Download - Solidarité 1/2010

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Le magazine de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO • Février 1/2010www.oseo.ch

SuisseMaîtriser son environnement grâce au français

NicaraguaDes jeunes unis contre la violence

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Chère lectrice, cher lecteur,

À l’école, vos enfants apprennent une deuxième langue,

l’anglais ou l’allemand. Mais que diriez-vous si le fran-

çais, leur langue maternelle, n’y était plus enseigné? Que diriez-vous si votre enfant répétait que c’est l’alpiniste anglais Edward Whymper qui a découvert le Cervin? Il faudrait lui rappeler que ce sont des guides de Zermatt qui ont permis le succès de la première ascension du Cervin.

En Afrique, on est en train de se réapproprier langue

et histoire: il était grand temps. Il y a vingt-cinq ans encore, je lisais dans les livres d’histoire du Zimbabwe que David Livingstone avait découvert les chutes Victoria. Depuis lors, cela a été corrigé: on explique désormais qu’il a été le premier Européen à y parvenir, dans une expé-dition avec des gens du lieu. Au Burkina Faso, les enfants suivent désormais l’école d’abord dans leur langue maternelle, puis dans une deuxième langue, le français.

Sous la conduite de Paul Taryam Ilboudo, l’OSEO

a largement contribué à ce que les langues africaines

trouvent leur place dans les programmes scolaires

du Burkina Faso. Depuis le milieu des années nonante, le modèle de «l’éducation bilingue» a été mis au point, et est aujourd’hui reconnu par l’Etat.

Alors que ce numéro de Solidarité est à l’impression, une

conférence importante sur ce sujet se déroule à Oua-

gadougou: y ont été invités 24 Etats d’Afrique, et l’OSEO elle aussi, reconnaissance méritée de notre travail. Paul Ilboudo espère que la conférence contribuera à faire entrer définitivement l’intégration des langues et des cultures africaines dans le système scolaire. Vous trouverez des informations sur la conférence sur www.oseo.ch.

Ruth Daellenbach, directrice de l’OSEO

19.12.2009 Yves Ecœur nommé secrétaire général de l’OSEOL’actuel directeur de l’OSEO Valais, Yves Ecœur, va quitter ses fonctions à Sion après quatorze années de collaboration. A partir du mois de juil-let, il sera le nouveau secrétaire général de l’OSEO Suisse. La structure nationale chapeaute une dizaine d’associations régionales occupant un total de 300 personnes et est dotée d’un budget de près de 15 mil-lions de francs.

09.12.2009 Achats publics équitablesDix-huit mois après le lancement de sa campagne «Non à l’exploitation grâce à nos impôts!», l’OSEO tire un bilan positif. Des interventions parlemen-taires ont été déposées dans une centaine de com-munes. Fin novembre, Christian Levrat et Hans-Jürg Fehr, président de l’OSEO, ont fêté ce beau succès en lâchant sur la Place fédérale 100 immenses ballons.

02.12.2009 Exporter le partenariat social à l’Est?Harmoniser vers le haut les normes sociales des pays européens, en particulier dans les pays de l’Europe centrale et orientale, cela grâce au partenariat social. Tel était le thème du symposium mis sur pied par l’OSEO le 19 novembre dernier à Zurich. Une cen-taine de représentants syndicaux et patronaux, ainsi que des représentants gouvernementaux venant de Suisse et d’Europe centrale et orientale, y ont participé. Micheline Calmy-Rey est notamment intervenue pour rappeler l’importance du dialogue social dans le développement économique.

10.11.2009 Une tragédie au Salvador«Ida» poursuit sa route vers le golfe du Mexique et le sud des Etats-Unis. L’ouragan a causé dimanche la mort de 130 personnes au Salvador, où l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO dispense une aide d’urgence.

Revue de presse

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Editeur: Œuvre suisse d’entraide ouvrière,Quellenstrasse 31, 8031 Zurich, tél. 021 601 21 61, e-mail: [email protected] CP 10-14739-9 Lausanne. www.oseo.ch

Rédaction: rosanna Clarelli, Christian Engeli, Hans Fröhlich,alexandre Mariéthoz, Cyrill rogger, Katja Schurter (resp.)

Layout: atelier Binkert, www.atelierbinkert.ch

Traduction: irene Bisang, Marianne Enckell, Ursula Gaillard,Milena Hrdina, Peter Schrembs

Correction: angelo Ciampi, Jeannine Horni,Frances trezevant

Impression et expédition: Unionsdruckerei/subito aG, Platz 8, 8201 SchaffhausenParaît quatre fois par an. tirage 37 000 ex. Le prix de l’abon- nement est compris dans la cotisation (membres individuels 50.– par an minimum, organisations 250.– minimum). imprimé sur papier recyclé

Impressum

SUISSE100 communes suisses veulent acheter équitable 4

aSaFi: une contribution à une véritable politique d’intégration 6

POINT DE VUEdes offres de formation et des contacts pour favoriser l’intégration 9

INVITATION 10

INTERNATIONALSerbie: améliorer la sécurité au travail grâce au dialogue social 11

Nicaragua: des jeunes s’engagent contre la violence et la discrimination 12

reconstruction à Sumatra après le tremblement de terre 14

DONSQuand le chagrin fait naître l’espoir 17

PORTRAITMartín Pérez est le nouveau coordinateur de l’OSEO en Bolivie 18

Photos de couverture: dans le cadre du programme aSaFi, des migrants apprennent le français. Photos: robert Hofer

INTERNATIONAL a Mulukukù, des jeunes s’engagent, avec des débats et des émissions de radio, contre la violence et la discrimination. P. 12–13

SUISSE Worb est l’une des 100 communes suisses à avoir décidé

d’acheter équitable. des ballons ont célébré ce beau succès. P. 4–5

INTERNATIONAL après le tremblement de terre de Sumatra, l’OSEO apporte une aide à la reconstruction. P. 14–15

SUISSE Le programme aSaFi de l’OSEO Genève aide des personnes migrantes à apprendre le français et à maîtriser leur environnement. P. 6–7

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Cent communes suisses veulent acheter équitableWorb achète désormais durable et compte ainsi parmi les cent communes qui appliquent le slogan «Non à l’exploitation grâce à nos impôts!» Bilan.Texte: Marco Kistler. Photos: Monika Flückiger (en bas) et Viktor Fröhlich (à dr.)

Le 26 novembre, l’OSEO et le PS ont lâché cent ballons, un pour chacune des communes où une intervention pour des achats publics équitables a été déposée.

