“Vuillaume“ - t-2-h.fr · 24 En fait, entre 1810-1820 et les années 1875, un seul rituel, du...

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23 Quant au tablier, malgré la représentation en couleur du “Thuileur“ d’Alexandre de Grasse-Tilly, nulle trace dans les rituels d’un quelconque décor, hormis l’œil d’or peint ou brodé sur la bavette bleue. Les branches de laurier et d’olivier ne sont présentes dans les rituels que dans la composition de la couronne qui est imposée au nouveau Maître Secret dès son obliga- tion prononcée. Notons d’ailleurs que, dans cette reproduction, c’est une clef qui est entourée par les branches de laurier et d’olivier. Tablier extrait du Thuileur d’Alexandre de Grasse-Tilly Cette représentation n’est pas la seule du même type et deux aquarelles détenue par le GOdes Pays-Bas montre le même dessin, avec pourtant, sur l’une, cette rectification manus- crite portée à l’encre (et en français) sur la même feuille : « Sur le tablier il ne faut pas de clef mais bien la lettre Z ». Cependant, le “Précis Exact des Trente Trois Grades du Rite Ecossais d’après les principes de plusieurs auteurs“ édité vers 1813 présente parmi les décors aquarellés des divers degrés un « Tablier Blanc dou- blé et bordé de noir, Bavette bleue sur laquelle est un œil ; sur le Tablier, deux branches, l’une de Laurier et l’autre d’Olivier et au milieu des deux, la lettre Z ». C’est la première représentation du tablier que nous connaissons aujourd’hui. A la même époque, deux Tuileurs renommés, celui de “Delaulnaye“ 73 , dès 1813, celui de “Vuillaume“ 74 , dès 1820, corroborent la description du “Précis Exact…“. Mais faut-il tou- jours se fier aux tuileurs ? A propos du mot de passe du grade en vigueur à leur époque, les deux tuileurs sont en entière opposition sur le mot employé. Pour “Delaulnaye“ qui qualifie ce grade d’« assez insignifiant… », le mot de passe est « Zizon ; que l’on traduit par Balustrade ». Et il ajoute à ce propos : « Voici un exemple frap- pant d’une altération qui a fait perdre jusqu’au sens du mot primitif. Zizon n’est d’aucune langue ; à la place de cette parole insignifiante, il faut dire ZIZA (splendor). » Pour “Vuillaume“, le mot de passe est « ZIZA (resplendens) » qu’il commente ainsi : « Quelques-uns disent Zizon, mais c’est une faute. On traduit aussi ce mot par balustrade, ce qui paraît sans fondement, à moins que l’on ne considère les rayons de la gloire de Dieu, auxquels pourrait être appliquée la signification vraie, resplendens, comme une balustrade qui en garanti l’approche ; » Aucun document, rituel ou tuileur, précédant ces documents ne faisant mention de Ziza com- me mot de passe, il nous faut donc admettre que nous manquons de document(s) expliquer cette évolution. 73 « Thuileur des trente-trois degrés de l’Écossisme du Rit Ancien dit Accepté » (1 ère édition en 1813 ; 2 nde en 1821 ; réédition -de l’édition de 1821- aux «“Éditions d’aujourd’hui » en 1979). 74 « Manuel Maçonnique ou Tuileur des divers rites de la Maçonnerie… » (1 ère édition en 1820 ; 2 nde en 1830 ; réédition –de l’édition de 1830- aux Éditions Dervy en 1975, 1983…).

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Quant au tablier, malgré la représentation en couleur du “Thuileur“ d’Alexandre de Grasse-Tilly, nulle trace dans les rituels d’un quelconque décor, hormis l’œil d’or peint ou brodé sur la bavette bleue. Les branches de laurier et d’olivier ne sont présentes dans les rituels que dans la composition de la couronne qui est imposée au nouveau Maître Secret dès son obliga-tion prononcée. Notons d’ailleurs que, dans cette reproduction, c’est une clef qui est entourée par les branches de laurier et d’olivier.

Tablier extrait du Thuileur d’Alexandre de

Grasse-Tilly Cette représentation n’est pas la seule du même type et deux aquarelles détenue par le G∴ O∴ des Pays-Bas montre le même dessin, avec pourtant, sur l’une, cette rectification manus-crite portée à l’encre (et en français) sur la même feuille : « Sur le tablier il ne faut pas de clef mais bien la lettre Z ». Cependant, le “Précis Exact des Trente Trois Grades du Rite Ecossais d’après les principes de plusieurs auteurs“ édité vers 1813 présente parmi les décors aquarellés des divers degrés un « Tablier Blanc dou-blé et bordé de noir, Bavette bleue sur laquelle est un œil ; sur le Tablier, deux branches, l’une de Laurier et l’autre d’Olivier et au milieu des deux, la lettre Z ». C’est la première représentation du tablier que nous connaissons aujourd’hui.

