Université Paris 1 Fabrice Lefort
Panthéon Sorbonne
Master 2 de Logistique
Les stratégies d’achats dans le domaine de l’armement :
le cas de la Délégation Générale pour l’Armement
Mémoire de fin d’études
Maître de mémoire : Monsieur Ibrahim Chitou 2005-2006
1
SOMMAIRE
SOMMAIRE p1
REMERCIEMENTS p3
INTRODUCTION p4
I. L’organisation des achats dans l’armée française p6
1) Notion de marchés publics et d’appels d’offres : la législation en
vigueur p7
i. Présentation du code des marchés publics et de la réforme du CMP p7
ii. Le cas particulier du secteur de la Défense p11
2) Présentation structurelle et fonctionnelle de la Délégation Générale
pour l’Armement p14
i. L’organisation de la DGA p15
ii. Les missions de la DGA p17
3) La politique d’acquisition du ministère de la Défense p21
i. Le principe fondamental : l’autonomie compétitive p21
ii. Une politique d’acquisition sous influence p23
II. L’évolution de la stratégie d’achats de la DGA p27
1) La présentation du référentiel achat de la DGA p28
i. Les fondements de la politique d’achats de la DGA : principes généraux p28
ii. La normalisation au cœur des processus achats de la DGA p31
iii. Un processus qualité intégré à la politique d’achats de la DGA p33
2) L’arrivée des Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication : la mise en place de la démarche e-achat p34 i. Les débuts de la démarche e-achat p35 ii. Une démarche e-achat : quelle finalité p36 iii. Les technologies utilisées par la DGA p40
2
3) Une démarche qui s’inscrit dans l’établissement de nouvelles formes
de partenariat p44 i. Une vision commune avec les fournisseurs : une relation « win-win » p45 ii. La création des Partenariats Publics Privés p46 iii. Les perspectives d’externalisation p49
4) Analyse critique du système utilisé par la DGA p53 i. La mise en place des portails ixarm et achats : un projet sans réelle politique
d’accompagnement du changement p53 ii. Une utilisation qui peut se révéler problématique p55 iii. Des résultats contrastés p56
III. Les axes d’amélioration possibles des processus d’acquisition de
l’armée française : comparaison avec le modèle américain p57
1) Une redéfinition des échanges entre les partenaires publics et les
entreprises privées dans la production d’armement p58
i. La comparaison entre le modèle français et le modèle américain p58
ii. La remise en question de la notion de programme d’armement p61
2) L’exemple de l’U.S Air Force : la mise en place des « best practices »
en matière de « Purchasing Management » p62
i. L’influence du secteur privé p63
ii. La redéfinition du système organisationnel p67
iii. L’utilisation d’outils spécifiques p70
CONCLUSION p72
Références bibliographiques p74
3
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier tout particulièrement mon maître de mémoire, M. Chitou, pour les
conseils qu’il a su me promulguer ainsi que pour le soutien qu’il m’a apporté dans cette
entreprise difficile.
Je souhaite également remercier M. Charles Cottenot, Manager du portail armement, et
M. Laurent Hury, Acheteur DGA/DSA/SPOTI et chargé des études amont, qui m’ont
accordé chacun un entretien permettant d’apporter des réponses pratiques, issues de leurs
expériences professionnelles, à certaines de mes questions.
4
INTRODUCTION
Avec l’accroissement constant de la compétitivité entre les entreprises et la recherche
permanente de rentabilité dans le secteur privé, la fonction achats a connu, ces dernières
années, de profonds bouleversements tant sur le plan stratégique que dans le
développement de nouveaux outils et de nouvelles relations entre les clients et leurs
fournisseurs. En effet, une politique d’achats efficace permet non seulement la réalisation
d’économies importantes mais aussi l’accroissement de la compétitivité.
Ainsi, les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) jouent
désormais un rôle crucial dans les processus d’acquisition des sociétés. Il est possible de
citer, à titre d’exemple, le principe des enchères inversées, qui se développent de plus en
plus entraînant de fortes diminutions des coûts quant à l’obtention de biens ou de services.
Internet est aussi un outil incontournable grâce auquel il est désormais beaucoup plus aisé
de gérer, d’une façon efficace, l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
Certains secteurs de pointe du domaine public ont compris qu’il était essentiel de revoir
leur stratégie d’achats afin de s’adapter à de nouvelles contraintes économiques. Ceci est
particulièrement vrai dans certains domaines comme celui de l’armement où les
programmes de fabrication des matériels sont onéreux et durent plusieurs années. Il est
alors nécessaire d’avoir recours à des techniques permettant, dès le début du processus
d’achats, la réalisation de gains substantiels ainsi qu’un suivi précis des dépenses. Les
NTIC peuvent être une solution.
Il est alors possible de se demander « pourquoi ce choix ? », et « comment les Nouvelles
Technologies de l’Information et de la Communication ont modifié les processus d’achats
dans le domaine de l’armement ? », en prenant comme exemple concret le cas de la
Délégation Générale pour l’Armement (DGA). Dans une première partie nous étudierons
donc l’organisation des achats dans l’armée française, puis nous verrons en quoi ces
nouvelles technologies ont modifié la stratégie d’achats de la DGA, enfin nous terminerons
avec une comparaison entre la politique d’achats de l’armée française et l’armée de l’air
5
américaine, et ce, afin de faire des propositions et de prouver qu’il n’existe pas de solution
unique en matière d’achats.
6
I. L’organisation des achats dans l’armée française
Depuis une dizaine d’années, la fonction achats a acquis ses lettres de noblesse. La plupart
des chefs d’entreprise lui reconnaissent un rôle stratégique. En passant d’une logique
�approvisionnement� à une logique �réduction des coûts�, cette fonction intervient
désormais dans de nombreux domaines tels que : le pilotage de la performance, le
management des fournisseurs, le développement de nouvelles méthodologies ou d’outils et
participe activement à des projets de réflexion quant à la délocalisation de sites dans des
pays à bas coûts.
Conscient de ces transformations, le secteur public, dont les achats occupent un rôle
primordial dans l’économie avec des commandes qui dépassent en 2005 les 110 milliards
d’euros soit 9% du PIB1, a décidé de mettre en place un corps de règles clair et
compréhensible par tous : il s’agit du Code des Marchés Publics ou CMP. Ce code doit
permettre le respect de principes fondamentaux tels que la liberté d’accès aux entreprises
des marchés publics, l’égalité de traitement des différents candidats ainsi que le contrôle de
l’usage des fonds publics.
Directement concernée, l’armée où les achats occupent une place prépondérante (en 2004
4,74 milliards d’euros2 ont été dépensés pour la mise en place de quatre programmes
d’armement) doit donc se plier aux exigences du CMP mais aussi à certaines
réglementations spécifiques. Cette législation particulière influence directement la stratégie
de l’armée française et plus précisément l’entité responsable des achats, à savoir la
Délégation Générale pour l’Armement ou DGA.
En conséquence, dans cette première partie, nous étudierons de façon approfondie le
fonctionnement du Code des Marchés Publics et son application dans le cadre du secteur
de la défense et de l’armement. Nous présenterons ensuite l’organisation de l’entité achats
du ministère de la Défense, à savoir la DGA. Enfin, nous nous intéresserons à la politique
d’acquisition et aux différents facteurs économiques ou politiques influençant cette
dernière.
1 Source : Site du Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie – www.finances.gouv.fr 2 Source : Rapport d’activité 2004 de la Délégation Générale pour l’Armement – www.defense.gouv.fr
7
1) Notion de marchés publics et d’appels d’offres : la législation en
vigueur
En dépit de quelques exceptions, l’importance des achats dans le domaine public n’a été
prise en considération que très tardivement comme en témoigne la complexité des règles
de commande publique. En effet, avant le 8 mars 2001, date à laquelle le CMP a été
réformé, il existait un véritable flou juridique quant à la réglementation de ces marchés.
Les difficultés étaient essentiellement dues à un éparpillement entre les nombreux textes
d’origine législative ou réglementaire, à la prise en compte du droit communautaire avec
notamment l’article 2963 du traité instituant la Communauté Européenne ou encore à
l’évolution des différentes jurisprudences.
i. Présentation du Codes des Marchés Publics et de la réforme du CMP4
Le Code des Marchés Publics est « un ensemble de dispositions d’origine législative ou
réglementaire relatives aux marchés passés pour la satisfaction des besoins des
collectivités et organismes publics. La personne publique doit en respecter les
dispositions »5.
Il a fait l’objet d’une réforme en 2001 afin de clarifier le contexte juridique des achats du
secteur public. Cette réforme, résultant de travaux engagés de longue date, repose sur
plusieurs objectifs, à savoir une meilleure compréhension des règles, une simplification des
procédures, une modernisation des commandes publiques et une ouverture plus large du
marché aux petites et moyennes entreprises ainsi qu’aux artisans. La clarification des
règles a été rendue possible grâce à la définition précise d’un champ d’application et à la
simplification de la législation. Le champ d’application du CMP couvre « l’Etat et ses
établissements publics autres qu’industriels et commerciaux, ainsi que les collectivités
3 Source : Communication de M. Didier Boulaud sur le Livre vert sur les marchés publics de la défense – 12 Décembre 2004 – www.senat.fr. C’est l’article 296 qui définit les règles communautaires applicables aux marchés publics de la défense. 4 N.B : Nous nous intéresserons tout particulièrement à la réforme du CMP datée de 2001 et non à celle de 2004 qui présente, à l’égard de notre étude, peu d’intérêt (les nouvelles modifications concernent essentiellement les montants relatifs à la passation des appels d’offre). 5 Source : définition donnée par le portail de l’armement – www.ixarm.com
8
territoriales et leurs établissements publics »6. L’harmonisation des règles de droit étatique
avec le droit communautaire a aussi joué un rôle crucial, les dispositions nationales ont été
rapprochées de celles contenues dans les directives européennes afin d’éviter toute
confusion qui résultait d’un décalage entre les normes françaises et communautaires. Cette
réforme s’inscrit aussi dans le cadre de la modernisation des processus de commandes
publiques en tenant compte de la dématérialisation des achats (sujet que nous aborderons
dans la deuxième partie : l’évolution de la stratégie d’achats de la DGA), de l’utilisation
désormais récurrente des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication
(possibilité de recourir aux moyens électroniques afin de transmettre certaines informations
comme la réglementation de la consultation, la transmission de candidatures etc.), mais
aussi de la volonté de mieux prendre en compte les innovations émanant des entreprises.
Ainsi, les sociétés, qui se portent candidates pour un appel d’offres, ont la possibilité de
faire une proposition comportant des variantes par rapport aux spécifications du cahier des
charges. Dans tous les cas, la personne publique se doit, avec la réforme de 2001, de
prendre en compte toutes les offres qui lui sont soumises. Enfin, le nouveau CMP
s’accompagne d’une ouverture plus large aux Petites et Moyennes Entreprises/Industries
(PME/PMI). Les procédures d’inscription aux appels d’offres ont été très largement
simplifiées puisqu’une simple déclaration sur l’honneur attestant de la régularité fiscale et
sociale est demandée.
Plus particulièrement, le côté véritablement novateur de cette réforme concerne la
méthodologie employée pour présenter, de façon claire et succincte, la réglementation à
travers les différentes étapes de commande publique. Le nouveau CMP a opté pour une
présentation chronologique reprenant chaque phase du processus d’achats : la définition du
marché, la passation, l’exécution des marchés et enfin le contrôle de ces derniers.
La définition du marché consiste à définir dans quel type de marché s’inscrit l’appel
d’offres. Il peut s’agir soit d’un marché de définition soit d’un marché négocié7. Le
marché de définition ne peut être employé que si la personne publique n’est pas en mesure
de préciser les buts à atteindre ou encore les techniques de base à utiliser. En effet, « la
collectivité peut avoir recours à ce type de marché lorsqu'elle a identifié un besoin à 6 Source : Circulaire n°2001-164 du 30 août 2001 – www.legifrance.gouv.fr 7 Source : Site du Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie – www.finances.gouv.fr
9
satisfaire qui nécessite la passation d'un contrat, mais qu'elle n'a pas la capacité d'en
déterminer la nature et l'étendue avec précision »8. En fait, il n’y a pas véritablement de
cahier des charges établi, l’objectif principal est de laisser plus ou moins libre cours à
l’imagination des fournisseurs, d’explorer les possibilités d’un futur contrat et de réaliser,
le cas échéant, un prototype du projet avec une estimation de prix possible. Ce marché, qui
est en fait un marché d’étude, peut être attribué seulement s’il est transmis simultanément à
plusieurs entreprises qui bénéficieront de la même date pour la remise des prestations, et
ce, afin d’éviter le délit de favoritisme. Le marché négocié est une procédure classique,
avec un cahier des charges précis, par laquelle « l’Etat choisit le titulaire du marché après
consultation des candidats et négociation des conditions de marché avec un ou plusieurs
d’entre eux »9.
Concernant la sélection et la passation des marchés, la personne publique a le choix entre
quatre outils possibles : l’appel d’offres qui correspond à une mise en concurrence basique,
la procédure négociée qui s’inscrit en règle générale dans le cadre du marché négocié et
qui permet aux administrations de dialoguer librement avec les candidats sur les raisons du
choix final, le dialogue compétitif qui offre la possibilité d’une négociation entre les
acteurs avant la prise de décision finale ou encore les marchés passés selon la procédure
adaptée (ce type de marché n’est soumis à aucune procédure particulière, il peut
notamment être dispensé de forme écrite et correspond alors à de simples achats sur
factures.).
Une fois le marché signé, l’exécution de ce dernier doit répondre à des règles strictes. Le
titulaire du marché a la possibilité de recourir à la sous-traitance sous certaines conditions :
il ne peut s’agir que de marchés de travaux ou de services, le sous-traitant ne doit pas
effectuer la totalité du marché et enfin il ne doit exister aucune relation contractuelle entre
la personne publique et le sous-traitant10. De plus, des avances et acomptes peuvent être
versés au titulaire. Ce principe permet, à des entreprises bénéficiant de problèmes de
trésorerie, de pouvoir postuler à des appels d’offres mais aussi de pouvoir honorer leurs
engagements dans le cas où elles remporteraient un marché public.
8 Source : Article 73 du Code des Marchés Publics 2001 – www.legifrance.gouv.fr 9 Source : Article 34 du Code des Marchés Publics 2001 – www.legifrance.gouv.fr 10 Source : Droit des marchés publics par Florian Linditch – 2004, éd. Dalloz.
10
Enfin, la dernière étape d’une commande publique concerne le contrôle de la bonne
exécution des marchés. Effectivement, devant la recrudescence des contentieux, la mise en
place d’organismes de contrôles et de documents permettant un meilleur suivi de l’avancée
d’un contrat est devenue obligatoire. Un contrat exigeant du prestataire un service de
qualité ne suffit plus, l’agent public, en charge du contrôle, doit pouvoir s’en assurer.
Ainsi, la France s’est dotée de documents venant renforcer le CMP dans ce domaine
comme le Cahier des Clauses Techniques Générales (CCTG) ou le Cahier des Clauses
Administratives Générales (CCAG). Le CCTG regroupe l’ensemble des dispositions
techniques applicables à des prestations de même nature tandis que le CCAG concerne les
dispositions juridiques et financières applicables aux marchés contenant des prestations
d’un même secteur d’activité. Il existe ainsi un CCAG spécifique pour les travaux, les
marchés industriels ou encore les fournitures et les prestations courantes. De plus, la
Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des
Fraudes (DGCCRF) ainsi que la Mission Interministérielle d’Enquête sur les Marchés
Publics (MIEM) qui, dans certains cas, sont associées à la Direction Départementale de
l’Equipement (DDE) et à ses connaissances techniques permettent une vérification efficace
du processus. Ils sont les garants de la qualité des achats publics.
Avec l’évolution de la fonction achats, le secteur public a été obligé de s’adapter. Il a ainsi
dû moderniser le CMP à travers un certain nombre de réformes en tenant compte de
nombreux critères comme la législation communautaire ou encore l’utilisation, désormais
massive, des NTIC. Ce code constitue, à l’heure actuelle, un outil de référence et est
indispensable pour toute entreprise souhaitant travailler avec l’Etat. Néanmoins, il reste
encore très généraliste et n’est pas forcément totalement adapté à certains domaines
d’activité plus sensibles comme la défense ou la recherche. Dans la partie suivante, nous
allons donc étudier ces spécificités juridiques à travers un exemple concret : le secteur de
la défense et de l’armement.
11
ii. Le cas particulier du secteur de la défense
La France est l’un des seuls pays de l’Union Européenne à s’être doté, en complément du
CMP, d’un cadre législatif spécifique concernant la passation de commandes pour les
marchés de la défense nationale. Il s’agit du décret 2004-16 baptisé aussi �décret défense�
et publié le 8 janvier 2004. Ce décret ne concerne que les « marchés de fourniture et de
services qui ont pour objet la conception, l’essai, l’expérimentation, la réalisation,
l’acquisition, le maintien en condition opérationnelle, l’utilisation ou la destruction des
armes, munitions et matériels de guerre »11 comme nous l’indique l’article 1. Ainsi, le
CMP continue de régir les achats soumis aux principes généraux de la commande publique
pour l’armée française. Ce �décret défense� s’inscrit aussi parfaitement dans la lignée du
CMP en se basant sur trois principes fondamentaux : liberté d’accès, égalité de traitement
et transparence des procédures ; l’objectif non avoué étant d’éviter de retomber dans les
affres de certaines affaires comme celles de la Direction des Constructions Navales (DCN).
Néanmoins, il existe des différences. En effet, le recours classique à l’appel d’offres n’est
pas privilégié comme dans le cas du CMP et ce, afin de s’adapter aux conditions si
particulières des programmes d’armement. Le système d’appel d’offres est performant à
partir du moment où les besoins sont spécifiés de façon précise, ce qui est impossible dans
certains cas. En effet, les dispositifs militaires sont des entités complexes où le temps et les
perspectives d’évolution sont deux facteurs essentiels qu’il est impératif de prendre en
compte. Les acheteurs ainsi que les fournisseurs ont donc besoin de flexibilité. Le décret
2004-16 donne donc la priorité à des techniques comme la procédure négociée avec
publicité (ou sans publicité afin de ne pas dévoiler certains secrets commerciaux proposés
par les industriels) et concurrence privilégiée, les marchés à phase, le système dit des
entreprises qualifiées ou encore l’échange de lettres. Il peut être intéressant d’analyser de
façon précise le fonctionnement de ces outils. Les marchés à phase sont d’une grande
utilité dans le cadre du développement d’un projet particulier puisqu’ils permettent, à
chaque étape, de redéfinir les objectifs à atteindre. Ils sont couramment employés dans les
marchés informatiques de développement de prologiciels uniques. Le système des
entreprises qualifiées, quant à lui, est une sorte de vivier au sein duquel plusieurs
entreprises gravitent autour du même projet et sont régulièrement mises en concurrence.
