
qui mériteraient d’être regardées par la Commission. Aussi, les pistes de réflexions et de
recommandations présentées portent sur quatre angles d’approche d’égale importance qui se
complètent (voir schéma 4). La section qui suit en fait la description.
Schéma 4 : Les angles de réflexion selon l’ICO
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
4.1 Prendre conscience collectivement
Il serait facile de se décourager à la suite de la lecture de ce qui précède. Cette Commission, source
d’espoir, semble susciter plus d’inquiétudes pour l’avenir qu’au début de ses travaux. Cependant,
ce n’est pas en vain que cette Commission s’est exécutée. Les Commissaires et leurs procureurs
ont été un peu comme des médecins faisant le diagnostic de notre société. Le Québec était le
patient. Tous nous doutions qu’il était malade, mais nous ne savions pas à quel point, sauf certains
qui le savaient peut-être, mais qui ne voulaient pas le voir ou pire qui en profitaient. Ces médecins
n’ont diagnostiqué qu’une partie du patient, disons le bras gauche (firmes d’ingénierie, de
construction, quelques syndicats, quelques joueurs du monde criminel, le MTQ, quelques villes,
quelques attachés politiques et quelques politiciens). Toutefois, ce bras était très malade. La pire
chose aurait été de ne pas voir cette maladie. Or, la Commission vient de la mettre à jour. Comme
le patient recevant son diagnostic, ce n’est pas amusant. Il a alors différents choix : ne pas se
soigner, continuer son vice qui le rendra encore plus malade ou se battre pour guérir. Le problème
qui demeure est que la Commission n’a regardé que le bras gauche… Selon nous, il ne faut pas
s’imaginer que les autres secteurs d’activités sont nécessairement différents. Un virus qui se
propage dans l’organisme s’arrête rarement à l’épaule. Alors, tous les Québécois sont concernés
par ce virus. Nous sommes tous des globules blancs qui peuvent se réunir pour combattre, devenir
contagieux à notre façon et vaincre ce virus.
Qu’est-ce qui nous a conduits à cette dérive ? Quelle part de blâme revient à plusieurs de nos
institutions de surveillance et élus qui, selon toute vraisemblance eu égard aux révélations de la
Commission, ont dormi pendant tant d’années ? Complicité, aveuglement, complaisance ou
manque de courage, toujours est-il que nous n’avons pas voulu écouter ceux et celles qui, comme
madame Vera Daniluk, ex-mairesse de Ville Mont-Royal, dont nous gratifions la mémoire, ont
décrié haut et fort depuis le début des années 2000 cette corruption et la culture du chacun pour
soi. Le Commissaire au lobbyisme du Québec dénonçait lui aussi à plusieurs reprises la réticence,
pour ne pas dire le refus, de certains professionnels, avec au premier chef les firmes de génie-
conseil, d’opter pour la transparence et d’inscrire au registre des lobbyistes l’objet de leurs
communications d’influence auprès des élus et des fonctionnaires.
Il est impératif que nous nous regardions nous-mêmes. Si on dit souvent que l’on a les élus qu’on
mérite, dans chacun de nous, il y a un germe du « Madoff-Lacroix » qui sommeille1. On peut choisir
de le contrôler ou de le laisser croître. Il y a la grosse corruption, celle que l’on voit devant la
Commission, mais il y a aussi la petite corruption à laquelle trop d’entre nous participent (travail
au noir, faux compte de dépenses, évasion fiscale, etc.). Il n’y a souvent qu’un pas entre les deux…
1 L’Institut de la confiance dans les organisations (ICO) a développé un outil permettant de mesurer le niveau d’intégrité d’une personne, outil nommé ‘’ Mesure du germe Madoff-Lacroix’’
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Même avant la publication de son rapport, nous pensons que la Commission a déjà été un succès,
peu importe la suite. Le Québec devait se regarder dans le miroir et recevoir son diagnostic. La
Commission et sa longueur, parfois lourde pour certains, a été en ce sens un succès. Son rapport
nous donnera sans doute des éléments de solution. Mais le véritable travail commence
maintenant : ce qu’à l’avenir nous voulons avoir comme société? Quelle option choisirons-nous ?
Aider le virus à se propager encore davantage ? Demeurer passif en laissant le virus sévir ? Soigner
celui-ci ? Il était urgent que les Québécois voient les dessous du monde des affaires et politique.
Comme le décrit si bien Denis Coulombe, ex-secrétaire général au Commissaire au lobbyisme et
l’un des fondateurs de notre Institut, regardons la carte du Québec aujourd’hui et questionnons-
nous sur ce que nous aimerions qu’elle devienne. Cette carte est passablement rouge ou jaune pas
les temps qui courent, mais il y a beaucoup de points verts qui veulent changer les choses. Il y a de
nombreux points jaunes qui souhaiteraient et pourraient avec un peu de volonté et de fierté
devenir verts. Il est important que les porteurs de confiance envers une société meilleure
s’affichent et se lèvent afin de devenir les leaders de demain dès aujourd’hui. Comme l’énonce si
bien Étienne Brodeur, ancien haut dirigeant chez Bombardier durant plusieurs années : « l’intégrité
globale à l’intérieur d’une société correspond au niveau de vertu attendu et à la somme de
l’intégrité des personnes ».
4.2 Focaliser sur le long terme et bâtir une société de confiance
4.2.1 Opter clairement pour une société de confiance
Le Québec est récemment passé d’une « confiance aveugle » à une « méfiance complète ». Depuis deux ou trois ans, les médias étrangers et d’autres provinces parlent davantage de notre corruption que de nos créateurs, artistes et inventeurs. Sommes-nous pires qu’ailleurs ? Nous ne le pensons pas. D’ailleurs, le secrétaire général de l’OCDE lui-même, monsieur Angel Gurria, l’a énoncé dans son discours du 10 juin 2013 lors de son passage à Montréal.
« L’une des victimes de la crise, en plus de l’emploi et de l’égalité, a été la confiance. Nous avons perdu confiance dans les gouvernements, dans les partis politiques, dans les organisations internationales, dans le système bancaire, dans les multinationales et dans tout ce que nous avons bâti, comme sociétés, depuis cent ans. »2
Le sondage Léger Marketing 2013 portant sur la confiance dans les différents métiers est éloquent3. En 2002 la moyenne de confiance de l’ensemble des métiers était de 63% et aujourd’hui, elle frôle les 50%. Peut-être pour la première fois en 2014, serons-nous entrés dans une société de méfiance plutôt que de confiance. L’Institut a réalisé une enquête d’opinions (voir appendice 1) auprès de 1,300 Québécoises et Québécois dont plusieurs des résultats sont révélateurs (861 répondants ont été retenus pour des fins statistiques). Notamment, parmi ceux-ci, 83% étaient d’avis que le climat de confiance au Québec s’est détérioré au cours des dix dernières années. L’impact de cette crise de confiance est majeur sur notre économie, notre démocratie et sur nos vies au quotidien.
2 Voir le site web suivant : http://forum-ameriques.org/montreal 3 http://www.leger360.com/admin/upload/publi_pdf/JML20131012.pdf
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Pourtant 97% considèrent qu’il est important ou très important que les dirigeants se préoccupent d’améliorer le climat de confiance qui existe au sein de leur personnel et 95% de hausser les relations de confiance avec leurs clients, fournisseurs et autres parties prenantes. Notre partenaire européen, le Trust Management Institute, lequel procède à de nombreuses recherches portant sur la confiance, établit un lien de plus en plus évident entre la confiance et la performance.
Schéma 5 : Le management par la confiance selon le TMI
Déjà en 2002, la firme internationale de ressources humaines Watson Wyatt établissait déjà un lien
entre la performance des organisations et la confiance au sein de celles-ci.
« Total return to shareholders in high trust companies was almost three times higher than
in companies with low trust ». Watson Wyatt, WorkUSA 2002.
Chaque organisation, privée et publique devrait tous les quatre ans, simultanément à son plan
stratégique, réalisé un exercice d’audit (état des lieux) de sa confiance interne (voir douze
ingrédients) et externe (voir douze ingrédients). Cet état des lieux permettra d’identifier toutes les
actions qui ont contribué à la confiance et toutes celles qui ont contribué à son effritement. Il
permettra également d’identifier toutes les actions qui pourraient être mises en place pour
solidifier cette confiance. Ce diagnostic devrait être réalisé en impliquant un nombre suffisant
d’employés reflétant la diversité de l’organisation. Plus important encore que le diagnostic sera le
parcours de confiance à mettre en place, lequel devrait impliquer tous les membres de
l’organisation et permettre donner l’opportunité aux employés ayant participé au diagnostic de
jouer un rôle particulier.
RECOMMANDATION 1 – Investir dans la confiance pour ne pas devenir une société de méfiance. Il
faut prendre le pari de la confiance.
Management classique
Management par la confiance
AVANT - SUCCÈS = Investissement X travail
DEMAIN - SUCCÈS = Investissement X Travail X Confiance
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 2 – Chaque organisation devrait, tous les quatre ans, procéder à un état des
lieux de sa confiance organisationnelle, lequel serait accompagné d’un parcours de confiance
organisationnelle.
4.2.2 Le syndrome du court terme versus le long terme : Le danger des solutions
miracles
La crise actuelle est tellement importante que l’imagination de plusieurs devient fertile pour
trouver des solutions miracles. Plusieurs acteurs de notre société se mobilisent présentement pour
lutter contre la corruption et participer à un projet de société qui permettra de reconstruire la
confiance envers nos organisations. L’Institut de la confiance dans les organisations s’est interrogé
sur plusieurs initiatives lancées récemment, notamment : Une firme de consultant a lancé une
certification en éthique et gouvernance, un ordre professionnel souhaite mettre de l’avant une
future certification éthique destinée aux firmes d’ingénierie, une association du milieu de la
construction est présentement en projet pilote afin d’émettre une certification éthique, l’Autorité
des Marchés Financiers accorde après consultation auprès de différents organismes une
autorisation de contracter avec le gouvernement, etc.
En ces temps troublants d’enquête publique, qui est en mesure d’attester, de son sceau, qu’une
entreprise est éthique ? Comment peut-on être convaincus que SNC Lavalin, Dessau, Hexagone
(autrefois Louisbourg) sont aujourd’hui des entreprises éthiques parce que l’AMF leur a donné une
autorisation de contracter ou parce que dans six mois elles obtiendraient un sceau éthique de l’une
ou l’autre de ces organisations ?
L’été dernier, trente experts et professionnels en éthique et en gouvernance ont répondu à une
quinzaine de questions (voir appendice 2). L’Institut a par la suite pris connaissance des réponses
et a procédé à une réflexion plus approfondie. Nous en présentons ici brièvement le résultat.
(a) Un sceau dit « éthique » est dangereux pour la confiance du public :
‒ Il est dangereux qu’un sceau éthique donne une confiance apparente et de fausses
certitudes. Seulement 25% des experts consultés considèrent qu’accorder un sceau
éthique à une entreprise est une bonne idée et 14% qu’il est légitime de rendre ISO un
domaine comme l’éthique. L’éthique n’est pas un produit dont on peut authentifier
les ingrédients dans le temps. Elle est à la fois intemporelle et il est impossible de
mesurer l’ensemble des multiples ingrédients qui y contribuent.
‒ La population ne pourra faire confiance à une entreprise qui aura obtenu un sceau
éthique (81% des experts sont de cet avis). Il est dangereux de créer une confusion
encore plus grande sur ce qu’est une conduite dite éthique (91% des experts). Il est
possible que tous les dirigeants d’une entreprise n’aient aucune condamnation au
moment de l’octroi du sceau et que le plus beau code d’éthique soit en place, mais, en
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
même temps, que des comportements illégaux et non éthiques aient lieu. À titre
d’exemple, Enron, WorldCom, Norbourg, Hollinger et SNC Lavalin auraient
probablement obtenu une certification éthique avant que n’éclatent les scandales.
‒ L’Institut lance un avertissement aux organisations et au public de ne pas se laisser
aveugler par les sceaux et indices dits éthiques ou de confiance. La totalité des experts
consultés considère dangereux que plusieurs dirigeants d’entreprises s’empressent de
recourir à des sceaux afin de redorer leur image et gagner des contrats sans
véritablement changer leur culture organisationnelle (100% le craignent). Ainsi,
pourrait-on prédire que plusieurs des villes et entreprises ayant fait l’objet de
manquements éthiques se précipiteront les premières vers de telles solutions
miracles.
(b) Les ordres professionnels et les associations professionnelles ne disposent ni des pouvoirs
ni des compétences pour examiner suffisamment la situation et accorder un tel sceau.
‒ Déjà, la responsabilité de vérifier le respect des règles déontologiques des
professionnels est en soi un défi énorme qu’aucun ordre n’a pu à ce jour remplir avec
certitude et sans défaillance. Il nous semble par conséquent illusoire, voire utopique,
que des ordres professionnels puissent faire enquête dans une entreprise qui compte
des centaines, voire des milliers d’employés œuvrant dans divers métiers. En outre,
selon les experts consultés, les ordres professionnels ne disposeraient pas des
compétences suffisantes pour évaluer le respect des lois (70%), des règles
déontologiques (63%) et encore moins de l’éthique (86%) des dirigeants et
administrateurs.
‒ Les ordres devraient se concentrer sur la vérification du respect des règles
déontologiques de leurs membres et ne pas s’éparpiller au niveau des organisations.
Le public est en droit de se poser la question à savoir qui ces ordres chercheraient-ils
véritablement à protéger, le public ou les firmes de professionnels ?
‒ De nombreux administrateurs des conseils d’administration des ordres et associations
seraient en conflit d’intérêts relativement à cette question, puisque nombreux sont
également des dirigeants, et même des actionnaires de firmes d’ingénierie ou de
construction.
‒ Qu’arriverait-il à un ordre professionnel ou une association si une entreprise de
construction à laquelle ils auraient remis un « sceau éthique » était reconnue coupable
de collusion six mois plus tard ? Non seulement l’entreprise en question verrait sa
réputation entachée, mais c’est la confiance même du public envers cet ordre ou cette
association qui serait mise à rude épreuve. D’ailleurs, rappelez-vous qu’un ingénieur
est venu devant la Commission avouer qu’il avait fait partie du système de collusion,
mais qu’il avait une semaine auparavant obtenu son autorisation de contracter de
l’AMF. L’ICO ne désire pas par la présente critiquer la qualité du travail de l’AMF, car
celle-ci agit selon les règles de l’art en obtenant divers rapports d’organismes tels que
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
l’UPAQ sur le passé des actionnaires, administrateurs et dirigeants d’une entreprise.
Cependant, malgré tous ses efforts, il est impossible de garantir qu’une entreprise dite
éthique aujourd’hui l’est vraiment ou le sera encore l’année suivante. L’autorisation
de l’AMF est un outil permettant d’empêcher des organisations employant des
individus ayant un casier criminel relié au milieu de la construction de faire des affaires
avec le gouvernement, car cela est un privilège.
L’Institut félicite l’Ordre des ingénieurs, les associations et les professionnels qui tentent de trouver
des solutions qui permettraient de contribuer à la confiance du public. Cependant, malgré ce désir,
il est important de bien faire les choses. Un changement de culture prend des années et il n’y a pas
de recette instantanée. Accorder un sceau éthique ou de confiance à une organisation nous
apparaît être une solution dangereuse et précipitée qui aiderait certes quelques organisations sur
le court terme, mais qui nuirait à la confiance du public sur le moyen et long terme.
À titre d’information, à notre question « Attesteriez-vous de votre nom qu’une entreprise est
éthique ? », un seul des experts consultés serait prêt à l’attester de sa signature.
Pour conclure, nous assistons présentement à une multiplication des « alchimistes » sur le plan de
solutions pour rebâtir l’éthique. Plusieurs, avec de bonnes intentions, veulent offrir des sceaux
éthiques. L’ICO n’est pas contre les pratiques visant à améliorer l’éthique au sein des organisations,
mais ne croit pas que l’on doive utiliser l’appellation « sceaux ». L’éthique n’est pas un produit.
Comme le disait Michel Nadeau, Directeur général de l’IGOPP, il est déjà difficile d’identifier ce
qu’est un « aliment du Québec », allez imaginer ce qu’est une « entreprise éthique ».
RECOMMANDATION 3 – Investir des efforts sur le long terme, bien faire les choses. Faire attention
aux solutions miracles. Les sceaux éthiques risquent de devenir des paratonnerres en bois.
4.2.3 Mettre en place des structures, mais qu’elles soient alignées avec la culture
Enron et WorldCom comptaient sur les plus beaux codes de déontologie, des administrateurs de
renoms et des états financiers vérifiés. Cela n’a pas empêché les dirigeants de ces organisations
d’être corrompus et que plusieurs professionnels de grande renommée qui les accompagnaient de
l’être tout autant ou jouer à l’aveuglement volontaire sous l’excuse du fameux « secret
professionnel ». Souvent suite à un scandale, le réflexe est de recourir à une multiplication des
structures, des contrôles et des solutions miracles. Les scandales d’Enron et Worldcom ont entraîné
un raz de marée des pratiques d’encadrement et de contrôles aux États-Unis. Dans un premier
temps, la Loi Sarbanes-Oxley (SOX) entraîna des mesures d’encadrement important dans les
grandes entreprises inscrites en bourse. Suivirent les grandes firmes comptables américaines. Puis
le mouvement fut repris au Canada. Firmes comptables et firmes d’avocats, voulant bien faire,
conseillèrent aux organisations de mettre en place des structures de toutes sortes (ligne de
dénonciation, conseil d’administration et comité d’audit, etc.). Or, ce que nous avons oublié, c’est
que même avant les scandales d’Enron et de WorldCom, ces deux entreprises avaient mis en place
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
toutes les supposées meilleures pratiques de gouvernance. Le réflexe de l’ensemble de notre
société fut encore d’ajouter de nouvelles structures, des contrôles, etc.
Il va sans dire que les structures sont nécessaires, mais elles sont insuffisantes. Poussés trop loin,
les gens n’y croiront plus, car elles resteront sur papier et ne seront pas suivies dans le quotidien,
servant simplement de parure de protection aux dirigeants. Pire, elles étoufferont l’initiative, la
créativité et la flexibilité. Les employés auront peur de poser des gestes pourtant simples, se
demandant si cela leur sera reproché.
Un réflexe dangereux que l’ICO a repéré depuis environ 18 mois est de voir les firmes d’ingénierie
et de construction se précipiter vers la mise en place de structures en pensant que mettre en place
des documents peaufinés et d’encadrements sur papier garantira la confiance envers leur
organisation. Nous comprenons ces dirigeants de vouloir tout faire pour sauver leur organisation,
leur capital, leur retraite, car sans l’autorisation de contracter de l’AMF, c’est leur avenir et celui
de leurs employés qui seraient mis en péril. Malheureusement, plusieurs firmes mettent et
continueront de mettre en place des documents et des structures pour l’AMF, mais leur culture ne
change pas véritablement. L’Institut a d’ailleurs refusé d’accompagner une firme d’ingénierie et
une entreprise de construction qui voulaient seulement mettre en place des documents pour
l’AMF sans véritable intention de changer quoi que ce soit à leur culture et pratiques. Cependant
et heureusement, l’Institut a accompagné quelques organisations dans ce secteur d’activité qui
voulaient améliorer leurs structures d’intégrité et de gouvernance, mais plus important renforcer
et même solidifier leur culture interne.
Pire, certains dirigeants ayant fraudé ou participé à la collusion, se retournent soudainement,
touchés par la main divine de l’éthique, et deviennent plus stricts que demandé. Par exemple, une
grande firme d’ingénierie qui a avoué ses pratiques collusoires demande aujourd’hui a tous ses
employés de rapporter ce qui a été dit lors des dîners avec chaque fournisseur. Ceux qui ont été
coupables se voudront repentants et mettront en place des structures encore plus contrôlantes
pour tous, même pour l’employé sur le terrain qui a toujours été honnête et qui a fait la preuve du
temps pendant trente ans. Le problème n’est pas le dîner, mais la corruption en haut. Un dîner de
temps en temps, avec transparence à un prix raisonnable qui n’est pas de nature à influencer ou
faire fléchir le jugement ou un dîner lors duquel chacun paye sa part devrait-il être considéré
comme suspect ? Nous ne le croyons pas, bien au contraire, il peut même s’avérer fort utile pour
traiter d’un sujet sensible d’une manière plus humaine et décontractée.
Nous avons l’impression présentement que les dirigeants d’entreprises ont peur et mettent en
place des structures et des encadrements disproportionnés pour la majorité des employés, mais
très peu pour les dirigeants, actionnaires ou eux-mêmes. Cette disproportion ou distorsion brise
même la confiance au sein des organisations, elle effrite le côté humain, la camaraderie, des
relations saines et transparentes. C’est une manifestation de résistance au changement, voire une
nouvelle hypocrisie. Un autre exemple est celui d’une grande entreprise qui interdit à ses vendeurs
de payer des verres de vin à leurs clients ou prospects. Pour contrer cette situation, les vendeurs
astucieux deviennent amis avec les serveurs et restaurateurs et changent les quatre verres de vin
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
par quatre desserts. À qui la faute ? La majorité des gens trouve ridicule cette structure de parade
qui rassure et protège les dirigeants qui l’ont édictée. Même à travers l’organisation, tous en rient,
plusieurs la contournent déjà et de toute manière on se dit qu’il n’y aura pas de conséquences. Le
Code d’éthique n’est pas vécu ou pas réellement appliqué. Il est souvent tabletté. Pire, alors que
les employés ne peuvent se faire rembourser une chambre d’hôtel de plus de 125$ la nuit, ils voient
leur PDG recevoir un salaire annuel dépassant les millions de dollars et se permettre des nuitées à
plus de 1000$ par nuit dans un grand hôtel de luxe, après s’être permis un repas gargantuesque.
Le message ne passe pas, car « les bottines ne suivent pas les babines ».
Une autre grande hypocrisie collective est le phénomène des faux codes d’éthique. Nous avons
formé plus de 10,000 personnes au cours des dernières années sur différents enjeux d’éthique et
de confiance. À chaque occasion, nous avons demandé la question suivante : « Combien d’entre
vous avez lu votre Code d’éthique ? ». Seulement entre 10 et 15% des employés et au maximum
25% des administrateurs de conseils d’administration nous ont répondu l’avoir réellement lu dans
le détail. L’Institut a constaté que la très grande majorité des Codes avaient été construits en
réponse à une crise ou parce qu’il en fallait tout simplement un. Si bien que ceux-ci sont trop
juridiques, pas suffisamment personnalisés à l’organisation, édictent des interdictions aberrantes
non respectées dans le quotidien, etc. Bref, ils ne reflètent pas la culture de l’organisation ou sa
carte identitaire. Malheureusement, ils sont écrits en vase clos par quelques personnes pressées
voulant bien faire sans impliquer un certain nombre d’employés. Pire, ils sont parfois écrits par un
avocat externe qui connaît très peu l’organisation et qui soumet un papier collé auquel personne
n’adhérera. Par exemple, une firme d’avocats québécoise a écrit plus d’une centaine de codes
d’éthiques en mode « papier collé » pour les villes et municipalités du Québec. Une grande
association du secteur de la construction a eu l’initiative pour bien faire de produire un Code de
déontologie pour ses membres. Le résultat fut le même, en panique les firmes se précipitèrent sur
celui-ci et l’adoptèrent sans véritable personnalisation. Le résultat est que ces codes reflètent
rarement leur environnement et que très peu d’administrateurs, dirigeants ou employés n’ont
véritablement participé à leur écriture de même qu’à leur lecture.