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«Ni les autorités ni le grand public n’avaient conscience du problème», résume Jonathan Gimmel. Conseiller commu-nal socialiste à Worb, dans le canton de Berne, il a œuvré pour que sa com-mune adopte les règles prônées par la campagne de l’OSEO et assume ses responsabilités en adoptant une politique d’achats socialement durable. En ac qué- rant des produits provenant de pays ém ergents ou en développement, la com-mune entend s’assurer qu’ils sont produits dans des conditions de travail équitables, qui respectent donc les principales normes de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Worb achète durableBeaucoup d’habitants de Worb ont re-

pris cette préoccupation à leur compte: il a suffi d’une collecte de signatures au PS local pour réunir le double de paraphes nécessaires au dépôt d’un postulat. Le Conseil communal a ensuite donné son feu vert à une nette majorité.

Quels changements cette décision a-t-elle entraînés pour l’administration com-munale? «Sur le formulaire de déclara-tion spontanée, le soumissionnaire doit désormais garantir le respect des normes de l’OIT», explique Jonathan Gimmel. «S’il ne remplit pas cette condition, il est exclu de la procédure.»

Mais ce n’est qu’une première étape. «Il faut à présent des moyens pour vérifier le contenu de la déclaration spontanée», estime Jonathan Gimmel. L’idéal serait d’adopter des mécanismes de vérification

aux nouveaux cantonal et national. Les communes ayant opté pour des achats équitables plaident dès lors pour une action concertée.

Succès de la campagneDans l’ensemble, l’OSEO peut tirer un

bilan favorable de la campagne lancée il y plus de vingt mois, car Worb n’est pas un cas unique: des interventions ont été dé-posées dans cent communes et un million de personnes vivent aujourd’hui dans des communes misant sur des achats équitables.

Même la Confédération a fait un pre-mier pas: le 18 novembre 2009, le Conseil fédéral a édicté une nouvelle ordonnance qui reprend les exi-gences de l’OSEO en faveur d’achats équi - tables. Jonathan Gim-mel pense que la colla - boration avec l’OSEO a été utile pour sa section du PS: «L’OSEO nous a four-ni les outils: modèles de textes, maté-riel d’information et idées d’actions. Nous les avons appliqués au niveau local et obtenu des résultats positifs.»

Le 26 novembre, l’OSEO et le PS ont fêté le succès de cette campagne com mune sur la Place fédérale. Christian Levrat, pré-sident du PS Suisse, et Hans-Jürg Fehr, président de l’OSEO, ont lâché dans le ciel cent immenses ballons avec l’inscription «La Suisse bouge!». Chacun des ballons portait en outre le nom de l’une des cent communes équitables, de Chêne-Bourg à Zurich en passant par Arlesheim.

Le succès de la campagne a un impact sur nombre d’habitants des pays émergents et en développement. Mais leurs condi-tions de travail ne peuvent s’améliorer que si les consommateurs dans les pays indus-trialisés s’engagent pour un commerce équitable.

Cantons réfractairesLa campagne rencontre cependant un

accueil moins favorable auprès des exé-cutifs et des législatifs cantonaux: «Pour l’instant, seuls Bâle-Campagne, Bâle- Ville, Berne, Uri et Vaud nous ont fait part de leur intention de mener une poli- tique d’achats équitable, en exigeant de

leurs fournisseurs le respect des normes fondamentales de l’OIT», relève Hans-Jürg Fehr, président de l’OSEO. «Le scep-ticisme de nombreux autres cantons est inexplicable. Même de petites communes répondent à nos exigences.»

Christian Levrat, président du PS Suis-se qui est un parrain de l’OSEO, abonde dans ce sens: «Le PSS se réjouit vivement de l’excellent travail accompli ensemble. Grâce à cette campagne, nos sections peu-vent agir dans leur commune pour con-tribuer à donner un visage plus social à la mondialisation.»

La campagne a des effets sur les habitants des pays en développement.

Jonathan Gimmel (à dr.) remet un postulat pour des achats équitables au président de la commune de Worb.

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«J’avais peur que l’on me parle en français»Le programme ASAFI de l’OSEO Genève permet à des personnes migrantes d’apprendre le français et de mieux maîtriser leur environnement. Témoignage.Texte: Alexandre Mariéthoz. Photos: Robert Hofer

«Récemment, je suis allée à la Poste. La personne au guichet ne parlait pas an-glais. J’ai réussi à lui expliquer ce que je voulais en français.» Mary Ann Landicho suit le programme ASAFI (voir encadré) de l’OSEO Genève. Elle mentionne cet épisode avec fierté. Pour la première fois depuis 13 ans, elle a réussi à se faire com-prendre en français à un guichet postal. Interdiction de parler français

Mary Ann Landicho vient des Philippi-nes. Agée de 44 ans, mère de trois enfants aujourd’hui adultes, elle est arrivée en

Suisse en août 1996. Elle s’occupe dans un premier temps de ses deux fils et de sa fille.

Depuis 2000, elle travaille comme em-ployée de maison pour une famille avec six enfants. Elle fait tout: ménage, cuisine, gar-de des enfants, repassage. «Il m’est aussi ar-rivé de déblayer la neige», se souvient-elle. Durant son travail, elle parle uniquement en anglais aux enfants. Son métier lui offre peu de contacts avec l’extérieur. Le français demeure pour elle une langue étrangère.

En 2008, Mary Ann Landicho cesse de travailler pour cette famille. Elle se retrou-ve alors au chômage. «J’ai voulu profiter

de cette période pour apprendre le fran-çais. Mon conseiller m’a suggéré de suivre le programme ASAFI.»

Tri des déchets«Il est difficile d’habiter à Genève sans

parler le français. Cela pose problème en permanence. A la Migros, je n’osais pas demander un renseignement. J’avais même peur que l’on me parle en français, car je n’y comprenais rien», se souvient Mary Ann Landicho.

Depuis qu’elle suit ASAFI, elle revit, même si les débuts furent difficiles. «Après

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Grâce à ASAFI, Mary Ann Landicho (à gauche) apprend le français et maîtrise mieux son environnement.

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le premier cours, j’avais mal à la tête, sou-rit-elle. Je n’avais jamais entendu autant de mots en français.» Quatre semaines plus tard, Mary Ann Landicho participe avec aisance à une conversation, même s’il lui arrive de recourir à un mot d’anglais. Ses

progrès ont surpris ses enfants. «Ils disent qu’ils doivent dorénavant faire attention à leurs propos, vu mes progrès en français», glisse-t-elle avec malice.

Outre l’enseignement du français, le programme ASAFI accorde une grande importance à la maîtrise de son environ-nement. Il permet ainsi à des migrants d’apprendre des gestes qui semblent évi-dents. «Grâce au cours, j’ai compris le système pour trier les déchets», explique Mary Ann Landicho.

Vers une citoyenneté nouvelle«Mme Landicho ne représente pas un

cas isolé, explique Dominique Rey, res-ponsable du programme ASAFI. Des femmes qui sont restées au foyer ne parlent souvent pas un mot de français, alors qu’elles résident dans notre pays depuis une dizaine d’années. C’est aussi le cas de certains hommes qui travaillent dans la construction.» Il en résulte une très mau-vaise connaissance du pays d’accueil et une grande difficulté à s’intégrer.