11 Source : Publication du décret n°2004-16 publié au Journal Officiel de la République Française – www.legifrance.gouv.fr
12
L’échange de lettres est un procédé particulier, il ne peut être utilisé que dans des
conditions précises et notamment en cas « d’urgence incompatible avec la préparation des
documents constitutifs d’un marché »12, c'est-à-dire lorsque la France a besoin d’envoyer
des troupes en opérations extérieures (OPEX).
Le décret n°2004-16 occupe donc une place à part dans la législation des marchés publics.
Il détaille les procédures conformes au droit communautaire, que le ministère de la
Défense peut utiliser pour passer des commandes liées à ses besoins exclusifs. En outre, il
apporte une certaine souplesse dans la passation de marchés atypiques comme les
programmes d’armement. Enfin, il permet de raccourcir les délais en cas d’urgence.
Néanmoins, ce décret n’est pas l’unique document réglementant les marchés spécifiques à
la défense. En effet, il faut aussi prendre en compte d’autres réglementations mises en
place par la Délégation Générale pour l’Armement (nous verrons dans la deuxième partie
quel est le rôle de la DGA dans la politique d’armement française mais aussi son
organisation et son mode de fonctionnement).
Ainsi, il est possible de distinguer trois nouveaux actes législatifs qui viennent s’ajouter à
ceux déjà vu précédemment. Le Cahier des Clauses Administratives Communes (CAC) est
« un document élaboré au niveau de la DGA qui complète les CCAG (voir p.10) en
regroupant un certain nombre de clauses spécifiques à la DGA s’appliquant à tous les
marchés »13. Plus précisément, le CAC comprend une vingtaine d’articles portant sur
divers sujets comme les obligations à respecter de la part des candidats ou des titulaires
ayant reçu notification d’un marché. Ces derniers se doivent de maintenir confidentielles
toutes les documentations, communications qu’ils ont pu avoir avec la DGA. De même, il
existe un certain nombre d’articles relatifs à la responsabilité du titulaire quant aux
différentes infrastructures (bâtiments, outils et instruments etc.) qui peuvent lui être
confiées pour la bonne exécution d’un marché. Un descriptif des assurances à souscrire par
le fournisseur a aussi été prévu. Enfin, les réglementions spécifiques, abordant les notions
de litiges dans le domaine de l’armement, de retard dans l’accomplissement d’un contrat et
de pénalités, sont définies par les articles 7,8 et 11 du CAC13. Le Cahier des Clauses
Contractuelles Types (CCT) peut être considéré, en quelque sorte, comme un dérivé du 12 Source : article 3 du décret n°2004-16 – www.legifrance.gouv.fr 13 Source : Cahier des Clauses Administratives Communes applicables aux marchés industriels ou de prestations intellectuelles de la Délégation Générale pour l’Armement, éd.2000 – achats.defense.gouv.fr.
13
CCTG. Il sert de fil conducteur aux acheteurs lors de la rédaction de leur contrat. Ce
recueil contient, en fait, un panel de clauses accompagné de pages de commentaires.
Chaque commentaire fait référence à une situation particulière et informe l’acheteur sur la
conduite à tenir et la procédure à adopter dans la rédaction des pièces contractuelles. Pour
chaque cas de figure, ce dernier doit sélectionner la clause appropriée. Le dernier
document spécifique à la DGA est un complément du CCT baptisé clausier de la
Délégation Générale pour l’Armement. Il s’agit d’un véritable listing regroupant « tous les
articles que l’on doit retrouver dans un marché selon l’article 12 du code des marchés
publics ainsi que d’autres appropriés aux cas des marchés complexes que sont ceux du
ministère de la Défense. »14. Ce listing est une aide précieuse notamment dans le cadre de
négociations avec les industriels puisque les clauses y figurant ont été rédigées en
partenariat avec le CIDEF (Conseil des Industries de Défense)15. De plus, il apporte
également une plus grande homogénéité dans la gestion des marchés puisque le clausier est
utilisé par l’ensemble des services.
Au fil de ces premières pages, nous nous sommes tout particulièrement intéressés à situer
le cadre de notre analyse. En effet, nous avons abordé les notions juridiques fondamentales
intervenant dans la mise en place de marchés publics. Nous avons vu le fonctionnement du
CMP et des autres documents intervenant de façon directe ou indirecte dans la constitution
des contrats publics. Ensuite, nous avons réduit notre champ d’étude en nous focalisant sur
les réglementations particulières au secteur de la défense et de l’armement. Nous avons pu
voir, par exemple, le mode de fonctionnement du décret défense et son impact sur les
passations des programmes d’armement ainsi que les mesures juridiques spécifiques telles
que le CAC ou encore le CCT. Il est désormais temps de s’intéresser à l’organisation qui
est directement concernée par ces mesures, c'est-à-dire la Délégation Générale pour
l’Armement. Après une présentation de la DGA, nous verrons quelles sont ses missions,
puis nous étudierons le fonctionnement de sa politique d’acquisition.
14 Source : le référentiel réglementaire de la DGA – Portail de l’armement – www. ixarm.com 15 Le CIDEF a été fondé en 1990 par un certain nombre d’organisations professionnelles comme le Groupement Industriel des Constructions et Armements Navals (GICAN) ou le Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales (GIFAS). Le CIDEF a pour objectif principal la conduite d’actions communes relatives à la représentation, la promotion des industries de défense française. Source : l’industrie de défense française, une dynamique à soutenir, des enjeux européens – publication du CIDEF, 2004 – www.gifas.asso.fr
14
2) Présentation structurelle et fonctionnelle de la Délégation Générale
pour l’Armement
Avec la chute du mur de Berlin et l’explosion du bloc soviétique à la fin des années 1980,
le monde a connu de nombreux changements géopolitiques ces vingt dernières années
entraînant une refonte complète de la stratégie des armées. En effet, la tendance, qui a
prévalu ces derniers siècles et qui veut que deux ou plusieurs nations s’affrontent sur une
ligne de front bien déterminée, est aujourd’hui obsolète. Au contraire, les nouvelles études
stratégiques menées, lors des mutations de l’environnement européen et international, ont
pu dégager les nouvelles propensions qui vont régir les conflits des prochaines décennies
(disparition d’une menace directe aux frontières, plus d’affrontements directs entre de
�vraies puissances�, adoption récurrente de la stratégie de guérilla avec un ennemi qui se
fond dans la population comme pour la deuxième guerre en Irak, apparition de nouvelles
formes de menaces avec les attentats, retour à des conflits basés non pas sur des intérêts
économiques mais sur des oppositions entre les religions etc.). Face à ces changements, la
France a pris, il y a maintenant une dizaine d’années, certaines mesures afin de réadapter
sa stratégie militaire qui s’articule autour de quatre axes : prévention, protection,
projection, dissuasion. Une réforme a ainsi été mise en place en 1996 avec notamment la
mise en œuvre de la professionnalisation au sein des forces armées. Avec une armée
professionnelle, la France est, désormais, davantage en mesure de fournir une réponse
adaptée aux différents évènements pouvant survenir au cœur du territoire national mais
aussi sur la scène internationale. En conséquence, les matériels utilisés doivent, eux aussi,
être de qualité et adaptés aux nouveaux besoins de l’armée française. C’est à la DGA que
revient la tâche importante d’assurer, aux forces armées, les meilleurs équipements
possibles en tenant compte d’un triple impératif : respect des délais, des coûts et recherche
d’une performance optimale.
15
i. L’organisation de la DGA
La DGA a pour vocation la conduite de la politique industrielle ordonnée par le ministère
de la Défense. Elle travaille en collaboration avec deux autres entités, à savoir le Chef
d’état-major des armées (CEMA) qui s’occupe de l’organisation générale des forces et le
secrétaire général de l’administration (SGA) qui intervient dans la plupart des domaines de
l’administration générale du ministère comme, par exemple, les finances, les ressources
humaines ou encore la gestion du patrimoine.
L’organisation interne de la DGA s’articule autour de 3 grands pôles (voir l’organigramme page suivante) :
Le pôle stratégie, sécurité et international qui est en charge de la
préparation de l’avenir avec le pilotage des projets de recherche sur les
capacités opérationnelles futures et le développement de la coopération
européenne dans le secteur de la défense.
Le pôle opérations qui conduit les différents programmes d’armement,
fournit les prestations techniques nécessaires au bon déroulement de ces
programmes, met en place des essais et tests de contrôle pour s’assurer
du bon fonctionnement des matériels. Ce pôle est aussi en charge de la
maintenance aéronautique.
Ministère de la Défense
Chef d’état-major des armées
Délégation Générale pour l’Armement
Secrétaire général pour l’administration
Chefs d’état-major Directeur général gendarmerie
nationale
Chef du contrôle général des armées
Directeur des affaires stratégiques
Source : rapport d’activité 2004 de la DGA
16
Un pôle qui comprend l’ensemble des services généraux et est donc en
charge du budget, des ressources humaines, de la communication.
La DGA est présente sur l’ensemble du territoire français grâce à ses nombreux centres.
On distingue ainsi les centres d’expertise (ils regroupent les différents centres techniques et
les laboratoires de recherche), les centres d’essais ou encore le service de la maintenance
aéronautique avec les ateliers industriels aéronautiques.
Délégation Générale
pour l’Armement
Pôle stratégie, sécurité et international
Systèmes de forces, stratégies industrielles, technologiques et de
coopération.
Pôle opérations
Systèmes d’armes,
Expertise technique, Essais, Service de la
maintenance aéronautique.
Pôle des services généraux
Gestion du budget, des ressources humaines, de la communication
et de la qualité.
Source : www.defense.gouv.fr
Source : www.defense.gouv.fr
17
Concernant les moyens mis à disposition de la DGA, même si celle-ci connaît, depuis une
dizaine d’années, une baisse16 des crédits qui lui sont alloués, elle bénéficie encore d’un
budget important pour mener à bien les missions qui lui sont confiées. En 2005, les crédits
sont même en légère augmentation comme en témoigne le tableau suivant :
2002 2003 2004 2005 2005/2004 Etudes de défense Développement Fabrication Entretien programmé des matériels Infrastructure Transfert BCRD
661 114 75
197 481 191
638 169 105 161 621 191
581 169 93
165 607 200
668 184 105 166 642 200
+ 15 % +8,9%
+12,9% +0,6% +5,8%
-
Total 1720 1886 1814 1965 +8,3% Nous venons d’aborder, de façon succincte, quelle était l’organisation de la DGA en
interne mais aussi en externe avec la répartition des entités régionales à travers la France.
Nous avons vu aussi quelle était la répartition des crédits pour l’année 2005. Il est donc
désormais logique de s’intéresser aux missions qui doivent être remplies par la Délégation
Générale pour l’Armement.
ii. Les missions de la DGA Elles sont au nombre de deux. Il y a tout d’abord la conduite des programmes d’armement
puis la �préparation de l’avenir� (la �préparation de l’avenir� comprend l’identification et
le développement des technologies futures dans le but d’assurer l’autonomie stratégique et
technologique de la France).
La conduite des programmes d’armement doit fournir aux forces armées les meilleurs
équipements possibles dans les conditions fixées de coûts, de délais et de performance.
16 A partir de 1996, la DGA a connu une succession de réformes se traduisant par une réduction de ses effectifs, par la mise en œuvre de nouvelles méthodes de gestion visant à diminuer les coûts, par la refonte de sa structure industrielle avec la sortie de la Direction des Constructions Navales du �périmètre DGA�. Source : Projet de loi de finances pour 2005 – Tome IV par M. Xavier Pintat, Sénateur – www.senat.fr
Source : Projet de loi de finances pour 2005 – Xavier Pintat.
(En millions d’euros)
18
Ainsi, cette première mission a pour principale ligne de conduite le respect de quelques
règles fondamentales. Une parfaite maîtrise de la performance des systèmes d’armes et du
temps sont obligatoires. De plus, il est nécessaire de prendre en considération le fait que
ces programmes d’armement doivent aboutir à un renforcement de la cohérence entre les
équipements et garantir la satisfaction des utilisateurs. En conséquence, afin d’avoir une
maîtrise complète du processus de mise en place des systèmes d’armes, la DGA va couvrir
l’ensemble de la durée de ces programmes (de leur lancement jusqu’à leur utilisation par
les unités opérationnelles). Elle va, ensuite, évaluer les différentes options possibles afin
d’optimiser au mieux la gestion du temps, le budget et la recherche technique. La création
et le développement des programmes seront transférés à des groupes industriels (tels que
Thalès ou encore EADS) qui joueront le rôle de maître d’œuvre industriel. La DGA, grâce
à ses connaissances techniques, va accompagner les travaux du maître d’œuvre et va
évaluer les résultats obtenus par ce dernier avant la mise en service finale. Il est à noter
qu’en 200417, afin de bénéficier d’une meilleure expertise technique, une restructuration a
eu lieu. Les différents moyens et connaissances techniques ont été regroupés en 11 pôles
d’expertise technique et un pôle d’essai. Cette nouvelle organisation a pour objectif
d’animer plus efficacement la fonction technique de la DGA en favorisant notamment la
communication et la transversalité entre les différents pôles.
La maîtrise des coûts et des délais est obtenue grâce à l’application de méthodes issues du
contrôle de gestion avec des enjeux très précis, à titre d’exemple « le total des coûts
prévisionnels des programmes d’armement en réalisation a été contenu dans une variation
inférieure à 1% »18 pour l’année 2004. Concernant la mesure des délais, elle se fait avec
l’utilisation, pour chaque programme, de jalons particuliers. Cette meilleure gestion est
principalement due au fait que la DGA est en recherche constante de cohérence entre les
équipements. Ainsi, chaque année, un programme est élaboré en commun entre les
différents états-majors et la DGA afin de coordonner les rendez-vous de cohérence
opérationnelle que doivent rallier les différents programmes. En fait, chaque rendez-vous
correspond à une échéance qui doit être respectée lors de la réalisation des équipements.
17 Source : synthèse du plan prospectif à 30 ans – www.defense.gouv.fr 18 Source : rapport d’activité 2004 de la Délégation Générale pour l’Armement – www.defense.gouv.fr
19
Enfin, l’accompagnement des équipements au-delà de leur mise en service est une
composante essentielle dans le travail de la DGA. Effectivement, la conception de
matériels aisés à entretenir, la mise en oeuvre des moyens de formation, d’entretien et de
réparation sont des axes fondamentaux qui sont mis en place dès les phases de conception.
Cette démarche baptisée Soutien Logistique Intégré (SLI) est une composante majeure
quant à la satisfaction des utilisateurs (la DGA porte une attention toute particulière à la
satisfaction des utilisateurs finaux et procède régulièrement à des évaluations).
La seconde mission, baptisée �préparation de l’avenir�, a pour vocation la création d’une
vision à plus ou moins long terme de ce que doivent être la stratégie de la DGA et la
recherche de nouvelles technologies pouvant être utilisées dans le domaine de la défense.
L’élaboration d’une méthode de préparation de l’avenir se fait grâce au plan prospectif à
30 ans (PP30). Ce plan est élaboré chaque année par la Délégation Générale pour
l’armement en collaboration avec l’Etat-major des armées (EMA), des Officiers de
cohérence opérationnelle (OCO) et des Architectes de systèmes de forces (ASF). En tenant
compte de certaines réflexions géostratégiques (analyse des risques et menaces inhérents à
un pays comme la France), en essayant de déterminer le lieu et la nature des futurs conflits
possibles mais aussi en prenant en considération les capacités militaires françaises, le PP30
tente de déterminer la nature des futurs programmes d’armement qui serviront les forces
armées (voir le schéma de la démarche prospective ci-dessous). Ces recherches vont donc
permettre une planification et une programmation des futurs besoins de l’armée française.
Prospective géostratégique - Contexte géostratégique - Risques et menaces - Prospective opérationnelle
- Missions des armées - Engagements futurs - Capacités militaires
Prospective technologique - Technologies transverses - Technologies spécifiques Prospective des systèmes de force
Réponses technico-opérationnelles
Détermination des technologies futures
Planification d’actions et de recherches
Hypothèse de plans d’équipement des
forces
Source : synthèse du plan prospectif à 30 ans.
20
En conséquence, le plan prospectif peut aussi être considéré comme le fil conducteur dans
la recherche des technologies du futur. En effet, à partir du PP30, la DGA va élaborer un
document spécifique : le modèle des capacités technologiques. Il s’agit d’un outil
permettant de « répondre aux besoins en technologies engendrés par la réalisation des
armements du modèle d’armée 2015 et de ceux identifiés dans le plan prospectif à 30 ans
comme pouvant faire l’objet d’un lancement durant les 15 années suivantes »19. Cet effort
de recherche se matérialise par la création d’études de recherche amont et de
démonstrateurs. Ces études vont permettre d’appréhender les technologies qui seront, par
la suite, intégrées dans les futurs armements. Les démonstrateurs, quant à eux, constituent
la suite logique des études amont, ils permettent de les valider. En effet, ces
démonstrateurs sont en quelque sorte des prototypes. Dans le cadre du développement de
technologies futures, il est à noter que la DGA peut, aussi, se tourner vers le secteur privé
et la recherche civile. Il n’est pas rare que des programmes civils intéressent le ministère de
la Défense et inversement. Ainsi, chaque année des accords de coopération ou des
opérations de cofinancement de projets ou d’études sont établis entre la DGA et des
sociétés privées.
Finalement, la DGA est une entité directement dépendante du ministère de la Défense et
dont l’organisation se révèle relativement complexe, surtout en externe, avec la multiplicité
des différents centres d’essais ou encore de maintenance. Ses missions sont multiples et
d’une importance capitale pour l’avenir des forces françaises. En effet, comme nous
l’avons vu précédemment, la DGA occupe de multiples fonctions. Elle est en charge de la
conduite des programmes d’armement, de la recherche de nouvelles technologies mais a,
aussi, un rôle de conseil auprès du gouvernement avec la publication du PP30 qui
détermine les grands axes de la future stratégie de la politique d’armement. Il est donc
nécessaire de s’interroger sur la stratégie d’achats de la DGA, néanmoins, avant cela, il est
obligatoire d’étudier la politique d’acquisition du ministère de la Défense, puisque c’est
cette politique qui va directement influencer les commandes passées par la Délégation
Générale pour l’Armement.
