La douleur chez le sujet incapable dexpression verbale Dr GRANATO Philippe Géronto-psychiatre...

Post on 04-Apr-2015

119 views 0 download

Transcript of La douleur chez le sujet incapable dexpression verbale Dr GRANATO Philippe Géronto-psychiatre...

La douleur chez le sujet incapable d’expression verbaleDr GRANATO Philippe

Géronto-psychiatre

Centre Hospitalier de Valenciennes

Caractéristiques de la douleur Ne se voit pas,

Ne s’enregistre pas, Ne se mesure pas, Ne s’échange pas,

Variable en fonction : De la culture, De la religion, De l’éducation, De l’instruction, De l’individu.

Le ressenti de la douleur est intrinsèque à notre psyché.Entreprise malaisée de parler d’une représentation psychique de la douleur

ou de l’amour…. Et qu’il est facile de simuler et difficile à objectiver.

Caractéristiques de la douleur

La douleur somatique est indissociable de la douleur psychique :

Douleur somatique synd. Dépressif, Douleur psychique maladies psychosomatiques

Difficile de parler d’une représentation mentale d’un concept que pourtant nous connaissons mais de façon aussi personnelle que les traits de notre visage.

La non communication verbale Concerne :

les jeunes enfants, les malades psychiatriques et les sujets âgés.

En 2007 ils sont de véritables oubliés de la douleur.

LA DOULEUR

L’International Association for the study of Pain (ISAP) définit la douleur comme un :

« vécu désagréable, à la fois sensoriel et émotionnel, associé à un dommage tissulaire présent ou potentiel ou simplement décrit en termes d’un tel dommage ».

Piège de la douleur chronique

Si la douleur aiguë signal d’alarme un diagnostic étiologique traitement curatif.

Si douleur chronique fatalisme souffrances inutiles perte d’autonomie syndromes de glissement, voire de demande d’euthanasie.

L’utilité de la douleur

Eviter les situations dangereuses, réflexes de protection aux stimulus délétères, soulager la partie de notre corps sujette à une

agression, ou une posture prolongée devient fatigante pour le

corps, et même pendant le sommeil, la nociception est à

l'origine des retournements dans le lit qui évitent les douleurs liées aux postures prolongées.

Misère d'une vie sans douleur

le cas d’une canadienne née avec une indifférence aux stimulus douloureux, sans autre déficit sensoriel.

apprentissage précoce à éviter toute situation susceptible de la blesser,

elle développa : une dégénérescence progressive des articulations de ses

membres et au niveau de ses vertèbres qui conduisit rapidement à une déformation importante de son

squelette et à un processus infectieux qui se termina par sa mort, à l'âge de 23 ans.

1994 : considération de la douleur

La circulaire du 19 janvier 1994 incite les praticiens à s'organiser en unités de soins spécifiques pour mieux lutter contre la douleur.

Le statut de la douleur a évolué : celle-ci est

désormais considérée comme un état autonome.

LA DOULEUR : Toujours la clinique d’autrefois… Expérience subjective purement individuelle.

Symptôme le plus souvent rencontré en médecine. Elle ne se mesure pas. Elle ne peut être visualisée par un examen

paramédical. Pas de zone corticale spécifique de  l’intégration de

cette sensorialité particulière. Seule la séméiologie clinique, par l’observation et le

dialogue peut tenter de l’appréhender. Très peu de mots peuvent décrire une douleur. Le médecin doit souvent les suggérer au patient.

Douleur et vieillissement Fait commun chez les sujets âgés . Plus l’âge augmente plus la prévalence de

la douleur augmente : de 30 à 80 % selon les études et les situations.

Douleurs chroniques sont d’environ 60 %, dont un tiers a des douleurs sévères.

En fin de vie, la prévalence de la douleur peut atteindre 80 %.

Il n’existe pas d’étude épidémiologique spécifique à la personne âgée ayant des troubles de la communication verbale.

Douleur et vieillissement

05

101520253035404550

% de la population douleureuse

18-30ans

31-40ans

41-50ans

51-60ans

61-70ans

71-80ans

plus de81 ans

tranches d'âgesCrook et al. The prevalence of pain complaints in a

general population

Evolution des douleurs avec l'avancée en âge

La douleur : indice de danger D’abord, signal de danger pour l’individu,

Ensuite, signal de danger pour les autres,

Et enfin, signal de demande d’aide pour les autres.

La douleur = signal

Un émetteur : le malade,

Un récepteur : le soignant,

Le bon code,

Le bon canal.

Un émetteur : le malade

dépend du code culturel, du contexte social, et du  cadre  religieux auquel il appartient.

Il s’agit donc de données apprises dont l’expression dépend pour beaucoup du statut cognitif du patient, du statut physique du patient.

Un récepteur : le soignant

 Pour Schwartzmann (1994) le décodage de la douleur est une donnée apprise.

