IUFM de Bourgogne
Concours de recrutement : CAPES
Enseigner la phonologieau lycée
Vandier Matthieu
Discipline : Anglais Sous la direction de :
M.François Faivre
Année : 2003 N° de dossier :
0162829N
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Plan du mémoire
1) Définition des termes, analyse des facteurs inhibants
A Phonétique et phonologie, rapports et différences
B Les facteurs inhibants pour le professeur
C Les facteurs inhibants pour les élèves
2) Le choix de l’auteur et ses objectifs
A Quoi ? Quand ? A qui ?
B Les objectifs établis par rapport aux besoins de laclasse
2) La mise en œuvre
A La présentation d’un phonème (cours « type »)
B Deux exemples d’intégration de la phonologie
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Le choix du sujet s’est imposé à moi, suite à mon expérience de l’enseignement
en lycée. J’ai constaté dès le début de l’année une méconnaissance de la
phonologie chez les élèves et de nombreuses fautes de prononciation, ce qui
m’a décidé à approfondir la question pour comprendre les origines de ce
problème et réfléchir à d’éventuelles solutions pour d’aider les élèves à
améliorer leur prononciation.
En vue de corroborer cette affirmation, j’ai donc décidé de m’appuyer sur un
sondage réalisé auprès de ma classe de seconde, qui représente un
intéressant échantillonnage, du fait de la variété des établissements d’origine
des élèves.
Voici une copie du sondage distribué aux élèves.
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Ce sondage a été réalisé sur une classe de seconde de 26 élèves.
Le dépouillement donne les résultats suivants :
Question 1 : OUI=19.23% NON=57.89% UN PEU=23.08%
Question 2 : OUI=65.38% NON=34.62%
Question 3 : OUI=19.23% NON=80.77%
Question 4 : OUI=100%
Les réponses à la question 1 mettent en évidence le fait que, près de 60% des
élèves interrogés n’ont pas étudié la phonologie en collège. Il faut cependant
nuancer cette affirmation, car le fait que les élèves aient répondu « NON » ne
signifie pas qu’ils n’ont pas été entraînés à la prononciation mais qu’ils n’ont
pas été mis en contact avec l’alphabet phonologique (voir les phénomènes
d’accentuation interne des mots ou des phrases) contrairement aux
recommandations des Instructions Officielles. J’étudierai par la suite les raisons
de ce décalage dans une première partie ainsi que les raisons pour lesquelles
la question 3 montre un désintérêt aussi marqué pour la phonologie.
Il est intéressant de se pencher dans un second temps sur les questions 2 et 4
En comparant les résultats, on note que la majorité absolue des élèves
considère qu’une bonne prononciation est utile mais on remarque également (et
surtout) que presque 35% d’entre eux ne font pas la relation entre
l’apprentissage de la phonologie et une bonne prononciation de l’anglais ce qui
a entraîné la création du concept de phonologie utilitaire que je tenterai
d’expliquer dans une deuxième partie.
J’étudierai finalement les moyens qu’il est possible de mettre en œuvre pour
résoudre le réel problème mis en lumière par la troisième question et auquel se
retrouve confronté l’enseignant qui tente d’aborder la phonologie avec ses
élèves et présenterai des exemples d’exercices ou de cours que j’ai mis en
œuvre avec ma classe.
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Il m’apparaît essentiel de commencer par un travail de définition de termes que
l’on a trop souvent tendance à assimiler, il s’agit des termes phonétique et
phonologie car ils ne sont pas synonymes comme on pourrait le croire.
La phonétique s’emploie à identifier, répertorier, décrire les caractéristiques
physiques (articulatoires, auditives, acoustiques) et analyser comment sont
produits les sons des différentes formes que peut prendre la parole humaine.
Elle ne s’occupe en fait que des sons bruts de la parole.
La phonologie quant à elle, à partir de sons mis en évidence par la phonétique,
cherche à déterminer comment ils sont utilisés au sein d’une langue
particulière, à dégager les principes qui régissent leur apparition, leur fonction
dans les mots de cette langue et à les mettre en rapport au sein d’un système
d’oppositions. Traditionnellement, on aborde la phonologie par le biais de la
phonémie qui décompose le discours en segments qui peuvent être mis en
opposition les uns par rapport aux autres car la substitution d’un segment à un
autre modifie le sens du mot qu’il contient.
Pour conclure ce travail de définition, je citerai les propos de Kenneth Pike dont
la justesse résume bien, selon moi, la nuance entre la phonétique et la
phonologie phonémique : « Phonetics gathers raw material ; phonemics cooks
it. »
Mise au point sur les symboles employés
/ / encadrent un phonème ([ ] étant réservés aux symboles phonétiques)
< > encadrent quant à eux une graphie.
Je me propose dans un premier temps de dresser une liste des facteurs (de
quelque nature qu’ils soient) qui peuvent inhiber, gêner ou perturber un élève
lorsqu’il aborde la phonologie. Je suis cependant convaincu qu’il n’y a pas que
les élèves qui peuvent avoir des réticences lorsqu’il s’agit de travailler la
prononciation et que le professeur peut aussi ne pas vouloir se confronter à
cette tâche pour des raisons qui lui sont propres et que je tenterai également
d’analyser.
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Je commencerai mon analyse des facteurs inhibant en me référant à un article
de Rita Wong, professeur au Foothill Community College en Californie. L’auteur
y énonce quatre préjugés fermement ancrés dans l’esprit des professeurs
comme dans celui des élèves concernant l’enseignement et l’apprentissage de
la phonologie.
Le premier est, qu’enseigner la prononciation de l’anglais aux élèves, se
résume à ne leur enseigner que les sons vocaliques et consonantiques un par
un. Nous allons voir, dans la partie consacrée aux facteurs inhibants pour le
professeur, comment ce préjugé a conduit à un abandon total de
l’enseignement de la prononciation à toute une génération et les conséquences
de choix sur la situation actuelle.
Le deuxième préjugé mis en lumière par Rita Wong, est celui consistant à dire
qu’il est très difficile, voire impossible, pour les élèves de percevoir et de
prononcer certains sons, comme par exemple, faire la distinction entre les sons
vocaliques contenus dans <sheep> et <ship>, ce qui pourrait pousser le
professeur à renoncer à l’enseignement de la phonologie.
Le troisième, sans nul doute le mieux ancré, est que l’apprentissage de la
phonologie ennuie les élèves. J’expliquerai comment l’intégration peut endiguer
ce phénomène.
Enfin, beaucoup de gens tendent à croire qu’une personne qui n’est pas
anglophone d’origine ne peut pas enseigner correctement (je répondrai à cet
argument dans ma deuxième partie lorsque je traiterai de l’utilisation de
l’assistante).