19 Source : rapport du député M. Gilles Carrez écrit dans le cadre de la loi de finances pour 2006 – document mis en distribution le 5 novembre 2005 – www.assemblee-nationale.fr
21
3. La politique d’acquisition du ministère de la Défense
La stratégie militaire française met l’accent sur la capacité des forces armées à prévenir,
limiter ou encore arrêter, le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions qui
soient, les conflits et les guerres. Cette volonté s’est traduite par la présentation en 2002,
par Madame le Ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie, d’un projet baptisé loi de
programmation militaire 2003-2008. Ce projet a pour ambition de « redonner de la
crédibilité opérationnelle aux forces armées, de les mettre au niveau d’équipement et
d’entraînement des armées les plus modernes »20 ; l’objectif final étant de doter la France
« d’une défense qui soit à la hauteur de ses besoins comme de ses ambitions
internationales »20. Ainsi, avec cette nouvelle loi de programmation, près de 15 milliards21
d’euros seront investis chaque année dans le secteur de la défense pour la période 2003-
2008. Le ministère de la Défense a donc la charge de la mise en application des principes
énumérés ci-dessus, pour cela, il a dû se doter d’une politique d’acquisition adéquate. Dans
un premier temps, nous étudierons les fondements de cette politique d’acquisition avec,
notamment, le principe d’autonomie compétitive, puis, dans un second temps, nous
analyserons quels peuvent être les facteurs influençant cette stratégie d’acquisition.
i. Le principe fondamental : l’autonomie compétitive
Le ministère de la Défense a la charge de créer un outil performant répondant aux attentes
gouvernementales en matière d’achat. Ainsi, une politique d’acquisition a été mise en place
dans le but d’équiper les unités opérationnelles de matériels performants. Ces acquisitions
sont fondées sur un principe : l’autonomie compétitive. Celle-ci s’articule autour de deux
axes :
Assurer le meilleur rendement possible entre l’efficacité des
équipements et les investissements engagés par le ministère pour
acquérir ou développer ces équipements.
20 Source : Discours du Ministre de la Défense Madame Michèle Alliot-Marie, le 11 septembre 2002. 21 Source : Chapitre 1 – Exposé des motifs – loi de programmation militaire 2003-2008 – www.assemblee-nationale.fr
22
Permettre à la France d’avoir une autonomie complète quant à l’accès
de ses capacités technologiques et industrielles.
En fait, l’efficacité économique doit être au cœur des priorités du ministère de la Défense.
Les sommes, dépensées par le gouvernement dans l’acquisition ou le développement de
programmes d’armement par exemple, doivent procurer, ensuite, le meilleur retour sur
investissement possible. Dans ce but, mais aussi afin de ne pas transgresser la
réglementation du CMP (comme nous avons pu le voir dans la première partie), le
ministère a pour obligation de faire appel aux règles du marché, c'est-à-dire de mettre en
concurrence les candidats potentiels, et ce, afin de bénéficier de l’effet de compétition pour
obtenir les meilleurs conditions de prix possibles. De plus, le fait que la France puisse
avoir accès, de façon systématique, à ses capacités technologiques et industrielles est
obligatoire et impératif. En effet, il s’agit là d’une condition sine qua non pour une
efficacité maximum de l’armée. Cette liberté d’action est d’autant plus importante qu’elle
permet à la France de préserver son autonomie d’action et de décision.
Il est donc évident que l’application du principe d’autonomie compétitive repose sur des
liens étroits, mais non tendancieux, entre le ministère de la Défense et les entreprises du
secteur privé. Le ministère a d’ailleurs entrepris une réforme à ce sujet portant sur la
rénovation des partenariats qu’il peut entretenir avec les sociétés de défense. La finalité de
cette réforme porte sur le respect des principes évoqués ci-dessus (à savoir la mise en
compétition et la liberté d’action dans les choix stratégiques de l’armée française). En
conséquence, le processus de rénovation doit aboutir au retrait de l’Etat du capital des
compagnies dont il est encore actionnaire. Il doit aussi faciliter le développement de
solutions d’acquisition innovantes qui peuvent avoir recours au financement privé et à
l’achat de prestations de services. La volonté de moderniser, mais aussi de renforcer la
relation existante entre les entreprises privées et l’Etat, présente des intérêts réciproques
pour chacun des deux acteurs. Pour les industriels, avoir une certaine connivence avec des
organismes publics est un avantage indéniable notamment dans le domaine de l’armement
où la vente d’armes est souvent influencée par les relations diplomatiques et économiques.
Réciproquement, un programme d’armement, mené par une entité étatique, ne peut être
viable ni aboutir s’il n’y a pas une complicité qui s’est instaurée entre les deux partenaires.
23
En définitive, le ministère de la Défense, afin de répondre aux besoins du gouvernement
dans le domaine des marchés publics, a instauré une politique d’acquisition basée sur le
principe d’autonomie compétitive. Celle-ci a pour enjeu l’optimisation des achats grâce à
la mise en compétition et l’établissement de nouvelles formes de partenariats basées sur le
principe de la transparence. Malgré cette transparence, des relations étroites sont tout de
même nécessaires pour finaliser la création ou le développement des matériels. De plus, il
serait aussi utile de s’intéresser à l’influence que peut avoir l’Europe sur la stratégie du
ministère de la Défense. Dans la partie suivante, nous nous interrogerons sur le pouvoir
que peuvent posséder les sociétés de défense privées sur les programmes d’armement
français, puis nous verrons ensuite pourquoi les coopérations internationales et
européennes en matière de défense et d’armement ont, directement ou indirectement, un
impact sur le développement des matériels français.
ii. Une politique d’acquisition sous influence
La France a, pendant de très nombreuses années, pratiqué une politique d’autosuffisance en
matière de défense et d’armement. La possession de l’arme nucléaire en est le parfait
exemple, l’armée française a basé l’ensemble de sa stratégie sur ce type d’armement avec,
comme leitmotiv, la dissuasion. Néanmoins, l’évolution du contexte géopolitique et
économique a amené la France à revoir progressivement sa politique. La baisse des coûts
d’acquisition est désormais l’objectif principal et, même si la France tient à garder son
indépendance vis-à-vis de ses capacités technologiques et industrielles (voir le principe
d’autonomie compétitive), il est possible de remarquer un changement de positionnement
de l’Etat français. Désormais, l’Etat tend à faire disparaître son rôle d’actionnaire et se
situe plus comme un Etat prospectif avec le PP30, le financement de la Recherche &
Développement et comme un Etat client avec la loi de programmation 2003-2008, la
passation de marchés publics etc… Ce phénomène n’est pas typique à notre pays en
particulier, au contraire, de nombreux pays européens ont opté pour une situation similaire.
Il est possible de citer le cas de la Grande-Bretagne, qui avec la vague de privatisation
lancée par Mme Thatcher à la fin des années 70, a immédiatement cherché l’instauration
de nouvelles formes de partenariats entre les entreprises privées et le �Ministry of
Defence� du Royaume-Uni (partenariat de type client/fournisseur ou partenariat mixte
24
avec un financement public/privé). En Allemagne, la politique n’a jamais été d’aboutir à
l’autosuffisance, au contraire, toute la stratégie d’acquisition des matériels militaires repose
sur la mise en concurrence de sociétés privées, et ce depuis toujours. L’adoption d’une telle
stratégie provient du fait, qu’en 195522, avec l’entrée de l’Allemagne dans l’OTAN, il
fallut réarmer le pays et réinventer l’outil de production d’armement. Les autorités
gouvernementales se sont alors tournées vers le secteur privé entraînant la création de
sociétés comme Alcatel, Diehl ou encore Siemens qui sont désormais les fondements de la
base industrielle allemande. Il est à noter, qu’en dehors de l’Europe, le recours à des
sociétés extérieures dans les programmes d’armement est aussi d’actualité. Citons le cas
des Etats-Unis où le secteur privé est, depuis longtemps, un partenaire privilégié et actif
dans l’industrie de la défense.
Ainsi, cette volonté des gouvernements de faire participer les entreprises privées aux
programmes d’armement et aux enjeux de la Défense, couplée au fait que la libéralisation
économique a engendré la création de �super structures� telles que les sociétés
transnationales23 de défense, les joint venture23, les groupements d’intérêt économiques23,
ont entraîné une redéfinition des relations états/entreprises. Bien qu’en France, l’Etat soit
encore le plus souvent le �maître du jeux� dans la conduite de plans d’acquisition de
matériels, il est possible de remarquer que cette règle, qui a prévalu pendant longtemps, est
en train de subir de profonds changements. Au fil du temps, les industriels prennent
l’initiative et peuvent avoir une influence sur les décisions prises par les hautes autorités
étatiques. Il est évident que la politique d’armement reste au niveau de l’Etat, mais il est
possible de dire que les industriels opèrent, désormais, dans un domaine plus libéré et
surtout que l’administration française accepte un principe de mutuelle dépendance.
22 Source : article intitulé « Quarante années d’appartenance de l’Allemagne à l’OTAN » publié en 1995 dans la revue de l’OTAN et remis à jour en septembre 2002 – auteur : Karl Kaiser – professeur à l’université de Bonn – www.nato.int (site de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord). 23 Société transnationale : société se composant d’une société mère et de ses entreprises affiliées à l’étranger. La taille et le champ d’action des sociétés transnationales sont variables. Source : communiqué de presse sur les investissements à l’étranger du 03/10/00 – Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement – www.un.org/french Joint venture : association de plusieurs entreprises autour d’un projet économique commun. L’objectif est de bénéficier d’effet de synergie en mettant en commun les infrastructures, les capacités des différents partenaires. Source : L’encyclopédie du marketing – Editions d’Organisation – Jean-Marc Lehu. Groupement d’intérêt économique : personne morale dont le but est de faciliter ou de développer l’activité économique de ses membres. Source : Droit des sociétés 3ème édition – Laure Siné – Editions Dunod.
25
Le programme UCAV (Unmanned Combat Air Vehicle) en est le parfait exemple. Ce
projet, qui a pour vocation la création d’un démonstrateur d’avion de combat sans pilote, a
été confié à la société Dassault – Aviation. Il s’agit d’une véritable opportunité pour cette
entreprise puisque le ministère de la Défense lui laisse la plus grande liberté d’action quant
à l’organisation des coopérations industrielles. Dassault – Aviation va aussi avoir la
possibilité d’organiser un certain nombre d’opérations visant à consolider sa position sur ce
type de marché. En agissant ainsi, le ministère lui permet d’obtenir une position de leader
dans les aéronefs de combat pour les années à venir à condition que le projet soit mené à
bien. En tant que maître d’œuvre, la compagnie Dassault a décidé de s’associer à EADS,
SAAB et HAI pour accomplir le projet UCAV24, tâche qui lui a été confiée. Cette volonté
de mener à bien un projet à vocation militaire plutôt que de se replier sur le secteur de
l’aviation civile prouve le rôle moteur de l’industrie au sein de la politique de défense
française. Enfin, il est possible d’affirmer qu’il existe désormais une vraie convergence
d’intérêts entre le secteur public et privé.
Autre fait marquant, la publication, début 2004, d’une déclaration conjointe de la part de
BAE, EADS et THALES à destination des gouvernements a très certainement eu une
influence sur la rapidité de mise en place de l’Agence Européenne de Défense (l’AED a été
créée le 12 Juillet 200425 par décision du conseil de l’Union Européenne). Cette déclaration
exhortait justement les états européens à renforcer et mieux coordonner, au sein d’un
organisme particulier, leur stratégie d’armement afin de bénéficier d’une protection
européenne commune permettant à la fois de rivaliser avec les Etats-Unis, de se prémunir
contre certaines attaques terroristes et d’avoir une capacité de projection adaptée à des
interventions comme ce fut le cas en Irak ou encore en Afghanistan.
Néanmoins, cette volonté des industriels de voir se développer une défense et une sécurité
européenne grâce, notamment à l’utilisation de programmes d’armement européen, est
aussi une vision partagée par les états membres de l’UE. Ces derniers ont déjà pris de
nombreuses résolutions avec la création du Plan d’Action Européen sur les Capacités
(ECAP), de l’Organisation Conjointe de Coopération en matière d’Armement (OCCAR)
etc… Cela se traduit par une multiplication des programmes d’armement européens ; il est 24 Source : article intitulé « EADS et Dassault Aviation s’allient dans les drones » et publié dans l’expansion en juin 2004. 25 Source : site institutionnel du Conseil de l’Union Européenne - http://ue.eu.int
26
à noter que ceux-ci ont, par conséquent, un impact direct sur les politiques d’acquisition
nationales. La France, et plus particulièrement le ministère de la Défense, a ainsi dû
réadapter sa stratégie en fonction de ces nouveaux accords. En effet, la stratégie
d’acquisition du ministère et le principe d’autonomie compétitive s’appliquent, de manière
adaptée, en fonction de la nature des équipements. Des catégories d’équipement, créées en
fonction du mode de coopération choisi, ont été instaurées. La première catégorie regroupe
les matériels réalisés en coopération européenne comme les frégates européennes
multimissions qui sont le fruit d’une coopération franco-italienne, le programme SATCOM
2000 portant sur la fourniture de capacités de télécommunications militaires par satellite
(projet développé avec le Royaume-Uni et l’Italie) etc… Cette catégorie regroupe aussi les
programmes transatlantiques. Même si la coopération entre la France et l’Amérique du
nord en matière d’armement est relativement faible, il existe, chaque année, quelques
programmes qui sont implémentés (en 200426, seule la création de deux démonstrateurs
portant sur l’interopérabilité et la lutte antiterroriste a été instaurée avec les Etats-Unis).
Enfin, la dernière catégorie concerne les programmes d’armement mondiaux et regroupe
les matériels dits courants où il est possible de s’approvisionner auprès de nombreux
fournisseurs.
Nous avons abordé, dans cette première partie, de nombreuses notions permettant de situer
le cadre de notre analyse. Ainsi, nous avons pu étudier la réglementation juridique relative
aux marchés publics et au cas particulier de la défense, nous avons ensuite fait une
présentation de la structure de la DGA et de ses différentes missions, enfin nous avons
analysé la politique d’acquisition du ministère de la Défense dont la DGA dépend. Dans la
partie suivante, nous allons �rentrer au cœur� de l’étude en nous focalisant sur la stratégie
d’achats de la Délégation Générale pour l’Armement.
26 Source : Le Contrat Opérationnel de la Délégation Générale pour l’Armement 2004, www.defense.gouv.fr
27
II. L’évolution de la stratégie d’achats de la DGA
La Délégation Générale pour l’Armement absorbe encore près de 80% des budgets affectés
au secteur de la Défense. Néanmoins, en 1996, une décision a été prise de réformer cet
organisme, avec, comme objectif principal, une réduction drastique des coûts. La DGA
s’est engagée, à ce moment-là, à une refonte complète de son organisation et de ses
méthodes de travail afin de devenir une entreprise à part entière avec tous les enjeux que
cela implique (la prise en compte des notions de rentabilité et de retour sur investissement
est désormais systématique dans les différents travaux menés par la DGA). Le système
hiérarchique d’antan a été démantelé et une nouvelle organisation a vu le jour (voir page
16).
De plus, afin de répondre à cette logique de minimisation des dépenses, les achats, qui
représentent le cœur de métier de la DGA, ont été professionnalisés. A partir de 1997, un
véritable département achats a été mis en place avec la venue d’acheteurs professionnels.
Ceux-ci ont été débauchés27 du secteur privé pour venir grossir les rangs de la nouvelle
entité créée. Des projets, visant à créer des outils spécifiques aux achats et utilisant les
Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), ont été
progressivement mis en place. Aujourd’hui, près de dix années se sont écoulées depuis
l’instauration de ces changements. la DGA emploie actuellement 25028 acheteurs, a
conduit, en 2004, 77 programmes d’armement, 992 programmes d’études amont et a
dépensé près de 8 milliards d’euros dans divers paiements à l’industrie.
Par conséquent, il est possible de s’interroger sur cette nouvelle politique d’achats qui a été
instaurée. Nous verrons tout d’abord brièvement les fondements de cette stratégie, puis la
dématérialisation de achats publics et l’utilisation des NTIC dans le processus
d’acquisition de la DGA, ensuite, nous analyserons en quoi cette démarche participe à
l’instauration de nouvelles formes de relations entre la DGA et les entreprises privées.
Nous terminerons par une analyse critique du système d’achats actuel et de ses outils.
27 Source : entretien avec M. Charles Cottenot qui a eu lieu le jeudi 2 Mars 2006 – Manager du projet portails ixarm et achats, responsable contenu et animation réseau. 28 Source : les chiffres clés de la DGA – www.defense.gouv.fr
28
1) La présentation du référentiel achat de la DGA
Les achats occupent une place prépondérante au sein de la DGA. Ils ont en effet une
double fonction : trouver les fournisseurs répondant au mieux aux besoins de l’armée
française, et ce, dans un souci d’économie et d’efficacité (respect des délais et des coûts)
permanent. Pour mener à bien ses missions, la DGA peut s’appuyer sur les directives du
ministère de la Défense dont la stratégie influence directement ses méthodes de travail
ainsi que sur le Code des Marchés Publics qui définit le cadre de travail des acheteurs de la
Délégation Générale pour l’Armement.
i. Les fondements de la politique d’achats de la DGA : principes généraux
La politique d’achats de la DGA est soumise à la politique d’acquisition du ministère de la
Défense et ses principes généraux reposent sur les fondements mis en place par le CMP.
Ainsi, les acheteurs doivent avoir recours, à chaque fois que cela est possible, à la mise en
concurrence des candidats potentiels. Ils ont aussi pour mission d’accentuer leurs efforts
quant à la responsabilisation des maîtres d’œuvre dans le but d’assurer la bonne conduite
des programmes d’armement. La massification des commandes est une autre priorité,
notamment dans le cadre d’achat de matériels non stratégiques, afin d’optimiser la gestion
des coûts.
Ce respect de la concurrence est un principe fondamental et est appliqué, chaque fois que
cela est possible, à tous les stades de création d’un produit. Afin de faire respecter ce
principe à ses fournisseurs, la DGA s’est dotée d’un plan d’acquisition obligeant les
maîtres d’œuvre à une mise en concurrence des sous-traitants lorsqu’ils font appel à ces
derniers. Ces plans d’acquisition, très largement utilisés dans le cadre des programmes
d’armement, sont divisés en deux grandes étapes29 :
La négociation avec le maître d’œuvre : elle permet de décomposer le
matériel en sous-ensembles qui donneront lieu à la mise en concurrence.