RECOMMANDATION 4 - Chaque organisation du secteur de la construction et chaque organisme
public devrait procéder à un véritable examen de la culture de son organisation et en réviser les
documents clés (tel que le code d’éthique) afin qu’ils soient personnalisés à l’organisation et cohérents
dans le quotidien. Il est fondamental qu’un nombre substantiel d’employés représentant la diversité
de l’organisation participe à la démarche d’analyse, d’écriture puis, de façon encore plus importante,
de mise en place.
Un changement de culture prend du temps à réaliser. Les structures doivent bénéficier d’un
support ou d’un accompagnement et surtout être alignées et en diapason avec la culture. Or, au
cours des dix dernières années, la grande majorité des efforts ont été investis dans les structures
et très peu dans la culture. Est-ce que nos cultures d’entreprises au Québec sont meilleures pour
autant ? Il y a quelques années, Me Riendeau rencontrait le PDG d’une grande entreprise
québécoise qui lui disait :
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
« J’espère que vous ne venez pas me parler de gouvernance… Nous avons su bâtir au cours
des années une culture d’intégrité exceptionnelle et les nouvelles règles et mesures, bien
que je comprenne les objectifs poursuivis m’agacent… Chaque année, j’engloutis des
sommes extraordinaires, plusieurs millions, en frais d’avocats, de comptables et de
technologies de l’information. » Un chef d’entreprise, octobre 2005
Ce commentaire porte tout son sens aujourd’hui. Les structures ne créeront pas automatiquement
la culture. Elles pourront y contribuer si elles sont alignées avec celle-ci, mais à elles seules, elles
ne suffiront pas. Comme nous le verrons dans les réflexions qui suivent, d’autres ingrédients
contribueront à cette culture. D’ailleurs dès 2003, Yvan Allaire, président de l’IGOPP, prévenait du
danger de pousser à l’extrême les structures :
« La gouvernance fiduciaire poussée à bout donnera de piètres résultats, le contrôle
étouffant la stratégie, la vigilance évacuant la vision. » Allaire et Firsirotu, 2003, 2005
Il y a également une grande importance à accorder aux valeurs. Dans une société ou les médias
instantanés sont de plus en plus présents, où l'on ne connaît plus son voisin, où l’individualisme est
de plus en plus fort, où les entreprises optimisent les structures, où les entreprises cherchent le
plus de profit possible, la culture d’entreprise s’effrite. L’un des seuls leviers pour travailler cette
culture est celui des valeurs. Or, très peu d’organisations ont réalisé de véritables exercices
d’actualisation de leurs valeurs. Trop souvent, les valeurs sont choisies pour les mettre sur les
affiches et ne veulent rien dire. Par exemple, une organisation rencontrée nous avait demandé de
l’aider à trouver ses valeurs. Une fois sur place ils nous ont dit qu’ils voulaient cinq valeurs qui
devaient commencer par un « I » ou par un « E ». L’objectif des valeurs n’est pas de les afficher
sur une belle affiche en couleur et qu’elles fassent un jeu de mot mnémotechnique saisissant ou
un acronyme. Les valeurs peuvent devenir un précieux levier si elles sont travaillées. Il n’est pas
nécessaire que toutes celles que l’ont choisi soient déjà en place, l’important c’est de choisir des
valeurs qui nous permettront de cheminer. Plus que des mots, elles doivent être définies et elles
doivent éviter d’être vides de sens. Par exemple, une entreprise de construction que nous avons
rencontrée a comme valeur la « pérennité ». Cette valeur est plus qu’un mot, car cette organisation
existe depuis plus de 50 ans et est un poumon social et économique pour sa région, des générations
de membres de familles y ont travaillé, de nombreux fournisseurs en dépendent, etc. La pérennité
a un sens profond et engageant pour ses employés, dirigeants et actionnaires. Les valeurs doivent
être profondément intégrées à la gouvernance des organisations. L’ICO définit d’ailleurs la
gouvernance de la manière suivante :
« En harmonie avec la mission et la vision de l’organisation, la gouvernance englobe les
valeurs, les processus et la structure permettant de gérer les activités dans l’intérêt de
l’organisation. Alors que les valeurs guident les décisions, les processus et la structure
définissent la division du pouvoir et établissent les mécanismes permettant de rendre «
responsables » les mandants (actionnaires, membres, coopérants, etc.), le conseil
d’administration et la direction. L’intérêt de l’organisation se définit comme celui des
mandants, mais également de l’ensemble des parties prenantes avec lesquelles
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
l’organisation entretient des liens ou sur lesquels ses activités ont des impacts sociaux,
environnementaux ou économiques. » Me Donald Riendeau, 2007
RECOMMANDATION 5 - Chaque organisation devrait procéder à un véritable exercice d’actualisation
de ses valeurs. Ces valeurs devraient permettre d’aiguiller les administrateurs, dirigeants et employés
dans leur prise de décision. Ces valeurs devraient être insérées dans les documents clés de
gouvernance (règlements de régie interne, convention des actionnaires, code de déontologie, etc.)
4.3 Instaurer des mécanismes de gouvernance et de contrôle appropriés
4.3.1 Prendre garde aux lois spontanées et non réfléchies
Autrefois, on critiquait souvent le législateur pour des lois qui devenaient parfois « archaïques » ou
non adaptées à la société du moment. Depuis quelques années, il semble que ce soit la situation
inverse : plusieurs lois sont adoptées en panique ou pour plaire à la population. Malheureusement,
adoptées à la hâte, elles présentent des failles,
des incohérences ou, pire, elles entraînent des
injustices, qui ne seront connues que quelques
mois ou quelques années après qu’elles aient été
édictées. Le réflexe de nos politiciens a souvent
été de punir les organisations coupables pour
apaiser le mécontentement populaire, mais sans
mesurer toutes les conséquences à moyen terme
des lois adoptées trop rapidement. Faut-il
condamner toutes ces entreprises et surtout
indirectement tous leurs employés pour nous
donner bonne conscience? Ci-après, nous
présentons plusieurs exemples de lois
récemment adoptées.
En ce qui concerne le provincial, les récentes dispositions législatives ont réduit substantiellement
les contributions aux partis politiques. En effet, celles-ci sont passées de 1,000$ à 100$ dans un
premier temps, puis à 200 $ depuis mai 20134. En ce qui concerne le municipal, celles-ci sont
passées de 1,000$ à 3005$. Ce financement est généralement accompagné d’un dévoilement de
la liste des donateurs. D’abord, le problème n’est pas le montant. Les véritables problèmes sont la
proximité des élus et des entrepreneurs, le financement sectoriel, la peur de ne pas obtenir de
contrats, l’argent occulte, les futurs retours d’ascenseurs (un beau poste dans une firme
d’ingénierie, d’avocats ou de comptables), etc. Plusieurs pays ne vivent pas nos problèmes
d’intégrité politique, alors que pourtant leur financement politique n’a soit pas de limite, soit des
4 Le projet de loi 2 modifiant les règles de financement politique au niveau provincial a instauré de manière très claire le principe de compensation du financement privé par un financement public. 5 Loi 26, Loi modifiant la loi sur les élections et référendums dans les municipalités en matière de financement.
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limites de contribution très élevées (certains pays présentent des limites jusqu’à 35,000$, pour
autant que les montants dépassant un certain seuil soient dévoilés par transparence). Le Danemark
est un bon exemple, un pays ou la confiance envers les politiciens est beaucoup plus élevée qu’au
Québec, mais où les limites de contributions sont très élevées. Autre effet pervers, c’est que les
gens osent de moins en moins contribuer. Pourtant, il n’y a rien de mal à encourager des candidats
ou un parti qui inspire des idées, un idéal, du courage, de l’espoir, etc. Alors que l’on protège la
confidentialité du vote dans l’isoloir, on peut voir notre nom sur l’Internet pour un 100$ donné à
un parti ou à un candidat en qui l’on croit. La confidentialité disparaît aussitôt. Rappelons-nous
l’incident lors de la Commission Bastarache lors de laquelle le procureur initial, Me Pierre Cimon, a
démissionné sous la pression médiatique parce qu’il avait contribué au PLQ à la hauteur de 250$.
Des centaines, voire des milliers de personnes qui aimeraient encourager un candidat ou un parti
qui s’abstient par peur de voir leur nom déterré par les journalistes et associé à des contrats ou à
des intentions. Jusqu’où la transparence est-elle désirée ?
RECOMMANDATION 6 – L’ICO est d’avis, étant donné les montants peu élevés des contributions aux partis politiques municipaux et provinciaux, que l’on devrait garantir la confidentialité des donateurs de manière à encourager la participation citoyenne et ne pas permettre de faire des liens douteux qui ont impact sur la réputation des individus.
La Loi 1 sur l’intégrité dans les contrats publics est un autre bon exemple6. Cette loi a pour objet de
renforcer les actions de prévention et de lutte contre la corruption en matière contractuelle dans
le secteur public et de contribuer à favoriser la confiance du public dans les marchés publics. Elle
est instaurée par l’AMF, un système permettant que soit vérifié si les entreprises satisfont aux
conditions d’intégrité requises (privilège d’obtenir des contrats publics).
Cette loi prévoit que pour contracter avec le gouvernement, une entreprise de construction doit
obtenir son autorisation de contracter de l’AMF. Dans un premier temps, cette obligation
s’appliquait aux contrats de 40 millions de dollars et plus, donc une vingtaine ou une trentaine de
firmes tout au plus pouvaient soumissionner pour des contrats au-delà de cette ampleur (depuis
le 15 janvier 2013). Depuis un an, ce sont les contrats de 10 millions de dollars et plus, donc
potentiellement plus de cinq cents entreprises à être vérifiées. L’objectif est éventuellement que
cette obligation s’applique aux contrats de 1 million de dollars et plus, et potentiellement pour
tous les contrats de 100,000$ et plus. Or, il y a 28,000 entreprises de construction au Québec et
plus de 100,000 actionnaires, administrateurs et dirigeants dans ces entreprises… C’est donc dire
qu’à moyen terme, l’AMF devra analyser des milliers d’entreprises qui souhaitent contracter avec
l’État. À ce jour, environ 500 entreprises en deux ans ont été analysées. Des centaines, voire des
milliers vont bientôt s’engager dans le même processus. L’ex-maire de Montréal, Monsieur Michael
Applebaum, souhaitant écarter une – ou plusieurs – firme d’ingénierie des appels d’offres de la
Ville de Montréal, influença le conseil municipal afin que tout contrat de construction de plus de
100,000$ soit soumis à l’autorisation de contracter de l’AMF. Or, l’effet est destructeur pour les
PME souhaitant faire des affaires avec la Ville de Montréal, du moins à court terme. Plusieurs, qui
n’ont jamais fait l’objet de critiques ou de soupçons, attendent toujours leur autorisation de l’AMF
6 Loi sur les contrats des organismes publics et la Loi concernant la lutte contre la corruption (chapitre L-6.1)
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
et ne peuvent pas pour le moment soumissionner sur des offres. La conséquence, et l’ironie, depuis
quelques mois, sont que la plupart des contrats sont octroyés aux entreprises qui ont fait l’objet
de scandales, mais qui, depuis, ont réussi à obtenir leur autorisation de l’AMF. Plusieurs
propriétaires de petites firmes de construction et d’ingénierie sont présentement en furie. Pire,
depuis un an, les contrats à la ville de Montréal coûteraient potentiellement beaucoup plus cher
aux citoyens (deux entrepreneurs à qui nous avons parlé parlent de 25% de plus). Si ce chiffre
s’avère véritable, cela revient à dire que les contribuables payent le même prix qu’au moment où
la collusion sévissait allègrement.
Dans ce contexte, qui sont les véritables gagnants ? Probablement que les principales gagnantes
sont les firmes de comptables et d’avocats qui accompagnent des centaines, et bientôt des milliers
d’entreprises de construction, pour mettre en place des structures et des encadrements qui
rassureront les autorités. Les grandes firmes qui ont fraudé ont toutes ou presque obtenues leur
autorisation, avec comme excuse, tout à fait réelle, qu’elles sont des poumons pour l’économie du
Québec et qu’exclues, ce sont des centaines d’employés qui auraient pu être mis à pied. Est-ce que
les autorités seront aussi clémentes pour les PME de petite taille ? Agiront-elles de façon équitable?
Puniront-elles les 200 employés d’une PME parce qu’un dirigeant a fait de la collusion ? Dans deux
décisions importantes (Wise, 2004 et BCE, 2008) 7, la Cour Suprême du Canada énonçait que
l’intérêt d’une organisation ne devait pas être synonyme ou confondu avec celui de ses
actionnaires, mais devait également tenir compte des intérêts des employés, des clients, des
créanciers, des fournisseurs, du public et des autres parties prenantes. Il est donc très dangereux
pour un gouvernement provincial ou municipal de condamner publiquement une entreprise dans
son ensemble alors que quelques dirigeants ou actionnaires ont agi de manière illégale, aussi
frustrant cela soit-il. Selon l’Institut, agir ainsi va potentiellement à l’encontre de ce principe de la
Cour Suprême. D’ailleurs, qui peut juger de l’intégrité d’une entreprise et de la confiance du public?
Un entrepreneur nous soulevait qu’il n’est pas juste qu’une entreprise privée qui a compté un ou
deux fraudeurs à l’interne puisse être pénalisée à pratiquement une peine de mort alors que la
Ville qui en a compté des dizaines ne subit aucune conséquence.
Le bon côté de la Loi 1, c’est qu’enfin les firmes d’ingénierie ont pris au sérieux une loi. Par le passé,
elles se sentaient intouchables grâce à leurs avocats, comptables, firmes de relations publiques,
relations politiques et leur argent. Le message de cette loi semble être que la fête est terminée.
Selon l’Institut, les organisations sont toujours intègres, ce sont les gens qui y travaillent qui parfois
ne le sont pas. Une entreprise est plus que ses actionnaires, administrateurs et dirigeants. Ce sont
des centaines d’employés, des fournisseurs et une communauté, lesquels ne doivent pas être punis
pour quelques-uns. Il ne faut pas protéger ou laisser ces firmes impunies pour leurs actions
inacceptables. Cependant, il ne faut pas non plus les détruire parce que quelques-uns se sont servis
pendant une époque où c’était le buffet à volonté au Québec, une époque où plusieurs de nos
instances de surveillance ne faisaient pas preuve de la vigilance qu’elles présentent aujourd’hui.
Récupérons au passage quelques centaines de millions des beaux profits réalisés par ces firmes,
mais à un rythme qui ne les détruiront pas. Les entreprises devraient être appelées à payer des
7 Magasins à rayons Peoples inc. (Syndic de) c. Wise, 2004 CSC 68, [2004] 3 R.C.S. 461 et BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976, 2008 CSC 69, [2008] 3 R.C.S. 560
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amendes pour ne pas avoir mis en place des encadrements et des structures appropriées. Aux
États-Unis, les entreprises au sein desquelles les dirigeants et administrateurs ont fraudé
s’exposent à des amendes très importantes, des centaines de millions de dollars et parfois même
des milliards (Furukawa Electric Co. Ltd. fut condamné à 200 $ millions d’amendes pour fixation de
prix, Christie’s International Inc. and Sotheby’s Holdings Inc. à 512 millions de dollars pour fixation
de prix, Kellogg Brown & Root (KBR) à 579 millions de dollars de pénalités pour des pots-de-vin au
Nigéria à des officiers gouvernementaux et la spectaculaire pénalité de 1,6 milliard de dollars à
Siemens AG pour «disgorgement and anti-bribery fines ». Cependant, si les entreprises ont mis en
place de bonnes pratiques, telles que suggérées par les Federal Sentencing Guidelines for
Organizations (FSGO)8, elles voient l’amende être réduite de manière importante. Cette pratique a
entraîné la vaste majorité des grandes entreprises aux États-Unis à mettre en place de véritables
programmes d’éthique et d’intégrité. Par exemple, Pratt & Whitney forme tous ses employés une
fois par année, et ce, depuis plus de dix ans.
Un dernier exemple est la Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale9 qui exigeait des
1,100 villes du Québec qu’elles adoptent en un an un Code d’éthique pour le Conseil municipal et
dans un délai de deux ans, un code pour les employés. Dans la précipitation, des centaines de villes
ont sous contracté l’écriture de leur code à des firmes d’avocats et ne s’y sont pas impliquées. Il
n’y a par ailleurs pas eu de véritable démarche d’intégration de ces codes.
De plus, cette Loi énonce les six valeurs du secteur municipal, sans les définir. Cette absence de
définition n’aide personne. Par exemple : Qu’est-ce que l’honneur ? Devant cette absence de
définitions, Me Riendeau, Directeur général de l’Institut, a défini ces valeurs auprès de la
Commission municipale du Québec dans un document intitulé « L’éthique, pilier de la gouvernance
municipale et de la confiance du citoyen »10. Enfin, chaque municipalité étant différente, chacune
devrait avoir le choix de déterminer ses propres valeurs. Or, une poignée de villes seulement sur
les 1100 ont édicté des valeurs qui leur étaient propres, la grande majorité se contentant de celles
de la Loi, sans les définir. Une belle occasion manquée de bien faire les choses malgré une bonne
intention à la base.
RECOMMANDATION 7 – Les gouvernements devraient faire attention à la tentation d’adopter des
lois rapidement sans en mesurer les conséquences. Pour toute future loi visant à encadrer le milieu
des affaires et l’attribution de contrats, le gouvernement devrait faire une étude des impacts à court,
moyen et long termes. Le gouvernement doit également continuer à demander des avis au Barreau
du Québec, ainsi qu’à d’autres organisations pouvant contribuer à la réflexion.
RECOMMANDATION 8 – Ne pas punir indirectement les employés et parties prenantes innocentes au
sein des organisations, mais punir sévèrement les individus fautifs. Réviser la Loi 1 sur l’intégrité dans
8 Report of the Ethics Resource Center’s Independent Advisory Group on the 20th Anniversary of FSGO 9 Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale, RLRQ c E-15.1.0.1 10 Voir : www.http://www.cmq.gouv.qc.ca/images_data/515.pdf
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les contrats publics afin que celle-ci intègre le concept de gouvernance édicté par la Cour Suprême du
Canada et afin d’éviter de punir des centaines d’employés, fournisseurs et une communauté pour
quelques-uns. Une possibilité serait d’accorder une amnistie aux entreprises fautives pour autant
qu’elles se déclarent coupables et payent des pénalités conséquentes.
RECOMMANDATION 9 – Que le Québec adopte des principes directeurs semblables à ceux que l’on
trouve dans le Federal Sentencing Guidelines qui feraient état des éléments clés pour instaurer une
véritable culture de l’éthique.
RECOMMANDATION 10 – Que le Québec adopte une loi prévoyant des pénalités importantes
représentant un pourcentage significatif du chiffre d’affaires annuel des entreprises et non pas un
montant pareil pour tous (par exemple entre 5 et 10% du chiffre d’affaires pendant deux ou trois ans).
Une amende de 1,000,000$ est énorme pour une PME, mais pratiquement ridicule pour une
multinationale. Que cette loi laisse la discrétion au juge de fixer les pénalités en fonction du respect
des principes éthiques (i.e. Federal Sentencing Guidelines)
4.3.2 La carotte et le bâton
L’absence de sanctions proportionnées au Québec constitue un découragement collectif et dans
certains cas, elle devient, pour certains, un encouragement. Il n’est pas normal que l’un des plus
importants fraudeurs de notre récente histoire, Vincent Lacroix, s’en sorte après avoir purgé moins
du sixième d'une peine de 13 ans de prison pour avoir floué plus de 9200 investisseurs. Aux États-
Unis, il aurait eu une sentence de prison à vie et peut-être même une sentence semblable à celle
de Bernard Madoff aux États-Unis qui fut condamné à 150 ans de prison ferme. La dissuasion
devient de plus en plus importante dans une société qui s’appauvrit et au sein de laquelle plusieurs
ont peur pour leur avenir et sont prêts à poser des gestes répréhensibles. Différentes études
démontrent qu’il y a 20% de gens qui ne frauderont pas, peu importe la tentation, mais 20% qui le
feront, peu importe les encadrements et les conséquences. Il reste donc 60% d’individus qui
peuvent pencher un jour ou l’autre dans l’une de ces directions, en fonction de leur vie personnelle,
de leur avarice, de leur goût du risque, de leurs valeurs, etc. Un sondage récent du 17 juin 2014 de
KPMG en Suisse démontrait que 60% des employés avaient fait usage de pratiques malhonnêtes11.
Le bâton, au Québec, est insuffisant. Nous sommes une société qui a été tolérante, mais face à
l’ampleur de ce que nous vivons, nous ne pouvons plus nous fier seulement aux formations en
éthique, à la pression médiatique et au risque de réputation pour changer les choses. Comme
disaient les Romains : Corruptio optimi pessima (c.-à-d. la corruption des élites est la pire). C’est
donc au niveau des élites responsables que les sanctions devraient s’appliquer, et ce, avec rigueur
et vigueur.
11 17 juin 2014 « Près de 2 employés sur 3 sont malhonnêtes’ » voir http://www.20min.ch/ro/economie/news/story/22508601
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 11 – Renforcer les peines des dirigeants reconnus coupables. Que les peines
passent de 14 ans à 25 ans pour la corruption et la collusion (véritable intention de tromper et
stratagème)12.
Pour bon nombre de citoyens, l’incohérence qui demeure est que plusieurs fonctionnaires
corrompus s’en sortent avec quelques coups de règles sur les doigts, un énorme magot et un
régime de retraite qui fait l’envie de plusieurs. Le gouvernement devrait songer à donner le pouvoir
aux organismes publics de ne pas remettre la partie de l’employeur dans les prestations de retraite
aux fonctionnaires ayant fraudé.
RECOMMANDATION 12 – Le fonctionnaire ayant fraudé pourrait ne pas recevoir la partie de
l’employeur dans sa prestation de retraite.
En même temps, il faudrait ne pas seulement adopter une approche punitive ou coercitive, mais
nous devrions aussi féliciter les compagnies démontrant des comportements éthiques. Une partie
de la solution consisterait à récompenser de telles entreprises qui ont fait la preuve du temps.