La façon dont  l’observateur peut percevoir et intégrer la souffrance du patient fait référence à :

sa propre histoire, son expérience professionnelle, la durée de la prise en charge soignante du patient.

Les canaux de communications L’incapacité totale d’expression verbale est une

situation exceptionnelle (Vincent Himbert et d’autres)

Le discours n’est qu’un des différents outils de communication.

La communication verbale se juxtapose à une dimension infra-verbale qui passe par :

les cris, les pleurs, les gémissement, etc.

méta-verbale qui passe par : la gestuelle, les émotions faciales exprimées, etc.

Non prise en charge ou prise en charge insuffisante de la douleur

pour le malade : risques accrus de

complications de décubitus et

perte d’autonomie.

Non prise en charge ou prise en charge insuffisante de la douleur pour les soignants :

sentiment d’impuissance, culpabilité, usure, épuisement professionnel.

Non prise en charge ou prise en charge insuffisante de la douleur pour l’entourage :

épuisement, découragement, isolement, retrait social, rejet, surprotection.

L’unité de mesure de la douleur

Echelle Verbale Simple (douleur, absente,faible,modérée, intense, extrêmement

intense.) émetteur uniquement. Echelle Visuelle Analogique : 0 à 10 = émetteur

uniquement. Bien pour évaluer l’évolution d’une douleur. Absence d’échelles objectives et métriques :

Autoévaluation (sujet communiquant) Hétéro évaluation (sujet non communiquant)

Absence d’outils validés sur le plan international Les limites de l’auto évaluation obligent à l’hétéro

évaluation comportementale de la douleur

gériatres français d’outils d’hétéro évaluation DOLOPLUS-2, ECPA .

Toutes deux issues des travaux du Dr Gauvain-

Piquard chez le jeune enfant (échelle douleur enfant Gustave-Roussy).

Absence d’outils validés sur le plan international Les limites de l’auto-évaluation obligent à l’hétéro-

évaluation comportementale de la douleur

gériatres français d’outils d’hétéro-évaluation DOLOPLUS-2, ECPA .

Toutes deux issues des travaux du Dr Gauvain-

Piquard chez le jeune enfant (échelle douleur enfant Gustave-Roussy).

Evaluation de la douleur par l’observation Plusieurs subjectivités objectivité,

Observation = les yeux et non les oreilles = changement de canal.

Hétéro évaluation (sujet non communiquant)

Doloplus-2. ECPA : Echelle comportementale d’évaluation de la douleur chez la

personne âgée non communicante.

Aucune recommandation officielle.

Plaintes somatiques, Positions

antalgiques, Protection de zones, Mimique, regard vide, Sommeil,

DOLOPLUS-2

RETENTISSEMENT SOMATIQUE

RETENTISSEMENT PSYCHOMOTEUR

Toilette et /ou habillage,Mouvements.

RETENTISSEMENT PSYCHOSOCIAL Communication, Vie sociale, Troubles du comportement.

ECPA : Echelle comportementale d’évaluation de la douleur chez la personne âgée non communicante.

Expression du visage : regard et mimique. Position spontanée au repos. Mouvements (ou mobilité) du patient. Relation à autrui. Anticipation anxieuse aux soins. Réactions pendant la mobilisation. Plaintes exprimées pendant le soin.

Pour le Dr Gauvain-Piquard  (1994)

la douleur provoque 3 types de comportements sans aucune verbalisation :

-1) les signes émotionnels, -2) les réponses défensives du corps, -3) disparition des mouvements d’affects.

Pour le Dr Gauvain-Piquard  (1994)

-1)  les signes émotionnels : les cris, les émotions faciales, l’agitation, les gémissements, ….

Pour le Dr Gauvain-Piquard  (1994)

-2) les réponses défensives du corps : les positions antalgiques au repos, la protection des zones douloureuses, les plaintes lors de l’examen clinique, la bradykinésie lors des soins de la toilette, la bradykinésie lors de l’habillage et la bradykinésie lors des transferts.

Pour le Dr Gauvain-Piquard  (1994)

-3) disparition des mouvements d’affects : désintérêt, anhédonie.

Toujours lui… 68 ans plus tôt…

En 1926 Freud décrit la douleur en termes :

« d’intérieur » et

« d’extérieur »

« d’investissements narcissiques » et

« d’investissements objectaux ».

5 stades.

1 : Aucune Douleur

Il existe un équilibre entre les investissements narcissiques et les investissements objectaux.

2 : douleur de faible intensité

Il existe une zone d’hyperactivité psychique avec une concentration narcissique sur cette zone.

3 : douleur d’intensité moyenne

L’aggravation de la douleur conduit à une exacerbation  de l’activité psychique avec

Hyper investissement narcissique et

désinvestissement objectal.