29 Source : Portail de l’armement – www.ixarm.com
29
Les critères de choix des sous-traitants sont définis dans cette première
étape, il en est de même pour les critères d’analyse des offres issues de
la sous-traitance.
La mise en place de la notification du marché par la DGA : le plan
d’acquisition est mis en ligne sur le portail �ixarm� (voir la partie 2.iii
p40 pour une explication de ce qu’est ixarm). Les sous-traitants
déposent leurs candidatures, les dossiers de consultation sont ensuite
créés à partir de ces dernières, et les plus intéressants sont transmis à la
DGA pour validation.
La détermination des prix des marchés est un élément primordial qu’il convient d’étudier.
Effectivement, pour fixer le montant d’une commande d’équipements militaires par
exemple, plusieurs éléments sont pris en compte par la DGA. L’étude de la détermination
du prix se fait en fonction d’un double impératif : la détermination du type de prix et la
forme de prix. Le type de prix permet de caractériser le prix initial dans un marché en
fonction des notions de prix unitaire/forfaitaire30 et en tenant compte des concepts de prix
initial définitif /provisoire30. La forme de prix concerne directement l’établissement du
prix de règlement et le choix se fait en fonction de la durée d’exécution des prestations. Il
existe d’ailleurs trois formes différentes : le prix ferme (il ne varie pas en fonction des
conditions économiques et est appliqué lorsque la durée d’exécution est inférieure à trois
ans), le prix révisable (il peut varier selon certains facteurs économiques), le prix ajustable
(il est modulable en fonction de barèmes particuliers et est utilisé pour les marchés de
biens courants).
Les contrats passés par la DGA portent le plus souvent sur la création de biens
d’équipement complexes. Ils s’étendent donc généralement sur plusieurs années et le prix,
qui est fixé au début du marché par l’administration publique, peut se voir modifier en
30 Prix unitaire : prix à l’unité pour une prestation déterminée. Prix forfaitaire : prix global qui rémunère le titulaire du marché pour l’ensemble d’une prestation. Prix initial définitif : prix que l’on trouve généralement dans un marché, il couvre le titulaire d’un marché contre tous les aléas prévisibles et ne doit donc pas être remis en cause. Il est utilisé à chaque fois que les prestations sont bien définies. Prix provisoire : Il est introduit dans un marché lorsque toutes les conditions permettant la fixation d’un prix initial définitif ne sont pas réunies au moment de la notification d’un marché. Le prix définitif sera alors fixé ultérieurement – Source : portail de l’armement : www.ixarm.com
30
fonction de l’évolution de facteurs économiques tels que les salaires, le coût des matières
premières ou d’un service. L’adaptation du tarif se fait en fonction d’un indice baptisé
�Produits et services divers� (Psd)31. Cet indice, divisé en trois modèles types, a été établi
par la DGA en collaboration avec l’Institut National de la Statistique et des Etudes
Economiques (INSEE) et la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et
de la Répression des Fraudes (DGCCRF). Il se calcule comme suit (l’exemple ci-dessous
correspond à l’indice PsdA2 utilisé principalement dans le cas de travaux publics) :
t : correspond à la date de lecture des indices pour la mise en œuvre de la formule, t
correspond à un mois de l’année.
EBI : correspond au facteur énergie et biens intermédiaires. Les valeurs à prendre en
compte sont régulièrement mises à jour sur le site Internet de l’INSEE.
TCH : correspond au facteur Transport, Communication et Hôtellerie (frais de restauration
etc.). Les valeurs à prendre en compte sont régulièrement mises à jour sur le site de
l’INSEE.
Une fois l’indice calculé, il ne reste plus qu’à utiliser la valeur obtenue pour moduler et
réadapter le prix de base.
Les principes de mise en concurrence, d’optimisation des coûts, de respect du budget et de
transparence sont les clefs de la stratégie de la DGA. Des outils particuliers (ex. : les plans
d’acquisition) sont donc utilisés pour que ces principes soient respectés tout au long du
processus d’achats. De plus, dans un souci d’équité et d’égalité vis-à-vis des fournisseurs,
la politique de prix est, elle aussi, soumise à une démarche particulière : le choix des tarifs
et leur adaptation en fonction des aléas économiques sont soumis à des méthodes
spécifiques employées par les acheteurs publics. En outre, il est à noter qu’il existe d’autres
31 Source : INSEE, indices pro – http://indicespro.insee.fr
Source : Méthode de calcul des indices PsdX – www.iwarm.com
31
mécanismes permettant de répondre aux objectifs définis lors de la réforme de 1997, la
normalisation des programmes d’armement est un exemple typique.
ii. La normalisation au cœur du processus achats de la DGA
Avec la restructuration de la DGA qui a été entreprise à la fin des années 90, de nouvelles
méthodes de travail ont été implémentées pour répondre aux exigences du gouvernement.
Ainsi, le responsable ministériel pour la normalisation et la Délégation Générale pour
l’Armement ont lancé, avec la participation de partenaires extérieurs tels que les industriels
et les états-majors, la création d’un référentiel baptisé RNPA (Référentiel Normatif des
Programmes d’Armement). Le RNPA est le document de référence pour l’ensemble des
acheteurs de la DGA. Il permet, à l’entité publique, de bâtir un référentiel normatif
spécifique à chaque programme d’armement à partir d’une base de normes communes et
consultables par tous les acheteurs du secteur de la défense. Cette base de données a été
constituée à partir des normes les plus utilisées dans le secteur civil, le but étant de fournir
un outil pratique, facilement utilisable.
La normalisation présente des avantages multiples. Elle permet « de fournir des documents
de référence comportant des solutions à des problèmes techniques et commerciaux
concernant les produits, biens et services, qui se posent de façon répétée dans les relations
entre partenaires économiques, scientifiques, techniques et sociaux »32. L’utilisation de
normes facilite l’élaboration des contrats des programmes d’armement et simplifie les
échanges entre le client et le fournisseur. Qui plus est, le fait de bénéficier d’un outil
commun va entraîner obligatoirement une diminution des erreurs lors de la création des
référentiels normatifs. L’utilisation récurrente de cet outil permet de systématiser le
déroulement du processus de normalisation des programmes d’armement dans le but de
rendre ce dernier familier. Les marges d’erreurs vont donc s’en trouver réduites. Le RNPA
permet aussi de répondre à des besoins ad hoc répétés et communs, il évite toute sur-
spécification ou sous-spécification normative pouvant engendrer à terme des coûts. Ainsi,
il s’inscrit parfaitement dans la logique de la réforme de 1996 et répond parfaitement aux
objectifs fixés par celle-ci. De plus, il entraîne une réduction des coûts du processus
32 Source : décret n°84-74 du 26 janvier 1984 – www.legifrance.gouv.fr
32
d’achats, une meilleure maîtrise des dépenses relatives à la création des projets militaires
français grâce, notamment, à une meilleure gestion du temps. Avec le RNPA, les équipes
en charge du projet ont la possibilité de rendre effectif le référentiel normatif du
programme dans des délais très réduits. Autre objectif rempli par ce document,
l’interopérabilité entre les différentes armées de terre, de l’air et la marine nationale.
L’utilisation d’un groupement de normes commun à ces trois armées permet une
rationalisation des choix d’investissement. Enfin, l’usage, pour différents programmes,
d’un même document favorise la transparence grâce à l’emploi d’un langage commun. Ce
dernier permet d’établir aussi un dialogue compréhensible par tous les acteurs du processus
d’acquisition lorsqu’un problème se pose.
Concernant la structure du RNPA, elle a été divisée en deux parties33 pour que son
utilisation soit la plus large possible : le RNG ou Référentiel Normatif Général qui
constitue le tronc commun du document et le RNS, référentiel Normatif Sectoriel, qui
regroupe les documents nécessaires pour un domaine d’application particulier. Il est à
noter aussi qu’en 200233, le RNPA a subi quelques modifications. Une mise à jour a été
effectuée avec l’intégration de nouvelles normes.
Finalement, la mise en place d’un système de normalisation présente de nombreux
avantages. Il facilite la tâche des acheteurs en leur fournissant une base de travail
commune. Il y a effectivement un gain de temps lors de la création du référentiel normatif
des programmes d’armement. L’usage répété du RNPA permet une diminution du taux
d’erreurs lors de la mise en place de ces référentiels. En effet, l’utilisation d’un langage
compréhensible à la fois par l’administration, les industriels et les sous-traitants est un gage
à la fois de transparence mais aussi d’efficacité. En plus de l’optimisation des coûts, il est
évident que l’utilisation de normes particulières répond à un souci de qualité des matériels
militaires. Néanmoins, l’obtention d’équipements, répondant aux attentes des troupes
opérationnelles, n’est possible que si la démarche qualité est présente tout au long du
processus : de la phase achats aux phases de conception et de réalisation des produits.
33 Source : rapport sur le Référentiel Normatif des Programmes d’Armement rédigé par Bruno Budini du BINORM (Bureau interarmées de normalisation) et publié en 2002 – www.ixarm.com
33
iii. Un processus qualité intégré à la politique d’achats de la DGA
La notion de qualité est une composante essentielle dans la stratégie de la DGA. Elle est
donc appliquée dès la phase d’acquisition des matériels, et ce, afin de garantir, dès le
début du programme d’armement, l’implication à la fois des acheteurs publics mais surtout
celle des industriels. Cette politique se traduit, dès les premiers stades de la relation
DGA/fournisseur, par des exigences en matière de management et d’assurance de la
qualité. Ces exigences sont définies par deux outils élaborés en commun avec le service
achats et le service qualité de la DGA. Il y a ainsi le cahier des clauses administratives
particulières communes d’assurance de la qualité des fournitures (CAC AQF)34 et le cahier
des clauses administratives relatives au traitement d’une non-conformité (CAC NC) 34.
Ces deux documents revêtent une importance capitale. Effectivement, ils sont pris en
compte lors de la rédaction des appels d’offre, des contrats et de la notification des
marchés. Le CAC AQF va permettre, en fonction de la nature du marché et du bien
commandé, de déterminer les obligations contractuelles et réglementaires qui devront être
respectées par les prestataires. Avant le lancement, des réunions auront lieu entre
l’industriel et le service qualité et achats de la DGA pour s’assurer du respect de ces
obligations. Le CAC NF intervient en cas de litiges, il peut apporter certaines solutions en
cas de problèmes. Plus précisément, il est utilisé lorsque des écarts techniques sont
constatés entre la livraison du matériel par l’entreprise privée et les exigences qualité
requises lors de la passation du marché.
Il est évident, qu’une fois le contrat signé, et même si des écarts peuvent être constatés lors
de la livraison du matériel comme nous venons de le voir, des contrôles sont tout de même
effectués lors des phases de conception et de réalisation. Tout d’abord, au sein de chaque
équipe en charge du programme, il existe des �ingénieurs qualité programmes� (IQP)34 qui
collaborent avec les ingénieurs de la DGA pour que soient mises en application les
exigences qualité instaurées lors de la phase d’achats. Le contrôle des industriels est assuré
par des �agents qualité� spécialement détachés par la DGA. Ceux-ci réalisent, chaque
semestre, des contrôles auprès d’une quarantaine de fournisseurs afin de mesurer leurs
performances au niveau de la qualité des matériels produits. Ces évaluations sont ensuite
34 Source : Portail de l’armement – www.ixarm.com
34
utilisées pour faire progresser les partenaires privés dans le cadre d’un suivi mis en place
par le service qualité de la Délégation Générale pour l’Armement.
Au fil des précédentes pages, nous avons pu voir que la DGA a subi de nombreuses
modifications tant dans sa structure que dans l’organisation de ses missions. Avec la
réforme de 1996, le métier d’acheteur a été professionnalisé, de nouvelles méthodes de
travail ont été implémentées. Les processus de normalisation et l’assurance de la qualité
produit sont désormais des composantes incontournables dans la stratégie d’achats de
l’armée française. Afin de supporter, d’un point de vue technique, ces changements,
l’utilisation des NTIC (favorisée par la dématérialisation des achats publics) a permis la
création d’une démarche e-achat et d’outils tels que les portails armement.
2) L’arrivée des Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication : la mise en place de la démarche e-achat
Même si le plus souvent, dans l’administration, l’usage des NTIC reste limité (l’usage de
l’Internet est souvent restreint et réduit à la simple recherche d’informations), il est
possible de dire que dans ce domaine, la DGA a été avant-gardiste. Ceci peut être expliqué
par le caractère particulier des missions qui lui sont confiées. La conduite des programmes
d’armement est en effet un domaine technique où les intervenants se doivent d’être à la
pointe de la technologie. Pour cela, ils doivent disposer d’outils adéquats. La démarche,
e-achat35, instaurée par la Délégation Générale pour l’Armement répond à cette obligation.
35 Il est à noter que le terme e-achat correspond en fait à l’anglicisme eSourcing. C'est-à-dire qu’il « correspond à l’utilisation d’Internet depuis la définition du besoin jusqu’à la signature du contrat d’achat pour faciliter la prise de décision achat et plus généralement pour établir une stratégie d’acquisition des produits et des services ». L’e-achat intervient donc en amont au contraire de l’eProcurement qui intervient en aval et « qui consiste à utiliser Internet pour opérer les aspects transactionnels de l’achat » (paiement etc.) – Source : Les achats, la révolution discrète par Maxime Ayel, Thierry de Cassan Floyran et Didier Picot – Elenbi Editeur – ouvrage publié le 9 décembre 2003.
35
i. Les débuts de la démarche e-achat
Les balbutiements de la démarche e-achat remontent à 1996 (année correspondant au début
de la réforme de la DGA comme nous avons pu le voir précédemment). En effet, cette
année là, le délégué général à l’armement, influencé par les dispositifs d’achat
dématérialisés d’ores et déjà utilisés dans certains pays comme les Etats-Unis36 ou encore
l’Australie36, décida de la création d’un démonstrateur. Ce démonstrateur avait pour
objectif la création de deux portails permettant l’accès à une salle de marché virtuelle où
les appels d’offres pourraient être publiés permettant ainsi aux industriels de consulter
les"annonces" mises en ligne (possibilité de télécharger les dossier de consultation etc.) et
de suivre, par exemple, au fur et à mesure l’avancée du processus de sélection des
candidats potentiels. Ainsi, la version expérimentale du projet a été mise en ligne dans le
courant de l’année 2000 et le retour d’expérience du démonstrateur a permis le lancement
de la version finale fin 2002. Un an plus tard, un processus de dématérialisation des
factures est implémenté afin, notamment, d’offrir plus de visibilité aux entreprises du
secteur privé.
Il est à noter que l’instauration d’un tel dispositif et la création d’une procédure de
dématérialisation correspondent aussi à une volonté, de la part de la DGA, d’appliquer, le
plus rapidement possible, le droit français avec l’article 56 du Code des Marchés Publics.
Cet article a été mis en application en avril 2002 grâce au décret n° 2002-69237. Il prévoit,
non seulement, la possibilité de recourir à la transmission dématérialisée des dossiers de
consultation et de soumission, mais aussi d’étendre les procédures électroniques au
processus de sélection des offres. Ainsi, à partir du 1er janvier 2005, tous les organismes
publics devaient être capables de recevoir, par voie électronique, les réponses des
entreprises à leurs appels d’offres.
36 Les administrations américaines effectuent la plupart de leurs achats courants grâce à une centrale d’achats (GSA) et utilisent régulièrement certaines procédures électroniques en mettant en ligne, par exemple, les catalogues fournisseurs. Le gouvernement australien, quant à lui, a entrepris l’utilisation de télé-procédures en matière d’achats publics en 1996. Source : rapport d’étude sur les procédures électroniques de gestion des achats publics par Eric Garandeau, Inspecteur des Finances – date de publication : mai 2001 – www.men.minefi.gouv.fr 37 Source : Article paru dans le n° 605 de Décision Informatique du 27 septembre 2004 et intitulé « achats publics, le mode FAH prédomine ».
36
En outre, il est possible de dire que la DGA fait office de modèle en France concernant la
dématérialisation des procédures d’achats publics. Cette volonté d’être considérée comme
un "fer de lance" dans ce domaine est due à la fois aux exigences de la direction achats de
la DGA qui a été en charge du projet mais aussi à la législation française qui a compris,
bien que tardivement, qu’il était vital d’instaurer un nouveau process d’achats utilisant les
TIC. En effet, l’utilisation d’une démarche e-achat présente certains avantages que nous
allons étudier dans les pages suivantes.
ii. Une démarche e-achat : quelle finalité ?
L’instauration d’une démarche e-achat au sein d’une structure comme la DGA doit
apporter, si elle est bien menée, plus de transparence et de flexibilité pour l’entreprise
publique mais aussi pour les sociétés privées. L’utilisation d’outils électroniques dans la
gestion des achats publics va entraîner une amélioration des procédures d’acquisition en
amont et une meilleure gestion du worflow38 en aval. En effet, ces nouveaux outils
électroniques, tels que l’Internet, permettent une modernisation du processus d’achats et
donc une optimisation de la politique d’acquisition en automatisant, par exemple, les
phases les plus coûteuses contenant le moins de valeur ajoutée. Il est à noter que toutes les
phases de l’achat sont concernées par la mise en place de cette nouvelle démarche comme
en témoigne le schéma ci-dessous.
38 Le workflow est un terme « désignant la modélisation électronique du circuit d’approbation de la société. Il permet de transmettre la demande d’achat de l’approvisionneur aux personnes qui devront la valider. » – Source : : Les achats, la révolution discrète par Maxime Ayel, Thierry de Cassan Floyran et Didier Picot – Elenbi Editeut – ouvrage publié le 9 décembre 2003.
Source : Rapport sur les procédures électroniques de gestion des achats publics – Eric Garandeau – Mai 2001
37
Grâce aux NTIC, la phase achats, qui va de la définition du besoin à la passation de la
commande, et la phase d’exécution du marché sont des étapes moins fastidieuses pour les
acheteurs de la DGA. On assiste à une fluidification des process. La définition du besoin,
tout comme la recherche de prestataires capables de satisfaire les attentes de la Délégation
Générale pour l’Armement, sont des étapes grandement facilitées par les nouvelles
technologies. Ainsi, dans le cadre d’un programme d’armement, la définition de ce dernier
passe obligatoirement par la création d’un cahier des charges qui sera fourni aux candidats
potentiels afin de savoir s’ils sont en mesure de répondre à l’appel d’offres. La création de
ce cahier nécessite une mobilisation interne des données des différents services de la DGA,
le fait de bénéficier d’un système d’information performant facilitera incontestablement
cette étape. De plus, le fait d’avoir recours à une salle de marchés virtuelle peut être
considéré comme une véritable opportunité concernant la mutualisation des connaissances.