Pourquoi ne pas implanter à la grandeur du Québec un système de points de mérite ou de démérite
lors des appels de propositions? Un système qui, par exemple, accorderait 10% aux entreprises qui
n’auraient pas fait l’objet de condamnation ou d’accusations au cours des 10 dernières années ou,
mieux encore, qui auraient mis en place un véritable programme d’intégrité. Cette avenue
permettrait aux compagnies éthiques de gagner plus de contrats sans nécessairement détruire les
entreprises au sein desquelles quelques dirigeants ont agi avec cupidité et malice. Ce système
pourrait être géré par un organisme indépendant, potentiellement l’AMF, qui fait déjà l’analyse de
l’historique des actionnaires, administrateurs et dirigeants d’entreprises. Il est temps de remettre
en question le système du plus bas soumissionnaire conforme et de laisser plus de place à
l’appréciation de l’intégrité, de la compétence, des résultats, du nombre d’accidents sur les
chantiers et de l’intégrité. Bien entendu, les comités de sélection auront une part de discrétion,
mais bien sélectionné, encadré et informé, ces comités pourraient voir juste, l’on pourrait leur
donner notre confiance, pas une confiance aveugle, mais une confiance construite sur des assises
solides. En effet, une hypocrisie dénoncée tant par les dirigeants de firmes d’ingénieurs, de
constructions que par les fonctionnaires publics est de ne pas reconnaître ce qui peut être appelé
la « preuve du temps et de la compétence », soit le fait qu’une entreprise a toujours bien livré, qu’il
est agréable de travailler avec celle-ci, etc. Or, il est frustrant qu’un nouveau venu, sans expérience
ou connaissances, soumissionne à 30% de moins que les autres et obtienne le contrat. Pire, le
résultat peut être désastreux et celui-ci réapplique au prochain appel de proposition et le gagne
12 Dispositions du Code criminel : La fraude visant un objet de plus de 5 000 $ est passible d’une peine (sentence) maximale de 14 ans de prison (article 380 (1) (a) Code criminel). La fraude de moins de 5 000 $ est passible d’une sentence / peine maximale de 2 ans si la poursuite est effectuée par voie d’acte criminel, ou de 6 mois d’emprisonnement si la poursuite est effectuée par voie sommaire (article 380 (2) (a) et (b) Code criminel). Disposition de la Loi sur la concurrence : paragraphe 45(1) est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 14 ans et d’une amende maximale de 25 millions de dollars ou de l’une de ces peines.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
de nouveau au plus bas prix. Si on veut parler d’une véritable équité, celle-ci ne doit pas se baser
uniquement sur les prix.
RECOMMANDATION 13 – Instaurer un système permettant de féliciter les entreprises honnêtes, mais
également qui pourrait tenir compte de certains éléments qualitatifs dans son processus
d’adjudication de contrats. Une attribution des contrats publics intégrant un pourcentage de points
qualitatifs accordé aux entreprises ayant fait la preuve du temps et mis en place des pratiques
éthiques. L’appréciation serait qualitative et subjective, mais certains paramètres pourraient être
identifiés pour faciliter l’appréciation. Nous ne suggérons pas que cette appréciation subjective et
qualitative dépasse 25% du système de pondération.
4.3.3 Instituer des instances permanentes de surveillance
Dans le domaine public, il existe déjà certaines instances de vérification, qui font un travail efficace
et très professionnel (par ex. Vérificateur général du Québec, Régie du Bâtiment, AMF, CCQ, UPAQ,
CMQ, Commissaire au Lobbysime, etc.). Autrefois, certaines d’entre elles n’ont sans doute pas
surveillé de manière optimale, mais l’ICO est d’avis qu’elles ont nettement amélioré leurs pratiques
au cours des dernières années. Nous ne voyons pas l’intérêt de créer une ou plusieurs instances
additionnelles. Cependant, le mandat de ces organisations pourrait être bonifié pour améliorer
leurs pouvoirs d’interventions et de sanctions. Par exemple, les organismes publics ayant présenté
des lacunes pendant la Commission Charbonneau (par exemple le MTQ, la Ville de Montréal, etc.),
devraient faire l’objet d’une surveillance encore plus serrée au cours des trois prochaines années,
que leurs intentions dépassent les plans d’action peaufinés et se transforment sur le terrain en
s’assurant de l’implantation des plans et que ces actions se transposent dans la culture
organisationnelle. Par exemple, il faudrait s’assurer que tous les organismes publics et les sociétés
d’État, incluant Hydro-Québec, soient soumis aux vérifications du Vérificateur général du Québec.
RECOMMANDATION 14 – Que les organismes publics exposés devant la Commission Charbonneau
pour leur laxisme, complaisance ou aveuglement volontaire fassent l’objet d’une surveillance serrée
par différents organismes au cours des prochaines années. Le Vérificateur général du Québec serait
un joueur clé avec sa grande indépendance, son expertise et sa réputation d’intégrité pour exercer ce
contrôle plus serré.
De plus, il faudrait donner davantage de pouvoirs au Commissaire au Lobbyisme pour enquêter,
faire appliquer la loi et poursuivre lui-même les entités ayant manqué à leurs obligations en vertu
de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme. Bien que la Loi soit tout à fait
louable par son esprit, il appert que le Commissaire au lobbyisme, mandataire de l’Assemblée
nationale du Québec pour veiller à l’application de la Loi, n’a pas suffisamment de ressources et de
moyens pour la faire appliquer. Par exemple, il n’est pas suffisant que le Commissaire ne dispose
que de seulement une année pour enquêter et intervenir auprès d’un individu après la commission
d’un manquement ou d’une faute. Mais plus que tout, les devoirs des titulaires de charge publique
en regard du respect de cette importante loi devraient être précisés dans la Loi de façon à les
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
responsabiliser davantage vis-à-vis le processus de régulation du lobbyisme. Il est permis de penser
que si les titulaires de charge publique avaient, par le passé, véritablement pris fait et cause pour
cette loi déterminante en matière de surveillance des communications d’influence, nous n’en
serions pas où nous en sommes aujourd’hui.
RECOMMANDATION 15 – Ne pas créer de nouvelles instances de surveillance, mais bonifier les
pouvoirs de celles déjà en place. Permettre au Vérificateur général du Québec de procéder à des
vérifications des organismes publics qui ne sont pas encore vérifiés. Donner plus de pouvoirs au
Commissaire au Lobbyisme.
Bien qu’une certaine partie de la population ait trouvé éprouvante cette Commission, celle-ci
semble avoir instauré une pression et une vigilance dans le milieu des affaires. Est-ce à dire qu’elle
devrait devenir une commission permanente ? Si celle-ci disparaît, il est possible que les tricheurs
non débusqués, et il y en a sans doute beaucoup, outre ceux présentés devant la Commission,
considèrent s’en être bien sorti et avoir gagné la première manche. Si nous voulons qu’ils ne
gagnent pas la suivante et que l’on ne voit pas ces comportements recommencer ou se multiplier,
il pourrait être intéressant que la Commission devienne permanente, un peu comme à New York,
mais pas seulement pour le secteur de la construction; pour tous les secteurs importants de notre
économie qui reçoivent des deniers publics, dont l’informatique au tout premier rang. Une
alternative pourrait être celle d’instaurer une Commission tous les dix ans, pendant une période
de trois ans, qui porterait sur l’ensemble des secteurs d’activité, de façon à mettre une pression
régulière.
Sans aucun doute, il faut aussi envisager la mise sur pied de l’équivalent de la Commission pour
d’autres secteurs impliquant des fonds publics considérables, notamment l’informatique et les
entreprises énergétiques.
RECOMMANDATION 16 – Instaurer une Commission d’enquête soit permanente, soit tous les dix ans, laquelle porterait sur l’ensemble des secteurs d’activité.
4.3.4 Améliorer la gestion contractuelle au sein des organismes publics
Bon nombre d’entrepreneurs considèrent que les appels d’offres sont souvent mal écrits ou qu’ils constituent parfois un calque d’un appel d’offres passé, si bien que les entrepreneurs voient l’incohérence de l’appel d’offres et que la proposition déposée ne reflétera pas la réalité sur le terrain. Désirant le contrat, ceux-ci soumissionnent et corrigent le tir plus tard par des avenants (autrefois appelés « extra »). Il est important que les organismes publics améliorent leurs compétences dans la détermination de leurs besoins, dans la planification et la budgétisation, ainsi que dans la préparation des cahiers des charges.
RECOMMANDATION 17 - Il est important que les organismes publics améliorent l’écriture de leurs appels d’offres et que ceux-ci soient le plus précis possible. Il faut rehausser la compétence des
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
estimateurs et procéder à des regroupements d’organismes pour ceux qui ne disposent pas des ressources suffisantes (petites municipalités, organismes publics, etc.).
Il y aura toujours un risque important de complaisance envers d’anciens politiciens, attachés politiques et hauts fonctionnaires pour placer ceux-ci dans des sociétés d’État, ministères et organismes publics. Il est difficile de penser que cette pratique disparaîtra, mais il est possible que la complaisance s’accompagne de la compétence. Les nominations, même d’anciens politiciens ou attachés politiques, devraient être précédées d’une vérification rigoureuse de leurs compétences serrées pour les fonctions convoitées.
RECOMMANDATION 18 – Exiger une vérification des compétences des anciens politiciens et attachés politiques à des postes d’importance au sein de sociétés d’État, de ministères ou autres organismes publics.
La population et les journalistes sont très préoccupés par les possibles retours d’ascenseurs des
entreprises aux fonctionnaires qui quittent l'organisation pour leur retraite afin de démarrer une
seconde carrière dans le secteur privé. Il serait pertinent de veiller à ce que les règles existantes
soient appliquées strictement. Les règles entourant la carrière des personnes politiques et des
fonctionnaires après leur passage dans les instances gouvernementales et apparentées doivent
aussi être révisées et rendues encore plus transparentes et crédibles.
RECOMMANDATION 19 – Veiller à une application stricte de l’après-mandat des fonctionnaires
auprès d’entreprises privées surtout celles avec qui ils ont pu interagir au cours des quelques années
ayant précédé leur départ pour le privé ou pour la retraite.
Il faut aussi espérer une fonction publique renforcée et imputable. Le cas du MTQ à cet égard est
fort révélateur; il serait devenu progressivement captif des firmes externes et souvent très
complaisant, oubliant son rôle, son devoir de fiduciaire et son pouvoir. Pour contrer cette lacune,
on peut penser notamment à des obligations de transparence, des mécanismes de surveillance et
des sanctions fortement accrues pour les dirigeants et autres personnes impliquées.
RECOMMANDATION 20 – Renforcer l’imputabilité des dirigeants d’organismes publics.
4.3.5 Instaurer des parcours d’intégrité et de gouvernance sur plusieurs années
Tel que mentionné précédemment, les documents peaufinés souvent tablettés ne changeront pas
la culture de nos organisations et ne garantiront pas leur intégrité. De même, il est impossible de
s’attendre à ce que, du jour au lendemain, une entreprise mette en place des structures et une
culture d’intégrité et de gouvernance semblables aux meilleures pratiques. Une PME de trente
employés ou un OBNL ont souvent plus de difficultés à attirer des administrateurs de qualité, n’ont
pas les ressources pour embaucher un responsable de l’éthique ou un responsable des ressources
humaines. Il faut veiller à ce que les PME et les organismes à but non lucratif prennent en exemple
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
la gouvernance des grandes entreprises privées ou celles des sociétés d’État. Il est important
qu’elles mettent en place des pratiques, mais en fonction de leur réalité et de leur environnement,
plutôt qu’identiques à celles des grandes entreprises privées ou sociétés d’État.
L’intégrité, c’est plus que le respect des lois et des règles. Plusieurs ordres professionnels et les
autorités réglementaires décrivent souvent l’intégrité comme étant le respect des lois et des
règles. Si bien que l’intégrité est intimement associée et même pour certains est devenue le
synonyme de respecter les lois. Or, selon l’Institut, cela n’est pas suffisant. Il y a trois paliers à
l’escalier de l’intégrité : la loi, la déontologie et l’éthique (voir schéma 6). Il ne suffit pas de respecter
les lois, mais également de respecter des règles déontologiques. Les lois prescrivent ce que nous
devons faire et ce que nous ne pouvons pas faire sous peine de sanctions criminelles, pénales ou
civiles. La déontologie est un ensemble de règles et de devoirs additionnels, venant ajouter ou
préciser ce qui ne peut être fait (par exemple poser des gestes discriminatoires) ou ce qui doit être
fait (par exemple remplir la déclaration d’intérêts). Parfois, la loi et la déontologie n’interdisent pas
ou ne permettent pas spécifiquement une situation particulière. Il faut alors se référer à l’éthique.
L’éthique guide la prise de décision et l’action lorsqu’il n’y a pas de règles. Cela exige une culture,
des valeurs connues et partagées par tous. Le passage à l’éthique est nécessaire parce que la
législation et la déontologie ne sont très souvent pas suffisantes pour assurer le niveau d’exigence
attendu légitimement par les citoyens. Pour reprendre l’idée de Pauline D’Amboise (Secrétaire
générale et Vice-présidente Gouvernance et responsabilité sociale au Mouvement des caisses
Desjardins et formatrice Leadership éthique dans un contexte de gouvernance au Collège des
administrateurs de sociétés), ces règles constituent « un habit trop étroit pour évaluer les
situations de plus en plus complexes ». L’éthique permet d’être proactif et favorise le
développement de la prise de décision responsable.
Tant les organisations privées que publiques devraient veiller à ce que les trois paliers de l’escalier
de l’intégrité soient respectés à tous les niveaux de l’organisation. Régulièrement les organisations
devraient procéder à un état des lieux en matière d’intégrité et mettre en place des actions pour
la solidifier.
Schéma 6 : Les 3 marches de l’escalier de l’intégrité
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 21 – S’assurer que nos dirigeants et administrateurs d’organismes publics
procèdent régulièrement (par exemple aux quatre ans) à un état des lieux (audit) de leur organisation
pour chacune des trois marches de l’escalier de l’intégrité (loi, déontologie et éthique). Cette pratique
permettrait de responsabiliser les dirigeants et cadres dans l’application de pratiques efficientes et
en développement continu.
Les organisations devraient présenter des parcours d’intégrité ainsi que des parcours de
gouvernance sur plusieurs années. L’important n’est pas d’avoir tout en place du jour au
lendemain, mais de prévoir des étapes et de se fixer des objectifs pour améliorer ces deux aspects.
Le parcours d’intégrité devrait comporter à la fois des ingrédients de « structure » et de
« culture ».
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Schéma 7 : La culture et la structure de l’organisation
Structure Culture ‒ Code d’éthique et de confiance; ‒ Engagement des actionnaires, dirigeants et
administrateurs; ‒ Code déontologique des administrateurs et dirigeants; ‒ Vérification des antécédents ; ‒ Diagnostic des 30 risques d’intégrité; ‒ Déclarations, diagnostics et encadrements des conflits
d’intérêts; ‒ Programme de déontologie des professionnels; ‒ Registre des lobbyistes; ‒ Mécanismes de signalement des incidents; ‒ Politique de contrôles internes; ‒ Politique de saines pratiques concurrentielles; ‒ Politique portant sur les avenants et les prix; ‒ Politique antifraude; ‒ Comité d’audit avec les administrateurs indépendants; ‒ Politique de gestion disciplinaire; etc.
‒ Comité éthique composé d’une variété d’employés reflétant la diversité de l’organisation;
‒ Actualisation des valeurs à tous les quatre ans; ‒ Audit de l’implantation des valeurs et
engagements de l’organisation (focus group ou sondage auprès d’un nombre significatif d’employés);
‒ Conseiller à l’éthique externe OU interne (mais sans pouvoir disciplinaire);
‒ Programme de formations sur 3 ans (saines pratiques concurrentielles, réflexions éthiques, etc.);
‒ Document de résolution de dilemmes éthiques; ‒ Plan de communication éthique interne,
incluant des articles visant à renforcer les valeurs et engagement; etc.
Le parcours de gouvernance devrait s’adresser à toutes instances de gouvernance de
l’organisation.
LA DÉONTOLOGIEEst-ce que je peux?
Est-ce que je dois?
LA LOI
copyright@DonaldRiendeau, 2005
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RECOMMANDATION 22 – Les organisations devraient se doter d’un parcours d’intégrité et d’un
parcours de gouvernance sur plusieurs années (nous suggérons que ces diagnostics soient réalisés au
même moment que la planification stratégique afin d’être alignés et incorporés avec celui-ci.
RECOMMANDATION 23 - Chaque organisme public devrait produire annuellement, auprès de son
mandant, les résultats de sa démarche d’intégrité et de gouvernance grâce au tableau de bord
développé, personnalisé et mis à jour par ses instances de gouvernance et intégré au rapport annuel
public.
Gouver-
nance
corporative
Gouvernance
organisationnelle
Gouvernance fonctionnelle
Tactique
CA
Comités
Direction
Gestionnaires
Employés
Actionnaires
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copyright@DonaldRiendeau, 2007
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4.3.6 Intégrer l’intégrité dans l’évaluation des dirigeants et administrateurs
Il est important que l’on choisisse la prochaine génération de leaders non seulement sur la base de leur performance financière, opérationnelle et stratégique, mais en fonction de l’évaluation de leur intégrité, c’est-à-dire selon leur respect des lois, des règles déontologiques, mais aussi de leur éthique dans leurs décisions et comportements, ainsi que du respect et de la mise en application des valeurs de l’organisation. Cette idée implique qu’il est important que l’on évalue si ceux-ci ont pris des décisions dans le meilleur intérêt de l’organisation et de ses parties prenantes et que l’on mesure l’impact de ces décisions (voir document intitulé « Gouvernance : Agir dans l’intérêt de qui ? », août 201113). On pourrait notamment exiger ou demander des lettres de recommandation d’individus d’expérience détenant une grande crédibilité (à ne pas confondre avec la renommée). On pourrait aussi procéder à un questionnaire anonyme de collaborateurs et dirigeants passés permettant de mesurer s’ils sont intègres et dignes de confiance. Les conseils d’administration auraient la responsabilité de déployer des efforts et une réflexion sur cet enjeu.
RECOMMANDATION 24 – Prendre en compte l’intégrité dans l’évaluation et l’embauche de dirigeants.
13 Gouvernance : Agir dans l’intérêt de qui ? Me Donald Riendeau en collaboration avec Jean-Claude Deschênes, Hubert Manseau et la contribution du Barreau du Québec, Août 2011
L’ICO a eu le privilège d’accompagner quelques entreprises du secteur de la construction et de
l’ingénierie pour mettre en place de véritables parcours d’intégrité et de gouvernance. L’une de ses entreprises nous avait initialement contactés pour que nous procédions à la rédaction d’un
Code de déontologie rapidement. L’ICO a alors refusé en expliquant que l’important n’est pas le
document mais la démarche permettant d’écrire cet important document, les efforts déployés pour
permettre aux employés d’en apprivoiser le contenu, de le mettre en pratique et de le faire évoluer. Après avoir hésité et bien qu’ils aient été pressé, ils ont accepté non seulement d’écrire un Code mais
de se lancer dans une démarche complète de confiance et d’intégrité. Un comité de confiance et
d’intégrité fut mis en place et procéda à diverses rencontres sur période d’un an. Plusieurs membres de
l’organisation répondirent à des questionnaires ouverts ainsi qu’à un sondage. Le diagnostic permis d’en
apprendre beaucoup sur qu’elles étaient les véritables forces de l’organisation, le niveau d’implantation
des différentes valeurs et les éléments à améliorer. Un parcours de confiance et d’intégrité fut mis en
place, plusieurs encadrements et comportements implantés ainsi que diverses formations dont l’une à
tous les employés et d’autres propres à différents métiers de l’organisation. Un an et demi après le début de la démarche, la confiance au sein de cette organisation s’est beaucoup
améliorée et les gens croient en la démarche à tous les niveaux, ils en redemandent ! Le Comité de
Confiance et d’intégrité est toujours en place pour permettre que le momentum ne s’essouffle pas. Ces
entrepreneurs ont pris le pari de la confiance.
Exemple d’un cas vécu dans une entreprise de construction
L’ICO a eu le privilège d’accompagner quelques entreprises du secteur de la construction et de
l’ingénierie pour mettre en place de véritables parcours d’intégrité et de gouvernance. L’une de ses entreprises nous avait initialement contactés pour que nous procédions à la rédaction d’un
Code de déontologie rapidement. L’ICO a alors refusé en expliquant que l’important n’est pas le
document, mais la démarche permettant d’écrire cet important document, les efforts déployés pour
permettre aux employés d’en apprivoiser le contenu, sa mise en pratique et son évolution. Après avoir hésité et bien qu’ils aient été pressé, ils ont accepté non seulement d’écrire un Code, mais
de se lancer dans une démarche complète de confiance et d’intégrité. Un comité de confiance et
d’intégrité fut mis en place et procéda à diverses rencontres sur une période d’un an. Plusieurs
membres de l’organisation répondirent à des questionnaires ouverts ainsi qu’à un sondage. Le
diagnostic a permis d’en apprendre beaucoup sur qu’elles étaient les véritables forces de l’organisation,
le niveau d’implantation des différentes valeurs et les éléments à améliorer. Un parcours de confiance
et d’intégrité fut mis en place, plusieurs encadrements et comportements implantés, ainsi que diverses
formations dont l’une à tous les employés et d’autres propres à différents métiers de l’organisation
furent données. Un an et demi après le début de la démarche, la confiance au sein de cette organisation s’est beaucoup
améliorée et les gens croient en la démarche à tous les niveaux, ils en redemandent ! Le Comité de
Confiance et d’intégrité créé est toujours en place pour permettre que le momentum ne s’essouffle pas.
Ces entrepreneurs ont pris le pari de la confiance.
Exemple d’un cas vécu dans une entreprise de construction
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4.3.7 Mettre en place des mécanismes de signalement et de surveillance efficaces
Plusieurs sont d’avis que les employés témoins ou soupçonnant des fraudes ou des activités de
collusion ne pouvaient presque rien faire. En effet, dans une organisation où il n’y a pas de comité
d’audit avec des administrateurs indépendants, où il n’y a pas de conseiller à l’intégrité
indépendant et où il n’y a pas de ligne de dénonciation ou de vigilance indépendante, il est souvent
difficile d’intervenir. Comme le mouvement de la qualité totale l’a clairement démontré, ces
mécanismes de vigilance devront être revus et améliorés en continu pour suivre l’évolution de la
société et des pratiques d’affaires.
Toutes les grandes entreprises privées et les grands organismes publics devraient compter sur une
majorité d’administrateurs indépendants (ce qui est déjà le cas pour la grande majorité) faisant
partie d’un Comité d’audit, ainsi qu’un mécanisme permettant aux employés et aux parties
externes de dénoncer des gestes questionnables de la direction sans risque de représailles. Elles
devraient également compter sur un conseiller à l’intégrité indépendant, lequel n’est ni l’avocat
externe de l’organisation ni un avocat responsable des dossiers de discipline au sein de
l’organisation. Il est important que ce conseiller puisse être consulté pour conseiller, prévenir,
analyser et proposer des solutions, et ce, sans peur de représailles pour les employés. Ces
organisations auraient avantage à disposer d’une ligne de dénonciation ou de vigilance
indépendante, auprès du conseiller à l’intégrité ou auprès d’un organisme externe indépendant.
Les organisations devront mettre en place des mécanismes de surveillance et de contrôle fiables
et efficaces. L’expérience du Mouvement Desjardins à cet égard avec ses Conseils de surveillance
composés de membres élus périodiquement et formés aux bases de l’excellence des diverses
instances devrait être étudiée attentivement.
RECOMMANDATION 25 – Toutes les grandes organisations devraient compter sur un conseiller à
l’intégrité indépendant et un comité d’audit comptant au moins deux administrateurs indépendants
auprès desquels les employés et parties prenantes pourraient se confier sans crainte de représailles.
Au sein des plus petites organisations, la tâche est plus difficile. Il leur est parfois difficile d’attirer
des administrateurs externes et le cas échéant cela peut leur coûter cher. Toute PME d’une
certaine taille devrait compter sur au moins un administrateur indépendant et graduellement en
ajouter d’autres (deux ou trois). Ces administrateurs devraient à la fois présenter des habiletés de
types « fiduciaires » (contrôles, reddition de compte, gestion des risques, fonctionnement des
comités, etc.) et « créatrice de valeurs » (vision, orientations, performance, compétences,
connaissance des parties prenantes externes, etc.).