Je commencerai donc par m’interroger sur les raisons qui poussent certains
professeurs à mettre entre parenthèses l’enseignement de la phonologie à leurs
élèves. De l’aveu même de Mme l’I.P.R., la phonologie dont la pratique se
généralise tout au long de l’enseignement de l’anglais au collège est subitement
délaissée au lycée. Le manque de temps est la principale cause mise en avant
pour expliquer ce phénomène ; nous verrons plus tard comment l’idée
d’intégration peut remédier à ce problème. Lorsque l’on interroge les
professeurs en exercice sur les raisons du peu de place accordée à la
phonologie dans leurs cours, la plupart d’entre eux répondent que cela est dû à
leur manque de connaissances dans le domaine. La faute ne leur incombe
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évidemment pas, et pour comprendre les raisons de ces lacunes, il faut se
pencher sur l’histoire de l’enseignement des langues étrangères en France. On
s’aperçoit alors que la majorité des professeurs en poste, à l’heure actuelle, ont
appris l’anglais par le biais de la méthode audio-orale qui ne laissait aucune
place à l’enseignement de la phonologie car elle considérait qu’une bonne
prononciation se résumait à la connaissance des sons de la langue (premier
préjugé évoqué par Rita Wong). Cependant une bonne prononciation implique
bien plus qu’une simple connaissance des sons de la langue, elle implique
également une bonne maîtrise du rythme et de l’intonation qui jouent un rôle clé
dans l’intelligibilité d’un message oral. Il devient donc évident que toute
personne souhaitant communiquer en anglais se doit d’attacher une grande
importance à la prononciation. Rien d’étonnant dès lors à ce que les
professeurs qui ont suivi les enseignements basés sur la méthode audio-orale
se trouvent démunis maintenant que la phonologie a retrouvé ses droits au sein
de l’enseignement des langues étrangères en France.
Le deuxième argument concernant la capacité des élèves à reconnaître des
sons qui sont étrangers à leur langue et à les reproduire est plus difficilement
réfutable car il est corroboré par les travaux de Tomatis sur l’oreille humaine
(L’Oreille et le Langage). Ce dernier a prouvé que l’on apprenait sa langue
maternelle à partir du milieu ambiant ce qui a eu pour effet de limiter l’ouverture
de ce qu’il appelle le « diaphragme sélectif de l’audition » ce qui nous rend
capable de ne maîtriser et reproduire parfaitement qu’une certaine gamme
sonore (propre à notre langue maternelle). Pour apprendre une langue
étrangère, il faudra donc que l’apprenant rééduque complètement son oreille à
de nouvelles fréquences. Les études qu’il a menées, ont montré que les sons
du français se situaient dans une fourchette allant de 800 à 1800 Hz tandis que
ceux de l’anglais sont compris entre 2000 et 12000 Hz ; on remarque que les
deux ne se chevauchent même pas ce qui accroît d’autant la difficulté. C’est là
que l’on comprend, d’une part l’importance de donner aux élèves un modèle
fiable et constant (ce qui tendrait à rendre indispensable l’utilisation du
magnétophone) pour bien éduquer leur audition puisqu’elle conditionne
également la qualité de leurs productions et, d’autre part l’importance de la
motivation chez les élèves car la difficulté de la tâche en réclame énormément.
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Il est donc essentiel que les élèves soient convaincus de l’intérêt et de
l’importance de ce qu’ils font et c’est au professeur qu’il incombe, le cas
échéant de les leur rappeler.
Je m’y suis attaché lorsque j’ai tenté de faire comprendre aux élèves la grande
satisfaction que l’on éprouve lorsque, dans un échange avec un anglophone,
celui-ci n’est pas capable de reconnaître, à l’accent de son interlocuteur, d’où
vient ce dernier (ce qui était mon but lorsque j’étudiais la phonologie à
l’université). Les élèves m’ont rétorqué qu’ils ne souhaitaient pas perdre leur
accent français car ils auraient l’impression de perdre leur identité culturelle.
Cet argument m’a un peu surpris car je ne m’étais pas préparé à devoir justifier
du bien-fondé de l’idée de s’approcher le plus possible d’un accent authentique.
Il a cependant permis de déclencher un débat intéressant pour moi, puisqu’il a
fallu que je m’emploie à faire comprendre aux élèves que l’on ne pouvait pas
considérer un accent comme une partie de la culture d’un pays pour qu’ils
acceptent de suivre mes conseils pour corriger leur prononciation. S’ils
n’avaient pas accepté de passer ce contrat avec moi, ils auraient sans doute
développé ce que Tomatis nomme une surdité « élective » à l’anglais en ce
que, si leur esprit s’était bloqué par rapport à l’idée d’apprendre la langue, leur
oreille se serait bloquée aux sons de cette dernière
Il est un autre phénomène moins spécifique au sujet qui nous intéresse ici ( la
phonologie en cours d’anglais), puisqu’il bloque les élèves dans toutes les
matières lorsqu’il s’agit d’intervenir oralement en cours, c’est de se confronter
au regard des autres. En effet, les élèves sont très soucieux du jugement que
leurs camarades peuvent porter sur eux et leurs prestations et, cette gêne va
croissante avec l’âge. Les élèves de sixième avec lesquels j’ai eu l’occasion de
travailler lors de mon stage en collège, n’y prêtaient aucune attention et
participaient avec un réel enthousiasme lors des cours sans aucune arrière-
pensée. Il en va tout autrement de la classe de seconde avec laquelle je
travaille la phonologie. Ils sont très sensibles à leurs propres erreurs et à celles
des autres dont ils n’hésitent pas à se moquer. Ce blocage est accentué par le
fait qu’il est évident qu’ils vont faire de nombreuses erreurs lors de travaux sur
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leur prononciation, ce qui a pour conséquence, que les élèves abordent donc la
phonologie avec un a priori très négatif quant à l’image d’eux-mêmes qu’ils vont
donner lors de ces entraînements. Il y a donc là un problème à résoudre avant
même le début des cours et j’expliquerai dans la deuxième partie la solution
que j’ai mise en œuvre.
Du fait qu’ils sont habitués à être évalués dans ce domaine dès le début de leur
apprentissage de la langue, les élèves se focalisent plus sur la correction
syntaxique de leurs énoncés que sur leur correction phonologique. Ce réflexe
(sain en lui-même), hérité de la production écrite, vient contaminer leurs
productions orales et occulte dans leur esprit, l’égale importance que prend une
bonne prononciation lors d’une situation de communication orale.
De même, les grilles d’évaluation de la production orale en PPC telles que celle
que j’utilise pour ma classe de seconde, reflètent elles aussi cette
prépondérance de la correction syntaxique au « détriment » de la correction
phonologique (toutes proportions gardées puisqu’un seul point les sépare dans
le barème, correction morpho-syntaxique 4 points, correction phonologique 3
points). J’ai d’ailleurs modifié ce barème pour remettre les deux à égalité
puisque comme je l’ai dit plus haut, j’estime qu’elles jouent toutes deux, un rôle
prépondérant dans l’intelligibilité d’un locuteur en situation de communication.