Ces salles de marchés sont un véritable lieu d’échanges, en jouant le rôle de catalyseur de
l’information, elles favorisent les possibilités de rencontre et le partage de connaissances
entre les différents acteurs d’un appel d’offres. La recherche de fournisseurs ou sourcing
est aussi simplifiée puisqu’Internet est un support d’information qui ne cesse d’évoluer et
qui permet donc un élargissement du panel des fournisseurs.
La communication interentreprises se trouve elle aussi grandement simplifiée. Le grand
avantage d’Internet réside dans sa capacité à échanger de l’information sur des supports
homogènes et standardisés de façon quasi instantanée. Ainsi, concernant les portails
armement mis en place par la DGA, il est possible de télécharger les dossiers de
candidature ou de consulter directement les appels d’offres (les acheteurs se doivent de
publier, de façon simultanée, les appels d’offres aux journaux officiels39 mais aussi sur les
portails). Il s’ensuit, en conséquence, des gains de temps considérables dans les phases de
publication, de réception et d’analyse des offres et du choix des fournisseurs. De plus, il est
utile de remarquer que les gains d’efficacité ne se limitent pas seulement au
téléchargement des dossiers de consultation et des réponses des entreprises. La création
d’une démarche e-achat permet aussi un meilleur suivi des programmes. Une fois le contrat
signé, un espace a été spécialement créé par la DGA pour permettre, à l’administration et
aux sociétés privées, de pouvoir continuer d’échanger des informations dans un endroit
39 Source : entretien avec M. Charles Cottenot qui a eu lieu le jeudi 2 Mars 2006 – Manager du projet portails ixarm et achats, responsable contenu et animation réseau.
38
virtuel spécialement "aménagé" et disposant de mesures sécuritaires spécifiques. Cet
espace permet, par exemple, un suivi très précis des programmes d’armement, ce qui est
fondamental car ceux-ci sont le plus souvent relativement complexes et peuvent durer
plusieurs années.
Concernant la phase d’exécution du marché, il est certain que l’utilisation d’outils
électroniques implémentés par la démarche e-achat peut, encore plus que dans la phase de
sélection du fournisseur, jouer un rôle crucial. Effectivement, la phase aval du processus
achats, c'est-à-dire la passation de la commande, la facturation et le paiement sont des
étapes pouvant être optimisées. Grâce aux TIC, les coûts de gestion de ces opérations
peuvent être diminués. Assurément, l’automatisation du workflow avec la
dématérialisation de la facturation et du paiement sont deux concepts pouvant entraîner des
économies substantielles lors de l’achat de fournitures courantes. Celles-ci sont
commandées régulièrement et souvent en grand nombre entraînant la multiplication des
opérations relatives à leur acquisition et donc une augmentation de leurs coûts de gestion.
La dématérialisation des bons de commande, des factures ou encore des bons de livraison
peut permettre de fluidifier l’ensemble de la chaîne de traitement des opérations liées à la
gestion des achats.
Néanmoins, l’utilisation d’une démarche e-achat ne présente pas que des avantages. Tout
d’abord, comme nous avons pu le voir précédemment, les contraintes juridiques sont
importantes et des dépenses élevées ont dû être faites pour que les administrations soient
en conformité avec les nouvelles réglementations. Ensuite, ce type de démarche peut être
très astreignant pour des petites structures ne disposant pas forcément des moyens
financiers nécessaires (voir p. 42). Or, pour que le principe d’égalité et de transparence soit
respecté, il faut que l’ensemble des fournisseurs soit capable de bénéficier d’un système
informatique leur permettant de souscrire aux appels d’offre dématérialisés. En outre, pour
que l’achat en ligne soit efficace et équitable, il est obligatoire que les entreprises privées et
les administrations adoptent au même moment des procédures communes ; de plus ces
dernières doivent être expliquées de façon claire et précise aux compagnies qui postuleront
en ligne aux appels d’offres. La gestion du workflow, même si elle a été facilitée par
l’utilisation des NTIC, est encore difficile surtout sur des dossiers complexes telle que
l’acquisition de matériels militaires. Enfin, la protection des données et la question de la
39
signature électronique sont les deux soucis majeurs quant à la mise en place d’une
démarche e-achat. Depuis le début de leur utilisation, les NTIC soulèvent des problèmes
techniques relatifs à la sécurisation des échanges d’informations sur l’ensemble de la
procédure d’achats. Cette sécurité est d’autant plus importante lorsqu’il s’agit d’appel
d’offres ; les données et les propositions des entreprises ne doivent pas pouvoir être lues
par des concurrents ou même par l’acheteur public avant une date butoir fixée au préalable.
Dans le cas particulier de la défense et de la DGA, la sécurisation des systèmes de
réception et d’envoi est primordiale car les informations échangées peuvent être très
sensibles. Ainsi, la signature électronique40 a été adoptée dans le droit français avec la loi
du 13 mars 200040 et est désormais admise comme preuve au même titre que l’écrit. Il est à
noter que l’utilisation d’une signature électronique est un procédé pouvant se révéler
fastidieux. Avant d’utiliser un tel outil, il est nécessaire de suivre une auto formation40
d’une durée de trois heures, ce qui peut se révéler pénible puisque aucune autre forme
d’aide n’est proposée.
Finalement, l’instauration d’une démarche e-achat présente de mutliples avantages pour
une organisation comme la DGA. Comme nous avons pu le voir, elle permet une meilleure
définition et une meilleure adaptation du produit au besoin grâce à une amélioration des
échanges d’information à la fois en interne (entre les différents services de la DGA) mais
aussi en externe (entre les fournisseurs et l’administration publique). L’utilisation des
NTIC entraîne aussi une réduction des délais (avec Internet l’information est transmise en
temps réel), des coûts liés à la gestion des appels d’offres et des dossiers des entreprises
candidates ainsi qu’une diminution du prix d’achat avec l’utilisation des enchères inversées
(il s’agit en fait d’un procédé visant à réunir, sur une place de marché virtuelle, des
fournisseurs ayant répondu à un appel d’offres pour une durée comprise entre 1 et 3
heures ; le fournisseur qui remportera l’appel d’offres est celui qui aura proposé le prix de
vente le moins élevé). De plus, avec l’utilisation de systèmes d’information de plus en plus
perfectionnés, il existe d’autres avantages qui concernent de façon indirecte la fonction
achats. Ainsi, il est évident que la fonction approvisionnement va pouvoir être améliorée
avec, par exemple, l’utilisation d’analyses comparatives concernant les coûts (la création
de bases de données par les acheteurs va faciliter les comparaisons entre les différents 40 La signature électronique « permet, à l’aide d’un procédé cryptographique, de garantir l’intégrité du document signé et l’identité du signataire. » – Source : Serveur Thématique sur la sécurité des systèmes d’information – www.ssi.gouv.fr
40
fournisseurs). Néanmoins, la démarche e-achat présente aussi des déconvenues. Ainsi,
l’aspect sécuritaire peut être un frein quant à l’implémentation d’un tel système. D’un point
de vue technologique, l’e-achat demande aussi, de la part des compagnies privées et plus
particulièrement pour de petites structures, des efforts notamment d’un point de vue
financier afin de pouvoir participer aux appels d’offres. Il est alors possible de remettre en
question les principes d’égalité et de transparence prônés par le Code des Marchés Publics.
Nous venons de voir en détail les bénéfices et les désagréments qu’il est possible de retirer
d’une stratégie ayant pour objectif la mise en service d’une démarche e-achat, il est donc
désormais utile de s’intéresser aux systèmes et technologies utilisées par la DGA.
iii. Les technologies utilisées par la DGA
Avec la réforme de 1997 et le code des marchés publics qui a favorisé la dématérialisation
des appels d’offres, la DGA a instauré un certain nombre d’outils lui permettant de
répondre à ces attentes. Le portail armement a ainsi été créé pour un coût d’environ 3
millions d’euros41, deux systèmes d’information baptisés « Espace Partenaires » et
« SIPROG » ont été développés, et pour sécuriser le transfert d’informations, la DGA a
choisi d’utiliser les réseaux ENX (European Network Exchange).
L’architecture e-achat de la Délégation Générale pour l’Armement peut être divisée en 3
modules : les deux portails "ixarm.com" et "achats.defense.gouv.fr" s’articulent autour
d’une salle de marché virtuelle baptisée "Place de marché service public défense". Le
portail "ixarm.com" doit être utilisé pour les achats relatifs aux armes, munitions ou
matériels de guerre. Il permet une amélioration de l’efficacité de la conduite des
programmes d’armement (en facilitant la recherche de fournisseurs, le suivi des contrats et
l’acquisition des matériels), un accroissement de la réactivité du Ministère de la Défense
en accélérant les échanges et facilite l’accès aux marchés des programmes d’armement
notamment pour les PME/PMI. Il est composé de trois rubriques principales42. La
première, "le secteur de l’armement", présente les grands programmes, dont la liste
détaillée des fournisseurs ainsi qu’un descriptif des acteurs industriels de la Défense. La 41 Source : entretien avec M. Charles Cottenot qui a eu lieu le jeudi 2 Mars 2006 – Manager du projet portails ixarm et achats, responsable contenu et animation réseau. 42 Source : www.ixarm.com
41
deuxième, "travailler avec la défense", sert de méthodologie pour les sociétés qui ne sont
pas habituées à travailler avec le Code des Marchés Publics. Enfin, la troisième rubrique,
baptisée "Marchés et opportunités" peut être considérée comme le cœur du système, les
entreprises peuvent effectuer un travail de veille sur les appels d’offres, récupérer des
informations du Journal Officiel ou encore, participer aux compétitions de façon
électronique, bref il s’agit d’un lieu d’échanges entre le ministère de la Défense et ses
fournisseurs. Le portail "achats.defense.gouv.fr" a été construit sur un modèle identique,
excepté qu’il ne concerne que les achats généraux, c'est-à-dire les fournitures courantes,
l’habillement, les travaux ou encore les équipements de santé. Le dernier module est la
salle de marché virtuelle qui a de multiples fonctions. Elle sert de bases de données
concernant les candidats potentiels, elle gère les consultations et les factures et peut être
utilisée par les fournisseurs lorsqu’ils souhaitent participer à une enchère électronique,
enfin elle permet un approvisionnement sur les catalogues électroniques.
Portail ixarm.com Famille d’achats : - Armes - Munitions - Matériels de guerre
Place de marché service public
défense
Base de données candidats
Portail achats.defense.gouv.fr
Famille d’achats : - Fournitures courantes - Infrastructures et
travaux - Vivres et habillement - Carburant - Equipements der
santé
Appros sur catalogue
électronique
Enchères électroniques
Gestion des consultations
Gestion des factures
Réception des plis Mise en ligne des
dossiers de consultation
Publication des annonces
Architecture e-achat de la DGA
Source : Présentation faite par Michel Cadic, Directeur du portail de l’armement, sur la dématérialisation des relations entre la Défense et ses fournisseurs le 6 avril 2004 – document récupéré sur le site du ministère de la Défense – www.defense.gouv.fr
42
Afin de compléter mais aussi d’optimiser l’architecture e-achat vue précédemment, la
création de deux systèmes d’information43 a été lancée en même temps que le projet portail
armement. Ces systèmes ont pour objectif d’assurer une meilleure coordination des actions
entreprises par les différents acteurs lors du processus d’acquisition des matériels mais
aussi lors de la phase de conception de ces derniers. Ainsi, le système d’information
"Siprog" a pour vocation de fournir des outils (tableaux de bord, synthèses et échanges de
données dématérialisées) qu’il sera possible d’utiliser afin de réaliser un suivi extrêmement
minutieux des processus de conduite des programmes d’armement. La finalité de "Siprog"
est de pouvoir gérer de la façon la plus précise qu’il soit ces programmes en tenant compte
des données financières, du montant des achats fixé en amont ou encore des ressources
humaines rattachées au programme. Le second système d’information, baptisé "Espace
Partenaires" vient s’interfacer avec "Siprog" et a été conçu pour être utilisé une fois la
phase de contractualisation passée. Ce système est en fait un lieu d’échanges sécurisé entre
les fournisseurs et l’administration, il est utilisé lors des phases de conception des matériels
de guerre pour transférer des informations relatives à la bonne conduite des projets. Cet
"Espace Partenaires" a pour objectif principal « l’interconnexion sécurisée de réseaux non
classifiés de la Défense, avec celui de partenaires extérieurs à la Défense pour le partage
et l’échange d’informations d’un niveau de sécurité dit restreint »44.
Il est à noter que l’"Espace Partenaires" est accessible grâce aux technologies Web,
néanmoins, en raison de la confidentialité des données échangées, ce système ne s’appuie
pas sur le réseau classique d’Internet mais sur un réseau extranet : ENX qui permet
l’interconnexion des réseaux locaux des entreprises au moyen de réseaux virtuels privés
limitant les risques de piratages ou de déperdition quant à l’information transmise. La seule
contrainte d’un tel système est son coût qui peut se révéler relativement élevé pour ses
utilisateurs et plus particulièrement pour de petites organisations (les frais d’installation
sont au minimum de 500 €, il faut aussi compter l’abonnement mensuel à un opérateur
téléphonique du type France Télécom ou Deutsche Telekom, enfin il faut prendre en
43 Un système d’information est « un ensemble organisé de ressources (matériels, logiciels, personnels, données procédures) permettant d’acquérir, de traiter, de stocker et de communiquer des informations dans et entre des organisations. Il permet des opérations aussi diverses que la prise de commandes, l’édition de bons de préparation, la facturation, la comptabilité générale ou encore la paie, etc. » - Source : Management de la production 2ème édition – Anne Gratacap et Pierre Médan – Editions Dunod – année de parution : Septembre 2005. 44 Source : Présentation de l’espace partenaires – document rédigé le 19/01/2006 et téléchargeable sur le site du portail armement ixarm – www.ixarm.com
43
compte le type de connexion souhaitée, c'est-à-dire soit l’ADSL soit un système plus
performant pouvant être facturé plusieurs k€ par mois)44.
Au final, l’arrivée des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication a
permis la mise en place d’une démarche e-achat au sein de la DGA. La volonté de cette
administration de vouloir renouveler ses processus d’acquisition s’inscrit parfaitement
dans la politique de modernisation voulue par le ministère de la Défense. Ainsi, cette
démarche répond à un double objectif : elle permet d’atteindre le but que s’était fixée la
DGA Partenaires étatiques Partenaires Industriels Autres partenaires
Segment d’interface Segment d’interface Segment d’interface
Réseau ENX
HUB de
l’Espace Partenaires Echange de données, gestion du workflow, de la
messagerie…
Point d’accès ENX du HUB de l’Espace Partenaires
Liaison ENX entre le partenaire et le HUB créé sur le réseau ENX par
l’opérateur ENX
Point d’accès ENX du partenaire
Source : Présentation de l’espace partenaires – document rédigé le 19/01/2006 et téléchargeable sur le site du portail armement ixarm – www.ixarm.com
44
réforme de la DGA entreprise en 1996 (à savoir une réduction des coûts et une meilleure
réorganisation des process de travail), de plus l’implémentation de cette nouvelle méthode
de travail est une véritable opportunité pour la DGA. Elle correspond exactement aux
attentes de l’Etat français qui a décrété l’utilisation de la dématérialisation des dossiers de
consultation et des soumissions mais aussi l’obligation pour les pouvoirs publics d’être
capables, à partir du 1er janvier 2005, de recevoir et de traiter toutes réponses électroniques
relatives à un appel d’offres. Néanmoins, il est à noter que l’établissement de cette
nouvelle méthodologie, qui a entraîné de profonds bouleversements quant à la façon de
travailler de la DGA et de ses partenaires, a obligatoirement engendré des modifications
concernant les relations entre cette administration et ses fournisseurs. Nous allons donc
aborder ce sujet dans la partie suivante.
3) Une démarche qui s’inscrit dans l’établissement de nouvelles
formes de partenariat
La démarche e-achat utilisée par la DGA correspond parfaitement à la tendance actuelle
qui veut qu’il y ait une multiplication des échanges entre le secteur public et privé.
Effectivement, on assiste de plus en plus à une recherche de complémentarité entre les
administrations dites publiques et les sociétés privées. Cette tendance est flagrante dans le
secteur de la défense où les contrats de partenariats et d’externalisation sont en plein essor.
Le portail armement de la Délégation Générale pour l’Armement en est le parfait exemple :
en favorisant les échanges, en facilitant l’accès à l’ensemble des entreprises pour ses
marchés d’équipement ou encore en utilisant des outils de suivi efficaces concernant les
programmes d’armement, de nouvelle formes de relations ont vu progressivement le jour.
Celles-ci peuvent prendre de multiples formes et reposent toutes sur un principe commun :
le principe « win-win ».
45
i. Une vision commune avec les fournisseurs : une relation « win-win »
Il est certain que les portails armement et le lieu d’échanges virtuels �Espace Partenaires�
ont fortement participé à l’établissement d’une nouvelle forme de collaboration entre la
DGA et ses fournisseurs. Ceci est particulièrement vrai pour les PME-PMI à taille humaine
qui, auparavant, n’avaient pas toujours la possibilité de répondre aux offres proposées par
le marché de la défense. L’utilisation de ces technologies est donc un excellent moyen pour
la DGA d’agrandir son panel de fournisseurs et de collaborer avec des sociétés
positionnées sur une niche technologique.
L’établissement de ce nouveau type de relation s’est immédiatement fait sur des bases
saines. Chacun des deux interlocuteurs a cherché à établir au plus tôt une synergie
gagnante basée sur la méthode du « win-win »45, et ce, afin de bénéficier des conditions de
travail les plus favorables qu’il soit. Effectivement, la décision d’une solution gagnant
gagnant est obligatoire dans le cas du secteur de la défense (les programmes d’armement
sont relativement longs et les travaux effectués ainsi que les informations détenues par
l’entreprise privée sont souvent de nature confidentielle) ou une collaboration �intimiste�
est exigée de la part des deux parties concernées. De plus, en adoptant ce type d’accord, les
deux partenaires sont sûrs de tirer avantage l’un de l’autre. La DGA pourra bénéficier de
l’expertise de son fournisseur car il est clair qu’une administration, même si elle intervient
dans un environnement technologique évolué n’est pas toujours capable de produire un
bien de manière efficace, et le fournisseur aura l’opportunité, par exemple, de développer
son portefeuille clients et de bénéficier de certaines aides du gouvernement.
