GEOLITTERATIE
"Écrire, c’est dresser la carte de nos landes intérieures.« (Neil Jomunsi)
Florilège i-voix
2013-2014
Cartographie théâtrale
MISSION = Prendre une photo de Florence telle qu’aurait pu la regarder un
personnage de la pièce de Musset (avec géolocalisation)
Florence vue par Louise Strozzi
Florence vue par Louise Strozzi (Camille)
- Cette photographie révèle la façon dont est perçue Louise Strozzi, c'est-à-dire
claire et pure comme l'eau de cette petite cascade dans l'Arno (fleuve traversant
la Toscane), voire même presque transparente. Car, en effet, elle est très peu
présente dans la pièce. Et même quand elle l'est, sa présence est très peu
considérée. C'est une cascade qui s'écoule et qui ne laisse rien paraître.
- Contrairement à l'interprétation précédente, l'eau de cette cascade peut aussi
ici matérialiser le poison avalé par Louise lors du grand souper organisé par son
père et rassemblant près de quarante Strozzi. Preuve encore que Louise, en
enlevant le fait que cet empoisonnement ait attisé de façon plus intense la colère
de Philippe Strozzi face à Alexandre de Médicis, n'avait pas un rôle très
important dans la pièce car ce n'est que vers le milieu de celle-ci (acte III -
Scène VII), que Louise meurt. Tandis que les héros très importants dans une
histoire tragique (ici Lorenzo), meurent souvent à la fin.
Ce lieu est un miroir de son âme car elle est éphémère et à la fois essentielle,
tout comme l'Arno, fleuve chargé d'histoire mais qui paraît presque inaperçu
dans les grandeurs de Florence.
Cartographie artistique
MISSION = Choisir à Florence une statue de la Renaissance, puis produire un
article qui réalisera plusieurs objectifs : cartographier, informer, analyser, créer,
oraliser.
Décapitation de statues par Lorenzo
Décapitation d’une statue de Giambologna par Lorenzo (Léo)
Bon soir mon bel étalon, voudrais-tu de l'aide ? tu sembles en bien
mauvaise posture face à la taille de son bâton, et de ces muscles, Ô ces
muscles ! Mais quel talent avaient ces artistes d'autrefois ! ... Je pourrais
t'aider c'est sûr, mais je trouve fort dommage de retirer un si beau visage
à de si splendides formes !
Pour un grand courage, je te saisirai le cou !
Et pour la gloire je te casse le genou !
Ciel ! voilà que le vin me fait faire des vers, et s'ils sont justes c'est que
je ne suis pas encore assez gris !
Il boit dans sa bouteille -
Héraclès... n'en as-tu pas assez fait ! Terrasser des monstres et des
monstres, cela doit être épuisant ! Au fond, je t'envie tu sais, pas pour ta
force ni pour ton courage, mais pour ta gloire, pour la trace indélébile
que tu as ancrée dans l'histoire ! En fin de compte, nous ne sommes pas
si différents tous les deux, je vais moi même laisser une marque de mon
passage sur terre, mais je commencerai par toi !
Il lui coupe la tête.
Décapitation d’une statue de Michel-Ange par Lorenzo (Zoé)
Il fait nuit. Lorenzo entre en titubant.
Bonsoir, mignon ! Ô dieu ! Quel pâle figure tu montres là ! Comme tes
yeux paraissent vides ! Est-ce donc cela que la perfection ? Ce vide est-il
reflet de ta pureté ?
Ah, tu sembles prendre un malin plaisir à me toiser du haut de ton
piédestal, figé dans ton instant de gloire, ta fronde à la main, avant que tu
ne terrasses le terrible Goliath. De ta beauté d'éphèbe, de tes muscles fins
et puissants tu me méprises, jeune roi, moi qui ne suis plus que le reflet
de ma gloire passée. Mais dis-moi, ô David, toi qui sembles si parfait, ton
esprit n'a-t-il jamais été traversé par de sombres pensées ? Quand tu
songes à l'instant où ton épée tranche le cou de Goliath, revois-tu le sang
qui gicle ? Qu'est-ce que cela fait d'ôter la vie ? Mais parle ! Réponds-moi
! Je veux le savoir, je dois le savoir ! Diable, sais-tu que devant toi se tient
l'assassin d'un tyran ?
Griserie que toute cette perfection, qui ne nourrit chez moi qu'une affreuse
jalousie, qui ne fait qu'ajouter au vice qui me ronge ! Je te parle, j'ose me
prendre pour ton égal, je rêve même de te trancher la tête ... (Il pose son
épée sur le cou de la statue)
Mais tout cela est ridicule. Je ne suis plus rien. Adieu.
Il sort..
Décapitation d’une statue de Giambologna par Lorenzo (Clémentine)
Florence. - Piazza della Signoria.Entre Lorenzo.
