La Drépanocytose en Médecine Générale Dr Maryse ETIENNE-JULAN Unité Transversale de la drépanocytose CHU de Pointe à Pitre, 97139 Les Abymes
Centre de Référence de la drépanocytose aux Antilles -Guyane
Faculté de Médecine Hyacinthe Bastaraud – UAG 15 mars 2013
1- RAPPELS SUR L’HEMOGLOBINE
Rappel sur l’Hémoglobine
Gènes Globine
Chromosome 16
Chromosome 11
LCR
5’ G A
G A
1
1
LCR
3’
3’
3’
3’
5’
5’
5’
Synthèse de l’hémoglobine Noyau
Chromosome 16
ARN messager
Chromosome 11
ARN messager
Cytoplasme
b
Synthèse de l’hème
mitochondrie
HbA2
HbA
Hème Hème
Fe
Hémoglobines: Ontogenèse
Adulte nouveau-né
HbA 96 % 10 %
HbA2 2-3 % < 1 %
HbF < 1 % 90 %
Synthèse des chaînes de globines formant les hémoglobines (Hb), au cours de la vie. L’hématie renfermant l’hémoglobine est produite dans le foie, la moelle et la rate
chez le fœtus, et uniquement dans la moelle osseuse chez l’adulte. L’HbF ( 2 2) stade fœtal. L’HbA ( 2 2) adulte.
Naissance En Mois
Syn
thès
e de
Glo
bine
en
pour
cent
prénatal postnatal
Sac vitellin Foie rate Moelle osseuse
Hémoglobinopathies
Anomalie qualitative : anomalie de
structure, Hémoglobine anormale
Anomalie quantitative : Thalassémie
Persistance Héréditaire de l’Hémoglobine
Fœtale (PHHF)
Hémoglobinopathies : Hb anormales
Plus de 900 Hb mutées dans le monde
Hb pathologiques par :
° Altération de la solubilité: HbS
° Altération de la fonction
* HbM
* Hb à affinité anormale
° Altération de la stabilité de la molécule
2- PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DREPANOCYTOSE
Globules rouges
normaux et GR falciformés
Le schéma physiopathologique classique est insuffisant
pour expliquer la crise vasoocclusive car le délai à la
polymérisation de la désoxyHbS est supérieur au temps
de passage dans la microcirculation
Nécessité d’un ralentissement de la circulation du sang
Toute cause de ralentissement circulatoire peut
constituer un facteur déclenchant
Ralentissement de la circulation
chez les drépanocytaires adhérence des GR à l’endothélium
◦ activation cellulaire et rôle de l’hypoxie
chronique
◦ environnement pro-inflammatoire
dysfonctionnement vasculaire :
vasoconstriction (Non disponibilité
du NO)
Rôle de l’hémolyse
Vasoocclusion : phénomène en 2
temps - Ralentissement circulatoire par adhésion
cellulaire
- Polymérisation HbS falciformation des
GR vaso-occlusion
Toutes les cellules sanguines et du vaisseau
sont impliquées
Tout ce qui va favoriser l’un ou l’autre de
ces phénomènes va favoriser la vaso-
occlusion
Facteurs déclenchants de
complications drépanocytaires Facteurs qui favorisent la polymérisation
de l’HbS
◦ Concentration en hémoglobine (CCMH)
◦ Taux de HbS
◦ SS S 0thal >>> SC S +thal
Facteurs déclenchants de complications
drépanocytaires (1)
Hypoxie
Pression O2 : altitude , avion non pressurisé
Infection
Hypertrophie des amygdales
Insuffisance respiratoire
Effort trop important (dette O2)
Anesthésie générale / thérapeutique (morphine)
Douleur abdominale postchirurgicale non calmée autolimitation ampliation thoracique
Toxicomanie / tabagisme
Troubles (micro)circulatoires, traumatisme (ex: ulcères cutanés)
Grossesse (multifactoriel)
Aggravation de l’anémie (AVC sur vasculopathie)
Facteurs déclenchants de complications
drépanocytaires (2)
Déshydratation
Chaleur
Effort physique
Infection /fièvre
Troubles digestifs, apports insuffisants
Troubles rénaux (hyposthénurie)
Hémoconcentration (génotype SC++)
Facteurs déclenchants de complications
drépanocytaires (3)
Acidose
Effort physique prolongé
Infection
Inflammation
Atteinte rénale (acidose tubulaire, insuffisance rénale) ou
respiratoire
Facteurs déclenchants de complications
drépanocytaires (4)
Facteurs de stase ou de vasoconstriction: ◦ position assise prolongée jambes croisées (vols aériens,…)
◦ Froid : bureaux climatisés, vols aériens, services hospitaliers
Hiver
Pluie, Piscine, bains
Psychologique
◦ Stress
◦ Anxiété
◦ Fatigue
◦ Dépression
3- LES SYNDROMES DRÉPANOCYTAIRES MAJEURS
Hémoglobinopathies entraînant un
syndrome drépanocytaire majeur
S/S
S/DPunjab
S/SAntilles
A/SAntilles
S/Lepore
S/ °Thal
S/ +Thal
S/C
S/E
S/OArabe
S/CHarlem
S/CZiguinchor
4- CONSÉQUENCES CLINIQUES
Vaso-occlusion ==> ◦ Douleur,
◦ Autres complications aiguës : syndrome thoracique aigu, priapisme,….