A titre d’exemple, il est possible de citer les nombreux efforts faits par la Délégation
Générale pour l’Armement pour soutenir son tissu industriel constitué de plusieurs milliers
de PME/PMI qui lui confèrent une grande réactivité. Ainsi, des aides à l’innovation telles
que la Recherche Exploratoire et Innovation46 ont été créées permettant la révélation de
technologies de rupture. Des procédés de soutien ont aussi été prévus dans d’autres
domaines comme la finance où un dispositif de renforcement des fonds propres permet un
45 La stratégie gagnant gagnant ou win-win est « une démarche au terme duquel ou de laquelle les deux participants tirent un bénéfice relativement équitable ». Source : L’encyclopédie du Marketing, Jean-Marc Lehu, édition d’Organisations, 2004. 46 Source : portail de l’armement – www.ixarm.com
46
accompagnement en matière d’innovation et d’accès à certains moyens financiers. Cette
assistance, destinée aux PME/PMI intervenant dans des secteurs dits stratégiques, est
contrôlée par la DGA mais aussi par le Haut Responsable pour l’Intelligence Economique
(HRIE) et s’appuie sur plusieurs fonds d’investissement pour dispenser son aide. D’autres
formes de soutien ont été prévues afin de faciliter l’exportation et la promotion des
technologies développées par ces petites structures afin d’éviter qu’elles ne soient
complètement dépendantes des commandes de défense.
En outre, l’instauration de la démarche e-achat a permis d’intensifier les relations entre la
DGA et ses partenaires et plus particulièrement avec des organisations telles que les
PME/PMI. Ces échanges, basés sur le principe d’une relation « win-win », permettent une
optimisation des travaux et des tâches à effectuer lors des différents projets. Effectivement,
chaque partenaire travaille selon un double objectif : engranger un maximum de
connaissances et retirer de cette collaboration le plus grand bénéfice possible tout en
respectant la mission qui lui a été confiée ainsi que les attentes et les besoins de l’autre
partie. Afin d’aboutir à un tel résultat, nous allons voir que dans le secteur de la défense,
les Partenariats Publics/Privés ou PPP ont été grandement privilégiés au cours de ces
dernières années.
ii. La création des Partenariats Publics-Privés
Les partenariats entre le secteur public et privé ont toujours existé et ont très souvent été
employés à des fins de production et ce, quel que soit le domaine d’activité (le
gouvernement français a, par exemple, pendant de très nombreuses années, passé la
commande d’autoroutes réalisées et gérées par des entreprises privées). Cette tendance
s’est accélérée dernièrement à tel point qu’il a fallu penser à réglementer les contrats de
partenariat. L’ordonnance du 17 juin 2004 a donc été créée définissant de manière précise
les responsabilités et les limites de ce type de collaboration. Ainsi « les contrats de
partenariat sont des contrats administratifs par lesquels l’Etat ou un établissement public
de l’Etat confie à un tiers, pour une période déterminée, en fonction de la durée
d’amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une
mission globale relative au financement d’investissements immatériels, d’ouvrages ou
47
d’équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des
ouvrages ou équipements, ainsi qu’à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou
leur gestion, et, le cas échéant, à d’autres prestations de service concourant à l’exercice,
par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée »47. Ce
mécanisme juridique permet donc d’adopter une logique de concession, dans certains
secteurs spécifiques comme la Défense ou la Justice, alors qu’il était jusqu’alors
impossible, à cause d’un manque de réglementation, de bénéficier de véritables
partenariats.
Ainsi, cet article de loi est une véritable opportunité pour le secteur de la Défense et pour la
Délégation Générale pour l’Armement. Il intervient en pleine période de transition. Avec
l’utilisation des portails armement comme ixarm, la réforme de la DGA, la mise en place
de pratiques incitant un rapprochement entre le ministère de la Défense et les entreprises
privées, cette ordonnance conforte le fait que la Défense ne perçoit plus sa tâche comme
« consistant à produire des infrastructures comme un porte-avions, par exemple, mais
plutôt comme celle d’offrir un service »48. Le recours aux Partenariats Publics Privés (PPP)
ne va donc s’en trouver que facilité, ce qui ne peut être que bénéfique. En se positionnant
désormais comme simple prestataire de service, l’armée française et donc la DGA
répondent parfaitement aux nouvelles mesures prises concernant la réduction des coûts lors
des phases de conception et d’acquisition des matériels de guerre. Il serait possible
d’imaginer alors une multitude de possibilités comme la location sur le long terme
d’avions de transport, voir même d’aéronefs de combat. La finalité serait d’obtenir, de la
part des sociétés privées, des kits �clefs en main� comprenant la location, l’entretien voir
même la formation des pilotes. Ce type de projet va très certainement se démocratiser de
plus en plus dans un futur proche car de nombreuses armées du monde (y compris l’armée
française) ont déjà eu recours à la location pour des besoins ponctuels (en matière de
projection, l’armée française a eu recours à la location de gros porteurs du type Antonov
lors de la crise du Kosovo, qui plus est, l’ALAT est actuellement en train de privatiser la
formation de son personnel naviguant : voir page suivante). Les PPP présentent un autre
47 Source : Site Internet du Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie consacré au Partenariat Publics-Privés (PPP) – www.ppp.minefi.gouv.fr 48 Source : Partenariat Public-Privé dans le domaine de la Défense : comparaisons Europe/Etats-Unis, étude réalisée par Martial Foucault, professeur d’économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et Pierre Kopp, chercheur économiste à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne pour le Centre des Hautes Etudes de l’Armement, mars 2003, éd. Les Cahiers du CHEAR – www.chear.defense.gouv.fr
48
avantage : grâce à eux la DGA va pouvoir se décharger des risques financiers potentiels
liés à la création et à la conduite des projets d’armement en s’appuyant sur ses
collaborateurs privés. Il est néanmoins certain que si les sociétés privées décident de
prendre en charge les risques relatifs à la fabrication d’équipements militaires, ces risques
seront refacturés à la DGA à un moment ou à un autre.
Depuis juin 2004, un certain nombre de Partenariats Publics-Privés ont d’ores et déjà été
signés entre la DGA et des organisations privées. Le premier partenariat concerne la
formation des pilotes de l’Aviation Légère de l’Armée de Terre (ALAT). Ce premier
contrat de partenariat porte sur l’« achat d’heure de vol au profit de l’Ecole d’application ».
Plus précisément, il s’agit de mettre à disposition de l’école de l’ALAT une flotte
d’hélicoptères, de plus, le cocontractant devra se « charger de la mise en œuvre, de la
maintenance et des réparations des machines, lesquelles resteront sa propriété pendant la
durée du contrat qui est estimée à 20 ans »49. D’autres projets sont actuellement à l’étude
comme le déploiement et la gestion d’un réseau de desserte Internet-protocole49 pour les
bases de l’armée de l’air ou la recherche d’un partenaire par le SGA (Secrétariat Générale
à l’Armement) pour la mise en place d’un mécanisme financier destiné à faciliter
l’escompte des factures des fournisseurs de la Défense49.
Finalement, la création des Partenariats Publics-Privés facilite grandement la stratégie de
rapprochement déjà entamée par la DGA vis-à-vis de ses fournisseurs. Couplée au
fonctionnement de la démarche e-achat, elle offre la possibilité d’un véritable travail
collaboratif basé sur la confiance et le respect mutuel entre l’Etat et ses partenaires issus du
secteur privé. Ces PPP présentent aussi l’avantage majeur de répartir les risques lors des
programmes d’armement. Malgré cela, les relations public-privé du secteur de la Défense
restent tout de même relativement complexes. Il est utile de prendre en considération le fait
que ces nouveaux partenariats ne représentent qu’une aide supplémentaire permettant une
optimisation de la production d’équipement. Ils doivent donc être utilisés sur des secteurs
où la DGA n’a pas forcément les compétences nécessaires, mais en aucun cas, leur
utilisation ne doit aboutir à une privatisation du secteur de la Défense bien
qu’indirectement ils conduisent à un externalisation de ses moyens. 49 Source : Portail de l’armement – www.ixarm.com, Site Internet du Ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie consacré au Partenariat Publics-Privés (PPP) – www.ppp.minefi.gouv.fr
49
iii. Les perspectives d’externalisation
Avec la démarche e-achat favorisant l’utilisation des PPP, il est possible de s’interroger sur
l’avenir des moyens de défense français. Il semblerait que la prochaine étape consiste à
externaliser complètement certains services de l’armée française alors que de nombreux
experts militaires s’y opposent arguant le fait qu’externaliser certains secteurs revient tout
simplement à privatiser, de façon déguisée, la Défense. Or, la loi de programmation
militaire 2003-2008 ne semble pas avoir tenu compte de ces revendications puisque
l’externalisation y est très défendue prônant le fait qu’il s’agit surtout d’un moyen de
financement innovant. A ce sujet, 600 millions d’euros50 sont déjà consacrés à la mise en
place et au développement des processus d’externalisation (Il est à noter que le ministère
de la Défense a déjà externalisé certaines tâches comme l’entretien de ses infrastructures ;
de plus le recours à la sous-traitance est déjà très utilisée par la Direction des Chantiers
Navals lors de la construction des bâtiments de la marine nationale. Néanmoins ce type
d’externalisation ne concernait jusqu’alors que des travaux bénins) .Cette dépense peut
paraître considérable mais l’un des enjeux de ce type de processus est aussi la réalisation
sur le long terme d’économies importantes pour l’armée française.
Le recours à une telle méthode étant controversée, une Charte de bonnes pratiques50 a été
créée afin d’éviter tout dérapage pouvant entraîner l’insatisfaction des deux parties lors de
prestations futures. Cette charte met en avant quelques grands principes à respecter pour
aboutir à une collaboration fructueuse ainsi que la méthodologie à appliquer. Les notions
de partenariat sont régulièrement abordées confirmant ce que nous avons vu précédemment
à savoir que les PPP constituent une étape préliminaire dans l’instauration d’accords
d’externalisation : « l’externalisation implique un partenariat car la recherche permanente
d’innovation, de flexibilité et de réactivité s’inscrit dans une perspective de pérennité des
partenaires et d’évolution des métiers et des compétences des collaborateurs. La
connaissance partagée des organisations et des métiers dans le respect de la culture de
chacun permet d’organiser au mieux les échanges pour enrichir la prestation et bénéficier
des compétences de chacun des partenaires »50. Les futurs projets d’externalisation
50 Source : Actes du colloque portant sur les « Perspectives d’externalisation en France » entre le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF), le ministère de la Défense et l’Institut Esprit Service (association regroupant des sociétés de tous secteurs et pilotant un observatoire de l’externalisation), document publié le 30 janvier 2003 et disponible sur www. institut-esprit-services.medef.fr
50
devront donc respecter une démarche particulière afin de se conformer aux attentes de la
charte de bonnes pratiques. Tout d’abord, une phase de préparation est nécessaire (la
méthode qui va être décrite ci-dessous est issue des actes du colloque portant sur les
« Perspectives d’externalisation en France »), elle comprend :
L’élaboration de la stratégie qui nécessite la prise en compte de
plusieurs éléments. La décision d’externaliser une fonction ou un service
doit être prise d’un commun accord entre l’administration et la société
privée concernée. En effet, il faut s’assurer que l’entreprise a bien les
capacités pour prendre en charge le service sous-traité. De plus, il faut
fixer des objectifs à respecter sur une durée pluriannuelle afin d’avoir
des éléments de repère et de pouvoir effectuer un pilotage précis du
projet.
La définition du périmètre : il s’agit d’analyser et de délimiter les
fonctions pouvant être �transmises� à l’entreprise partenaire ; l’objectif
étant, grâce à ce travail effectué en amont, de faciliter le transfert de
contrat à la structure partenaire et d’accroître la réactivité. Cette
sous-étape permet aussi de fixer les limites des activités externalisées
déterminant ainsi précisément le rôle que va occuper le contractant.
Enfin, il faut prendre en compte l’aspect évolutif que peut avoir le projet
et s’assurer que l’entreprise contractante aura la possibilité d’adapter ses
outils et méthodes de travail aux changements engendrés par le temps.
La prise de décision qui doit s’accompagner de l’accord de l’ensemble
des équipes ayant travaillé sur le projet afin de faciliter ensuite les
échanges. Durant la prise de décision, les deux parties doivent se mettre
d’accord sur le contrôle qu’aura l’administration sur les travaux
effectués par son partenaire. Il s’agit ici de préparer la conduite future du
projet et les actions de co-pilotage.
51
La seconde phase concerne tout simplement les actions de suivi une fois que le contrat
d’externalisation a été signé. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte afin d’aboutir à
une relation pérenne avec des échanges fructueux :
L’organisation du suivi et du co-pilotage est un aspect fondamental à
prendre en compte. Ainsi, il est nécessaire d’avoir un certain contrôle
sur les différents travaux effectués par l’entreprise contractante.
L’administration concernée peut, par exemple, créer une cellule qui va
contrôler la bonne exécution du marché et surtout dialoguer avec les
titulaires de ce dernier.
L’enrichissement du contrat est un sujet essentiel, il doit être prévu en
amont afin de faciliter son adaptation ainsi que celle des processus de
travail en fonction des évolutions du marché.
Des indicateurs de suivi comme la mesure du taux de service doivent
être utilisés afin de s’assurer du bon déroulement de l’externalisation.
De plus, l’utilisation d’indicateurs permet un véritable co-pilotage entre
l’administration et son partenaire en favorisant le reporting et donc la
relation administration-entreprise privée.
Le recours à l’externalisation, bien que controversé, présente aussi des avantages et plus
particulièrement en matière de collaboration européenne. Effectivement, nous avons pu
voir, dans la troisième section de la première partie intitulée �La politique d’acquisition de
la DGA�, l’influence les programmes d’armement européen sur la stratégie d’acquisition
des matériels de guerre français. Ce type d’entente ne peut être que renforcée avec
l’externalisation des moyens de défense. Au fil du temps, il est possible de dire que
l’Europe de la Défense progresse avec la création de structures spécifiques comme
l’Agence Européenne de Défense et la définition d’une politique unique (la Politique
Européenne de Sécurité et de Défense ou PESD). Ce phénomène se traduit par une
augmentation de la mutualisation de certains programmes renforcée par le fait que la
plupart des pays européens ont recours, comme la France, à la stratégie d’externalisation.
En effet, à l’heure où la diminution des coûts est un enjeu majeur pour l’ensemble des
52
gouvernements, il est évident que l’externalisation peut constituer un outil efficace et être
aussi le catalyseur de la mutualisation en Europe. Elle peut entraîner une optimisation de
l’efficacité de la dette publique grâce à des modèles d’acquisition originaux en s’appuyant
sur les forces du secteur privé. De plus, la mutualisation est un bon procédé permettant, à
chaque pays, de voir le montant de la facture finale diviser en fonction du nombre d’états
impliqués. A titre d’exemple, citons le cas de la France et de la Belgique qui ont décidé,
dans un futur proche, de créer une école commune à la formation de leurs pilotes de
chasse, ces derniers seront formés sur des alphajet dont l’entretien a été confié à une
société privée. Ce type d’accord n’est possible que si les deux parties sont d’accord sur le
fait d’avoir recours à un tiers non étatique, à savoir une société privée. L’intérêt d’avoir
recours à l’externalisation prend ici tout son sens puisqu’il y a une diminution et un partage
des dépenses liées à la formation des pilotes mais aussi un partage des connaissances.
L’externalisation des moyens de défense français est un sujet ambivalent. Elle présente de
nombreux avantages et s’inscrit parfaitement dans la stratégie de diminution des coûts
voulue par le ministère de la Défense et la DGA ; malgré cela son utilisation est aussi
source de craintes. De nombreux militaires appréhendent le fait que l’externalisation puisse
conduire à une privatisation des moyens de la Défense Nationale. Néanmoins, il est
possible de retirer des bénéfices de l’utilisation d’un tel procédé lorsque celui est utilisé à
bon escient et avec une méthodologie adaptée. Les Etats européens ont bien compris les
enjeux liés à l’externalisation et de nombreux projets communs basés sur ce principe sont
en train de voir le jour. En définitive, nous avons vu, dans cette seconde partie, de
nombreuses informations relatives à la stratégie e-achat de la DGA et à l’apport des NTIC
(en l’occurrence le portail armement) dans les processus d’acquisition, puis, nous avons
tenté de comprendre en quoi la démarche e-achat et les NTIC pouvaient avoir une
influence sur la création de nouvelles formes de relations entre une administration et une
entreprise privée. Il est désormais temps de dresser un bilan et de s’interroger, de façon
objective et pragmatique, sur le véritable intérêt retiré par l’armée française de l’utilisation
de ces nouvelles technologies. Plus précisément, nous procèderons à une analyse critique
du système déjà utilisé à savoir le portail armement.
53
4) Analyse critique du système utilisé par la DGA
Il est certain que la dématérialisation des achats publics et la création d’outils spécifiques
comme le portail armement offre des avantages non négligeables notamment d’un point de
vue financier. Néanmoins, il existe toujours une grande différence entre la théorie et la
pratique, les différents entretiens menés dans le cadre de ce mémoire tendent à le
confirmer. Ainsi, nous allons observer quelles sont les faiblesses du système actuel. Les
idées développées ci-dessous sont les résultantes de deux interviews réalisées avec deux
fonctionnaires de la DGA directement impliqués dans le processus de fonctionnement
d’ixarm.com et d’achats.defense.gouv.fr à savoir M. Charles Cottenot, manager du projet
portails ixarm et achats, et M. Laurent Hury, acheteur DGA/DSA/SPOTI et chargé des
études amont.
i. La mise en place des portails ixarm et achats : un projet sans réelle
politique d’accompagnement du changement
L’utilisation des nouvelles technologies par la Délégation Générale pour l’Armement se
révèle plus complexe qu’il n’y paraît à la fois en interne mais aussi en externe. Cette
difficulté rencontrée par les utilisateurs est très certainement liée au fait que le projet,
visant à la mise en place d’un portail de l’armement accessible via Internet, n’a bénéficié
d’aucune stratégie de communication particulière. Plus précisément, malgré le fait que
l’utilisation d’une telle technologie allait bouleverser les habitudes de travail et de
fonctionnement des acheteurs de la DGA mais aussi des fournisseurs, aucune mesure
particulière n’a été prise en vu de former les utilisateurs à ce type de technologies. Ainsi,
une fois le démonstrateur validé et l’outil installé dans la plupart des départements achat de
la DGA, les acheteurs ont reçu, en tout et pour tout, une seule demi-journée de formation
ce qui est relativement peu, qui plus est, aucun suivi ou rappel n’a été prévu. Il n’est donc
pas étonnant, comme nous le confiait M. Hury, que nombre de ses collaborateurs
continuent à utiliser la �procédure papier classique� sans se soucier de la nouvelle
technologie mise à leur disposition. Cette attitude est parfaitement compréhensible, sans un
programme de communication et d’accompagnement solide, les fondements de ce type de
projet d’entreprise ne peuvent être que friables. Ceci est particulièrement regrettable
54
puisque ce sont ces projets, qui permettent, s’il y a adhésion du personnel, une
amélioration de la performance et un accroissement du rendement et des profits comme
nous le confirment Hervé Sérieyx et Georges Archier dans leur ouvrage l’entreprise du
3ème type51 : « il dote l’entreprise d’un cap. Il utilise les capacités de contribution de tous à
bâtir une �cathédrale� en commun, un défi qui justifie qu’on se batte pour la qualité totale,
l’innovation et la vitesse ». Dans le cas de la DGA, l’absence d’une stratégie de
communication interne fondée sur le long terme n’a très certainement pas permis de
rassurer les craintes du personnel liées au changement.