"Que fais-tu là, ami ?! Crois-tu qu'on ne discerne point ton ombre, se glissantdans la pénombre pour ravir à ses nobles familles leurs jeunes filles ? Lumièredu ciel ! Toi, Romain, symbole de courage et de hardiesse. Quelle folie t'habite,quel esprit malin parcourt ton corps de marbre ? Quoi ? Que dis-tu ? Non, non...Tu ne parles pas, tes muscles, figés, pour l'éternité, tes bras tendus etenlaçant la mère d'hommes libres, tout, jusqu'à la plus infime partie de tonêtre est crispée dans cet élan. Tu ne peux te défendre, face à moi, moi que levice a déjà gagné, corrompu jusqu'à la moelle, cependant je peux t'aider l'ami.Faire tomber cette tête serait une si bonne chose ! Une bonne action, quipourrait me délivrer. Oui, ton regard me semble si froid, tu tiens en tes bras lafaiblesse des Hommes et à tes pieds gît le désespoir mêlé d'horreur. Il suffit !Sang du christ, j'en perdrai la tête... ô romain ! Le temps est venu pour toi deperdre la tienne.
Il le décapite.
Décapitation d’une statue de Flaminio Vacca par Lorenzo (Corentin)
ll fait nuit. Lorenzo s'approche de la statue.
Cesse donc de me dévisager ainsi, Lion. Tu portes sur moi unregard que tu as volé à tes maîtres, tu n'es qu'un animalenchaîné par la tyrannie et la crédulité, exactement comme cepauvre peuple de Florence. Tu ne sembles pas voir plus loin quele bout de ton museau. Sâche que, dans mon esprit, ta tête demarbre jonche déjà le sol... mais je ne suis pas mauvais, Lion. Ladébauche ne m'a pas rendu aussi cruel que le temps, c'est de luique tu dois te méfier, il est ton véritable ennemi. Il t'aura àl'usure, et, avec le plus malin des plaisirs, te délestera de cetteénorme tête que tu portes sur tes épaules. Quant à moi, jem'occupe de celle d'Alexandre. Il serait très amusant que latête du despote tombe en même temps que celle de la statue quile symbolise. Mon vrai visage apparaîtra pendant que le tiens'écrasera sur les pavés. Enfin, tout ceci n'est qu'une questiond'heures. Tâche de profiter de celles qu'il te reste...
Cartographie poétique
MISSION = Ecrire un
kaléidoscope poétique du
voyage en Italie = pour
chaque jour et lieu du
voyage, écrire au moins
une note qui fixera
poétiquement un souvenir
du voyage.
Kaléidoscope
Dans une rue, au cœur d'une ville de rêve
Ce sera comme quand on a déjà vécu :
Un instant à la fois très vague et très aigu...
Ô ce soleil parmi la brume qui se lève !
Ô ce cri sur la mer, cette voix dans les bois !
Ce sera comme quand on ignore des causes ;
Un lent réveil après bien des métempsycoses :
Les choses seront plus les mêmes qu'autrefois
(…)
Ce sera comme quand on rêve et qu'on s'éveille,
Et que l'on se rendort et que l'on rêve encor
De la même féerie et du même décor,
L'été, dans l'herbe, au bruit moiré d'un vol d'abeille.
Paul Verlaine, Jadis et Naguère, 1885
Ce sera un départ sur des notes salées.
Ce sera le vrombissement d'un
moteur et des cœurs qui, à
l'unisson, bruissent pendant que les
corps se dessoudent les uns des
autres.
Ce serait des mains qui s'agitent au-
delà des vitres
Des sacs rassemblés à la hâte
Une dernière étreinte et enfin,
salvateur,
Le ronronnement du moteur qui
démarre.
Ce sera une voiture noire et familièrequi s'éloigne.
Ce sera un jour ou l'on dépassera la ville deGargantua, celle de Louise Labé et où l'onfranchira le "toit de l'Europe".
Ce sera un tunnel frais jus-
qu'aux montagnes piquantes.
Ce serait une aire d'autoroute, il fait nuit
Une lumière rouge clignote au loin
Et cet instant magique, en une seconde,
Une heure qui disparait.
Ce sera le magnétisme de l'inconnu et l'attente
d'une découverte, le tout sous le regard lumineux
des étoiles et des grands sommets attentifs,
comme nous.
Ce sera comme quand on plane au dessus desnuages,Au dessus de cette neige qui nous colle auxsouvenirs.
Ce serait une cité ramifiée par les veines
pleines d'eau de son histoire.
Ce sera une ville peuplée
d'histoires, d'amitié
Des mots nouveaux, une
langue à partager
Quelques moments uniques,
découverte éveillée
Et l'accueil bienveillant
d'inconnus familiers.
Ce serait plaisant de suivre le
cours de l'eau, le cours des
architectures, le cours des
gens heureux.
Ce serait un immense damier noir et blanc
La mer qui s'étend à perte de vue
Un frêle bateau de pêcheur qui semble
lutter contre les cargos à l'horizon
Et une tache de glace à la fraise.
Ce sera comme si jereprenais à nouveau ma brise saléemais de la couleur de la Méditerranée.
