1
UNIVERSITE LOUIS PASTEUR - STRASBOURG I
FACULTE DE CHIRURGIE DENTAIRE
Année 2011 N°39
THESE
Présentée pour le Diplôme d’Etat de Docteur en Chirurgie Dentaire
par
SCHOCH Pierrené le 17 janvier 1985, à Saverne
INTERETS DES « SERIOUS GAMES » DANS L’ENSEIGNEMENT
APPLICATION AUX URGENCES MEDICALES AU CABINET DENTAIRE
Président : Professeur A. FEKI
Assesseurs : Professeur A. BLOCH-ZUPAN
Docteur S. BAHI-GROSS
Docteur B. CALON
Docteur G. REYS
Monsieur P. PORTELLI
2
REMERCIEMENTS
3
A Monsieur le Professeur Ahmed FEKI, Président du jury,
Vous me faites le grand honneur d’avoir accepté la présidence de ce jury.
Permettez-moi en cette occasion de vous témoigner toute ma
reconnaissance pour la qualité de votre enseignement si précieux et mon
admiration pour l’étendue de votre expérience clinique.
Veuillez recevoir l’expression de ma profonde gratitude et le témoignage de
ma sincère considération.
4
A Madame le Professeur Agnès BLOCH-ZUPAN,
J’ai été très sensible à l’intérêt que vous avez spontanément exprimé en
acceptant de siéger au sein de ce jury.
Je tiens à vous remercier pour votre enthousiasme au moment de me confier
ce sujet.
Permettez-moi de vous témoigner ma grande reconnaissance pour votre
expérience, votre pédagogie, ainsi que votre grande disponibilité clinique
durant ces années d’études.
Veuillez recevoir l’expression de ma profonde estime.
5
A Madame le Docteur Sophie BAHI-GROSS,
Je tiens à vous remercier pour votre participation à mon jury de thèse.
C’est un honneur pour moi d’avoir pu profiter pendant ces études de votre grande expérience clinique et de votre énergie.
Permettez-moi de vous témoigner ma sincère reconnaissance pour tout votre investissement.
6
A Monsieur le Docteur Bartholomeus CALON,
Ce fut un grand plaisir pour moi de pouvoir travailler avec vous durant
l’élaboration de ce travail.
Vous avez tout de suite montré un intérêt profond pour tout ce qui touche à
la formation et un grand enthousiasme pour ce sujet, je vous en remercie.
Je vous suis très reconnaissant pour votre grande expérience clinique, dont
vous m’avez fait profiter avec tant de disponibilité et de bonne humeur.
Permettez-moi de vous témoigner ma sincère gratitude.
7
A Monsieur le Directeur Philippe PORTELLI,
Je vous remercie pour notre entrevue, certes de courte durée, mais au
combien enrichissante.
Je suis heureux d’avoir pu m’inspirer de votre passion pour l’enseignement
et la grande sagesse qui l’accompagne. Je suis très sensible à l’intérêt que
vous m’avez porté.
En vous remerciant de m’avoir aidé à percer certains mystères de la
pédagogie,
je voudrais vous faire part de ma sincère reconnaissance pour votre
participation à l’élaboration de ce travail.
8
A Monsieur le Docteur Guillaume REYS, Directeur de thèse,
Tout d’abord j’aimerai vous remercier pour la proposition de ce projet, aussi
original que passionnant. Cela a été un honneur de me le voir confier.
Ce fut une chance pour moi de bénéficier de votre soutient et de votre
dynamisme tout au long de ce travail.
Je vous exprime toute ma reconnaissance pour votre disponibilité et votre
efficacité qui m’ont permis de mener à bien ce projet.
Cette thèse est l’occasion pour moi de vous vous faire part de mon estime
pour votre forte implication dans la formation, de saluer la grande attention
que vous y portez, et d’admirer votre continuelle volonté d’innover.
Veuillez recevoir mes plus sincères remerciements.
9
A mes parents, pour les belles valeurs qu’ils m’ont inculqué, et pour m’avoir aidé dans ce travail.
A ma mère, qui m’a enseigné l’humanité et m’a toujours offert beaucoup d’affection.
A mon père, qui m’inspire la sagesse et le respect, pour sa sensibilité d’écoute.
A mon oncle Henri, pour m’avoir accueilli au sein de son cabinet, et avec qui je partage la vision humaine du métier. Pour toutes ces fabuleuses rencontres musicales que je savoure.
A ma grande sœur Caroline, qui m’a appris le voyage et l’humilité. Merci d’être là, c’est quand même mieux d’avoir grandis à deux.
A mon cousin Nicolas, pour tous ces moment sportifs privilégiés, indispensables pour garder la forme. Des petits déjeuners philosophiques aux débats d’opinion endiablés, il fait bon en ta compagnie.
A Guillaume, mon coloc’ de toujours, avec qui j’ai évolué pendant ces années, tu es un peu comme mon frère, pourvu que l’on puisse longtemps partager ces passions communes pour le sport, le voyage et la montagne.
A Philippe et Kiri, mes amis de « bon temps », pour toutes ces aventures qui nous rassemblent et me rappellent que d’autres vies existent que celle de dentiste.
A Iris et Steven, pour tous ces beaux moments passés en votre compagnie. Aujourd’hui vous êtes à l’autre bout du monde, mais qu’importe, on se retrouve toujours. Des sommets Alpins aux plages Guyanaises, que la nature reste longtemps notre terrain de jeu.
A Zazou, merci d’avoir pensé à moi, à tout bientôt…
A mes autres amis de promo, Alessandro, Alex, Matthieu, Julia, Cyril, Ben, Magali, pour ces séances de travaux pratiques mémorables, et toutes ces vacances, on repart au ski quand vous voulez !
A François, Vianney, et Vaudrey, pour toutes ces soirées épiques, ces idées de voyage, à l’assaut de la poudreuse ou de l’exotisme...que ça continue !
A Charlotte, pour la tendresse que tu m’apportes chaque jours, la passion et l’enthousiasme toujours exprimés. Merci pour ton soutien et tes encouragements au fil de ce travail.
A Thibald, Hugo, Jean-Sébastien, Louis, et les autres, que cette thèse soit l’occasion de penser à vous.
10
SOMMAIRE
.....................................................................................PREMIERE PARTIE : L’ENSEIGNEMENT 18L’ART DE TRANSMETTRE DES CONNAISSANCES : LA PÉDAGOGIE ........................................... 18
......................................................................................................Définitions 18.........................................................................................................................La pédagogie 18.........................................................................................................................La didactique 19
...........................................................................Les doctrines pédagogiques 19................................................................Qualité des modèles pédagogiques 20
LES DIFFERENTS MODELES D’APPRENTISSAGE [7, 8, ..........................................9] 21............................................La pédagogie magistrale : méthode transmissive 21
..........................................................................Le behaviorisme [8,9, 10,11] 22..............................................................La pédagogie constructiviste [7, 8, 9] 25
.............................................Quelle pédagogie pour les métiers de la santé ? 26.................La formation continue en odontologie : réalité actuelle [12, 13,14] 27
DES NOUVEAUX OUTILS AU SERVICE DE LA FORMATION [7, 15, 16, 17, 18, .....29] 29.........................................................................De nouveaux constats [7, 29] 29
.................................................................................................Le e-Learning 30Les Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement
.....................................................................................(TICE) [15, 18, 19, 36] 31.............................................................................................................Présentation [15, 36] 31
...........................................................................Espace Numérique de Travail (ENT) [19, 36] 31.....................................................................................................La situation à l’étranger 32
................................................................................................................Royaume-Uni 32.................................................................................................................Le Danemark 33
L’Espagne 33.................................................................................................................La France[36] 34
.......................................................................................Enseignements de cette étude 36............................................................................................................................La 3D : [16] 37
....................Apport de la 3D pour enseigner l’anatomie à la Faculté de Médecine de Lyon 37....................................................................................................Retours des professeurs 38
LES PLATEFORMES VIRTUELLES 3D DANS L’ACQUISITION ET L’ECHANGE DE .............................................................................................CONNAISSANCES 39
..........................................................................................................................Présentation 39.......................................................................Apport dans l’échange des connaissances [25] 40.......................................................................Les différents types d’informations véhiculées 41
............................................Les sites dédiés à l’éducation et la sensibilisation à la santé : 41..................................................................................................Les sites de soutien : [21] 42
..................................................................................Les sites dédiés à la formation : [21] 43.............................................................................................L’impérial College London 43
...................................................................................................Programme Play2Train 44..............................................................................................Medical Examiner's Office 44
Dental Life 45............................................................Les sites de marketing et de promotion de la santé 46
...........................................................................................Les sites dédiés à la recherche 46.............................................................................................................................Discussion 47
.............................................................................................................Retours d’expérience 47...................................................................................Une étude d’un séminaire interactif 47
..............................................................................................Case Western University [26] 48......................................................................................................Retour d’étudiants [27] 49
Résultats 50Discussion 51
................................................................................................................Limites et critiques 53.................................................................................................Limites d’ordre technique. 53
....................................................................................................Limites de compétences 53.......................................................................................De nouveaux outils, mais pour qui ? 54
.........................................................................................Les étudiants et les jeux vidéos 54...............................................................................Constat sur l’utilisation du numérique 55
11
DEUXIEME PARTIE : LE SERIOUS GAME (SG) AU SERVICE DES MÉTIERS DE LA ...................................................................................................................................................SANTE 58
DEFINITION ..........................................................................................................S 58..............................................Différence entre serious game et jeu vidéo [28] 58
.......................................................Détourner la fonction initiale d’un « jeu » 60..................................................................Différence SG et « simulation » [7]. 60
......................................................................Classification des Serious game 61..........................................................................................................................Le Gameplay 62
...........................................................................................................L’objectif pédagogique 62....................................................................................................Les domaines d’application 63
......................................Définir la place du SG dans la pédagogie multimédia 63...................................................................................................................Le jeu métaphore 63
.........................................................................................................L’exemple de Adibou 64INTÉRÊTS PÉDAGOGIQUE ..........................................................................................S 65
...................................................Une génération d’apprenants ouverts au jeu 66..........................................................Du professeur au médiateur [7p18, 34] 67
.........................................................................Dextérité visuelle et cérébrale 67.....................................................................Développement du sens critique 68
.......................................................................................Le facteur « plaisir » 68...................................................................L’expérimentation d’une montée en compétence 69
.............................................................Le sentiment d’autonomie totale dans la progression 69................................................................................La qualité de relation aux autres joueurs 70
......................................................................Le joueur et le cycle d’expertise 70.......................................................................................Le rapport à l’erreur 71
..................................................L’information « Just in time » (à la demande) 71......................................................................................Le mode d’évaluation 72
.........................................Un mode d’apprentissage « ouvert » et collaboratif 73RÈGLES D’ÉLABORATION ET D’ÉVALUATION .................................................................... 74
...............S’appuyer sur une vision constructiviste de l’apprentissage [7p131] 74.................................Le modèle mental ou représentation sémantique [7, 46] 75
..........................................................................................Définir les besoins 76
...............................................................................................................A quoi sert le projet 77........................................................................................................A qui d’adresse le projet 77
.................................................Quel type de gameplay pour quel type de formation [7p182] 77.............................Passer des objectifs pédagogiques (serious) au JEU (game) 78
.................................................................................................................Analyse du corpus 79..................................................................................................Caractérisation des données 79
.....................................................................Connaissances factuelles et/ou déclaratives : 79............................................................................................Connaissances procédurales : 79
...................................................................................................Connaissances expertes : 79REVUE DE LITTÉRATURE DES SG DANS LA SANTÉ [3P ..................................................83] 82
...................................................................................................................Message éducatif 82
...................................................................................................................- Re-Mission : 82........................................................................................................................- Fatworld : 82
..........................................................................................................................- Pulse !! : 83................................................................................................- Hospital Waste Disposal : 83
..............................................................................................................- Triage training : 83.................................................................................................................Message informatif 83
..................................................................................................................Message persuasif 84............................................................................................................- Histoire de dent : 84
........................................................................................................- Campto ou Multaq : 85............................................................................................................Entraînement cérébral 85...........................................................................................................Entraînement physique 86
.................................................................................................................- Flower for all : 87RETOURS D’EXPÉRIENCE ............................................................................................ 87
.........................................................................................Triage training [50] 88................................................................................................................................Résultats 88
...........................................................................................................................Discussion : 89
12
..............................................................................................Pulse !! [48, 49] 89........................................................................................................MicroSim 92...............................................................................................................................Résultats: 92
............................................................................................................................Remarque : 92.........................Etude sur la Réanimation Cardio-PULMONAIRE (RCP) virtuelle 93
.................................................................................................................Résultats apportés 93....................................................................................................................Limite de l’étude 94
TROISIEME PARTIE : MISE EN APPLICATION ET EXEMPLE CONCRET, LA ....................................CONCEPTION D’UN SERIOUS GAME AU SEIN DE DENTAL LIFE 96
BUT DU PROJET PÉDAGOGIQUE .................................................................................... 96..................................................................................Une vision pragmatique 96.................................................................................Créer des automatismes 96
.............................................Instaurer un climat d’apprentissage divertissant 97................................................................................Favoriser la « rencontre » 97
..................................................................Proposer une pédagogie moderne 97..............................................................Vers une formation « à la demande » 97
SITUATIONS THÉORIQUES .......................................................................................... 98.................................................Syndrome coronarien/ Infarctus du myocarde 98
........................................................................................................Manifestations cliniques 98.....................................................................................................................Conduite à tenir 99
.....................................................................................Choc anaphylactique 101.......................................................................................Les manifestations cliniques sont : 101
.................................................................................................................Conduite à tenir : 101.............................................................................................................................Evolution 101
.......................................................................................................L’asthme 104.........................................................................................Conduite à tenir en cas de crise : 104
...........................................................................................................................Evolution : 105.................................................................................................En cas d’asthme aigu grave: 105
................................................Obstruction des Voies aériennes Supérieures 107...............................................................................................Cas de l’obstruction partielle 107
..............................................................................................................Conduite à tenir 107..............................................................................................Cas de l’obstruction complète 107
..............................................................................................................Conduite à tenir 107.......................................................................................................Epilepsie 110
............................................................Manifestations cliniques du patient sujet à une crise 110...................................................................................................................Conduite à tenir 110
........................................................................................................Etat de mal épileptique 111...............................................................................Emphysème sous cutané 113
...................................................................................................................Signes cliniques 113
...................................................................................................................Conduite à tenir 113....................................................................................................................Complications : 113
...............................................................................Malaise hypoglycémique 116.................................................................................................................Signes cliniques : 116
...................................................................................................................Conduite à tenir 116RÉSULTATS.......................................................................................................... 119
...................................................................................................Description 119..................................................................................................................Arrivée sur l’Ile : 120
..............................................................................................................Découverte d’Ivoire 120...................................................................................................Structure du serious game 121
...........................................................................................................................Discussion 124
..................................................................................................................................CONCLUSION 126...........................................................................................RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 129
................................................................................................................................WEBOGRAPHIE 133
13
14
INTRODUCTION
La survenue d’une urgence médicale au cabinet dentaire est un évènement
rare.
Pour cette même raison, c’est une situation stressante exigeant une parfaite
connaissance de la part du praticien.
Comment y préparer au mieux les professionnels « autonomes » comme les
chirurgiens dentistes pour qu’ils puissent agir de manière éclairée, et quels
types de formation vont permettre une gestion optimale de l’urgence et
réduire au maximum le risque de séquelles pour les patients face à une telle
situation ?
Actuellement, les attestations de formation aux gestes et soins d’urgence
(AFGSU 1 et 2), effectuées pendant le cursus universitaire et réactualisées
tous les 4 ans valident cette compétence.
On peut alors se demander ce qu’il advient des connaissances une fois la
formation achevée, pendant ces longues années sans entraînement.
Cette formation traditionnelle suffit-elle ou peut on faire plus ?
En complément des séances de formation continue aux soins d’urgence,
certes de qualité, mais coûteuses en temps et en moyens, avons nous à notre
disposition des outils différents qui répondent à la problématique d’un
enseignement durable ?
C’est le sujet de ce travail, que nous aborderons en trois parties.
Dans la première partie, pour comprendre l’intérêt du « serious game » ou
« jeu sérieux » dans le paysage éducatif, on tentera de montrer en quoi
l’enseignement est évolutif dans le temps, ou comment la société par
plusieurs aspects, influence ses propres modes d’éducation.
15
On décrira ensuite la place des environnements virtuels 3D et leurs attributs
(dont fait partie le serious game) dans l’enseignement actuel et notamment
dans les métiers de la santé.
Enfin nous ferons un rapide bilan de la situation actuelle de la formation
continue en odontologie destinée aux urgences médicales.
Dans une seconde partie, il sera question du serious game ou « jeu sérieux »
en tant que tel, un outil numérique novateur dont on dégagera, après l’avoir
décrit, les principaux atouts pédagogiques ainsi que certaines règles
d’élaboration.
Enfin dans la troisième partie, plus pratique, on créera des scénarios de mise
en situation d’urgence, utilisés dans le processus d’élaboration d’un serious
game, et on engagera une discussion concernant l’impact d’un tel
programme informatique sur la formation des chirurgiens dentistes.
16
PREMIERE PARTIE
L’ENSEIGNEMENT
17
18
PREMIERE PARTIE : L’ENSEIGNEMENT
Comment transmettre au mieux un savoir pour qu’il soit compris, appris et
retenu par le plus grand nombre ?
Il ne semble pas y avoir de réponse unique à cette question, tant les
populations apprenantes et enseignantes ainsi que les contextes éducatifs
sont variables.
Tous les professionnels de l’enseignement se la posent néanmoins et une
science s’y consacre : la pédagogie
I.L’ART DE TRANSMETTRE DES CONNAISSANCES : LA PÉDAGOGIE
I.1 DÉFINITIONS
Lorsqu’on souhaite créer un nouveau moyen d’enseigner, comme le Serious
Game, on va chercher à prévoir son impact sur l’apprenant, et ce que l’on en
attend comme évolution dans l’apprentissage, c’est le projet pédagogique.
Définissons d’abord quelques termes :
I.1.1 La pédagogie
En cherchant dans le dictionnaire Larousse, on trouve la définition suivante :
pédagogie « science de l’éducation ». [1]
Beaucoup d’auteurs à travers les époques lui ont attribué des définitions
variées,
parmi lesquelles, celle d’Emile Durkheim:
Pédagogie « Réflexion appliquée aussi méthodiquement que possible aux
choses de l’éducation ».[2]
19
I.1.2 La didactique
La didactique se définit comme « l’étude des questions que posent
l'enseignement et l'acquisition des connaissances », dans différents
domaines et matières « spécifiques » auxquelles elle se rattache. [3]
Pour Philippe PORTELLI, Directeur des Usages du Numérique à l’Université de
Strasbourg, la didactique correspond à « la structuration des étapes d’un
cours et la gestion des outils utilisés pour le parcours d’apprentissage.»
La didactique va correspondre à l’agencement stratégique des différents
supports écrits, imagés, vidéos, voulu par le pédagogue pour transmettre de
façon appropriée des connaissances spécifiques.
D’autre part, toujours selon Philippe PORTELLI, la pédagogie concerne plus la
prise en charge de la dimension humaine dans l’enseignement (gestion des
interactions directes enseignants - apprenants). [29]
La didactique faisant partie intégrante de la pédagogie au sens large, et pour
simplifier les propos, on parlera par la suite uniquement de pédagogie, par
abus de langage, recouvrant les deux significations.
Selon les auteurs et les époques on distingue différentes doctrines, ou
courants de pensées pédagogiques.
I.2 LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES
Les doctrines pédagogiques s’inscrivent dans un processus dynamique ; il
n’existe pas UNE UNIQUE pédagogie valable, ni UNE pédagogie
intemporelle ; elles sont liées à une période historique donnée, dans une
conjoncture donnée, et évoluent sans cesse.
Différentes doctrines se détachent selon les périodes historiques avec des
courants majoritaires tels que :
- la pédagogie traditionnelle ou transmissive dont Comenius passe pour
être le fondateur (La Grande Didactique, 1657) [5],
- la pédagogie négative prônée par J-J Rousseau (Emile, 1762) mettant
l’accent sur la recherche du développement spontané de l’apprenant,
20
où l’environnement n’exercerait pas de pression sur l’enfant mais où
l’enfant viendrait par lui même à corriger ses erreurs par nécessité et
instinct de survie [6] ;
- la pédagogie active portée par Célestin Freinet (1896-1966) et Jean
Piaget (1896-1980), mettant l’individu au cœur de l’apprentissage en
tant qu’acteur de son éducation[4] ; la pédagogie de Rudolph Steiner
(1919) cherchant un équilibre entre l’intellectuel, le manuel,
l’artistique nécessaire au juste développement de l’enfant…
La liste est longue, chaque pédagogue apportant sa propre définition ou
presque, mais avec toujours le même leitmotiv : transmettre des savoirs de la
meilleure façon à un sujet apprenant.
