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Dynamiques et rles
conomique et social du
secteur informel des TIC en
Afrique de lOuest et du Centre :
Cas du Burkina Faso, du Cameroun et du Sngal
Rapport final de recherche
Septembre 2010
Dynamiques et rles conomique et social du secteur informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre : Cas du Burkina Faso, du Cameroun et du Sngal
Yam Pukri et les nouvelles technologies pour le dveloppement
Yam Pukri est une association pionnire dans le domaine des nouvelles technologies pour le dveloppement au Burkina Faso. Elle entreprend depuis 1997 des travaux dans le domaine de la formation, de linformation, de lappui-conseil dans le domaine des TIC pour le dveloppement.
Elle est membre de plusieurs rseaux de recherches sur le thme de TIC pour le dveloppement. Elle participe de ce fait de nombreux travaux de recherches de niveau universitaire, dont la prsente. Yam Pukri a dj particip par exemple ltude sur la fracture numrique de genre avec ENDA Dakar, ltude sur le fonds de service universel avec lARCE, Burkina Faso, louvrage Les tlcoms, entre Biens publics et marchandises, la revue N022 de lannuaire Suisse de dveloppement, la revue N 4 les cahiers de NETSUD /CEAN/Bordeaux et bien dautres ouvrages.
http://www.yam-pukri.org
yamnet@fasonet.bf yam-pukri@yam-pukri.org
Bureau : (+ 226 50 37 39 74) Portable : (+ 226 70 25 04 49)
Fax : (+226 50 37 93 06) 09 BP 1170, Ouagadougou 09, Burkina Faso
Quartier Kalgondin, ditions, yam-pukri.
http://www.yam-pukri.org/
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 3
Ce document est ddi :
Feu SOULAMA Souleymane,
Agrg en Sciences conomiques, Matre de confrences lUniversit Ouaga II, Burkina Faso.
Parti dans la fleur de lge, il sut faire de ses cours et de son enseignement une ppinire dconomistes africains.
Au nombre des gnrations de professeurs et de chercheurs dont il fut lartisan figurent sept Burkinabs comptant parmi les contributeurs de ce livre et dont le travail rend hommage sa mmoire.
Repose en Paix, mais que ton uvre soit perptuelle et continue par nous qui tu as trasmis ton flambeau.
4 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Remerciements
Au CRDI, Aux acteurs du secteur informel des TIC au Burkina Faso, Cameroun Sngal. Aux Institutions nationales des pays de ltude et aux institutions internationales Aux organisations associatives, prives et publiques des pays de ltude Aux personnes dont les noms suivent, prsentes latelier rgional : DAME Abdoulaye,Sidwaya, Burkina Faso DIONGUE Abdou K, Universit Gaston Berger de St Louis Sngal DRAME Mamadou, Universit Gaston Berger de St Louis /Sngal HIEN Y. Christophe, Burkina-ntic, Burkina Faso ILBOUDO Wendemi, Yam Pukri, Burkina Faso KABORE Pousga E.J.C, CCI / Burkina Faso KONTE Almamy, Ministre de lEnseignement suprieur/R, Sngal LACOMBE Bernard, IRD, France MAIGA Youssouf, ARCE /Burkina Faso MANDE Esther, Burkina Faso MBIATSO Yimgnia Thodore,Universit Yaound I /Cameroun NDJOMO Sbastien, INS /Cameroun NEBIE D. Hyacinthe, ESTA /Burkina Faso OUATTARA B. Safiatou, CCI / Burkina Faso OUEDRAOGO Mamadou, APROTIC /Burkina Faso SANOU Soumanan, ARCE /Burkina Faso SAWADOGO Alfred MPTIC, Burkina Faso SAWADOGO Franceline, Yam Pukri, Burkina Faso SOME Sankar Placide, INSD/ Burkina Faso TOURE Ndeye Mbana, Sngal TOWA Koh Michel, ACSIS /Cameroun TRAORE Sarata, Burkina Faso ZIO Amlie, Yam Pukri, Burkina Faso
AVANT PROPOS
Lconomie des pays en dveloppement, africains notamment,
est caractrise par la coexistence dun secteur formel et dun
autre dit informel. Ce secteur occupe, selon les pays et les zones
urbaine ou rurale, 70 80 % de la population active. Au cours
des dernires annes, son expansion a t favorise par les crises
conomiques cycliques et lapplication de politiques
dajustement structurel.
Aujourdhui, aucun domaine de la vie conomique et sociale de
ces pays nchappe lemprise du secteur informel. Il en est
ainsi avec lessor notable des technologies de linformation et de
la communication (TIC) dans les pays de la rgion la faveur de
la libralisation des tlcommunications, de lavnement
dInternet, et, plus rcemment, de lexpansion de la tlphonie
mobile jusque dans les zones les plus recules de beaucoup de
pays de la rgion. Ce nouvel environnement technologique cre
des opportunits conomiques qui contribuent la richesse
nationale ainsi qu la cration demplois et dactivits
cratrices de revenus au profit de diverses catgories sociales.
Du vendeur de cartes de recharge au dveloppeur de logiciels en
passant par le rparateur de tlphones mobiles, et le tenancier
de tlcentres, le secteur informel des TIC revt des dimensions
conomiques, sociales et politiques quil est intressant
dobserver afin de mieux aider faonner ce nouveau terreau
qui est porteur despoir si on coute les discours politiques et les
messages des confrences internationales sur la thmatique des
TIC pour le dveloppement. Le dveloppement rapide des
technologies et lespoir suscit par le sous-secteur nous
interpellent donc faire un tel travail.
La recherche propose sinscrit donc dans une logique de
valorisation du potentiel du secteur informel des TIC par la mise
6 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
en place de cadres rglementaires et la prise de dcisions
politiques favorisant, le cas chant, le passage des activits et
formes dentrepreneuriat relevant du formel. Le Burkina, le
Cameroun et le Sngal sont les lieux dobservation.
La recherche a commenc en 2007 et sest termine en 2010
avec les restitutions nationales dans les pays concerns par
ltude, latelier de validation finale et le dbut de la valorisation
des rsultats de la recherche par des activits appropries.
Nous tenons remercier tous les chercheurs, les enquteurs et
les personnes ressources qui ont contribu ce travail en
particulier le CRDI et toute son quipe base Dakar qui
nont mnag aucun effort pour que ce travail puisse tre
men bien.
Les ides, opinions et penses dveloppes dans le prsent
document de recherche engagent les auteurs et non le CRDI.
Sylvestre Oudraogo
Coordonnateur Rgional de ltude.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 7
Sommaire
AVANT PROPOS .............................................................................. 5 SOMMAIRE ....................................................................................... 7 LISTE DES TABLEAUX................................................................... 8 ACRONYMES .................................................................................... 9 EQUIPE DE RECHERCHE ........................................................... 10 RSUM .......................................................................................... 12 INTRODUCTION GNRALE .................................................... 18 1. APERU DE LA SITUATION TIC DANS LES 3 PAYS .. 20 1.1 Etat de la diffusion des TIC dans les trois pays ................................ 20 1.2 Les oprateurs de tlphonie et de lInternet dans les trois pays. ... 23
2. MTHODE DE RECHERCHE ............................................. 35 2.1 Secteur informel des TIC : un potentiel de dveloppement ? .......... 35 2.2 Objectifs et hypothses de recherche ............................................. 41 2.3 Cadre thorique et mthodologie de recherche .............................. 46 2.4 Mthodes dinvestigation ............................................................... 50
3. CARACTRISTIQUES SOCIO DMOGRAPHIQUES DES PROMOTEURS DU SECTEUR INFORMEL DES TIC DANS LES TROIS TUDIS. .................................................................. 58 3.1 Caractristiques des acteurs ........................................................... 60 3.2 Les caractristiques des activits du sous-secteur informel des TIC 64
4. RLE SOCIO-CONOMIQUE DU SECTEUR INFORMEL DES TIC ........................................................................................... 77 4.1 Dynamique du secteur informel ...................................................... 77 4.2 Potentiel socio-conomique............................................................ 91
CONCLUSION .............................................................................. 101 RECOMMANDATIONS .............................................................. 105 RFRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..................................... 107 TABLE DES MATIRES ............................................................ 111 ANNEXES ...................................................................................... 114
8 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Liste des tableaux
Tableau 1. tableau comparatif de quelques indicateurs tic .......... 21 Tableau 2. essai de catgorisation des activits du secteur informel des tic 58 Tableau 3. rpartition entre le niveau dinstruction et lactivit principale 63 Tableau 4. rpartition des activits du secteur informel des tic .... 64 Tableau 5. rpartition des activits du secteur informel des tic dans le secteur des tlcommunications .................................................. 65 Tableau 6. rpartition des activits du secteur informel des tic dans le secteur de laudiovisuel............................................................. 69 Tableau 7. caractristique du secteur de linformatique ............. 70 Tableau 8. le march de la concurrence dans le secteur des tic .... 83 Tableau 9. accs au crdit ................................................. 86 Tableau 10. origine des crdits sitic ...................................... 87 Tableau 11. la productivit du sitic dans les pays tudis ............. 98
Liste des figures
Figure n 1. diffusion des tic en afrique ............................. 21
Figure n 2. rpartition de la ville en segments ................... 51
Figure n 3. rpartition compare des produits et services du burkina faso et du cameroun .................................................. 96
Figure n 4. lments de charges : cas du burkina faso........... 97
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 9
Acronymes ADSL
ANTIC
ARCE
ART
ARTEL
ARTP
BOAD
CDMA
CRDI
CSC
CSI
DSL
F CFA
FCR
FFMO
GPRS
GSM
IUT
MIC
MPTIC
MTN
MTTIC
OMD
RnI
RsI
RSI RTC
SENTEL
SITIC
SONATEL
SONATEL
SUDATEL
TELMOB
TIC
UEMOA
USB
Asymmetric Digital Subscriber Line
Agence Nationale des Technologies de lInformation et de la
Communication
Autorit de rgulation des communications lectronique
Agence de Rgulation des Tlcommunications
Autorit de Rgulation des Tlcommunications
Agence de Rgulation des Tlcommunications et des Postes,
Banque Ouest Africaine de dveloppement
Code division multiple access en franais Accs multiple
par rpartition en code (AMRC),
Centre de Recherches sur le Dveloppement International
Conseil Suprieur de la Communication
Conseil Suprieur de lInformation
Digital Subscriber Line
Franc de la Communaut Financire Africaine
France Cble Radio
Forces-Faiblesses Menaces Opportunits
General Packet Radio Service
Global System for Mobile communications
International Communication Union
Millicom International Cellular
Ministre des Postes et des Technologies de linformation et
de la communication
South Africa-based multinational telecommunications
company,
Ministre des Tlcommunications, des Nouvelles
Technologies de lInformation et de la Communication
Objectifs du Millnaire pour le Dveloppement
Le Rel Normal d'Imposition
Le Rel Simplifi d'imposition Le Rgime du Secteur Informel
Rseau tlphonique commut
Sngal tlcommunications (TIGO)
Sous-secteur Informel des TIC
Socit Nationale de Tlcommunications
Socit nationale des Tlcommunications (orange)
Sudan Telecommunications
Tlcommunications Mobiles du Burkina
Technologies de linformation et de la communication
Union conomique et montaire ouest-africaine ().