Je souhaite à présent essayer de démontrer l’influence que peut avoir la
phonologie sur les autres domaines qui composent l’enseignement d’une
langue vivante. Dans un premier temps, une bonne connaissance de la
phonologie améliorera la capacité de compréhension orale des élèves puisqu’ils
seront plus familiers des sons de la langue et seront donc plus à même de les
identifier lorsqu’ils resurgiront en situation de communication. Cela aidera
également les élèves à mieux écrire ce qu’ils entendent. Ils aimeraient qu’il y ait
une correspondance directe entre ce que l’on dit et ce que l’on écrit (ou pour
citer l’élève qui a fait cette judicieuse remarque : « Pourquoi n’écrit-on pas
comme on parle ? », ce qui m’a d’ailleurs permis de leur expliquer avec leurs
propres mots toute l’essence de la phonologie, et tout le monde sait qu’ils
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comprennent beaucoup mieux une définition qu’ils ont élaborée eux-mêmes).
Ils sont donc extrêmement surpris (voir choqués) de découvrir l’importante
différence qui existe entre la graphie et la phonie pour une lettre comme <a>,
par exemple, qui peut se prononcer de 5 façons différentes (/ε/ <same>, //
<sat>, /α⊃/ <father>, /↵⊃/ <call>, /∴/ <about>). Il faut d’ailleurs noter que la
plupart des erreurs de prononciation sont liées à des erreurs de lecture.
La prononciation peut également avoir un rôle grammatical puisque entre les
deux phrases suivantes : « I’m sorry. They must go » et « I’m sorry they must
go. » La seule différence écrite entre les deux phrases (la ponctuation) doit se
retrouver, à l’oral, dans le rythme et dans l’intonation pour éviter tout
malentendu sur le sens. Il faut donc que le locuteur fasse une pause ou non
dans la phrase, suivant le sens qu’il souhaite lui donner.
On comprend donc que la pratique de la phonologie avec des élèves n’a pas
pour unique effet l’amélioration de leur prononciation mais a des effets positifs
sur d’autres capacités
Le professeur qui choisit d’enseigner la prononciation de l’anglais à ses élèves,
se doit d’opérer de nombreux choix (quel système de prononciation ? Quelle
classe ? Quel moment ? Comment le présenter aux élèves ?…) pour que son
initiative soit bien accueillie par ses élèves et qu’elle leur apporte le plus
possible. Je reproduis ici l’extrait des Instructions Officielles pour la classe de
seconde qui peut servir de référence pour juger dans quelle mesure je m’y
conforme ou pas ; puis je décrirai les choix que j’ai faits et les justifierai.
Extrait du B.O.E.N N°7 du 3 octobre 2002 hors série
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J’ai choisi d’enseigner à mes élèves la phonologie de l’anglais (en accord avec
les Instructions Officielles) par le biais de la phonèmie car elle est considérée
comme la manière la plus facile d’aborder la prononciation pour toute personne
totalement étrangère à cette spécialité. Ajoutez à cela le fait qu’elle est la plus
facile à rapporter à la graphie et l’on comprend alors pourquoi mon choix s’est
porté sur elle.
Tous les ouvrages s’accordent cependant à dire que l’on ne peut séparer la
phonologie de la phonétique, ce qui est totalement vrai puisque l’une découle
de l’autre et que de solides connaissances en phonétique sont nécessaires
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pour aborder la phonologie. Mes choix vont donc, à première vue, à l’encontre
de cette assertion. Mais en fait, j’abonde dans son sens en ce que j’estime que
les connaissances du professeur en matière de phonétique et (par dérivation
logique) de phonologie doivent être solides. Il doit également, à mon sens, être
capable (au nom du principe utilitariste qui guide cette étude, mais aussi au
nom du devoir qui est le sien de s’adapter à son public) de distiller, à partir de la
somme de ses connaissances théoriques, une sorte d’ « essence » qui
constitue ce qu’il se donnera pour objectif d’enseigner à ses élèves et que je
présenterai en détails un peu plus loin.
Il faut faire très attention au vocabulaire que l’on emploie face aux élèves. Par
exemple, il est risqué de parler de phonologie car les élèves semblent être
allergique aux mots à consonance grecque et scientifique. Le terme
« Prononciation » sera bien mieux accepté par notre public comme le montre le
sondage évoqué en introduction. Je continuerai cependant à employer le terme
de « Phonologie » ici par réflexe mais je me suis obligé à lui substituer le terme
« Prononciation » lors des cours.
J’ai donc fait le choix d’enseigner la phonologie à mes élèves, mais j’ai plus
particulièrement choisi de leur enseigner une phonologie que je qualifierais
d’utilitaire. Je vais résumer brièvement ici la notion d’utilitarisme en phonologie
car on comprendra bien mieux ce choix à la lecture des paragraphes qui
suivent. Je dirais qu’enseigner une phonologie utilitaire c’est enseigner une
phonologie qui sert de manière concrète aux élèves.
L’apprentissage de la phonologie se justifie d’ailleurs beaucoup plus facilement
que celui de la phonétique d’un point de vue utilitaire comme l’expriment
Adamczewsky et Keen dans leur ouvrage intitulé Phonétique et phonologie de
l’anglais puisqu’ils ont choisi de rebaptiser la phonologie « phonétique
fonctionnelle » ( je trouve ce terme intéressant parce qu’il réaffirme le lien de
filiation entre les deux et qu’il exprime aussi le fait que la phonologie se veut
plus « utilitariste » que la phonétique). Les phonèmes que l’on enseigne aux
élèves, ont été répertoriés pour leur valeur distinctive en termes de sens dans
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la langue, c'est-à-dire que la substitution d’un phonème à un autre au sein d’un
même mot en modifie le sens.
Par exemple : /bn/≠ /bι⊃n/, l’un se traduisant « poubelle » et l’autre « haricot »,
ces deux mots forment ce que l’on appelle une paire minimale que l’on peut
définir de la manière suivante :
Couple de mots de sens différents et qui ne sont différenciés que par un seul
son (phonème). De ce fait, les phonèmes prennent une importance capitale
pour quiconque se donne pour objectif de parler une langue et d’être compris
lorsqu’il la parle. Il est très aisé de faire comprendre ceci aux élèves en utilisant
les paires minimales pour créer des situations de communication cocasses où
une simple erreur de phonème crée un imbroglio. Cette méthode qui permet de
faire sourire les élèves et de faire travailler leur imagination, vaut toutes les
explications qui soient, pour leur faire percevoir l’importance des sons qu’ils
apprennent.
La tentative ici faite de définir une notion de phonologie utilitaire prend tout son
sens lorsque l’enseignant qui a décidé d’initier ses élèves à cette discipline se
retrouve confronté à la question qui revient à chaque fois que l’on enseigne une
matière plutôt théorique aux élèves : « Mais à quoi est-ce que ça sert ? ».
Cette question est d’autant plus compréhensible dans le cas de l’anglais que la
matière leur fournit des moyens de s’exprimer dont la mise à profit peut être
immédiate et leur semble donc évidente.
