Éditorial

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Annales Medico-Psychologiques 172 (2014) 487–488

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Editorial

Editorial

La « Medico » a un nouveau president. Je succede a EvelynePewzner-Apeloig. J’en suis tres honore. Et j’ai plaisir a me faire leporte-parole de tous pour la remercier de tout ce travail accompli,notamment pour la cooperation franco-italienne en psychiatrie.

J’ai ete elu membre correspondant national de la SocieteMedico-Psychologique il y a 37 ans et je remercie l’ensemble del’assemblee generale de la Societe de m’avoir elu a la presidencel’an passe. Je dois dire que j’y ai vu ce jour-la une nouvelle preuveque la SMP etait bien ancree dans son temps puisque je n’ai pas eteoublie lorsque je suis parti aux Antilles, comme le craignait YvesPelicier.

Neanmoins, chaque fois que j’entre dans une seance de laMedico, j’eprouve le sentiment d’entrer dans un temple. Dans uneliturgie intemporelle. Cette regularite des offices depuis 162 ansme rassure et m’installe dans une atmosphere de « poetique durituel » de la psychiatrie. Et si je pense ici a Jean-Francois Allilaire,ce n’est pas au pretre du temple mais plutot a la poutre maıtressedu temple, au poto mitan comme nous disons a la Martinique, queje le comparerais, et je veux le remercier pour sa solidite. Merciaussi a Jacqueline Parant et a son experience qui accompagne cetteeternite de la SMP.

A Christine Mirabel-Sarron, secretaire generale quand je suisentre au Bureau, je voudrais dire mon admiration pour sa grandecompetence et aussi pour son sens de l’organisation au sein denotre Societe.

Je voudrais egalement remercier pour leur travail opiniatrel’ensemble du Conseil d’Administration et notre secretaire general,le tres dynamique Marc Masson.

A notre vice-president le Pr Jean-Marie Vanelle, je souhaite labienvenue. Il apporte deja son savoir et son sens de la convivialitepour conserver a notre societe ce qui lui a permis de se perpetuerdepuis sa creation. Et je remercie enfin tous ceux qui sont venuspresenter leurs communications. Elles nous enrichissent.

Nous sommes aujourd’hui le 24 fevrier 2014.Le 24 fevrier 1848, c’est une date que nous connaissons dans les

outre-mer. Louis-Philippe ne parvient pas a reprendre en main lasituation, le Palais-Bourbon est envahi par les revolutionnaires quifont proclamer un gouvernement provisoire. La DeuxiemeRepublique francaise est nee ce 24 fevrier. Dans les colonies,l’espoir renaıt chez les esclaves. La Convention avait abolil’esclavage en 1794 pour calmer leurs revoltes. Bonaparte avait

http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2014.08.002

0003-4487/� 2014 Publie par Elsevier Masson SAS.

annule l’abolition en 1802. De cette date, plusieurs insurrectionsavaient secoue les colonies. C’est pourquoi, des le 27 avril 1848,Victor Schoelcher publie les decrets d’abolition.

Ainsi donc, pendant que les turbulences de la Revolutionacceleraient la procedure administrative d’abolition de l’esclavage,elles ralentissaient notablement la creation de la Societe Medico-Psychologique.

En effet, voici ce qu’ecrit Jean-Christophe Coffin dans La Revue

d’Histoire du XIXe siecle : « La creation, au milieu du XIX

e siecle, de laSociete Medico-Psychologique, societe savante de medecinsalienistes, met en exergue le jeu complexe des liens entre medecine

et politique [. . .]. La mise en place de la Societe, retardee par les

evenements de fevrier, connaıtra jusqu’en 1852 des errements liesaux avatars politiques et a des clivages propres au milieumedical. »

Ce jeu complexe des liens entre psychiatrie et politique a prisdes formes diverses depuis la naissance de la psychiatrie mais il n’ajamais cesse. D’ailleurs, le numero 1 des Annales Medico-

Psychologiques, paru en fevrier 2014, lui est consacre. La dimensionpolitique est donc immanente a la psychiatrie et aujourd’hui, elleinterroge deja cette derniere a propos des consequences psychi-ques de la traite et de l’esclavage, car des voix se sont elevees pourdemander la mise en place d’un college d’experts afin d’evaluer lestraumatismes subis.

Les experts, justement, sur quels criteres sont-ils nommes ?Quels enjeux politiques et ideologiques sous-tendent l’expertise ?Voila deux questions auxquelles repond l’un des deux memoires(Palaric et Moulin) de ce numero. Non loin, le deuxieme memoire(Bouyer-Richard et al.) souligne la necessite de prendre en compteles psycho-traumatismes chez les victimes d’infractions penales etde les evaluer rigoureusement. De meme, mais cette fois chez lessujets en grande precarite (Schiltz et al.), le lien de celle-ci avec deselements traumatiques de l’enfance fait l’objet d’une etudequantitative et qualitative integree. Un autre article (Auxemery)porte sur la clinique – elle est singuliere – du psycho-traumatismechez les personnes agees. Ainsi la plupart des articles de ce numeromettent en exergue l’interet d’une pratique formalisee del’evaluation en psychiatrie legale et en psycho-traumatologie.On percoit bien l’importance d’une standardisation du bilanclinique face aux tribunaux et aussi pour une meilleure efficacitede la therapeutique. . .

Editorial / Annales Medico-Psychologiques 172 (2014) 487–488488

Les autres articles dans ce champ se revelent, eux aussi,particulierement interessants : le brillant expose de notre presidentesortante sur la psychiatrie en France sous l’occupation (E. Pewzner-Apeloig), la question de la liberte du malade au regard des recenteslois (Hazif-Thomas et al.) et l’article de M. Schweitzer et N. Puig-Verges, « Soins obliges, injonction de soins et expertises judiciaires.Enjeux ideologiques ou enjeux politiques pour la psychiatrie ».Ailleurs, deux textes (Balzani, Grenouilloux) montrent, s’il en etaitbesoin, l’imperieuse necessite de l’approche phenomenologique,tandis que l’addiction aux combats de coqs (Malpica) merite ledetour. Enfin nous ne savons que trop combien « le vecu des effets

indesirables d’un traitement antipsychotique » (Vaxelaire et al.)limite l’observance du patient, a moins qu’il ne s’agisse d’uneinefficacite medicamenteuse liee au profil de son cytochrome P450 (Estingoy et al.). Pour finir, le DPC sur l’autisme (Murad et al.)rafraıchit avec bonheur notre memoire declarative.

Pr Aime Charles-NicolasCHU de Fort-de-France, BP 632, 97261 Fort-de-France,

Martinique

Adresse e-mail : acn972@gmail.com (A. Charles-Nicolas)