Universal Serial Bus
http://fr.wikipedia.org/wiki/Asymmetric_Digital_Subscriber_Line
10 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Equipe de recherche
Mr Bayala Serge, PhD ; Enseignant Chercheur en gestion lUniversit Ouaga II. Mr Camara Alioune, CRDI, Dakar Mme Chaupin Marie-Pierre Raky, Consultante en genre. Mr Diongue Abdou K, Statisticien Gaston Berger de Saint-Louis, BP 234, Saint-Louis, Sngal (http://www.ugb.sn) Institut des Sciences de l'Ingnieur, Mr Diouf Pape, Enseignant-Chercheur lInstitut de Hautes Etudes Internationales et du Dveloppement, HEID, Genve, SUISSE, pape.diouf@graduateinstitute.ch Mr Kabor Mose, Enseignant Chercheur lUFR de Sciences conomiques de lUniversit de Koudougou. Mr Kabor Samuel, Matre Assistant lUnit de formation et de Recherches en Sciences conomiques et de Gestion de lUniversit Ouaga II. stkabore@yahoo.fr Mme Loquay Annie Cheneau, Directrice de Recherche au CNRS, Bordeaux. Mr Ndiaye Seydina M., Enseignant chercheur en Informatique, Universit Gaston Berger de Saint-Louis, BP 234, Saint-Louis, Sngal (http://www.ugb.sn) Institut des Sciences de l'Ingnieur, Pr Niang Abdoulaye, professeur de sociologie lUniversit Gaston Berger, pniangabdou@yahoo.fr Sngal. Dr Niang Abdoulaye Jr, Enseignant Chercheur en sociologie LUniversit Gaston Berger de Saint-Louis.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 11
Mr Oudraogo Sylvestre, Enseignant Chercheur en Economie lUniversit Ouaga II, Prsident de lassociation Yam Pukri, Mr Som Placide, Ingnieur Staticicien Economiste lInstitut National de la statistique et de la dmographie (INSD) Burkina Faso Mme Tankeu Robertine Keutchankeu, Coordinatrice Anais.ac, membre du rseau de recherche RIA ResearchICTAfrica , Mme Thioune Ramata Molo, Administratrice de programme, CRDI, Dakar Mr Traor Inoussa, tudiant en DEA lUnit de formation et de Recherches en Sciences Economiques et de Gestion de lUniversit Ouaga II Mr Zahonogo Pam, Enseignant Chercheur lUnit de formation et de Recherches en Sciences Economiques et de Gestion de lUniversit Ouaga II . Mr Zerbo Boureima, Enseignant Chercheur de Statistiques lUnit de formation et de Recherches en Sciences Economiques et de Gestion de lUniversit Ouaga II
12 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Rsum
La recherche sur le rle conomique et social du secteur
informel des TIC est mene sous la coordination de Yam Pukri
en collaboration avec ANAIS AC au Cameroun et lUniversit
Gaston Berger de St Louis. Plusieurs chercheurs sont impliqus.
La recherche a t finance par le CRDI.
Le choix des trois pays vise avoir une diversit de situation
afin davoir une bonne vision du phnomne en Afrique de
lOuest francophone et galement dobserver le phnomne au
Cameroun qui reprsente lAfrique Centrale.
Lobjectif gnral de ce projet est de mieux comprendre les
dynamiques actuelles du secteur informel des TIC et le rle
conomique et social quil joue afin de recommander la mise en
place de cadres rglementaires et ladoption de mesures
politiques propices au renforcement des capacits des acteurs
qui y voluent et, le cas chant, leur passage des activits et
des structures relevant du formel.
De faon plus spcifique, le projet vise :
- caractriser le secteur informel des TIC par lidentification plus prcise des acteurs et des activits
dans lesquelles ils sont engags ;
- analyser les dynamiques en cours afin didentifier le potentiel du secteur, les facteurs explicatifs de son
dynamisme actuel, ses forces et faiblesses, mais aussi
les opportunits et les menaces;
- dterminer le rle social et conomique du secteur travers sa contribution la richesse nationale, la
cration demplois et dactivits gnratrices de
revenus, et limpulsion dautres secteurs nationaux et
locaux ;
- analyser les cadres rglementaires et les politiques existants afin de proposer les adaptations appropries et
mettre la disposition des dcideurs politiques des
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 13
donnes probantes destines la prise de mesures
propices une meilleure exploitation du potentiel du
secteur et au passage au formel de ses acteurs qui en ont
le potentiel et les motivations.
La logique dans laquelle sinscrit notre recherche part de la
reconnaissance de lexistence du secteur informel comme lun
des fondamentaux des conomies de pays en dveloppement
surtout celles qui relvent de crises ou continuent de les vivre.
Ds lors, nous considrons ce secteur comme une ralit
incontournable pour la transition de nos conomies vers une
situation dconomie mergente, conformment aux vux et
aux discours dominants des dcideurs politiques. Malgr les
politiques et tentatives de lradiquer dans certains pays, y
compris par des mesures policires, le secteur informel reste
toujours aussi vivace, voire dynamique et cratif, dans beaucoup
de cas. Loption retenue dans notre recherche est celle de la
valorisation du potentiel de ce secteur et de la cration des
conditions rglementaires, institutionnelles et politiques qui
peuvent favoriser le passage des activits et structures relevant
du formel pour ses acteurs qui en ont le potentiel et les
motivations.
partir de mthodes de recherche prement discutes au cours
dun atelier rgional, nous sommes parvenus certaines
conclusions.
La recherche sur le Secteur Informel des TIC (SITIC) a permis
dobserver le phnomne en suivant les acteurs, les activits
dune part et dautre part le rle conomique et social quil joue
dans les pays concerns par ltude.
Dans lensemble ; la recherche sest rvle trs riche en
enseignements.
Les observations sur le SITIC ont montr que le sous-secteur est
domin par les hommes contrairement au secteur informel en
gnral qui est lapanage des femmes. Les femmes qui
interviennent dans le SITIC sont confines aux mtiers de
14 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
tlcommunications les plus basiques comme le CALL BOX au
Cameroun et les tlcentres au Burkina Faso et au Sngal.
Le SITIC est plus un milieu intellectuel quanalphabte. Cest
un milieu o de jeunes hommes et femmes ayant un niveau
dtudes secondaires en moyenne essaient de trouver leur
chemin. Ce nest donc pas seulement une chappatoire, mais un
domaine procurant des emplois plus ou moins stables.
La formation sur le tas semble tre la rgle dans le SITIC. Les
promoteurs qui y exercent un quelconque mtier ne proviennent
pas souvent dun lyce technique ou dune cole dingnieurs,
mais ils ont un niveau denseignement gnral et pour le reste,
ils ont appris travailler en imitant ou se formant sur le tas.
Le SITIC, malgr les difficults soulignes dans le rapport
contribue grandement lconomie des pays. Il constitue dune
part un appendice des grandes socits TIC comme les
oprateurs de tlcommunications qui se passent donc de la
fonction de distribution (ventes de cartes de recharges
notamment, vente de puces) pour se cantonner la fonction
de production.
La femme dans les SITIC, elles occupent les mtiers les moins
rentables et les plus risqus.
