Web viewCombien d’auteurs connaisseurs, compétents, cultivés auraient pu faire...

2
« QUI TROP EMBRASSE MAL ETREINT“ L’ARRIERE-GOUT AMER DE VIENNE Quelques remarques sur « Le goût de Vienne » par Gérard-Georges Lemaire, publié au MERCURE DE France, en 2003 Evidemment, si l’on est trop goulu, on risque une indigestion. Gérard-Georges Lemaire publie la même année (en 2003) le Goût de Prague, le Goût de Vienne et le Goût de Trieste, et on ne peut pas être à la fois gourmet et se remplir le ventre. Noms, dates, chiffres, orthographe – que de peccadilles – l’auteur pense que ses lecteurs n’auront pas plus de connaissances que lui qui arpente l’Europe centrale à grands pas. De cette manière, il ne peut certainement pas « parvenir à saisir l’essence volatile et donc insaisissable de Vienne » comme il le regrette dans sa préface (on ne peut plus creuse et superficielle) – où le lecteur apprend à sa grande surprise que la population de Vienne « dépasse largement les deux millions » (mais non, mais non : max. 1,8 millions). Puis, il parle de la « Große Wien » création lemairienne, qui se dit – si jamais - « Groß-Wien » ce qui était un terme utilisé par les nazis pour parler de l’élargissement de la ville ce qui n’est pas forcément à propos dans ce contexte. Rodolphe de Habsbourg, dit le fondateur, qui est lié à l’histoire de St. Etienne ne porte que le numéro IV et non pas V, comme veut nous le faire croire Gérard-Georges Lemaire. Et le comble des insultes vis-à-vis des pauvres Habsbourg, la dernière est appelée « l’impératrice Zara » comme le magasin de mode en face de la cathédrale et non pas « Zita » comme nous aurions pensé. Que la Votivkirche ait juste perdu son « e » à la fin, soit, le « Naturhistorisches Museum » est tronqué pour devenir « Naturalisches ( !) Museum », le « Ringstraßenstil » est comprimé en « Ringstil » ce qui laisse plutôt penser à une nouvelle forme « de lutte ». Le « très antisémite maire » s’appelle ici « Karl Lueber » (il s’appelait Lueger), l’architecture est ici « néologique » - qu’est-ce que c’est ?– et la Tuchlauben est extorpié en « Turklauben ». Notre dramaturge classique – comparable à votre « Jacques Racine », un certain Friedrich Grillparzer – n’était-ce pas plutôt « Franz » ( ?) -allez, cela n’a vraiment pas beaucoup d’importance, les Français ne le connaissent pas de toute façon. Après la lecture épuisante de cette préface, on n’a presque plus le courage de continuer pour apprendre que le siège de Vienne par les

Transcript of Web viewCombien d’auteurs connaisseurs, compétents, cultivés auraient pu faire...

Page 1: Web viewCombien d’auteurs connaisseurs, compétents, cultivés auraient pu faire un travail merveilleux pour réunir les textes de ce petit opuscule – quel scandale de produire

« QUI TROP EMBRASSE MAL ETREINT“

L’ARRIERE-GOUT AMER DE VIENNE

Quelques remarques sur « Le goût de Vienne » par Gérard-Georges Lemaire, publié au MERCURE DE France, en 2003

Evidemment,  si   l’on est trop goulu,  on risque une  indigestion.  Gérard-Georges Lemaire publie  la même année (en 2003) le Goût de Prague, le Goût de Vienne et le Goût de Trieste, et on ne peut pas être à la fois gourmet et se remplir le ventre. Noms, dates, chiffres, orthographe – que de peccadilles – l’auteur pense que ses lecteurs n’auront pas plus de connaissances que lui qui arpente l’Europe centrale à grands pas. De cette manière, il  ne peut certainement pas « parvenir à saisir l’essence volatile et donc insaisissable  de Vienne » comme il   le regrette dans sa préface (on ne peut plus creuse et superficielle) – où le lecteur apprend à sa grande surprise que la population de Vienne « dépasse largement les deux millions » (mais non, mais non : max. 1,8 millions). Puis, il parle de la « Große Wien » création lemairienne, qui se dit – si jamais - « Groß-Wien » ce qui était un terme utilisé par les nazis pour parler de l’élargissement de la ville ce qui n’est pas forcément à propos dans ce contexte. Rodolphe de Habsbourg, dit le fondateur, qui est lié à l’histoire de St. Etienne ne porte que  le  numéro  IV et  non pas V,  comme veut nous le  faire  croire Gérard-Georges  Lemaire.  Et  le comble des insultes vis-à-vis des pauvres Habsbourg, la dernière est appelée « l’impératrice Zara » comme le magasin de mode en face de la cathédrale et non pas « Zita » comme nous aurions pensé. Que la Votivkirche ait juste perdu son « e » à la fin, soit, le « Naturhistorisches Museum » est tronqué pour devenir « Naturalisches ( !) Museum », le « Ringstraßenstil » est comprimé en « Ringstil » ce qui laisse plutôt penser à une nouvelle forme « de lutte ». Le « très antisémite maire » s’appelle ici « Karl Lueber »   (il   s’appelait   Lueger),   l’architecture   est   ici  « néologique »   -  qu’est-ce  que  c’est ?–  et   la Tuchlauben   est   extorpié   en   « Turklauben ».   Notre   dramaturge   classique   –   comparable   à   votre « Jacques Racine », un certain Friedrich Grillparzer – n’était-ce pas plutôt « Franz » ( ?) -allez, cela n’a vraiment pas beaucoup d’importance, les Français ne le connaissent pas de toute façon.

Après   la   lecture   épuisante   de   cette  préface,   on  n’a  presque  plus   le   courage   de   continuer  pour apprendre que le siège de Vienne par les Turcs a eu lieu en 1693 – un peu moins d’accord, 1683 suffit – le comte Stahremberg s’appelle Starhemberg, le Calenberg – Kahlenberg, passons – l’ambassadeur de Russie à l’époque soit Rasoumovsky ou bien Razumovsky, mais certainement pas Rasowmoffski …Arthur Schnitzler n’a pas abandonné ses études de médecine, mais après avoir passé son doctorat, il a même exercé à l’Hôpital de Vienne, Ludwig n’était pas VON, mais van Beethoven…. Assez, trop, cela nous suffit, on n’a même plus envie de s’exprimer sur le choix arbitraire des textes, il nous reste un arrière-goût amer.  Combien d’auteurs connaisseurs,  compétents,  cultivés auraient pu faire un travail merveilleux pour réunir les textes de ce petit opuscule – quel scandale de produire un livre pareil !

Mais au fond : si depuis 2003, personne ne s’est rendu compte de ces grosses fautes et erreurs et que Le goût de Vienne se vend toujours si bien – Mercure de France a peut-être raison : il ne faut pas mettre les points sur les i, à Vienne on boit et on danse et on s’amuse et on n’est pas aussi correct et strict et rabat-joie que les Allemands !