I.3 QUALITÉ DES MODÈLES PÉDAGOGIQUES
Chaque modèle pédagogique possède une part de présupposé concernant
les mécanismes cérébraux mobilisés chez l’apprenant dans l’accès aux
connaissances, et sur l’élaboration d’un savoir ou d’une compétence dans le
cerveau.
Chaque modèle s’appuie sur des postulats concernant l’état cognitif initial, la
plasticité cérébrale de l’apprenant, et sur une bonne part d’hypothèses
comportementales (non scientifiquement prouvées) qui le légitimeraient.
Ces modèles se doivent d’être en permanence en évolution et remis en
question, en amélioration, en raison du type d’information, de la quantité et
de la complexité des savoirs utilisés, transmis et exigés par la société
moderne.[7]
Une connaissance est acquise, quand elle peut être réutilisée pour la
résolution d’un problème concret, même longtemps après son
apprentissage.
Pour cela, il faut les moyens d’apprendre qui soient les plus harmonieux, les
plus efficaces, pour être au final les plus « engrammés » possibles.
21
Par exemple, apprendre une liste par cœur va permettre de la réciter à la
perfection dans un délai court, mais pas sur le long terme. Par contre si les
éléments de cette liste sont conceptualisés, mis en relation les uns avec les
autres, la connaissance a plus de chance d’être mobilisable dans le temps.
On peut se poser la question : par quel moyen pédagogique va-t-on le
mieux établir une connaissance durable dans le cerveau de l’apprenant ?
Le modèle pédagogique transmissif est prédominant dans notre système
éducatif français tant dans le secondaire que dans les études supérieures,
mais détaillons également les autres principaux modes d’apprentissage.[7]
II.LES DIFFERENTS MODELES D’APPRENTISSAGE [7, 8, 9]
II.1 LA PÉDAGOGIE MAGISTRALE : MÉTHODE TRANSMISSIVE
C’est une approche centrée sur le « maître », qui détient le savoir ;
l’apprenant est un verre vide qui a comme principale fonction de mémoriser
les connaissances transmises. Simple mécanique d’enregistrement, son
exemple extrême est le cours de faculté en amphithéâtre. [8]
Elle part du principe que la transmission se fait sur un cerveau « vierge »,
disponible, et considère l’acquisition comme un empilement de savoirs
successifs.
Elle nécessite un «émetteur », au discours unilatéral, et un « récepteur » :
c’est le modèle de la salle de classe. [7 p.125]
Dans notre système éducatif principal, où ce modèle transmissif n’a plus à
faire ses preuves, les modalités d’évaluation des élèves se font surtout sur la
quantité d’informations mémorisées, sans doute par nécessité, notamment
dans les études supérieures.
On peut alors se demander ce que deviennent ces connaissances une fois
« déposées sur la feuille d’examen ».
22
Les interrogations sont nombreuses : manque d’action de la part de
l’apprenant ? Répétition de la pensée de quelqu’un qui a sans doute une
autre logique ?
D’autre part, si l’on reprend l’exemple du cours en amphithéâtre, on risque
de passer à côté des lacunes des élèves qui n’ont dans ce système que peu
l’occasion de les exprimer. Entre croire et avoir compris, ne pas oser
demander du fait de l’effet de nombre, ou encore par manque de temps, les
raisons sont nombreuses de passer à côté de la compréhension unanime et
intégrale.
L’idéal serait de pouvoir appliquer ces connaissances à la résolution de
problèmes pratiques, et d’utiliser les notions apprises pour la réflexion, pour
garantir l’entière compréhension de ce qui est enseigné.
II.2 LE BEHAVIORISME [8,9, 10,11]
C’est une théorie éducative mettant l’accent sur le comportement observable.
Elle part du principe que les modèles mentaux individuels sont inaccessibles
par le pédagogue. Par contre ils peuvent être modelés, retravaillés par des
stimuli externes bien pensés.
Selon cette approche, c’est l’environnement qui « conditionne » les conduites
humaines. Ce modèle ne nie pas la réalité de l’individu, ni son
fonctionnement interne, mais n’en tient pas compte dans un schéma
d’apprentissage.[8]
Selon Skinner [11], les comportements qui se fixent sont les comportements
qui permettent de réussir ce que souhaite le sujet, donc renforcés
positivement (par une récompense).
Après avoir décrit le conditionnement opérant chez les souris, Skinner s’est
intéressé à la pédagogie. Il a créé la machine à enseigner : l’élève est mis
face à des questions auxquelles il doit répondre dans des cases prévues à cet
effet ; puis il actionne une manette pour voir immédiatement s’il a bien
23
répondu, ce qui va jouer le rôle de renforcement positif ou négatif de la
réponse.[11]
Au niveau de l’enseignement, cela se traduit par un apprentissage fondé sur
une progression par paliers, avec des petits exercices effectués de
nombreuses fois, faisant pas à pas évoluer l’élève.
Un cours global est découpé en nombreux sous objectifs, au cours desquels
l’élève passe de la connaissance initiale à la connaissance finale.
La pédagogie béhavioriste est fondée sur l’entraînement à haute dose avec
des « renforcements positifs » (si la réponse est juste) et des « renforcements
négatifs » (menant à l’abandon d’une réponse fausse par l’élève).
Dans ce modèle, l’agent de renforcement tient une place centrale : lorsqu’il
est positif, sa représentation favorise un comportement (compliments,
louanges, bons points), il est facilitateur d’apprentissage. A l’opposé, s’il est
négatif (blâme, malus), c’est sa suppression qui favorise ce comportement.
[10]
C’est un principe utilisé par exemple dans l’enseignement assisté par
ordinateur (EAO),
et de certains logiciels éducatifs tel Adibou® [7 p126].
Dans cet exemple (Figure 1), on apprend à trier des déchets, et à les placer
dans les poubelles adéquates. Si l’on se trompe, une voix off le signale et
l’objet reprend sa place initiale. Par contre s’il s’agit du bon emplacement,
une animation vocale enthousiaste félicite le joueur, et place le déchet
directement dans la poubelle concernée, ce qui renforce l’association d’idée
canette/métal. On recommence jusqu’ à ce que tous les objets trouvent leur
juste place. En comparaison avec une simple question, « dans quelle poubelle
se jette une canette ? », on peut concevoir le caractère motivant de cette
approche.
24
Figure 1 : Adibou (Source : www.adibou.com/)
Avantages :
C’est une pédagogie qui permet un bon suivi de l’évolution de l’élève, qui
permet de s’adapter à son rythme (à l’inverse d’un cours en classe où
certains élèves peuvent être « lâchés »).
Inconvénients :
Scinder les problèmes ne permet pas de voir si l’apprenant possède une
vision d’ensemble. Savoir passer de A à B, puis de B à C ne permet pas
nécessairement de savoir passer directement de A à C… [9]
Ce modèle ne tient pas compte des représentations initiales internes de
l’individu, qui peuvent ressurgir et parasiter la réflexion face à des
problèmes plus complexes.
En ne cherchant aucunement à s’adapter au « terrain » mental préexistant,
cette pédagogie va en quelque sorte déconstruire des représentations
mentales et les remplacer par d’autres. [7 p.126]
La théorie suivante dite « pédagogie de la construction » fut développée,
entre autre, par Jean Piaget dans les années 1920, en réaction au
behaviorisme qui d’après lui limitait trop l’apprentissage à l’association
stimulus - réponse. [7p.126]
25
II.3 LA PÉDAGOGIE CONSTRUCTIVISTE [7, 8, 9]
Selon cette théorie, les représentations internes initiales des élèves
interviennent dans la construction du savoir.
Ces mêmes représentations, modifiées au contact de la nouvelle
connaissance et mises en relation avec elle, vont participer à l’acquisition de
nouveaux concepts mentaux.
C’est un apprentissage dit « actif » qui met en avant l’autonomie de
l’apprenant, qui va accéder aux connaissances par des besoins spontanés
d’apprendre.
Je cite « En bref, beaucoup de chercheurs s’entendent à dire que :
- « apprendre » n’est pas le résultat d’empreintes que laisseraient des
stimulations sensorielles dans l’esprit de l’élève à la manière de la
lumière sur la pellicule photographique (appartenant plutôt au modèle
transmissif).
- « apprendre » n’est pas non plus uniquement le résultat d’un
conditionnement opérant, dû à l’environnement (pédagogie
behavioriste).
- « apprendre » procède d’abord de l’activité d’un sujet, sa capacité
d’action étant effective ou symbolique, matérielle ou verbale, et cette
capacité d’action procède de représentations mentales
personnelles. » (constructivisme). [7 p.127]
L’acquisition de nouveaux savoirs ne se fait pas par empilement, effaçant
toute connaissance antérieure, mais par façonnage de celle-ci.
L’apprentissage selon la théorie constructiviste naît d’une transformation des
informations reçues par l’apprenant, en fonction de son expérience et de ses
connaissances préalables.
Qu’en est-il concernant les métiers de la santé ?
26
II.4 QUELLE PÉDAGOGIE POUR LES MÉTIERS DE LA SANTÉ ?
Actuellement, l’apprentissage des métiers de la santé passe par le circuit des
facultés, et donc tout d’abord par un modèle transmissif que proposent les
cours magistraux.
Lorsque l’on avance dans le cursus, si les connaissances factuelles
nécessaires (vérités scientifiques établies, notions à mémoriser sans
représentation spécifique, faisant surtout travailler la mémoire) sont
dispensées de cette façon, des capacités manuelles spécifiques et des
concepts scientifiques plus complexes viennent s’y ajouter.
Ces derniers nécessitent une habileté cognitive d’analyse, de critique, de
mise en relation (abordé les parties suivantes), et en plus de cela, des
facultés d’adaptation et de réactivité à acquérir sur fond de savoir théorique.
Tous ces éléments ne sont pas aisés à transmettre par l’intermédiaire de
cours en amphithéâtre, et même, si l’on considère la mise en situation
clinique on constate :
- Un manque de cas relatif,
- La confrontation à des problèmes éthiques,
- Un nombre d’étudiants élevé, en relation au nombre de cas,
- Une diversité clinique non exhaustive de ce qu’on peut rencontrer dans
la vie professionnelle, du moins inégale selon les étudiants.
Comment s’assurer que les notions sont acquises, que les apprenants
peuvent répondre à une situation aléatoire, alors que bon nombre d’entre
eux n’a pu bénéficier d’un véritable entraînement ?
Manipuler des notions, retravailler les connaissances de façon dynamique et
les mettre en relation pour être préparé à agir dans une situation concrète :
un défi posé à l’enseignement dans les études supérieures, notamment dans
27
le domaine de la santé où les données techniques et intellectuelles sont de
plus en plus complexes.
De nouveaux outils pédagogiques apparaissent depuis de nombreuses
années, notamment via le développement de l’informatique et du Web,
cherchant à performer la formation traditionnelle qui doit s’adapter aux
nouvelles données (recherche d’économie financière, complexité des notions
à maîtriser, et raisons d’éthique).
II.5 LA FORMATION CONTINUE EN ODONTOLOGIE : RÉALITÉ
ACTUELLE [12, 13,14]
Nous avons effectué une enquête auprès des organismes de formation
continue en odontologie, sur les différentes formations attribuées aux
Urgences médicales au cabinet dentaire à travers l’hexagone, sur la période
2008/2011.
Description de l’étude : j’ai recueilli auprès du conseil de l’Ordre des
Chirurgiens Dentistes (ONCD) les coordonnées des différents Organismes
français de formation continue[14].
Un mail a ensuite été envoyé à la plupart des organismes susceptibles de
dispenser une formation continue sur le thème des Urgences médicales au
cabinet dentaire en leur demandant le but de la formation ainsi que le
support pédagogique utilisé.
Sur 51 organismes interrogés, seuls 14 ont répondu, dont 7 par l’affirmative.
Voici les observations de l’étude :
En ce qui concerne la préparation aux Urgences médicales au cabinet
dentaire elle semble être actuellement essentiellement assurée par des
formations AFGSU (Attestation de Formation aux Gestes et Soins d’Urgence)
28
niveau 1 et 2, obligatoires pour les professionnels qui sont inscrits dans la
quatrième partie du code de la santé publique (le chirurgien dentiste en fait
partie) selon le journal officiel, arrêté du 3 mars 2006. Elles sont dispensées
par divers organismes de Formation continue via les facultés de médecine et
les praticiens hospitaliers. [12,13]
Valables 4 ans ces formations nécessitent des remises à niveau.
La formation AFGSU 1 et 2 (figure 2) fait également partie du cursus des
étudiants en chirurgie dentaire.
Figure 2: Formation AFGSU 2 à Strasbourg (Source Dr VALLE, Chirurgien dentiste)
Par ailleurs, on dénombre en plus de ces formations AFGSU, quelques
conférences internet dédiées à ce thème, via des sites internet comme
ZeDental.com ® (www.zedental.com/formations/fiche.cfm?
i=ZEDE00000000986 ) ou Dentalespace ® (www.dentalespace.com/dentiste/
formation/video-352.htm),ou encore de conférences retransmises sur des
univers virtuels 3D (Dr CALON/Conférence au symposium 2009 du CAICB)
vouées à mettre l’accent sur les Urgence spécifiques à la pratique dentaire.
On remarque que la formation aux urgences médicales survenant
spécifiquement au sein du cabinet dentaire est assez peu développée, au
profit d’une formation plus généraliste (AFGSU).
Si des initiatives locales s’intéressent à l’urgence médicale plus
caractéristique de notre profession, elle sont tout de même plutôt rares, au
29
regard de la préparation que réclame une situation de stress, comme un
patient en détresse vitale, surtout dans notre pratique professionnelle isolée.
Comment faire évoluer ces systèmes de formation traditionnelle, comment
les compléter, les potentialiser, rester dans une perpétuelle évolution
pédagogique ?
L’outil informatique peut-il représenter cette évolution, et apporter du
progrès pour les formateurs ? Pour les apprenants ?
Trouver des éléments de réponse représente tout l’enjeu des parties qui
suivent.
III.DES NOUVEAUX OUTILS AU SERVICE DE LA FORMATION [7, 15,
16, 17, 18, 29]
On va d’abord expliquer les raisons de l’apparition de ces nouveaux outils
numériques au sein de l’enseignement avant d’en décrire certains.
III.1 DE NOUVEAUX CONSTATS [7, 29]
« Nous assistons de nos jours à une réelle mutation de la demande des
apprenants en matière de produits de formation, et cette demande est en
rapport direct avec l’évolution de la société. Elle témoigne d’un besoin urgent
de combler un déséquilibre de plus en plus marqué entre une société
multimédia en pleine mutation et des modalités éducatives encore attachées
à des processus académiques de transfert de connaissance. » [7 p.21]
Dans une société moderne où internet est un des vecteurs principaux du
développement intellectuel de chacun, l’outil multimédia devrait faire partie
intégrante de l’acquisition de nouvelles connaissances.
En plus de la présence d’un professeur devant une assistance, de la lecture
de livres ou d’articles, d’autres moyens d’apprendre sont désormais
accessibles à tous.
30
L’observation anthropologique de la société fait remarquer une évolution
dans l’univers de la formation ; les populations étudiantes sont de plus en
plus mobiles, les formations spécifiques les amenant parfois loin de leur
famille, les charges périscolaires augmentent (tarifs des technologies comme
internet, le prix des logements souvent loin des parents, les frais de
déplacements) et par conséquent les étudiants travaillent de plus en plus en
parallèle de leur formation. [29]
Ces emplois du temps chargés imposent à l’université un nouveau défi : être
flexible et adaptable. Cette transformation devient progressivement possible
avec le numérique.
L’éventail des supports d’enseignement est de plus en plus large, et permet
donc de nouvelles possibilités pédagogiques.
III.2 LE E-LEARNING
Dans les pays anglo-saxons, ce terme désigne la formation à distance.
La définition française est beaucoup plus vaste, puisque étymologiquement,
e-learning signifie apprendre par des moyens électroniques (allant ainsi du
cours par correspondance, aux plateformes internet, en passant par le simple
CD-Rom).
Par conséquent, vu l’étendue du sujet, nous ne rentrerons pas dans le
détail .[29]
Cependant, il faut savoir que dans un projet pédagogique, le e-Learning peut
avoir différentes formes ou fonctions ; il peut correspondre par exemple à la
simple médiatisation des contenus de cours pour les rendre accessibles au
plus grand nombre, mais peut également faire partie d’une réflexion plus
avancée, par assemblage de deux types d’enseignement : en « présentiel » et
31
en « distanciel » (un professeur qui décide de faire un cours magistral et de
suivre un exercice en ligne par exemple).
Le principe e-Learning fait alors partie d’une stratégie didactique bien
réfléchie de la part du pédagogue.
III.3 LES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA
COMMUNICATION POUR L’ENSEIGNEMENT (TICE) [15, 18, 19,
36]
III.3.1Présentation [15, 36]
Le terme TICE recouvre les outils et produits numériques pouvant être
utilisés dans le cadre de l’éducation et de l’enseignement. Sans entrer dans
les détails, depuis la deuxième moitié du XXe siècles, mais surtout depuis les
années 2000, le monde de la formation tente de se les approprier.
En septembre 1997, la Direction de l’Information Scientifique et des
technologies Nouvelles du Ministère de l’Education Nationale estimait que
« l’Ecole ne peut rester à l’écart de ces évolutions […] de la société de
l’information ». [15]
En enrichissant et en diversifiant les supports et les pratiques pédagogiques
dans toutes les disciplines, les TICE permettent de mieux prendre en compte
l'hétérogénéité des élèves et d'individualiser les apprentissages. Elles
permettent également de mieux assurer la continuité pédagogique en dehors
de la classe.[36]
A l’intérieur même de ce concept de TICE, on trouve une multitude de
dénominations, pour un grand nombre de supports au service de
l’enseignement dans une multitude de domaines.
III.3.2Espace Numérique de Travail (ENT) [19, 36]
C’est la traduction française d’un concept d’origine anglo-saxonne, le VLE
(Virtual Learning Environnement).
32
Il se définit comme un « terme générique qui décrit un large éventail de
systèmes TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) utilisés
pour fournir des services d’apprentissage et des services d’assistance en
éducation.
Il doit combiner des outils de communication et de collaboration, sécuriser
un espace de travail en ligne individuel, fournir à l’enseignant des outils pour
pouvoir gérer et adapter les contenus aux besoins des utilisateurs, garantir le
suivi des progrès des élèves et offrir un accès partout et à n’importe quel
moment. »
III.3.2.1La situation à l’étranger
D’après un rapport d’étude de 2010 auprès d’experts du Royaume Uni, du
Danemark et de l’Espagne, de manière générale et quel que soit le pays, ces
plateformes servent à l’heure actuelle à la communication entre enseignants,
entre parents et enseignants, à la gestion et à l’organisation de la vie scolaire
mais moins à de véritables usages pédagogiques.[19]
III.3.2.1.1Royaume-Uni
« De grands moyens et un développement coordonné »
Le développement des TIC au niveau national est depuis longtemps une
grande priorité. Ces dernières années, les infrastructures, la connectivité et
les contenus ont beaucoup évolué, avec de nombreux enseignants faisant
appel à ces technologies, mais rencontrant des difficultés à adapter les
contenus pédagogiques.
Malgré le ralentissement du développement des TIC du à la décentralisation
gouvernementale de 1999 qui laisse l’éducation à chaque assemblée locale,
plusieurs initiatives gouvernementales ont été lancées, vouées « à améliorer
les résultats des élèves et offrir une manière d’apprendre plus motivante, en
matière de contenus et méthodes ». [19]
33
Parmi elles, on peut citer la BECTA (British Educational Communications and
Technology Agency), qui est l’agence gouvernementale dédiée à l’intégration
des TICE dans le système éducatif, The National Grid for Learning (réseau
national d’apprentissage), Harnessing Technology : Transforming Learning
and Children’s Service (avec comme objectifs principaux de transformer
l’enseignement et l’apprentissage, améliorer les résultats des élèves et
proposer une manière d’apprendre plus motivante).
III.3.2.1.2Le Danemark
« Une approche pragmatique axée sur la demande des enseignants »
Pays en pointe en matière de TIC en public et en privé, son système éducatif
y est largement ouvert.