On pourrait se demander pourquoi les femmes sont en reste dans
le SITIC contrairement au mtier de linformel en gnral o
elles sont les plus dominantes. Les hypothses les plus
vraisemblables se contestent et nous voyons que la situation est
diffrente selon les pays. Au Burkina Faso, la vente des cartes de
recharge est domine par de jeunes garons, en revanche, au
Cameroun, les femmes ont pu domestiquer ce secteur de recharges
de crdits de tlcommunications si bien que dans ce pays, les
Call box sont le business des femmes. Au Sngal, ce sont dans
les tlcentres que lon voit le plus souvent les femmes.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 15
Repenser le secteur informel des TIC en Afrique ? la
recherche dune nouvelle dnomination pour caractriser le
sous-secteur.
La faon dont le SITIC, se dploie, fonctionne et volue nous
amne nous interroger sur des formes de dnomination pour
mieux caractriser le sous-secteur.
Dans la pratique, il semble se dgager une nouvelle conomie
qualifie dinformelle, mais que lon pourrait assimiler une
forme dconomie mergente comparable au modle asiatique,
mais une autre chelle et fonctionnant avec dautres rgles. En
effet, peut-on continuer appeler informel un systme qui est
gnral et est accept par tous ?, Nest il pas mieux de trouver
une autre dnomination plus marketing afin de mieux canaliser
ce sous-secteur et lui donner plus de poids et despoirs ?
Quelques recommandations sont formules ici pour continuer la
rflexion sur le sujet et apporter quelques solutions aux
promoteurs des SITIC des pays concerns par la recherche ;
Recommandations
Au terme de notre tude, nous pouvons formuler un certain
nombre de recommandations pour le SITIC puisse tre un
vritable levier de dveloppement dans les pays tudis et mme
au-del. Les recommandations sont dduites de nos analyses,
mais galement des rapports des ateliers de restitutions tenues au
Burkina Faso, au Cameroun et au Sngal.
Reconnatre limportance du SITIC
Cette tude a permis de jeter des bases solides pour une
exploration du phnomne du SITIC ; nous pensons, au vu de
leur grande contribution lconomie que les autorits
gouvernementales devraient mettre une ligne particulire dans
les statistiques sur le plan de la nomenclature afin de mieux
cerner le SITIC. Il en est de mme pour les services des impts
16 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
qui nont pas de lignes particulires pour le SITIC et le
mlangent dautres volets. Lors des diffrentes restitutions de
ltude, certaines institutions tatiques ont mme trouv que
ctait ncessaire et dans les statistiques de la banque mondiale,
on donne des chiffres en mettant toujours des rserves pour la
non-prise en compte du secteur informel des TIC. La
reconnaissance empirique et technique du SITIC est un
pralable toute action oriente vers ce sous-secteur.
Prendre en compte les acteurs du SITIC dans les projets et
programmes TIC des pays.
La non-reconnaissance des SITIC fait quil nest pas pris en
compte dans les projets et programmes TIC. Les autorits de
rgulation dans le cadre du fonds de service universel devraient
insrer lappui du SITIC au rang de ses priorits dintervention.
Vers une reconnaissance et une labellisation des capacits pour
plus de performances
Les acteurs du SITIC se forment principalement sur le tas
comme nous lavons vu dans cette tude. Peut-on reconnatre ou
formaliser les comptences dune personne qui est autodidacte
ou comment vrifier intrinsquement la somme de
connaissances que lindividu a dans un domaine particulier ?
Cette question est actuellement brulante parce quelle remet en
cause le processus de formation et dacquisition de
connaissances dans un schma classique. On ne peut demander
aux acteurs du SITIC de faire un concours classique pour cela et
on devrait avoir de nouvelles mthodes pour vrifier quelle
chelle se situe telle ou telle personne dans larbre de
connaissances dune discipline donne. Cette approche peut
renforcer les comptences manquantes une personne pour la
rendre plus performante dans ce domaine.
Elle concerne galement la mise en place de certificats
techniques dans des domaines trs cibls comme on le constate
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 17
dans les pays anglophones. Chaque acteur peut donc solliciter
une formation trs spcifique de quelques jours quelques
semaines pour tre plus efficace dans son domaine au lieu de se
rinscrire dans un cycle classique qui lui prendra des annes et
ne lui permettra pas de continuer exercer dans son mtier,
principale source de ses lments de survie.
18 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Introduction gnrale
La recherche sur le sous-secteur informel des TIC au Burkina
Faso, au Cameroun et au Sngal se situe dans une perspective
exploratoire au vu de la nouveaut du thme (le secteur des TIC)
et de sa complexit (le secteur informel).
Ce double dfi a proccup les chercheurs tout au long de
ltude.
Sans ambitions de trouver de nouvelles thories ou de remettre
en cause celles existantes, le travail entrepris vise mieux
comprendre et expliquer un phnomne que nous jugeons
important parce que dominant la vie conomique et sociale de
nos pays. La vision souvent pjorative du secteur informel, la
difficult pour le circonscrire ainsi que le phnomne TIC qui
volue un rythme soutenu sont des ingrdients qui nous ont
pousss cette difficile analyse.
Le secteur informel des TIC semble tre la partie visible et
invisible de liceberg des TIC en Afrique. Utilis par tous,
exploit par chacun quand loccasion sy prsente, il constitue
nen pas douter un nouveau secteur conomique qui puise sa
force dans le besoin, la crativit et limagination de ses
promoteurs dune part et dautre part dans la logique
dimplantation des entreprises TIC en Afrique, presses de faire
des hyper profits et externalisant les fonctions de distribution de
leurs produits et services.
La problmatique principale qui est aborde ici est de
comprendre le rle conomique et social, et surtout la
dynamique du sous-secteur informel des TIC dans les
conomies concernes par ltude.
Le rapport prsent ici est la synthse des tudes effectues au
Burkina Faso, au Cameroun et au Sngal par des quipes de
recherches de niveau universitaires et pluridisciplinaires.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 19
Le document est structur comme suit :
Un premier chapitre qui prsente la situation des TIC dune
faon gnrale dans les trois pays tudis. Cette partie nous
permet de bien connatre le contexte dans lequel opre le sous-
secteur informel des TIC (SITIC). Ce contexte est analys sous
langle des acteurs en prsence et de lenvironnement
institutionnel dans lequel ils voluent.
Un deuxime chapitre pose la mthodologie de la recherche.
Cette partie aborde les questions de recherche, les hypothses, la
problmatique de base, le cadre thorique de rfrence et les
outils danalyse.
Le troisime chapitre essaie de caractriser le secteur informel
des TIC en mettant laccent sur les acteurs dune part et dautre
part sur les activits TIC entreprises par les acteurs.
Le quatrime chapitre aborde le cur de notre travail, savoir
lanalyse du rle conomique et social du sous-secteur des TIC
dans les trois pays concerns par ltude.
A ce niveau, il est fait tat de la dynamique des acteurs dune
part et dautre part du potentiel conomique du secteur.
Enfin, en termes de conclusion, les hypothses de dpart ont t
reprises pour mettre en exergue leurs degrs de vrification.
Quelques recommandations sont formules pour permettre au
travail dtre oprationnel et de servir tant aux acteurs quaux
institutions des pays concerns.
20 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
1. APERU DE LA SITUATION TIC DANS LES 3 PAYS
Ltat des lieux du secteur des TIC vise dresser un panorama
de la situation dans les trois pays de ltude. Cela permettra de
voir comment les TIC se prsentent dans les pays concerns et
comment le secteur informel des TIC est peru et apprhend
dans la pratique. galement, ltat des lieux et la dynamique du
secteur des TIC de faon gnrale peuvent fournir les premires
explications sur la dynamique du secteur informel des TIC. Il
sagira donc dans un premier temps de faire ltat des lieux de la
diffusion des TIC, dans un deuxime temps ltat des lieux des
oprateurs dans la tlphonie mobile et Internet et enfin dans un
troisime temps ltat actuel des politiques nationales en matire
de TIC dans les trois pays.
Cet aperu va nous aider mieux comprendre lunivers dans
lequel volue le sous-secteur informel des TIC.
1.1 Etat de la diffusion des TIC dans les trois pays
Tout dabord, il faut rappeler que le secteur des nouvelles
technologies, notamment dans sa composante tlphonie mobile,
est un secteur dans lequel les pays africains de manire gnrale
ont enregistr des performances records. Ces performances sont
bien illustres par lunion internationale des tlcommunications
(UIT) travers les graphiques ci-dessous.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 21
Figure N 1. Diffusion des TIC en Afrique
On constate que le rythme de diffusion de la tlphonie mobile
est assez lev passant dune moyenne de 44% en 2002 une
moyenne de 64% en 2007 soit un accroissement net de 20% sur
ladite priode.
En restreignant lanalyse sur les pays de la zone dtude savoir
le Burkina Faso, le Cameroun et le Sngal, le tableau ci-dessous
nous montre les disparits entre ces pays en matire de diffusion
des TIC.
Tableau 1. Tableau comparatif de quelques indicateurs TIC
Ligne fixe
pour 100 habitants
Tlphonie
mobile pour 100 habitants
Bande
passante linternational
e par
utilisateur (bit/s)
Proportions
de mnages ayant des
ordinateurs
Proportion de
mnages ayant accs
lInternet
domicile
2002 2007 2002 2007 2002 2007 2002 2007 2002 2007
Burkina Faso
0.5 0.7 0.9 10.9 320 2170 2 3 0.3 1.8
Camerou
n
0.7 1 4.5 24.5 150 371 0.5 10.1 5.2
Sngal 2.1 2.2 5.1 29.3 752 2079 1.7 7.8 0.5 1
Source: International Telecommunications Union (2008)
22 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Dans les pays de la zone dtude, nous constatons une diversit
de situation dans le dveloppement des TIC. Dans lensemble,
on observe une croissance entre 2002 et 2007. Si
paradoxalement le Cameroun a fait une perce dans le domaine de
lquipement des mnages (0.5 10.1% entre 2002 et 2007), le
Cameroun enregistre des performances moindres en matire de
bande passante. Le Burkina Faso, quant lui, enregistre un faible
niveau de progression de lquipement des mnages dans la
priode considre. Il faut dire que les taxes dimportation de
matriels informatiques sont leves au Sngal, contrairement au
Burkina o les taxes sont assez importantes.