Les problèmes cités précédemment se sont donc obligatoirement répercutés en externe, sur
les partenaires de la Délégation Générale pour l’Armement. Ces derniers n’ont bénéficié
que de moyens limités pour �appréhender� le nouvel outil puisqu’en fait chaque division
régionale/départementale de la DGA avait pour charge de former les entreprises locales à
l’utilisation du portail (il est alors possible de s’interroger sur l’intérêt d’une telle
formation si les formateurs, eux-mêmes, n’ont pas acquis tous les mécanismes de
fonctionnement de cette nouvelle technologie). Les sociétés, qui n’ont pas pu bénéficier de
ce type de programme, ont toujours la possibilité de s’initier à l’utilisation d’ixarm.com et
d’achats.defense.gouv.fr en téléchargeant les différents guides de fonctionnement proposés
sur les sites Internet correspondants (ceux-ci sont très volumineux et il est possible d’avoir
des doutes sur le fait que le dirigeant d’une structure du type PME/PMI prenne plusieurs
heures pour s’initier à l’ensemble des fonctionnalités et des procédures d’enregistrement).
Il y a donc fort à parier que ces dernières continueront à utiliser la procédure classique.
Le manque de préparation et de communication concernant le fonctionnement de ce nouvel
�instrument� a engendré un certain nombre de dysfonctionnements comme nous allons le
voir ci-après.
51 L’entreprise du 3ème type, paru le 10/2000 aux éditons Points, Georges Archier et Hervé Sérieyx.
55
ii. Une utilisation qui peut se révéler problématique
L’utilisation des portails est effectivement problématique dans certains cas de figure. De
plus, malgré les efforts consentis pour sécuriser les échanges, la peur de la fuite
d’information peut entraîner aussi quelques soucis.
L’un des problèmes majeurs concerne essentiellement la procédure d’enregistrement des
fournisseurs dans la base de données. Ces derniers rencontrent des difficultés lors de cette
phase, soit parce qu’ils ne respectent pas les étapes expliquées dans les guides d’utilisation
(en règle générale ils souhaitent remplir au plus vite ces formalités), soit parce que tout
simplement ils ne comprennent pas ces procédures. Au final, l’utilisateur privé ainsi que
l’acheteur public se retrouvent pénalisés. A titre d’exemple, l’acheteur ne peut effectuer un
travail de veille efficace en vue d’un appel d’offres, le prestataire, quant à lui, peut même
se voir tout simplement retirer de la base de données si les informations fournies ne
correspondent pas au champ approprié. Il existe aussi des incohérences dans l’utilisation
des portails engendrant des coûts supplémentaires inutiles. Ainsi, en matière de sécurité, la
DGA doute encore des systèmes installés par ses équipes et les acheteurs ont pour ordre,
dans le cas de données confidentielles, de ne transmettre aucune information de façon
électronique et d’utiliser la voie postale, il est alors possible de se questionner sur l’intérêt
d’avoir instauré une plate-forme informatique sécurisée. De même, il existe encore à
l’heure actuelle des appels d’offres qui ne sont pas consultables à partir du portail mais
seulement sur le Bulletin Officiel des Marchés Publics (BOMP), les acheteurs oubliant de
remplir la section adéquate prévue à cet effet. . Le gain de temps procuré est aussi
discutable puisque nombre d’acheteurs continuent à informer les candidats du déroulement
d’un appel d’offres via Internet mais aussi en utilisant le �courrier papier�.
En définitive, l’utilisation des outils ixarm et achats peut être source de contraintes alors
que la volonté première du projet initial était de faciliter les relations entre la DGA et ses
prestataires. Il ne faut, néanmoins, pas faire de ces cas de figure précédemment cités une
généralité mais ces derniers existent et il faut en tenir compte dans l’appréciation de la
nouvelle démarche e-achat implémentée.
56
iii. Des résultats contrastés
En conclusion, l’utilisation des portails armement présente un bilan mitigé. Effectivement,
ils remplissent parfaitement leur rôle concernant la diminution des coûts et l’optimisation
de la réactivité de la chaîne d’information. Il est indéniable qu’ils ont contribué à favoriser
l’utilisation d’Internet pour le téléchargement des dossiers de consultation et donc à
diminuer les coûts entraînés par la constitution de dossiers papier. Ils ont entraîné, de façon
indirecte, la déflation du nombre de personnels de la DGA depuis 199752. Avec
l’utilisation d’un tel outil, les personnes qui étaient en charge auparavant de la gestion des
dossiers n’ont pas été remplacées lorsqu’elles sont parties en retraite.
Néanmoins, le système est encore perfectible et les gains engendrés par celui-ci ne sont
véritablement perceptibles que par la DGA à moyen terme, les utilisateurs sont confrontés
régulièrement à des problèmes et la fonctionnalité et la convivialité des portails sont à
améliorer. Ce manque de clarté dans l’utilisation quotidienne de ces instruments
électroniques est très certainement la cause principale du faible retour quant à la remise des
plis depuis l’année 2005 (sur 93000 dossiers électroniques téléchargés, seuls 325 ont été
retournés par voie électronique soit un taux de retour de moins de 1%)53.
Partant des éléments décrits précédemment, les portails ixarm.com et
achats.defense.gouv.fr remplissent ils pleinement leurs missions ? En effet, permettent-ils
une véritable optimisation du travail des acheteurs de la DGA et de leurs partenaires ? Rien
n’est moins sûr. Il est alors possible de s’interroger sur les autres alternatives qui
s’offraient au ministère de la Défense pour moderniser la DGA ainsi que ses processus et
méthodes de travail, c’est ce que nous allons approfondir dans la partie suivante en prenant
un exemple concret : la modernisation des achats de l’armée de l’air des Etats-Unis, l’Air
Force.
52 Source : Commission de la Défense Nationale et des Forces Armées, compte rendu n°5 sur l’audition de M. Yves Gleizes, délégué général pour l’armement, 15 octobre 2003 – www.assemblee-nationale.fr 53 Source : Présentation de Ixarm : portail et salle d’acquisition dématérialisée faite par Emmanuelle Plessiet et Charles Cottenot – document PowerPoint remis par Charles Cottenot lors de l’entretien du jeudi 2 mars 2006.
57
III. Les axes d’amélioration possibles des processus d’acquisition
de l’armée française : comparaison avec le modèle américain
Nous avons vu, au fil des précédentes pages, le fonctionnement du processus d’acquisition
au sein de l’armée française. Celui-ci a subi de profondes modifications depuis 1996,
lorsque le ministère de la Défense décida de lancer une réforme visant à moderniser
l’agence étatique en charge de l’achat des fournitures courantes et de la conduite des
programmes d’armement, à savoir la Délégation Générale pour l’Armement.
Ainsi, un certain nombre de décisions ont été prises afin de moderniser les procédés
auparavant utilisés, de se mettre en conformité avec la législation nationale et européenne
et de concourir à la construction de l’Europe de la défense. La France a donc choisi
d’utiliser les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication pour mettre
en application les grands principes de la dématérialisation et créer sa propre stratégie
e-achat. Cette stratégie est fondée sur la création de deux portails armements (ixarm.com
pour les équipements relatifs à l’armement et achats.defense.gouv.fr pour les marchandises
courantes) donnant accès à une salle de marchés virtuelle où les fournisseurs peuvent
répondre en ligne aux appels d’offres. Un second espace virtuel a été développé (l’espace
partenaires) afin que la DGA et ses prestataires puissent échanger des données dans un
endroit sécurisé une fois les contrats signés.
D’autres gouvernements comme celui des Etats-Unis, ont aussi mis en place, à la même
époque, des restructurations au niveau de leurs armées. Effectivement, afin de réadapter sa
politique d’armement qui datait de l’époque de la guerre froide, le gouvernement américain
a mis en place, au milieu des années 90, des réformes. Cette restructuration est
régulièrement citée comme le modèle à suivre. Nous allons donc établir une comparaison
entre le modèle français et américain. L’objectif est de déterminer quels auraient pu être les
autres choix possibles pouvant moderniser les processus d’acquisition si le ministère de la
Défense n’avait pas opté pour une démarche e-achat. Il est à noter que les propositions
faites ci-après n’ont, en aucun cas, pour but de dénigrer le travail effectué par la DGA, il
s’agit plutôt de proposer une �ouverture� à notre étude.
58
1) Une redéfinition des échanges entre les partenaires publics et les
entreprises privées dans la production d’armement
La création de la démarche e-achat au sein de la DGA a pour vocation de faciliter les
échanges entre les acheteurs publics et les fournisseurs du secteur privé. En effet, avant
l’utilisation des NTIC, il est certain que le réseau de communication entre les différents
intervenants dans le cadre des programmes d’armement était relativement complexe. Lors
de la réforme de 1996, le ministère de la Défense a voulu accélérer la circulation du flux
d’informations grâce aux portails virtuels. Cependant, il est intéressant de se demander s’il
n’aurait pas été possible d’envisager une autre solution, c’est ce que nous allons voir ci-
après en opposant le dispositif français de production d’armement au dispositif américain.
i. La comparaison entre le modèle français et le modèle américain
La France dispose, depuis le début des années 60, de la même organisation concernant la
création de ses équipements militaires. Lors de la conception d’un matériel militaire,
plusieurs acteurs interviennent. Ainsi, on distingue le ministère de la Défense, qui est en
charge de déterminer les grandes lignes de la politique française en matière d’armement,
une agence étatique (la DGA) qui a pour responsabilité la conduite des programmes
d’armement ainsi que la Recherche et Développement, les grandes divisions de l’armée (à
savoir l’armée de terre, de l’air et la marine nationale) qui communiquent leurs besoins à la
DGA , les arsenaux et les firmes privées qui participent à l’élaboration des programmes
d’armement. Cette structure organisationnelle (voir le schéma page suivante) est
relativement compliquée et il est facilement compréhensible qu’en matière de
communication elle ne soit pas forcément adaptée. Dans le cas des programmes
d’armement, les échanges sont nombreux et peuvent s’étendre sur plusieurs années. La
remontée de l’information doit être très certainement lente empêchant la réactivité de
l’ensemble de l’organisation et, au vu des problèmes d’utilisation rencontrée par les
portails virtuels, il n’est pas sûr que ceux-ci facilitent l’accès à l’information. Les
conséquences d’un tel dysfonctionnement sont susceptibles d’entraîner de nombreux
retards dans la réalisation des équipements engendrant alors des coûts considérables.
59
Il est alors possible de se demander si, lors des différentes réformes qu’a connues l’armée
française en vue de sa professionnalisation et notamment celle de 1996 visant à moderniser
les processus de fonctionnement de la DGA, il n’aurait pas été envisageable, au lieu de
faire le choix des NTIC (et donc de n’apporter en fin de compte qu’une amélioration du
système existant), de réformer et d’adapter l’ensemble du procédé de fabrication des
équipements militaires en prenant comme modèle le dispositif américain. Effectivement, ce
dernier (voir schéma ci-dessous) est d’une grande simplicité puisque ce sont les armées
(Navy, Army, Air Force) qui développent directement auprès des entreprises privées leur
propre armement. Cette stratégie présente de nombreux avantages, elle permet surtout à
chaque corps d’armée de définir et de répondre de façon précise à ses propres besoins, de
plus il y a une véritable optimisation des flux d’informations puisque les utilisateurs finaux
sont en contact direct avec les équipes de développement du secteur privé. Ainsi, la DGA
aurait très bien pu être �découpée� en trois grandes divisions, chacune aurait été rattachée à
un corps d’armée. Ces divisions auraient, ainsi, été spécialisées dans l’acquisition de
matériels propres à l’armée de terre, de l’air et à la marine nationale. Cette nouvelle
organisation aurait permis un gain de temps certain et donc une meilleure gestion des
programmes d’armement. Néanmoins, des difficultés auraient pu être rencontrées
concernant la mutualisation des coûts.
Source : Dépenses militaires, restructuration de l’industrie d’armement et Privatisation de la défense : analyse comparée France – Etats – Unis 1994-1999, Gilles Le Blanc, Décembre 2000, Centre d’économie industrielle Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris – www.cerna.ensmp.fr
Dispositif français
60
Finalement, les modèles américain et français de production d’armement sont totalement
différents. Les Etats-Unis ont choisi de simplifier au maximum le processus de fabrication,
en effet, celui-ci se rapproche de ce que l’on pourrait appeler une relation marchande
basique où les futurs clients sont en contact direct avec leurs fournisseurs. Du côté français,
le choix de passer par un organisme étatique spécialisé (la DGA) a été fait. Cette
organisation présente un inconvénient majeur : les utilisateurs futurs du matériel ne sont
pas en relation avec les sociétés privées productrices d’armement mais avec la DGA. C’est
donc à la DGA que les militaires se doivent d’exprimer leurs besoins : n’aurait-il pas alors
été possible, dans le cadre des réformes mises en œuvre au milieu des années 90, de
découper la DGA en �trois unités� rattachées chacune à une armée ? Cela aurait permis
notamment un raccourcissement du flux d’informations mais il aurait fallu, alors, remettre
en cause le principe fondateur de la politique d’achat de la DGA, à savoir les programmes
d’armement. C’est le point que nous allons aborder dans la partie suivante.
Source : Dépenses militaires, restructuration de l’industrie d’armement et Privatisation de la défense : analyse comparée France – Etats – Unis 1994-1999, Gilles Le Blanc, Décembre 2000, Centre d’économie industrielle Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris – www.cerna.ensmp.fr
Dispositif américain de défense
61
ii. La remise en question de la notion de programme d’armement
Il est incontestable que vouloir apporter des modifications quant à l’élaboration des
matériels militaires revient tout simplement à une remise en question du processus actuel,
c'est-à-dire les programmes d’armement. Ces derniers ont été instaurés dans les années
6054 lorsque la France a voulu répondre à un double impératif : garder la maîtrise de ses
programmes d’armement tout en faisant participer de multiples intervenants
(essentiellement des entreprises privées) dans leur conception. Il est à noter que ces
programmes, dont la mise en place était aussi liée à l’instauration d’une politique de
défense particulière à savoir la dissuasion nucléaire, ne sont peut-être plus forcément
adaptés aux contraintes et aux directives de notre époque comme en témoignent les
nombreux problèmes rencontrés lors de ces dernières années.
Effectivement, les programmes d’armement ne semblent plus être une méthode aussi
performante qu’autrefois. Il est ainsi possible de citer, à titre d’exemples, le cas de l’avion
de chasse Rafale qui accuse un retard de plus de 120 mois par rapport à la date initiale ou
encore le missile air-air d’interception, de combat et d’auto-défense (MICA) et le véhicule
blindé de combat d’infanterie (VBCI) dont les délais de livraison ont été repoussés d’un à
deux ans55.
Ces retards, sont dans certains cas, dus à des défaillances de maîtrise d’ouvrage55
entraînant un allongement des délais initialement prévus ainsi qu’une augmentation des
dépenses financières. Il apparaît que ces troubles sont engendrés par le fait que « le
dialogue entre les états-majors et la DGA n’est pas toujours suffisant » 55, de plus au vue
du système organisationnel actuel « les négociations entre partenaires industriels et
étatiques prennent du temps et elles engendrent des délais plus longs » 55.
Nous avons vu, dans la partie i) intitulée �comparaison entre le modèle français et le
modèle américain�, qu’il était possible de s’inspirer du modèle américain pour accélérer,
54 Source : Dépenses militaires, restructuration de l’industrie d’armement et Privatisation de la défense : analyse comparée France – Etats – Unis 1994-1999, Gilles Le Blanc, Décembre 2000, Centre d’économie industrielle Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris – www.cerna.ensmp.fr 55 Source : Commission de la Défense nationale et des forces armées, compte rendu sur l’intervention de M. Jean-Louis Bernard et M. Antoine Carré au sujet des conditions d’exécution des grands programmes de défense, 17 novembre 2004 – www. assemblee-nationale.fr
62
de façon efficace, les échanges de données entre les partenaires privés et leurs homologues
étatiques. Cette nécessité de modifier en profondeur le processus d’acquisition des
armements a été confirmée grâce aux exemples cités précédemment. Sur de nombreux
projets de défense, il existe un véritable manque d’efficacité entraînant des ralentissements
et des dysfonctionnements. Nous allons maintenant étudier le cas de l’US Air Force qui
était dans un cas similaire à ce que connaît la DGA aujourd’hui, et ce, afin d’en tirer les
enseignements nécessaires et de voir s’il est possible d’adapter les choix américains au
modèle français.
2) L’exemple de l’US Air Force : la mise en place des « best
practices »56 en matière de « Purchasing Management »56
L’US Air Force a entrepris des changements radicaux en matière de politique d’acquisition
à la fin des années 90. En effet, à partir de 1995, le Department of Defense (DoD) lança un
programme visant à améliorer les processus d’achats de l’armée de l’air américaine (US
Air Force). Ce projet, d’une durée de cinq ans, avait pour dessein la mise en place de
nouvelles techniques en matière d’achats en vue d’optimiser la gestion des dépenses et
donc de réduire les coûts. Pour ce faire, l’état major américain prit exemple sur certaines
compagnies privées reconnues pour leur savoir faire en matière de gestion des achats ou
purchasing management. Ainsi, un audit fut réalisé auprès de certaines firmes privées afin
de déterminer quels procédés se révélaient être les plus efficaces. Ces derniers furent
ensuite adaptés à l’US Air force. En conséquent, dans un premier temps, nous verrons
quelle a été l’influence du secteur privé sur les stratégie d’achats de l’armée de l’air
américaine, puis, nous étudierons la nouvelle organisation instaurée une fois l’audit des
compagnies privées terminé, enfin, nous finirons par les nouveaux outils qui sont
désormais utilisés.