Une agence nationale UNI-C de 1985 (Centre d’Education et de Recherche du
Ministère de l’Education Danois) à été crée à ce sujet.
Les plateformes virtuelles dans ce système nordique sont utilisées par 97%
des établissements.
Mais une fois encore, elles le sont plus par les enseignants que par les
étudiants, dont elles doivent aujourd’hui chercher à susciter l’intérêt en
privilégiant les fonctions pédagogiques.
Parmi les initiatives Danoises on peut souligner celle de 2007 : Stratégie
nationale pour l’apprentissage soutenu par les TIC concernant la flexibilité de
l’enseignement en temps et en espace.
III.3.2.1.3L’Espagne
« Approches régionales, fondées sur les logiciels libres »
En Espagne, l’accent est mis sur la formation des enseignants à l’utilisation
des TICE, et sur les ressources pédagogiques digitales.
De grandes initiatives débutant dans les années 2000 concernent internet en
salle de classe, un programme visant à développer une infrastructure
technologique, et à favoriser l’insertion numérique dans le scolaire, mais
34
également à former les enseignants et assurer le suivi des initiatives dans les
écoles.
Il n’y pas en Espagne, d’étude concrète sur les moyens mis en place comme
dans les deux autres pays, mais l’impression des responsables est que
l’usage pédagogique se développe, même s’il est progressif.
III.3.2.1.4La France[36]
Comme il est difficile de trouver un rapport national sur l’utilisation des TICE,
nous allons donc nous intéresser aux initiatives ministérielles et les plans de
développement des TICE depuis 2006.
Les grandes initiatives françaises [36]:
2007 : Mise en place du B2i (brevet informatique et internet) au collège et
lycée qui certifie de la formation des étudiants à l’utilisation maîtrisée et
raisonnée des ressources numériques et d’internet.
Mise en place du livret scolaire électronique destiné au suivi du parcours de
l’élève.
2009 : Une circulaire distribuée en début d’année insiste pour :
- Donner des chances de réussite à tous les élèves par le développement
de l’accès aux technologies TICE et leurs usages,
- Développer des ENT en priorité, en partenariat avec les collectivités
territoriales.
- Instaurer le cahier de texte électronique
- Etablir un plan « Ecoles numériques rurales », pour l’équipement de
5000 écoles de village de moins de 2000 habitants.
- Encourager le développement des TICE au service de la scolarisation
d’enfants en situation de handicap.
2010 :
- Généralisation des ENT à tous les établissements scolaires, mettant
l’accent sur le développement des ressources pédagogiques et le rôle
prépondérant du chef d’établissement.
- Amélioration de l’apprentissage des langues grâce au numérique
35
- Mise en place d’un plan de formation des enseignants à l’utilisation des
TICE, initiative arrêtée en juin 2010, relayée par un programme
collaboratif :
- p@irformance: http://national.pairformance.education.fr/
Bien que ces initiatives semblent dynamiques et prometteuses, je n’ai pas
trouvé de rapport national sur la situation sur le terrain, en dehors de
témoignages individuels d’utilisation des TICE dans des expériences
pédagogiques isolées (exemple Farm Frenzy [32]).
Si l’on explore un ENT (par exemple celui de l’UDS) ce site propose :
- un suivi du parcours de l’étudiant (résultats d’examens, cursus)
- des informations sur l’organisation de l’Université
- l’accès via une bibliothèque numérique à de nombreuses ressources
documentaires et revues électroniques,
- des « podcasts » (fichiers audio ou vidéo consultables en différé via
internet) sur différents thèmes dans différentes filières (à noter que si
l’on recherche en chirurgie dentaire par exemple, il n’y a qu’une seule
référence, celle du Professeur Bloch-Zupan : cela signe un faible
développement de ces supports dans nos études de dentistes)
- la formation au C2i (certificat informatique et internet des études
supérieures) ou encore l’apprentissage de langues étrangères via
internet.
- l’accès aux Universités Numériques Thématiques (UNT) francophones,
destinées à mettre en commun des ressources émanant des différents
lieux de recherche et d’enseignement dans un même domaine (http://
www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/notice-1699).
Pour exemple, l’UNF3S (http://www.unf3s.org/) est l’UNT des Sciences de la
Santé et du Sport.
Dans cet historique concernant les initiatives françaises en matière de TICE
on sent une volonté (émanant plutôt du ministère et de la haute hiérarchie)
36
d’ « imposer » ces nouvelles technologies sans connaître l’avis de ceux qui
sont sensés les utiliser.
Pour Philippe PORTELLI, expert dans ce domaine, l’erreur serait de « faire
pression » sur le corps enseignant quand à l’utilisation des TICE, alors qu’il
serait plus habile d’en faire la promotion auprès des enseignants.
La venue des technologies numériques dans l’enseignement est inévitable
mais doit émaner de l’interaction « enseignant - apprenant ».
Elle se fera naturellement, dès lors que ces outils numériques montreront
leur « évidence pédagogique » dont seuls les enseignants et les étudiants du
terrain sont juges.
La place des instances supérieures et des ingénieurs à l’origine de ces outils
est de les soumettre au corps enseignant et de travailler en collaboration
avec eux ainsi que les élèves pour favoriser leur développement. [29]
III.3.2.1.5Enseignements de cette étude
Dans ces Pays Européens, on remarque que les plateformes de type ENT sont
surtout destinées à la gestion et à la communication mais trop peu à la
pédagogie.
L’évolution pourra venir d’initiatives ministérielles, mais également d’une
impulsion donnée par les enseignants et les élèves (qui représentent la
demande).
Pour en arriver là, le facteur de succès passe par un développement des ENT
qui doit se faire à la manière d’un processus pédagogique et non comme
vitrine technologique.
Partout il faut organiser le rôle des différents acteurs, créer progressivement
un accès facile aux ressources (voire même en salle de classe plus que dans
une salle dédiée, mettant l’outil numérique au centre de l’enseignement).
Il serait souhaitable d’agir sur les contenus, la qualité de la formation de
l’enseignant à son utilisation, et travailler la communication autour des TICE.
37
Ceci étant, les ressources que l’on retrouve au sein des ENT notamment, et
sur toutes autres plateformes Internet dédiées à l’enseignement vont
permettre de dégager un premier aspect important : le contenu est
disponible à tout moment, ce qui permet à l’apprenant de s’affranchir de la
notion de temps, d’espace, et de la présence physique du formateur. Cette
disponibilité intemporelle et répétitive de l’information, rendue possible par
l’outil internet, est un des avantages de l’enseignement dans un
environnement virtuel.
Les ressources pédagogiques existantes, qui alimentent ces espaces
d’apprentissage sont souvent crées par des ingénieurs non enseignants, puis
insérés dans un cours par le pédagogue lui même, qui juge alors de leur
intérêt et argumente leur utilisation.
III.3.3La 3D : [16]
Parmi les multiples ressources numériques disponibles, la 3D en est une qui
possède de nombreux atouts pour l’enseignement de la médecine.
III.3.3.1Apport de la 3D pour enseigner l’anatomie à la Faculté de Médecine de Lyon
L’anatomie est une discipline aux contenus abstraits dont l’assimilation par
les élèves représente un casse tête et de longues heures d’apprentissage.
L’émergence de la 3D dans l’enseignement de cette matière difficile facilite
grandement la tâche.
Nous nous appuyons sur une initiative de création numérique 3D support de
cours d’anatomie (figure3), présentée lors du CIUEN 2010 (Colloque
International de l’Université à l’Ere du Numérique) qui s’est tenu à
Strasbourg, et auquel nous avons assisté.
Cette initiative a été présentée par Christophe BATIER [16], responsable de la
recherche et du développement en e-Learning à l’Université Lyon 1 ©:
38
Figure 3 : Cours d’anatomie en 3D (Source http://anatomie3d.univ-lyon1.fr)
Selon les professeurs de l’Université de Lyon intégrant à leur enseignement
ce nouvel outil, l’abord de la matière est facilité par :
- L’utilisation d’images mentales au sein du cours est rendue possible (se
servir de l’image d’un objet concret pour en symboliser un autre ; par
exemple pour représenter un bassin humain, en partant d’une image
de bassine, sa représentation 3D permet de tirer l’étudiant vers une
représentation logique et aboutie) par un graphisme informatique
réaliste, et elles sont rendues modelables à souhait.
- La possession d’une image concrète (et non pas un dessin en 2D) dont
on peu faire le tour, rentrer dans les structures (figure3), ce qui
favorise une compréhension immédiate.
- La possible mise en ligne du contenu du cours sur une plateforme
numérique avec une évaluation des connaissances.
Cet outil utilisé dans ce cas en « présentiel » va pouvoir servir sur une
plateforme destinée à l’enseignement à distance, ou sur un ENT
(Espace Numérique de Travail).
III.3.3.2Retours des professeurs
Selon les professeurs en ayant usage, l’enseignement à l’aide de la 3D
possède plusieurs atouts :
39
- Une plus grande motivation de la part des apprenants, la 3D étant
plébiscitée à plus de 94% selon un panel de 500 étudiants.
- L’accès à l’information est simplifié car elle peut être scénarisée, une
démarche possible grâce au virtuel.
- La 3D aide l’enseignant à faire la démonstration car il possède une
grande maniabilité des structures (maniabilité des différents plans
osseux, musculaires, vasculo-nerveux)
III.4 LES PLATEFORMES VIRTUELLES 3D DANS L’ACQUISITION ET
L’ECHANGE DE CONNAISSANCES
III.4.1Présentation
« Les mondes virtuels sont en train de faire partie intégrante du paysage
technologique éducatif ».[25]
Il existe plusieurs mondes virtuels comme OpenSim®, Second Life®, Active
Worlds®, Blue Mars®[22].
Nous prendrons comme exemple Second Life® (SL), qui reste le plus utilisé,
et sur lequel porte la plupart des études trouvées.
Lancé en 2003, par la société Linden Lab ®, Second Life est un
environnement d’immersion en 3D dont l’aspect ressemble à celui de jeux
vidéo, mais dont la finalité serait plus axée sur la socialisation, l’interaction,
l’exploration, la construction.
Les résidents qui s’y téléportent, représentés par des avatars (apparence que
prend un internaute dans un univers virtuel), peuvent interagir avec un grand
nombre de personnes, dans des lieux virtuels très divers, et participer à des
activités individuelles et de groupe, des discussions, des moments de
distraction et de formation.
Il existe une communauté active d’éducation dans SL.
40
Plus de 300 collèges et universités ont construit des « lieux » ou sont
dispensés des cours et/ou des rencontres à but professionnel. [25]
III.4.2Apport dans l’échange des connaissances [25]
La plateforme SL possède un énorme potentiel comme environnement
d’apprentissage ; elle offre une grande souplesse d’interaction entre les
intervenants, un engagement intense du participant, la possibilité de mise au
point de scénarios immersifs rendus réalistes par l’utilisation de la 3D. On
peut y développer des programmes de simulation, des jeux de rôle,
participant à une vision constructiviste d’un enseignement.
Potentiel lieux pour la formation, en temps réel, ouvert à la plupart, avec une
capacité d’interactivité et de communication quasi identique au réel.
Devant une telle puissance de communication, on peut alors dégager un
nouvel aspect important : l’apprenant devient acteur de sa formation, tant
en terme de recherche de l’information (qui n’est plus uniquement dispensée
par un « maître » qui détient la connaissance), qu’en terme de participation
au savoir collectif (en apportant ses connaissances) ; le bénéfice supposé
d’un apprentissage collaboratif est alors renforcé.
Si l’on émet l’hypothèse de l’apport positif d’un flux d’échanges et d’un
apprentissage collaboratif par partage d’expériences, une telle plateforme
les optimise.
Cette plateforme permet en outre de réduire les frais et les déplacements en
rapport avec la formation traditionnelle.
D’autre part la représentation dans SL des personnes physiques situées
devant leur écran se fait sous forme d’avatars, dont on s’aperçoit qu’ils sont
souvent fidèles en ressemblance à la personne qui les créé, soulignant une
volonté d’apparaître « en personne » au monde virtuel.
41
Un sentiment de présence accrue, donc, qui est rendu possible quel que soit
la nature expansive ou introvertie de l’internaute, grâce à l’anonymat
qu’offre la plateforme, et qui semble conduire à moins d’inhibition dans les
interactions et la participation aux évènements .
Aucune autre méthode d’enseignement n’offre une telle liberté d’expression.
Dans les 4 dernières années, les communautés médicales ont montré un
intérêt grandissant à l’utilisation de SL pour l’enseignement public, la
sensibilisation et la formation. En 2009, un article sur les activités SL liées à
la Santé rapporte 68 sites directement liés au sujet de la santé, dont 34 sont
dédiés à la simple diffusion d’informations.
La plupart de ces sites proposent des présentations visuelles, des clips, des
diaporamas et des liens Web. Cependant, il existe plusieurs sites où des
simulations médicales, des soins infirmiers sont modélisés et où les
étudiants en médecine peuvent s’exercer avec des équipements virtuels.
III.4.3Les différents types d’informations véhiculées
Selon un article de 2009 [21], Beard distingue 5 catégories d’activités liées à
la santé sur SL.
III.4.3.1Les sites dédiés à l’éducation et la sensibilisation à la santé :
Les sites qui y sont destinés sont ouverts au grand public, il s’agit d’un
carrefour d’informations et de liens web, orientant et redirigeant les
utilisateurs vers d’autres sites ou centres d’information de la vie réelle. Ils
peuvent aussi inclure des groupes de discussions, des conférences
communiquant des informations sur des sujets spécifiques. Il s’agit des sites
les plus courants sur SL.
Quelques exemples :
- Health Info Island, University of Plymouth avec Sexual Health Sim de US
Centers for Disease Control and Prevention (CDC),
42
- National Institutes of Health qui donne la possibilité de parler
directement avec un représentant du CDC.
- La Ann Myers Medical Center (Figure 4), avec un environnement offrant
salles de classes, ressources de connaissances ainsi que les premières
simulations médicales (2007).
- Ou encore le Women’s Health Center (WHC) qui sensibilise à l’auto
examen mammaire en prévention du cancer du sein.
Figure 4 : Ann Myers Médical Center
(Source : http://scienceroll.com/2007/06/17/top-10-virtual-medical-sites-in-second-life)
III.4.3.2Les sites de soutien : [21]
Ils offrent la possibilité de discuter avec des professionnels de santé, sans
l’aspect tabou de la maladie.
Pour ne citer que l’exemple des problèmes d’halitose (mauvaise haleine)
qu’un patient n’oserait pas aborder face à un professionnel. Grâce à la
barrière de l’écran d’ordinateur, il libère sa parole. Cette relative distance
désinhibe l’internaute et facilite l’expression.
Ces sites proposent des liens vers des groupes de soutien et de discussions
spécifiques à différentes maladies.
On souligne un taux de connexions élevé sur ce type de sites. Cela justifie-t-
il leur utilité ?
43
III.4.3.3Les sites dédiés à la formation : [21]
Selon le même article, Beard n’en retient que 11 au sein de SL, mais ce type
de sites serait en croissance rapide. [21]
Stott (2007) soulève que certaines universités ont constaté que la proposition
de formations sur SL peut favoriser l’image de marque de l’Université et
attirer de futurs étudiants.
III.4.3.3.1L’impérial College London
L’impérial Collège London, entre autre, a créé un jeu de simulation fondé sur
SL pour les étudiants en médecine, avec des patients virtuels, pour apprendre
et savoir agir face à des pathologies respiratoires (figure 5). Une analyse de
l’impact de ces nouvelles opportunités pédagogiques est en cours, avec le
retour d ‘étude de cette expérience menée de juillet 2010 à juin 2011[23].
Lors de ma visite, ce site était vide.
Figure 5: Hopitâl virtuel de l’Imperial College of London sur SL (Source :http://slurl.com/
secondlife/Imperial%20College%20London/150/86/27/)
44
III.4.3.3.2Programme Play2Train
Figure 6 : Mise en situation Play2train
(Source : http://elianealhadeff.blogspot.com/2007/07/play2train-serious-games-for-emergency_24.html )
Le programme Play2Train [24] est une simulation qui entraine à la réaction
au bioterrorisme, ayant pour théâtre une ville et un hôpital virtuels, dans
Second Life (figure 6). Il vise à enseigner le triage des blessés en cas de
catastrophe, et la bonne gestion de la crise par la population.
Cette simulation utilise les fonctions audios de la plateforme qui aident à
améliorer le réalisme de la situation et la communication entre participants.
Les concepteurs projettent de comparer les résultats de cette méthode à une
simulation dans le monde réel.[21]
III.4.3.3.3Medical Examiner's Office
On peut apprendre à effectuer une autopsie dans une salle de médecin
légiste reconstituée en 3D dans SL (figure 7) où les avatars agissent avec
réalisme, recréant une autopsie virtuelle.[21]
45
Figure 7 : Salle d’autopsie
(Source : http://maps.secondlife.com/secondlife/Whispering Angel Island/19/97/22/ )
III.4.3.3.4Dental Life
Dans cette même partie liée à l’utilisation de SL pour la formation, évoquons
bien évidemment Dental Life®.
Cet environnement virtuel se situe sur « Ivoire », une île en forme de molaire
au sein de SL (figure 8), où l’on peut se retrouver avec toute la communauté
des chirurgiens dentistes pour diverses activités devant son écran :
Des cours universitaires iconographiés mis en lignes et accessibles à tous,
des possibilités d’interactions entre les dentistes géographiquement et
temporellement éloignés (par la voix ou par des fenêtres de texte écrit), des
conférences en temps réel retransmises au sein d’un auditorium : les
possibilités sont nombreuses et vont même aller prochainement vers la
création d’un programme de formation et d’entraînement aux urgences
médicales pour les chirurgiens dentistes.
46
Figure 8 : L’île « Ivoire » de Dental Life (Source : http://www.dentallife.fr/)
III.4.3.4Les sites de marketing et de promotion de la santé
Certains sites cherchent à promouvoir l’image des établissements de santé
en organisant une visite virtuelle par exemple, pour préparer les futurs
patients à une éventuelle hospitalisation et rendre l’environnement plus
familier. On peut également faire découvrir de nouvelles technologies au
service des patients, sorte d’opération marketing ; Second Health (UK),
Palomar West Hospital.
Ces sites existent également dans le but d’obtenir des dons pour des
fondations, comme l’American Cancer Society, en décrivant leur activité de
manière virtuelle.
III.4.3.5Les sites dédiés à la recherche
Bainbridge (2007) évoque le potentiel des mondes virtuels pour effectuer des
recherches, créer des laboratoires, des expériences, et des paramètres qui
simulent l'expérience réelle, le tout à un coût très faible [21].
47
Exemple : l'Université de Houston dans Second Life qui s’intéresse à la lutte
anti obésité propose aux visiteurs de participer à des enquêtes, études et
activités.
III.4.4Discussion
On aura compris les avantages qu’offre ce type de plateforme en terme
d’immersion réaliste, de flux de communication, de disponibilité
permanente, d’interactivité, de liberté d’expression, de gain de temps et de
confort d’utilisation.
Cependant, si la majorité des sites sur SL concernant la santé sont des sites
informatifs pour grand public et répondent totalement à leur cahier de
charge, qu’en est il vraiment de ceux destinés à la formation ? Si l’on met de
côté les arguments cités ci dessus, la formation virtuelle porte-t-elle autant
ses fruit qu’une formation sur le terrain ?
On ne trouve pas d’étude certifiant formellement l’efficacité pédagogique des
formations virtuelles comparativement au « présentiel », par manque de
preuves empiriques. Des analyses et des retours d’expériences tendent à se
développer et apportent progressivement leurs résultats. En voici quelques
exemples. On verra également les limites de ces environnements virtuels
juste après.
III.4.5Retours d’expérience
III.4.5.1Une étude d’un séminaire interactif
Ce séminaire a été réalisé dans SL, pour la formation médicale continue sur
le thème de la prise en charge d’un patient diabétique [25].
Le but de cette expérience est de dégager le potentiel de SL dans la
formation médicale continue.
Ce retour d’expérience est fondé sur les impressions des médecins
participant au test, soit 14 personnes.
48
Premier élément en faveur de ce support : le « chat » (se prononce
« TCHATT »), qui est une fenêtre d’échanges écrits permettant de lancer des
discussions, faisant interagir les participants, en parallèle à l’activité
principale, et favorisant l’investissement de chacun.
Des enquêtes en ligne avant et après la session ont été effectuées pour
contrôler les connaissances, et ne constatent pas de différence avec la
même formation dans le réel.