Dans lensemble, les pays concerns par ltude sont dans la
frange faible par rapport aux indicateurs de dveloppement des
TIC en Afrique.
Pour ce qui est des activits, part le Sngal o on a quelques
exemples de montages dordinateurs, lensemble des activits se
regroupe dans le secteur tertiaire savoir le commerce et les
prestations de services. Lanalyse des cots montre une diversit
de situations dans les cots et services TIC dans la zone dtude.
Certains pays comme le Sngal a opt pour la leve des taxes
pour limportation des ordinateurs, ce qui a favoris le secteur
alors quau Burkina, le matriel est tax assez cher, bien quun
effort ait t fait par le gouvernement, les cots restent levs.
Les biens et quipements informatiques sont taxs autour de
20% et en prenant en compte la TVA (18 %), le transport,
lassurance et la marge du commerant, on se retrouve vite avec
70 75% daugmentation. Cela a comme consquence le
dveloppement du march des secondes mains et donc de
linformel.
Dans la sous-rgion ouest-africaine, le Sngal semble tre le
pays qui pratique les tarifs les plus bas pour les
tlcommunications.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 23
1.2 Les oprateurs de tlphonie et de lInternet dans les trois pays.
Le dveloppement de la tlphonie mobile et de lInternet de
faon gnrale va offrir de nouvelles opportunits au secteur
informel cest pourquoi il est important de faire ltat des lieux
des principaux oprateurs dans les pays concerns.
Il faut aussi rappeler que la tlphonie mobile est le sous-secteur
des TIC qui connait un dveloppement fulgurant en Afrique,
avec des possibilits dexpansion dans les zones rurales, le taux
de pntration tant encore faible.
Plusieurs raisons expliquent cet tat de fait : la chert des
quipements, latomicit, la non-concentration des villages et
labsence dlectricit. Pour pallier ces problmes, la plupart des
pays comme le Burkina, le Cameroun et le Sngal disposent dun
Fonds de service universel, mais loprationnalisation du fond
tarde voir le jour. Dans les cahiers de charge des oprateurs de
tlphonie mobile, il existe galement des exigences de
couverture de certaines zones juges non rentables et des efforts
sont entrepris dans ce sens.
La tlphonie mobile
La situation de la tlphonie mobile dans les trois pays prsente
des similitudes plusieurs niveaux, toutefois les oprateurs
diffrent dun pays un autre.
Au Sngal, il existe trois oprateurs qui se partagent le march
des tlcommunications : le groupe SONATEL (ORANGE),
TIGO (SENTEL) et le dernier arriv, le SUDATEL.
La SONATEL (Socit Nationale des Tlcommunications) est
loprateur historique du Sngal cr en 1985 par la fusion de
deux entits publiques, lOffice des Postes et
Tlcommunications et Tl Sngal, a t privatise en juillet
1997, avec le statut de socit anonyme. Elle a ouvert son
24 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
capital au public, par le biais d'une offre publique de vente, et
un partenaire stratgique choisi par appel d'offres international :
France Cble Radio (FCR), filiale 100% de France Tlcom.
La SONATEL est titulaire dune licence de tlcommunications
globale qui lui permet dexploiter tous les rseaux et services de
tlcommunications. Depuis novembre 2006, le groupe a adopt
la marque Orange . Le groupe SONATEL offre des solutions
globales de tlcommunications dans les domaines du fixe, du
mobile, de lInternet, de la tlvision et des donnes au service
des particuliers et des entreprises.
la suite de SONATEL, l'Etat du Sngal et la Socit SENTEL
GSM ont conclu une convention de concession, le trois juillet
1998 Dakar, pour lexploitation dune 2e licence de tlphonie
mobile.
La socit SENTEL GSM, est dtenue 75% par le groupe de
tlcommunications Millicom International Cellular (MIC) et
25% par un investisseur Senegalais priv. .
Enfin, en septembre 2007, une troisime licence globale de
tlcommunications a t attribue la socit soudanaise des
tlcommunications SUDATEL pour un montant de 200
millions USD.
Au Burkina Faso, nous avons galement trois oprateurs qui se
partagent le march du mobile : TELMOB, TELECEL et ZAIN
(ex CELTEL).
TELMOB est la branche mobile de loprateur historique
ONATEL. Seul oprateur de Tlphonie fixe, pour linstant, en
attendant la libralisation de ce volet, lONATEL contrle 41%
du march du mobile.
Loffice a lanc, en juin 2005, un emprunt obligataire sur le
march financier sous-rgional, en faisant appel lpargne
publique, dun montant nominal de 16 milliards de F CFA. le
prix dmission de cet emprunt a t fix 10 000 FCFA. Les
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 25
fonds mobiliss permettront lOffice de disposer de 525 728
lignes fixes et 235 000 abonnements supplmentaires au
tlphone mobile.
Depuis dcembre 2006, le groupe Maroc-Tlcom est le nouvel
actionnaire majoritaire 51 % de lONATEL.
Ainsi, ayant accru sa capacit en 2006-2007, TELMOB a pu
faire face la concurrence. Il compterait aujourdhui un nombre
dabonns denviron un million.
Ensuite on a le groupe Zain (ex CELTEL)1. Pour obtenir la
licence de dix ans, CELTEL a vers 10.6 millions de dollars.
CELTEL-Burkina peut senorgueillir davoir ralis, depuis son
implantation, un investissement de plus de 20 milliards de
FCFA et cre prs de 140 emplois directs et 3 000 indirects.
Pour tendre et augmenter la capacit de son rseau et vanter les
services quelle propose au public, la socit a aussi lanc, en
aot 2003, un emprunt obligataire de 3 milliards de F CFA dans
lespace de lUnion conomique et montaire ouest-africaine
(UEMOA).
Depuis son implantation en 2001, CELTEL a investi plus 25
milliards de F CFA en infrastructure. Entre 2001 et 2004, elle a
multipli par prs de trois son chiffre daffaires qui slevait en
2006 plus de 5 milliards de F CFA.
Son rseau stendait sur plus de 82 localits, mais son ambition
est de couvrir 80 % de la population dici 2008. Dj, 80 % des
villes exiges par le gouvernement dans le cahier des charges
ont accs au rseau, selon les autorits Burkinab. CELTEL a eu
1 Au moment o on mettait sous presse le rapport, ZAIN est devenu AIRTEL.
26 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
le temps de fter son millionime abonn en 2008 avant dtre
englouti par le coren ZAIN. En dbut 2010, ZAIN est rachet
par le groupe indien BHARTY.
Enfin, on a le groupe TELECEL. Cre au dpart par un priv
burkinab, TELECEL a vers 8 millions de dollars pour obtenir
sa licence et a pu bnficier dun prt de 4 milliards de F CFA
de la part de la Banque ouest-africaine de dveloppement
(BOAD) pour financer lextension de son rseau.
Trois principaux actionnaires se partagent le capital de
TELECEL Faso : Planor Afrique SA, reprsent par un autre
priv Burkinab, Atlantique Tlcom, contrl par un priv
ivoirien (51 %) et West African Ground Fund (WAGF). Mais
les bisbilles entre les actionnaires de TELECEL Faso, ont mis en
pril, courant 2005, la survie de la compagnie de tlphonie
mobile. En aot de cette mme anne, aprs avoir t mise sous
administration judiciaire, la socit a frl la liquidation.
Aujourdhui cette compagnie semble renatre peu peu de ses
cendres. Le dernier vnement en date a t la suppression
temporaire de sa licence du un non-paiement, ce qui a port un
prjudice aux abonns de son rseau et aux employs qui y
travaillent.
Pour ce qui est du Cameroun, trois oprateurs sont galement
prsents sur ce segment de march, savoir Orange, MTN et
depuis 2006 CAMTEL. La forte demande dans le sous-secteur a
amen les oprateurs offrir une gamme assez varie de
produits et services leur clientle. Le parc dabonns ne cesse
de crotre un rythme exponentiel. En moins de six ans, les
deux oprateurs ont peu prs 5 millions dabonns ; la part de
MTN (3 000 000 dabonns soit prs de 60%) dpasse celle
dOrange. Mais Orange serait le leader sur le segment des
entreprises et aussi en termes de couverture gographique.
En moins de quatre ans, le nombre dabonns a plus que tripl.
La grande majorit de ces abonns, soit 97%, sont sur le mode
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 27
prpay. Le taux de couverture national est de 85% et concerne
principalement les grandes villes de plus de 50 000 habitants.
239 sur les 268 localits du pays sont connects lun des
rseaux et de ce nombre, 99 sont couverts par les deux
oprateurs. Le taux de pntration est pass de 10,20% en 2004
15% en 2005 et se situerait autour de 17% ce jour. Du point
de vue du Rgulateur, le march nest pas encore satur ; il y
aura saturation lorsque le march atteindra 8 millions dabonns.