Étant donné leur taille, il est difficile d’embaucher un conseiller à l’intégrité indépendant. Elles
pourraient recourir à un expert externe à temps partiel (cependant, les risques de conflit d’intérêts
sont souvent élevés) ou envisager avoir recours à un organisme totalement indépendant et à but
non lucratif composé de gens renommés qui pourraient agir auprès de nombreuses organisations.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 26 – Les PME devraient compter sur de véritables conseils d’administration et
non seulement sur des conseils d’administration sur papier ou sur des comités consultatifs sans
véritables pouvoirs et responsabilités. Ces conseils d’administration devraient compter au moins un,
sinon deux et pour les plus grandes trois administrateurs indépendants. Mais il est important que la
gouvernance d’une PME ne soit pas automatiquement calquée sur la gouvernance des grandes
entreprises privées et sociétés d’État, car les réalités ne sont pas les mêmes.
RECOMMANDATION 27 – Le gouvernement pourrait financer un organisme indépendant et sans but
lucratif composé de sages et de professionnels crédibles qui pourraient conseiller les petites
organisations privées, publiques et à but non lucratif en cas de manquements, de même que conseiller
les employés et agir comme conseiller en intégrité, poser les gestes appropriés en cas de manquement
et protéger la confidentialité de ceux-ci.
Un outil que toutes les organisations, petites ou grandes, pourraient développer est la mise en
place d’un Comité interne d’intégrité, composé de plusieurs personnes au sein de l’organisation
qui se réuniraient quelques fois par année afin d’analyser l’intégrité au sein de l’organisation et de
proposer des encadrements, comportements ou actions. Ce comité pourrait avoir un mandat plus
large que celui de l’intégrité, mais également suggérer des actions pour améliorer diverses
pratiques et la confiance au sein des organisations.
RECOMMANDATION 28 – Les organisations pourraient mettre en place des comités internes
d’intégrité qui veilleraient à la mise en place et à l’implantation de bonnes pratiques.
Il serait pertinent d’améliorer les mécanismes de signaleur d’alerte au sein de toutes les
organisations. En effet, nous pouvons nous questionner à savoir comment il est possible que les
avocats au sein des contentieux de nos grandes firmes d’ingénierie ou société d’État n’aient rien
vu de la collusion qui y sévissait. Plusieurs se demandent s’ils étaient complices, complaisants ou
incompétents. Si l’on doit se doter de divers mécanismes pour contrer les tricheurs, on ne doit pas
s’imaginer qu’aucun groupe d’individus ou d’entreprises ne tentera de détourner ces mécanismes.
Il est impératif que des professionnels soient formés pour pouvoir alerter les bons intervenants
(Comité d’audit, autorités policières, enquêteurs externes, etc.).
RECOMMANDATION 29 – Que les ordres professionnels incitent les professionnels, particulièrement
les secrétaires corporatifs et les vérificateurs internes, à être vigilants et ne pas hésiter à donner
l’alerte le cas échéant.
La force des médias sociaux et des « journalocitoyens » n’a jamais été aussi importante. Prenons
l’exemple d’une grande entreprise québécoise qui avait décidé d’entreprendre des procédures
judiciaires contre une PME qui utilisait une marque de commerce identique à son produit phare,
mais un nom très commun. Des citoyens indignés et considérant que cette entreprise utilisait des
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
procédures abusives envers une petite entreprise se sont exprimés sur les médias sociaux. Dans un
temps éclair, la nouvelle s’est rependue et des leaders d’opinion s’en sont mêlés. Nous tenons à
souligner que cette entreprise est une grande réussite québécoise et comme toute entreprise peut
commettre des erreurs, l’important est de s’amender et de s’améliorer.
Un autre exemple de la puissance des citoyens est le suivant. Le président d’une firme d’ingénierie
nous relatait que cela allait devenir plus difficile dans les années à venir de refaire les trottoirs d’une
banlieue, contrairement à autrefois, quand les personnes âgées – ou autres – ne posaient pas de
questions. Aujourd’hui, le citoyen questionne. Chaque citoyen a un rôle de surveillance non
seulement au sein de l’organisation dont il fait partie, mais également au sein de la société. Bien
entendu, il est important qu’un employé ne dévoile pas de l’information confidentielle ou ne brise
les dispositions de son Code, par exemple en transmettant un document confidentiel à un
journaliste. Il se doit d’utiliser tous les moyens à sa disposition au sein de l’organisation, mais doit
se rappeler que le Code criminel, le Code civil et le Code de déontologie de sa profession
prédominent le Code d’éthique de son organisation et qu’il se doit d’agir en regard de ces
différentes lois.
RECOMMANDATION 30 – Que chaque citoyen joue un rôle de sentinelle au sein de son organisation
et au sein de la société, tout en respectant lui-même les règles.
4.4 Faire preuve de leadership et de responsabilisation
4.4.1 Encourager les résistants de l’intégrité et la responsabilité individuelle
« Rien ne procure plus de fierté et de satisfaction à la vieille garde que de savoir que les
idées pour lesquelles ils se sont sacrifiés portent enfin leurs fruits (1989). Il n’y a pas
cadeau plus généreux que de consacrer son temps et son énergie à aider les autres sans
rien en retour. » (Nelson Mandela 2004)
Cette réflexion de Mandela peut sembler surprenante dans la société d’aujourd’hui où plusieurs
sont tentés de s’enrichir en utilisant parfois des stratagèmes peu recommandables, même si pas
toujours illégaux. Combien d’occasions peuvent se présenter par lesquelles nous pourrions nous
laisser tenter par le côté obscur ? Par exemple, plusieurs n’hésitent pas à exagérer leur kilométrage
parcouru en voiture aux fins de réduction fiscale, payer un ouvrier au noir ou se faire payer lui-
même au noir pour ses services. Il est difficile de résister à ces astuces qu’un grand nombre semble
utiliser sans aucun remords. Il est même frustrant pour les gens honnêtes de voir des gens se servir
de stratagèmes sophistiqués et de paradis fiscaux pour s’enrichir en s’en tirant sans aucune
conséquence.
La situation ne peut et ne doit pas s’empirer, sinon le monde du chacun pour soi gagnera, chacun
se méfiera de tout un chacun. Chacun tentera de prendre ce qu’il peut de l’autre plutôt que de
donner. La société en deviendra une de méfiance. Il est vrai qu’au cours des dernières décennies
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
l’on a assisté à davantage de créativité vers le vice ou vers la survie, diront certains (trop de taxes,
l’injustice des retraites du secteur public versus les gens du privé, une société de consommation et
de crédits, etc.). L’ICO est d’avis que trop de gens sont tentés de pencher vers les opportunités de
collusion, d’évasion fiscale, etc. « Aurais-je été résistant ou bourreau ? » (Minuit, 2013).
Selon la mairesse de Chateauguay14, Madame Nathalie Simon, nous avons toujours le choix de
résister ou de plier. Nous devrions être fiers d’afficher notre intégrité, en laissant filer des
occasions faciles de s’enrichir, plutôt que d’être mécontents et de plier pour s’enrichir. La rigueur
éthique devrait être présente en chacun de nous. Que l’on soit un richissime homme d’affaires qui
cache son argent dans les paradis fiscaux ou un client prêt à payer une facture sans les taxes, la
véritable question est de savoir l’importance que l’on accorde à ce que nous avons envie d’être et
quel exemple nous voulons donner. La mairesse de Chateauguay, Madame Simon, s’est distinguée
en se classant au cinquième rang parmi les 20 candidats de notre enquête d’opinions15 portant
sur les personnalités de confiance 2013 s’étant le plus illustrée en matière de confiance. Elle fut
pourtant l’un des candidats les moins médiatisés, mais ses actions et son courage ont marqué
l’imaginaire des Québécois.
RECOMMANDATION 31 - Encourager et gratifier les résistants de l’intégrité, les faire graduer et leur
laisser leur chance. Résister à la tentation et être fièrement des résistants de l’intégrité, même si l’on
trouve injuste que tant d’autres se le permettent, et ce, malgré des conséquences presque
inexistantes.
Il faut selon nous savoir contrôler le germe du « Madoff-Lacroix » qui sommeille en nous16. Lorsque
huit personnes dans un département (Ville de Montréal) sont impliquées dans une telle manœuvre
douteuse (sans compter combien d’autres qui ont possiblement fermé les yeux), cela signifie peut-
être qu’un germe existe. Un germe de l’appât du gain, de la luxure, des cadeaux, de la voiture de
luxe, du séjour sur un bateau ou du voyage en Italie. Nous avons tous un tel germe. Certains l’ont
recouvert d’une toile de paillage, alors que d’autres ont ajouté de l’engrais chimique. Est-ce
moralement acceptable pour les proches de Gilles Surprenant et Luc Leclerc de recevoir
gratuitement une maison dont les murs respirent l’argent blanchi ? Combien de professionnels
reçoivent une partie de leur salaire en Alberta dans une fiducie pour sauver des centaines de
milliers de dollars d’impôts au cours de leur vie ? Combien de médecins avec trente années
d’expérience se contentent d’enlever de simples verrues parce qu’ils sont payés à l’acte au lieu de
servir réellement la société avec leurs expertises acquises dans nos universités quasi gratuites ?
Certes, il y a des gestes pires que les autres, mais c’est insidieusement, année après année que l’on
peut passer de la « petite » corruption à la « grande » corruption.
La responsabilisation individuelle exige du courage. Cela est particulièrement vrai au sein de plusieurs conseils d’administration de nos grandes entreprises privées et publiques qui ont failli.
14 Texte Mairesse de Chateauguay, Transmettre le gène du courage et de la rigidité éthique, mai 2014 15 Journée internationale de la confiance, les prix de la confiance 2013 (3 mai 2014) 16 Voir note 1.
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Malgré des administrateurs compétents et renommés, il leur a manqué de courage. Difficile de se lever face à ceux qui nous ont nommés et qui pourraient nous aider demain.
RECOMMANDATION 32 – Apprendre à contrôler notre germe de la cupidité et se responsabiliser individuellement.
4.4.2 Développer une responsabilité collective
L’une des plus graves menaces qui nous guettent est le désengagement collectif. Ce que nous voyons présentement peut en décourager plusieurs et les amener à être cyniques. Comme le père de famille qui fait de la collusion, mais qui se rassure en se disant qu’il est un bon père et distribue son argent à ceux qu’il aime, tant pis pour le voisin et le restant de la société.
La responsabilité collective est liée à l’intégrité globale à l’intérieur d’une société, celle correspondant au niveau de vertu attendu, à la somme de l’intégrité des personnes17. Également, il faut utiliser nos outils démocratiques et s’intéresser à cette gestion des municipalités et des gouvernements, demander des comptes.
La passivité après la Commission aurait un effet dévastateur. Le cynisme général risque de paralyser l’initiative sociale. La passivité serait probablement la pire résultante de la Commission. Cependant, le manque de proximité de la commission avec la population générale en fait un spectacle de corruption détaché des réalités terrain et surtout d’un plan d’action afin d’empêcher le financement politique et l’attribution de contrats publics de manière non éthique.
Il devient difficile de développer une solidarité dans une société de plus en plus individualiste. Mais comme l’écrit si bien Nelson Mandela :
« Les valeurs de solidarité qui conduisaient autrefois notre quête d’une société plus humaine semblent avoir été remplacées, ou du moins sont menacées par le matérialisme sans scrupules et la recherche de la satisfaction instantanée. L’un des défis de notre époque, sans vouloir formuler de vœux pieux ou jouer au moraliste, est de réintroduire dans les consciences le sentiment de solidarité entre les hommes, la nécessité d’être au monde par l’autre, grâce à lui et pour lui. » (10 septembre 2004).
Au lieu de critiquer et d’envier celui qui réussit, de ne pas accorder de temps à son voisin qui traverse un mauvais moment, de s’émouvoir seulement lorsqu’il y a de grandes catastrophes, il est primordial et urgent de changer nos habitudes de vie en se préoccupant de l’autre et en investissant en lui. Il faut penser davantage à donner plutôt qu’à prendre. On en retirera une satisfaction immense.
RECOMMANDATION 33 – Se préoccuper de l’autre, investir dans la solidarité.
17 Tirer d’un texte d’Étienne Brodeur, actuaire et ex-dirigeant de Bombardier, juin 2014,
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4.4.3 Savoir pardonner, d’un pardon mérité
« C’est grâce aux sanctions que des progrès énormes ont été faits (1990). Je travaille
aujourd’hui avec les gens qui m’ont mis en prison, qui ont persécuté ma femme, chassé
mes enfants d’une école à l’autre… Et je fais partie de ceux qui disent : oublions le passé,
et pensons au présent. » Nelson Mandela (1990)
Si Nelson Mendela a su pardonner, nous pouvons tous le faire. À la lumière de tout ce que nous
avons entendu au sujet de la corruption dans notre société québécoise et devant les abus
impensables commis par certains de nos concitoyens, dirigeants ou chefs d’entreprises, il n’est pas
aisé de pardonner, comme le suggère Mandela, et de passer à autre chose. Trop de nos ordres
professionnels et organismes de réglementation n’ont rien fait pendant de longues années, faisant
en sorte que les corrompus influencent un grand nombre de personnes qui se sont laissées
entraîner et qui sont elles-mêmes devenues corrompues.
Le principe de pardon demeure valable, mais doit être remis dans sa véritable perspective.
Mandela n’aurait pas accepté que certains des crimes commis contre l’humanité demeurent
impunis. Ainsi, nous saluons l’audace et la force de notre présent gouvernement pour l’adoption
de la Loi 1 qui a entraîné le départ de nombreux actionnaires et dirigeants ayant commis des fautes.
En même temps, il faudra pardonner pour aller de l’avant. Il ne faut pas tuer nos organisations. Il
faudra ensemble remettre de l’ordre dans notre société. Trop de professionnels, dirigeants et
politiciens ont fait partie de ces stratagèmes pour qu’on les écarte pour toujours. Ils font partie de
la solution, qu’on le veuille ou non. Mandela était pour le pardon, mais il faut le mériter. L’Institut
a fait le choix d’accompagner certaines organisations dont certains dirigeants ont pu faillir, parce
que ceux-ci ont la volonté de changer et investissent les efforts.
RECOMMANDATION 34 - Apprendre à pardonner pour aller de l’avant ; il faudra ensemble remettre
de l’ordre, mais il faut mériter ce pardon, il faut démontrer une véritable volonté de changer et non
seulement pour obtenir l’autorisation de contracter de l’AMF, par exemple.
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4.4.4 Un leadership renouvelé - Encourager les gens et organisations de confiance
« La première tâche d’un leader est de donner une vision (1993). Un vrai leader se sert de chaque problème, aussi sérieux et sensible soit-il, pour faire en sorte que nous sortions du débat plus forts et plus unis qu’avant (2000). C’est une grave erreur, pour n’importe quel leader, d’être hypersensible aux critiques et de mener les débats comme s’il était un professeur discourant devant des élèves moins informés et moins expérimentés (1998). » Nelson Mandela
Nous n’en disons pas plus, ces paroles parlent d’elles-mêmes. Mettez celles-ci en contexte avec les
actions de nos gouvernements depuis une vingtaine d’années et comparez ceux-ci à Mandela. Ont-
ils cherché la solidarité ou plutôt la division ? Ont-ils été opportunistes en se servant d’événements
survenus au Québec ces dernières années pour se faire élire ? Ont-ils privilégié la ligne de partie à
l’intérêt des Québécois ? Avons-nous eu au cours des quinze dernières années des politiciens et
entrepreneurs à la hauteur de nos attentes ? De véritables leaders ?
Notre enquête d’opinions de juin 2013 révélait que 55 % des Québécois sont d’avis que les
politiciens gèrent en se souciant davantage de leur intérêt personnel que du bien-être collectif
(27 % croient l’inverse et 22 % sont neutres) et seulement 26 % des répondants sont d’avis que les
dirigeants des grandes entreprises privées sont généralement éthiques et intègres (43,5 % croient
l’inverse et 30 % sont neutres).
Les entreprises et les secteurs qui ont été malmenés doivent rapidement rehausser leur leadership
et changer la situation, sinon des entreprises privées québécoises affaiblies auront de la difficulté
à concurrencer et à croître. Ces joueurs doivent affronter la tempête et redresser la situation.
Il faut donc commencer le ménage et ne pas se décourager, notamment en accompagnant et en
montrant aux chefs d’entreprises à faire confiance à leurs subordonnées, à travailler avec eux et
non à leur place et en les amenant à prendre la pleine responsabilité de la direction de leur
entreprise. Si on veut que les employés, et ultimement la population, croient aux changements, il
est primordial que ceux-ci voient un engagement véritable de leurs dirigeants et qu’ils voient non
pas du maquillage, mais de véritables gestes et efforts de ceux-ci pour changer. De plus, de
nombreux employés ont été blessés et entrent au travail avec un énorme nuage gris au-dessus de
leur tête. Ils ont honte de dire où ils travaillent et ont perdu la fierté envers leur entreprise. Pour
ceux-ci, il est important que leurs dirigeants reconnaissent ce qui s’est passé, montrent une
compassion envers ce que leurs employés ont subi et démontrent que des actions seront prises
pour changer les choses et retrouver cette fierté. Au cours des deux dernières années, nous avons
eu l’opportunité de parler à des dirigeants qui ont fait le choix de changer, de faire les affaires
différemment. Pour l’un d’entre eux, c’est cette prise de conscience qui sauvera son entreprise et
lui permettra de connaître bientôt encore plus de succès qu’avant.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 35 – Les dirigeants et propriétaires d’organisations ayant adopté des pratiques d’affaires douteuses doivent croire à une autre manière de réussir en affaires, se transformer en leaders qui montrent l’exemple et qui montrent qu’il est possible de changer et de s’améliorer. Qu’il est possible de connaître du succès et de faire de l’argent tout en restant honnête.
De plus, il est essentiel d’encourager une nouvelle génération de leaders avec un leadership
renouvelé. Au lieu d’une culture qui félicite le gagnant sur 100 participants, pourquoi ne pas
partager et admettre plusieurs petits gagnants. De même, il faut réapprendre aux futurs leaders
ambitieux de ne pas aller trop vite et d’obtenir l’avancement sans véritable mérite. Trop de nos
dirigeants et leaders avec un important potentiel et des rêves veulent les réaliser trop rapidement,
à n’importe quel prix, rapidement, sans peur de commettre des irrégularités, car les sanctions sont
inexistantes et que des professionnels les protégeront. À la base, les parents ont un devoir
d’éducation. Si l’on enseigne à son enfant que le seul but est de gagner et de s’enrichir, il y a de
fortes chances que cette mentalité s’installe en lui lorsqu’il sera sur le marché du travail.
RECOMMANDATION 36 – Identifier et faire graduer une nouvelle génération de leaders qui peuvent à la fois être compétents, efficaces et intègres. Repérer et prendre des actions appropriées auprès des employés trop ambitieux qui utilisent des coups bas pour monter les échelons et qui malgré leurs compétences et leur intelligence ne considèrent pas suffisamment les autres parties prenantes de l’organisation, agissant en sens contraire des valeurs prônées.
Il devient impératif de reconnaître et de valoriser les entreprises intègres, les hommes et les
femmes courageux et déterminés à réussir honnêtement. Par exemple, lors des audiences de la
Commission, nous avons entendu le témoignage d’un entrepreneur honnête qui a refusé de
marcher dans la collusion à Laval pour rester en paix avec lui-même, M. Pierre Allard, d’Excavations
S. Allard, qui a tenu tête aux collusionnaires. Les gens et les jeunes cherchent de bons leaders :
prenons par exemple le défi Pierre Lavoie, lequel est devenu un leader et une source d’inspiration.
Il est important d’identifier les bons entrepreneurs.
RECOMMANDATION 37 – Que la Commission présente ses félicitations à tous ceux et celles qui ont contribué positivement à ses travaux.
Le 3 mai 2014, journée internationale de la confiance, notre Institut soulignait le travail
exceptionnel accompli par certains citoyens durant l’année 2013 en leur décernant le prix des
« personnalités de confiance ». Suite à une enquête d’opinions18 auprès de plus de 500 Québécois
et Québécoises effectuée par l’ICO et qui avait pour but d’identifier les personnalités dignes de
confiance, les Québécois ont choisi l’honorable juge France Charbonneau (Commissaire de la
Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la
construction) comme la personne de confiance par excellence au Québec pour l’année 2013. Elle
était suivie, dans l’ordre, de Madame Colette Roy-Laroche, mairesse de Lac Mégantic, Monsieur
18 Voir note 15.
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Régis Labeaume, maire de Québec, Monsieur Claude Robinson, artiste et illustrateur et Madame
Nathalie Simon, mairesse de Chateauguay.
L’Institut a cru qu’il était nécessaire d’entreprendre cette démarche pour souligner qu’il existe au
Québec des gens qui méritent notre confiance, même si parfois nous sommes portés à en douter.
Fréquemment, on évoque la confiance en son absence ou lorsqu’elle est brisée par les mensonges
et errements de certains politiciens et dirigeants. Pourtant, il y a des élus intègres et courageux,
comme il y a des ponts et des routes bien construits.
L’Institut a été impressionné par les témoignages des récipiendaires rencontrés, mais surtout par
leur réaction lors de la remise de leur trophée : ils se sont dits très émus. Il est une chose de se
faire aimer, mais il en est une autre d’être une personne digne de confiance.
En 2014, l’Institut s’associe à différentes organisations et organismes afin de repérer les
personnalités de confiance dans différents secteurs d’activité et il identifiera ainsi les personnalités
de confiance par domaine d’activité (gens d’affaires, politicien, ingénieur, avocat, etc.).
RECOMMANDATION 38 – Que les organisations et associations identifient les leaders intègres et de confiance afin de les gratifier et de les faire connaître.
RECOMMANDATION 39 – Que le gouvernement procède à de vastes campagnes d’éducation et de sensibilisation afin de redonner un sens plus juste et porteur à ces concepts actuellement malmenés. Mettre sur pied une campagne éducative portant sur l’importance des vrais leaders, des leaders de demain.
4.4.5 Briser la culture des affaires et réinventer une nouvelle manière de faire des
affaires
Au-delà des concepts ou notions qu’il importe de renouveler, plusieurs attitudes questionnables
(ou prédispositions lourdes à agir dans un certain sens) ressortent dans le cadre des travaux de la
CEIC et se révèlent largement partagées par les acteurs influents de notre société. Ces attitudes
forment une mentalité, une culture qui, jusqu’à un certain point, cautionne, justifie et supporte un
ensemble de modes d’action qui sont devenus une menace pour nos institutions démocratiques.
Parmi ces attitudes à conscientiser et à modifier, qu’il suffise de nommer une ignorance feinte des
gestes douteux posés autour de soi ou par soi-même, une tolérance excessive de ceux-ci, la peur
de dénoncer ces agir aux autorités légitimes, un légalisme opportuniste qui tient lieu d’éthique, le
report constant sur autrui de la responsabilité relativement aux actions incorrectes observées, la
complicité dite naïve avec des intervenants plus ou moins bien intentionnés, la poursuite de
l’intérêt financier individuel à court terme au détriment de l’intérêt commun ou la minimisation
systématique des conséquences de ces agir douteux, etc.
Ces attitudes ont malheureusement la capacité de rendre normales et donc acceptables aux yeux
des gens impliqués plusieurs pratiques contraires à un fonctionnement sain et démocratique de
nos institutions. Plus difficiles à modifier que nos idées, ces attitudes évolueront pour le mieux
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notamment grâce aux remises en question authentiquement effectuées par les dirigeants des
organismes, par leur exemple dans l’action et par la démonstration convaincante de leurs effets
nocifs sur notre société.