Le programme ASAFI veut y remédier. Il répond en cela aux nouvelles exigences de la politique migratoire suisse, et en par-ticulier de la nouvelle loi sur les étrangers, qui insiste beaucoup sur l’insertion profes-sionnelle, l’intégration socio-culturelle et la maîtrise de l’environnement. «Des pro-grammes tels qu’ASAFI contribuent à atteindre ces objectifs», note Christian Lopez, directeur de l’OSEO Genève.

«La Suisse, explique-t-il, doit se doter d’une véritable politique d’accueil. Le pro-cessus d’intégration serait grandement facilité si les migrants pouvaient bénéficier

de mesures dès leur arrivée.» Christian Lopez plaide pour une citoyenneté nou-velle, qui permette aux migrants de parti-ciper à la vie sociale et politique. «Il faut fournir les outils nécessaires à la construc-tion de citoyens à part entière, qui maîtri-sent à la fois la langue et leur environne-ment.»

«J’ai enfin compris le système pour trier

les déchets.»

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Un lieu d’intégration

ASAFI (Atelier de soutien à l’appren- tissage du français et à l’intégration) vise d’une part à l’intégration sociale et culturelle et, d’autre part, à la sensi-bilisation aux exigences du marché du travail. aSaFi est destiné à un public d’adultes non francophones ne pou-vant pas, compte tenu de leur niveau de français, s’insérer de manière rapide sur le marché de l’emploi. Ce programme dure huit semaines; 145 personnes migrantes en ont bénéficié durant l’année écoulée.

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Le nettoyage s’enseigne

Le projet Co-Opera de l’OSEO Suisse centrale a mis sur pied un nouveau cours: «blitzblank» (tout beau, tout propre!), une formation dans le domaine du nettoyage. Cette formation s’adresse avant tout aux réfugiés et aux personnes provisoirement admises en Suisse. Travailler dans le secteur du nettoyage leur permet d’allier travail et tâches familiales et de cumuler les postes pour atteindre le taux d’occupa­tion souhaité. Beaucoup d’entre elles travaillent déjà dans le secteur du net­ toyage.Ce cours leur permet d’accroître leurs compétences et d’améliorer ainsi leur régime de travail et leurs chances sur le marché de l’emploi. Très axé sur la pratique, le cours a lieu deux fois l’an et se déroule sur vingt demi­journées. Voici les sujets au programme: écologie, prévention des déchets, assurances sociales, gestion du temps, recherche d’emploi et connaissance de l’allemand. En parallèle, l’OSEO Suisse centrale appuie les participants dans leur recherche d’emploi et les place chez des employeurs.

Pour une «consomm’action» responsable

Un livre de René Longet montre comment chacun peut, dans sa vie quotidienne, promouvoir une économie orientée vers le développement durable. «De la Consommation à la consomm’action» présente la face cachée et les options citoyennes de huit activités banales de la vie quotidienne: s’habiller, boire son café, ouvrir son ordinateur, boire un jus d’orange, manger à midi, imaginer une sortie pour le week­end, utiliser sa voiture, penser à son mobilier. Autant de possibilités de passer de la consomma tion, subie, impulsive et passive, à la consomm’action, engagement citoyen de son propre pouvoir d’achat en faveur d’une économie plus durable et plus solidaire.A l’heure où les collectivités publiques sont de plus en plus nombreuses à s’engager sur la voie d’achats publics équitables, suite notamment à la campagne de l’OSEO «Non à l’exploi­tation grâce à nos impôts!», cet ouvrage tombe à point nommé pour montrer qu’il est possible, en achetant de manière responsable, d’exercer une influence sur les conditions de produc­tion, et d’apporter ainsi sa contribution pour faire reculer la pauvreté dans les pays en développement.René Longet est reconnu pour son expertise et son engagement pour le développement durable. Ancien conseiller national, il est membre de l’exécutif de la Ville d’Onex (Genève), président du PS genevois et président de l’ONG equiterre.«De la Consommation à la consomm’action» est un guide format livre de poche, paru aux éditions Jouvence, dans la collection «Savoir et Agir pour ce Siècle». Il a été rédigé en collaboration avec Muriel Lardi, journaliste.Il peut être commandé auprès des Editions Jouvence: http://www.editions­jouvence.com/

Mondialisation du travail domestique

Dans les pays riches, ce sont souvent des femmes migrantes venues de pays pauvres qui assument les soins et les tâches domestiques. En novembre, un séminaire de l’OSEO et du Réseau de réflexion s’est penché sur les moyens de renforcer leur position. «Pourquoi est­il plus facile de faire venir des femmes de l’autre bout de la planète que de faire participer les hommes aux travaux domestiques?», s’est demandé la Professeure Maria Rerrich, l’une des principales intervenantes du séminaire. Elle a ensuite relevé les «qualités» de ces travailleuses: très «attachées» à leur lieu de travail, corvé­ ables à merci et prêtes à s’adapter à tout. Comme la législation sur les étrangers ne cesse d’entraver l’immigration légale, la Suisse compte un nombre crois­ sant de personnes migrantes qui travail­lent dans des conditions fort précaires au sein de ménages privés. Risquant l’expulsion à tout moment, ces employées ne peuvent faire respecter leurs droits.Tous les participants au séminaire ont donc fait de la régularisation des sans­ papiers une revendication essentielle. Ils préconisent par ailleurs l’adoption de normes minimales au niveau tant natio­ nal qu’international et la réduction de la durée du travail, pour que quiconque puisse s’occuper d’une personne à charge sans devoir renoncer à un emploi salarié. Le travail non rémunéré mérite plus de respect et l’Etat doit s’engager davantage dans tous les secteurs de l’accompagnement et des soins.

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Vers la fin de l’automne 2008, un grand nombre d’hommes et de femmes venant d’Erythrée et de Somalie ont cherché re-fuge en Suisse, où ils ont la plupart du temps été hébergés dans des abris sou-terrains. Lorsque nous leur avons rendu visite à Bâle, nous les avons trouvés à table avec leurs manuels scolaires, en train de potasser le vocabulaire allemand. A Bâle-Campagne, en revanche, les réfugiés s’ennuyaient dans une salle de séjour glaciale et nous ont suppliés de pouvoir apprendre l’allemand. À Bâle-Ville, un cours d’allemand de trois mois est obli-gatoire pour les demandeurs d’asile; en revanche, à Bâle-Campagne, il a été sup-primé. Notre groupe du Solinetz Bâle a sauté sur l’occasion et a organisé des cours sur le champ. Dès que nos élèves ont maî-trisé quelques bribes d’allemand, ils se sont mis à écrire des requêtes au Parlement et au Conseil d’Etat pour qu’on leur accorde des cours de langue. Leur demande a été repoussée à la semaine des quatre jeudis: bel exemple d’instruction civique, qui fait partie des cours de base. L’acquisition de la langue est considérée comme une me-sure prioritaire d’intégration, mais le droit aux cours n’est pas inscrit dans la loi. Les conditions légales de l’intégration com-prennent beaucoup de devoirs, mais aucun droit pour les migrants et migrantes.