En conclusion, on peut dire daprs le rapport dvaluation du
secteur fait par lAgence de rgulation des tlcommunications
entre fvrier et juin 2007, que malgr les efforts des deux
oprateurs privs, loffre en service de tlcommunications est
insuffisante et ncessite dtre amliore ; Les deux oprateurs
de tlphonie mobile doivent tendre leurs rseaux et amliorer
la qualit de leurs services afin de respecter les objectifs fixs
dans le cahier de charges de leurs licences2.
LInternet
Linternet reste concentr dans les grandes villes comme partout
ailleurs en Afrique, mais le dveloppement des technologies
CDMA et les kits de connexion USB avec certains oprateurs au
Burkina et au Sngal commencent booster le sous-secteur de
lInternet mobile. Avec un simple tlphone mobile, il est
possible davoir accs lInternet. Les particuliers, ONG et
associations dans le monde rural et possdant la couverture
rseau peuvent se connecter tout juste en crditant leurs comptes
simplement.
Cette rvolution risque de changer le visage de la connectivit
Internet domin par les plthores de cybercafs en milieu urbain,
2 Mobile telephone networks : Coverage and quality of service , Nouvelles
de lART, No. 20, Janvier 2008
28 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
mais la chert dachat des ordinateurs ne va pas trop jouer au
Burkina Faso. Les cybercafs sont devenus galement un
phnomne social o des jeunes se donnent rendez-vous pour de
multiples raisons et ce nest pas vident que linternet mobile
vienne dtrner le march de cybercafs. On risque davoir deux
produits complmentaires.
Au Burkina Faso, le march de lInternet reste concentr dans la
capitale qui compte prs de 80% des cybercafs du pays. Avec
une dizaine de fournisseurs Internet actifs dont un seul, fasonet)
possdent plus de 80% de la clientle, le march commence se
redessiner avec des providers plus innovants avec des
technologies wimax (exemple : connecteo, Giganet)
Au Cameroun, depuis la libralisation du secteur des
tlcommunications en 1998, le march de lInternet a connu
des mutations. Actuellement, on compte une cinquantaine de
fournisseurs daccs Internet parmi lesquels loprateur
traditionnel CAMTEL, le seul fournisseur dInternet ADSL et le
gestionnaire du point cm, MTN avec lachat de Global Net et
Orange qui a obtenu une licence dexploitation. Ils sont relays
sur le terrain par plus de 2500 cybercafs installs surtout en
milieu urbain. Les fournisseurs daccs Internet se connectent
au backbone soit directement au VSAT, soit par liaisons
spcialises, soit par fibre optique.
La connexion des utilisateurs seffectue par le RTC ou par
liaison spcialise radiolectrique ou filaire. En 2005, CAMTEL
exploitait huit nuds Internet dans les villes de Yaound,
Douala, Bafoussam, Garoua, Ebolowa, Sangmlima, Bua et
Kribi. Avec ces nuds, CAMTEL dispose dune bande passante
de 155 Mbits/s. CAMTEL, dans un effort damlioration de la
connectivit, a investi 18 milliards FCFA pour le raccordement
du pays au cble sous-marin fibre optique
SAT3/WASC/SAFE. Avec cet investissement, CAMTEL
dispose dune bonne capacit de transmissions de 2,5 Gbits/s,
dune large bande passante de transmissions de donnes haut
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 29
dbit via les rseaux Inmarsat et Intelsat et ambitionne de jouer
le rle dHub au niveau de la sous-rgion.
Au Sngal, sur le march de lInternet, une douzaine de
fournisseurs daccs Internet (FAI) dveloppe en sus de la
distribution daccs Internet, une activit essentiellement axe
sur le service informatique et la relation commerciale.
Les fournisseurs daccs sont nombreux, mais sont encore
dpendants du monopole de la SONATEL qui a pris fin en
juillet 2004, notamment pour lattribution de bandes passantes.
La SONATEL, par le biais de sa filiale SONATEL Multimdia,
reste lheure actuelle le principal fournisseur daccs.
Le march de lADSL domin par SONATEL compte plus de
33 000 abonns.
1.2.3 Des politiques nationales convergentes
Les politiques nationales des TIC dans les trois pays de ltude
semblent converger sur bien des points. Celui du Sngal semble
se dmarquer par une politique volontariste cible et ambitieuse
contrairement au Burkina Faso o les TIC semblent relever du
domaine du dveloppement, donc li laide extrieure. En
dehors des efforts entrepris dans la modernisation de la socit
dEtat ONATEL qui a t vendue Maroc Tlcom, on ne voit
pas dans les faits se dessiner une orientation claire et nette pour
faire du secteur des TIC un levier de lconomie comme on le
voit au Sngal avec la leve des taxes sur limportation du
matriel informatique, lexistence de services valeur ajoute
comme les calls centers dus lexistence dune bande passante
confortable
Dans les trois pays tudis, on semble suivre la mme dmarche
sur le plan gnral. Cette dmarche suit bien la tendance
louverture des conomies africaines amorces dans les annes
1990.
30 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
On a donc le mme schma avec lexistence dun oprateur
historique qui jouait en mme temps la fonction de rgulation du
sous-secteur, de 1960 1990, louverture au march
partiellement entre 1990-2000 avec lapparition des rseaux
mobiles de tlcommunications et enfin, louverture totale 2000
nos jours avec le march de lInternet et des donnes ouvert
aux oprateurs. Cette ouverture semble tre partielle.
Lorigine de ces politiques est rechercher dans les grandes
lignes directrices des politiques nationales de lutte contre la
pauvret crite dans les annes 90, politiques fondes sur des
stratgies de dveloppements antrieures et rchauffs avec le
vent de la libralisation pour donner une place de choix au
secteur priv.
Les documents de politiques TIC ont donc suivi cette courbe et
pour le cas du Burkina Faso, ils ont t rviss plusieurs fois pour
tenir compte du contexte. Dans lensemble, on peut dire que ces
documents pour parler du Burkina Faso manquent
doprationnalit du fait de la difficult de lier la pauvret aux
TIC. En effet, il fallait que dans les axes du cadre stratgique de
lutte contre la pauvret, les TIC apparaissent dans les volets de
base.
Les documents sont crits plus pour avoir la caution des
bailleurs que pour servir de trame oprationnelle lclosion
dune vritable socit des TIC au visage africain. On dnote
donc une copie presque conforme des institutions TIC avec
celles qui ont vu le jour en France.
La mise en place des institutions lies aux TIC est galement en
constante mutation du fait que le phnomne est nouveau et que
lavance rapide de la technologie ne concorde pas avec les lois
et dcisions au niveau national.
Au Burkina Faso lautorit de rgulation des tlcommunications
mise en place en 2000 pour jouer le rle de rgulateur, rle
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 31
occup auparavant par lONATEL a t mu en autorit de
rgulation des communications lectroniques (ARCE).
LAutorit de rgulation des communications lectroniques est
rgie par le dcret 2009-346/PRES/PM/MPTIC du 25 mai 2009.
Sa mise en place fait suite ladoption en novembre 2008 dune
loi portant rglementation gnrale des rseaux et services de
communications lectroniques au Burkina, une loi qui entre dans
le cadre du processus mis en place par la CEDEAO et
lUEMOA pour garantir la libralisation du secteur et son
ouverture la concurrence. Elle remplace dsormais lAutorit
de rgulation des tlcommunications (ARTEL).
Le conseil suprieur de lInformation, cre en 1995, mais
oprationnel en 1997 a t chang en CSC (Conseil Suprieur
de la Communication) pour tenir compte galement de certains
aspects lis au TIC. Cest une institution dappui la dmocratie
dans la mme ligne que le CIL et autres (commission de
lInformatique et des liberts). Sur le site officiel du CSE, on lit
bien que la nouvelle loi relative au CSC marque le passage de
lappellation linstitution de Conseil suprieur de linformation
(CSI) conseil suprieur de la communication (CSC). Ce
changement de dnomination vise prendre en compte
lvolution constate dans les techniques de diffusion de
linformation et dattester officiellement lextension du champ
de comptence de linstitution qui va, en ralit, au-del de la
rgulation des mdias3.
Le ministre des Postes et Tlcommunications a t chang en
ministre des postes et des technologies de linformation ce
ministre a t cr par dcret N 2006-002 PRES du 5 janvier
2006 portant remaniement du gouvernement, le ministre des
Postes et des Technologies de linformation et de la commu-
nication. Le MPTIC assure la dfinition et le suivi de la mise en
3 http://www.csc.bf/conseil/presentation.htm
http://www.csc.bf/conseil/presentation.htm
32 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
uvre de la politique du gouvernement en matire des postes et
des TIC.
La dlgation gnrale lInformatique (DELGI) qui tait
rattache au premier ministre a disparu par la mme occasion.
Elle est maintenant rattache au MPTIC et est devenue un grand
dpartement de ce mga- ministre . Il faut signaler que cest
dailleurs le directeur de cette institution qui a t confirm au
rang de ministre de MPTIC en 2006.
La situation semble similaire pour le cas du Cameroun.