Il est, dès lors, logique que l’utilité d’apprendre un nouvel alphabet d’apparence
très « barbare » (étape qui déconcerte toute personne confrontée à
l’apprentissage d’une langue comme le russe par exemple) ne leur paraisse
pas évidente de prime abord (ce qui semble être le cas de presque 35% des
élèves interrogés).
Il conviendra donc, dans un premier temps, de leur faire comprendre ce que les
notions de phonologie qu’on leur enseigne vont apporter à la qualité de leur
anglais parlé mais aussi à leur compréhension de la langue.
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En optant pour une phonologie « utilitaire », le professeur choisit de s’employer
à enseigner à ses élèves des notions qu’il aura soigneusement sélectionnées
avec pour objectif un bénéfice immédiat pour l’élève.
Pour rester dans cette optique utilitaire, le professeur doit donc opérer des
choix (Les miens seront détaillés un peu plus loin). Il n’est par exemple, pas
nécessaire d’étudier avec les élèves tous les phonèmes de l’anglais, dans le
cas des consonnes par exemple, nombreux sont les sons consonantiques
partagés par les deux langues. On pourra ainsi choisir d’aborder l’étude des
sons consonantiques en bloc en n’insistant uniquement sur ce qui les
différencie d’une langue à l’autre (par exemple la présence d’une aspiration à la
suite des plosives anglaises).
Il existe en anglais plusieurs normes de prononciation. Il est à noter que les
Instructions Officielles n’imposent rien en la matière comme ce fut le cas à
certaines époques. En fait, elles ne peuvent plus se permettre de désigner un
système de prononciation comme étant la norme à l’exclusion de tout autre
,puisque les professeurs parlent des types d’anglais de plus en plus variées du
fait de la multiplication des destinations d’études et que, tenter d’établir une
norme reviendrait à marginaliser bon nombre de personnes dont l’anglais a
pourtant une totale légitimité puisqu’il est usité par une partie du monde
anglophone. Parmi toutes les normes de prononciation, le professeur doit donc
opérer un choix généralement guidé par sa propre expérience de langue et
basé sur le système qu’il a lui-même appris et avec lequel il se sent le plus à
l’aise. Il n’y a, en effet, rien de plus dangereux qu’un professeur qui tente
d’enseigner à ses élèves un système de prononciation qui n’est pas le sien (le
pire exemple serait celui d’un professeur parlant le « General American » et
enseignant la R.P. à ses élèves. On imagine alors aisément les dégâts que cela
pourrait faire sur la prononciation des élèves) J’ai pour ma part choisi
d’enseigner à mes élèves la prononciation qui m’a été enseignée et qui est celle
dite R.P. (Received Pronunciation), également connue sous le nom de BBC
English pour des raisons historiques puisqu’elle fut choisie par la BBC pour ses
programmes car c’était la prononciation comprise et acceptée (car sa neutralité
en termes d’accent régional ne suscitait pas de protestations) par la majorité de
son public. Elle est basée sur les habitudes de prononciation les plus établies et
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fait en cela preuve d’un certain conservatisme dans ses choix. On distingue 3
types de R.P. : La « General R.P. » (celle que j’ai choisie d’enseigner aux
élèves) la « Refined R.P. » et enfin la « Regional R.P. »
La « General R.P. » est la variété la plus neutre et la plus proche, dans l’esprit,
du « BBC English » original. La « Refined R.P. » est une variété en voie de
disparition car elle n’est plus parlée que par les membres de la haute société ce
qui la charge d’une forte connotation sociale. En plus, elle tend à être dénigrée
par les autres anglophone car trop « posh ». La « Regional R.P. », quant à elle,
correspond à un discours basé sur la « General R.P. », mais à laquelle
s’ajoutent quelques colorations régionales suffisamment infimes pour ne pas
être identifiables par les personnes parlant un autre type de R.P.
Si j’ai choisi d’enseigner la « General R.P. » à mes élèves, c’est d’abord parce
qu’elle jouit d’une légitimité historique au sein de la langue anglaise, parce que
sa grande neutralité n’est pas censée permettre de déterminer l’origine du
locuteur et parce qu’elle est implicitement acceptée par toutes les couches
sociales au Royaume-Uni. On pourrait me reprocher cependant d’enseigner
une prononciation qui n’est en réalité utilisée que par une petite minorité du
monde anglophone (puisqu’elle n’est usitée qu’au Royaume-Uni et que les
Américains pour qui la norme est le « General American » représentent la
majorité des anglophones). A ceci, je répondrais que, bien qu’effectivement
employée par bien peu d’anglophones, même au Royaume-Uni, elle constitue
une norme reconnue et comprise par l’ensemble du monde anglophone
(Américains compris). C’est également la prononciation retenue pour
l’enseignement de l’anglais dans le monde entier et utilisée par la quasi totalité
des ouvrages de référence en la matière ainsi que par les dictionnaires et les
manuels.
On remarquera à la lecture de ma troisième partie que les extraits et les
exercices que je présente sont tous tirés de manuels de seconde. Le choix
d’une classe de seconde comme cadre expérimental de ce mémoire n’est en
rien innocent. Il est motivé par le rôle « charnière » que joue cette classe dans
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la transition entre le collège et le lycée. En effet, une même classe regroupe
des élèves provenant d’établissements, de classes différentes et ayant donc
suivi des cours dispensés par des professeurs différents qui attachaient plus ou
moins d’importance au sujet qui nous occupe ici. Le fait que ces élèves de
différentes origines se trouvent mélangés au sein d’un même groupe fait
ressortir à outrance les différences entre les connaissances de chacun d’eux
dans ce domaine.
Il existe une autre justification, d’ordre plus matériel celle-ci. Des deux classes
qui m’ont été confiées en responsabilité cette année (une seconde LV1 et une
première LV2), la classe de seconde est celle qui bénéficie du quota horaire le
plus élevé (quatre heures contre deux à la classe de première). Qui plus est,
ces quatre heures hebdomadaires incluent deux heures de « modules » où la
classe se trouve divisée en 2 groupes ce qui, à mon sens, constitue
l’environnement idéal pour l’étude de la phonologie.
En effet, comme nous l’avons vu plus haut, le nombre d’élèves peut devenir un
facteur de gêne pour certains qui rechignent à s’exprimer oralement face à un
grand groupe. Les classes de module, réduisant ce nombre de moitié,
permettent d’atténuer d’autant ces réticences. J’ai voulu accentuer les effets
positifs de cette réduction des groupes et ai poussé la démarche plus loin en
choisissant de diviser les groupes de module en deux (en en confiant une
moitié à l’assistante) ce qui a donné des résultats très positifs. De plus, et
comme chacun le sait, moins il y a d’élèves dans un groupe, plus chaque élève
est amené à s’exprimer ce qui lui est évidemment très bénéfique.
Je tiens à évoquer maintenant le statut de l’assistante dans mes travaux sur la
prononciation avec les élèves car j’ai choisi de ne pas l’intégrer dans ce projet
et je veux justifier de ce choix.