◦ Atteintes dégénératives des organes
Hémolyse ==> ◦ Anémie chronique (anémie aiguë) : Ictère, lithiases vésiculaires
◦ Macrovasculopathie : AVC ou vasculopathie cérébrale, Atteinte rénale, ulcère, HTAP,..
Susceptibilité accrue aux infections;
Etat d’hypercoagulabilité.
Morbidité et mortalité élevées si absence de prise en charge adaptée
Maladie drépanocytaire
Périodes d’ accalmie entrecoupées
d’épisodes intermittentes de
complications
Grande variabilité de l’expression clinique
interindividuelle et en fonction de l’âge :
◦ 5% des patients : 1/3des hospitalisations
◦ Taux HbF
◦ Alpha thalassémie
4-1. PRINCIPALES
CARACTERISTIQUES DE
LA DREPANOCYTOSE
CHEZ L’ENFANT
Expression clinique
De la naissance à 3 mois :
- nouveau-né sans particularité (poids-
terme)
- Pas d’anémie hémolytique
- Pas d’expression de la maladie
- Fort taux d’Hb F
Expression clinique (suite)
De 3 mois à 6 ans :
- premiers symptômes après 3 mois
- anémie
- splénomégalie :
- à partir du 6ème mois
- augmente durant les deux premières années
- régression secondaire par atrophie
- persiste au delà de 10 ans chez l’hétérozygote composite
(aggravation anémie, thrombopénie)
- crises vaso occlusives
Expression clinique (suite)
2 risques majeurs mettent en jeu le pronostic
vital :
- épisodes de séquestration splénique aiguë
- infections aiguës
1 autre risque :
- développement de la vasculopathie cérébrale
Expression clinique (suite)
De 6 à 15 ans :
- crise vaso occlusives hyperalgiques
- accidents vaso occlusifs graves mais plus rares :
* syndrome thoracique aigu
* accident vasculaire cérébral
* priapisme
- infections : évolution moins dramatique
Expression clinique (suite)
Au delà de 15 ans :
- crises algiques
- atteintes dégénératives :
* lithiase vésiculaire
* ulcère de jambe
* lésions pulmonaires
* lésions ostéoarticulaires
* atteinte rénale
* retard pubertaire
Anémie aiguë Aggravation de l’anémie
Tableau d’anémie aiguë :
pâleur – asthénie – polypnée – tachycardie
Étiologies :
- la séquestration splénique aiguë
- la séquestration hépatique
- l’hémolyse aiguë :
* G6PD
* auto immune (infections)
* accident transfusionnel
- l’érythroblastopénie
- l’hémorragies
- déglobulisation des CVO sévères
2. Aggravation progressive de l’anémie
- carence en folates
- carence en fer
- hypersplénisme
Crises vaso occlusives : - nombre, sévérité : indicateur de
gravité de la maladie - 2 aspects : * la crise osseuse * la crise abdominale
Petite enfance (suite) La crise osseuse : Chez un nourrisson et le jeune enfant : syndrome main-pied Par la suite : - crise des os longs - crise thoracique (côtes – sternum) Les crises sévères avec fièvre élevée,
hyperalgie, œdème font suspecter les infarctus osseux. Diagnostic différentiel avec ostéomyélite
Petite enfance (suite)
La crise abdominale :
- douleur avec ileus réflexe
- problème de diagnostic différentiel avec les urgences chirurgicales
Crise graves multifocales exposent au risque d’infarctus multiples, de syndrome thoracique aigu
Les infections graves :
- insuffisance des défenses immunitaires :
• hyposplénisme ou asplénisme fonctionnel
• altération de la voie du complément
• déficience en properdine
• taux élevé de polynucléaires contrastant avec leur dysfonctionnement
Défaut de défense contre les germes encapsulés
Les infections chez le tout petit de moins de 3 ans :
1. Autrefois : - méningite, septicémie à pneumocoque
(67% avant 6 ans) - septicémie à salmonella avec dans 77 %
des ostéomyélites - méningite, septicémie à hémophilus
influenzae - Autres : pneumopathie, ostéomyélite,
pyélonéphrite Première cause de décès (24 % de
mortalité avant 3 ans)
Petite enfance (suite)
Les mesures préventives ont entraîné la diminution des ces infections.