En effet, au Cameroun, au lieu dtre rattach au premier
ministre, lANTIC est rattach la prsidence. Elle est pourtant
sous la tutelle du MINPOSTEL, on observe un amalgame, une
confusion de rle avec le MINPOSTEL. Avant lentre en scne
de lANTIC, ctait la responsabilit seule du MINPOSTEL,
dpartement ministriel en charge des TIC, dlaborer et de
mettre en uvre la politique dans le secteur. Dans les textes
crant lANTIC, lune de ses missions est la dfinition et la mise
en uvre de la politique en matire de TIC. Cette mission vient
emboter le pas sur celle du ministre. Cette duplication a cr
une duplication dinstruments de politique TIC. Cest ainsi
quen 2005, le ministre a plac la charrue avant les bufs en
dfinissant sa stratgie sectorielle des tlcommunications et
TIC qui sinscrit dans la mouvance du DRSP et de la
Dclaration des OMD, mais aussi dans la dynamique actuelle de
globalisation des changes4.
Quant lANTIC, en 2007, elle a labor la stratgie nationale
de dveloppement des TIC qui sinscrit dans la perspective de
mise en uvre des dispositions de la Constitution, du Code des
investissements, des lois dorientation du secteur de lducation,
4 Rapport tat des lieux TIC INFOR Cameroun
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 33
des orientations majeures du DSRP ainsi que des engagements
du Cameroun en faveur de la rduction de la pauvret dans le
monde (OMD, ducation pour tous, Dclaration de Tunis sur la
Socit de linformation, etc.).
Cette stratgie qui vise 12 points, est sous-tendue par une vision
politique o Larrimage du Cameroun la socit mondiale de
linformation et des savoirs en mergence constitue une priorit
nationale et un enjeu majeur pour son devenir. Aussi, le
gouvernement entend-il utiliser les Technologies de
lInformation et de la Communication comme lun des leviers de
la lutte contre la pauvret et de la promotion du dveloppement,
dans loptique de transformer le pays en une socit du savoir,
du savoir-faire et du savoir-tre dans laquelle les citoyens, les
mnages, les entreprises et les administrations utilisent
pleinement Internet et les autres TIC de manire assurer
louverture, la comptitivit et lattractivit du Cameroun et de la
sous-rgion dAfrique Centrale dans le monde 5.
La rgulation est assure par lART, tablissement public
administratif dot de la personnalit juridique et de lautonomie
financire, dcisionnelle et fonctionnelle. En plus de la
rgulation du secteur des tlcommunications, elle est charge
aussi du contrle, du suivi des activits des exploitants et des
oprateurs et de la protection du consommateur de ce secteur.
La situation au Sngal est marque par lexistence dun mga
ministre dans lequel se trouve le dpartement charg des TIC.
Ce mga ministre des Tlcommunications, des Nouvelles
Technologies de lInformation et de la Communication, des
transports terrestres et des transports ferroviaires est charg de
prparer et de mettre en uvre la politique arrte par le Chef de
5 Stratgie nationale de dveloppement des technologies de linformation et
de la communication , Prsidence de la Rpublique, ANTIC, Octobre 2007
34 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
lEtat dans les domaines des Postes, des Tlcommunications et
des Nouvelles technologies de lInformation et de la Commu-
nication et des transports terrestres et des transports ferroviaires.
Pour conclure, il faut dire que le sous-secteur des TIC est un vrai
chantier sur le plan institutionnel.
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 35
2. MTHODE DE RECHERCHE
La mthode de recherche a t dveloppe dans un document
spcifique. Lessentiel de ce document est prsent dans cette
section. Il sera prfrable pour des dtails de se rfrer ce
document de plus de 100 pages6 qui a ncessit la contribution
de plusieurs chercheurs et spcialistes, dont des sociologues, des
conomistes, des statisticiens et des spcialistes en genre.
2.1 Secteur informel des TIC : un potentiel de dveloppement ?
LAfrique est cite parmi les continents qui ont fait, cette
dcennie, des bonds spectaculaires dans le domaine des
technologies de linformation et de la communication(TIC). Le
nombre dutilisateurs dordinateurs, de tlphones mobiles, de
tlphones fixes et de lInternet a connu, des degrs divers, un
accroissement sans prcdent.
titre dillustration, lAfrique enregistre un taux de croissance
annuel moyen de 65% du nombre des abonns au tlphone
mobile contre respectivement 24, 38% pour les Amriques et
lEurope sur une moyenne mondiale de progression de 33%
(World Bank7 2006). Le mobile enregistre en effet une
progression considrable et a dpass le fixe en 2001 surtout
avec lintroduction des cartes prpayes, plus adaptes la
6 Yam Pukri, 2009, Dynamiques et rle conomique et social du secteur
informel des TIC au Burkina Faso, au Cameroun et au Sngal, lments
mthodologiques pour une recherche sur la question, Yam Pukri, Burkina
Faso.
7 World Bank, 2006, Information and Communications for
Development, Global Trends and Policies
36 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
consommation quotidienne pour une large partie de la
population de ce continent qui vit au jour le jour.
LAfrique ayant obtenu ces rsultats, on peut dire que ce
nouveau mode de communication sied son environnement et
sa logique. Le continent, surtout la partie subsaharienne se
caractrise par un tat de pauvret absolu, une population
fortement rurale plus de 60% (Henri de France; 2001) et une
forte proportion de la population active notamment urbaine
(75%, Traor et al 2000) se trouve dans le secteur dit informel.
La mobilit tant le matre mot de ce secteur, on comprend alors
pourquoi il existe un tel engouement pour cet outil de
communication quest le mobile.
En se rfrant Hamadoun Tour, secrtaire gnral de lUnion
internationale des tlcommunications (UIT), les pays africains
ont connu les plus forts taux de croissance en tlphonie mobile,
allant de 50 400 pour cent ces trois dernires annes.
LAfrique doit maintenant se donner comme objectif de
reproduire cette prouesse pour le haut dbit, en apportant
laccs Internet dans chaque village, chaque cole, chaque
universit, chaque hpital.
En matire de dveloppement de lInternet, les chiffres de lIUT
montrent que moins de 4 % des Africains ont accs lInternet,
la pntration du haut dbit reste infrieure 1 % et 70 % du
trafic total est rachemin lextrieur du continent, do un
surcot pour les utilisateurs. Daprs la Banque Mondiale, le
cot de la connexion Internet en Afrique est le plus lev du
monde (environ 250-300 USD par mois).
Lessor des TIC en Afrique a intress plus dun oprateur du
secteur des tlcommunications qui trouve sur ce secteur une
mine exploiter. Le taux de croissance des chiffres daffaires
ainsi que la masse financire dgage par les entreprises des
Tlcommunications en Afrique sont trs importants. En effet,
les oprateurs intervenant en Afrique nont pas connu les
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 37
problmes de ceux doutre-Atlantique qui se sont embourbs
avec les achats de sommes pharaoniques des licences UMTS de
3e gnration dont les anticipations sur leurs dveloppements ne
se sont pas avres exactes. Il y a donc eu comme des lments
de compensation pour ces entreprises qui se rattrapent en
Afrique en investissant ou en rachetant des parts dautres
oprateurs nationaux ou privs. Au Burkina Faso, Maroc Telecom,
dtenu en majorit par France Telecom a rachet 51% du capital
de lONATEL (Office National des tlcommunications) avec
141 milliards de FCFA. La mme opration a eu lieu avec sa
filiale Orange qui a rachet les parts de plusieurs oprateurs
dans la zone subsaharienne.
Sur le plan local, au Nigeria, les tudes montrent que les
investissements dans le secteur des tlcoms atteignent 3.5
milliards de dollars en fin 2005, se situant juste aprs le ptrole
et le gaz.
En somme, au cours des deux dernires dcennies, les TIC ont
radicalement transform le monde et son potentiel pour
contribuer la rduction de la pauvret et acclrer la croissance
dans les pays en dveloppement sest trs vite accru. La
tlphonie mobile permet de mettre en contact par exemple les
agriculteurs, leveurs et les entrepreneurs. LInternet livre aux
coles et hpitaux des connaissances vitales. Les ordinateurs
amliorent le service public et priv et accroissent la
productivit. En mettant en relation les gens et les espaces, les
TIC jouent un rle vital dans le dveloppement au plan national
et rgional et offrent toujours dnormes perspectives pour
lavenir. Par consquent, il y a lieu de bien comprendre et de
cerner les TIC dans leur trajectoire.
Malgr la faible pntration de lInternet sur le continent qui est
pour le moment concentr dans les centres urbains, les TIC ont
commenc redessiner le paysage conomique et social des
Africains en induisant de nouveaux comportements. En effet, ils
font lobjet dusages multiples et varis et contribuent ainsi la
38 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
cration de nombreux emplois. Toutefois, ce dynamisme des
TIC est matrialis, limage des conomies dans son ensemble
dans les pays en dveloppement par un dualisme : la coexistence
dun secteur formel et dun secteur informel dont les activits
relvent toutes des TIC. On constate donc dun ct les
moyennes et grandes entreprises dont les leaders sont les
oprateurs de tlphonie mobile, les fournisseurs daccs
internet et les vendeurs de Hardware et de Software. D'un ct,
nous avons les entreprises formelles dont la caractristique
essentielle (en dehors des oprateurs de tlphonie mobile) est
quelles ont pour principal client ltat. De lautre ct, nous
avons les micro-entreprises informelles qui sont les plus
nombreuses.