Il est unanimement reconnu que le fait de mettre les élèves au contact de
quelqu’un de langue maternelle anglaise ne peut être que bénéfique pour eux. Il
n’est pas dans mon intention de m’inscrire en faux par rapport à cette
affirmation, cependant je tiens à émettre quelques réserves quant à la
pertinence de l’usage de l’assistante dans l’optique d’améliorer la prononciation
des élèves. En effet, lorsque l’on se donne pour objectif, comme je l’ai fait,
d’enseigner le « BBC English » aux élèves, on ne peut qu’avoir recours à ses
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services avec parcimonie. Il faut bien voir que dans la plupart des cas, les
origines de l’assistante (pays anglophone autre que l’Angleterre) peuvent la
rendre « incompatible » avec l’enseignement de la R.P. et que quand bien
même elle serait d’origine anglaise (en acceptant l’idée que les élèves
entendent du « Regional R.P. ») son accent d’origine ne sera que très rarement
pur puisque l’immense majorité des étudiants britanniques n’ont pas accompli
leur cursus universitaire dans leur région d’origine ce qui a souvent eu, pour
conséquence d’avoir intégré, à leur accent d’origine, des accents de leur lieu
d’étude ce qui résulte en quelque chose d’évidemment tout à fait
compréhensible mais d’assez peu cohérent d’un point de vue accentuel. Tout
ceci peut conduire, par exemple, à des situations où le professeur dit /k℘p/ et
l’assistante /k←p/ (accent du nord de l’Angleterre) ce qui a pour effet de plonger
les élèves dans un profond désarroi et leur faire perdre toute motivation. Qui
plus est, cela risque d’entamer la crédibilité du professeur puisque les élèves
n’accepteront pas d’être corrigé par lui (un francophone) pour une « erreur »
qu’ils auront commise en essayant d’imiter l’assistante qui, elle, est
anglophone. Il ne faut d’ailleurs pas que le professeur se sente handicapé par
le fait de ne pas être un « native » car il a suivi, lors de son cursus universitaire
une formation poussée dans ce domaine, si toutefois cela n’avait pas été le cas,
le professeur peut s’imposer une remise à niveau en testant sur lui les
exercices qu’il se propose de donner à ses élèves et plus particulièrement ceux
réalisés dans le cadre du laboratoire. De plus, il faut éviter de trop se focaliser
sur les sons et de se demander si on les prononce bien car c’est là le meilleur
moyen de développer un blocage, là où il n’y en avait pas avant. Il ne faut pas
oublier que dans la chaîne parlée anglaise, l’intonation et le rythme jouent un
rôle tout aussi important dans l’intelligibilité du message et sont communs à
presque toutes les langues. Enfin j’irai même jusqu’à dire que le professeur
« non native » est avantagé par rapport au « native » en ce qui concerne le
recul sur la langue qu’il parle et qu’il est bien plus à même, du fait de la manière
très scientifique dont il a appris cette langue, d’en analyser les plus infimes
variations tandis que le « native » qui parle la langue depuis sa naissance et n’a
jamais réfléchi à la façon dont il la parlait et dont elle fonctionnait sera bien en
peine de percevoir et d’expliquer certains phénomènes.
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Le choix du manuel, quand il est laissé au professeur, ce qui n’est pas toujours
le cas, est un élément déterminant dans son étude de la phonologie avec les
élèves. Le professeur doit, quand le choix lui est donné, choisir un manuel qui
soit en conformité avec ses choix d’accent et de symboles dans les exercices
qu’il propose. J’ai eu, bien que je n’ai pas choisi le manuel (Wide Open, 2nde
LV1) avec lequel j’ai enseigné, la chance que celui-ci utilise exactement le
même alphabet que celui que j’ai choisi d’enseigner. Malheureusement les
auteurs ont fait une erreur extrêmement fréquente qui consiste à faire
l’amalgame entre phonétique et phonologie puisqu’ils intitulent leurs exercices
de prononciation « phonology » alors que tous les symboles et transcriptions
sont encadré par des symboles encadrant normalement (par convention) les
symboles et transcriptions phonologiques. J’ai tout de même, comme je
l’illustrerai dans ma troisième partie, eu recours à des exercices intégrés au
déroulement des séquences thématiques proposées par cet ouvrage.
J’ai cependant choisi de faire l’acquisition d’une méthode d’apprentissage de la
prononciation (Prononciation Tasks, Cambrige university press) en complément
des exercices proposés par le manuel car ceux-ci étaient prévus pour des
élèves ayant déjà acquis de bonnes connaissances en phonologie au collège
ce qui, on l’a compris, n’est pas le cas de mon public. Le niveau de cette
méthode n’est pas inférieur à celui des exercices proposés par le manuel mais
inculque mieux les bases à l’apprenant ce qui est l’un des objectifs primaires de
mon projet. J’ai aussi utilisé les cassettes fournies avec la méthode pour
entraîner les élèves en laboratoire de langue.
Je tiens cependant à préciser qu’il ne faut pas se méprendre sur mes choix. Ce
n’est pas parce que j’ai choisi d’aborder la phonologie avec mes élèves
principalement en cours de module que je n’en fais que là, à l’exclusion de tout
autre moment. Car il ne faut pas perdre de vue que le meilleur terrain de mise
en pratique des savoirs phonologiques étudiés lors de ces mêmes cours de
module est justement en dehors de ces cours. Le travail en classe entière sur
un document, lors duquel les élèves ont tout le loisir de s’exprimer est le
meilleur moyen pour le professeur de vérifier les effets (que ce soit sur leur
prononciation bien sûr, mais aussi comme nous l’avons vu plus haut sur leur
compréhension, leur capacité à orthographier ce qu’ils entendent, ou même leur
19
approche de la grammaire) de ses travaux en module. Si l’on considère d’un
côté que lors de travaux sur leur prononciation, toute leur attention est focalisée
sur cette dernière, et que de l’autre, lors de l’étude d’un document en classe, le
point de focalisation de leur attention se déplace sur le document en question,
on comprend alors pourquoi je pense qu’il n’existe pas de meilleur moyen de
voir si ce qui a été étudié en module est devenu un automatisme ou reste dans
le domaine des opérations conscientes.
Je vais maintenant exposer le programme que je me suis fixé avec cette classe
de seconde. Mes objectifs peuvent paraître fort peu ambitieux puisqu’ils sont en
fait plus proches du contenu des Instructions Officielles de collège que de celles
de lycée. Je réponds en cela au devoir qu’à le professeur de s’adapter à son
public. Comme l’a prouvé le sondage qui illustre l’introduction, la majorité des
élèves n’ont que très peu abordé la phonologie au collège, j’ai donc préféré
commencé par faire de la remédiation en donnant des bases solides à mes
élèves plutôt que de me voiler la face en faisant mine de croire que les notions
les plus basiques, tel que l’alphabet, étaient déjà acquises (ce qui n’était pas le
cas).