Une leçon fondamentale de la CEIC est la nécessité d’inventer une nouvelle façon de faire des
affaires avec les différents paliers gouvernementaux, para et péri gouvernemental. La collusion
entre fournisseurs et la corruption interne ne disparaîtront qu’avec une gouvernance et un
leadership éthique portés par les hauts dirigeants de nos organismes publics. Ce sont eux qui
doivent amorcer le mouvement et donner l’exemple.
RECOMMANDATION 40 - Apprendre à nos dirigeants, administrateurs et employés qu’il faut
développer une loyauté envers l’organisation plutôt qu’envers l’individu.
Plusieurs sont prêts à bafouer les règles, leur honneur, le mérite, pour suivre le leader aux
comportements déviants en espérant que celui-ci les fera monter dans les entreprises. Il est de
plus en plus possible de constater une société québécoise basée sur la loyauté envers l’individu
plutôt qu’envers l’intérêt collectif et corporatif. Par exemple, de nombreux organismes publics,
dont le dirigeant provient de l’extérieur, amènent rapidement sont anciens cercles de
collaborateurs, entre autres pour se protéger. Cette situation crée un sentiment d’iniquité et de
gestion ou le mérite passe au second plan après la loyauté et lance le message que les bonnes
positions se s’obtiennent si on est fidèle et loyal.
Or, les articles 2088 et 322 du Code civil du Québec énoncent respectivement qu’un employé et
un administrateur doivent agir avec loyauté envers l’organisation. Chaque employé, dirigeant et
administrateur devraient placer en premier l’intérêt de l’organisation avant la loyauté envers un
collègue ou un dirigeant19.
D’ailleurs, le président d’une grande firme d’ingénierie auparavant en scandale nous disait que
l’organisation n’aurait pas été dans cette difficulté si on avait avant tout agi dans l’intérêt de
l’organisation, c’est-à-dire avant l’intérêt individuel ou de groupe. À cet effet, Andrew Molson
relatait lors d’une formation aux étudiants du MBA en 2013 aux HEC, qu’il est un devoir pour les
actionnaires, administrateurs, dirigeants et employés de s’assurer que Molson Coors reste en
santé. Si chacun essaye de tirer son épingle du jeu et de prendre un avantage indu sur l’entreprise
dans son ensemble, c’est au final la santé de l’entreprise qui en souffrira. Si par contre tous
contribuent à la garder en santé, tout un chacun en bénéficiera.
RECOMMANDATION 41 – Enseigner aux administrateurs et dirigeants ce que signifie le devoir légal
d’agir dans le meilleur intérêt de l’organisation. Leur permettre de comprendre que l’intérêt d’une
organisation est davantage que l’intérêt des actionnaires (ou mandants) ou que leur intérêt
personnel, mais également l’intérêt des employés, des créanciers, des clients, des fournisseurs et de
19 Voir 13.
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la communauté. Que des mesures déontologiques soient prises contre ceux ne respectant pas ce
principe qui est également un devoir juridique.
Le Québec tout entier est entré dans une paranoïa en ce qui concerne les cadeaux, repas et
activités. Si bien que des clubs de golf sont sur le bord de la faillite et les restaurateurs vivent des
moments plus difficiles.
Il est clair que le Québec a été longtemps dans une éthique de parade (voir schéma 6). C’était le
buffet à volonté pour ceux et celles qui voulaient se servir, sans véritable crainte de se faire punir.
La Commission a révélé plus d’une trentaine de personnes qui se sont fait offrir des cadeaux
substantiels pouvant être liés à de la corruption. Combien de personnes sont allées sur le bateau
de M. Accurso, combien de personnes ont été invitées à Cuba ou en Italie par divers entrepreneurs,
combien de billets de hockey ont été donnés ?
Schéma 8 : Le balancier de l’éthique en 2014
Aujourd’hui, une conséquence est que le balancier est tout à l’opposé ; nous sommes en train de
tout interdire. Certaines sociétés d’État nous demandent parfois de resserrer encore plus leurs
règles internes. Nous leur suggérons à leur grande surprise de les rendre moins contraignantes.
En effet, il leur faut montrer qu’ils ont confiance aux employés. L’objectif n’est pas de punir les
90 % qui n’abusent pas pour les 10 % qui abusent.
C’est un peu un balancier, mais celui-ci reviendra dans quelques années à un juste équilibre. Il faut
réinventer des façons de faire des affaires et agir avec jugement, intelligence et transparence.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 42 - Que des comités d’éthique composée d’employés représentant la diversité
de l’organisation suggèrent à la direction les lignes directrices en regard des cadeaux, activités et
repas, afin que celles-ci reflètent la culture au sein de l’organisation et celle des parties prenantes
externes.
4.4.6 Le privé et le public ne sont pas des ennemis
Quels sont les impacts sur le milieu des affaires ? Ralentissement des affaires, l’hyper
réglementation, les cônes orange envahissent le paysage ou rien ne bouge, l’éthique ne fait plus
de sens pour plusieurs puisqu’on semble bannir toute relation humaine, la lenteur des prises de
décisions dans les municipalités, etc. (voir à ce sujet l’article de Francis Vailles « Les affaires, la
confiance et Charbonneau »20).
Nous sommes passés en quelques années d’une éthique de « buffet à volonté » à une éthique de
« contrôles extrêmes ». À part quelques avocats et comptables qui sont ravis de l’ouvrage que
procure l’ajout de contrôles, presque tous les autres sont perdants ; entrepreneurs, fonctionnaires,
syndicats, élus et ultimement le grand public. La méfiance n’a jamais été aussi grande. Les
fonctionnaires restent cloîtrés dans leurs bureaux et ne veulent plus rencontrer personne. On
enseigne même dans des formations en intégrité au sein du secteur public depuis plus d’un an,
qu’une invitation à dîner est le début de la corruption, qu’il n’y a pas d’invitation sans intention…
D’un côté, les entreprises privées adoptent des documents et vont chercher des sceaux pour
rassurer les donneurs d’ouvrage, de l’autre les donneurs d’ouvrage se blindent de contrôles et ne
veulent plus prendre de décision. Deux grandes solitudes qui ont besoin l’une de l’autre, mais qui
se sont éloignées. Il faut rétablir les ponts. En ce moment, nous sommes inquiets des conséquences
des efforts investis pour structurer exagérément à l’aide de contrôles des firmes d’ingénierie et des
organismes publics, comme si l’on désirait isoler ceux-ci et créer un mur entre les deux.
Il est dangereux de perdre et de ne pas investir dans l’essentiel lorsque l’on procède ainsi. Ce n’est
pas en interdisant les dîners à nos employés que l’on va gagner leur confiance et celle du public. La
question n’est pas de ne plus avoir de contact entre le public et le privé. Dans l’expression
« relations d’affaires », il y a le mot relation. Il faut toutefois entretenir ces relations différemment,
avec jugement et transparence.
RECOMMANDATION 43 – Rétablir le dialogue et le contact entre le secteur privé et le secteur public.
Ce sont présentement deux solitudes qui ont besoin l’une de l’autre.
20 Francis Vailles « Les affaires, la confiance et Charbonneau » paru dans La Presse Affaires le mardi, 14 mai 2013
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4.4.7 Redevenir de véritables professionnels, pas seulement des hommes d’affaires
Il y a quelques semaines, l’ICO était invité par l’Association des Ingénieurs Conseils du Québec21
pour lui faire part de ses réflexions sur les actions à poser pour regagner la confiance du public.
Malgré les scandales et la mauvaise presse, les ingénieurs enregistrent un taux de confiance de
56 % en 2013, ce qui est une chute importante par rapport à 2006 ou la confiance était à 88 %22.
Le but de la présente section est de tenter de déterminer quels sont les éléments requis pour
établir et maintenir le lien de confiance entre les citoyens, les donneurs d’ouvrage et les
professionnels. Au Québec, ce lien de confiance a été durement mis à l’épreuve notamment en ce
qui regarde les ingénieurs, les avocats et, dans une moindre mesure, les médecins. Le baromètre
des professions 2013 du Québec montre que la confiance des Québécois entre 2002 et 2013 est
passée de 65 % à moins de 51 % dans l’ensemble des métiers. Cependant, la confiance envers
certains professionnels, tels que les avocats (au 52e rang sur 60 métiers avec 35 % de confiance),
les chirurgiens plastiques (50e), les fiscalistes (48e), les chiropraticiens (41e) et les psychiatres (37e)
est également sérieusement basse.
Selon nous, l’une des principales raisons sous-jacentes aux problèmes des dernières années est
l’objectif poursuivi par plusieurs firmes d’ingénierie qui sont davantage devenues des machines à
profit que des firmes de professionnels.
Au cours des 20 dernières années, les firmes d’ingénierie québécoises ont connu une telle
croissance, oubliant parfois l’essence même de la définition d’un professionnel. La Commission
nous a permis de percevoir que plusieurs firmes d’ingénierie québécoise étaient devenues des
machines à profit au sein desquelles l’objectif premier était le profit. Les moyens pour y parvenir
devenaient souvent secondaires. Pour plusieurs, la collusion étant considérée comme un moyen
de faire des affaires. Les citoyens ont pu y voir que les dirigeants de firmes d’ingénierie seraient
devenus davantage des hommes d’affaires à l’éthique très élastique que de véritables
professionnels. Il est fondamental que les firmes d’ingénierie cherchent un meilleur équilibre entre
cette recherche du profit et le professionnalisme.
Les firmes d’ingénierie traversent une période difficile et de remise en question de la façon de faire
des affaires, de leur culture organisationnelle et de leur leadership. À l’Institut, nous avons
confiance dans le génie québécois. Plusieurs organisations présentent de nombreux ingrédients à
la confiance. Il appartient à celles-ci de sortir gagnantes sur le moyen et le long terme et de
regagner cette fierté d’être une firme d’ingénierie québécoise. Le Québec a besoin de ces firmes,
mais veut avoir confiance en elles, elles doivent se remettre en forme.
21 Voir le site Web : http://www.aicq.qc.ca/accueil 22 Voir note 3.
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RECOMMANDATION 44 – Les firmes d’ingénierie devraient questionner à nouveau leur philosophie d’entreprise et redéfinir leur modèle d’affaires afin de présenter un meilleur équilibre entre la recherche du profit et être une véritable firme de professionnels. Elles pourraient insérer la notion de la recherche du meilleur intérêt de l’organisation dans leurs conventions d’actionnaires, règlements de régie interne ou même repenser le mode de rémunération des actionnaires/associés. Elles pourraient s’assurer de définir et de former leurs professionnels sur les éléments clés du professionnalisme ainsi que de les mesurer par rapport à ces critères.
Bon nombre de professionnels autres qu’ingénieurs devraient également en profiter pour procéder
au même examen de conscience. Au cours des vingt dernières années, de nombreuses professions
semblent avoir davantage focalisé sur la recherche du profit plutôt que d’avoir recherché à être de
véritables professionnels. Le cas de Claude Robinson est d’ailleurs éloquent. Le 20 novembre 2013,
la Cour Suprême23 rendait un jugement final en faveur de monsieur Claude Robinson, après deux
décennies d’une bataille juridique épique, voire inédite. Pour plusieurs, c’est la victoire de David
contre Goliath, mais pour monsieur Robinson, c’est avant tout la victoire de ses petits bonshommes
contre les arrogants. Il aurait été si simple d’avouer le plagiat et de passer à autre chose avec cette
multinationale qui nageait dans l’argent qu’était devenue Cinar quelques années plus tard. Mais
non, les Charest, Weinberg, France Animation, Ravensburger, etc. voulaient à tout prix gagner
contre ce petit Robinson. Ils étaient certains que l’argent, le pouvoir et les meilleurs avocats d’un
peu partout auraient raison de lui. D’ailleurs, monsieur Robinson aurait pu perdre son courage à
maintes reprises face à ces nombreux avocats et juges qui ont défilé devant lui, et ce, malgré leurs
nombreux conflits d’intérêts, le camouflage de preuves, la prolongation indue des procédures, ses
locaux espionnés, des tactiques déloyales, ainsi qu’une créativité juridique sans frontière pour
facturer et gagner à tout prix. Il y a également les firmes comptables qui conseillèrent les dirigeants
de Cinar toutes ces années et qui n’auraient pas vu les multiples prête-noms et la fraude, malgré
des états financiers vérifiés... Lorsque l’ICO a rencontré monsieur Robinson pour lui remettre le
prix des personnalités de confiance 201324, il a tenu à souligner le bon travail de ces quelques
avocats et juges qui se sont démarqués, dont Me Marc-André Blanchard, jeune avocat qui a cru en
lui en 1996 et qui l’a appuyé pendant 11 années, ainsi que le juge Claude Auclair de la Cour
supérieure qui condamna les gestes de « bandits à cravate ou à jupon »25.
Les deux dernières décennies ont transformé plusieurs firmes d’avocats au sein desquelles la
facturation est devenue la philosophie première de gestion. Dans plusieurs grands cabinets, la
pression est de facturer souvent plus de 2000 heures par année. Chaque avocat est poussé à
vendre ses services. La compétition interne entre avocats est de plus en plus intense. Le vol de
clients au sein d’un même cabinet n’est pas rare. L’on identifie les avocats approchant 65 ans et
comme des charognards certains se positionnent pour hériter les premiers et même avant terme
des clients de ces derniers.
23 Christophe Izard et autres c. Claude Robinson et autre, 2012 CanLII 28260 (CSC) 24 Robinson La victoire des petits bonhommes, 1 juin 2014, Institut de la confiance dans les organisations. 25 Robinson c. Weinberg, 2005 CanLII 20304 (QC CS)
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Prenons également l’exemple de certaines firmes de comptabilité structurées en centres de
profits. Seuls les associés principaux deviennent millionnaires, les autres travaillant comme des
forcenés en espérant eux aussi accéder à la tour d’ivoire de la royauté et faire travailler les autres
à leur tour. Une phrase courante dans le milieu des firmes de comptables est la suivante « We eat
what we kill ». Ce qui signifie que, peu importe le client, il faut rapporter, il faut vendre et livrer.
Quoi vendre ? Cela devient secondaire. Certaines firmes de comptables ont multiplié leurs services.
En plus des services de comptabilité, de vérification et de contrôles, elles offrent des services en
éthique, gouvernance, développement durable, stratégie, financement, marketing, recrutement,
etc. Certaines firmes comptables achètent même des entreprises de construction (c’est le cas de
l’une de nos plus grandes firmes comptables qui vient d’acquérir une entreprise de construction
dans l’Ouest canadien). Pourquoi ? Parce que depuis bientôt deux années, plusieurs firmes de
comptabilité font du lobbying auprès du gouvernement du Québec afin qu’elles puissent surveiller
les projets d’ingénierie.
Depuis environ un an, ces mêmes firmes d’avocats, de comptabilité et de relations publiques
vendraient leur expertise en intégrité pour venir sauver les firmes de construction et d’ingénierie.
Il est possible d’imaginer que certaines d’entre elles auraient su ce qui se passait depuis de longues
années et auraient elles-mêmes contribué au financement sectoriel des partis politiques. Certaines
ont même cherché à cacher les choses, à manipuler, à pousser à demain ou à plaire aux dirigeants
pour les garder comme clients en acceptant tout. Il aurait fallu du courage pour parler aux
dirigeants de firmes de construction et d’ingénierie que l’on savait collusionnaires pour leur dire
carrément que certains de leurs comportements étaient inacceptables et ne pas accepter de
masquer le tout. Il aurait fallu que de nombreux professionnels agissent dans l’intérêt de
l’organisation cliente et non pour les quelques individus au sein de celles-ci qui leur donnaient des
contrats (voir recommandation # 40). Il aurait pourtant été si facile de rapporter ces situations aux
Conseils d’administration de plusieurs de ces entreprises pour qu’ils agissent.
Les firmes d’avocats, de comptables et de relations publiques doivent également aider les
entreprises de construction et firmes d’ingénierie à sortir de cette crise. Malheureusement, leur
objectif est souvent de vendre aux entreprises de construction, aux firmes d’ingénierie et aux
organismes publics le plus de structures et de documents possible en leur disant que cette façon
de faire les choses est le seul moyen de regagner la confiance.
Les structures ne seront pas suffisantes pour changer les choses. Pire, elles entraîneront des frais
extraordinaires et ne changeront pas réellement la culture. Si l’on veut sortir de cette crise et
changer les choses, les firmes d’ingénieurs n’y arriveront pas seules si elles sont mal conseillées.
Les firmes de professionnelles qui les conseillent devront jouer leur rôle, soit en leur indiquant
véritablement les bonnes choses à faire, soit en ne s’en mêlant pas.
RECOMMANDATION 45 – Les firmes de professionnels qui n’ont pas l’expertise en intégrité et qui ont
fermé les yeux devant leurs clients collusionnaires devraient avoir une réflexion sur la pertinence
d’accompagner les organisations publiques et privées pour redresser l’intégrité de celles-ci.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Les ordres professionnels et associations de firmes de professionnels devraient redéfinir ce qu’est
un professionnel en 2014 et ce dont on s’attend de celui-ci. Nous félicitons le Barreau du Québec
qui depuis plusieurs années nous permet de donner une formation intitulée « Avocat gardien de
l’éthique », laquelle a été donnée à ce jour à des centaines d’avocats.
RECOMMANDATION 46 – Les ordres professionnels et associations de firmes de professionnels
devraient redéfinir ce qu’est un professionnel en 2014 et à quoi l’on s’attend de celui-ci.
Depuis 2001, tour à tour, les comptables, les avocats et, depuis peu les médecins multiplient les
outils pour faire du profit et devenir des professionnels « Inc. » : fiducies, salaires versés dans
d’autres provinces pour sauver de l’impôt, fausses voitures de compagnies, etc. Nous assistons
année après année au déclin du rôle du professionnel. Il faut avoir le courage de critiquer l’éthique
de telles pratiques. Ce n’est pas parce que c’est légal que cela est moralement acceptable. Un
professionnel a un devoir d’exemplarité. Rappelons-nous qu’un poisson pourrit d’abord par la tête
et que si nos dirigeants et professionnels ne montrent pas l’exemple, on peut se demander qui le
fera ? L’éthique va plus loin que le respect des lois et des règles, l’éthique est de faire la meilleure
chose dans les circonstances et de regarder les impacts de nos décisions et de nos choix sur le
public. Déjà, de nombreux professionnels sont des privilégiés de notre société. Ont-ils besoin
d’utiliser en plus tous les stratagèmes légaux et comptables disponibles ? Si vous êtes l’un de ces
professionnels, êtes-vous parfaitement à l’aise et avez-vous l’esprit complètement tranquille face
à ces pratiques ?
RECOMMANDATION 47 – Le gouvernement devrait se questionner sur les structures juridiques des
firmes de professionnels, ainsi que sur les différents outils auxquels elles ont recours pour optimiser
leurs profits. Le gouvernement, le conseil interprofessionnel et les ordres professionnels ont
aujourd’hui la responsabilité de se pencher sur le présent enjeu, car leur mission est de protéger le
public. Tous ses outils et pratiques contribuent à créer une philosophie de commerçant plutôt que de
professionnel.
4.4.8 Des médias plus éthiques qui jouent véritablement leur rôle
« Crucial est le rôle des médias pour que nous restions en contact et soyons informés ;
dans la diffusion des informations bonnes ou mauvaises, sensationnelles ou banales.
J’aimerais rendre hommage en cette occasion à leur dévouement sans borne, et souvent
mal apprécié et à leur contribution à un monde mieux informé, et donc meilleur (1997). Il
est du devoir des journalistes d’examiner la conduite des personnalités publiques et de
braquer les projecteurs sur eux – c’est leur devoir (1992). Les journaux nous tendent un
miroir et nous devons avoir assez de courage pour regarder notre reflet (2007). » (Nelson
Mandela)
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Il est vrai que nos médias québécois recherchent parfois le sensationnalisme en déformant quelque
peu la réalité. Par exemple, il est tentant de braquer la caméra sur la bouteille de vin sur la table à
laquelle se trouve un élu en compagnie d’un entrepreneur en construction. Il est également tentant
de présenter la version de deux personnes qui disent « rouge » alors qu’ils savent que 98 autres
diraient « vert ». Malgré ses quelques dérapages, il n’en reste pas moins que les médias ont joué
un rôle de premier plan dans la création de la Commission Charbonneau dont le travail aidera à
changer nos mœurs. L’Institut tient à féliciter les nombreux journalistes grâce à qui cette
Commission d’enquête n’aurait probablement jamais eu lieu. Leurs reportages, leurs enquêtes et
surtout la pression qu’ils ont mise sur le gouvernement de l’époque ont permis cette Commission.
Nous les remercions d’être le quatrième pouvoir sans lequel les dérives pourraient être encore plus
grandes.
Cependant, selon le baromètre de Léger Marketing26 portant sur la confiance des Québécois envers
différents métiers, la confiance envers les journalistes a passablement chuté depuis quelques
années. En 2013, ils se retrouvaient au 47e rang avec 42 % de la confiance de la population. Or, ils
avaient plus de 53 % de confiance en 2002.
Les médias devraient également avoir certaines réflexions sur leur rôle dans cette crise et leur
professionnalisme. Il est vrai qu’à une époque de médias en continu et de médias sociaux
instantanés, le métier de journaliste devient de plus en plus difficile et que l’on a moins de temps
pour le travail de fond. Comme le mentionne madame Nathalie Simon, mairesse de Chateauguay
et ancienne journaliste, l’actualité n’aide en rien à modifier la perception des citoyens sur la
possibilité de changements dans la manière de faire les choses autrement27. En effet, on parle dix
fois plus d’actes de corruption que d’actes de bravoure. On s’attend à plus de certains journalistes
pour mériter et faire honneur à ce métier si important pour notre société, ils sont les transmetteurs
de l’information, ils nous permettent plus de transparence et une meilleure compréhension du
monde.
Les journalistes se retrouvent souvent entre deux réalités : informer et trouver la vérité ou vendre
du papier (ou du Web). Ces objectifs doivent être atteints en se préoccupant de l’intérêt et de la
protection du public. Les journalistes devraient constamment garder en tête la protection du
public.
RECOMMANDATION 48 – Que le gouvernement considère attribuer aux journalistes le statut de
professionnels afin que ceux-ci soient tenus à des standards élevés de comportements. Bien qu’en ce
moment le professionnel ne soit pas toujours un exemple.
RECOMMANDATION 49 – Un Conseil de presse obligatoire pour tous, des pouvoirs plus grands de
réprimande et des pénalités plus importantes.
26 Voir note 3. 27 Voir note 16.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 50 – Un Conseil de presse qui identifie annuellement le ou les journalistes qui
ont agi avec grande intégrité.
RECOMMANDATION 51– Le journaliste n’est pas seul ; son patron aussi a une part de responsabilité.
Il est imputable de ce que font ses employés. Les rédacteurs en chef et les éditeurs devraient être
imputables de ce que leurs journalistes publient.
RECOMMANDATION 52 -- Une évaluation annuelle de chaque journaliste intégrant l’intégrité dans
la profession et le traitement de l’information par ses pairs.
RECOMMANDATION 53– Les organisations qui comptent sur des journalistes devraient également
adopter des valeurs et s’assurer que celles-ci soit mises en pratiques par leurs journalistes. Par
exemple, la valeur de la transparence; la transparence, ce n’est pas de tout dire, c’est plutôt dire la
bonne chose au bon moment, à la bonne personne et en accordant le poids relatif à la nouvelle.