Dans une perspective de dveloppement conomique, il est
intressant de sinterroger sur la dynamique des activits
informelles des TIC en Afrique, car la simple observation
montre quelles se dploient vigoureusement dans tous les pays
africains, en particulier dans les villes o se trouve une forte
proportion de la demande solvable. De plus, la spontanit et la
rapidit avec lesquelles les activits TIC se dploient, leur
vivacit et les enjeux quelles pourraient reprsenter pour les
pays sont autant de raisons qui appellent une analyse de ce
secteur. Cela est dautant plus important que dans les
valuations des impacts des TIC sur les pays pauvres ce secteur
est trs souvent ignor pour des raisons lies aux difficults de
collecte des donnes lies au secteur informel en gnral.
Il existe peu dtudes et de recherches sur le secteur informel
des TIC dans sa globalit, notamment dans ses dimensions
conomiques. Des travaux antrieurs mens dans le cadre de
recherches soutenues par le programme Acacia du Centre de
recherches pour le dveloppement et portant sur les tlcentres
communautaires ont abord les effets socio-conomiques des
TIC travers leur capacit crer des emplois et offrir des
opportunits de gnration de revenus, en particulier dans le
cadre des stratgies de durabilit de ces tlcentres. Cest dans
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 39
cette mme optique que lquipe Cyberpop dEnda Tiers-Monde
a conduit entre 2001 et 2003 des recherches sur lancrage
conomique de ces centres de ressources communautaires, dont
la capacit gnrer des ressources financires durables sur la
base de lexistence dune demande solvable au sein des
quartiers o ils ont t implants.
Les travaux de Oudraogo S. (2000, 2002) pour le compte de
lInstitut International pour la communication et le
dveloppement (IICD) au Burkina Faso soulignent le fait que le
phnomne dappropriation des TIC se limite des usages
basiques (bureautique, courrier lectronique) et que la baisse des
cots et limportation du matriel informatique de seconde main
permettent de petits entrepreneurs douvrir de cybercafs et de
les faire fonctionner avec du personnel possdant trs peu de
qualifications.
La crativit de ce sous-secteur est pourtant sans limites comme
le mentionne Loquay (2003)8 : les produits informatiques
d'occasion alimentent un nouveau march crateur d'emplois et
de ressources dont s'empare le secteur informel. Ce march
prolifrant de l'occasion engorge les centres-villes et cre de
nouvelles formes d'appropriation de l'espace urbain. Les grands
commerants ouest-africains du Nigria du Sngal acteurs de ce
commerce, sillonnent la plante entre les centres de l'conomie
mondiale et les grandes villes africaines. Sandaga illustre
l'efficacit de systmes et d'agents considrs comme
marginaux, informels ou illgaux par rapport au concept
traditionnel de l'conomie classique et qui gnrerait autour de
60% du PIB sngalais.
8 Annie Chneau-Loquay ,(2003) Les TIC sont elles compatibles avec
l'conomie informelle en Afrique ? http://www.cities.lyon.fr/articles/211.html
40 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Le rseau de recherche RIA en 2006 a ralis une tude sur
laccs et lusage des TIC par les PME dans 14 pays en Afrique.
Le but de la recherche tait dapprcier limpact des TIC dans la
productivit de lentreprise. Une des conclusions est que le
secteur informel a de la difficult faire le passage au formel
cause de trop de procdures administratives qui demandent
beaucoup dargent. De mme, la recherche a rvl que les
petites et trs petites entreprises utilisent plus intensment les
TIC que les moyennes entreprises9.
Les rares tudes existantes indiquent que le secteur informel des
TIC contribue rsorber le chmage des jeunes dans ces pays.
Au Cameroun, daprs les statistiques de lInstitut National des
Statistiques, lEtat emploie environ 5% de la main duvre, le
priv peu prs de mme et le reste volue dans le secteur
informel. travers ce cas, et bien dautres dans la plupart des
pays africains, lon voit trs bien quelle place occupe le secteur
informel dans le march de lemploi.
De plus, malgr les normes profits que gnrent les
tlcommunications et les activits connexes, et leur part
croissante dans le PIB, il nexiste pas dtudes sur la
contribution du secteur informel des TIC la richesse nationale.
Dans le cas du Sngal, seules quelques indications paraissant
dans la presse ou dans les rapports du syndicat des grants de
tlcentres ou les rapports de loprateur donnent une ide de
lampleur des montants concerns.
Au moment o la plupart des pays africains, conscients de la
place croissante des TIC dans leurs conomies, misent sur le
secteur priv comme levier du dveloppement dans ce domaine,
il y a lieu de sintresser au dynamisme dont fait preuve le
secteur informel dans le march des TIC. Des recherches en la
9 http://www.researchictafrica.net
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 41
matire sont dautant plus opportunes que ce secteur nest pas
bien connu parce que non clairement caractris et ses
dynamiques actuelles non encore bien cernes.
Il existe beaucoup dinterrogations sur le potentiel quil recle,
les motivations de ses acteurs, les relations avec le secteur
formel, et au-del des chiffres annoncs et parcellaires, sa
contribution relle la richesse nationale, la formation de
revenus significatifs pour les promoteurs et la cration
demplois durables et qualifis. De mme, il est ncessaire de
rflchir sur les cadres rglementaires et les politiques les plus
appropris pour une meilleure exploitation du potentiel recle
de ce secteur informel des TIC et pour favoriser, le cas chant,
le passage de certains de ses acteurs des activits et des
structures dentrepreneuriat relevant du formel.
Ce sont ces gaps en matire de connaissances sur le secteur
informel que la prsente recherche sest propose de combler
par la mise disposition de lensemble des acteurs, en
particulier les dcideurs politiques, de donnes empiriques
probantes au moment o, sous lgide de la Commission des
Nations Unies pour lAfrique, certains pays cherchent donner
un contenu plus oprationnel leurs plans stratgiques de mise
en uvre de leurs politiques TIC. Les propositions et
recommandations qui sont proposes devraient permettre de
tenir dsormais compte de ce secteur qui de loin est celui par
lequel les TIC joueront peut-tre leur rle de dveloppement
dans les pays africains.
2.2 Objectifs et hypothses de recherche
Objectifs
Lobjectif gnral de ce projet est de mieux comprendre les
dynamiques actuelles du secteur informel des TIC et le rle
conomique et social quil joue afin de recommander la mise en
place de cadres rglementaires et ladoption de mesures
42 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
politiques propices au renforcement des capacits des acteurs
qui y voluent et, le cas chant, leur passage des activits et
des structures relevant du formel.
De faon plus spcifique, le projet vise :
- caractriser le secteur informel des TIC par lidentification plus prcise des acteurs et des activits
dans lesquelles ils sont engags ;
- analyser les dynamiques en cours afin didentifier le potentiel du secteur, les facteurs explicatifs de son
dynamisme actuel, ses forces et faiblesses, mais aussi
les opportunits et les menaces;
- dterminer le rle social et conomique du secteur travers sa contribution la richesse nationale, la
cration demplois et dactivits gnratrices de
revenus, et limpulsion dautres secteurs nationaux et
locaux ;
- analyser les cadres rglementaires et les politiques existants afin de proposer les adaptations appropries et
mettre la disposition des dcideurs politiques des
donnes probantes destines la prise de mesures
propices une meilleure exploitation du potentiel du
secteur et au passage au formel de ses acteurs qui en ont
le potentiel et les motivations.
Questions de recherche
Pour ce faire, nous essayons de formuler, ci-aprs, les questions
et hypothses de recherche auxquelles la recherche contribue
donner des lments de rponses sont les suivantes :
La logique dans laquelle sinscrit notre recherche part de la
reconnaissance de lexistence du secteur informel comme lun
des fondamentaux des conomies de pays en dveloppement
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 43
surtout celles qui relvent de crises ou continuent de les vivre.
Ds lors, nous considrons ce secteur comme une ralit
incontournable de la transition de nos conomies vers le statut
dconomies mergentes, selon les vux et les discours
dominants des dcideurs politiques. Malgr les politiques et
tentatives de lradiquer dans certains pays, y compris par des
mesures policires, le secteur reste toujours aussi vivace, voire
dynamique et cratif, dans beaucoup de cas. Loption retenue
dans notre recherche est celle de la valorisation du potentiel de
ce secteur et de la cration des conditions rglementaires,
institutionnelles et politiques qui peuvent favoriser le passage
des activits et structures relevant du formel pour ses acteurs qui
en ont le potentiel et les motivations.
Bien que les thses de lconomie solidaire soient plus proches
des ralits des pays couverts par notre tude, il serait peu
pertinent de limiter les actions du secteur informel comme
relevant uniquement et entirement de la survie face la crise.
Pour le secteur informel des TIC qui sappuie sur des
technologies modernes et valeur hautement ajoute pour
certaines dentre elles, il serait plus judicieux de procder une
caractrisation plus prcise de ses acteurs qui y voluent et de
leurs activits.
Ceci permettra de distinguer les activits qui relvent de
stratgies de survie et celles qui rpondent dautres
motivations et qui, pour certaines, relvent dun secteur
moderne non encore tudi ou sont plus en transition en
labsence de cadres et de politiques facilitant le passage des
activits plus formelles. Les leons tires du projet financ par le
CRDI sur linsertion des jeunes dans le march mergent des
tls services au Sngal ont montr lexistence chez de jeunes
diplms dun potentiel et dune volont dentreprendre de
faon durable, mais quils nont pas accs des financements,
des conseils stratgiques et un accompagnement en matire de
formation dans le domaine du management et du marketing.