Manque de cours Des initiatives comme le programme

ASAFI de l’OSEO Genève (voir page 6) donnent de l’espoir. Ce programme ac-corde la priorité à l’accueil des personnes migrantes dès leur arrivée. Comme on le

voit à Bâle-Campagne, ce n’est pas le désir d’apprendre qui manque, ce sont les offres de cours adaptés aux besoins des popula-tions migrantes. Si l’on attend, pour don-ner des cours, que la personne ait obtenu le droit de rester en Suisse, son désir spon-tané d’apprendre a le temps de s’évanouir. Et au-delà des cours de langues, on peut se demander comment les migrants pour-raient communiquer avec les gens du lieu, quand ceux-ci sont fermés à tout ce qui est étranger. J’ai conseillé à mes élèves de par-ler avec les gens dans la rue, dans les ma-gasins, dans le bus, pour utiliser ce qu’ils avaient appris. Mais ils m’ont dit avec une certaine frustration que personne ne ré-pondait à leurs tentatives de contacts.

L’intégration, reconnaissance mutuelle

La langue n’est pas seulement une dis-cipline scolaire. Nous pouvons tous et tou-tes contribuer à la communication si nous allons vers les gens, si nous leur parlons. Pour moi, il est bien plus facile de nouer des contacts avec des personnes migran-tes qu’avec des Suisses. Il faut souvent de sérieux efforts pour surmonter les préju-gés et la méfiance de nos concitoyens, qui recouvrent une grande insécurité. Il faut de l’ouverture, la disponibilité à échan-ger. L’intégration peut se produire s’il y a une reconnaissance mutuelle, et le cou rage de débattre directement des désaccords éventuels. Pour beaucoup des personnes qui débarquent en Suisse, les cours de langue sont l’un des rares lieux où ce genre d’interactions peut se produire.

Beaucoup de devoirs mais aucun droit pour les personnes migrantesLes personnes immigrées ont un grand besoin de cours de langues. L’offre ne correspond toutefois pas à leur situation, et les contacts avec les Suisses sont rares. Texte: Anni Lanz

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Militante des droits humains, Solidarité sans frontières et Solinetz Bâle

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Concours

Envoyez la solution à l’OSEO sur le talon pré-affranchi ci-joint, par carte postale ou par courriel:

[email protected], sujet «Sudoku». toutes les réponses exactes participent au tirage au sort.

1er prix: Un sac à commissions en toile de voile

2e prix: Un bougeoir métallique pour quatre bougies à réchaud

Les prix sont généreusement offerts par l’atelier de l’OSEO Berne.

La date limite de réception est le 17 mars 2010. Les noms des gagnant-e-s seront publiés dans le n° 2/2010 de Solidarité. aucune correspondance ne sera échangée au sujet de ce concours. Le personnel de l’OSEO et de ses associations régionales ne peut participer au concours.

La solution de l’énigme publiée dans le dernier numéro de Solidarité était «Pas de business de guerre». Les gagnant-e-s sont: Eva Schlesinger de Untersiggenthal, Ursula Mörgeli-Welz de Bubikon et Magdalena Maspoli de Zurich. Merci à celles et à ceux qui ont joué, et à gebana et Carrom pour les prix offerts.

Le Sudoku de l’OSEO

Baromètre de la solidarité

Etes-vous favorable à des cours de langue obligatoires pour les personnes migrantes

qui viennent d’arriver en Suisse?

Faut-il changer quelque chose à la politique migratoire de la Suisse?

répondez à notre sondage au moyen du talon-réponse joint à ce numéro. Votre opinion nous intéresse.

Invitation

Assemblée générale 2010 de l’OSEO

Mardi 11 mai 2010, 16h30 à 21h

Volkshaus Zurich, Blauer Saal,

Stauffacherstrasse 60, Zurich

Programme*

16h30: Questions statutaires

tous les membres de l’OSEO y sont invités.

depuis la modification des statuts adoptée

l’an dernier, les membres individuels ont dés-

ormais le droit de vote.

Prière de vous annoncer avec le talon ci-

joint, par courriel ([email protected]) ou par télé-

phone (021 601 21 61) avant le 6 avril.

L’assemblée sera suivie d’un apéritif.

19h: Assemblée publique, «Coupe du

monde 2010, un autogoal dans la lutte

contre la pauvreté?»

La Coupe du monde de football se déroule

en afrique du Sud au mois de juin 2010. tout

est censé reluire, la FiFa prévoit des gains de

plusieurs milliards. dans ce même pays, un

tiers de la population vit dans la pauvreté.

des conditions de travail décentes et des sa-

laires suffisants pour en vivre permettraient à

ces personnes de se libérer de la misère. Ces

gens ont mis énormément d’espoir dans les

milliards investis pour la Coupe du monde.

Une table ronde discutera de diverses ques-

tions. Qu’est-ce qu’une manifestation spor-

tive comme la Coupe du monde apporte aux

pauvres en afrique du Sud? Contribue-t-elle

au développement, et si oui, à court ou à

long terme? Quelle est la responsabilité

sociale de la FiFa, en est-elle consciente?

Quelles sont les possibilités et les limites des

programmes de l’OSEO pour améliorer les

conditions de travail et de vie?

avec la participation de: un-e représentant-e

de la FiFa (sous réserve); Crecentia Mofo-

keng, syndicat iBB, afrique du Sud; Hans-

Jürg Fehr, président de l’OSEO.

* Sous réserve de modifications. Pour consulter le programme actuel: www.oseo.ch/agenda

Règle du jeu

Complétez les cases de la grille avec

les chiffres de 1 à 9 afin qu’il n’y ait au-

cune répétition et aucun doublon dans

chaque colonne, ligne et carré de 3x3.

La solution se trouve dans les cases

grises lues horizontalement,

selon l’équivalence ci-dessous:

1=U, 2=K, 3=r, 4=N, 5=V, 6=EL, 7=S,

8=i, 9=B.

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Le dialogue social contribue à la sécurité au travailL’OSEO s’est engagée en Serbie pour l’amélioration de la sécurité au travail: il reste beaucoup à faire.Texte: Claude nicolet. Photo: Svetlana Dingarac

«Montrez-nous encore comment vous poncez le métal», demande le directeur à un ouvrier qui s’octroie une pause – «mais faites-le en portant l’équipement com-plet», ajoute-il à mi-voix. Dans la ville ser-be de Mladenovac, je visite une entreprise de traitement du métal, une entreprise qui se veut modèle. Le directeur et deux syn-dicalistes me montrent, tout fiers, les nou-velles mesures en vigueur pour empêcher que des accidents ne se produisent dans l’entreprise.