Les intervenants livrent des impressions positives sur cette expérience,
supérieure en efficacité selon eux à d’autres formations en ligne, et sans
différence notoire avec une formation en « présentiel ».
On assiste même à la naissance d’un groupe de discussion extérieur à la
formation, entre professionnels, vu comme un partage d’informations
sérieuses (et pas uniquement divertissantes).
En conclusion ils plébiscitent une formation conforme à leurs horaires
chargés de médecins, sans voyage nécessaire, qui les plongent dans un
univers très réaliste, un anonymat qui favorise le partage, et pourvoyeur de
connexions professionnelles au delà de l’étude.
III.4.5.2 Case Western University [26]
Au sein de Second Life, cette université
de Cleveland, Ohio, propose aux
étudiants en chirurgie dentaire de
travailler leur communication. En allant
sur le site, ils rendent visite à Masha
(figure 9), une patiente virtuelle qui
change de problème dentaire au gré
des rencontres, et avec qui on apprend
à transmettre les messages de
thérapeute à patient.
Figure 9 : Masha, patiente virtuelle (Source : http://blog.case.edu/casenews/2008/07/28/virtualdentistry/ )
49
Le projet développe des scénarios qui aident à la récolte d’informations sur
l’histoire d’un patient, à transmettre des conseils sur l’hygiène ou encore à
proposer et expliquer clairement un traitement au patient. Malheureusement
je n’ai pu testé le programme, le lieu étant vide au moment de ma visite.
Selon Kristin Z. Victoroff [26], professeur adjoint à l'École de médecine
dentaire de l'Université Case Western Reserve, qui est à l’origine du projet, le
fait de passer par un environnement virtuel permet d’aller plus loin dans les
situations rencontrées, les barrières sont quasi inexistantes pour développer
l’imagination dans toutes les situations envisageables.
De plus, parce qu’il s’agit d’un module de formation facultatif, on peu
organiser les cours sans libérer trop de moyens financiers. On imagine
qu’atteindre le même objectif par petits groupes de travail de mise en
situation réelle serait économiquement et humainement plus coûteux.
Kristin Z. Victoroff dégage aussi le fait qu’il s’agit de compétences plutôt à
transmission orale qu’écrite, et que le support virtuel répond mieux à ces
exigences qu’un questionnaire QCM, ou encore un examen classique.
Elle en conclue que les environnements virtuels comme Second Life ,
permettent , par immersion réaliste et grâce à une communication
performante, d’ enseigner certaines notions aussi bien qu’une formation
standard .
Comme c’est le cas dans l’apprentissage d’une langue étrangère par
exemple : par des interactions désinhibées au sein d’un environnement
virtuel, il est facilitée en comparaison à un enseignement classique.
III.4.5.3 Retour d’étudiants [27]
Une étude datant de 2008 a été réalisée par Catheryn Cheal professeur du
département « Art » de l’université d’Oakland. [27]
Elle rapporte les impressions de 15 étudiants se définissant comme « non
joueurs informatiques » ayant suivi un cours sur le thème des
environnements virtuels.
50
Le cours portait sur les technologies, la théorie et les enjeux actuels autours
des Mondes Virtuels. Les étudiants devaient créer un environnement sur
Second Life illustrant leurs observations en fin de session.
Sept questions leurs ont été posées portant sur les problème techniques
rencontrés , sur ce qu’ils aimaient ou pas dans la démarche de travailler sur
SL, puis sur les possibilités pédagogiques promues par SL selon eux, ainsi
que sur la possibilité de retenter l’expérience d’ un autre cours sur SL.
III.4.5.3.1Résultats
L’enquête indique clairement un problème avec l’accès à SL. 60% des
étudiants n’ont pas pu accéder depuis leur domicile faute de configurations
matérielles informatiques suffisantes. Des difficultés sont également
présentes à l’université et les mises à jour logicielles nécessaires sont trop
rarement effectuées par le service informatique.
Un aspect plus positif vient du temps mis pour créer un avatar, 60% des
élèves ont mis moins d’une heure grâce à l’ergonomie proposée (https://
join.secondlife.com/?lang=en-US ).
L’apprentissage de la modification de l’apparence des avatars, la navigation
et la communication ont été faciles malgré le fait qu’un seul élève déclare
avoir une expérience de jeu vidéo.
En quelques chiffres :
- 20% des étudiants se sont limités à l’exploration de l’univers, omettant
la dimension éducative.
Pour les autres, le potentiel pédagogique de SL réside dans la
dimension créative qu’il offre, et dans une communication possible à
travers le monde entier.
- 46% des étudiants dénigrent la lenteur du programme, 26% trouvent
l’interface de construction difficile à utiliser et les autres ont eu des
51
soucis avec le moteur de recherche de SL, les fonctions vocales, ou
encore des avatars « parasites » n’ayant rien à apporter à leur travail.
- 33 % des élèves voient le chat écrit comme un moyen de communication
trop lent pour être efficace.
- 33% considèrent que la courbe d’apprentissage pour la création d’objets
est trop difficile.
- 26% déplorent une configuration matérielle trop exigeante pour accéder
correctement aux fonctions qu’offre le site.
Sur les 15 étudiants enfin, aucun ne souhaite rééditer une telle expérience
sur SL.
III.4.5.3.2Discussion
Le commentaire positif vient du projet pédagogique du professeur d’utiliser
SL comme une méthode d’apprentissage constructiviste : en communiquant,
en explorant et en construisant des objets au sein de SL, les élèves ont
acquis des compétences et une compréhension des environnements virtuels.
Le style d’apprentissage variable des étudiants (préférant parfois lire et
écouter que agir) pourrait avoir influencé le relatif échec de l’étude. En tout
cas le fait de ne plus vouloir reprendre un tel cours sur SL impose une
sérieuse étude concernant les méthodes d’enseignement sur une telle
plateforme.
La réaction des étudiants couplée à de précédentes études indique 3 critères
de réticence faces à SL comme environnement d’enseignement :
1. Les problèmes techniques et logiciels concernant l’exigence en matière
de performance de l’équipement informatique, une prise en main du
52
logiciel parfois décourageante en ce qui concerne les fonctions
avancées autres que la création d’avatars et l’exploration.
2. Une difficulté dans la conception des cours : les enseignants ont des
styles et des stratégies d’apprentissage très différentes, ce qui
complique encore plus la création du contenu d’un cours sur SL.
Un cours dans SL pour lequel les étudiants doivent se trouver dans la
salle informatique de l’établissement, avec une communication par
« chat » plus lente, souffre par comparaison avec le même cours en
classe et une interaction personnalisée avec un professeur disponible.
Pour les élèves, il a été difficile de comprendre les stratégies
pédagogiques utilisées pour illustrer les objectifs à atteindre (ex :
comment transmettre un cours de mathématiques dans un monde
3D ?).
3. Une difficulté à concevoir SL comme environnement d’apprentissage :
75% des élèves déclarent avoir été attirés par le côté « fun » (amusant)
du monde virtuel par rapport à l’environnement de salle de classe
traditionnelle. L’attrait pour le cours en ligne viendrait donc de son
aspect pratique et flexible.
Dans la présente expérience, les étudiants se sont retrouvés face à des
difficultés inattendues sur internet, ce qui s’est avéré plus contraignant
qu’un cours traditionnel.
Je cite : « La disparition de la dimension amusante du monde virtuel
risque d‘être une raison importante du décrochage des étudiants vis-
à-vis du cours virtuel. »(Stanford-Bowers 2008)[27]
D’autre part et pour finir, le fait de se retrouver dans un
environnement ressemblant à l’univers des jeux vidéos, conduit les
élèves à se sentir joueurs plutôt qu’apprenants, ce qui leur semble
néfaste pour atteindre les objectifs .
53
III.4.6Limites et critiques
III.4.6.1Limites d’ordre technique.
Ces sites se trouvent sur le réseau Internet, et il est vrai que garantir la
sécurité des données qui circulent, et l’exactitude des informations n’est pas
simple.
D’autre part pour que chaque internaute ait un accès aux ressources et un
fonctionnement optimal, il y a une exigence de performance matérielle et
logicielle qui n’est pas encore atteinte par tous, et les équipements
informatiques sont parfois inadaptés.
Cela s’accompagne d’un débit internet trop variable à l’heure actuelle pour
prévenir la survenue de bugs et autres interruptions de communication.
Ces paramètres sont sensés évoluer avec l’Internet du futur (élévation du flux
de connexion, augmentation de la performance des ordinateurs).
III.4.6.2Limites de compétences
Cette « révolution » dans le monde de la formation et de l’information se fait
avec des générations qui ne sont pas toutes familières à l’utilisation de
l’informatique. Cela peut créer un fossé et le découragement de certains, tant
la mise à niveau nécessaire au maniement de l’outil peu être chronophage et
prendre parfois autant de temps que la formation elle même[21]. Il est
évident que l’expérience de « jeu » informatique des « nouveaux
apprenants » est un atout dans l’utilisation de ces plateformes, et en tout cas
il faut veiller à rendre « ergonomique » l’accès aux programmes pour attirer
les plus septiques.
Ces critiques ne remettent pas en cause le vivier que représentent ces
mondes virtuels et leurs fonctionnalités pour un espace d’apprentissage
constructiviste, susceptible d’améliorer les résultats d’apprentissage fournis
par la formation traditionnelle.
54
Les technologies du numérique semblent apporter de nouvelles solutions
pour les enseignants qui n’ont de cesse de s’« adapter » à leurs élèves.
D’un autre côté, quel est l’impact de la personnalité des apprenants sur leur
manière d’apprendre ? On peut se poser la question.
III.4.7De nouveaux outils, mais pour qui ?
La population apprenante compte des individus aux comportements et aux
manières d’apprendre extrêmement variables et par conséquent le support
informatique ne convient pas à tous.[29]
Les environnements virtuels font ressortir un côté ludique pouvant stimuler
l’intérêt de l’apprenant, mais les élèves sont-ils tous sensibles à cet
argument ?
III.4.7.1Les étudiants et les jeux vidéos
Une étude, publiée en 2010 [37] sur l’attitude de 217 étudiants en médecine
face aux jeux vidéo, a été réalisée auprès de 2 universités de médecine,
basée sur des critères démographiques, d’utilisation de jeux vidéos en
fonction du sexe et de l’âge.
Cette étude apporte certains résultats :
- 53% des étudiants interrogés étaient des femmes.
- 98% des étudiants ont jugé utile l’idée d’utiliser des nouvelles
technologies pour l’éducation de santé.
- 96% pensent que l’éducation pourrait davantage utiliser les
technologies numériques.
- 80% pensent que le jeu vidéo peut avoir une vertu pédagogique.
- 77% utiliseraient une simulation de santé multi-joueurs en ligne
pendant leur temps personnels à condition que cela les aide dans un
objectif pédagogique bien défini au préalable.
- 97% des étudiants accordent leur intérêt à la simulation à condition
qu’elle soit amusante.
55
- 90% se sentent motivés pour une simulation à condition qu’elle leur
apporte un plus dans la prise en charge des patients.
Cette étude nous montre que ces étudiants sont ouverts à l’emploi de
nouvelles technologies dans leur formation. Si l’on compare les résultats de
cette étude avec celle de Catheryn Cheal (chap. III.4.5.3) on se rend bien
compte que les perceptions sont différentes.
Il faut garder à l’esprit que la volonté du pédagogue est de transmettre les
connaissances au plus grand nombre. Ainsi, les outils numériques, et, en
particulier ceux renfermant une dimension ludique, pourraient être un moyen
de plus pour atteindre cet objectif, offrant une approche pédagogique
différente adaptée à certains élèves.
III.4.7.2Constat sur l’utilisation du numérique
Il ne faut pas non plus faire l’erreur de penser que la forte consommation de
moyens technologiques dans la société est directement transposable à
l’éducation. Le fossé entre les deux existera toujours, car le monde éducatif
et celui de la vie privée bien que de plus en plus entremêlés, fonctionnent
différemment (par exemple, l’utilisation d’un réseau social comme
Facebook®, peut servir dans la vie privée, comme dans la vie professionnelle,
mais pas sur le même mode ; son fort pouvoir de communication et de
partage servant dans un cas à exhiber la vie privée, ou alimenter le lien
social, dans l’autre il permet de rassembler une communauté de
professionnels et d’aider, par exemple, à l’organisation d’un travail d’équipe,
ne faisant circuler que des informations purement « sérieuses ») .
Une étude réalisée en 2011 auprès d’étudiants de l’Université de Strasbourg
confirme ce fossé utilisation universitaire/utilisation domestique [38]:
- dans la sphère privée, l’utilisation des services et outils numériques se
fait essentiellement par les réseaux sociaux, les mails, la messagerie
instantanée, les achats et la recherche d’informations.
56
- Dans la sphère universitaire, elle se fait pour l’accès aux ENT, aux
plateformes e-Learning, à la messagerie professionnelle et les
recherches documentaires.
Les ingénieurs qui créent des technologies numériques perfectionnées ont
beau être enthousiastes quand à leur utilisation pour l’éducation, il n’en
demeure pas moins que le « jus » pédagogique doit en être extrait grâce à
l’interaction entre enseignants et étudiants, sous peine d’être abandonnées.
[29]
Parmi ces supports, il en est un qui s’appuie sur des hypothèses cognitives
nouvelles, le « Serious Game » ou « jeu sérieux ». Il s’agit d’un programme
informatique aux dimensions ludique et sérieuse, fondé sur les techniques
issues du jeu vidéo (ludique) au service d’une démarche pédagogique
(sérieuse).
Ce programme peut être utilisé sur un support indépendant (logiciel, CD-
Rom) ou bien être développé sur une plateforme virtuelle comme celles
présentées dans cette partie.
57
DEUXIEME PARTIE
LE SERIOUS GAME (SG) AU SERVICE DES
MÉTIERS DE LA SANTE
58
DEUXIEME PARTIE : LE SERIOUS GAME (SG) AU SERVICE DES MÉTIERS DE LA SANTE
IV.DEFINITIONS
Selon la définition donnée par Julian Alvarez et Damien Djaouti [28], un
serious game est une application informatique, dont l’intention initiale est
de combiner, avec cohérence, à la fois des aspects sérieux (Serious) tels, de
manière non exhaustive et non exclusive, l’enseignement, l’apprentissage, la
communication, ou encore l’information, avec des ressorts ludiques issus du
jeu vidéo (Game).
Une telle association, qui s’opère par la réalisation d’un scénario utilitaire,
qui, sur le plan informatique correspond à créer un habillage (sonore et
graphique), une histoire et des règles appropriées, a donc pour but de
s’écarter du simple divertissement.
Toujours selon les mêmes auteurs, cette mise en relation de ces dimensions,
sérieuse et ludique, à pour principal but de susciter le « flow » chez
l’utilisateur (état subjectif de bien être qui se manifeste quand il y a un
équilibre entre les compétences et la tâche à accomplir) [20], signifiant
qu’une tâche sera d’autant plus facile à réaliser par un individu, qu’il éprouve
du plaisir à la réaliser. [28]
Pour amener l’utilisateur à ce plaisir, il faut veiller à réunir les deux
dimensions, dans un scénario unique, apportant la connaissance à
l’apprenant « a son insu » en quelque sorte, de façon à aiguiser sont
« appétit » de savoir.
IV.1 DIFFÉRENCE ENTRE SERIOUS GAME ET JEU VIDÉO [28]
D’un point de vue informatique et de programmation du logiciel, il n’y a pas
de différence, la création d’un serious game s’appuyant sur les bases
informatiques du jeu vidéo. La grande distinction entre les deux se fait
59
quand les choses font sens pour l’utilisateur. En tant qu’interface avec les
sciences humaines, les serious game sont à replacer dans des domaines
particuliers (culturels, bancaires, de la santé, etc…) pour chercher à
différencier le serious game du jeu traditionnel.
Par exemple, un programme du type Trauma Center : Second Opinion (Altus
2006) qui pourrait être considéré comme un serious game, propose
d’incarner un chirurgien (Figure 10), mais ne possède pas de dimension
sérieuse.
Mis à part quelques références aux pratiques médicales réelles, il ne permet
d’acquérir aucune compétence transposable dans le monde médical.
Figure 10 : Trauma Center
(Source : http://www.jeuxvideo.com/screenshots/images/00016/00016343_146.htm )
Par contre si l’on cherche un programme d’enseignement servant le domaine
médical ; on retrouve Pulse !! ® (Breakaway, 2007) qui dispense un
entrainement sur des bases et des connaissances actuelles de la médecine
(figure 11). (Cf. Chapitre V.2)
Pour paraphraser, on peut voir en Pulse !! ® un « jeu » qui sert la santé, et
non la santé qui sert de « support » à un jeu.
60
Figure 11 : Pulse !! (Source http://www.ilumens.org/ )
IV.2 DÉTOURNER LA FONCTION INITIALE D’UN « JEU »
On peut noter que l’utilisation d’un « jeu » peut se faire avec une intention
sérieuse.
Un jeu de karaoké utilisé pour travailler la prononciation en Anglais (Singstar
PS3, SCE London Studio, 2008) n’en est qu’une illustration. Mais la différence
majeure qui persiste est la conception spécifique du serious game, qui est
« a priori » prévue pour transmettre des connaissances.
Pour entrer un peu dans le détail, on associera le jeu (dont l’utilisation est
détournée « a posteriori » pour une dimension sérieuse, mais non anticipée
par son créateur), à la famille du « serious gaming »(jouer de façon sérieuse),
les « serious game » ne définissant que les programmes « nés » avec cette
intention sérieuse.
Du côté de la dimension sérieuse, on trouve une série de programmes
informatiques ne possédant aucune partie ludique, comme des systèmes
médicaux experts d’aide au diagnostic qui font la frontière avec le serious
game.
IV.3 DIFFÉRENCE SG ET « SIMULATION » [7].
La simulation comme on la connait par exemple dans l’aéronautique, sert à
approfondir des compétences ou des reflexes chez des professionnels d’un
domaine particulier
61
Les simulateurs sont un ensemble logiciel (qui fait intervenir des paramètres
très pointus du domaine) et matériel (commandes, dispositif de visualisation,
dispositif proprioceptif) visant à imiter au maximum le réel, et ce, sans règle
du jeu particulière ni « projet pédagogique ».
A la différence du jeu sérieux au sens ou l’entend Louise Sauvé [7] comme
« une situation fictive, fantaisiste ou artificielle dans laquelle des joueurs, mis
en position de conflit les uns par rapport aux autres ou tous ensemble contre
d’autres forces, sont régis par des règles de jeu qui structurent leur actions
en vue d’un but (gagner, prendre sa revanche) et d’objectif éducatifs. »
Le serious game est avant tout un projet de formation, dont la conception
est intégrée dans un scénario pédagogique, lui même encadré par un
scénario de jeu dont les règles sont fixées.
L’environnement de jeu peut être une forme de réalité, ou carrément
imaginaire, là n’est pas l’élément le plus important. Il se trouve dans la
qualité d’immersion et d’interaction auxquelles sont confrontés les joueurs.
En idéalisant ; il faudrait amener l’élève à assimiler des principes, des
notions, par des actions de jeu, à s’approprier de nouveaux reflexes tout en
ayant l’impression de se divertir.
IV.4 CLASSIFICATION DES SERIOUS GAME
On peut distinguer deux mécanismes différents distinguant le principe
ludique des jeux vidéo ; d’une part des programmes ne proposant pas
d’objectif précis permettant à l’utilisateur de « gagner », donc dépourvu d’un
état final de la partie. Il se rapproche de l’idée d’amusement et de
divertissement, et sera alors classé dans la famille « jouet vidéo » ou
« serious play » (exemple Sim City), contrairement au serious game qui
définit des objectifs précis utilisés pour évaluer la performance d’un joueur
(limite de temps, score, vies, etc…) le mettant ainsi dans la position de
« gagner » ou de « perdre ». Un serious game se veut de donner au joueur
des objectifs à atteindre, en instaurant une règle du jeu.
62
Selon Julian Alvarez toujours, on peut les classer selon : [28 p.27]
- Le Gameplay (« jouabilité »), qui renseigne sur la structure ludique utilisée
ou type de jeu.
- L’objectif pédagogique qui précise la fonction sérieuse attendue et la
démarche recherchée pour l’atteindre.
- Les domaines d’application visé par le serious game (secteur et public visé)
Ces trois critères forment le modèle « G (Gameplay)/P (Permet de)/
S(Secteur) »
IV.4.1Le Gameplay
Traduction de « jouabilité », ou façon dont va se jouer le « jeu ». Cette
définition comprend autant l’ensemble des règles imposées au joueur que
l’architecture sur laquelle sera construit le jeu et l’interface graphique. Pour
illustrer, le gameplay pourra être représenté sous la forme d’un jeu de
plateau, d’un jeu d’aventure, d’un jeu de stratégie… Le gameplay englobe
également les moyens utilisés pour effectuer les actions de jeu (une manette,
un clavier, ou des clics souris).