4 : douleur d’intensité majeure

Elle s’exprime par une atonie motrice.

La disparition des investissements objectaux, La disparition des investissements narcissiques. L’appareil psychique est sidéré par la douleur. Ce qui évoque une atonie psychique.

L’absence de mécanisme de défenses psychiques précipite la constitution de ce tableau.

5 : La douleur indicible

L’intensité de la douleur est égale à la torture physique avec une sensation de désorganisation psychique qui ne laissera pas l’appareil psychique indemne.

- Tortures politiques,

- Camps de concentration,

- …

Il en découle que

tout changement de comportement, spontané ou pendant un soin,

chez une personne âgée avec troubles de

communication évoque la possibilité d’un

état douloureux et le faire rechercher.

Il en découle que

C’est le regard de l’aide-soignante, de l’infirmière, du kinésithérapeute, du médecin, des autres soignants, de la famille, de l’entourage

que la subjectivité pourra disparaître auprofit d’un consensus objectivant la réalité douloureuse.

Il en découle que

L’évaluation pluridisciplinaire, la réévaluation fréquente et l’établissement d’une cinétique des scores

sur la feuille de soins ou le cahier de liaison autres paramètres de surveillance meilleurs gages de la mise en route rapide

d’un traitement antalgique adapté.

Par conséquent

L’intensité et le type d’une douleur se base sur

l’observation et l’interprétation subjective.

deS observateurS.

MAIS …

Inadéquations

Gauvain-Piquard enfant Appareil psychique en devenir avec grande plasticité.

Freud adulte sain Appareil psychique efficient et compétent.

Or Sujet âgé Appareil Psychique en régression voir fortement altéré les comparaisons sont fausses.

L’appareil psychique

L’appareil psychique

vieillissement de l’appareil psychique.

L’altération des processus attentionnels de concentration, de raisonnement, de motivation, une réduction des performances, de la confiance en soi et de l’estime de soi, cognitifs, sensori-moteurs, émotionnels, et motivationnels

Conduisent vers une inhibition psychomotrice majeure

Et une désagrégation de la conscience de soi.

Peu d’études abordent les réaménagements du fonctionnement psychique dans le cadre du sujet âgé non communicant et communicant.

Vieillissement : modification de l’organisation psychique sur versant d’émoussement de l’ensemble des instance et des compétences.

Enchevêtrement des douleurs…

- pertes d’autonomie, - des troubles de l’humeur : dépression- douleur morale - des troubles de la communication,

la douleurphysique

Les douleurs du sujet âgé

Les douleurs somatiques- excès de nociception :

* destruction : arthrose, polyarthrite rhumatoïde* compression : tassement vertébral, * inflammation des tissus : escarre, artérite, etc.)

- Douleurs neurogènes* amputations, cicatrices, neuropathie diabétique ou

éthylique, zona, cytomégalovirus, post-radique, chimiothérapie, etc.)

Les douleurs psychiques* dépression,* syndrome anxieux,* etc

LE PLUS SOUVENT = Douleurs mixtes = sujet âgéAssociations médicamenteuses adaptées,évaluer systématiquement les aspects organiques et psychologiques,Pas attendre d’avoir éliminé toutes les causes organiques.

PREVENTION ET DOULEUR Si la douleur peut se traiter, elle doit être

prévenue.

Douleurs induites par les soins : injections, pansements, nursing et manipulations

Traitement pharmacologique

Moyens pharmacologiques La prescription de bolus antalgiques et d’inter-doses par

des médicaments à demi-vie courte permet de prévenir ces douleurs induites,

planification rigoureuse : les posologies, la classification pharmacologique et l’heure du soin ou de la manipulation par rapport à l’heure

effective d’administration des bolus doivent être précisées. L’application topique d’anesthésiques locaux (gel de

xylocaïne, crème Emla* prévenir les douleurs induites

Traitement non pharmacologique Les techniques de nursing :

prévention et traitement de la douleur (toilette, habillage, installation, transferts). importance de la communication non verbale :

ton et rythme de la voix, positionnement corporel du soignant par rapport au malade, regards, toucher, odeurs) et de la préparation au nursing (à expliquer au malade).

D’autres « petits moyens » pouvant réduire les douleurs induites:

noter sur un schéma les zones douloureuses du patient afin d’éviter les manipulations intempestives ; ce schéma doit être affiché dans la chambre à la vue de tous ;

ne pas tirer sur les épaules d’un patient pour l’asseoir ; utiliser la technique du drap pour le mobiliser, faire des soins de bouche adaptés

Conclusions

Doloplus2 et ECPA sont les moins mauvais outils pour tenter d’évaluer la douleur dans un appareil psychique en cours d’altération.

Encore à ce jour ignorance totale de la douleur, de l’appareil psychique, de la conscience de soi.

Je vous remercie pour votre attention