RECOMMANDATION 54 – Que les médias accordent davantage de visibilité aux bonnes nouvelles, aux
bons leaders.
4.4.9 Encourager et élire des politiciens dignes de confiance
Il n’existe pas de détecteur de confiance ou d’intégrité. Toutefois, quatre-vingt-trois pour cent des
Québécois sont d’avis que la confiance s’est dégradée au Québec au cours des 10 dernières années
(enquête d’opinion ICO juin 2013). Comment faire autrement lorsque les Tomassi, Applebaum,
Zampino et Vaillancourt clament qu’ils sont intègres alors qu’ils sont poursuivis quelques mois plus
tard ? En même temps, et cela est contradictoire, de nombreux citoyens sont prêts à donner leur
vote parce que le candidat a l’air gentil, affirme représenter le changement ou encore se dit
expérimenté. Il faut savoir et ne pas se contenter de croire.
Nous sommes un peu pris au dépourvu, il faut l’admettre. Il n’existe pas encore de détecteur de
confiance. L’ICO a mis sur pied un comité de réflexion qui identifiera quels sont les critères
permettant de mieux choisir, de trouver un équilibre entre une confiance aveugle et une méfiance
complète. En attendant, nous recommandons sept angles de réflexion :
‒ Un élu qui n’a pas ou pas trop de squelettes dans son placard. Les Québécois aspirent à
choisir un politicien qui est éthique, c’est-à-dire qui n’a pas usé de pratiques douteuses ou
qui n’a pas dit de propos méprisants envers les autres.
‒ Un candidat multidimensionnel. Confieriez-vous la gestion de votre patrimoine à un
fleuriste ou l’excavation de votre maison à un écrivain ? C’est la même chose si vous
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
décidiez de confier la destinée d’un bateau aussi complexe que celui de la Ville de
Montréal, du Québec ou du Canada à un candidat unidimensionnel qui ne possède pas un
ensemble d’habiletés et d’expériences complémentaires.
‒ La preuve du temps. Il faut être critique face aux beaux parleurs. Le candidat devrait
pouvoir démontrer un bon équilibre dans sa carrière entre ses engagements et ses
réalisations.
‒ Le courage. Comme le disait si bien Winston Churchill, la plus grande qualité d’un homme
d’État est le courage, car sans cette qualité les autres ne servent à rien. Le candidat est-il
prêt à affronter les vraies questions telles que l’énorme déficit du fond de retraite ou la
désuétude de nos routes et aqueducs ?
‒ Non redevable aux rois de l’ombre. Le candidat devrait posséder une grande indépendance
d’esprit. Saura-t-il écouter son équipe et son propre jugement ou, à l’inverse, ses décisions
seront-elles influencées par la mafia ou des hommes d’affaires puissants ? Est-il menotté
par tous les retours d’ascenseurs obtenus au cours de sa carrière ou tentera-t-il de plaire
à certains pour la prochaine étape de sa carrière ?
‒ Un rêveur terre à terre. Certes, attirer les Jeux olympiques est plus vendeur que colmater
des égouts, mais nos organisations ne disposent pas de ressources infinies. Il faut bien sûr
rêver, mais il est plus sage de mettre l’accent sur l’innovation et la mobilisation citoyenne
plutôt que sur de futurs déficits qui rattraperont les prochaines générations déjà fortement
endettées.
‒ Un Mandela plutôt qu’un Napoléon. Napoléon était brillant et a connu du succès, mais
Nelson Mandela aussi. Il y a toujours deux manières de réussir comme homme d’État, avec
ou sans le peuple. Le candidat devrait pouvoir démontrer qu’il ne s’est pas soudainement
improvisé champion de l’intégrité. Son parcours devrait illustrer qu’il est proche des gens,
qu’il les respecte, qu’il les aime et qu’il est au diapason de leurs aspirations.
À défaut de posséder un détecteur de confiance, il faut saisir l’occasion de chaque élection pour
faire des choix plus éclairés, avoir un second regard sur les candidats et pousser notre réflexion un
peu plus loin. Les journalistes ont également le pouvoir, mais surtout l’énorme responsabilité, de
nous aider à déterminer si les candidats méritent notre confiance.
RECOMMANDATION 55 – Une responsabilisation individuelle à chaque élection, un effort pour faire
des choix mieux éclairés.
Il faut penser à donner le goût à la politique aux futures générations. Une éducation politique à
l’école secondaire pourrait être obligatoire, laquelle expliquerait les différents postes électifs, en
quoi cela consiste et quels sont des leaders respectables. Les travaux de certaines organisations à
vocation citoyenne devraient être encore plus encouragés, tels que ceux de l’Institut du Nouveau
Monde (INM).
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 56 – Enseigner davantage la politique aux jeunes dès le secondaire afin de
préparer une nouvelle génération de leaders et donner le goût à plusieurs de s’engager davantage en
politique.
De plus, pour plusieurs citoyens, un vote semble ne pas compter. Dans des quartiers
traditionnellement « bleus » ou « rouges », de nombreux citoyens ne vont même pas voter,
pensant que leur vote ne servira à rien. Il est impératif de questionner à nouveau notre mode électif
au niveau provincial et fédéral. De plus en plus de voix se lèvent pour réévaluer le vote
proportionnel.
RECOMMANDATION 57 – Réévaluer le système électif au niveau provincial et fédéral en considérant
le vote proportionnel.
L’une des plus importantes frustrations qu’éprouvent et que nous ont partagé plusieurs personnes
consultées est celle de l’impunité et du déni des politiciens. La très vaste majorité des Québécoises
et Québécois se doutent que les politiciens, attachés politiques et collecteurs ont joué un rôle
important dans la culture actuelle des affaires au Québec, mais semblent s’en sortir sans presque
aucun reproche. Plusieurs entrepreneurs et dirigeants de firmes d’ingénierie nous ont dit que
c’étaient principalement les politiciens qui avaient créé et encouragé le ‘’ jeu ‘’ ou la pratique des
prête-noms. Jeu qui existe depuis des décennies, mais qui a connu un regain important dans les
années 2000 tant dans le secteur municipal que provincial. Alors que de plus en plus d’ingénieurs
et d’entrepreneurs avouent y avoir joué, la plupart des politiciens, attachés politiques et collecteurs
font les vierges offensées en mettant le blâme sur les premiers. Or pour rebâtir la confiance, il y a
plusieurs étapes importantes (voir schéma 7) et l’une d’entre elles est celle de l’"admission". Il est
important pour la population d’entendre les politiciens admettre, puis accepter et par la suite il
sera possible de croire en leur volonté de changer les choses et de passer à un leadership
renouvelé.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Schéma 7 : Les étapes pour rebâtir la confiance
RECOMMANDATION 58 – Que les politiciens, attachés politiques et collecteurs admettent qu’ils ont
participé à ces pratiques et qu’ils ont véritablement le désir de changer en agissant dans le futur avec
un niveau beaucoup plus élevé d’intégrité.
Rebâtir la confiance
1. Compréhension de ce qui s’est
produit
2. Transparence et admission
3. Passer du déni à
l’acceptation
4. Volonté affirmée de
changer -Leadership renouvelé5. Apprendre à
pardonner et à se pardonner
6. Aller de l’avant
ensemble -Passer du ‘’ je ‘’
au ‘’ nous ‘’ –
7. Rigueur et discipline
8. Faire honneur aux
attentes, besoins et promesses
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
CONCLUSION
L’utilité sociale des crises
Pendant des années, les médecins londoniens prévenaient le gouvernement du danger que
représentait l’utilisation du charbon. Un smog dense et sans pareil dans l’histoire recouvrit la Ville
en 1952 pendant plusieurs jours (The Great Smog ou Big Smoke : « la grande fumée »), plus de
12,000 Londoniens en seraient morts et ce smog aurait également rendu malades 100 000
personnes. Il a fallu cette crise pour donner un élan important au mouvement moderne en faveur
de l’environnement et amener la population et les gouvernements à repenser les phénomènes de
pollution atmosphérique et à investir dans les sources d’énergie alternatives. Le Québec vit une
crise de confiance importante envers ses dirigeants d’entreprises, ses professionnels, ses syndicats
et ses politiciens. Aussi douloureux et décourageant que peut être la présente crise, et la
Commission nous a donné une partie du portrait de cette crise, il faut qu’elle ait une utilité sociale.
Perestroïka et Glasnost québécoises
Après la guerre froide, le président Gorbatchez de la défunte URSS, lança la libéralisation
économique, culturelle et politique connue sous les noms de Perestroïka et de Glasnost. La
Perestroika signifie « reconstruction » et la Glasnost signifie « transparence ». La Commission
Charbonneau a un réel effet pédagogique, elle nous aide à voir ce qui se cachait dans l’ombre et
nous interpelle à la reconstruction. Seule la transparence nous aidera à sortir de nos ornières et de
la tentation de la cupidité. On comprend davantage par les révélations que c’est dans l’ombre et le
silence que les fourbes réussissent le mieux leurs méfaits. Inversement, c’est par la transparence
que la Commission rend le plus service et prépare le public à accepter, puis à implanter
d’éventuelles réformes pour une meilleure gestion publique et un véritable changement de
culture. Déjà, les choses bougent. Les organismes de réglementation et de surveillance contrôlent
de mieux en mieux les organisations et les individus. Plusieurs dirigeants et professionnels, qui
semblaient s’être égarés au cours des dernières années, croient en ce changement et font preuve
de leadership. Soyons positifs, il y a de plus en plus de gens qui veulent changer les choses. Le
Québec est en train de se réveiller.
Combattre le germe de la cupidité
La Commission est beaucoup plus que l’étalement des méfaits de quelques bandits et personnes
qui se sont laissés tentés par la luxure et la cupidité. Si on arrive à lire entre les lignes, elle nous fait
prendre conscience que ce germe existe en chacun de nous ; un germe que nous devons tous
combattre. Seriez-vous fier de voir votre enfant devenir un Bernard Madoff ou un Vincent Lacroix ?
Permettons-nous d’être imparfaits de temps en temps, mais combattons cette tentation ou ce
germe qui s’installe insidieusement en nous et qui peut nous conduire sur de mauvais chemins.
Comme ces quelques personnages « charbonnesques », qui ont défilé devant nos yeux, voulez-
vous devenir riches, mais honteux à jamais ? Questionnons-nous sur nos valeurs et notre contrat
invisible envers nous-mêmes.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
Une confiance construite sur des structures, mais surtout sur une culture
Nous devons non seulement investir dans des structures, mais miser sur la culture de nos
organisations et de notre société. Il faut viser une confiance construite qui ne se réalisera pas
seulement à coup de lois, de contrôles, de condamnations ou par l’adoption de codes d’éthique la
plupart du temps simulés et de campagnes de relations publiques. Cette confiance construite, qui
sera notre fierté collective, nécessitera de la volonté, un nouveau calibrage de nos valeurs, du
temps et des efforts.
Encourageons les leaders d’aujourd’hui et de demain
Pour les dirigeants en place ayant succombé aux tentations du côté obscur, ceux-ci doivent changer
leur façon de faire des affaires et croire qu’il est possible d’avoir du succès et de s’enrichir par la
compétence et l’intégrité. Trouvons des hommes et des femmes pour nous diriger qui ne
succomberont pas parce qu’ils ont reçu quelques cadeaux, qui éviteront de recourir à
l’aveuglement volontaire pour être élus ou qui s’abstiendront d’accepter un travail très lucratif à
leur sortie de politique au sein d’une organisation ayant frayé avec leur parti. Élevons nos enfants
de manière à ne pas seulement leur montrer l’importance du matériel et de la victoire coûte que
coûte, mais l’importance de la collectivité.
Efforts et responsabilité collectifs
Ce changement implique chaque citoyen et non seulement les politiciens, les policiers et les
journalistes. Les travaux de la Commission contribueront à un électrochoc dans la population, car
c’est elle qui au bout du compte détient les clés d’un changement dans les mentalités et qui doit
avoir les exigences les plus élevées au niveau de la transparence, de l’éthique et de la compétence,
des ingrédients indispensables à la confiance et à la santé de la vie démocratique. Le changement
implique chaque citoyen.
Retrouver une fierté québécoise
Malgré ce qui se passe et une certaine honte d’être Québécois à notre époque, nous avons, comme
René Lévesque, confiance dans les Québécois. Malgré ce germe qui est en nous et qu’il faut
combattre, il y a beaucoup plus de possibilités de bon que de mauvais. Il faut avoir confiance dans
le Québécois, trop souvent sous-estimé par de nombreux politiciens et dirigeants. Régis Labeaume,
l’un des récipiendaires des prix de la confiance 2013 de l’Institut, nous faisait part d’une possible
raison expliquant la confiance des Québécois envers lui de la manière suivante :
« J’ai confiance dans l’intelligence des gens. Le monde est intelligent et comprend. J’en fais
des gaffes, mais j’ai confiance que les gens vont comprendre. Je n’ai ni la volonté ni le temps
de me créer un personnage. Ma venue en politique, c’est l’amour de Québec qui l’a
motivée ! J’ai confiance dans les gens, je les respecte, ils me font confiance. »28
28 Rencontre de l’ICO avec monsieur Regis Labeaume le 3 avril 2014.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
C’est d’ailleurs en grande partie grâce aux citoyens que nous avons eu cette Commission. C’est
grâce à eux que des projets de loi plus musclés seront adoptés. Mais surtout, c’est grâce à eux que
nous apprendrons à respecter les autres et à nous respecter nous-mêmes. Nul doute que les
Québécois retrouveront leur fierté. Il y a dans la vie des étapes difficiles, mais elles sont nécessaires
pour faire ressortir le meilleur qui sommeille au fond de nous. La Commission nous a permis de
faire un pas de plus vers un changement de culture.
Oser la confiance
Aussi, il faut oser la confiance, il faut prendre le pari de la confiance. C’est le plus beau pari que
peut prendre notre société. Cette confiance mènera à la fierté, à l’engagement, à l’investissement,
à la mobilisation collective ainsi qu’à une meilleure qualité de vie. Nous aurons besoin de tous les
Québécoises et Québécois qui voudront contribuer à cet important défi de société.
Me Donald C. Riendeau LLB, LLM, MBA
Directeur général et fondateur
Institut de la confiance dans les organisations (ICO)
514.825.9006
donaldriendeau@institutdelaconfiance.org
Émilie Deschênes, MBA, PhD (c)
Consultante en confiance et intégrité
Institut de la confiance dans les organisations (ICO)
514.629.1302
emiliedeschenes@institutdelaconfiance.org
Produit par l’Institut de la confiance dans les organisations
3843, Old Orchard | Montréal (Qué.) H4A 3A9
Pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la
construction. Gouvernement du Québec.
Juillet 2014
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
LISTE DES RECOMMANDATIONS
RECOMMANDATION 1 – Investir dans la confiance pour ne pas devenir une société de méfiance. Il faut prendre le pari de la confiance.
RECOMMANDATION 2 – Chaque organisation devrait, tous les quatre ans, procéder à un état des lieux de sa confiance organisationnelle, lequel serait accompagné d’un parcours de confiance organisationnelle.
RECOMMANDATION 3 – Investir des efforts sur le long terme, bien faire les choses. Faire attention aux solutions miracles. Les sceaux éthiques risquent de devenir des paratonnerres en bois…
RECOMMANDATION 4 - Chaque organisation du secteur de la construction et chaque organisme public devrait procéder à un véritable exercice de la culture de son organisation et en réviser les documents clés (tel que le code d’éthique) afin qu’ils soient personnalisés à l’organisation et cohérents dans le quotidien. Il est fondamental qu’un nombre substantiel d’employés représentant la diversité de l’organisation participe à la démarche d’analyse, d’écriture puis, de façon encore plus importante, de mise en place.
RECOMMANDATION 5 - Chaque organisation devrait procéder à un véritable exercice d’actualisation de ses valeurs. Ces valeurs devraient permettre d’aiguiller les administrateurs, dirigeants et employés dans leur prise de décision. Ces valeurs devraient être insérées dans les documents clés de gouvernance (règlements de régie interne, convention des actionnaires, code de déontologie, etc.)
RECOMMANDATION 6 – L’ICO est d’avis, étant donné les montants peu élevés des contributions aux partis politiques municipaux et provinciaux, que l’on devrait garantir la confidentialité des donateurs de manière à encourager la participation citoyenne et ne pas permettre de faire des liens douteux qui ont impact sur la réputation des individus.
RECOMMANDATION 7 – Les gouvernements devraient faire attention à la tentation d’adopter des lois rapidement sans en mesurer les conséquences. Pour toute future loi visant à encadrer le milieu des affaires et l’attribution de contrats, le gouvernement devrait faire une étude des impacts à court, moyen et long termes. Le gouvernement devrait également demander des avis au Barreau du Québec, ainsi qu’à d’autres organisations pouvant contribuer à la réflexion.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 8 – Ne pas punir indirectement les employés et parties prenantes innocentes au sein des organisations, mais punir sévèrement les individus qui ont commis des fautes. Réviser la Loi 1 sur l’intégrité dans les contrats publics afin que celle-ci intègre le concept de gouvernance édicté par la Cour Suprême du Canada et afin d’éviter de punir des centaines d’employés, fournisseurs et une communauté pour quelques-uns. Une possibilité serait d’accorder une amnistie aux entreprises fautives pour autant qu’elles se déclarent coupables et payent des pénalités conséquentes.
RECOMMANDATION 9 – Que le Québec adopte des principes directeurs semblables au Federal Sentencing Guidelines qui feraient état des éléments clés pour instaurer une véritable culture de l’éthique.
RECOMMANDATION 10 – Que le Québec adopte une loi prévoyant des pénalités importantes représentant un pourcentage significatif du chiffre d’affaires annuel des entreprises et non pas un montant pareil pour tous (par exemple entre 5 et 10 % du chiffre d’affaires pendant deux ou trois ans). Une amende de 1,000,000 $ est énorme pour une PME, mais pratiquement ridicule pour une multinationale. Que cette loi laisse la discrétion au juge de fixer les pénalités en regard du respect des principes éthiques (i.e. Federal Sentencing Guidelines)
RECOMMANDATION 11 – Renforcer les peines des dirigeants reconnus coupables. Que les peines passent de 14 ans à 25 ans pour la corruption et la collusion (véritable intention de tromper et stratagème)29.
RECOMMANDATION 12 – Le fonctionnaire ayant fraudé pourrait ne pas recevoir la partie de l’employeur dans sa prestation de retraite.
RECOMMANDATION 13 – Instaurer un système permettant de féliciter les entreprises honnêtes, mais également qui pourrait tenir compte de certains éléments qualitatifs dans son processus d’adjudication de contrats. Une attribution des contrats publics intégrant un pourcentage de points qualitatifs accordé aux entreprises ayant fait la preuve du temps et mis en place des pratiques éthiques. L’appréciation serait qualitative et subjective, mais certains paramètres pourraient être identifiés pour faciliter l’appréciation. Nous ne suggérons pas que cette appréciation subjective et qualitative dépasse 25 % du système de pondération.
29 Dispositions du Code criminel : La fraude visant un objet de plus de 5 000 $ est passible d’une peine (sentence) maximale de 14 ans de prison (article 380 (1) (a) Code criminel). La fraude de moins de 5 000 $ est passible d’une sentence / peine maximale de 2 ans si la poursuite est effectuée par voie d’acte criminel, ou de 6 mois d’emprisonnement si la poursuite est effectuée par voie sommaire (article 380 (2) (a) et (b) Code criminel). Disposition de la Loi sur la concurrence : paragraphe 45(1) est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 14 ans et d’une amende maximale de 25 millions de dollars ou de l’une de ces peines.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 14 – Que les organismes publics exposés devant la Commission Charbonneau pour leur laxisme ou complaisance ou aveuglement volontaire fassent l’objet d’une surveillance serrée par différents organismes au cours des prochaines années. Le Vérificateur Général du Québec serait un joueur clé avec sa grande indépendance, son expertise et sa réputation d’intégrité pour exercer ce contrôle plus serré.
RECOMMANDATION 15 – Ne pas créer de nouvelles instances de surveillance, mais bonifier les pouvoirs de celles déjà en place. Permettre au Vérificateur général du Québec de procéder à des vérifications des organismes publics qui ne le sont pas encore. Donner plus de pouvoirs au Commissaire au Lobbyisme.
RECOMMANDATION 16 – Instaurer une Commission d’enquête soit permanente, soit tous les dix ans qui porterait sur l’ensemble des secteurs d’activité.
RECOMMANDATION 17 - Il est important que les organismes publics améliorent l’écriture de leurs appels d’offres et que ceux-ci soient le plus précis possible. Il faut rehausser la compétence des estimateurs et procéder à des regroupements d’organismes pour ceux qui ne disposent pas des ressources suffisantes (petites municipalités, organismes publics, etc.).
RECOMMANDATION 18 – Exiger une vérification des compétences des anciens politiciens et attachés politiques à des postes d’importance au sein de sociétés d’État, de ministères ou autres organismes publics.
RECOMMANDATION 19 – Veiller à une application stricte de l’après-mandat des fonctionnaires auprès d’entreprises privées surtout celles avec qui ils ont pu interagir au cours des quelques années ayant précédé la retraite.
RECOMMANDATION 20 – Renforcer l’imputabilité des dirigeants d’organismes publics.
RECOMMANDATION 21 – S’assurer que nos dirigeants et administrateurs d’organismes publics procèdent régulièrement (par exemple aux quatre ans) à un état des lieux (audit) de leur organisation pour chacune des trois marches de l’escalier de l’intégrité (loi, déontologie et éthique). Cette pratique permettrait de responsabiliser les dirigeants et les cadres dans l’application de pratiques efficientes et en développement continu.
RECOMMANDATION 22 – Les organisations devraient se doter d’un parcours d’intégrité et d’un parcours de gouvernance sur plusieurs années (nous suggérons que ces diagnostics soient réalisés au même moment que la planification stratégique afin d’être alignés et incorporés avec celui-ci.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 23 - Chaque organisme public devrait produire annuellement, auprès de son mandant, les résultats de sa démarche d’intégrité et de gouvernance grâce au tableau de bord développé, personnalisé et mis à jour par ses instances de gouvernance et intégré au rapport annuel public.
RECOMMANDATION 24 – Intégrer l’intégrité dans l’évaluation et l’embauche de dirigeants.
RECOMMANDATION 25 – Toutes les grandes organisations devraient compter sur un conseiller à l’intégrité indépendant et un comité d’audit comptant au moins deux administrateurs indépendants auprès desquels les employés et parties prenantes pourraient se confier sans crainte de représailles.
RECOMMANDATION 26 – Les PME devraient compter sur de véritables conseils d’administration et non seulement sur des conseils d’administration sur papier ou sur des comités consultatifs sans véritables pouvoirs et responsabilités. Ces conseils d’administration devraient compter au moins un, sinon deux et pour les plus grandes trois administrateurs indépendants. Mais il est important que la gouvernance d’une PME ne soit pas automatiquement calquée sur la gouvernance des grandes entreprises privées et sociétés d’État, car les réalités ne sont pas les mêmes.
RECOMMANDATION 27 – Le gouvernement pourrait financer un organisme indépendant et sans but lucratif composé de sages et de professionnels crédibles qui pourraient conseiller les petites organisations privées, publiques et à but non lucratif en cas de manquements, de même que conseiller les employés et agir comme conseiller en intégrité, poser les gestes appropriés en cas de manquement et protéger la confidentialité de ceux-ci.