Ce seraient des noms se reflétant sur les eaux :Larrone, Filomena, Cesarino, Gesa, Anaise, MarcoPolo ...
Ce sera dans les rues aux maisons
colorées,
Où Anglais, Hollandais ou Prusses se
sont croisés,
Que l'on pourra rêver et s'envoler
Au côté de gens toujours pressés.
Ce sera comme une longue plume qui frôle l'eau.
Ce sera la rencontre avec
une dame dont la droiture a
traversé les âges. Ou pas.
Ce sera comme si on l'avait déjà vue.
Ce sera enfin mon tour.
Ce seront un campanile, unmonastère, un cimetière etune tour penchée, tout celaréuni en un jardin d'Edenblanchi, où la louve allaiteses petits.
C'est à Pise que nous verrons ladroiture deshommes... chancelante.
Ce serait une chasse aux trésors, même si les plusbeaux sont ceux dont regorge l'âme. On apprend qu'ilfaut les chercher entre les murailles pour mieux lesretrouver dans nos forts intérieurs.
Ce serait le vertige qui nous prend,
Devant l'immensité d'une mer de tuiles
Puis un dédale de ruelles fraîches et ombragées
Qui semblent jouer à nous perdre.
Ce sera une recherche animée dans le silence desmurs cuivrés.Un olivier perché dans une tour, feuillage sage, nousparlera de Lucques au passé.
C'est Via Del Fosso que nous nous perdrons,dans cette ville encerclée par les murs del'imaginaire.
Ce sera à présent la beauté minérale
D'une cité ouverte au frais parfum des fleurs
Les murmures assourdis transpirent de ses dalles,
Antiques, où sont-ce les statues dont on entend le
cœur ?
Ce serait une étreinte de pierre
Le regard qui se perd dans celui de l'autre
L'amour et la tendresse à l'épreuve de la mort
Prisonniers d'une vitre.
Ce sera des pièces, des morceaux, des bouts, desbribes, des éclats du passé qu'il faut maintenantconjuguer au présent, pour mieux entendre ce qu'ilsont à nous dire.
Ce seront des bijoux finement ornés,
Appartenant à des hommes presque oubliés.
Ce sera un village fortifié, et à l'entrée,
Une antre abritera un inquiétant musée.
Ce sera une arche d'une antique civilisation, les visageseffacés nous dévisageront.
Ce serait Volterra, qui vivra verra. Volte face,me voila nez à nez avec uncharmant étrusque.
Ce sera comme l'ombre du soir, s'étirant et
enveloppant les maisons et les rues.
Ce sera sinueux comme les
ruelles, et ouvert, sur la
profondeur du vide.
Ce serait une longue marche,
sans but et sans point de départ
dans la tranquillité d'un après-
midi.
Ce sera une libération quede s'évaderPour découvrir sur ces pavésUne sérénité dans les notesd'une harpeQui aspire à une envie, quis'échappe.
Ce serait comme si de Médicis j'avaistrouvé mes dix "si"..."Arno" me tiendra le cœur etcertaines statuesme parleront d'ici.
Ce serait un immense édifice qui
s'élance
Vers le ciel, une certaine idée de la
perfection.
Et de beaux postérieurs rebondis,
En pierre, malheureusement.
Ce sera une ville méconnue, si belleque le syndrome de Stendhal a bienfaillim’attraper.
Ce sera un coin de vieÀ perte de vue, tableau d'artUn instant véritable,L'envie de tout reconnaître et savoir.
Ce seront des pierres et des lumières,Qui à leur guise font bien des manières.Ce sera la puissance d'une louve sur unebannièreQui nous renvoie longtemps en arrière.
Ce sera comme une course de chevaux
et de touristes,
une place où on retrouvera notre Luppa,
l'histoire subsiste.
Ce sera comme si la magie d'enfant devenaitadulte ailleurs,Comme si une fontaine pouvait nousmouiller le cœur.
Ce sera un corps vide mais une âme présente.
Ce seraient les ombres et la musique du
piétinement agité d'une horde de
chevaux sur les pavés.
Ce sera les pieds lecœur lourds.
Ce sera comme si
cette ville nous
avait dévoilé
ses secrets.
Ce sera un regard, le
tout dernier... ce sera un
au revoir, le tout
premier...
Ce seront des images, des paysagesqui défilent dans le mauvais sens,L'envie que le temps s'étire à l'infini,Et une certitude : je reviendrai.
Ce sera aussi doux qu'une larme sur une
joue,
Et un pincement aussi saisissant que
déroutant.
Par delà les montagnes, les villes et les
tremblements des roues,
C'est à nouveau notre mer que l'on
entend.
Ce serait comme si le petit zef avait
soufflé pour nous ramener
Un battement de cils, nous voila arrivés.
Et Brest ressemblerait, nostalgiquement,
à l'Italie.
Ce serait un retour au réel et à la grisaille.
On ne pleure pas, les cieux le font pour
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