Conscient de ses devoirs, l’ouvrier en-file ses gants, un tablier et des lunettes de protection et commence à meuler dans un bruit assourdissant. Il n’a pas de protection auditive – et moi, de la distance raison-nable à laquelle je me trouve, je résiste au réflexe de me boucher les oreilles. Des étincelles jaillissent de toutes parts. Les lunettes protègent les yeux de l’ouvrier des éclats de métal, mais pas contre le risque d’être aveuglé, car les «lunettes de protec-tion» équivalent plutôt à un masque de plongée: les verres ne sont pas teintés. Le temps de faire cette réflexion, de lourdes plaques de métal sont soulevées à l’aide d’une grande grue au beau milieu du pas-sage. Et personne ne porte de casque.

Il reste beaucoup à faireDepuis 2008, l’OSEO soutient en Ser-

bie le syndicat des ouvriers du métal par la mise en œuvre de mesures concrètes de sécurité au travail. Il reste tout un tra-vail d’information à faire, me suis-je dit après m’être rendu sur place. Ce n’est peut-être pas seulement l’argent pour acheter les équipements nécessaires qui manque.

Après ma visite toutefois, même les syndi-calistes invités étaient satisfaits de la tour-née. Et moi de me demander: «À quoi étaient-ils donc habitués auparavant?»

Quoi qu’il en soit, lors de la rencontre technique sur le partenariat social, le prési-dent du syndicat CATUS m’a dit fièrement que, dans leurs entreprises, les accidents de travail ont nettement diminué l’an dernier.

En Serbie, une amélioration de la sécurité au travail est absolument nécessaire.

L’équité sociale en Europe centrale et orientale concerne la Suisse

Si l’on veut éviter la menace de l’instabilité sociale et politique, il faut se pencher sur les acquis sociaux en Suisse et en Europe et rechercher leur harmonisation par le haut. C’est la conclusion essentielle de la réunion sur le partenariat social qui s’est tenue fin novembre à Zurich, avec plus de cent experts venant de Suisse et de six pays d’Europe centrale et du sud-est. La réunion était organisée par l’OSEO, avec le soutien des partenaires sociaux du bâtiment et de la métallurgie et sous le haut patro-nage du département fédéral des affaires étrangères. «Une économie durable et basée sur une harmonisation sociale vers le haut dans les nouveaux pays de l’Union européenne est aussi dans notre intérêt. Elle contribue à protéger les conditions de travail en Suisse et notre système de sécurité sociale, a déclaré la Conseillère fédérale Micheline Calmy-rey. Les activités de la Suisse en matière de coopération avec l’Europe centrale et orientale soutiennent par conséquent des programmes qui visent à promouvoir le partenariat social et à renforcer la forma-tion professionnelle.» L’OSEO a déjà noué des contacts dans ce sens avec des organi-sations partenaires dans les nouveaux pays de l’UE.

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Stop à la violenceA Mulukukú, au Nicaragua, des jeunes gens militent contre la violence et la discrimination en organisant des débats et des programmes de radio. Texte: Rebecca Allenspach. Photo: OSEO

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Jessenia Jarquín (à g.), Aldo Rochat (2e depuis la g.) et leurs collègues sont actifs dans la radio locale de Mulukukù.

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«Pour nous protéger de l’infection du virus VIH, nous devons utiliser des préservatifs. Il ne suffit pas de penser à se protéger, il faut le faire activement.» Voilà ce que Rosa Obando Centeno, 15 ans, a retiré d’une discussion sur la question du sida. C’est Aldo Rocha, 19 ans, qui a introduit le débat à l’école. Comme par le passé, par-ler de sexualité pendant les cours n’est pas chose évidente. Il voudrait bien poursuivre la discussion: «en matière de sexualité, les élèves font moins confiance aux maîtres et aux maîtresses qu’à d’autres jeunes». La diversité sexuelle est aussi un thème à

aborder et auquel tient également Aldo Rocha, qui sait hélas à quel genre de réaction s’attendre quand on se déclare homosexuel, comme lui: «Mon coming-out a été très difficile, à cause de l’ambiance machiste et de l’influence de la religion à Mulukukú. Il y a eu des cas de suicides de lesbiennes

et de gays, pour cette raison. Mais les dé-bats et les émissions de radio sur les droits humains ont contribué à ouvrir l’esprit des gens.»

Sensibiliser à la violenceAu cours de ces discussions, les jeunes

gens abordent aussi des questions comme l’estime de soi, les droits des enfants, la vio lence familiale, l’égalité entre les gen-res, la protection de l’environnement. Elles sont organisées dans 42 villages de la région et s’adressent à une population de 40 000 personnes.

Le travail avec les jeunes a été lancé par la coopéra-tive de femmes María Luisa Ortiz, pour affronter les pro-blèmes sociaux. L’un de ceux-ci est la violence à Mulukukú, région où la guerre civile a

particulièrement sévi dans les années 1980. Cette violence est surtout dirigée contre les femmes, les enfants et les jeunes; chaque année sont dénoncés 350 cas de violence familiale et 50 cas d’abus sexuels.

Les discussions sensibilisent au fait que la violence n’a rien de normal et qu’elle est inacceptable. Un soutien est offert aux enfants qui témoignent de violences dans leur famille: des visites chez eux, une mé-diation, des conseils psychologiques – et en dernier recours l’appel à la police. C’est sur l’initiative de la coopérative que le pre-mier Commissariat de police aux femmes et aux enfants dans une région rurale a été ouvert ici en 1998.

Diffuser une culture sans violencePlus de mille jeunes sont engagés dans

des organisations de jeunesse à Mulukukú. Ils font de la peinture, de la danse, du sport – l’équipe de football féminine vise le titre de championne régionale – ou encore de la radio.

Jessenia Jarquín, qui a 23 ans, a suivi avec sept autres une formation de mo-dératrice. Elle a été distinguée cette année comme la meilleure modératrice radio de

la région Atlántico Norte. Son objectif? «Motiver les jeunes gens à être responsa-bles de leurs actes et à s’engager pour les questions qui les concernent.» La radio des jeunes émet trois fois par semaine, de 14h à 15h; «L’Heure de la Femme» passe chaque jour. L’intérêt est manifeste: quinze personnes au moins appellent au cours de chaque émission, une vingtaine de lettres sont reçues.