L’apprentissage de l’alphabet phonologique de l’anglais, basé sur l’Alphabet
Phonétique International, est une étape indispensable à la pratique de la
phonologie et mentionnée dans les programmes. Sa connaissance permettra
aux élèves de développer une certaine autonomie et de s’auto-former à la
prononciation des mots nouveaux qu’ils iront chercher dans le dictionnaire.
C’est également l’une des étapes les plus difficiles à faire accepter aux élèves
car cela s’apparente, à leurs yeux, à l’apprentissage de l’alphabet d’une
nouvelle langue. A cette difficulté, vient s’ajouter celle de la situation
chronologique de cette étape dans l‘apprentissage, à savoir qu’à mon sens, il
est quasi obligatoire de commencer par cela. Il est donc essentiel, avant
d’aborder cette étape essentielle, de préparer les élèves
« psychologiquement » à cette éventualité. Ceci fait, on peut choisir (comme je
l’ai fait) de diviser l’alphabet phonologique en deux (voyelles + diphtongues /
consonnes). Il n’y a pas de méthode « miracle » pour faire intégrer cet alphabet
aux élèves. Cependant il est recommandable de rapporter chaque symbole à
20
un mot monosyllabique dont la prononciation est déjà très bien connue des
élèves et qui leur servira de point de repère dans l’apprentissage de cet
alphabet inconnu qui les effraie (par exemple <bus> pour le son /℘/). C’est une
méthode que l’on trouve beaucoup dans les manuels de collège et qu’il faut,
selon moi, maintenir pour établir une continuité entre le collège et le lycée (pour
ceux qui ont déjà abordé la phonologie au collège). On la retrouve d’ailleurs
dans les exercices de phonologie du manuel de seconde Wide Open que
j’utilise. On pourrait même envisager, en allant plus loin, la mise en place d’un
système de « flash cards » (Bien que l’usage de celles-ci soit plus adapté au
collège, elles ont le mérite d’amuser et de frapper les élèves et les marquent
d’autant plus qu’ils ne les attendent plus à ce niveau) sur lesquelles ne figurerait
que le dessin de l’objet correspondant au son que l’on veut que l’élève corrige
lors de son intervention. Cela permettrait de développer un ensemble
d’automatismes qui induiraient un gain de temps.
Une fois que l’on a fait découvrir tous les sons vocaliques « simples » aux
élèves, on peut, pour rendre la découverte des diphtongues moins rébarbative
et leur prouver l’utilité de ce qu’ils viennent de voir, procéder de la manière
suivante. En leur donnant le modèle de diphtongue oralement, on peut leur
demander de trouver les deux sons qui la composent parmi les sons vocaliques
étudiés auparavant.
J’ai choisi de me concentrer sur les phonèmes qui n’existent pas en français (ce
qui les rend plus difficile à prononcer et à identifier) et sont connus pour poser
problème à notre public : //, /ι⊃/, /℘/, / /, /↵⊃/, /←/, /υ⊃/, /∴/ (bien qu’il existe
également en français il me facilite l’introduction des formes faibles et de
l’accent de phrase) ainsi que les diphtongues. En ce qui concerne les sons
consonantiques j’ai été beaucoup plus sélectif, étant donné que beaucoup sont
déjà connus des élèves puisqu’ils existent également dans notre langue. Il faut
cependant faire sentir aux élèves la présence de l’aspiration après les plosives,
seule différence par rapport au français. Seuls deux sons consonantiques, mais
non des moindres, sont totalement inconnus des élèves et nécessitent une
étude approfondie, il s’agit de /∂/ et / /, dans une moindre mesure on peut
considérer que /τ♣/ et /δ/ leur sont également inconnus, mais comme il s’agit
de l’association de deux sons existants en français ils font rapidement le
21
rapprochement. Enfin on peut passer un peu de temps à corriger la
prononciation du // qu’ils prononcent généralement // alors que cela n’est pas
nécessaire. J’expliquerai plus en détails dans ma troisième partie comment j’ai
abordé les sons consonantiques avec mes élèves.
La notion de paire minimale est essentielle à l’étude de la phonologie et les
élèves doivent l’intégrer pour comprendre l’intérêt de pratiquer cette dernière. Il
est assez aisé de leur faire deviner ce qu’est une paire minimale en leur en
montrant une ( /ship/ et /sheep/ par exemple) et en leur demandant ce qui
oppose les deux mots qu’ils ont sous les yeux. Il y a de fortes chances que leur
première réponse soit :« L’orthographe », car le visuel les frappe souvent plus
que l’auditif. Confronté à cette situation je leur ai donc soumis les mots suivants
/r∴←/ (ramer) et /rα←/ (querelle) qui, comme chacun sait, s’écrivent de la
même façon (<raw>). Après le tollé général provoqué par la découverte du fait
que l’anglophone peut écrire deux mots de sens et de catégorie grammaticale
totalement différentes de la même façon, on peut alors faire remarquer aux
élèves que la seule différence entre ces deux mots réside dans leur
prononciation.
Il convient également de faire comprendre aux élèves les différences
fondamentales qui existent en termes d’accentuation interne des mots entre le
français et l’anglais car cela permet d’introduire par la suite la notion d’accent
de phrase et, par l’intermédiaire des syllabes non accentuées, de préparer le
terrain en vue de l’étude des formes faibles des mots grammaticaux. On pourra,
le moment venu, dresser un parallèle entre les deux ce qui permettra
d’introduire de façon plus douce ce phénomène difficile à intégrer pour un
francophone. Il est aisé d’introduire la notion de forme forte/ faible lors de
l’étude du phonème /∴/ puisqu’après avoir fait déduire aux élèves qu’on ne
trouve le « schwa » que dans les syllabes non accentuées à l’intérieur d’un mot,
ils déduisent rapidement, à la vue des formes fortes et faibles des mots
grammaticaux que le même phénomène d’accentuation se transpose au sein
de la phrase.
22
Mes choix m’ont conduit à laisser de côté deux choses, les allophones et
l’entraînement à la transcription phonologique, je me propose d’expliquer
pourquoi.
Je commencerai par définir le terme « allophone » en citant Jean-Philippe
Watbled (La pronociation de l’anglais) : « Lorsqu’un seul et même phonème est
(physiquement) manifesté par plusieurs sons différents, on dit que les sons en
question sont des allophones de ce phonème. Le phonème /π/ dans <peak> et
dans <speak> est manifesté par deux allophones différents : un allophone
aspiré dans <peak> [π] et un allophone non aspiré dans <speak> [π]. Etant
donné qu’ils ne modifient pas le sens des mots dans lesquels ils apparaissent,
contrairement aux phonèmes dont ils dérivent, qui eux, ont ce que l’on appelle
une fonction distinctive, ils n’ont donc pas de légitimité d’un point de vue
utilitaire. Ils relèvent d’ailleurs plus de la phonétique que de la phonologie
puisque les seules différences entre les allophones d’un même phonème sont
d’ordre physique.