Problème du développement de résistance du pneumocoque à la Pénicilline
Tout drépanocytaire fébrile doit être traité par des antibiotiques actifs sur ces 3 germes
Petite enfance (suite) :
Vasculopathie cérébrale :
Atteinte des petits et gros vaisseaux cérébraux
Petite enfance (suite) : * AVC patents : - hémiplégie – céphalées – aphasie – convulsions –
coma - fréquence : 6,9 % dans 1 service d’enfants en
France - 2/3 : récidive durant les 3 années suivant le
premier épisode - 70 – 80 % : AVC ischémique chez les enfants
de moins de 15 ans - âge moyen de survenue : 7 ans - 10 % de mortalité - séquelles motrices – mentales - épileptiques
Petite enfance (suite) : Infarctus latents – infracliniques silencieux :
• petite taille • 11 à 20 % • Avant 12 ans • Perte des fonctions cognitives Anomalies des vitesse du flux à l’EDIC • Corrélée à sténose artérielle • 10 % dans la population des moins de 16 ans • A rechercher dès la seconde année de vie
1 enfant sur 4, avant 20 ans, a une
atteinte vasculaire cérébrale
Petite enfance (suite) : Syndrome thoracique aigu (acute chest
syndrom) : - fièvre - symptômes respiratoires - douleur thoracique - infiltrat récent à la radiographie pulmonaire - risque de décès Étiologie : * 1/3 infectieuse : virale – mycoplasme –
chlamydiae * embolie graisseuse * hypoventilation alvéolaire
Seconde enfance et adolescence (6 – 15 ans)
Diminution du nombre d’hospitalisation entre 5 et 10 – 14 ans puis réaugmentation après la puberté.
Crises vaso occlusives : - souvent sans facteur déclenchant - 25 % des patients présentent des
crises sévères répétées sur fond de douleur chronique
Seconde enfance et adolescence (6 –15 ans) – suite
Ostéonécrose :
Infarctus épiphysaire :
- première localisation, la tête fémorale (fréquence : 4,6 % entre 10 et 14 ans) puis la tête humérale
- 1 cas sur 2 : ostéonécrose de la tête fémorale est peu symptomatique
- vertèbres
Seconde enfance et adolescence (6 –15 ans) – suite
Syndrome thoracique aigu : - 5 % des patients - secondaire à un infarctus osseux et une
embolie graisseuse AVC : - moins fréquent au delà de 10 ans - difficultés cognitives secondaires à la
vasculopathie - IRM : infarctus, atrophie cérébrale
Seconde enfance et adolescence (6 –15 ans) – suite
Priapisme : érection prolongée et douloureuse
- fréquence 2 à 6 % chez l’enfant
- âge de survenue : 2 pics :
* entre 5 et 13 ans
* entre 21 et 29 ans
priapisme intermittent
Priapisme aigu (durée > 3h)
4-2. PRINCIPALES
CARACTERISTIQUES DE
LA DREPANOCYTOSE
CHEZ L’ADULTE
Le drépanocytaire adolescent ou adulte
Personne ayant :
◦ Une histoire de sa maladie
Variable d’un patient à l’autre
Formes très symptomatiques Formes SS et S 0thalassémiques
Certains SC (2%) et S +thal symptomatiques
Hospitalisations fréquentes
Recours plus ou moins fréquent aux transfusions
Passages éventuel en service de réanimation
Formes peu symptomatiques
Etat de base individuel
Le drépanocytaire adolescent ou adulte (2)
Personne ayant :
◦ Un vécu de sa maladie
Fonction de la gravité
Histoire de la famille : décès
Impact sur sa vie sociale, scolaire ou professionnelle
◦ Des séquelles plus ou moins visibles
Le drépanocytaire adolescent ou adulte (3)
Personne ayant :
◦ Prise en charge
Complications iatrogènes
Qualité de la relation avec les soignants
Connaissance de sa maladie par le patient lui même
Connaissance de sa maladie par les professionnels
Profil général de la maladie chez
l’adulte
Est dominé par les complications chroniques
Un tiers des patients est asymptomatique
5% des patients 1/3 des hospitalisations
Persistence d’une sensibilité accrue aux infections bactériennes (ne pas hésiter à prescrire des antibiotiques si nécessaires)
Pour revue : Stuart et Nagel, Lancet, 2004
2- Les complications aiguës
Crises douloureuses vasoocclusives
Demeurent la cause principale d’hospitalisation dans toutes les cohortes
Facteur déclenchant toujours présent chez les adultes (infections, modifications température cutanée, stress,..)