44 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
En passant en revue les diffrentes conceptions du secteur
informel, il est loisible de constater quil ny a pas de consensus,
et que les critres varient dune dfinition lautre. Pour les
besoins de notre recherche, nous allons adopter celle propose
par le Professeur Abdoulaye Niang de lUniversit Gaston
Berger et qui nous parat la plus comprhensive : Le secteur
informel est lensemble des activits de commerce, de
production de biens, de services valeur marchande, de
pratiques associatives dpargne et de crdit, de transfert et de
distribution des ressources, toutes se menant une chelle plus
ou moins rduite, qui chappe partiellement ou totalement la
lgislation et/ou aux normes dominantes qui rgissent le champ
des activits et des pratiques de mme catgorie (Niang, 1996)
.
En appliquant cette conception au secteur des TIC, nous voulons
y inclure les activits dcrites ci-dessus et relatives aux
technologies numriques combinant les tlcommunications,
linformatique et laudiovisuel. Il est intressant de noter que
laudiovisuelle numrique offre des opportunits de gnration
de revenus et demplois des personnels de plus en plus
qualifis, notamment dans la production de documentaires.
Remarque : Il est toutefois ncessaire de noter que nous
excluons de notre champ de recherches les activits portant sur
des biens ou services illicites mme si nous nignorons pas leur
importance. Il sagit notamment des ventes de supports
audiovisuels dont les contenus sont pirats, la vente de logiciels
pirats, etc.
La question principale de recherche que nous posons alors est la
suivante :
Dans des conomies nationales o la part des TIC continue de
crotre, quels sont les caractristiques essentielles et le rle
conomique et social du secteur informel des TIC ?
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 45
Les questions spcifiques peuvent tre formules comme suit :
Caractrisation du secteur informel des TIC
- Que recouvre le secteur informel des TIC ? Quels sont les acteurs qui y voluent? Quelles sont les activits qui
y ont cours ? Sous quelles formes sont-elles exerces
(entrepreneur individuel ou entreprise)?
- Quelles sont les raisons qui expliquent lexpansion et le dynamisme du secteur ?
- Quel est le potentiel dinnovation du secteur ? Existe-t-il des innovations susceptibles de favoriser le passage
dactivits informelles vers le secteur formel ?
- Quelles sont les relations avec le secteur formel : complmentarit ou concurrence ?
Rle social et conomique
- Quelle est la vision des acteurs quant lavenir de leurs activits ?
- Quels rapports entretiennent-ils en tant quentrepreneurs avec leur environnement (institutions financires,
fournisseurs, clients, autres acteurs du secteur informel
ou formel)
- Quelle est la part relle du secteur dans la cration de la richesse nationale, demplois ou dactivits gnratrices
de revenus au profit de certaines catgories de la
population ? Cadre rglementaire et politique
- Quel est le rapport au formel (vision des acteurs) et aux impts ?
- Quelle est la place actuelle du secteur informel dans les politiques et stratgies TIC adoptes par les pays ?
- Quelles sont les mesures et/ou les politiques appropries dencadrement et daccompagnement de ses
acteurs qui veulent accrotre leurs activits et passer au
formel le cas chant ?
46 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
Les hypothses que nous cherchons vrifier travers cette
recherche sont ainsi formules :
- dans des conomies nationales o la part des TIC crot de faon continue, le secteur informel y joue un rle
dynamique et contribue au dveloppement conomique
et social ;
- lexistence dun cadre rglementaire et ladoption de mesures politiques appropries permettent de valoriser
le potentiel dont recle le secteur informel des TIC et
favoriser le passage de ses acteurs des activits et
structures dentrepreneuriat formelles.
2.3 Cadre thorique et mthodologie de recherche
Fondements thoriques
La littrature consacre lconomie informelle a connu une
volution rapide. En effet, depuis les annes 50, on est tour
tour pass des thories de la marginalisation du secteur informel
aux thories le valorisant. Quatre courants peuvent ainsi tre
identifis: les libraux, les marxistes, la thorie volutionniste et
la thorie de lconomie solidaire.
Les libraux vont dabord adopter une approche positive du
secteur informel en le mettant en rapport avec les travaux de
TODARO (1969) qui traitaient des problmes lis au chmage
urbain et la question de lexode rural. Sous cet angle, ils
considrent ce secteur comme une soupape de rechange qui
permet lindividu (venant des zones rurales) ne disposant de
suffisamment de moyens ni financiers, ni humains de pouvoir
sinsrer dans la sphre productive par cette porte quest le
secteur informel et dont les barrires lentre sont quasi-
inexistantes.
Par la suite pourtant, leur conception du secteur informel va
voluer. Tout en le considrant comme un potentiel de
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 47
production, les questions sur son devenir sont celles qui
retiennent lattention. Pour certains, ce secteur devrait voluer
vers une formalisation tant donn son potentiel et sa flexibilit.
Sa persistance dans les annes 80 va amener certains auteurs
accuser les Etats dtre les responsables de cette informalit des
micro-entreprises. Est de ceux-l DE SOTO (1987). Pour ce
dernier, ces micro-entreprises ne se formalisent pas cause des
nombreuses contraintes lies ladministration au nombre
desquelles on peut citer, la lourdeur administrative, la
corruption, les frais de formalisation, la pression fiscale, etc.
Plusieurs reformes ont t prises depuis par les diffrents Etats
sans pour autant que la tendance de cration des entreprises
informelles ne change. Elle se serait dailleurs renforce. Par
ailleurs, les tudes visant vrifier leffet de la pression fiscale
et des autres charges administratives sur les dterminants de la
formalisation ne confirment pas cette vision. En effet, selon
lOCDE (2001), la fiscalit comme contrainte la formalisation
napparait au mieux quau troisime rang des contraintes, les
autres tant lis labsence de financement, aux besoins
dencadrement, autrement dit, il faudrait plutt mieux que
moins dEtat. Dans cet ordre dide, les travaux de Kabor
(2005) portant sur les dterminants de la formalisation montrent
que la pression fiscale nest pas une variable dterminante dans
llan de formalisation de nos jours. En effet, toutes les
entreprises ou presque font face dune manire ou dune autre
des charges (taxes, patentes, contribution du secteur informel,
etc).
Ce renforcement du secteur informel au fil des annes va
amener certains auteurs sinterroger sur la vritable raison de
cette progression malgr la rpression des autorits fiscales dans
les annes 90 (cas de la Tunisie par exemple) Gauthier (2001).
Cest au sein des nouveaux dveloppements des thories de la
firme quon va trouver les lments de rponse tendant
montrer que ce renforcement sexplique surtout par les contextes
dans lequel ces micro-entreprises voluent, lerreur de base de
48 Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre
lanalyse librale selon ces auteurs tant de considrer une
rationalit substantive comme fondement de leurs analyses
plutt quune rationalit procdurale ou rationalit limite.
Emprunte la thorie volutionniste, la rationalit procdurale
prvoit des ajustements dans le comportement des agents
conomiques en fonction des informations disponibles et de
lvolution de leur environnement. Dans la thorie classique, la
firme est perue comme un ensemble statique dont la trajectoire,
parce qutablie partir dinformations quasi parfaites, est
parfaitement dfinie et finie. Par contre dans la thorie
volutionniste, lentreprise (assimile lentrepreneur), est un
organisme dynamique qui gre de linformation imparfaite. La
firme dans cette thorie se rvle ainsi diffrente de la bote
noire , digrant sans ''heurts'' linformation. Elle devient
vritablement un lment cyberntique, Hernandez et al (2003),
agenant de manire astucieuse les comptences
organisationnelles la recherche dun profit, non
ncessairement maximales, mais meilleures, Yildizoglu (2004).
Dans cette optique les auteurs, Hannan et Freeman (1985) cits
par Hernandez (1997), classent les entreprises en 3
catgories selon les ambitions des entrepreneurs: les
entrepreneurs traditionnels, ceux modernes et enfin les
entrepreneurs futuristes. Cette classification "contraste" une fois
de plus avec la thorie traditionnelle. Cette classification prend
en compte le temps donc le contexte et lambition qui devrait
guider les choix stratgiques desdites entreprises. Pour ces
auteurs, lentrepreneur, tourn vers le pass, utilise la tradition
comme moteur de son action ; ancr dans le prsent, il use de
limitation comme moyen de suivre la mode ; ax vers le futur,
il sappuie sur linnovation comme vecteur davantages
stratgiques.
Cette grille danalyse conduit pouser la conception de Copans
(1996) pour qui lanalyse de lentreprise africaine doit tre
contextualise. En effet, selon lui ; lentreprise africaine
Dynamiques et rles conomique et social du secteur
informel des TIC en Afrique de lOuest et du Centre 49
serait donc entirement soumise aux rapports sociaux ambiants.
Cette recomposition complte, continue-t-il, produirait demble
une perversit structurelle interdisant toute gestion "rationnelle",
au sens classique du terme, de lespace entrepreneurial. Ainsi,
poursuit-il, les interrogations portant sur la formalisation et
laccumulation au sein du secteur informel conduisent tudier
les petits entrepreneurs dans une perspective aussi bien
conomique que sociologique. Dans cette optique, la thorie de
lconomie sociale et solidaire qui prend pour point dancrage
des activits dans le secteur informel les conditions de ncessit
et la communaut de destin des acteurs rend compte des
impratifs de ces activits.
Abondant dans le mme sens, Copans (1995) soutient que
lanalyse de lentreprise africaine doit tenir