IV.4.2L’objectif pédagogique
Un serious game peut avoir différentes fonctions, les mécanismes utilisés
sont alors différents eux aussi. Il peut servir à informer, à éduquer, à
persuader, ou à diffuser un message.
Par exemple, certaines entreprises peuvent utiliser un serious game pour
apprendre et comprendre le fonctionnement interne et l’organisation de
l’entreprise, alors qu’une autre souhaite préparer les personnes à un
entretien d’embauche par des jeux de rôle informatiques. Ce sont deux
objectifs distincts qui ont été bien définis avant de créer le serious game.
63
IV.4.3Les domaines d’application
Ce critère donne 2 informations supplémentaires : la première sur le secteur
concerné (Art et culture, Entreprise, Etat et gouvernement, Humanitaire,
Santé) et l’autre sur le public visé (Grand public, Etudiants ou Professionnels).
IV.5 DÉFINIR LA PLACE DU SG DANS LA PÉDAGOGIE MULTIMÉDIA
La pédagogie multimédia est un vaste terme dont la définition englobe tous
les moyens informatiques mis en œuvre pour transmettre une connaissance.
Il est important, pour utiliser un outil informatique à bon escient, de bien
définir sa place et ses caractéristiques. En lieu et place du pédagogue, il faut
bien comprendre l’outil que l’on utilise pour son projet de formation.[29]
Voici quelques exemples.
IV.5.1Le jeu métaphore
La formation à distance doit être attrayante pour avoir du succès [7p.40].
« Jouer en apprenant » ; certes mais il ne faut pas tromper l’utilisateur en
faisant croire à un jeu qui ne le serait pas.
La pédagogie multimédia utilisée pour une formation à distance se voulant
ludique, notamment pour le e-Learning, va la plupart du temps correspondre
à un « jeu pédagogique multimédia » et non à un serious game.
A la différence du jeu pédagogique, le SG doit permettre à l’utilisateur de se
retrouver réellement dans l’univers du jeu vidéo et non pas dans une
métaphore de jeu.
Car sans diminuer le pouvoir attractif de la métaphore ludique d’un jeu
pédagogique multimédia, les mécanismes d’apprentissage ne sont pas les
mêmes que dans un SG, et restent sur une forme relativement classique,
transmissive, avec comme principe majeur, des ressorts graphiques
empruntés aux jeux de société (plateau type Monopoly, jeu de carte, etc…).
64
Pour appartenir à la définition de jeu multimédia, un programme doit
contenir :
Un scénario : c’est une histoire fictive, une enquête…métaphore générique
qui sert de fil rouge.
Une pédagogie : appuyée d’une panoplie d’outils multimédia tels questions à
choix fermé (vrai/faux), QCM, réponses brèves, associations d’objets.
Une évaluation : au début, éventuellement pendant, et à la fin du jeu, elle est
camouflée dans le scénario, permettant de finir le jeu , étant synonyme de
l’aboutissement de la formation.
L’évaluation peut également être formative ; c’est à dire proposer par des
liens internet un complément d’information au joueur concernant certaines
lacunes rencontrées au cours du jeu.
Ce type de projet ne peut pas être qualifié de SG ; il se décline comme un
dispositif de formation classique, alternant cours, quizz et illustrations
scénarisées. Il est vide d’ingrédients essentiels au SG tels : indicateur de
performance, adversaires en concurrence, mission à remplir, stratégie de
victoire à déployer. [7]
L’univers graphique et scénaristique n’est que le prétexte à la découverte du
contenu pédagogique : fiches de connaissances, cours, quizz.
IV.5.1.1L’exemple de Adibou
C’est un « Jeu ludo-éducatif (multimédia) » [7 p.49] célèbre en France
(figure1, p.13), développé dans les années 1990 qui a rencontré un vif
succès. Innovant pour l ‘époque, il alliait plaisir d’apprendre et plaisir de
l’informatique. Des effets scénaristiques, des personnages attachants se
basant sur le nouvel outil informatique attrayant, furent les clefs du succès.
En y regardant d’un peu plus près, la véritable innovation n’est pas d’ordre
pédagogique, mais juste la médiatisation extrême d’un cahier de cours et
d’exercices scolaires.
65
On y décline quelques cliques de souris et touches de clavier dans un grand
nombre d’actions ludiques (puzzles, intrus à trouver, sélection vainqueur,
recherche d’indice) au profit d’un cours initialement rébarbatif.
Petit bémol : selon Yves Dambach et Valérie Lavergne [7], en 2010 Adibou ne
fait plus rêver un enfant de 10 ans comme il y a 20 ans de cela. Le jeu vidéo
est entré en scène, avec des prouesses technologiques de plus en plus
poussées au niveau des scénarios, des variétés d’action, des possibilités
d’interaction avec les personnages, la 3D, les effets sonores … un fossé que
les créateurs de produits vidéo-ludiques tentent bien de combler.
Mais la magie que suscitait l’informatique des années 1990 au service de
l’éducation ne suffit plus.
L’élève de 2010 s’ennuie sur son banc d’école [7p.51], plus que celui des
générations précédentes. Alors que dans sa chambre le même élève est
acteur d’une communauté connectée, par internet, SMS, ou blogs qui
permettent de communiquer avec la terre entière, dans les classes il est un
auditeur passif et un observateur, d’un temps découpé en périodes de 55
minutes qui n’avancent pas.
Répondre en partie à ces nouvelles exigences est un défi que relève
l’élaboration des SG.
V.INTÉRÊTS PÉDAGOGIQUES
« Imaginons un environnement d’apprentissage, où le professionnel arrive à
une formation, sort son ordinateur et se met à jouer….tout en apprenant. Le
formateur n’enseignerait plus du haut de l’estrade, mais régulerait une partie
de jeu vidéo. »[7p.11]
C’est le but visé par le serious game, mais voyons de plus près ses intérêts
pédagogiques supposés.
66
V.1 UNE GÉNÉRATION D’APPRENANTS OUVERTS AU JEU
L’idée de jeu sérieux peut faire sourire, car le jeu évoque bien plus la cour de
récréation qu’une activité sérieuse. Pourtant si le mot « jeu » s’oppose à
« travail », ce n’est pas comme loisir.
Le mot « jeu » n’exclue pas la possibilité d’apprendre, comme « loisir » peut
le laisser supposer.
Le travail quand à lui, du latin Tripallium, désignant une forme de supplice
consiste à accomplir ce qui nous est imposé.
Selon Yves Dambach, de la société KTM Advance ® (qui développe des
serious game), la demande de solutions pédagogiques que représente le
serious game serait en plein essor, et l’intérêt suscité par ce nouvel outil
pédagogique serait sans cesse croissant.
Ce succès serait en partie lié à un nouveau contexte culturel. Comme dit
précédemment, dans une société où l’information circule en temps réel, où
les individus communiquent d’un bout à l’autre de la planète sans se soucier
du décalage horaire ou de l’espace qui les sépare, où les nouvelles
technologies affichent chaque jour d’autres prouesses, le modèle
pédagogique ne peut rester immuable. Sur le terrain, pourtant, les modes
classiques de transfert des connaissance du « sachant vers l’apprenant »
demeurent.
« Tandis que les salariés sont tenus d’évoluer, de se remettre en cause et de
réviser en permanence leurs méthode de travail, les sessions de formation
qui les assistent dans leur progression de carrière ne reflètent pas cette
dynamique. Durant quelques heures, la vie s’arrête et le collaborateur se
trouve renvoyé sur les bancs de l’école ; il éteint son portable, oublie
l’information disponible en temps réel, n’a plus besoin de réagir vite, de
67
chercher, de décider, de s’interroger, de choisir. Le temps est suspendu, la
magie technologique est arrêtée, le collaborateur est seul face à son projet
de formation […] la porte de la classe se ferme, le cours commence. »[7]
Effectivement, un serious game pourrait se fondre dans l’environnement
quotidien d’un professionnel, en ne rompant pas ou peu l’équilibre et la
dynamique d’une journée de travail et ainsi passer plus inaperçu, pour
finalement amener les utilisateurs à se former ou approfondir leurs
connaissances sans bloquer leur activité.
V.2 DU PROFESSEUR AU MÉDIATEUR [7P18, 34]
Le serious game fait partie de nouvelles pratiques pédagogiques, où la
formule transmissive traditionnelle est transformée.
Le « sachant » qui peut être soit un expert participant à l’élaboration du jeu
soit un professeur encadrant une séance, devient « médiateur » ou
« personne ressource » ne transmettant plus une connaissance inerte, mais
des contenus, des consignes et des formules vouées à être retravaillées ou
manipulées, développant chez l’élève le besoin d’aller chercher ailleurs
l’information. [34]
Cet apprenant doit alors appliquer des règles, de manière dégagée d’une
logique évaluative traditionnelle de salle de classe. Ces missions et actions
de jeu allègent le « poids » de l’apprentissage, et ce sont leurs manipulations
et leurs utilisations en temps réel qui donnent un sens aux notions et ainsi
l’appropriation des connaissances par le joueur.
V.3 DEXTÉRITÉ VISUELLE ET CÉRÉBRALE
68
La pratique du jeu en informatique est entre autres fondée sur les reflexes,
qu’ils soient visuels à l’arrivée d’un objet sur l’écran, sur la nécessité de
suivre plusieurs éléments en simultané, stimulant une dextérité visuelle peu
entrainée par ailleurs. D’autre part le fait de devoir mener plusieurs actions
de front, d’être attentif à plusieurs terrains en même temps dans un
programme virtuel, ont amené certaines études ont montrer une plus grande
vitesse d’exécution de la part des joueurs réguliers, et la capacité de mener
plusieurs gestes de front.
On peut se poser la question d’une éventuelle utilité de cette faculté une fois
transposée dans le réel. [7 p 38]
Cet argument souligne l’apport pédagogique du côté « jeu » du serious
game.
V.4 DÉVELOPPEMENT DU SENS CRITIQUE
L’utilisation du jeu dans l ‘éducation permettrait de développer son sens
critique vis à vis de ses propres démarches, le jeu renvoyant une image
directe de ses actions.[32p.41]
V.5 LE FACTEUR « PLAISIR »
S’il y trouve du plaisir, l’apprenant (re)viendra à la formation.
Selon plusieurs articles, l’intrusion des TICE et par extension des serious
game dans l’enseignement motive des élèves par son côté ludique.[34]
Mais au delà de cette seule dimension ludique qui semble évidente, qu’est
ce qui procure le plaisir à l’apprenant et en l’occurrence au « joueur » ?
Le plaisir que procure un jeu n’est pas uniquement lié à la magie du scénario
ou de l’environnement dans lequel il prend place. Il vient avant tout de la
sensation de pouvoir et de montée en compétence que le jeu octroie.
Cette source de plaisir pourrait être la clef d’une pédagogie du futur.
69
Selon une étude, menée par des chercheurs en socio psychologie, portant sur
10000 joueurs [31], il y aurait 3 facteurs de succès du jeu vidéo :
V.5.1L’expérimentation d’une montée en compétence
Figure 12: Courbe de montée en compétence du joueur (Source : [7])
Il s’agit de la courbe d’apprentissage (Figure 12), bien connue des « game
designers » (créateurs de l’architecture du jeu). Les premières missions du
jeu sont toujours faciles, séduisant le joueur par une victoire aisée, puis
communiquent les premiers réflexes et les premières règles simples qui
permettent d’aborder la suite du jeu.
Un principe fort du jeu vidéo est le réinvestissement systématique de ces
acquis et/ou savoirs, nécessaires à l’avancée dans le jeu.
V.5.2Le sentiment d’autonomie totale dans la progression
L’apprenant doit avoir une volonté individuelle d’accomplir telle ou telle
tâche dans son apprentissage. Un jeu dont les règles à suivre ne sont ni trop
strictes ni trop laxistes, mais qui laisse l’impression de progresser selon sa
volonté (choix ouvert de missions, à accomplir selon son choix) a de bonnes
chances d’être un facteur de motivation.
70
V.5.3La qualité de relation aux autres joueurs
Les rencontres avec d’autres joueurs doivent permettre d’échanger ses
compétences et d’acquérir des informations qui aident à la résolution
d’énigmes. Il est néanmoins nécessaire que ces rencontres deviennent un
échange de bons procédés.
V.6 LE JOUEUR ET LE CYCLE D’EXPERTISE
Au fur et à mesure de l’avancement, le joueur devient de plus en plus
compétent, il connait toutes les mécaniques, les intervenants, et par
réinvestissement permanent de la compétence acquise anticipe beaucoup
mieux les évènements le rendant à force, expert de son jeu [7p.116].
A ce stade, nous pouvons représenter les éléments favorisant l’intérêt de
l’apprentissage par le jeu, dans le schéma suivant (figure 13) :
Figure 13 : Facteurs de plaisir liés à l’utilisation du jeu dans l’enseignement (Source :[32 page 42] )
71
V.7 LE RAPPORT À L’ERREUR
L’autre élément intéressant du serious game est le statut de l’erreur [7p.
113]. Elle n’y est nullement sanctionnée, et, au contraire, nécessaire. Le jeu
n’existe que par les tentatives du joueur (apprenant), qui se voit dès lors le
« responsable » et acteur de sa progression. S’il ne tente rien, rien ne se
passe. C’est en effectuant des actions de jeu, parfois inadaptées et en les
corrigeant pour faire avancer le scénario, qu’il évolue.
Le joueur émet une série d’hypothèses qu’il teste, rendant l’erreur inévitable,
comme faisant partie du processus. Une erreur, une fois corrigée débloque
une situation, donne accès à la suite, sorte de récompense à l’effort fourni,
impliquant encore un peu plus l’apprenant.
Là où la question posée à un collègue assis juste à côté du banc de fac
pouvait s’avérer honteuse ou déplacée, l’anonymat au sein du programme
informatique permet en toute liberté d’exprimer ses lacunes, et décomplexé,
d’apprendre de ses erreurs.
Puis par la qualité du scénario, une péripétie ou un évènement de jeu va
rompre cet équilibre, jusqu’à être à nouveau maîtrisé par le joueur ayant
mobilisé ses compétences précédemment acquises.
Cette maîtrise apporte un sentiment d’assurance et de pouvoir, qui de la
même façon peut se retrouver sur le plan professionnel.
Maitriser un jeu apporte une grande satisfaction. Si son contenu est exhaustif
d’une notion pédagogique, il pourrait amener l’apprenant à être expert, tant
du jeu que de la notion ciblée.
V.8 L’INFORMATION « JUST IN TIME » (À LA DEMANDE)
Une notion a toutes les chances d’être assimilée si elle est activement
recherchée par un joueur. Un autre avantage du serious game est que cette
information est disponible de façon permanente quand le joueur la sollicite,
72
par exemple pour pouvoir franchir une étape après de nombreux essais
infructueux. [7 p.116]
Elle vient combler une lacune reconnue par le joueur et sera
vraisemblablement mieux intellectualisée que la même information donnée
hors contexte ou à un auditoire « passif ».
V.9 LE MODE D’ÉVALUATION
Utiliser un serious game comme support de formation pose une autre
question. Comment évaluer l’apprenant, par quel moyen s’assurer qu’il a
acquis les compétences souhaitées ?
Au sein d’un jeu on n’envisage pas d’arrêter le programme pour poser des
questions. Cela est cependant le cas lorsqu’un quizz est par exemple
proposé [7 p.162].
Le problème d’un quizz est qu’il contrôle plutôt des connaissances factuelles
(de type mémorisation) et moins des connaissances procédurales (savoir si
l’organisation mentale des différentes notions se fait dans un sens favorable
à une « juste » représentation sémantique).
Le serious game propose de s’assurer de la juste acquisition des
compétences par un autre moyen : le passage des niveaux de jeu.
Le passage des niveaux de jeu : si la structure du jeu est de qualité, le joueur
(apprenant) n’aura le droit de progresser dans les missions qu’une fois les
premières représentations mentales exigées acquises, autrement dit dès qu’il
aura établi un raisonnement adéquat. Il pourra débloquer un niveau de jeu
suivant, ainsi assuré de sa maîtrise des connaissances.
D’autre part, enseigner au sein d’un jeu permet au concepteur d’imaginer et
de faire intervenir un grand nombre de variables qui pourront servir à évaluer
la performance du joueur. Il s’agit de mettre une limite de temps, de voir ou
non si une rubrique d’aide a du être consultée, ou encore de comptabiliser le
nombre de tentatives effectuées. Cela renseigne aussi sur la facilité ou au
73
contraire la difficulté qu’aura rencontré l’apprenant à se représenter les
choses.
V.10UN MODE D’APPRENTISSAGE « OUVERT » ET COLLABORATIF
Le monde de l’éducation et celui de la vie privée deviennent de plus en plus
« connectés ». Cette connexion est possible grâce à l’évolution du Web.
Avant 2003, c’était l’ère du web 1.0 où l’utilisateur n’était que spectateur, et
seule la consultation de données était possible. [30]
Depuis 2003 s’est progressivement développé un Web 2.0 ou collaboratif,
dont la caractéristique principale est de faire participer l’utilisateur dans
l’évolution des contenus. L’internaute n’est plus seulement spectateur, mais
devient acteur et participe au partage de l’information. C’est l’ère des
réseaux sociaux (type Facebook®, Twitter®), des encyclopédies
collaboratives (type Wikipédia®), ou des forums d’échanges notamment…
C’est ainsi qu’autour de la plupart des jeux vidéo, on peut trouver des
« fans ».
Ces « fans » s’organisent en une communauté présente sur des forums, des
blogs, des zones d’échange pour ceux qui cherchent des solutions, ou font
profiter de leur expérience.
Cette communauté est un atout si elle est retrouvée ou organisée autour
d’un SG.
Un tel espace de partage en parallèle au jeu est très intéressant au niveau
pédagogique, donnant à l’utilisateur un rôle tantôt d’apprenant, tantôt de
« sachant », tout en étant collectivement investi dans un objectif de
progression.
Si les manuels scolaires homologués par l’éducation nationale sont un
prérequis indispensable aux constructions cognitives élémentaires, ils font
l’objet d’une appropriation interne.
74
Avec le monde des nouvelles technologies par contre, la formation, terrain
d’échange, de partage, de discussion et de comparaison, met les apprenants
dans une dynamique d’échange et de communication, ce qui rend
l’information « interactive ».
Les nouvelles générations semblent prêtes à recevoir un enseignement fondé
à la fois sur le transmissif et sur l’interactif, sans que pour l’instant les
modèles pédagogiques ne profitent pleinement de cette évolution.
Pour acquérir ces avantages pédagogiques, un serious game est soumis à
certaines règles d’élaboration auxquelles il ne faut pas déroger sous peine de
rendre le support incomplet, et de ne pas pouvoir atteindre les objectifs
pédagogiques qu’on lui attribue.
VI.RÈGLES D’ÉLABORATION ET D’ÉVALUATION
Pour qu’un dégagement éducatif soit possible, il faut travailler sur les
contenus.
Des ingénieurs pédagogues vont structurer les contenus à l’aide de modèles
métacognitifs et de cartographie mentale, que les game designers
(architectes du jeu) organisent. C’est un travail coordonné qui permet
d’accomplir la mission éducative du serious game.
VI.1 S’APPUYER SUR UNE VISION CONSTRUCTIVISTE DE
L’APPRENTISSAGE [7P131]
Dans un domaine comme la pédagogie qui ne détient pas de certitudes,
plusieurs courants de pensées ont leur place : modèles transmissifs
éprouvés, et vision constructiviste.
75
Le questionnement de l’élève est fondamental dans l’acte d’apprendre, ce
qu’on peut oublier dans les salles de classe, où un cours est dispensé, pris
en note, puis intériorisé sans être retravaillé. La pédagogie constructiviste
envisage les savoirs « en permanente construction ».
Cela se fait d’autant mieux si la manière d’enseigner une connaissance
suscite la réflexion chez l’apprenant.
Comme le préconise Valérie Lavergne, « Pour offrir une réponse efficace à
l’apprentissage, […] il faut « exposer les élèves au savoir » et non « exposer
le savoir aux élèves ». Il ne s’agit pas d’imposer, mais bien d’accompagner
les acquisitions et faciliter leur construction ».
C’est une de attentes en ce qui concerne le Serious game.