«Nos programmes sur la prévention de la violence et l’égalité entre les sexes ont contribué à faire diminuer la violence dans la région», affirme Jessenia Jarquín. L’an dernier, les cas de violence enregistrés ont été deux fois moins nombreux qu’il y a en-core cinq ans. C’est surtout dans les vil-lages qu’il y a moins de plaintes. «A long terme, le travail avec les jeunes se révélera le meilleur soutien à une culture sans vio-lence, estime Carmen Ayón, coordinatrice de l’OSEO au Nicaragua. Des jeunes qui critiquent le machisme de leurs pères, qui prennent conscience de leurs droits, des jeunes filles et des jeunes femmes plus sû-res d’elles-mêmes vont faire évoluer la so-ciété.» C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles Jessenia Jarquín s’est lancée dans l’aventure: «Je suis contente de participer avec d’autres jeunes à la création de nou-velles valeurs.»

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«Nos programmes ont contribué à faire diminuer

la violence.»

La coopérative de femmes María Luisa Ortiz

L’OSEO travaille depuis 1991 au Nicaragua avec la coopérative de femmes María Luisa Ortiz. Cette der-nière a mis sur pied plusieurs ateliers, lancé un programme d’alphabétisation, ouvert une clinique et des centres d’information juridique pour les fem-mes. Elle travaille aussi avec les jeunes: au cours du premier semestre 2009, ce sont 1200 élèves de moins de 14 ans et 2800 jeunes gens et jeunes filles qui ont participé dans 80 écoles à des séances de discussion sur la contraception, la violence familiale, les droits des en-fants, etc.

Vos dons sont utilesUn don de 60 francs permet d’orga- niser huit séances de discussion dans les écoles. Un don de 100 francs permet la réalisation du programme ra-dio pour les jeunes pendant deux mois.

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A mon arrivée, dix jours après le séisme, le centre de Padang offrait une image de désolation. Ce sont surtout les hôtels et les banques qui étaient en ruines. Dès le len-demain, je me suis rendue dans les villages environnants afin de me rendre compte de la situation.

A Pauah, j’ai rencontré Sara Permana, qui m’a raconté comment elle a vécu les évé-nements: le sol s’est mis à bouger sous ses pieds, au point de l’empêcher de tenir sur ses jambes, puis elle a entendu les maisons autour d’elle s’effondrer. Bien que Pauah soit presque entièrement détruit, aucun membre de sa famille n’a par chance été blessé. Craignant les incessantes répliques, sa famille a malgré tout passé plusieurs nuits dehors, avant de trouver refuge dans la mosquée peu endommagée.

Le séisme a surtout détruit des habita-tions privées, des écoles et des mosquées. Comme il est survenu vers 17 heures, il n’a pas causé beaucoup de victimes dans les villages: les enfants étaient sortis de l’école et les maisons, d’un seul étage, possèdent le plus souvent un toit de tôle ondulée, de sorte que la plupart des habitants s’en sont sortis avec des blessures légères. Beaucoup

ont toutefois perdu tous leurs biens et leur capacité à reprendre le dessus m’a impres-sionnée. Lorsque je me suis rendue sur place, l’école avait déjà repris… en plein air toutefois.

Quels sont les besoins les plus urgents?

Si les programmes d’assistance médi-cale m’ont paru bien assez nombreux, un besoin énorme se faisait sentir pour relo-ger les gens et reconstruire les bâtiments scolaires. Après le séisme, les gens ont en effet vécu chez leurs proches et leurs voi-sins, voire dans des abris précaires faits de planches et de tôle ondulée. La mousson a commencé quelques jours après mon arrivée, aggravant sensiblement la situation.

Je me suis attachée à évaluer le degré de destruction dans la région visée par le pro-jet de l’OSEO: j’ai pris en compte ce que

Quatre maisons sur cinq sont détruitesL’OSEO fournit une aide à la reconstruction après le séisme qui a secoué l’ouest de Sumatra fin septembre. La coordinatrice de notre aide humanitaire raconte les premières semaines d'intervention. Texte et photos: Debora neumann

A l’ouest de Sumatra, la plupart des maisons privées ont été détruites par le tremblement de terre.

Un grand merci pour votre générositéGrâce à vos versements, l’OSEO a pu apporter aux sinistrés de l’ouest de Sumatra une aide rapide et effi-cace: plus de 230 000 francs ont été réunis en faveur des victimes du séisme, somme à laquelle sont venus s’ajouter 800 000 francs de la Chaîne du Bonheur. Nous vous remercions vivement pour votre générosité.

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je voyais, ainsi que les recommandations des autorités communales et l’expérience d’autres ONG. Dans les quatre villages, dont Pauah, où l’OSEO est à présent à l’œuvre, 86 pour-cent de toutes les habi-tations avaient été détruites. Comme il fait trop chaud dans l’ouest de Sumatra pour vivre sous tente, l’OSEO construit 600 abris temporaires pour les personnes âgées, les handicapés, les familles monoparenta-les et ceux qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté.

Qui a le plus besoin d’aide?Au cours de l’étape suivante, j’ai fait du

porte-à-porte pour recenser les dégâts et évaluer la situation sanitaire des plus dé-munis, qui bénéficient de soins gratuits. J’ai ensuite examiné la liste des bénéfici-aires ainsi dressée avec les responsables de chaque village et des communautés religi-euses. Tout villageois doit savoir qui figure sur la liste et comment elle a été établie, pour qu’il puisse émettre une objection.

La construction des abris tempo-raires a débuté fin novembre: respectant les méthodes traditionnelles, elle recourt à du matériel local et est assurée par des artisans des villages. Ces derniers suivent en outre une formation sur les normes para-sismiques en prévision de la reconstruc-tion des habitations en dur. Elle sera entre-prise dès mars, lorsque le gouvernement

aura versé une compensation pour chaque maison détruite. Nous transmettons ainsi aux gens un savoir-faire pour mieux se pré-parer à de futures catastrophes.

Qui est le mieux à même de fournir de l’aide?

Riche d’une grande expérience de la re-construction après des catastrophes natu-relles, acquise notamment au Sri Lanka, pays culturellement proche, l’OSEO a dé-cidé de mener pendant une année au moins des activités sur l’île de Sumatra. Nous y avons ouvert un bureau et engagé du personnel local. Une fois les abris pro-visoires terminés, l’OSEO prévoit de reconstruire des écoles. L’enseignement est encore assuré sous des bâches et les classes comptent deux fois plus d’élèves que d’ordinaire. Voici notre objectif: en été, à l’époque des examens d’Etat, le système scolaire devrait être à nouveau sur pied.

Nous aimerions aussi que nos activités ne se limitent pas à l’aide d’urgence. Nous encourageons dès lors la création de comi-tés de reconstruction, pour que les habi-tants soient mieux à même de faire face aux catastrophes naturelles.

Après six semaines passées à Padang et dans les environs, je suis rentrée avec le sentiment que les projets de l’OSEO amé-liorent l’avenir de la population sinistrée. Et je suis heureuse d’avoir pu y contribuer.