D’autre part, la transcription phonologique est une compétence inutile en
situation de communication ; sa seule utilité est d’évaluer la bonne maîtrise de
la graphie mais une fois de plus, l’utilité de cette capacité se justifie assez mal
dans l’optique que je me suis fixée.
Je vais maintenant présenter des exemples de cours et d’exercices
d’entraînement à la prononciation et détailler les objectifs que je me fixais,
l’utilité de chaque exercice et mes conclusions suite à ces travaux.
J’ai basé mon enseignement et la pratique des sons vocaliques de l’anglais sur
les cours de laboratoire que j’avais suivis à l’université et qui constituent selon
moi une excellente base de départ pour la réalisation d’un cours. A partir de ce
matériau, je sélectionne ensuite les mots connus des élèves (ou qu’ils
apprendront dans une séance à venir) pour illustrer les différentes graphies car
si l’on n’utilise pas des mots que les élèves connaissent, on perd de vue la
notion d’utilitarisme décrite plus haut (j’en trouve d’autres si ceux de la fiche
sont trop difficiles).
Ces fiches suivent une procédure identique pour chaque couple de phonèmes
ce qui permet de développer chez les élèves des automatismes lors de
11
23
l’approche de nouveaux phonèmes par le même biais. Voici l’une des fiches
que j’ai utilisées pour construire mon cours sur les phonèmes /←/ et /υ⊃/.
2
24
3
4
25
Les cours sont donc basés sur l’opposition de deux phonèmes (formant bien
sûr une paire minimale) qui posent problème aux francophones. Je commence
par présenter les deux phonèmes en donnant le modèle aux élèves puis en les
leur faisant répéter (1). Nous nous penchons ensuite sur chaque phonème
séparément. Les élèves tentent de retrouver les différentes graphies que peut
prendre un phonème (2). Les plus évidentes sont en général trouvées assez
rapidement puis j’aiguille les élèves vers les autres en leur donnant la graphie
et en les laissant trouver l’exemple, je suis en général contraint de leur donner
les plus improbables. Nous reproduisons ensuite la démarche pour le deuxième
phonème en prenant bien soin de prononcer et faire prononcer chaque mot par
les élèves car même si nous n’étudions qu’un seul son à la fois, les élèves se
laissent beaucoup influencer par ce qu’ils lisent et font souvent des erreurs à ce
moment. La trace écrite au tableau s’apparente à ce qui suit :
/←/ ≠ /υ⊃/
full ≠ fool
/←/ /υ⊃/
<u> full <oo> food
<oo> book <o> do
<o> woman <ou> group
<ou> should <u> fuse
<ew> new
<ue> blue
<ui> fruit
<oe> shoe
. L’étape suivante consiste à opposer les deux sons en utilisant des paires
minimales (3) ce qui permet de bien faire comprendre aux élèves l’importance
de faire la différence entre les deux sons. Je leur en donne une en modèle puis
je ne leur donne plus qu’un des deux mots de la paire et ils doivent retrouver
l’autre et sa graphie voire en trouver une à partir de mots qu’ils connaissent.
Pour finir, j’écris au tableau des phrases, toujours tirées de la fiche (4), et
contenant de nombreuses occurrences des deux sons qu’ils viennent d’étudier.
Je leur demande alors d’identifier les mots contenant les sons en question.
26
J’envoie en général un élève au tableau pour écrire les sons sous les mots où il
pense qu’ils se trouvent en prenant bien soin de lui faire souligner la syllabe si
le mot est polysyllabique ce qui donne le résultat suivant au tableau :
WHO TOOK MY NEW BOOK ?
/υ⊃/ /←/ /ϕυ⊃/ /←/
Puis je pratique une inter-correction en faisant appel à l’opinion de la classe.
Pour finir, plusieurs élèves lisent la phrase en essayant d’être de plus en plus
fluides dans leur débit.
Pour simplifier l’enseignement du système des sons consonantiques (qui ne
doit pas prendre plus d’une heure étant donné que la plupart des sons sont
partagés entre les deux langues comme je l’ai dit plus haut), il me semble
pratique d’utiliser la théorie phonologique de Jakobson qui consiste à les
opposer au moyen du trait voisé (vibration des cordes vocales), non voisé
(absence de vibration des cordes vocales) ce qui induit la classification
suivante :
Non
voiséesπ τ κ φ σ ♣
Voisées β δ ϖ ζ δ ∂
Le meilleur moyen de faire comprendre aux élèves la différence voisé / non
voisé est de leur faire poser la main sur leurs cordes vocales et de leur faire
prononcer les sons par paires minimales (en commençant par les sifflantes
puisque le passage de l’une à l’autre peut se faire en continuité contrairement
aux plosives qui imposent un temps d’arrêt) pour qu’ils sentent l’absence ou la
présence de vibrations, il convient aussi de leur faire sentir qu’aucun de leurs
organes phonatoires ne change de position pour passer d’un son à l’autre. De
ce fait, ils réalisent que seul le trait voisé oppose chaque paire minimale.
On commencera par les plus évidentes (chuintantes et sifflantes) puis en leur
donnant l’une des deux plosives de la paire, on fera en sorte qu’ils devinent son
alter ego.
27
Pour faire remarquer la présence d’une aspiration après les plosives en anglais,
notée [π] en phonétique, on peut inviter les élèves à prononcer une phrase en
français en imitant l’accent anglais, on constate alors que les élèves, dans leur
parodie d’accent, intègrent inconsciemment l’aspiration des plosives. Il suffit
donc dès lors de les inciter à faire la même chose en anglais pour qu’ils
améliorent leur prononciation.
Le dictionnaire est un élément important lors de l’apprentissage de la
prononciation, ce dont les élèves sont rarement conscients. Il est donc
souhaitable de faire évoluer leur mentalité quant au statut du dictionnaire qui ne
doit plus être considéré comme un simple outil de traduction mais également
comme un outil pour améliorer leur prononciation.
L’exercice suivant a été pris dans les cahiers de module Nathan. Mon objectif
était ici, avant tout, de donner aux élèves de bonnes habitudes lorsqu’ils
recherchent du vocabulaire dans le dictionnaire (0). Mais ce qui a fait que mon
choix s’est porté sur cet exercice est qu’il intègre la phonologie à cet
entraînement méthodologique et invite les élèves à vérifier la prononciation des
mots qu’ils cherchent (1). Il constitue surtout une façon tout à fait originale
d’aborder le phénomène de l’accentuation interne (2) et l’influence des préfixes
et suffixes sur cette dernière (3).Bien que l’étude de l’accentuation interne
n’intervenait que plus tard dans le programme que je me suis fixé, il m’avait
semblé judicieux de l’introduire une première fois dans le cadre d’un exercice
qui différait des entraînements à la phonologie pratiqués jusqu’ici.