VI.2 LE MODÈLE MENTAL OU REPRÉSENTATION SÉMANTIQUE [7, 46]
Pour exploiter une notion ou un savoir, nous utilisons à notre insu un modèle
mental, Une sorte de représentation interne, forme élémentaire de la
compréhension, propre à chacun et variable d’un individu à l’autre en
fonction de ses expériences cognitives successives. [7p137]
Une notion doit, pour être apprise, entrer dans une représentation
sémantique à laquelle elle va être rattachée, au milieu d’autres notions liées
entre elles par une certaine « logique ».
Face à un problème donné ou un concept nouveau, nous convoquons des
représentations préétablies, qui vont être remaniées, détruites puis
reconstruites, pour donner naissance à une nouvelle représentation. Il s’agit
là à la fois d’une limite à l’acquisition d’un nouveau savoir (qui perturbera
une logique préétablie) et dans le même temps servira de support pour la
mise en perspective de la nouvelle connaissance.
Dans un enseignement classique où le professeur détient le savoir, il peut le
dispenser, mais n’a pas accès à la « boîte noire » de chaque élève. Il est alors
difficile de s’assurer que tout le monde possède la même représentation
sémantique que lui.
L’élève « subit » l’information.
76
Ce ne sont d’ailleurs que les élèves qui ont la même sémantique que le
professeur qui vont bénéficier de la juste acquisition du savoir.
Les autres vont se construire une logique personnelle, parfois biaisée par des
idées reçues, dues à de mauvais postulats de réflexion.
Un serious game est un logiciel qui possède une représentation sémantique
intrinsèque propre, ou scénario, visuellement accessible et le même pour
tous, qui permet de « recadrer » l’information. C’est une représentation
parfois simplifiée de la réalité, qui permet d’aider à donner un sens aux
informations.
Valérie Lavergne [7p.137] donne l’exemple d’une « cellule ».
Un novice y verra une membrane, un noyau et de l’ADN, avec des relations
simples entre les éléments tels que : la cellule est entourée d’une membrane,
elle contient le noyau qui lui même contient de l’ADN.
Un expert y verra beaucoup plus de détails, et connaîtra les interactions
entre les différents constituants. S’il dispense ses connaissances, l’élève peut
les apprendre, mais n’aura vraisemblablement que peu conceptualisé les
relations existantes entre les notions.
Pour ce faire on a besoin de modèle, ou métaphore, qui permet de se faire
une juste représentation sémantique, ce qui doit être intrinsèquement
présent dans l’architecture d’un serious game.
Le « modèle » est primordial dans un serious game, c’est le terrain favorable
au questionnement, à l’expérimentation. Au sein de ce modèle (ou structure
de jeu), le joueur va pouvoir s’approprier des objets de jeu, leurs propriétés,
et leurs relations pour progresser tant au niveau du jeu qu’au niveau
cognitif.
VI.3 DÉFINIR LES BESOINS
Avant de se lancer dans la réalisation d’un serious game, mieux vaut bien
définir les besoins, et les moyens disponibles pour les transmettre.
77
VI.3.1A quoi sert le projet
Selon le type d’informations à transmettre, le scénario utilisé est différent.
En ce qui concerne les informations portant sur des comportements
humains, il n’est pas nécessaire de créer des graphismes collant au réel. On
peut s’en dégager et faire travailler l’imagination.
Ce n’est pas le cas si l’on souhaite transmettre des informations ou acquérir
une expertise dans un domaine précis, comme par exemple, celui de la prise
en charge des urgences au cabinet dentaire, pour lequel il sera préférable
d’opter pour une représentation réaliste du métier en question.
VI.3.2A qui d’adresse le projet
Si le projet s’adresse à une génération de « digital natifs » convaincus de
l’informatique, la prise en main étant facilitée, le concepteur peu créer un
monde futuriste comme environnement de jeu. Par contre si il s’agit de
convaincre un public mixte, mieux vaut utiliser une représentation du réel.
Cela permettra aux générations moins familières de l’informatique à qui
s’adresse également ce type de formation, de se laisser attirer, même si la
délicate prise en main du programme représente un désavantage au départ.
VI.3.3Quel type de gameplay pour quel type de formation [7p182]
Pour redéfinir succinctement le gameplay, il s’agit de la façon dont se joue le
jeu, la forme qu’il prend.
Une relation existe entre la nature des informations à enseigner, l’habileté
cognitive sollicitée chez l’apprenant et le type de jeu adapté pour les
transmettre.
Prensky (2001) propose une classification des liens entre ces différents
éléments, rapportée dans le tableau suivant (figure 14):
78
Figure 14 : «Types of Learning and possible games styles » par Mark Prensky (Source :
Document Google PDF)
La logique d’association de ces différents paramètres doit être la plus claire
possible et être présente à l’esprit de celui qui va développer la structure du
jeu d’une part (Game Designer) et de celui qui apporte la conception
pédagogique d’autre part, ces deux postes étant le plus souvent occupés par
deux personnes distinctes.
VI.4 PASSER DES OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES (SERIOUS) AU JEU
(GAME)
C’est sans doute la partie la plus difficile, exigeant une importante réflexion
cognitive préalable.
79
VI.4.1Analyse du corpus
Il faut pouvoir cerner de façon claire les savoirs possédés par les apprenants
au départ du jeu, les cheminements mentaux escomptés chez l’apprenant, et
les objectifs à atteindre.
On réalise un « modèle cognitif » qui est ensuite mis en « image » par le
game designer.
VI.4.2Caractérisation des données
VI.4.2.1Connaissances factuelles et/ou déclaratives :
Comme expliqué précédemment, ce sont des vérités établies, des listes à
enregistrer comme telles, qui ne demandent pas de réflexion particulière,
mais seulement un travail de mémorisation.[7p.186]
VI.4.2.2Connaissances procédurales :
Ce sont « des structures de contrôle directement utilisables dans la
réalisation de l’action. Elles ne sont peu ou pas communicables car elles
reposent sur des systèmes plus ou moins complexes entre stimuli,
comportements et états mentaux ». [7]
Il s’agit de mettre en relation différentes notions et paramètres, qui une fois
utilisés par l’apprenant, vont permettre de fonder un raisonnement non
verbalisé, mais logique pour la résolution d’une situation donnée. Le joueur
aura alors face à lui un cycle de décisions complet : observation-hypothèse-
décision-action, résolu par la connaissance procédurale.
VI.4.2.3Connaissances expertes :
Un expert du domaine concerné est une personne importante dans la
création d’un serious game.
Dans son domaine, l’expert qui aura de nombreuses années d’expériences
effectuera certaines actions avec automatisme. Ces longues années de
80
pratique concrète lui permettront de trier les informations et de faire
ressortir les pièges à éviter. En faisant tester le programme par cette vision
experte, on fera la différence entres certaines informations inutiles et les
éléments importants, faisant un retour d’expérience qui permettra de donner
au jeu une direction « proche du métier » sur laquelle peut s’appuyer le
gameplay.
Cette collaboration avec l’expert s’appelle un « recueil d’expertise », qui
s’adresse à la fois au pédagogue en charge du programme et au game
designer.
Ce recueil permet de mettre l’accent sur une procédure prioritaire spécifique
au métier. Soulever les points à mettre en avant au niveau du scénario,
signaler des oublis dans les boucles de réflexion (figure 15), voilà le rôle de
l’expert.
Figure 15 : Schéma d’une boucle de réflexion (Source : Garris,Ahler et Driskell, 2002. [32] )
81
Ces boucles de réflexion sont des microstructures du jeu qui s’inscrivent
dans une démarche d’apprentissage plus générale, voulue par le pédagogue
et interne au jeu, c’est la boucle principale de réflexion (figure16).
Figure 16 : Boucle de réflexion principale dans l’utilisation du jeu vidéo (Source Kearney & Pivec, 2007 [32]).
Après ces quelques règles d’élaboration pour la création d’un serious game,
intéressons nous aux initiatives serious games déjà présentes dans le
domaine de la santé.
82
VII.REVUE DE LITTÉRATURE DES SG DANS LA SANTÉ [3P83]
Pour les classer nous allons nous appuyer sur la classification précédente
« G/P/S ».
Le secteur étant déjà défini, il seront distingués selon leur utilité « Permet
de ».
Ainsi, Julian Alvarez trouve 5 groupes distincts selon le message à
transmettre :
- Message éducatif,
- Message informatif,
- Message persuasif,
- Entrainement cérébral,
- Entrainement physique.
VII.1.1Message éducatif
- Re-Mission :
Un jeu grand public (figure 17), destiné à
des adolescents atteints de cancer. C’est
un jeu de tir prenant place à l’intérieur du
corps humain et le joueur est aux
commandes d’une chimiothérapie
personnifiée, expliquant le principe du
traitement et permettant aux
professionnels d’amorcer le dialogue avec
le malade.
- Fatworld :
Un jeu pour sensibiliser les enfants aux
effets néfastes de la malnutrition : le joueur
Figure 17: Re-Mission
(Source : http://serious.gameclassification.com )
Figure 18 : Fatwolrd
(Source: http://playthisthing.com/
83
incarne un avatar qui se promène dans une ville où la tentation est grande
d’aller consommer de la nourriture pour passer le temps (figure18). Ce jeu
tente de faire le lien entre obésité, nourriture, et situations
socioéconomiques dans les Etats Unis d’aujourd’hui.
- Pulse !! :
Ce jeu est destiné à la formation de futurs praticiens hospitaliers et qui
représente un environnement hyperréaliste. Le joueur suit le patient dans un
hôpital virtuel, pouvant intervenir sur de nombreux paramètres, établir de
vrais diagnostics ou lui faire passer des examens. Il vient d’être traduit en
français par la société iLumens ®.
- Hospital Waste Disposal :
Un jeu qui vise à sensibiliser les professionnels de santé à la gestion des
déchets en milieu hospitalier.
- Triage training :
Jeu d’entrainement au diagnostic de grands blessés, développé dans les retours d’expérience (figure 19).
VII.1.2Message informatif
Ils concernent surtout des serious games à but préventif.
- Sortez - revenez :
Lancé par la Sécurité routière, il s’agit
d’incarner un organisateur de soirées, devant
concilier « bonne ambiance » et « retour
prudent des invités », informant sur le risque
Figure 20 : Sortez - Revenez
(Source : http://serious.gameclassification.com )
Figure 19: Triage training
(Source : http://serious.gameclassification.com )
84
de l’alcool au volant (figure 20).
- Happy Night Club :
Fondé sur le modèle « aventure », il permet de
tester les excès pour en voir les conséquences,
mais de façon maîtrisée, pour pouvoir terminer
les missions proposées (figure 21).
Adopter un comportement
responsable vis à vis de la
consommation d’alcool permettra de finir le jeu.
- Deliver the Net :
Il sensibilise les internautes à la propagation
de la Malaria en Afrique (figure 22).
Le joueur incarne un bénévole à moto
distribuant des moustiquaires dans les
villages.
VII.1.3Message persuasif
- Histoire de dent :
Développé par Pierre Fabre, il s’agit avant tout de promouvoir une marque.
Mais au delà de la considération marketing, ce jeu à aussi pour objectif de
sensibiliser les jeunes à l’hygiène dentaire (figure23).
Figure 21 : Happy Night Club
(Source : http://serious.gameclassification.com )
Figure 22 : Deliver the Net
(Source : http://serious.gameclassification.com)
85
Figure 23 : Histoire de dents
(Source : http://serious.gameclassification.com )
- Campto ou Multaq :
Adressés aux professionnels, présentés lors
de salons, c’est la société Medpict® qui les
développe pour faire connaître sa marque de
médicaments (figure 24). Jeux de très courte
durée cherchant à convaincre les
acheteurs potentiels.
VII.1.4Entraînement cérébral
Ce sont des logiciels venus d’Asie sur le marché du « Brain Fitness » qui se
développe fortement en Europe et Etats unis. On en compte beaucoup pour
les consoles de jeu Nintendo DS par exemple.
Figure 24 : Jeu Campto
(Source : http://serious.gameclassification.com)
86
Il s’agit d’entraîner la mémoire et la logique par des petits casses têtes et des
calculs mentaux. Il en existe de nombreux dédiés au grand public dont un
très connu, Programme d’entraînement cérébral du Dr Kawashima : quel âge
a votre cerveau ?
Une étude écossaise de 2008 rapporte son bénéfice dans l’entraînement au
calcul mental (exactitude et rapidité de calcul) après l’avoir testé dans des
classes (figure 25).[32]
Figure 25: Séance d’aide au calcul mental (Source : European Scoolnet [32])
VII.1.5Entraînement physique
Ce sont des jeux destinés à faire pratiquer une activité physique, tel un
coach.
Ils se sont développés surtout sur une console Nintendo Wii avec le
programme WiiFit, ou auparavant YourSelf ! Fitness.
Ce sont là encore des programmes exclusivement dédiés au grand public,
même si certains professionnels ont réorienté leur utilisation dans un but
thérapeutique, comme les kinésithérapeutes par exemple (donc caractérisé
plutôt comme serious gaming (voir chap. I.2. de Deuxième partie).
Pour les professionnels de la santé, on retrouve peu de programme
d’entraînement si ce n’est :
87
- Flower for all :
Jeu destiné aux patients atteints de mucoviscidose dans le cadre des séances
de kinésithérapie respiratoire où l’on utilise le « flutter » pour expectorer les
sécrétions. Ce traitement étant fatiguant, ce programme se présente comme
un jeu de course (figure 26), la voiture avançant grâce au souffle du
patient.
Figure 26: Flower for all (Source : http://flower-for-all.org )
VIII.RETOURS D’EXPÉRIENCE
Il existe peu d’études empiriques à haut niveau de preuves quand à l’apport
pédagogique du serious game. Cependant, les sciences cognitives et
comportementales s’intéressent progressivement au potentiel de ce nouveau
support d’apprentissage.
88
VIII.1TRIAGE TRAINING [50]
Triage training (figure 19) est un jeu pour l’entrainement à la prise de
décision diagnostic en cas de catastrophe majeure, développé par la société
Trusim ®.
Des Scénarios comme l’explosion d’une bombe dans un lieu public vont
mettre le joueur dans une scène en 3D, avec des patients nécessitant
différents soins selon l’état de gravité de leurs atteintes. Le but est de trier
les blessés le plus rapidement possible, en posant les bonnes questions, en
contrôlant les bonnes constantes vitales, et en diagnostiquant leurs
détresses véritables.
Une étude menée sur 91 participants, médecins, infirmières et ambulanciers,
divisés en deux groupes a été effectuée selon 2 modes de formation:
Après un cours classique sur les urgences vitales et toutes les informations
nécessaires, dispensé en commun, un des groupes s’est entrainé avec le
logiciel pendant une heure, tandis que dans l’autre groupe, des cartes on
servi de support pour des exercices en présentiel.
Au final, une mise en situation commune a eu lieu, faisant intervenir chaque
participant seul dans une pièce face à des acteurs simulant diverses
détresses.
VIII.1.1Résultats
L’évaluation des participants qu’il soient issus du groupe 1 ou 2, s’est faite
sur la vitesse de tri des malades, le juste diagnostic et l’enchainement des
étapes pour y parvenir.
Il en ressort que :
Après entrainement avec le serious game, il y a de meilleurs résultats,
concernant le bon diagnostic.
89
Concernant le groupe du serious game, 68% des victimes ont était prises en
charge sans erreurs dans les étapes de diagnostic, contre 57% seulement
dans l’autre groupe.
L’étude ne note pas de différences significatives entre les deux groupes en ce
qui concerne la vitesse de tri des blessés.
VIII.1.2Discussion :
Il s’agit d’une première étude, qui mériterait d’être plus approfondie dans les
critères de comparaison, mais donne une vision positive quand à l’apport du
serious game dans ce type de formation. Il faudrait par exemple voir l’impact
de cet entrainement serious game dans la durée, comparé à l’exercice en
présentiel « jeu de rôle », en refaisant une étude ultérieure.
Les participants on fait remarquer le côté positif de l’immersion dans le jeu,
mais ont également émis quelques critiques concernant l’éventuelle
complexité d’utilisation ou de manipulation du jeu.
Quoique incomplète, cette étude apporte des résultats prometteurs, et invite
à pousser plus loin l’étude de l’impact de ces jeux sur la formation en santé.
VIII.2PULSE !! [48, 49]
C’est le programme serious game le plus connu dans le monde de la santé ;
il s’agit d’un logiciel qui a été développé par l’armée américaine pour
l’entraînement des médecins (figure 27).
Il propose un environnement hospitalier reproduit en 3D jusque dans les
moindres détails, où l’on peut interagir avec les patients, faire des
diagnostics, assister ou gérer une opération chirurgicale, selon des scénarios
préétablis. Il contient également un cabinet dentaire pour l’entraînement aux
décisions thérapeutiques dentaires et à la définition des protocoles.
90
Figure 27 :Pulse !! (Source : http://www.interaction-healthcare.com/ )
D’abord utilisé aux Etats-Unis, jusque dans la formation des internes en
médecine, il vient d’être récemment traduit en français par la société I-
Lumens et Interaction Healthcare et testé au niveau hospitalier par des
médecins et des étudiants encadrés.
Il en ressort certains éléments de réflexion du retour d’étude effectué par
des médecins urgentistes et réanimateurs d’une part et des étudiants lors de
cas pratiques encadrés :
Qualités :
- selon François Lecomte, médecin urgentiste, l’immersion dans ce jeu de
simulation 3D stimule les mêmes reflexes que dans le stress d’une
véritable urgence.
- La qualité de la simulation vient du temps réel des actions menées,
ajoutant fortement au réalisme du programme.
91
- Le « feedback » que propose le jeu permet de rectifier les
comportements erronés ; si dans la prise en charge une erreur est
faite, cela remonte directement au joueur par la détérioration de l’état
du patient, et il peut ainsi corriger le tir tout en prenant conscience de
sa lacune. C’est un aspect important de ce type de programme.
- Pour les étudiants, le rétrocontrôle proposé par le logiciel est bénéfique
pour apprendre de ses erreurs, et le fait de systématiser les actions de
jeu permet à force de répétition d’intégrer et de mieux retenir les
notions et les démarches de réflexion.
- Selon une Faculté de médecine des E-U le recours à ce programme pour
les étudiants aurait permis d’améliorer de 30% le taux de succès aux
examens [48, 23ème minute].
Défauts :
- Il manque certains paramètre réglables en comparaison avec la réalité
(par exemple les techniques d’imagerie scanner, moins développées
dans le logiciel)
- Les experts du domaine médical signalent la nécessité d’encadrer les
séances de jeu des étudiants, le programme ne permettant pas, vu sa
complexité, d’être appréhendé par l’apprenant seul. Ils lui attribuent
cependant une très bonne efficacité de support de cours en
« présentiel ».
- Son prix, très lourd, puisqu’il a coûté près de 10 millions de dollars.
92
VIII.3MICROSIM
Initiative datant de fin 2005 par l’université de Lyon 1 [47].
C’est un programme informatique à ranger plutôt dans la famille des
logiciels de simulation. Il utilise des éléments réels et des fenêtres
informatiques pour entraîner à l’urgence médicale, dans des études de cas
en temps réel.
Une enquête a été réalisée auprès de 66 étudiants sur l’intérêt de l’utilisation
du logiciel dans leur apprentissage, ainsi que son impact pédagogique et
l’adhésion des étudiants à ce support.
VIII.3.1Résultats:
- en complément de cours magistraux et de l’AFPS, l’immense majorité
(62 étudiants) le trouve utile, nécessaire, voir indispensable.
- Pour le côté pratique d’utilisation il leur a fallu entre 4 et plus de 6
heures d’utilisation pour résoudre tous les cas cliniques, à comparer
avec le même temps en réel.
- 55 sur les 66 estiment cette activité ludique, alors que 10 ne trouve pas
vraiment de différence d’attrait avec l’enseignement classique.
- Un des commentaires libres : « Ca m’a donné envie de devenir
Urgentiste » souligne le côté motivant de ce logiciel.
VIII.3.2Remarque :
Cette enquête rapporte un grand intérêt de la part des étudiants, et des
enseignants qui affirment pouvoir suivre la progression des élèves à
distance, et régler le niveau des moyens techniques mis à disposition du
joueur.
93
VIII.4ETUDE SUR LA RÉANIMATION CARDIO-PULMONAIRE (RCP)
VIRTUELLE
Cette étude suédoise a été réalisée auprès de 12 étudiants en médecine dans
le but de dispenser une formation à la RCP, via une plateforme virtuelle
multi-joueurs.[45]
La formation s’est déroulée comme suit : un premier cours traditionnel sur la
RCP, suivi d’une familiarisation à la plateforme. Ensuite, des mises en
situations de cas de réanimation ont eu lieu par équipes de 3 personnes. A la
fin, un questionnaire et un test de connaissances ont été effectués.