Commerce équitable plutôt que libre-échange

Nous sommes favorables au commerce

entre la Suisse et les pays en développe-

ment. Mais nous ne sommes pas pour la

liberté du commerce, nous voulons un com-

merce équitable. Malheureusement, nous

n’avons pas encore réussi à faire en

sorte que les accords de libre-échange soient

des accords sur le commerce équitable. Le

Conseil fédéral et les partis bourgeois ont

refusé au Parlement toutes les tentatives du

Parti socialiste pour conditionner les rela-

tions commerciales à des normes éthiques.

ils s’entêtent à distinguer artificiellement les

droits de l’homme de la politique commer-

ciale. Ce qui veut dire en clair que les impor-

teurs suisses n’ont pas besoin de se préoc-

cuper des conditions de production.

La notion de libre-échange est liée à un ex-

trême manque de liberté des travailleuses et

travailleurs dans les pays en développement.

Elle perpétue la pauvreté au lieu de s’y op-

poser, en favorisant des entreprises qui refu-

sent d’appliquer les droits humains fonda-

mentaux (comme les conventions de

l’Organisation internationale du travail par

exemple). Elle tolère le mépris systématique

des droits humains au lieu d’encourager leur

respect. réaffirmons-le: un accord de libre-

échange avec la Colombie est inacceptable

tant que des syndicalistes sont assassinés

dans ce pays.

Nous ne voulons pas d’accords de libre-

échange, nous luttons pour des accords de

commerce équitable contenant des normes

minimales sur les droits humains, les condi-

tions de travail et l’environnement.

HAnS-JüRG FEHRConseiller national PS et président de l’OSEO

La justice fiscale contre l’évasion fiscale

Plus de cent personnalités du monde politique, culturel et scientifique, ainsi que nombre d’organisations – dont l’OSEO – ont signé le «Manifeste fiscal». Ce document réclame une fiscalité plus juste qui interdise l’évasion fiscale dans le pays et à l’étranger sur le dos des personnes payant honnêtement leurs impôts. Le Manifeste fiscal demande en particulier un échange automatique d’informations et la suppression de la distinction entre fraude fiscale et évasion fiscale. Les pays en développement notamment sont victimes d’une évasion fiscale massive, et perdent ainsi des milliards en recettes qui pourraient servir au développement social et économique.Pour signer vous aussi le Manifeste: http://www.manifeste­fiscal.ch/fr/

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Souveraineté alimen-taire au Salvador

La quatrième réunion nationale des petits paysans et paysannes tenue en décembre 2009 a vu pour la première fois la présence d’un représentant du gouvernement. Le vice­ministre de l’agriculture Hugo Flores y a présenté la politique de son ministère, qui se concentre sur la sécurité alimentaire, et il a cherché un dialogue direct. Le gouvernement FMLN, au pouvoir depuis le 1er juin, marquait ainsi un tournant par rapport à la politique antérieure qui renforçait les sociétés transnationales et soutenait les semences génétiquement modifiées.Les paysans et paysannes ont ensuite élaboré un cahier de revendications pour parvenir à la souveraineté alimen­taire dans le pays. Les points princi­ paux sont l’accès aux titres de propriété pour celles et ceux qui cultivent la terre, ainsi qu’un soutien technique et financier aux petits paysans et des cultures écologiques. En outre, les semences locales encouragent la consommation d’aliments nationaux; il s’agit de les accompagner de program­mes sociaux qui garantissent l’accès au logement, à l’eau, aux services de santé et à la formation. Ces revendications ont été transmises au vice­ministre, et la conférence a appelé à un dialogue national. L’OSEO soutient cette forme participative de l’activité politique; sa coordinatrice Yolanda Martínez a pris part à la réunion.

Un concours pour jeu-nes en ex-Yougoslavie

Le 5 décembre 2009, le prix de l’OSEO pour le concours «Jeunesse et travail» a été décerné à Pristina. Ce sont des organisations de jeunes de Bosnie­Herzégovine, de Serbie et du Kosovo qui ont reçu les prix, deux pour chaque région. Trente idées étaient parvenues, dont on a retenu cinq par région; les organisations ont reçu des conseils qualifiés pour développer leurs projets. Ce sont donc quinze organisations de jeunes qui ont présenté leurs proposi­tions à Pristina, où elles ont pu discuter entre elles. Selon les critères fixés à l’avance, les participants eux­mêmes ont sélectionné les vainqueurs de chaque région. Les six projets choisis seront soutenus financièrement et technique­ment par l’OSEO. Ils ont pour objectif de mieux intégrer dans la vie profession­nelle de futurs travailleurs et travail­leuses, par exemple des jeunes sortant des écoles. Il y a là une nécessité criante, le chômage des jeunes s’élevant par­ fois à plus de 50 pour­cent dans certaines zones des pays concernés. La réunion de Pristina a aussi donné lieu à des échanges pratiques et amicaux. Contrairement aux gouvernements entre lesquels il existe toujours des obstacles insurmontables, les jeunes participant­e­s au concours n’ont eu aucun problème à nouer des contacts entre eux.

Quand je ne serai plus de ce monde …… je soutiendrai les travailleurs et travailleuses agricoles en Bolivie, afin qu’ils reçoivent des salaires équitables et disposent de loge-ments convenables.

J’ai mentionné l’OSEO dans mon tes-tament, car je sais qu’elle s’engagera concrètement dans ce sens.

Vous trouverez davantage d’informations sous www.oseo.ch ou dans nos notices explicatives: [email protected], tél. 021 601 21 61, Service donateurs, Case postale 1151, 1001 Lausanne.

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Du chagrin peut naître l’espoirQu’il s’agisse de promouvoir les femmes au Nicaragua ou le dialogue social au Kosovo, l’OSEO ne peut réaliser ses projets que grâce à votre appui. Les dons mortuaires sont aussi une occasion de nous soutenir. Texte: Christof Hotz. Photo: OSEO

Début 2009, suite à un décès, l’OSEO a reçu au total quelque 4500 francs de dons à la mémoire des défunts. L’argent a été versé à un projet dans la jungle nicara-guayenne. Là où Contras et Sandinistes se sont jadis livré de sanglants combats règne aujourd’hui une pauvreté criante et la violence est omniprésente: une violence qui vise avant tout les femmes, les jeunes et les enfants.

A Waslala et à Mulukukù, l'OSEO collabore depuis plus de dix ans avec des groupements de femmes, qui s’activent avec succès pour sensibiliser les gens à la violence et soutiennent femmes, jeunes et enfants. Nos partenaires apportent aussi une aide concrète (assistance médicale, psychologique et juridique) aux victimes d’agressions. Redonnant ainsi de l’espoir aux femmes et aux jeunes, elles les aident aussi à améliorer leur situation (voir article en page 12).

Voilà ce qu’il est possible de réaliser grâce à des dons mortuaires, ces dons qui remplacent couronnes et fleurs à la demande du défunt ou de ses proches.