Cet exemple montre que l’on peut intégrer l’apprentissage de la phonologie
dans toutes sortes d’exercices, y compris, comme c’est le cas ici, dans des
exercices méthodologiques.
Etonnamment, les élèves ont tout de suite intégré l’accent interne dans leur
prononciation des différents mots en insistant bien sur la syllabe qui leur était
indiquée. L’influence de celui-ci sur les autres syllabes du mot allait suivre avec
l’étude du /∴/. Cet exercice m’a donc permis d’aborder l’accentuation interne,
point sur lequel le français et l’anglais divergent complètement et qui peut poser
beaucoup de problèmes, en deux temps en séparant le renforcement des
syllabes et leur affaiblissement ce qui a donné tout le temps aux élèves de
s’habituer à cette différence et de l’accepter. Les résultats ont, je pense, été
meilleurs que si j’avais tenté d’aborder les deux phénomènes ensembles
0
1
23
28
On note une erreur des auteurs dans l’exercice 2 puisqu’ils demandent aux
élèves de relever la transcription phonétique alors que celle-ci est
phonologique(/ /)
Il convient de faire très attention aux mots dits « transparents » car leur
similarité orthographique avec le français cache dans la quasi totalité des cas
une grande différence de prononciation ce qui en fait des « faux amis »
phonologiques.
Comme je l’ai dit plus haut, il est important d’intégrer l’entraînement à la
phonologie dans le déroulement de la séance car cela permet d’une part de
varier les activités (ce qui est essentiel pour garder l’attention des élèves) mais
aussi de contourner le danger que constitue le fait de ne faire que des « cours »
de phonologie sans que jamais les élèves ne soient amenés à mettre à profit ce
qu’ils ont appris, ce qui ne manque jamais de les ennuyer profondément. Un
bon exemple de l’intégration de la phonologie à l’intérieur d’une séance se
retrouve dans cet exercice d’anticipation proposé par le manuel Wide Open.
Mon objectif était de mettre les élèves en contact avec les mots qu’ils allaient
rencontrer lors de l’écoute d’un document audio. J’ai donc fait faire cet exercice
aux élèves avant l’écoute du document en question en vue d’en faciliter la
compréhension. Cette fiche m’a également permis de revoir avec les élèves les
sons // et /ι⊃/ (1) qui avaient été travaillés en modules deux semaines
auparavant et d’en vérifier la bonne intégration par les élèves. Nous avons
aussi abordé un exercice déjà pratiqué en module, à savoir faire la liste des
différentes graphies d’un son, mais à ’envers cette fois puisque les élèves
doivent ici choisir entre les deux pronon
Finalement, dans la continuité de l’étud
premières séances), les élèves doivent
(3). Cet exercice utilise comme supp
manuel. Dans tous les cas de figure où
de l’extérieur, il faut, en priorité, s’assu
modèle proposé par le manuel. Tout co
manuel utilise le même alphabet que le
l3
29
ciations possibles de la graphie <i> (2).
e de l’alphabet phonologique (lors des
ici classer les différentes diphtongues
ort une cassette audio fournie par le
l’on compte utiliser un modèle venant
rer de la qualité et de la cohérence du
mme il est important de vérifier que le
professeur, il est également important
de s’assurer qu’il fournisse un bon modèle sur les cassettes qui
l’accompagnent.
1
2
3
30
31
L’exercice a) ne semblait pas devoir poser problème aux élèves, mais en fait la
correction a prouvé que la différence entre les deux sons n’était pas encore
bien perçue. A ceci deux raisons, d’abord les mots donnés comme modèles
pour illustrer chaque son (<witch> et <meet>) n’étaient pas connus des élèves.
Il aurait fallu que le livre utilise des mots déjà connus plutôt que d’utiliser des
mots nouveaux comme repères. Alternativement, j’aurais dû les remplacer moi-
même. La deuxième raison est que, sur l’enregistrement, les mots étaient
prononcés avec une différence moins marquée entre les deux phonèmes que
celle que j’avais donnée comme modèle aux élèves lors de leur premier contact
avec les phonèmes, ce qui tend à prouver que rien ne vaut la pratique de la
phonologie dans d’autres contextes que les cours de modules pour évaluer les
effets de ces derniers et par la suite envisager une remédiation comme ce fut le
cas ici.
Je conclurai en disant que, même si la phonologie a retrouvé la place qui lui
revient au sein de l’enseignement de l’anglais (c’est à dire dans les textes
officiels) ; sur le terrain des efforts restent à fournir pour éliminer les idées
reçues qui (j’espère l’avoir démontré) sont, dans la plupart des cas, infondées.
La prise en compte des notions d’utilitarisme et d’intégration dans
l’enseignement de la phonologie devraient permettre d’en faire un véritable
« outil » pour les élèves et non plus une science dispensée « ex cathedra » par
le professeur. Le fait que l’enseignement des langues vivantes s’oriente de plus
en plus vers la communication devrait d’ailleurs favoriser cette évolution car
parler la même langue c’est évidemment partager un système grammatical,
mais aussi partager un système de sons qui permettent aux locuteurs de
comprendre et de se faire comprendre
32
Bibliographie
La phonologie Jean Louis Duchet, collection Que sais-je ? (PUF)
La prononciation de l’anglais Jean Philippe Watbled, collection langues 128(Nathan université)
Anglais, classe de seconde générale et technologique B.O.E.N. N°7 du03/10/02, hors série
L’oreille et le langage A. Tomatis, (Seuil, 1991)
Gimson’s pronunciation of English (6th edition) Cruttenden (Arnold)
Pronunciation dictionary J.C. Wells (Longman)
Pronunciation tasks, a course for pre-intermediate learners Martin Hewings(student’s book et cassettes) (Cambridge
university press)
Phonétique et phonologie de l’anglais comtemporain Adamczewski et Keen(Colin)
English phonology (an introduction) H.J. Giegerich (Cambridge textbooksIn linguistics, 1992)
Enseigner l’anglais en collège et en lycée, (recueil de mémoiresprofessionnels)(CRDP de Créteil)
33
English Phonetics and Phonology, a practical course (third edition)Peter Roach
(Cambrigeuniversitypress)
Teacher development, making the right moves Edité par Thomas Kralrecueil d’articles tirés de« English teachingforum » 1989-1993
Anglais, classes des lycées (fichier 2) Jacques Marcelin, CharlesAron, Jane Elliott,François Faivre, collection Les modulesNathan (Nathan)
Wide Open (anglais- classe de seconde) Arlette Vesque-Dufrénot,(Livre de l’élève, workbook, cassettes) Michel Brusson, Jean-
Louis Habert
34
Enseigner la phonologie en lycée
RESUME : Ce mémoire analyse le statut de la phonologie au lycée du point devue des élèves et des professeurs, les problèmes qui en découlent etles solutions envisageables.Il expose une série d’objectifs sélectionnés en expliquant les critèresde cette sélection et présente des exemples de travaux réalisés enclasse
Lycée Hilaire de Chardonnet
Seconde LV1Première LV2
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