La même expérience à été refaite 6 mois plus tard, mais sans rappels
théoriques.
L’attention de l’étude s’est portée aux réponses des étudiants sur l’auto
efficacité apportée par ce type d’entraînement (sensation de bien savoir
comment se comporter face à une situation), la détermination et la
concentration qu’elle suscite chez les étudiants.
VIII.4.1Résultats apportés
D’après le questionnaire :
- 11/12 étudiants disent avoir appris quelque chose de nouveau
- 4/12 étudiants ont appris des choses concernant le travail en équipe
- 8/12 trouvent que l’apport de la formation vient surtout de
l’apprentissage d’une nouvelle technique de RCP.
- 4/12 étudiants rapportent avoir plus appris dans cette mise en situation
informatique, non stressante.
Les remarques des étudiants :
- ils ont aimé en majorité la répétition d’actions dans plusieurs scénarios
- peu de problèmes techniques rapportés
- la formation a été jugée réaliste et conviviale
94
- certains étudiants on trouvé qu’elle leur redonnait confiance.
- Le fait de travailler en équipe semble renforcer la concentration des
élèves.
- Il y a une demande de scénarios plus nombreux et variés, de plus
d’options d’entraînement.
Entre les deux sessions de test, le contrôle des connaissances relève une
diminution des compétences des élèves, que les auteurs attribuent au fait
que les questions posées portent sur le cours et sur des informations plus
complètes que dans les scénarios.
Chez les femmes, le peu de confiance en soi, la moindre auto efficacité, la
plus grande tension nerveuse remarquée et la plus grande concentration
nécessaire que chez les hommes de cette étude, oblige les auteurs à aller
plus loin pour comprendre la manière d’apprendre des différents publics.
Cette e-formation ne permet pas de transmettre les aspects strictement
physiques de formation (faire le massage par exemple, ce qui nécessite un
mannequin classique), mais permet par contre d’apprendre le travail en
équipe et les compétences procédurales. Elle permet également d’apprendre
la gestion du stress, les contraintes de temps, de faire ressortir les lacunes
théoriques, et d’apporter les reflexes face à une situation d’urgence.
VIII.4.2Limite de l’étude
La portée de ces résultats encourageants est limitée par la faible taille de
l’échantillon d’étudiants.
Après ces considérations théoriques entourant la création d’un serious game,
passons à la partie partique de ce travail, la création de scénarios
d’urgences.
95
TROISIEME PARTIE
MISE EN APPLICATION ET EXEMPLE CONCRET
LA CONCEPTION D’UN SERIOUS GAMEAU SEIN DE DENTAL LIFE
96
TROISIEME PARTIE : MISE EN APPLICATION ET EXEMPLE CONCRET, LA CONCEPTION D’UN SERIOUS GAME AU SEIN DE DENTAL LIFE
IX.BUT DU PROJET PÉDAGOGIQUE
D’une part par ce qu’il s’agit d’un projet serious game, et d’autre part parce
qu’il se tient au sein d’une plateforme recouvrant d’autres avantages cités
dans les chapitres précédents, on peut dégager les différentes attentes de ce
projet serious game pour la formation aux urgences médicales au cabinet
dentaire.
IX.1 UNE VISION PRAGMATIQUE
Au cours de la réalisation des scénarios, qui s’est faite en étroite
collaboration avec le Docteur B. Calon, médecin urgentiste au CHU de
Strasbourg, l’idée était de coller le plus près possible à la réalité du quotidien
d’un chirurgien dentiste, sans forcément être exhaustif à 100% des situations
existantes dans la vie courante en matière de situations d’urgence.
Le but était de faire un tour d’horizon « pragmatique » sur les urgences
susceptibles de survenir dans un cabinet dentaire, permettant de simplifier la
pensée. D’autant que face au stress que représente une telle situation mieux
vaut avoir les quelques bons reflexes, plutôt qu’une mine d’arbres
décisionnels en tête que l’on ne sait pas appliquer.
IX.2 CRÉER DES AUTOMATISMES
Chez le professionnel face à un incident survenant lors de soins dentaires
97
IX.3 INSTAURER UN CLIMAT D’APPRENTISSAGE DIVERTISSANT
Novateur, dont les retours d’étude vont pouvoir servir son amélioration.
IX.4 FAVORISER LA « RENCONTRE »
Dans la profession, entre les étudiants, les professionnels, pour favoriser une
échange collaboratif des connaissances et des expériences.
IX.5 PROPOSER UNE PÉDAGOGIE MODERNE
Et convaincre le plus grand nombre de son efficacité.
IX.6 VERS UNE FORMATION « À LA DEMANDE »
Ce serious game propose un accès permanent, une remise à niveau rapide,
une révision nécessaire des bonnes pratiques, un entraînement régulier pour
être efficace face aux cas d’urgences. Il serait bien plus compliqué
d’envisager toutes ces remises à niveau en « présentiel ».
98
X.SITUATIONS THÉORIQUES
Dans cette partie nous allons développer des scénarios sur les situations
d’urgence, certes exceptionnelles, mais susceptibles de placer le praticien
dans une situation de stress s’il y est un jour confronté.
X.1 SYNDROME CORONARIEN/ INFARCTUS DU MYOCARDE
Un syndrome coronarien aigu peut se manifester par l’Infarctus du Myocarde
(IM), qui n’est autre qu’une nécrose du myocarde par ischémie, par
oblitération d’une artère coronaire par un caillot sanguin ou un embole de
cholestérol sur une sténose préalable .
Une nouvelle classification des syndromes coronariens à été crée, se basant
sur l’analyse de l’ECG, mais pour une approche diagnostic guidant le
comportement du praticien chirurgien dentiste face à cette urgence, on se
basera sur les signes cliniques évocateurs.
X.1.1Manifestations cliniques
L’apparition des signes que sont des douleurs rétrosternales
constrictives avec irradiation au cou, au dos, à l’estomac, à l’épaule gauche
(ou droite) et à la mandibule se fait chez un patient pâle, en sueur et
angoissé.
Il faut savoir que depuis 4-5 ans, l’incidence d’infarctus du myocarde chez la
femme est en forte augmentation, désormais consommatrice de tabac et
généralement plus sédentaire. La prise de pilule contraceptive prédispose
également au risque d’infarctus.
99
Chez la femme, le tableau clinique est plus souvent non évocateur, avec
éventuellement de simples nausées, vomissements.
Dans la vie courante, les syndromes coronariens peuvent survenir soit au
cours d’un effort (évocation d’un angor stable) soit au repos (évocation d’un
angor instable ou infarctus).
Chez le chirurgien dentiste, il pourrait être provoqué par un stress
douloureux ou émotionnel.
Lors de l’arrivée des secours, le diagnostic se fait par un ECG
(Électrocardiogramme) qui montre un tracé spécifique en cas d’infarctus,
étayé par des examens biologiques recherchant des marqueurs sanguins de
l’infarctus (troponine c, CPK mb)
X.1.2Conduite à tenir
L’essentiel de la prise en charge est d’agir rapidement par :
- L’arrêt du stimulus douloureux
- La mise au repos du patient (il reste sur le fauteuil au calme)
- L’administration d’O2 par masque à 10L/min
- L’appel au SAMU (15 ou 112, mais ni les urgences ni le cardiologue, ni
le médecin généraliste car il faut une équipe interventionnelle
permettant d’agir assez rapidement),
- Le contrôle de l ‘état de conscience du patient et éventuellement la prise
de tension.
L’éventuelle administration de Trinitrine 0,15 mg en sublingual se fait sur le
conseil du SAMU.
100
Figure 28 : Scénario du syndrome coronarien et Infarctus du myocarde
101
X.2 CHOC ANAPHYLACTIQUE
C’est une Réaction allergique d’hyper sensibilité immédiate grave due à
une augmentation de la perméabilité vasculaire due à une libération
d’histamine, de leukotryènes et de prostaglandines, aboutissant à un
effondrement du volume plasmatique (sanguin) circulant (donc une
hypotension), par extravasation vers les secteurs interstitiels (donc formation
d’œdème)
X.2.1Les manifestations cliniques sont :
- Un érythème non prurigineux diffus touchant les conjonctives, rhinite,
- L’angio-œdème laryngé du à l’extravasation,
- Un bronchospasme par contraction musculaire lisse,
- Une sensation de malaise, mal de ventre, ténesmes, sensation de mort
imminente,
- Une chute de la TA.
X.2.2Conduite à tenir :
- Arrêt des soins
- Mise au repos
- Administration d’O2 à 10L/min
- Surélévation des jambes pour favoriser l’irrigation cérébrale
- Appel du 15 ou 112
- Contrôle de la conscience, d’un pouls radial ou carotidien.
X.2.3Evolution
L’évolution à redouter est la chute de la TA due à la diminution du
volume circulant et ses conséquences , l’insuffisance respiratoire due à
102
l’œdème laryngé et le bronchospasme et donc un mauvais apport d’O2 dans
les tissus.
La survenue de troubles de la conscience et le bronchospasme soulignent
une
URGENCE VITALE !
Elle nécessite l’administration d’Adrénaline à 0,3 mg en intramusculaire (IM),
dont l’action est à la fois vasoconstrictrice, bronchodilatatrice, anti-
histaminolibératrice et favorise la contractilité cardiaque.
S’en suit et la surveillance de la tension (pouls radial ou carotidien), ainsi que
l’évaluation de l’état de conscience par stimulation verbale.
Il peut arriver que la dégradation aille jusqu’à l’arrêt cardiorespiratoire,
nécessitant une Réanimation Cardio-Pulmonaire (RCP).
Dans ce cas continuer le massage cardiaque jusqu’à l’arrivée des secours qui
prendront le relais (1 mg d’adrénaline administré par voie veineuse à l’arrivée
du SAMU).
103
Figure 29 : Scénario du choc anaphylactique
104
X.3 L’ASTHME
Maladie chronique, probablement inscrite en grande partie dans les
gènes, soumise également à des facteurs environnementaux et allergiques.
La crise est une broncho constriction paroxystique spasmodique due à
l’inflammation bronchique avec contraction des muscles lisses bronchiques.
En France, on dénombre chaque jour 7 décès par crise d’asthme.
C’est une maladie difficile à contrôler car en dehors des crises, les
malades vont bien, et n’ont pas envie de se soigner, donc font peu d’effort
pour se faire suivre. Cette absence de traitement augmente beaucoup le
risque d’arrêt cardiaque.
Pour l’anecdote, le frère de Michel Drucker et fondateur de la chaine M6 est
mort d’un arrêt cardiaque suite à une sévère crise d’asthme.
Chez un chirurgien dentiste, le facteur principal de déclenchement est le
stress.
Le premier barrage à l’apparition de la crise est préventif : établir un
environnement de confiance et de détente envers le patient.
Le diagnostic d’une crise ne pose généralement pas de problème tant la
dyspnée sifflant est caractéristique, accompagnée d’une sensation
d’étouffement, d’agitation. Il faut immédiatement rechercher d’éventuels
signes de gravité :
- forts sibilants,
- difficulté à parler, finir une phrase ou compter jusqu’à 10,
- une fréquence cardiaque supérieure à 120 battements par minutes,
- éventuelle cyanose,
- troubles de la conscience.
X.3.1Conduite à tenir en cas de crise :
105
1. Arrêt des soins,
2. Mise en position semi assise du patient, pour faciliter son relâchement,
3. Administration de 2 bouffées de Ventoline®,
4. Appel du SAMU, car une dégradation rapide est possible.
X.3.2Evolution :
Soit on constate une amélioration avec disparition des signes après
administration de Ventoline®, soit elle ne cède pas à la Ventoline®, on peu
alors craindre une crise plus sévère d’asthme aigu grave, c’est une Urgence
Vitale !
X.3.3En cas d’asthme aigu grave:
Il faut renouveler les bouffées de Ventoline® et administrer 10 L d’O2/min.
Si l’état s’aggrave encore la complication redoutée est l’arrêt
cardiorespiratoire, auquel cas il faut entreprendre une RCP, avec Adrénaline à
0,3mg en Intra Musculaire sous indication du SAMU, et démarrer le massage
cardiaque jusqu’à l’arrivée des secours.
106
Figure 30: Scénario de la crise d'asthme
107
X.4 OBSTRUCTION DES VOIES AÉRIENNES SUPÉRIEURES
X.4.1Cas de l’obstruction partielle
Lors d’une obstruction des voies aériennes par un objet, la plupart du temps
elle est partielle et le patient respire plus ou moins efficacement, avec des
quintes de toux en parallèle, jusqu’à expulsion de l’objet étranger.
X.4.1.1Conduite à tenir
- Arrêt des soins
- Mise en position de repos semi assis, calmer le patient,
- Laisser tousser, surveiller,
- Eventuellement appel au 15 ou 112
X.4.2Cas de l’obstruction complète
C’est une Urgence Vitale !
Dans ce cas le patient ne présente ni parole, ni toux, ni respiration et portera
généralement ses mains à la gorge.
X.4.2.1Conduite à tenir
- 5 claques entre les omoplates pour redonner un reflexe de toux.
A partir de là, deux issues :
- le patient se met à tousser, on le laisse faire, si le corps étranger est
expulsé c’est bon. On donne de l’O2 15l/min.
- le patient continue à étouffer, il faut alors pratiquer la manœuvre de
Heimlich à 5 reprises, vouée à faire sortir le corps étranger, en
alternance avec les claques dans le dos.
Si toutefois ces manœuvres n’ont pas d’effet, on peut aboutir à une perte de
connaissance, avec arrêt cardiorespiratoire, nécessitant un appel rapide au
SAMU et la mise en place d’une RCP en attendant l’arrivée des secours.
108
Figure 31 : Réaction à une obstruction complète (Source : Santé A-Z)
109
Figure 32 : Scénario de l'obstruction des voies aériennes
110
X.5 EPILEPSIE
C’est une affection neurologique, symptôme d’une hyperactivité cérébrale
paroxystique, se manifestant par des convulsions et/ou perte de conscience.
Les crises peuvent être partielles ou généralisées, en fonction de
l’importance de la perturbation du cortex cérébral.
La crise épileptique revêt plusieurs formes cliniques, de la myoclonie (rapide
et faible contraction musculaire), à l’absence, ou petit mal épileptique
souvent passés inaperçus, jusqu’à la crise tonico-clonique plus
caractéristique, qui va nécessiter notre intervention.
Les causes sont nombreuses et complexes, mais souvent dues à un sevrage
éthylique, un arrêt médicamenteux (benzodiazépines, barbituriques,
antiépileptiques), les lésions cérébrales (infections méningées),
accompagnées d’un stress physique ou psychique et de fatigue, terrain
favorable à l’apparition d’une crise.
X.5.1Manifestations cliniques du patient sujet à une crise
Dans l’ordre, une :
1. Eventuelle aura qui se manifeste par des scotomes scintillants,
2. Perte brutale de connaissance,
3. Souvent accompagnée de la perte d’urine et morsure de la langue,
4. Phase de rigidité musculaire extrême (phase tonique) suivie de,
5. Phase de convulsions (phase clonique) avant stabilisation,
6. Phase de récupération, durant laquelle la respiration revient, restant
stertoreuse, patient fatigué et confus qui s’endort.
X.5.2Conduite à tenir
Pendant la phase tonico-clonique, l’unique chose à faire est de protéger la
tête du patient afin d’éviter un traumatisme crânien.
111
A l’arrêt des convulsions, on met le patient en PLS, puis on lui administre de
l’O2 à 10l/min.
Le lien avec le SAMU est fait et on suit ses indications.
X.5.3Etat de mal épileptique
Il est des cas où il n’y a pas d’éveil du patient entre plusieurs crises
convulsives , c’est l’état de mal épileptique, engageant le pronostic vital du
patient.
Il faut alerter immédiatement le SAMU, qui doit mettre en place une prise en
charge spécifique.
112
Figure 33: Scénario de la crise d'épilepsie
113
X.6 EMPHYSÈME SOUS CUTANÉ
Il s’agit d’un œdème extensif des tissus mous pouvant s’étendre au thorax
et à la face.
C’est une infiltration d’air dans les tissus celluleux, sous muqueux ou sous
cutané provoquée par des soins dentaires, il survient rapidement le plus
souvent après séchage intempestif de canaux radiculaires à l’air comprimé
ou après une extraction nécessitant une forte pression d’air [4].
X.6.1Signes cliniques
Gonflement d’une partie du visage.
Le signe principal et pathognomonique : crépitations neigeuses à la
palpation.
Aucune douleur.
X.6.2Conduite à tenir
Il n’est pas nécessaire d’appeler le SAMU.
Rassurer le patient.
Faire une prescription éventuelle d’antibiotiques contre une infection par les
bactéries anaérobies si l’on soupçonne une extension à l’hémiface
controlatérale.
Dans ce cas, prévoir une surveillance hospitalière de quelques jours.
X.6.3Complications :
114
Les complications sont théoriques, mais encore jamais décrites dans la
littérature comme pouvant faire suite à un emphysème après un traitement
dentaire.
Pour les citer : pneumomédiastin, pneumothorax ou une cécité due à la
compression du nerf optique.
115
Figure 34: Scénario de l'emphysème sous-cutané
116
X.7 MALAISE HYPOGLYCÉMIQUE
L’hypoglycémie correspond à un taux de glucose dans le sang < 0,6
gramme/litre
(3 mmol/l).
Les symptômes témoignent d’un fonctionnement anormal du cerveau, la
neuroglucopénie.
Chez le patient diabétique traité, les principales étiologies d’un malaise
peuvent être dues au traitement, par erreur de dosage d’insuline à injecter, à
un écart de régime (oubli de collation ou insuffisante ration d’hydrates de
carbone), une prise de médicaments hypoglycémiants (salicylés,
bêtabloquants, sulfamides), et/ou d’alcool.
Parallèlement à cette réaction hypoglycémique une réaction neurovégétative
de sécrétion d’adrénaline, en réponse de l’organisme à cette situation de
danger imminent.
X.7.1Signes cliniques :
Cette symptomatologie est polymorphe et non spécifique.
Les symptômes adrénergiques sont : une sensation de faim désagréable, des
sueurs, une tachycardie, une agressivité.
Les symptômes neuroglucopéniques sont : l’asthénie, les céphalées, les
convulsion, le coma.
X.7.2Conduite à tenir
Elle est avant tout préventive, en choisissant le début de journée pour
réaliser l’acte, et en s ‘assurant d’une bonne alimentation du patient avant le
rendez-vous.
Si un malaise hypoglycémique survient, il faut resucrer le patient via une
boisson sucrée.
117
Si le patient est dans le coma : il faut appeler le SAMU, faire une injection IM
de Glucagon 1 mg (stylo) sous contrôle du médecin régulateur, appliquer du
miel si disponible sur la muqueuse jugale.
Entreprendre une RCP si nécessaire.
118
Figure 35: Scénario du malaise hypoglycémique
119
Ce travail sur les scénarios, nous a permis de synthétiser les connaissances à
mobiliser face à une situation d’urgence.
Grâce à une dichotomie simplifiée dans les scénarios, on insiste sur les
reflexes essentiels, évitant ainsi de se mélanger les idées, ce qui serait le cas
avec des arbres décisifs diagnostiques trop complexes, non mobilisables par
la mémoire en situation de stress. Ce besoin de simplification s’est avéré très
intéressant, consistant en un travail de vulgarisation, sans pour autant perdre
la « substance » médicale. Cela nous a donné l’occasion de replacer les
limites des compétences du chirurgien dentiste dans la prise en charge
d’urgences, et de bien définir sa place dans la chaîne de survie du paient
dans un tel cas.
Les scénarios ainsi obtenus nous ont servi à la fois à créer des diaporamas
de cours récapitulatifs spécifiques à chaque type d’urgence, servant de
support théorique ; mais ils nous ont également servi à l’élaboration du
programme de simulation, le serious game à proprement parler.
La manipulation de l’outil numérique nous a permis d’en découvrir de
nouvelles propriétés et possibilités pédagogiques jusque là ignorées.
XI.RÉSULTATS
Une première version du serious game sur les Urgences médicales au cabinet
dentaire à vu le jour sur le site Dental Life en février 2011 (adresse internet
www.dentallife.fr).
XI.1 DESCRIPTION
Décrire l’expérience d’une visite sur Dental Life semble être la meilleure
façon de le présenter.