Le plus souvent prises en charge à domicile
Facteur de mauvais pronostic
◦ Fréquence élevée
◦ Intensité inhabituelle d’une crise : écouter le patient (« ce n’est pas comme d’habitude »)
Syndrome thoracique aigu
Complication redoutable chez l’adulte :
risque de détresse respiratoire et de
décès
Mécanismes différents de chez l’enfant :
prédominance de l’ischémie
Fréquence élevée complications
pulmonaires chroniques
Hémolyse aiguë
Secondaire à d’autres complications
aiguës
◦ CVO hyperalgiques
◦ Infections évères
Accidents vasculaires cérébraux
(SS) (Ohene-Frempong et al, 1998)
Incidence : 0,59 pour 100 années patients chez les plus de 20 ans
20-29 ans : AVC essentiellement hémorragiques
Avant 20 ans et après 30 ans : AVC ischémiques
Taux de récidive élevé (14%) dans les 22 mois
11% de décès dans les 14 jours
Autres complications aiguës
Infections :
◦ toujours les rechercher
◦ Points d’entrée à ne pas oublier : caries
dentaires, sinus
Priapisme
Séquestration hépatique ou splénique : SC
Les décès
Au décours d’une complication aiguë même chez un patient peu symptomatique
◦ CVO hyperalgique, STA, AVC, hémolyse aiguë, infections graves,…
Au décours d’une complication chronique
◦ Complications cardiovasculaires (HTAP,..), Insuffisance rénale terminale
Retard à la prise en charge :
◦ Arrivée tardive du patient
◦ Mauvaise connaissance du patient ou de la maladie par les professionnels de santé
Les décès (2)
Situation à haut risque :
◦ Chirurgie – anesthésie
◦ Grossesse
Taux de mortalité plus élevé dans le sexe
masculin (Shankar,2005)
3- Les principales complications
chroniques
Les plus fréquentes
Atteintes ostéoarticulaires
◦ Ostéonécrose de la tête fémorale
◦ Osténécrose de la tête humérale
Rétinopathie proliférante : hémorragie
Ulcères de jambe
Complications pulmonaires chroniques :
◦ Hypertension artérielle pulmonaire de mauvais
pronostic
Les troubles de l’érection
Atteintes rénales chroniques
Taille augmentée des reins fréquente
(hypertrophie glomérulaire, volume sanguin
rénal augmenté)
Hyposthénurie et nocturie (atteintes de la
fonction du néphron distal)
Dysfonction tubulaire proximale,
Anomalies glomérulaires microalbuminurie
proténiurie insuffisance rénale terminale
Plus fréquentes et plus précoces chez les SS
Atteinte hépatique chronique
Anomalies de la fonction hépatique
Lithiases
Hépatites virales
Hémochromatose secondaire
La grossesse
Situation à risque pour la mère et le
fœtus
Prise en charge spécifique
Multidisciplinaire
En fonction du génotype
Complications liées à l’hyperviscosité plus
fréquentes chez les SC/S +thalassémie
◦ ONTF
◦ Rétinopathie
◦ Hypoacousies, Surdité brusque, troubles
neurosensoriels (vertiges, acouphènes)
4- Facteurs de risque de
sévérité
Facteurs de risque d’évolution sévère (SS) (Cooperative study of sickle cell disease)
Evolution sévère :
◦ Le décès
◦ L’accident vasculaire cérébral
◦ Syndrome thoracique aigu
◦ Ulcères de jambes
Facteurs de risque d’évolution sévère (2) (Cooperative study of sickle cell disease)
Fonction de la complication
Faible taux d’hémoglobine (hémolyse) : décès, AVC, ulcères de jambe,
Faible taux d’hémoglobine fœtale (décès, STA, douleur, ulcères de jambe),
Nombre de globules blancs élevés : décès, STA
Fréquence élevée des épisodes douloureux : décès chez l’adulte
Anémie aigu : décès, AVC
Facteurs de risque d’évolution sévère (3)
Facteurs génétiques autres en fonction de
la complication : (voir recherche)
variabilité phénotypique
5- Les complications iatrogènes
Surcharge en fer : transfusions répétées
Infections virales : hépatites, peu
d’infection par le VIH
Problème des voies veineuses
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