56 Source : Implementing Best Purchasing and Supply Management Practices, Lessons from Innovative Commercial Firms, Project Air Force, Nancy Y. Moore, Laura H. Baldwin, Frank Camm, Cynthia R. Cook, publié en 1999 par l’association RAND – www.rand.org
63
i. L’influence du secteur privé
Bien que la DGA, au cours de sa réforme de 1996, a été indirectement influencée par les
sociétés privées (afin de moderniser la fonction achats, de nombreux acheteurs ont été
débauchés du secteur privé), l’US Air Force est allée véritablement �plus loin� en copiant
les pratiques de certaines entreprises privées. En effet, plusieurs audits ont été menés
auprès de multinationales reconnues pour leurs compétences en matière de �purchasing
management� (bien que longtemps délaissée, certaines entreprises privées ont très vite
compris l’importance de la fonction achats). Elles ont, alors, développé de nouveaux outils
et de nouvelles méthodes afin d’assurer un fonctionnement optimal de ce métier. Elles sont
aujourd’hui à la pointe dans ce domaine, ce qui leur procure un véritable avantage
concurrentiel quand on sait que les achats représentent entre 30 et 70% du chiffre d’affaires
d’une société comme IBM, John Deere ou encore Bristol-Myers Squibb56. Le but des
différentes études menées était donc de réduire le coût des achats en matière de fournitures
courantes, de services et d’armes. En effet, plus de 60% des dépenses de l’US Air Force
concernent ces postes comme en témoigne le graphique56 ci-dessous :
64
L’Etat-Major américain a donc très rapidement compris qu’il était possible de réaliser des
économies importantes sur ce type de dépenses.
Les audits réalisés ont abouti à la création d’une stratégie spécifique, baptisée « a strategic,
goal-oriented approach to purchasing and supply management »56 et développée à partir
d’expériences issues du secteur privé. Cette nouvelle politique repose sur trois fondements
qu’il est possible de résumer comme suit :
Il est fondamental d’établir, concernant les achats, des objectifs
stratégiques mesurables établis en corrélation avec les objectifs globaux
de l’entreprise. Ils doivent être établis à partir d’analyses internes
d’outils spécifiques tels que le benchmarking ou en faisant appel à un
cabinet de consultants externes. Les méthodes et outils de mesure
utilisées jusqu’alors doivent être examinés afin de comprendre les
raisons des dysfonctionnements latents.
Il est obligatoire de mesurer la performance de chaque acheteur en se
basant, par exemple, sur la qualité des produits ou des services fournis,
sur le respect des délais ou encore sur les économies réalisées. Cette
étape est d’autant plus importante qu’elle permet une responsabilisation
de chaque acheteur, elle lui fait prendre conscience qu’il occupe un
poste stratégique dans l’entreprise et qu’il a un véritable rôle à jouer
quant au bon fonctionnement de l’entreprise.
Toute décision prise, à partir d’un certain niveau hiérarchique, doit tenir
compte de la stratégie d’achats appliquée. De plus l’organisation de la
fonction achats doit être repensée (nous aborderons ce thème plus en
détail dans la partie suivante), un poste de directeur des achats doit être
créé, celui-ci doit siégé au conseil d’administration et participer
activement aux prises de décision. Les équipes d’acheteurs, afin d’être
les plus performantes possibles, doivent être composés d’individus
provenant de formations diverses afin d’obtenir une forte
complémentarité.
65
Mais, ce qui est le plus intéressant dans l’instauration de la nouvelle stratégie d’acquisition
de l’US Air Force est la prise en compte de la notion de changement. Effectivement, la
stratégie américaine s’est accompagnée d’une excellente gestion du changement. C’est sur
ce point que la différence est flagrante entre la DGA et l’US Air Force. Les américains ont
tout de suite compris qu’il allait être nécessaire d’accompagner chaque membre du
département achats lors de la mise en application des nouveaux fondements de la politique
d’acquisition. En effet, en prenant conscience que la résistance à toutes modifications
relatives à ses conditions où à ses méthodes de travail était un facteur humain naturel et
récurrent, les personnes responsables de l’application de la nouvelle stratégie ont donc mis
au point une tactique spécifique afin d’éviter des désagréments. Cette tactique peut être
résumée par le schéma56 suivant :
Il est possible de remarquer, grâce au schéma ci-dessus, que le travail réalisé en amont, au
niveau de la gestion du changement a été très important. Ce processus avait pour vocation
de rassurer les employés afin de les inciter à se plier aux nouvelles directives et donc à
travailler différemment. Ainsi, des programmes de formation ont été mis en place dans le
66
but d’expliquer les nouvelles pratiques de �purchasing management� et d’inciter les
salariés à tester ces nouvelles méthodes de travail. De plus, l’adhésion immédiate du
personnel dirigeant comme le �DeputyAssistant Secretary Assistant of the Air Force� a tout
de suite permis la création d’un projet d’entreprise commun facilitant ainsi l’adhésion du
reste du personnel. La communication, qui est l’élément moteur lors de tout changement et
qui était presque absente lors de la réforme de la DGA, a été parfaitement gérée par l’US
Air Force avec la création et l’application des procédés56 ci-dessous :
Nous venons d’étudier la stratégie et les moyens qu’avaient utilisés l’US Air Force pour
mettre en place sa nouvelle politique d’achats. L’Etat-Major a donc choisi de faire appel
aux techniques utilisées dans le secteur privé pour moderniser ses processus d’acquisition.
De plus, afin que chaque employé, chaque militaire adhère à ce nouveau projet, un travail
d’information et de gestion du changement a été réalisé en amont. La DGA, lors de la mise
en place de son portail armement, aurait très bien pu prendre exemple sur le modèle
américain en matière de communication, cela aurait très certainement permis une meilleure
adhésion du personnel et donc une meilleure utilisation de cet outil. Il est à noter que
l’audit demandé par l’armée américaine a entraîné des modifications importantes sur
l’organisation même du département achats et des équipes d’acheteurs de l’US Air Force,
c’est ce que nous allons voir ci-après.
67
ii. La redéfinition du système organisationnel
Suite aux études menées auprès des compagnies privées, de nombreux changements ont été
effectués, notamment au niveau de la place occupée par la fonction achats dans
l’organigramme de l’US Air Force. Celle-ci représente désormais un poste stratégique, en
relation directe avec les plus hautes autorités hiérarchiques alors qu’auparavant elle était
peu considérée.
De plus, la fonction �Purchasing and Supply Chain Management� a connu, en interne, de
profondes modifications. Elle a subi une refonte complète de son organisation visant à
diminuer le nombre de strates hiérarchiques et à améliorer les flux d’échanges
d’informations. Qui plus est, pour chaque programme d’armement, une équipe destinée à
l’acquisition du matériel et à la conduite du programme est créée. Cette équipe est toujours
organisée de la même manière, et ce, quel que soit le type d’achats effectué.
Nouveau modèle organisationnel
Source : Organizational Concepts for Purchasing and Supply Management Implementation, Project Air Force, Lynne M. Leftwich, James A. Leftwich, Nancy Y. Moore, C. Robert Roll, publié en 2000 par l’association RAND – www.rand.org
68
Cette redéfinition des équipes présente de multiples avantages. Comme il est possible de le
remarquer sur le schéma ci-dessus, chaque �pool� d’acheteurs fonctionne à la manière
d’une entreprise et prend en charge l’ensemble du processus d’achats. En outre, toutes les
fonctions nécessaires à la conduite d’un projet d’acquisition sont ici représentées. Les
équipes fonctionnent donc de manière autonome en gérant leurs fournisseurs, en contrôlant
leurs dépenses et les coûts engendrés par ces dernières et en s’assurant de la qualité des
produits acquis. Elles sont néanmoins suivis par le service du Air Force Materiel
Commander (AFMC, voir schéma page 67) qui s’assure du bon déroulement des
opérations. Le choix d’une telle structure permet à l’US Air Force de bénéficier d’une
grande réactivité. En dépendant directement de l’AFMC et en prenant en charge toutes les
étapes relatives à l’obtention des matériels militaires, les acheteurs sont plus à même de
trouver rapidement et efficacement une solution en cas de mauvais fonctionnement.
Purchasing Manager
Quality Advisor
Technical Advisor Procurement
Advisor
Demand Planning Advisor
Financial Cost
Advisor
Administrator
Sourcing leader Team 1
Sourcing leader Team 2
Material Manager
Material Manager
Material Manager
Material Manager
Material Manager
Material Manager
Support to the
sourcing leader team
Support to the
sourcing leader team
Nouvelle Organisation des équipes d’acheteurs
Source : Organizational Concepts for Purchasing and Supply Management Implementation, Project Air Force, Lynne M. Leftwich, James A. Leftwich, Nancy Y. Moore, C. Robert Roll, publié en 2000 par l’association RAND – www.rand.org
69
Ce type de structure, fonctionnant de façon indépendante, aurait pu être choisi, par le
ministère de la Défense, lors des différentes modifications apportées à la DGA dans le
cadre de la réforme de 1996. Néanmoins, le choix a été tout autre comme nous avons pu le
voir aux pages 15 et 16. De plus, au niveau de la constitution des équipes d’acheteurs, la
Délégation Générale pour l’Armement a opté pour une solution différente de celle prise par
l’US Air Force : à chaque étape du process d’achats correspond une équipe57. Plus
précisément, une équipe est en charge de la sélection des fournisseurs, une autre de la
contractualisation et la dernière s’occupe du suivi une fois le programme lancé. Bien qu’il
s’agisse ici que de proposer des solutions alternatives au modèle français, il est tout de
même possible de se demander si une organisation inspirée par le modèle américain
n’aurait pas été plus appropriée ; effectivement multiplier les équipes au sein d’un même
projet ne peut engendrer que la multiplicité des erreurs et alourdir de façon significative
l’échange d’informations. Bien que l’utilisation, au sein de la DGA, des NTIC et de la
dématérialisation ait permis d’accroître la vitesse de transmission des données entre les
intervenants lors d’un programme d’armement, il n’est pas certain que les mesures prises
soient finalement plus efficaces que le système organisationnel implémenté par les
américains.
En résumé, l’US Air Force a finalement compris que la fonction achats était un élément
essentiel puisqu’elle permet la réalisation d’économies importantes ainsi qu’un gain de
temps conséquent. En s’inspirant des méthodes utilisées dans le secteur privé, des
aménagements structurels ont été réalisés de manière à ce que les achats occupent une
place de choix lors de la prise de décision stratégique. Une reconfiguration des équipes
d’acheteurs a même été effectuée afin d’offrir plus de souplesse et de dynamisme à
l’ensemble du processus d’achats américains. Cependant, il ne s’agit pas de la seule
transformation qu’a connue l’US Air Force étant donné que de nouveaux outils et de
nouvelles méthodes de travail ont été apportées du secteur privé pour être utilisées dans le
domaine de la Défense. C’est le sujet que nous allons désormais traiter.
57 Source : entretien avec M. Laurent Hury qui a eu lieu le jeudi 6 avril 2006 – acheteur DGA/DSA/SPOTI et
chargé des études amont.
70
iii. L’utilisation d’outils spécifiques
Nous allons nous intéresser ici à une méthode en particulier, il s’agit de l’analyse des coûts
ou �spend analysis�58 qui est régulièrement employée par le département achats de l’US
Air Force. Cet outil est celui, qui a très certainement, le plus �révolutionné� la façon dont
travaillaient les acheteurs américains. De ce fait, avant de définir une stratégie d’achats et
les �best Purchasing Management practices� devant être appliquées, l’Etat-Major
américain utilise la technique �spend analysis�. Celle-ci permet, en tenant compte de
certains facteurs comme la nature du bien ou du service que l’on souhaite acquérir, le type
de contrat, la relation entretenue avec le fournisseur, de déterminer de façon très précise
comment les dépenses étaient effectuées auparavant et donc d’optimiser ces dernières. Plus
précisément, l’analyse des coûts permet un examen approfondi des méthodes d’achats
utilisées par l’armée de l’air américaine ainsi qu’une évaluation des fournisseurs.
Concernant l’application de cette �spend analysis� au sein de l’US Air Force, une
méthodologie spécifique a été établie. Elle se base sur les principes58 suivants :
Il est nécessaire, avant chaque acte d’achat de vérifier qu’un contrat ne
va pas être passé par une autre équipe d’acheteurs dans un délai proche
avec le même fournisseur. L’objectif ici est de consolider au maximum
les commandes afin de bénéficier d’un pouvoir de négociation plus
important.
Il faut identifier, pour chaque programme d’acquisition, les indicateurs
permettant de mesurer les risques et bénéfices relatifs à l’achat du
matériel ou du service en question.
Afin de prendre la meilleure décision qu’il soit, il est indispensable de
collecter le maximum d’informations. ce qui nécessite d’avoir recours à
une approche transverse et non fonctionnelle.
58 Source : Using a Spend Analysis to Help Identify Prospective Air Force Purchasing and Supply Management Initiatives, Project Air Force, Nancy Y. Moore, Cynthia Cook, Clifford Grammich, Charles Lindenblatt, publié en 2001 par l’association RAND – www.rand.org
71
L’utilisation d’une telle méthode a permis des gains substantiels en matière d’efficacité. Le
nombre de fournisseurs, par exemple, a considérablement diminué tout en restant
raisonnable afin de maintenir un esprit de compétition. De même, le fait de favoriser la
consolidation et la centralisation d’un genre d’achat au sein de la même équipe d’acheteurs
favorise la diminution des coûts tout en améliorant le flux de communication.
Finalement, nous venons d’aborder le fonctionnement d’une des nouvelles techniques
appliquées par l’US Air Force suite aux différents travaux d’audit qui ont pu être menés.
Ce type de méthode, bien que relativement simple à mettre en œuvre, est d’une redoutable
efficacité puisque, sur certains programmes d’acquisition tels que les réacteurs des avions
de chasse américain, une économie de près de 10% a été réalisée dès l’année 200259. En
faisant le parallèle avec le modèle de la DGA, il est possible de se rendre compte que le
choix des NTIC n’est pas la seule solution qui s’offrait à cet organisme étatique.
Effectivement, au lieu d’améliorer les processus d’achats existants grâce à la
dématérialisation et l’utilisation de portails virtuels, la Délégation Générale pour
l’Armement aurait très bien pu remettre en cause l’ensemble de son mode de
fonctionnement. Néanmoins, il n’est pas certain que la DGA aurait obtenu des résultats
similaires, et ce pour deux raisons : une refonte complète du système aurait engendré des
coûts très certainement bien supérieurs à ceux utilisés pour développer les portails
armement, de plus, dans le cadre d’une redéfinition complète de l’organisation et des
processus de travail, il est obligatoire d’avoir une connaissance parfaite des notions
relatives à la gestion du changement, ce qui comme nous avons pu le constater, n’est pas
forcément le cas de la DGA.
59 Source : Project Air Force, annual report 2002 – www.rand.org
72
CONCLUSION
En définitive, il est indéniable que les Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication constituent des outils permettant à la fonction Achats de gérer de la façon
la plus efficace qu’il soit et à moindre coût la chaîne d’approvisionnement. Ce gain est
d’autant plus important dans certains secteurs comme celui de l’armement où les
programmes d’acquisition concernent, le plus souvent, des matériels complexes. La
fabrication de ces derniers s’étend généralement sur plusieurs années d’où la nécessité pour
les acheteurs de bénéficier d’outils performants permettant un contrôle minutieux des
dépenses.
Conscient des économies qu’il était possible de réaliser, le ministère de la Défense a
décidé, à partir de 1996, de réformer l’entité étatique en charge des programmes
d’armement, à savoir la Délégation Générale pour l’Armement. Le but de cette réforme
était de moderniser la stratégie d’achats de la DGA. Pour ce faire, de nombreuses mesures
ont été prises : la structure organisationnelle a été modifiée et une démarche e-achat a été
instaurée (il est à noter que cet effort correspond aussi à une volonté, de la part du
ministère de la Défense, de se plier aux nouvelles réglementations nationales et
européennes). Celle-ci repose sur la mise en place de deux portails armement permettant
aux fournisseurs de répondre en ligne aux appels d’offres et d’un espace partenaires qui est
un lieu d’échanges d’informations protégé. A première vue, ces outils ne présentent que
des avantages. Effectivement, ils entraînent des gains directs reposant sur l’économie de
temps et d’argent mais aussi des gains indirects relatifs à une plus grande flexibilité et une
plus grande transparence des actes d’achats. Néanmoins, les économies réalisées ne sont
pas optimales. Sans une véritable réorganisation du travail et sans une politique
d’accompagnement et de formation adéquate, les NTIC et la dématérialisation présentent,
comme nous avons pu le voir, un bilan mitigé.
Il convient alors de se demander si l’utilisation des portails virtuels par la DGA constitue
un choix judicieux ? Au vu de ce qui a été fait par l’US Air Force (l’armée de l’air
américaine a, elle aussi, réorganisé son département achats mais en adoptant des outils
73
simples. De plus, afin de perturber le moins possible les acheteurs, un programme
d’accompagnement très abouti ainsi qu’une redéfinition de l’organisation ont été établis)
il est tout à fait possible de remettre en question le travail effectué par la DGA. Cependant
il faut tenir compte du fait que cet organisme public est le seul à disposer d’un tel outil
dans ce secteur d’activité et qu’il fait donc figure de pionnier. Aussi, avant de porter un
jugement définitif, il est nécessaire d’attendre la nouvelle réforme60 qui devrait combler les
lacunes du système actuel d’ici peu et qui devrait donc optimiser la stratégie achats de la
DGA. Celle-ci deviendrait alors l’une des organisations les plus performantes au monde en
matière d’achats et d’e-purchasing.
60 Depuis l’année 2004, la DGA est en train de réfléchir à la mise en place d’une nouvelle réforme. Celle-ci devrait notamment améliorer l’organisation actuelle de l’entité étatique et surtout instaurer un certain nombre de formations permettant une meilleure utilisation des portails armement. Source : Michel Cabirol, « La DGA attend sa grande réforme », La Tribune, 8 janvier 2004.
74
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