120
XI.1.1Arrivée sur l’Ile :
Après avoir créé son avatar, on arrive dans la zone d’accueil (figure 29), très
pédagogique, qui explique les fonctions de base, ou comment explorer le
monde virtuel et ses habitants. On y apprend comment écrire et interagir
avec les autres avatars.
Figure 36 : Zone d’accueil de Dental Life (Source : www.dentallife.fr)
XI.1.2 Découverte d’Ivoire
En se baladant sur Ivoire, on se retrouve dans un environnement convivial,
propice à l’interaction, alternant lieux de détente et lieux de travail.
L’atmosphère de Dental Life rappelle celle des grand rendez-vous de la
profession, comme l’ADF par exemple.
Que l’on se situe dans le palais des Congrès du site pour y suivre une
conférence dans un amphithéâtre virtuel (figure 37), ou assis dans un canapé
à discuter de ses dernières expériences avec un confrère, ou occupé à
découvrir les récentes innovations des laboratoires dans une exposition
virtuelle ; tous les professionnels du secteur dentaire sont présents sur
Ivoire.
121
Figure 37 : Pause dans un canapé et visite de l’amphithéatre (Source : www.dentallife.fr )
En discutant par écrit ou vocalement avec les autres avatars, on découvre une
grande facilité de communication et on peut envisager toutes les possibilités
de collaborations.
L’avantage d’une bonne communication se renforce lorsque l’on tombe sur
des diaporamas de cours disposés un peu partout sur l’Ile ; on s’imagine un
instant, pouvoir poser des questions à un professeur dont l’avatar serait
présent en direct, ce qui procurerait les mêmes conditions d’interactions
qu’un cours en réel.
Si toutefois, la raison de notre présence sur l’Ile est de tester le serious
game, on peut y aller directement, soit en marchant, soit en se téléportant
grâce à des fenêtres actives disposées à cet effet à différents endroits.
XI.1.3Structure du serious game
La zone de formation dédiée au serious game peut être divisé en 4,
correspondant à la zone d’accueil puis aux 3 étapes de formation :
122
1. Une zone d’accueil, qui dispense les informations et les modalités
d’utilisation du programme de simulation.
Figure 38 : Zone d’accueil du serious game (Source : www.dentallife.fr )
2. Une zone de diaporamas spécifiques à chaque type d’urgences
rencontrées plus tard dans les mises en situation (figure 39). Ces
rappels de cours théoriques permettent de répondre au questionnaire
sous forme de quizz, indispensable à valider pour ouvrir l’accès aux
simulations.
Figure 39 : Diaporamas de la zone serious game (Source : www.dentallife.fr )
123
3. Le questionnaire, auquel il faut répondre avec au moins 80 % de
réponses justes, libère l’accès aux animations d’entraînement. La non
validation d’un des quizz oblige à attendre au moins 24h avant de le
retenter. Il faut valider tous les quizz avant de passer à la suite.
Figure 40 : Etape de quizz du serious game (Source : www.dentallife.fr )
4. Les simulations : une fois les quizz entièrement validés, on peut
prendre place sur le siège de dentiste du cabinet reconstitué en 3D de
façon très réaliste, ce qui plonge dans un fort sentiment de présence.
Un choix de scénario est proposé et il faut adopter les bons
comportements face à diverses pathologies qui arrivent au patient que
l’on est en train de traiter. Le but étant bien évidemment d’en assurer
la survie.
Figure 41 : Mise en situation 3D (Source : www.dentallife.fr )
124
XI.1.4Discussion
Il s’agit bien là de la première version d’un serious game qui va être étoffé et
enrichi par l’ajout de scénarios et de règles d’utilisation.
Les premières impressions cependant sont très encourageantes. On se trouve
dans un environnement immersif, un graphisme reproduisant avec qualité les
conditions d’un cabinet dentaire, et la présence possible d’avatars
spectateurs ajoutant une certaine pression sur l’internaute qui « joue ».
L’évolution de ce serious game sera possible aussi grâce aux retours des
participants, dont les remarques de tous ordres sont susceptibles
d’améliorer la formation.
Voici quelques remarques ouvertes :
- faut il garder le questionnaire obligatoire, dont l’échec barre l’accès à la
simulation ? L’attrait du programme vient des mises en situations, et le
parcours exigeant qui y conduit peut être décourageant. On pourrait
éventuellement rendre le quizz facultatif
- Un pourcentage de bonnes réponses à atteindre de 80% est il justifié ?
Pourquoi pas 100% ?
- la possibilité de recommencer plus rapidement après avoir échoué ?
- Quand on commet une erreur au quizz, elle n’est pas signalée
immédiatement, on sait à la fin qu’on fait une faute, mais pas laquelle.
On pourrait montrer l’erreur précise, ce qui en même temps
conforterait les autres réponses.
- Comme pour beaucoup de jeux vidéo, une introduction serait motivante.
A l’image de Pulse par exemple, un petit Teaser d’intro serait
125
bienvenu, pour « transporter le joueur dans le monde du serious
game »
- La prise en main n’est pas évidente au départ, pour prendre les objets et
savoir où ils se trouvent. On pourrait faire un tutoriel, de prise en main
du programme. Il s’agirait d’une mission simple, demandant par
exemple d’oxygéner le patient, ou d’appeler le SAMU, juste pour
manipuler les différents paramètres avec aisance.
- On pourrait également renforcer le stress procuré par l’évolution d’un
score, une limite de temps…
Il s’agit là de pistes de réflexion pour enrichir et faire progresser la
pertinence de ce programme, jusqu’à en faire, pourquoi pas un jour,
un support de formation continue à part entière.
126
CONCLUSION
Faire face à une urgence médicale au cabinet dentaire est toujours une
situation délicate, qui demande une parfaite connaissance des symptômes et
des traitements, mais surtout qui nécessite un entraînement régulier
permettant l’acquisition d’automatismes. Or, comme les urgences sont des
évènements rares, ces automatismes ne peuvent être entretenus. Une
alternative à l’enseignement des urgences en « présentiel » est l’utilisation
d’un « serious game » dans un univers virtuel 3D, accessible en permanence.
Cette innovation a vu le jour récemment.
Le but de notre travail a été de réaliser des scénarios utilisables pour monter
un projet de serious game sur les urgences médicales au cabinet dentaire.
Pour cela, nous avons parcouru le paysage éducatif afin d’y définir la place
de ce support pédagogique et d’en dégager les intérêts.
Le serious game est un outil novateur qui semble apporter de nouvelles
fonctionnalités ; c’est un programme informatique aux dimensions ludiques
et sérieuses au service d’un objectif pédagogique, qui fait partie des TICE
(Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement),
vaste panel d’outils numériques se développant dans l’enseignement depuis
les années 2000.
Les enseignants se trouvent face à une nouvelle génération d’apprenants
ouverts à l’utilisation d’outils numériques dans leur formation, mais à qui
l’on n’a pas forcément proposé les supports adaptés, ni argumenté les
intérêts pédagogiques, ni donné les moyens techniques suffisants pour les
exploiter.
Ce travail tente de mettre en avant ces intérêts, et compare la vision
pédagogique constructiviste, sur laquelle s’appuient ces nouveaux outils,
avec une vision pédagogique transmissive, plus traditionnelle, actuel
héritage des courants de pensées pédagogiques successifs.
127
La plupart des études tendent à montrer les avantages du serious game ,
outil le plus souvent utilisé en « distanciel », en le comparant à une
pédagogie en « présentiel », ce qui peut parfois effrayer quand au devenir du
professeur en tant que personne.
Le serious game doit être considéré en complément à la formation
traditionnelle, et non pas en remplacement de celle-ci.
Les avantages propres au serious game regroupent des qualités ludiques et
collaboratives, motivantes pour une génération d’apprenants « connectés » ,
ainsi qu’une flexibilité d’utilisation et une grande autonomie de progression
assurées à l’utilisateur ; tous ces éléments étant au service d’une vision
pédagogique constructiviste.
Le serious game sur les urgences médicales au cabinet dentaire a été réalisé
au sein d’un univers virtuel 3D. Dans cet univers, la zone de formation
dentaire présente de nombreuses qualités intrinsèques :• Une immersion 3D, procurant une sensation de présence comparable au
réel,• Une communication performante, par « chat » écrit ou par échange
vocal.• Des vertus collaboratives faisant intervenir toute la communauté des
chirurgiens dentistes dans diverses activités individuelles ou de
groupe. • La convivialité d’un grand espace de rencontres.• Un accès ouvert à tous en permanence, à des contenus de cours, des
conférences, et des rencontres professionnelles.• La possibilité de créer de nombreux types de supports pédagogiques.
Dans le cadre de notre travail, nous avons ensuite mis au point des scénarios
de situations d’urgences susceptibles de survenir dans la profession
odontologique.
128
Pour garantir d’une part une approche réaliste de l’urgence, et d’autre part
définir avec précision les réactions attendues de la part du chirurgien
dentiste face à une telle situation, un médecin anesthésiste-réanimateur du
CHU de Strasbourg impliqué dans la formation des chirurgiens dentistes, a
participé à la mise au point de ces scénarios.
Ces scénarios ont ensuite été utilisés pour l’élaboration du serious game, se
déroulant en 3 parties :
- Des rappels de connaissances sous forme de diaporamas
thématiques,
- Le contrôle de ces connaissances sous forme de Quizz,
- Des simulations réalistes en 3D de différents cas d’urgences, dans
un cabinet dentaire virtuellement reconstitué.
Ce serious game, dont l’objectif pédagogique est d’entraîner les praticiens et
étudiants dentistes aux principaux réflexes à avoir face à un patient en
situation d’urgence, a reçu une subvention de l’UNF3S en 2010, et est
accessible gratuitement après inscription sur le site (http://
www.dentallife.fr).
Il s’agit là d’une première version pour ce programme de simulation; d’autres
scénarios viendront prochainement l’étoffer, au même titre qu’une
amélioration des fonctionnalités du jeu s’appuyant sur les retours
d’utilisateurs.
Pour approfondir les résultats probants des premières enquêtes
pédagogiques, bien que portant sur de faibles échantillons, il serait
souhaitable d’évaluer cet outil numérique par des études intégrant de plus
grands effectifs, et d’autres disciplines telles que l’ergonomie, les
neurosciences, l’anthropologie ou encore les sciences cognitives.
129
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Remarque : nous ferons souvent référence au cours de notre ouvrage à des articles de Wikipédia. Il nous a semblé pertinent de procéder ainsi, malgré toutes les critiques pouvant concerner cette encyclopédie, par le simple fait que Wikipédia est le fruit d’un travail collaboratif. Il serait en effet fort ambigu de traiter du travail collaboratif et de rejeter le fruit d’un tel travail…
1. Définition de pédagogie. Dictionnaire Larousse.
2. L’évolution de la pédagogie en France/ Emile Durkheim, 1905.-136 p.
3. Didactique/ Article Wikipedia. Site web : http://fr.wikipedia.org/wiki/Didactique
4. Pédagogie/Article Wikipédia.Site web : http://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A9dagogie
5. Biographie de Comenius/Marie-France Blanquet , Maître de conférence à l’IUT Bordeaux III.- Savoirs CDI, année 2010.
6. Encyclopédie thématique Jean-Jacques Rousseau/Gérard ALLARD.- Faculté de Philosophie ; Université Laval, année 1988.
7. Sérious Game : révolution pédagogique/Valérie Lavergne Boudier ; Yves Dambach.- Hermes Science Publications, année 2010.-216p.
8. Les modèles pédagogiques/CUEEP ; Université de Lille.Site internet: http://cueep.univ-lille1.fr/pedagogie/uc9/rouge.htm
9. Les modèles d’enseignement/Site officiel de l'enseignement de la physique de l'enseignement secondaire.Site internet :http://bdp.ge.ch/webphys/
10.Pédagogie de maîtrise/Cyril Rebetez ; Véronique Crelier Hamidou.- Faculté de psychologie et de Sciences de l’éducation-Université de Genève.
11.Burrhus Frédéric Skinner et la machine à enseigner/ParadoxaSite internet : http://paradoxa1856.wordpress.com/2008/12/05/burrhus-frederic-skinner-et-la-machine-a-enseigner/
12.Formation aux gestes et soins d’urgence - AFGSU/Arrêté du 3 mars 2006 relatif à l’attestation de formation aux gestes et soins d’urgence.Site inernet : www.secourisme.net
130
13.Les urgences vitales et non vitales au cabinet dentaire - une enquête française / Alice Bildstein, année 2008.-115f. : 26 ill. ; 29,7cm.
14.Liste des organismes de formation continue de l’Ordre National des Chirurgiens Dentistes / CNFCO, année 2011.
15.Les TICE / Article Wikipédia. Site internet :http://fr.wikipedia.org/wiki/Technologies_de_l%27information_et_de_la_communication_pour_l%27enseignement
16.Enseignement de la médecine, les + de la 3D/ Christophe Batier ; Université de Lyon 1 ; Web conférence, année 2011.
17.Vidéo « causerie » sur l’enseignement et les mondes immersifs/Christophe Batier ; Jean Paul Moiraud; Jacques Rodet.- Ange Zanetti, année 2011.Site internet : http://angezanetti.com/interet-usages-enseignement-mondes-immersifs/
18.Colloque International de l’Université à l’Ere du Numérique/ Strasbourg ; 14-15-16 Juin 2010 ; http://www.ciuen.fr/ .
19.Les platesformes virtuelles d’apprentissage en Europe/Caisse des dépôts ; Direction du développement territorial et du réseau.-Paris : Site internet Projets ENT, 2010.- 92p.
20.Le FLOW : l’expérience optimale ou autotélique/Jean Heutte, 2006. Site internet : http://jean.heutte.free.fr/spip.php?article54
21.A Survey of Health-Related Activities on Second Life/Leslie Beard; Kumanan Wilson; Dante Morra; Jennifer Keelan.-Journal of Medical Internet Research, Vol.11, N°2, 2009.
22.Choosing virtual worlds for use in teaching and learning in UK higher education / John Kirriemuir ,- Virtual World Watch, 2009.-31p.
23.Supporting Education in Virtual Worlds with Virtual Learning Environments / Imperial College London.
http://www1.imperial.ac.uk/medicine/teaching/elearning/news/vwvle/#fni-1
24.Top 10 des Sites médicaux virtuels dans Second Life/Science Roll, 2007.Site internet : http://scienceroll.com/2007/06/17/top-10-virtual-medical-sites-in-second-life/
131
25.Learning in a Virtual World: experience with using Second Life for
Medical Education/John Wiecha; Robin Heyden; Elliot Sternthal; Mario Merialdi.-Journal of Medical Internet Research, Vol. 12, N°1, 2010.
26.A virtual toothache helps student dentists learn patient-side communications/Case WesternReserve University, 2008.
Site internet : http://blog.case.edu/case-news/2008/07/28/virtualdentistry
27.Student Perceptions of a Course Taught in Second Life/Catheryn Cheal ; Vagner Whitehead-Oakland university.- Innovate, 2008.-6p.
28.Introduction au Serious Game/Julian Alvarez ; Damien Djaouti ,- Mercuès : Editions Questions Théoriques, année 2010.-225p. ; 20cm.
29.Entretient du 15/09/11 avec Phillipe Portelli, directeur des Usages Numériques de l’Université de Strasbourg.
30.Web 1.0 à 3.0 : les étapes de l'évolution/L'Atelier Informatique – Référencement. http://www.atelier-informatique.org/internet/evolution-web-10-web-20-web-30/358/
31.The Motivational Pull of Video Games: A Self-Determination Theory Approach/ Richard M. ; Ryan C. ; Scott Rigby ; Andrew Przybylski.-Motivation and emotion, 2006.-pp.347-363
32.Quels usages pour les jeux électroniques en classe ?/Rapport d’etude 2009 European Schoolnet, 2009.-180p.
33.Site internet de l’Agence nationale des Usages des TICE : http://www.cndp.fr/agence-usages-tice/
34.Les TIC : éléments sur leurs usages et leurs effets :ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/dpd/noteeval/ne0301.pdf
35.Le système éducatif /Repères et références statistiques, 2011. –pp.19-20.(document PDF)
36.Politique des TICE/ Site internet Eduscol, 2011.
Lien internet : http://eduscol.education.fr/textes/reglementaires/tice/@@document_whole2
37.Medical student attitude toward video games and related new media technologies in medical éducation/Frederick W Kron ; Craig L Gjerde ;
132
Ananda Sen ; Michael D Fetters.-BMC Medical Education, Vol. 10, 2010.
38.Usages Numériques : enquête auprès de l’étudiants/Philippe PORTELLI.- Strasbourg : Observatoire des Usages du Numérique, 2011.
39.Réanimation et Urgences/Collège National des Enseignants de Réanimation Médicale.- Paris : Masson, 2005.-597p. ; 25cm.
40.Medical Emergencies and Resuscitation/ Resuscitation Council.- United Kingdom, 2006.
41.Syndrome coronarien aigu, le point de vue hospitalier/ Negar Sedghi ; Laurent Calvel.-Hopitaux Universitaires de Strasbourg, 2008.- 28p.
42.Urgences au cabinet dentaire/B.Calon, Conférence au symposium du CAICB.- Strasbourg, 2009.
43.E-formation en médecine d’urgence.http://www.efurgences.net/index.php/accueil
44.Les Urgences médicales au cabinet dentaire/ Florian L.; Guy B.; atherine B.; Yves L.; Philippe L.; Louis M.; Philippe R.- Paris : Dossier ADF, 2009.-92 p. ; 24cm.
45.Exploring Virtual Worlds for scenario-based repeated team training of Cardiopulmonary Resuscitation in medical students/ Johan Creutzfeldt; Leif Hedman; Christopher Medin; Wm. LeRoy Heinrichs; Li Felländer-Tsai.-Journal of Medical Internet Research, Vol.12, N°3, 2010.
46.Le potentiel du jeu vidéo pour l’éducation/Catherine Frété.- Genève ; Mémoire de DESS STAF, 2002.- 148p.
47.Logiciel MICROSIM, Apprendre l’urgence médicale à distance : une première mondiale à l’Université Lyon 1/Martine Heyde ; Christophe Batier ; Gérard Ferrer ; Olivier Bastien ; Berand Bui Xuan,-Lyon, 2006.
48.Retour d’expérience Pulse !!/Web conférence du site internet Interaction Healthcare, le 29 juin 2011. Site internet : http://groupe-interaction.adobeconnect.com/p97589627/?launcher=false&fcsContent=true&pbMode=normal
49.Reportage de Télématin (France 2) sur le serious game santé de simulation 3D, Pulse!!/Archives Interaction Healthcare. Site intenet :
133
http://www.interaction-healthcare.com/actualite-france-2-parle-du-serious-game-sante-pulse-dinteraction-healthcare-78.html
50.Serious gaming technology in major incident triage training: a pragmatic controlled trial/Knight JF ; Carley S ; Tregunna B ; Jarvis S ; Smithies R ; de Freitas S ; Dunwell I ; Mackway-Jones K.- Elsiever Sciences ; Official Journal of the European Resucitation Council, vol. 81, année 2010.
WEBOGRAPHIE
1. http://blog.dentallife.fr/
2. http://www.zedental.com/formations/fiche.cfm?i=ZEDE00000000986
3. http://www.dentalespace.com/dentiste/formation/video-352.htm
4. http://anatomie3d.univ-lyon1.fr/
5. http://elearning-strategy.com/fr/?p=212&utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+eLearningStrategy+%28e-Learning+Strategy%29
6. http://eduscol.education.fr/dossier/jeuxserieux/cadre-universitaire/medecine-sante/second-life
7. http://www.sciencedaily.com/releases/2009/06/090611084130.htm
8. http://www.kimind.fr/2008/07/01/entreprise-20-et-courbe-dapprentissage/
9. http://www.esculape.com/cardiologie/coronaire_aigu.html
10.http://www.efurgences.net/index.php/pratique/94-sca-diagnostic
134
11.http://eduscol.education.fr/cid46073/b2i.html
12.http://serious.gameclassification.com/FR/index.html
13.http://www.ciuen.fr/
14.http://www.ilumens.org/
15.http://www.stayingalive.fr/
16.http://www.educause.edu/EDUCAUSE+Review/EDUCAUSEReviewMagazineVolume43/EducationalFrontiersLearningin/163163
17.http://www.enseignons.be/actualites/2011/05/26/serious-game-interet-enseignement/
18.http://www.canal-u.tv/producteurs/universite_bordeaux_segalen_dcam/dossier_programmes/colloques/ip3s_2010/ip3s_2010_session_2_serious_games
19.http://www.interaction-games.com/serious-games/1/sante-pulse-simulation-3d/
Top Related