RECOMMANDATION 28 – Les organisations pourraient mettre en place des comités internes d’intégrité qui veilleraient à la mise en place et à l’implantation de bonnes pratiques.
RECOMMANDATION 29 – Les ordres professionnels pourraient encourager et contribuer au développement de professionnels vigilants et pouvant agir en tant que signaleur d’alerte, particulièrement les secrétaires corporatifs et les vérificateurs internes.
RECOMMANDATION 30 – Que chaque citoyen joue un rôle de sentinelle au sein de son organisation et au sein de la société, tout en respectant lui-même les règles.
RECOMMANDATION 31 - Encourager et gratifier les résistants de l’intégrité, les faire graduer et leur laisser leur chance. Résister à la tentation et être fièrement des résistants de l’intégrité, même si l’on trouve injuste que tant d’autres se le permettent, et ce, malgré des conséquences presque inexistantes.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 32 – Apprendre à contrôler notre germe de la cupidité et se responsabiliser individuellement.
RECOMMANDATION 33 – Se préoccuper de l’autre, investir dans la solidarité.
RECOMMANDATION 34 – Apprendre à pardonner pour aller de l’avant ; il faudra ensemble remettre de l’ordre, mais il faut mériter ce pardon, il faut démontrer une véritable volonté de changer et non seulement pour obtenir l’autorisation de contracter de l’AMF, par exemple.
RECOMMANDATION 35 – Les dirigeants et propriétaires d’organisations ayant adopté des pratiques d’affaires douteuses doivent croire à une autre manière de réussir en affaires, se transformer en leaders qui montrent l’exemple et qui montrent qu’il est possible de changer et de s’améliorer. Qu’il est possible de connaître du succès et de faire de l’argent tout en restant honnête.
RECOMMANDATION 36 – Identifier et faire graduer une nouvelle génération de leaders qui peuvent à la fois être compétents, efficaces et intègres. Repérer et prendre des actions appropriées auprès des employés trop ambitieux qui utilisent des coups bas pour monter les échelons et qui malgré leurs compétences et leur intelligence ne considèrent pas suffisamment les autres parties prenantes de l’organisation, agissant en sens contraire des valeurs prônées.
RECOMMANDATION 37 – Que la Commission présente ses félicitations à tous ceux et celles qui ont contribué positivement à ses travaux.
RECOMMANDATION 38 – Que les organisations et associations identifient les leaders intègres et de confiance afin de les gratifier et de les faire connaître.
RECOMMANDATION 39 – Que le gouvernement procède à de vastes campagnes d’éducation et de sensibilisation afin de redonner un sens plus juste et porteur à ces concepts actuellement malmenés. Mettre sur pied une campagne éducative portant sur l’importance des vrais leaders, des leaders de demain.
RECOMMANDATION 40 - Apprendre à nos dirigeants, administrateurs et employés qu’il faut développer une loyauté envers l’organisation plutôt qu’envers l’individu.
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RECOMMANDATION 41 – Enseigner aux administrateurs et dirigeants ce que signifie le devoir légal d’agir dans le meilleur intérêt de l’organisation. Leur permettre de comprendre que l’intérêt d’une organisation est davantage que l’intérêt des actionnaires (ou mandants) ou que leur intérêt personnel, mais également l’intérêt des employés, des créanciers, des clients, des fournisseurs et de la communauté. Que des mesures déontologiques soient prises contre ceux ne respectant pas ce principe qui est également un devoir juridique.
RECOMMANDATION 42 - Que des comités d’éthique composée d’employés représentant la diversité de l’organisation suggèrent à la direction les lignes directrices en regard des cadeaux, activités et repas, afin que celles-ci reflètent la culture au sein de l’organisation et celle des parties prenantes externes.
RECOMMANDATION 43 – Rétablir le dialogue et le contact entre le secteur privé et le secteur public. Ce sont présentement deux solitudes qui ont besoin l’une de l’autre.
RECOMMANDATION 44 – Les firmes d’ingénierie devraient s’interroger à nouveau quant à leur philosophie d’entreprise et redéfinir leur modèle d’affaires afin de présenter un meilleur équilibre entre la recherche du profit et la décision d’être une véritable firme de professionnels. Elles pourraient insérer la notion de la recherche du meilleur intérêt de l’organisation dans leurs conventions d’actionnaires, leurs règlements de régie interne ou elles pourraient repenser le mode de rémunération des actionnaires/associés. Elles pourraient s’assurer de former leurs professionnels sur les éléments clés du professionnalisme ainsi que de les mesurer par rapport à ces critères.
RECOMMANDATION 45 – Les firmes de professionnels qui n’ont pas l’expertise en intégrité et qui ont fermé les yeux devant leurs clients collusionnaires devraient avoir une réflexion sur la pertinence d’accompagner les organisations publiques et privées pour redresser l’intégrité de celles-ci.
RECOMMANDATION 46 – Les ordres professionnels et associations de firmes de professionnels devraient redéfinir ce qu’est un professionnel en 2014 et à quoi l’on s’attend de celui-ci.
RECOMMANDATION 47 – Le gouvernement devrait se questionner sur les structures juridiques des firmes de professionnels, ainsi que sur les différents outils auxquels elles ont recours pour optimiser leurs profits. Le gouvernement, le conseil interprofessionnel et les ordres professionnels ont aujourd’hui la responsabilité de se pencher sur le présent enjeu, car leur mission est de protéger le public. Tous ses outils et pratiques contribuent à créer une philosophie de commerçant plutôt que de professionnel.
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
RECOMMANDATION 48 – Que le gouvernement considère attribuer aux journalistes le statut de professionnels afin que ceux-ci soient tenus à des standards élevés de comportements. Bien qu’en ce moment le professionnel ne soit pas toujours un exemple.
RECOMMANDATION 49 – Un Conseil de presse obligatoire pour tous et des pouvoirs de réprimande et pénalités plus importants.
RECOMMANDATION 50 – Un Conseil de presse qui identifie annuellement le ou les journalistes qui ont agi avec grande intégrité.
RECOMMANDATION 51– Le journaliste n’est pas seul ; son patron aussi a une part de responsabilité. Il est imputable de ce que font ses employés. Les rédacteurs en chef et les éditeurs devraient être imputables de ce que leurs journalistes publient.
RECOMMANDATION 52 -- Une évaluation annuelle de chaque journaliste intégrant l’intégrité dans la profession et le traitement de l’information par ses pairs.
RECOMMANDATION 53– Les organisations qui comptent sur des journalistes devraient également adopter des valeurs et s’assurer que celles-ci sont mises en pratiques par leurs journalistes. Par exemple la valeur de la transparence. La transparence, ce n’est pas de tout dire. C’est plutôt dire la bonne chose au bon moment, à la bonne personne et en accordant le poids relatif à la nouvelle.
RECOMMANDATION 54 – Que les médias accordent davantage de visibilité aux bonnes nouvelles, aux bons leaders.
RECOMMANDATION 55 – Une responsabilisation individuelle à chaque élection, un effort pour faire des choix mieux éclairés.
RECOMMANDATION 56 – Enseigner davantage la politique aux jeunes dès le secondaire afin de préparer une nouvelle génération de leaders et donner le goût à plusieurs de s’engager davantage en politique.
RECOMMANDATION 57 – Réévaluer le système électif des paliers provincial et fédéral en considérant le vote proportionnel.
RECOMMANDATION 58 – Que les politiciens, attachés politiques et collecteurs admettent qu’ils
ont participé à ces pratiques et qu’ils ont véritablement le désir de changer en agissant dans le
futur avec un niveau beaucoup plus élevé d’intégrité.
Enquête d’opinions auprès des québécoises et québécois - Juin 2013
MISSION – L’Institut est un organisme sans but lucratif dont
la mission est de « contribuer au développement et à la
promotion d’un climat de confiance dans les organisations
et dans la société québécoise. Permettre aux organisations
de saisir tout le potentiel que représente une ‘’confiance
construite’’ pour contribuer à l’amélioration de leur
structure, de leur culture et de leurs relations avec leurs
parties prenantes.»
ENQUÊTE D’OPINIONS – L’Institut a réalisé la présente
enquête entre la mi-avril 2013 et le début juin 2013 auprès
de 1,300 québécoises et québécois. Parmi les 1,300
répondants, 860 ont répondu à l’ensemble des questions
portant sur la confiance ainsi qu’aux questions portant sur
leur profil. L’Institut a compilé et analysé les 860 réponses
dites ‘’ complètes ‘’ et ‘’ fiables ‘’ d’un point de vue
statistiques. Le document qui suit présentera les réponses
des 860 répondants. Cependant, pour certaines questions,
nous ajoutons et précisions les réponses pour l’ensemble
des réponses.
Avertissement - Avertissement - L’Institut tient à avertir les lecteurs que les
données ne sont pas suffisamment fiables pour être considérées comme étant
un ‘’ sondage ‘’. D’une part, les réponses ont été récoltées sur une période de
deux mois et la marge d’erreur est de 4,5% , 19 fois sur 20 (la marge d’erreur
maximale signifie qu’on est sûr à 95 % (le fameux 19 fois sur 20) que les
résultats se situent à plus ou moins 4,5 % des valeurs présentée). Par
conséquent, l’enquête d’opinions réalisée par l’Institut n’est pas aussi précise
que celle qu’aurait pu réaliser une firme de sondage spécialisée. Cependant,
l’Institut est d’avis que les réponses présentées sont une excellente indication
des tendances actuelles au Québec en matière de confiance.
Mise en contexte
2
La confiance dans la société• 83% des québécois sont d’avis que le climat deconfiance au Québec s’est détérioré au cours des dixdernières années et seuls 5% considèrent qu’il s’estamélioré (12% neutres).
• 64% des québécois sont d’avis que le climat deconfiance au Québec est moins fort que dans lereste du Canada et seuls 7,5% qu’il est plus fort(28,5% neutres).
• Seulement 42% des répondants sont d’opinion quepour arriver au sommet, il est plus facile d'yparvenir en étant honnête alors que 34% en étantcorrompu (24% sont neutres).
• La confiance est généralement faible envers legouvernement (52,2%), les syndicats (48,4%), lesdirigeants (52,8%) et les médias (55%).
• La confiance est généralement moyenne envers lesystème de santé et des services sociaux (67%), lesystème l’éducation (67%) et le système judiciaire(69,2%).
• Seulement 27% sont d’opinion que les politiciensgèrent en se souciant davantage du bien-êtrecollectif que de leur intérêt personnel alors que 55%croient l’inverse (22% sont neutres).
• 5,3% des québécois font toujours confiance, 62,5%font confiance plus souvent que l’inverse, 29,5% fontconfiance si l’autre personne fait ses preuves et 2,5%ne font jamais ou rarement confiance.3
La confiance et les parties prenantes
• 96% des québécois sont d'avis que la confiance estun outil puissant pour solidifier les relationsd'affaires avec les clients et les fournisseurs.
• 95% des répondants sont d’opinion qu'il estimportant ou très important que les dirigeants sepréoccupent de hausser leur relation de confianceavec leurs clients, fournisseurs et autres partiesprenantes.
• Seulement 18% des québécois sont d'avis que lesentreprises prennent leurs décisions d’affaires entenant compte de leurs influences sur lacommunauté et sur l’environnement alors que 57%sont d’opinion contraire (25% sont neutres).
• 27% sont d’avis que les entreprises respectent leursclients et adoptent des publicités honnêtes alorsque 43% croient l’inverse (31% sont neutres).
• 43% sont d'avis que les organisations ont sudévelopper une véritable relation de confiance avecleurs clients alors que 17,5% sont d’opinion inverse(39,5% sont neutres).
• 47% sont d'avis que les organisations ont sudévelopper une véritable relation de confiance avecleurs fournisseurs et leurs partenaires alors que13,5% croient l’inverse (39% sont neutres).
• 26% sont d’avis que les pratiques d'affaires desorganisations sont éthiques alors que 32,% croientl’inverse (42% sont neutres).
4
La confiance et le milieu de travail
• 97% des répondants sont d’avis qu'il est importantou très important que les dirigeants desorganisations se préoccupent d’améliorer le climatde confiance qui existe au sein de leur personnel
• 89% des québécois sont d’avis que la confiance ausein du personnel permet de sortir plus facilementdes crises et de mieux relever les défis desorganisations.
• 75% des québécois considèrent que la confianceentre employés et dirigeants est importante outrès importante puisqu’elle favorise une cultured’engagement et de haute performance.
• Les québécois ont une confiance très élevée enversleurs collègues (71% considèrent qu’elle estélevée/très élevée, 4% qu’elle est faible/très faibleet 25,5% moyenne), une confiance assez bonneenvers les cadres intermédiaires (51% élevée/trèsélevée, 3% faible/très faible et 36% moyenne), uneconfiance moyenne envers les ressourceshumaines (40,3% élevée/très élevée, 13%faible/très faible et 36% moyenne), dirigeants(39,5% élevée/très élevée, 21% faible/très faible et39% moyenne) et administrateurs (39,5%élevée/très élevée, 21,5% faible/très faible et 39%moyenne).
5
La confiance et le milieu de travail (suite)• Seulement 26% des répondants sont d’avis que
les dirigeants des grandes entreprises privéessont généralement éthiques et intègres alorsque 43,5% croient l’inverse (30% sont neutres).
• 39% des répondants sont d’avis que lesdirigeants des sociétés d'État et desorganismes publics sont généralement éthiqueset intègres alors que 29% croient l’inverse(31,5% sont neutres).
• 88,1% sont d'avis que leurs collègues de travailsont fiables et qu’ils peuvent compter sur euxalors que 4% croient l’inverse (8% neutres).
• 78% sont d’opinions que leur supérieurimmédiat est fiable et qu’ils peuvent comptersur lui alors que 10,5% croient l’inverse (11,5%neutres).
• 45% sont d'avis que les valeurs affichées par lesorganisations sont véritablement respectéesalors que 28% sont d’opinion inverse (27% sontneutres).
• Vous êtes d’avis à 33,5% que les dirigeants desorganisations tiennent leurs promesses alorsque 32,5% êtes d’avis contraire (39% neutres).
6
Catégories # %
1 Intégrité, honnêteté et éthique 264 26,14%
2 Sécurité et assurance 131 12,97%
3 Fiabilité et parole 123 12,18%
4 Authenticité et transparence 79 7,82%
5 Respect 72 7,13%
6 Relations et empathie 53 5,25%
7 Compétence et crédibilité 50 4,95%
8 Foi et croyance 27 2,67%
8 Vulnérabilité et permission 27 2,67%
10 Responsabilité et imputabilité 25 2,48%
11 Équité et justice 24 2,38%
12 Collaboration et travail d'équipe 23 2,28%
13 Attentes et besoins 20 1,98%
13 Engagement et courage 20 1,98%
13 Loyauté et fidélité 20 1,98%
16 Valeurs et morale 17 1,68%
17 Confidentialité et privilège 11 1,09%
18 Connotation négative 9 0,89%
19 Notion anglaise de '' trust'' 5 0,50%
20 Autres 10 0,99%
La confiance c’est bien plus que l’éthique…
• Nous avons posé la question à savoir ‘’ Quel est le premier mot qui vous vient à l'esprit lorsque vouspensez au mot « Confiance » ? ‘’ Vous avez été 1100 répondants à répondre à cette question.
• Plus de 165 réponses différentes ont été données. Les réponses les plus populaires ont été dansl’ordre : 1) l’honnêteté (137), 2) l’intégrité (106), 3) le respect (72), 4) la fiabilité (72), 5) la sécurité(64), 6) la transparence (41) et 7) la crédibilité (31).
• Nous avons regroupé les 165 catégories de réponses identifiés dans les 20 regroupements ci-dessus.7
« Un changement de prisme, la confiance
pour orienter les activités, actions et
décisions de l’organisation. »
Me Donald Riendeau,
Directeur général et fondateur
514.825.9006
donaldriendeau@institutdelaconfiance.org
Sherly Aclan,
Assistante et analyste
514.885.4483
sherlyaclan@institutdelaconfiance.org
APPENDICE 2 : ENQUETES D’OPINION ENVERS LES SCEAUX ETHIQUES
PROFIL DES PARTICIPANTS À L’ENQUÊTE
L’Institut a demandé à une trentaine de personnes œuvrant dans le milieu de la gouvernance et de
l’éthique de répondre au présent questionnaire. Plusieurs sont reconnus comme étant d’éminents
experts dans ces domaines (consultants, administrateurs de sociétés, secrétaires généraux, etc.).
1. Quel est votre sexe ?
# Réponse
Réponse %
1 Homme
17 55%
2 Femme
14 45%
Total 31 100%
2. Quel est votre âge ?
# Réponse
Réponse %
1 Moins de 18 ans
0 0%
2 18 à 25
0 0%
3 26 à 35
4 13%
4 36 à 45
9 29%
5 46 à 55
8 26%
6 56 à 65
6 19%
7 Plus de 65 ans
4 13%
Total 31 100%
3. Laquelle des positions suivantes illustre la mieux votre statut professionnel ?
Réponse
Réponse %
Administrateur
3 7%
Directeur général
1 3%
Cadre supérieur et dirigeant
10 34%
Gestionnaire / cadre intermédiaire
4 14%
Personnel de bureau
0 0%
Personnel d'opération et production
0 0%
Personnel de service
1 3%
Professionnel / consultant
10 31%
Sans emploi
0 0%
Retraité
2 7%
Total 31 100%
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
4. Veuillez indiquer le type d'organisation dans laquelle vous travaillez
Réponse
Réponse %
Société d'état ou organisme public
13 52%
Grande entreprise privée
4 10%
Organisme sans bu lucratif
2 6%
Firme de consultation ou consultant
7 19%
Petite entreprise privée
1 0%
Coopérative
0 0%
Ordre professionnel
2 3%
Autre
2 10%
Total 31 100%
RÉPONSES AUX QUESTIONS 1. Selon-vous, il est possible d’accorder un sceau à une entreprise quant au respect des lois par :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en désaccord Moyenne
... ses administrateurs
et dirigeants 9 1 4 17 2.94
… ses professionnels 6 3 6 16 3.03
... ses employés 6 3 4 17 3.07
2. Selon-vous, il est possible d’accorder un sceau à une entreprise quant au respect des règles
déontologiques par :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en
désaccord
Moyenne
... ses administrateurs et
dirigeants 6 5 4 16 2.97
… ses professionnels 6 7 6 13 2.81
... ses employés 5 6 4 16 3.00
3. Selon-vous, il est possible d’accorder un sceau à une entreprise quant à une conduite éthique de :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en
désaccord
Moyenne
... ses administrateurs et
dirigeants 4 6 5 16 3.06
… ses professionnels 3 7 6 16 3.09
... ses employés 3 7 5 16 3.10
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
4. Selon vous, il est légitime d’accorder un sceau dit ‘’ éthique ‘’ à une entreprise si celle-ci a mis en
place des documents et pratiques couvrant les principaux enjeux déontologiques et légaux. Réponse
Réponse %
Totalement en accord
1 3%
Partiellement en accord
7 22%
Partiellement en désaccord
7 22%
Totalement en désaccord
17 53%
Total 32 100%
5. De manière générale, les ordres professionnels disposent des compétences pour évaluer le
respect des lois par une entreprise auprès de :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en désaccord Moyenne
... ses administrateurs et
dirigeants 3 5 9 12 3.03
… ses professionnels 5 10 7 9 2.65
... ses employés 2 7 7 13 3.07
6. De manière générale, les ordres professionnels disposent des compétences pour évaluer le
respect règles déontologiques par une entreprise auprès de :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en désaccord Moyenne
... ses administrateurs et
dirigeants 4 6 6 13 2.97
… ses professionnels 9 13 3 6 2.19
... ses employés 3 8 5 13 2.97
7. De manière générale, les ordres professionnels disposent des compétences pour évaluer la
conduite éthique d’une entreprise auprès de :
Question Totalement
en accord
Partiellement
en accord
Partiellement
en désaccord
Totalement
en désaccord Moyenne
... ses administrateurs et
dirigeants 1 3 7 16 3.41
… ses professionnels 2 7 8 13 3.07
... ses employés 1 3 9 15 3.36
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
8. De manière générale, les ordres professionnels ont eux-mêmes mis en place des pratiques
déontologiques appropriées. Réponse
Réponse %
Totalement en accord
9 28%
Partiellement en accord
11 34%
Partiellement en
désaccord
7 22%
Totalement en
désaccord
5 16%
Total 32 100%
9. Les ordres professionnels qui désirent accorder un « sceau éthique » risquent de confondre la
population quant aux enjeux « légaux », « déontologiques » et « éthiques ».
Réponse
Réponse %
Totalement en accord
23 72%
Partiellement en accord
6 19%
Partiellement en désaccord
0 0%
Totalement en désaccord
3 9%
Total 32 100%
10. Seriez-vous prêt à attester de votre signature qu’une organisation est ‘’ éthique ‘’ et engager
votre réputation, voire votre responsabilité juridique ?
Réponse
Réponse %
Oui
1 3%
Non
30 97%
Total 31 100%
11. Craignez-vous de voir des entreprises s’empresser de rechercher des sceaux éthiques pour redorer leur image et gagner des contrats sans véritablement vouloir changer leur culture organisationnelle ?
Réponse
Réponse %
Oui
31 100%
Non
0 0%
Total 31 100%
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Mémoire pour la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction | JUILLET 2014
12. Craignez-vous que des dirigeants d’organismes publics se déresponsabilisent dans l’octroi de
contrats à des entreprises parce que celles-ci auront obtenu un ‘’ sceau éthique ‘’. Réponse
Réponse %
Oui
27 90%
Non
3 10%
Total 30 100%
13. Le public pourra avoir confiance dans l’entreprise qui aura obtenu un sceau éthique de la part
d’un ordre professionnel. Réponse
Réponse %
Totalement en accord
1 3%
Partiellement en
accord
5 16%
Partiellement en
désaccord
10 32%
Totalement en
désaccord
15 48%
Total 31 100%
14. Il est légitime de rendre ISO un domaine comme l’éthique.
Réponse
Réponse %
Totalement en
accord
2 7%
Partiellement en
accord
2 7%
Partiellement en
désaccord
5 17%
Totalement en
désaccord
20 69%
Total 29 100%
15. En conclusion, un sceau éthique est une bonne idée. Réponse
Réponse %
Totalement en accord
1 3%
Partiellement en accord
8 26%
Partiellement en désaccord
3 10%
Totalement en désaccord
19 61%
Total 31 100%
1. QUI SOMMES-NOUS
MISSION – L’Institut est un organisme sans but lucratif dont la mission est de « contribuer au
développement et à la promotion d’un climat de confiance dans les organisations et dans
la société québécoise. Lancer et solidifier un mouvement qui permettra au Québec de 2025
de se distinguer en tant que société de confiance. Cette confiance mènera à la fierté, à
l’engagement, à l’investissement, à la mobilisation collective ainsi qu’à une meilleure qualité
de vie »
VISION – « Devenir la référence en matière de réflexions, d’outils, de formation,
d’évaluation, de parcours de confiance et d’information sur le thème de la confiance dans les
organisations. »
VALEURS – L’Institut réalise sa mission et vise à atteindre ses objectifs en adoptant des
comportements alignés avec les cinq valeurs suivantes :
Respect : traiter ses collaborateurs avec considération, professionnalisme et empathie.