Voici comment procéder Si vous souhaitez faire un don mor-

tuaire, ajoutez la remarque suivante sur l’annonce du décès ou sur le faire-part «En lieu et place de fleurs, veuillez pen-ser à l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière OSEO, 8031 Zurich, CP 10-14739-9» (le numéro de compte est important). Vous pouvez aussi faire mentionner l’OSEO lors des funérailles ou organiser une collecte à son profit.

Une aide cibléeL’OSEO utilise l’argent ainsi réuni là où

les besoins se font le plus sentir. Si vous le souhaitez, vous pouvez toutefois destiner l’aide à un domaine d’activités précis (nor-mes du travail, promotion des femmes, p. ex.) ou à un pays où nous menons des projets (tels le Mozambique, le Salvador ou le Nicaragua justement). L’an dernier, nous avons ainsi reçu au total quelque 40 000 francs.

Pour vous aider à régler toutes les ques-tions qui se posent en cas de décès, l’OSEO a édité une notice d’information fort utile, avec des aide-mémoire qui vous permet-tront de tout organiser sans rien omettre. Nous vous la ferons volontiers parvenir (à commander au moyen du coupon-réponse affranchi), mais vous pouvez également nous contacter: Frances Trezevant, tél. 021 601 21 61, [email protected], Service donateurs, Av. Warnery 10, Case postale 1151, 1001 Lausanne.

Au nicaragua, des jeunes s’engagent contre la violence.

Vous pouvez aussi nous soutenir

Par des dons réguliersEn donnant une autorisation de débit direct sur votre compte postal ou ban-caire, vous soutiendrez l’OSEO sans frais pour vous ni pour nous.

En faisant un don pour une occasion spécialeQue ce soit pour une naissance, une fête, un anniversaire, un mariage ou un départ à la retraite, pensez à l’OSEO.

Par un parrainageEn devenant parrain ou marraine de l’OSEO, vous vous engagez pour des conditions de travail décentes dans le monde entier.

Vous pouvez commander les formu-laires avec le talon ci-joint.

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La Bolivie a besoin de débats publicsMartín Pérez dirige le bureau de coordination de l’OSEO à La Paz, depuis novembre 2009. Qui est notre nouvel homme en Bolivie, quels sont ses engagements? Texte: Katja Schurter. Photos: OSEO

Martín Pérez a 38 ans, il vient de Cochabamba, la plus belle ville de Boli-vie, à son avis. En-fant, il a beaucoup voyagé en raison des différents postes de travail de son père,

employé par la compagnie nationale des gisements pétroliers YPFB. «Ça m’a aidé à comprendre qu’il y a beaucoup de points de vue», nous dit-il.

Grâce au soutien de sa mère et contre l’avis de son père, Martín Pérez a pu, comme il le souhaitait, étudier l’économie à La Paz. Il a obtenu son premier poste en 1994, au Ministère de la Planification et du Développement, l’année même où la Bolivie a introduit une loi sur la décentra-lisation.

Pour l’OSEO elle aussi, cette loi a mar-qué un tournant, puisqu’elle a constitué la base du développement de ses program-mes sur la participation populaire au ni-veau local.

Un engagement pour la démocratisation

Martín Pérez a été pendant huit ans en-gagé par l’agence allemande pour la coopé-ration technique (GTZ) pour travailler aux liens entre développement et démo-cratie; en 2004, il est passé au Ministère de la Décentralisation. En 2007, il a postulé à la direction du Programme d’appui à la dé-mocratie municipale (Padem), un mandat effectué par l’OSEO pour la Direction du développement et de la coopération (DDC). «J’ai bien aimé ce que fait l’OSEO pour le renforcement des organisations

populaires, dit Pérez pour expliquer son changement d’orientation: la manière créative dont elle a développé la participa-tion du peuple.» Lorsqu’on lui a demandé s’il était prêt à prendre la succession de Re-nata Hofmann, qui a dirigé le bureau de l’OSEO en Bolivie pendant 23 ans (voir Solidarité 3/08), il a estimé qu’il pouvait relever le défi. «L’OSEO est connue et appréciée en Bolivie. Je souhaite continuer à développer ce qui s’est fait jusqu’ici.»

La question des droits des travailleurs

Aux élections de décembre 2009, Evo Morales, le premier Président indigène de-puis l’indépendance de la Bolivie, il y a près de deux cents ans, a été confirmé à son poste par 64 pour-cent des voix. Le taux de participation aux élections a été de 90 pour-cent, et le parti au pouvoir MAS a aussi obtenu une majorité des deux tiers au Sénat et au Parlement. Evo Morales a-t-il donc les mains libres? Martín Pérez en doute. «La société civile ne doit pas s’exprimer lors des seules élections. Il faut de la transparence, un contrôle social.» Il regrette par exemple qu’il n’y ait eu quasi-ment aucun débat public avant les élec-tions: «La population ne savait pas vrai-ment quel était le programme des candidats. Pour que les gens puissent suivre les affaires politiques, il faut améliorer l’accès aux informations et créer des plate-formes pour les débats.»

Un autre thème qui lui semble central, c’est celui des conditions de travail décen-tes: «Je voudrais encourager le dialogue so-cial et les discussions publiques sur l’emploi dans ce pays. En Bolivie, peu de gens ont en effet un emploi régulier.»

L’effondrement des recettes du gaz et le re-cul des transferts d’argent des émigré-e-s aux Etats-Unis et en Europe, suite à la cri-se, ont aggravé la situation. «Les grands dé-fis sont la création de nouveaux emplois et l’application de la Constitution qui garan-tit des droits étendus aux travailleurs. Je compte m’engager là-dessus.»

* La loi sur la décentralisation accorde plus de compéten-ces (en matière notamment d’infrastructures et de budget) aux administrations communales et offre des possibilités de participation à la population.

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La situation en Bolivie

Sous la présidence d’Evo Morales, la Bolivie s’est donné en janvier 2009 une nouvelle Constitution. Les droits des popula tions indigènes ont été élargis et des mesures de réparti-tion en faveur des plus pauvres ont été introduites. Mais le gouvernement Morales n’a pas que des partisans. Certains critiques dénoncent son autoritarisme, voire le non respect de droits humains fondamentaux. Les conflits sociaux sont largement mar-qués par des ressentiments ethniques. Les élites des départements de plaine, dont la situation économique est meil-leure, défendent leurs privilèges et réclament l’autonomie. La Bolivie est confrontée à de grands défis: concréti-ser un nouveau contrat social pour une société démocratique et pluri-ethnique, et améliorer les conditions de vie des couches de population marginalisées.

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Martín Pérez en visite dans une communauté indigène qui a élaboré des propositions pour le budget communal.

«Il est difficile d’habiter à Genève sans parler le français.» Le programme ASAFI aide migrants et migrantes.

www.oseo.ch