Excellence : offrir un accompagnement de qualité, pertinent, rigoureux, d’avant-garde et accessible.
Courage : être un modèle d’engagement continu pour défendre les principes à la base de la
confiance
Intégrité : agir de manière fiable, impartiale, honnête et éthique
Transparence : privilégier l’ouverture, la communication et la collaboration avec toutes les parties
prenantes
2
NOTRE GOUVERNANCE
LA CONFIANCE DANS L’ORGANISATION EST L’ART
D’AUGMENTER L’ENVIE DE CHACUN DE S’ENGAGER.
3
NOS PARTENAIRES
4
Me Donald Riendeau,
Directeur général
Spécialiste dans les domaines de l’éthique et de la gouvernance, Me Riendeau a
fondé l’Institut en 2012. Depuis près de dix ans, il accompagne présidents, directeurs
généraux et conseils d’administration dans l’élaboration et la mise en place de
stratégies de gouvernance et de cadres de gestion en matière d’éthique. Me
Riendeau a occupé le poste de conseiller à l’éthique auprès de plusieurs
organisations privées et publiques, dont la Commission de la Construction du Québec.
Plus de 8 000 participants ont assisté aux formations dispensées par Me Riendeau
(Barreau du Québec, l’IGOPP, l’Ordre des ingénieurs, la COMAQ, la FQM,
l’AQESSS, etc.). Me Riendeau a réalisé plus d’une soixantaine de diagnostics de
gouvernance tant auprès d’organisations privées, publiques, sans but lucratif et
coopératives.
Avant de se spécialiser dans les domaines de l’éthique, de la gouvernance et de la
confiance, Me Riendeau a agi en tant qu’avocat en droit corporatif au sein du cabinet
Leduc puis en tant que stratège, assistant la direction de grandes organisations
canadiennes (Telus, BCE et Quebecor). Me Riendeau a également suivi une maîtrise
en droit international (Université de Lausanne) et une maîtrise en affaires (HEC).
Pourquoi la confiance ?
Ma grand-mère maternelle, Claire Létourneau Cosgrove, m’avait attribué le sobriquet de « Petit Robin des Villes ». Elle avait perçu que
mon objectif n’était pas de me transformer en voleur des riches pour le compte des pauvres, mais plutôt de devenir une personne
sensible aux dérives de notre société et surtout de toujours essayer de l’améliorer. J’ai réalisé que l’éthique et la gouvernance étaient
des outils à quelque chose d’encore plus puissant, un objectif tant personnel qu’organisationnel, celui de la confiance. La confiance est
beaucoup plus qu’un mot : elle fait partie de notre vie au jour le jour et est au cœur de nos relations humaines. Étrangement, très peu
de gens et d’organisations se sont donnés comme objectif d’investir en celle-ci. Pourtant, des sommes faramineusesextraordinaires
sont englouties afin de plaire, de se faire aimer et de se vendre. La société québécoise est prête pour la confiance, chacun d’entre nous
le souhaite, moi le premier. La confiance est le ciment invisible qui rapproche les individus et permet à chacun d’évoluer…
5
Cadre et professionnel bilingue avec une solide expérience de plus de 35 ans en négociation,
gestion, développement d’affaires et de plans de mise en marché au niveau local et international
pour des réseaux de partenaires à valeur ajoutée, j’ai également acquis une vaste expérience au
sein d’importantes entreprises de fabrication de haute technologie (directeur des finances,
directeur des ventes et directeur des partenariats).
J’ai cumulé plus de trente-cinq années d’expérience en tant qu’administrateur bénévole bilingue au
sein du Mouvement Desjardins. Facilitateur, coordonnateur, mobilisateur et ambassadeur, mon
leadership m’a toujours permis de présider un conseil d’administration pour une gouvernance
performante et moderne, et ce, afin de réaliser la mission de la Caisse, tout en assurant sa
pérennité et son sain développement au bénéfice de l’ensemble de ses membres.
Présentement président du conseil d’administration du CSSS de l’Ouest de l’Île offrant des
services de santé à une population de plus de 220,000 habitants avec un hôpital, deux CLSC et un
Centre de soins de Longue Durée pour personnes en perte d’autonomie. Le CSSS compte plus
de 2300 employés et 300 médecins.
Richard Legault,
président
Pourquoi la confiance ?
Depuis plusieurs années, nous avons perdu confiance dans nos institutions en général et la méfiance s’est installée partout,
notamment à l’égard de nos élus, patrons et administrateurs. Nous avons toujours l’impression de nous faire « avoir » que ce soit
pour le prix de l’essence, les taxes, les impôts, nos voisins qui abusent du système, et ainsi de suite. Lorsque Me Riendeau m’aapproché pour fonder l’Institut de la Confiance, j’ai accepté immédiatement, car je crois que cette organisation nous donnera les
outils pour rebâtir la confiance dans notre société. La rebâtir ensemble.
6
Denis Coulombe,
Vice-président du
conseil d’administration
Détenteur d’une licence en droit de l’Université Laval (1969), Me Denis Coulombe, membre du
Barreau du Québec depuis 1970 a poursuivi des études en droit administratif et constitutionnel
à la London School of Economics and Political Science (1970-1973). Il est également détenteur
d’un diplôme de conseiller en développement organisationnel (1995).
Me Coulombe a ouvré une bonne partie de sa carrière au sein du ministère de la Justice du
Québec. Il a assumé différentes fonctions gouvernementales de haut niveau telles que
secrétaire et de du Groupe de travail sur l’éthique et l’intégrité des administrateurs publics
(1995), de secrétaire de la Commission Poitras (1998-2000), de secrétaire de la Commission
Moisan (2000-2001) et de secrétaire général au bureau du Commissaire au lobbyisme du
Québec (2001-2011).
Il a été membre du conseil d’administration de la Société québécoise d’information juridique(SOQUIJ) et de son comité exécutif et membre du conseil d’administration d’Éducaloi.
Pourquoi la confiance ?
C’est donc fort de son expérience de plus de 35 années comme juriste et gestionnaire au sein de l’administration gouvernementale
et de son intime conviction quant à la nécessité pour les citoyens d’avoir confiance dans leurs institutions qu’il a accepté de
contribuer dès le tout début à la création de l’Institut de la confiance dans les organisations et de relever le défi que présente la
réalisation de sa mission. Car il en va tant de l’épanouissement des citoyens du Québec que de la santé de leur économie.
7
Spécialiste de la confiance organisationnelle, Émilie Deschênes a publié son mémoire de MBA
portant sur les relations de confiance dans les organisations et elle travaille présentement sur
son Ph. D. en administration des organisations et en gestion du personnel. Gardant toujours
un pied sur le terrain, elle a agi comme formatrice et gestionnaire dans différents types
d’organisation (commissions scolaires, centres hospitaliers, banques), et ce, à travers le
monde, puisqu’elle a travaillé en Europe, en Asie, aux États-Unis et en Amérique du Sud.
Son expérience en développement organisationnel consiste entre autres à l’étude des
organisations afin d’en comprendre les divers mécanismes et de déceler les manques à
combler, expériences à travers lesquelles elle constate une association entre la confiance
entre les différents membres de l’organisation et l’efficacité et la performance de celle-ci.
Ses intérêts sont de rendre les organisations plus performantes en insistant sur les relations
entre les employés et en travaillant à partir des forces de celles-ci. Passionnée, elle croit en la
capacité de tous de participer efficacement à la croissance de l’organisation dans un
environnement de travail sain, où la confiance règne.
Pourquoi la confiance?
La confiance est la base sur laquelle tout se construit. C’est grâce à la confiance que nous bâtissons les relations personnelles et
professionnelles avec les gens qui nous entourent. Elle est présente partout, à tous les niveaux de l’organisation. Elle mène à
l’engagement, à l’investissement, à la mobilisation collective et ainsi, éventuellement, à une meilleure qualité de vie au travail.
C’est aussi grâce à la confiance mutuelle qu’il est possible de créer un environnement de travail sain où les gens travaillent
ensemble, en équipe, vers la réalisation conjointe des objectifs organisationnels, à travers des valeurs communes.
Émilie Deschênes,
administratrice
8
Jean-Claude
Deschênes
Administrateur
Actuellement, Jean-Claude Deschênes agit en tant que Président du CA du CHUM à Montréal. Il
est également conseiller en gouvernance pour divers Conseils d’administration. À ce titre, il est
intervenu dans des activités de formation, d’évaluation et de conseil auprès de plus d’une
cinquantaine d’organisations. Dans le passé, il a siégé au CA de la Régie de l’Assurance- Maladie
du Québec ( 1970-1978 ), au CA de la Régie des Rentes du Québec (2001-2008 ) et plusieurs
années au CA des Agences Régionales de santé et de services sociaux de Montréal et de
Québec ainsi que de divers autres organismes. De 2003 à 2007, il a présidé le Conseil
d’administration du Centre Hospitalier Universitaire de Québec, lequel s’est vu reconnaître en
2007 le titre de « pratiques exemplaires » du Conseil canadien d’Agrément des Établissements
de Santé.
Après des études universitaires en sciences économiques et politiques puis en administration, la
carrière de Jean-Claude Deschenes s’est déroulée en trois grandes phases. Durant les vingt
premières années, il a œuvré à divers postes de direction dans quelques hôpitaux de Montréal,
dont l’Hôpital Saint-Luc où il fut directeur général durant plusieurs années. Sa carrière s’est
ensuite poursuivie au Gouvernement du Québec où il a assumé des postes de sous-ministre en
titre durant 14 années.
Pourquoi la confiance ?
J’ai souvent observé au cours de ma carrière d’administrateur que le succès d’une organisation est le corollaire de la confiance que
s’accordent les personnes au sein de cette organisation. J’ai aussi noté que ce climat de confiance reposait, au-delà des rôles et des
personnalités fort différenciés, sur l’authenticité, l’intégrité, l’ouverture et la fiabilité. Mais la confiance ne tombe pas du ciel. Elle se
bâtit, elle se mérite et elle s’entretient. Par l’authenticité, la qualité de l’écoute et le partage. Elle est comme l’huile dans un moteur.
Enlevez l’huile d’un moteur, aussi puissant soit-il, et vous verrez alors que rien ne bougera et que le moteur lui-même brûlera. Cette
image illustre la place essentielle de la confiance pour toute organisation, y compris notre société.
9
Après ses études classiques au Collège Grasset et l’obtention d’un baccalauréat ès arts, il a
obtenu une licence en droit (LL.L.) en 1964. Ses études furent couronnées de succès obtenant la
mention Grande Distinction et la Médaille du Gouverneur-Général du Canada. Reçu au Barreau
du Québec en 1965 et diplômé d’études supérieures en droit privé (D.E.S. de l’Université de
Montréal) en 1966.
Il a pratiqué le droit dans le cabinet d’avocats Ogilvy Renault (aujourd’hui Norton Rose) depuis
1965 jusqu ’ à sa retraite en décembre 2005. Durant sa carrière d’avocat, il a pratiqué
principalement en droit immobilier (acquisition, vente et location d’immeubles commerciaux) et en
droit des affaires. Il était également reconnu pour sa compétence en droit municipal et notamment
dans le domaine des évaluations municipales d’immeubles commerciaux et industriels.
Sur le plan du bénévolat, mentionnons sa participation à titre de président d’une société ayant
pour but de venir en aide aux enfants souffrant de problèmes de croissance (la « Société Je Veux
Grandir »), ainsi que sa participation à titre d’administrateur de deux sociétés vouées à la
protection de l’environnement (« ARLEQ » et « CRPF »). Enfin, en 2009, il accepta la charge de
conseiller municipal au sein de la municipalité de Saint-Hyppolite afin d’offrir à la société ses
services en raison de ses connaissances dans le domaine juridique ainsi qu’en matière
d’urbanisme.
Donald A. Riendeau Sr,
Administrateur
Pourquoi la confiance?
Je me suis rendu compte que la confiance était à la base même de notre structure sociale. C’est cet « élément » qui tisse les liens
entre les humains dans tous les domaines, qui les réunissent et leur permettent d’accomplir ce qu’ils ne pourraient réaliser seuls.
10
Détentrice d’une maîtrise en administration publique de l’École Nationale d’Administration
publique et d’un baccalauréat ès arts, Susan McKercher a acquis une solide expérience en
gestion municipale depuis près de 25 ans. Elle est à l’emploi de l’arrondissement de Ville-Marie
à la Ville de Montréal depuis 2002. Elle a été directrice générale de la ville de Saint-Constant
pendant un an. Depuis le début de 2013, elle agit à titre d’adjointe au directeur principal au
Secrétariat de liaison de l’agglomération de Montréal.
Elle est très impliquée dans la Corporation des officiers municipaux agréés du Québec où elle a
siégé au conseil d’administration de 1999 à 2005. Elle a été présidente de la Corporation de
2003 à 2005. Elle a obtenu le titre d’« officier municipal agréé » en 1995 qui démontre la
qualification dans l’exercice des fonctions attitrées. La Corporation l’a désigné Mérite COMAQ
2007, prix décerné chaque année à un membre s’étant distingué au sein de la Corporation et
tout au long de sa carrière municipale.
Elle a siégé et siège toujours sur plusieurs conseils d’administration : fondation du Centre
d’hébergement Denis-Benjamin Viger (présidente), CSSS de l’Ouest-de-l’Île (présidente du
comité de vigilance et de la qualité), École Nationale d’Administration publique (présidente du
comité de gouvernance et d’éthique), Centre des services partagés du Québec (CSPQ) et
Caisse Desjardins Ste-Geneviève de Pierrefonds.
Susan
McKercher
Pourquoi la CONFIANCE ?
La confiance, tant la confiance en soi que la confiance dans les organisations, est un élément essentiel et primordial qui doit être à la
base de toutes relations tant personnelles que professionnelles. La confiance est un état d’être, un état d’esprit qui est le fondement
même de nos actions et interactions, et le fruit d’une suite d’expériences positives. La confiance est basée sur l’engagement que ce
que l’on a dit c’est ce qui sera effectivement fait dans un climat propice à la négociation et laissant un sentiment d’équité. La
confiance présuppose l’absence de méfiance. Les valeurs importantes pour évoluer dans un climat de confiance, tant personnel,
professionnel que social, sont l’intégrité et le respect.
11
Quelques éléments qui nous distinguent…
LA CONFIANCE :
MOBILISER LES ÉNERGIES ET LES METTRE EN RÉSONNANCE
• Une indépendance financière et administrateurs avec une grande indépendance
d’esprit;
• Un organisme à but non lucratif qui vise des standards élevés grâce à un capital
d’expertises et d’expériences élevées de notre équipe;
• Un laboratoire de confiance organisationnelle;
• Une Charte de confiance et d’engagement des organisations accompagnées;
• Un profond désir de solidifier la confiance au Québec;
• Une position claire à savoir que l’Institut ne délivre pas de « sceau » de confiance
organisationnelle, considérant que cette pratique est dangereuse et pourrait induire la
population dans l’erreur. Cependant, l’Institut délivre des certificats de formation et des
agréments démontrant l’instauration d’une démarche de confiance organisationnelle.
12
2. QU’EST-CE QUE LA CONFIANCE ?
Administrateurs
Notre prisme d’intervention est la confiance organisationnelle. La confiance organisationnelle est essentiellement un
sentiment d’assurance et de sécurité partagé par une majorité des personnes qui forment l’organisation et qui
assurent la poursuite de sa finalité. Elle vise à mettre en résonnance les multiples intérêts au sein d’une organisation
et entre l’organisation et ses parties prenantes de façon à développer une communion d’intérêts transcendant les
intérêts individuels et de groupes.
L’étude de la confiance organisationnelle permet d’identifier la carte identitaire des organisations, le contrat invisible
ou tacite qui unit les gens. À l’instar d’une personne physique, chaque organisation a sa vie propre qui sera parsemée
d’événements heureux et d’autres, moins heureux, tels des conflits, crises, grèves, fusions, etc. La confiance n’est
pas statique, elle est dynamique et évolutive. Une démarche de confiance organisationnelle permet de retracer et de
mettre en place les éléments clés qui mobiliseront l’organisation et ses parties prenantes, soient les valeurs, les
paroles, les comportements et les attitudes. La confiance organisationnelle mène à l’engagement, à l’investissement,
à la mobilisation collective, à une meilleure qualité de vie au travail et ultimement, à la poursuite de la finalité de
l’organisation avec une efficacité accrue.
Les organisations ont la capacité de développer et de solidifier les fils de la confiance. Cependant, pour y parvenir
elles doivent croire en une telle démarche, miser non seulement sur les structures, mais sur un changement de leur
culture et avoir le courage d’identifier les freins, les craintes, les inhibitions et la rugosité dans les relations humaines.
Grâce à un rôle actif des porteurs de confiance, il est alors possible de mettre en place des parcours et actions qui
permettront de hausser cette confiance, de renforcer les différents cercles de confiance, de mettre les gens en
résonnance.
« IL FAUT OSER LA CONFIANCE, IL FAUT PRENDRE LE PARI DE LA CONFIANCE. C’EST LE
PLUS BEAU PARI QUE PEUT PRENDRE UNE ORGANISATION. LA CONFIANCE
CONSTRUITE EST UN REMARQUABLE MOTEUR DE PERFORMANCE POUR
L’ORGANISATION. » 2013 – Me Donald Riendeau Jr, Directeur général de l’ICO 13
LA VIE EN SOCIÉTÉ REPOSE SUR LA NÉCESSITÉ DE LA CONFIANCE, SANS QUOI NOTRE EXISTENCE
DEVIENDRAIT INSUPPORTABLE. FAIRE CONFIANCE, C’EST SOUVENT DEVOIR S’ABANDONNER À « ALLER
AU-DELÀ DES FAITS » PUISQU’IL EST IMPOSSIBLE, LA PLUPART DU TEMPS, DE VÉRIFIER
PERSONNELLEMENT LE BIEN-FONDÉ DE CETTE CONFIANCE.
Niklas Luhmann, sociologue
CERCLES DE CONFIANCE
Externe
Interne
14
Quelques-uns des principaux ingrédients permettant
de solidifier la confiance organisationnelle INTERNE
1Intégrité, éthique et
valeurs
3Compétence, qualité et résultats
2Gouvernance, responsabilité et imputabilité
4Fiabilité, parole et rigueur
12Climat de travail et
milieu de vie
8Avenir et pérennité
5Sécurité,
permission et protection
7Respect,
équité et non-jugement
6Transparence, cohérence et
commu-nications
9Fierté et
appartenance
11Dépassement
collectif et collaboration
Confiance
Expérience
Actions
Paroles
Instinct
10Valorisationet accom-plissement
Écrits
Contact
15
Quelques-uns des principaux ingrédients permettant
de solidifier la confiance organisationnelle EXTERNE
1Intégrité
et éthique
3Réputation
2Compétence,
qualité et résultats
4Preuve du temps et
expérience commune
12Climat de travail et plaisir de collaborer
8Impartialité et équité
5Fiabilité de la parole et respect des
délais
7Gouvernance, responsabilité et imputabilité
6Confidentialité,
prudence et sécurité
9Respect et profession-
nalisme
11Accessibilité
Confiance
EXTERNE
Expérience
Actions
Paroles
Instinct
10Transparence
et commu-nications
Écrits
Contact
16
3. NOS ACCOMPAGNEMENTS
NOTRE APPROCHE Comme la « stratégie », la « confiance » n’existe que par la mise en commun des autres disciplines et
expertises. La confiance ne doit pas être « complémentaire », aux autres disciplines elle doit devenir
prioritaire en soi.
Programme complet - Dans le meilleur des mondes, une organisation consacrera le même effort à mettre
en place un programme de confiance qu’à la mise en place d’un plan stratégique, tant au moment de sa
conception que dans son implantation en mode continue. C’est ce que nous aspirons à mettre en place dans
les organisations.
Petits pas - Certaines organisations préféreront une approche par petits pas. Chaque action mise en place
en confiance devra avoir un impact et apporter une valeur ajoutée, c’est-à-dire davantage de confiance, sans
dépendre nécessairement des autres actions ou d’un programme complet pour se réaliser. Ultimement, au
cours des années, l’ajout des actions en confiance aboutira à la création d’un programme complet.
17
1. Prises de position / recommandations à partir des travaux des groupes de réflexion émanant du
Cercle de Confiance;
2. Ralisation d’état des lieux des enjeux de confiance grâce à des évaluations (sondages et
diagnostics globaux, par direction, par clientèle, etc.) ainsi que proposer des parcours pour
solidifier les niveaux / cercles de confiance;
3. Intégration de la « confiance organisationnelle » au parcours stratégique de l’organisation
(planification stratégique et plans d’action)
4. Avis et recommandations en regard d’une gouvernance de confiance et des pratiques d’intégrité
correspondants aux attentes des parties prenantes;
5. Hausse, reconstruction ou solidification de la confiance par des formations / ateliers
(administrateurs, dirigeants, gestionnaires, employés, etc.);
6. Recherche, information et publications;
7. Interventions spontanées et spécialisées à titre d’accompagnateur / expert;
8. Développement de nombreux outils et sondages grand public (plus large bibliothèque de
documents portant sur la confiance, quotient de confiance, engagements personnels de citoyens,
services de référence pour les citoyens), etc.
UN CHANGEMENT DE PRISME, LA CONFIANCE POUR ORIENTER
LES ACTIVITÉS, ACTIONS ET DÉCISIONS DE L’ORGANISATION.18
NOS AXES D’INTERVENTIONS
Diagnostic et parcours
Formations et sensibilisation
Boîte à outils
Avis, conseils et réflexions
19
4. CERCLE DE CONFIANCE DU QUÉBEC
Mandat : Le Cercle de la confiance du Québec
se veut un véritable forum de discussion et de
réflexion sur les enjeux de confiance visant à
guider l’ICO dans sa stratégie de développement,
mais surtout afin d’aider les organisations et la
société québécoise à mettre de l’avant de
bonnes pratiques contribuant à la confiance. Le
Cercle de la confiance du Québec participe
aussi au renforcement des réseaux de l’Institut
et à la reconnaissance de ses activités au
Québec, au Canada et à l’étranger
Composition : Le Cercle de la confiance du
Québec est constitué d’une quarantaine de
personnes influentes, reconnues et d’expérience
qui ont des compétences manifestes sur le plan
des savoirs, savoirs-être et savoirs-faire.
20
2Confiance et
le profes-sionnel
3Confiance
entre employés et dirigeants
1Confiance et
les élus
4Confiance et l’investis-sement
8Confiance et
la relève
5Confiance et le bénévolat
7Confiance et les syndicats
6Confiance et les médias
CERCLE
DE
CONFIANCE
10Confiance et
la santé
9Confiance
entre autochtones
et non autochtones
L’HEURE EST AU CYNISME ET À LA MÉFIANCE? QU’À CELA NE TIENNE ! ÇA NE CHANGE RIEN
SUR LE FOND : « LA CONFIANCE EST UN INVESTISSEMENT. RISQUÉ, MAIS NÉCESSAIRE. »Benoit Robert, fondateur de Communauto et membre du Cercle de confiance du Québec
Me Donald Riendeau,
Directeur général et fondateur
514 825-9006
donaldriendeau@institutdelaconfiance.org
LE MOT DE 9 LETTRES LE PLUS ESSENTIEL…
« CONFIANCE »
Richard Legault
Président
438-870-2449
richardlegault@institutdelaconfiance.org
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