A la même époque, deux Tuileurs renommés, celui de “Delaulnaye“73, dès 1813, celui de “Vuillaume“ 74, dès 1820, corroborent la description du “Précis Exact…“. Mais faut-il tou-jours se fier aux tuileurs ? A propos du mot de passe du grade en vigueur à leur époque, les deux tuileurs sont en entière opposition sur le mot employé. Pour “Delaulnaye“ qui qualifie ce grade d’« assez insignifiant… », le mot de passe est « Zizon ; que l’on traduit par Balustrade ». Et il ajoute à ce propos : « Voici un exemple frap-pant d’une altération qui a fait perdre jusqu’au sens du mot primitif. Zizon n’est d’aucune langue ; à la place de cette parole insignifiante, il faut dire ZIZA (splendor). » Pour “Vuillaume“, le mot de passe est « ZIZA (resplendens) » qu’il commente ainsi : « Quelques-uns disent Zizon, mais c’est une faute. On traduit aussi ce mot par balustrade, ce qui paraît sans fondement, à moins que l’on ne considère les rayons de la gloire de Dieu, auxquels pourrait être appliquée la signification vraie, resplendens, comme une balustrade qui en garanti l’approche ; » Aucun document, rituel ou tuileur, précédant ces documents ne faisant mention de Ziza com-me mot de passe, il nous faut donc admettre que nous manquons de document(s) expliquer cette évolution. 73 « Thuileur des trente-trois degrés de l’Écossisme du Rit Ancien dit Accepté » (1ère édition en 1813 ; 2nde en 1821 ; réédition -de l’édition de 1821- aux «“Éditions d’aujourd’hui » en 1979). 74 « Manuel Maçonnique ou Tuileur des divers rites de la Maçonnerie… » (1ère édition en 1820 ; 2nde en 1830 ; réédition –de l’édition de 1830- aux Éditions Dervy en 1975, 1983…).

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En fait, entre 1810-1820 et les années 1875, un seul rituel, du moins en France, semble avoir été conservé. Conservant dans la forme, comme dans l’esprit, le contenu des premiers rituels français du REAA, il est toutefois beaucoup plus complet dans l’explication de la pratique gestuelle du rituel. Pouvant être daté des années 1840/1850, il n’apporte en fait que trois “nouveautés“ : - Il introduit le signe, la batterie et l’acclamation écossaise en fin d’ouverture et de clôture des travaux :

« Tous [les Frères] font le signe, frappent sept fois dans les mains et disent trois fois : Huzza (= on prononce Houzzai) »

- Il décrit pour la première fois le tablier que nous connaissons depuis l’aquarelle de 1813 :

« Le tablier est blanc et attaché avec des rubans noirs. (…) La bavette doit être bleue avec un œil dessus, peint ou brodé en or. Deux branches, l’une de l’aurier, l’autre d’olivier se croisent sur le tablier : dans le milieu est la lettre Z∴. »

- Il donne, dans la partie préliminaire : « Disposition de la ∴ » la première représentation du cartouche75 :

« Au dessus de l’autel est un grand cercle dans lequel est un triangle, au centre duquel est l’étoile flamboïante. »

C’est le cartouche que nous connaissons aujourd’hui et qui restera désormais (presque) sans modification. Cette figure, nouvelle en ce qu’elle remplace la clef au centre du triangle par l’étoile flamboyante, n’est toute-fois pas une création originale. Un rituel de Petit Archi-tecte inconnu76 des années1750/1760 présentait déjà une figure quelque peu identique :

« Un grand cercle renfermant un triangle au milieu duquel une Etoile flamboyante renfer-mant la lettre G∴ et sur les 3 pointes du trian-gle Les Lettres S∴ U∴ G∴. »

Les lettres S U G signifient Soumission, Union, Gomez.

Les archives du Suprême Conseil de France ne reprenant ensuite qu’avec un rituel manuscrit des années 1870, nous sommes obligés d’avoir recours aux divers documents imprimés en France ou à l’étranger.

75 Les Tuileurs Delaulnay et Vuillaume avaient déjà donné une telle représentation sans que celle-ci apparaisse dans les rituels de l époque que nous avons pu consulter. 76 Kloss ms XXXIV-4

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33- Les documents « étrangers ». Une aquarelle et trois livres imprimés sur le continent américain vont essayer de combler nos lacunes documentaires. Bien que nous ne puissions transférer automatiquement l’esprit et les pratiques “rituelliques“ d’un pays à l’autre, celles-ci peuvent toutefois nous servir de repères. ∆ ∆ L’aquarelle ci-contre provient de la collec-tion du G∴O∴ des Pays-Bas. Datée du début du XIXème siècle, elle est conforme à la des-cription traditionnelle de la Loge de Maître Secret. Nous pouvons y discerner : - le trône de Salomon surmonté d’un dais ; - l’autel triangulaire (au pied de l’Orient) - la place d’Adoniram siégeant à l’Occident, mais coté Nord-Ouest. - et surtout un tapis de Loge comportant le cartouche : une étoile flamboyante dorée ins-crite dans un triangle équilatéral lui-même inscrit dans un cercle. Comme toutes les aquarelles de la série, celle-ci ne contient aucun des luminaires prévus par le rituel (probablement pour des raisons d’esthétiques !). ∆ ∆ Parmi les imprimés, “Light on Masonry »77 en 1829, divulgue (entre autres) tous les degrés conférés dans la Loge de Perfection. Il reprend, dans ses grandes lignes et parfois in extenso, le rituel “Dalcho“ de 1801, sans toutefois divulguer les décors, les mots secrets ou de passe. « Liturgias de los treinta y tres grados de la verdera Mazoneria ó Rito antiguo y aceptado que se llama por antonomasia Rito Escoces »78, en 1859, décrit un rituel dont l’influence « scientiste ou positiviste » est (hélas) déjà, présente. Ses commentaires (sur l’intelligence, la conscience, le bien et le mal, le juste et l’injuste), qui forment l’essentiel de la cérémonie de réception n’étant pas de notre propos, nous nous attar-derons sur la description des décors qui présente parfois quelques variantes face aux pratiques françaises. Le cordon, porté en sautoir est : « de color violado con orilla negra », mais le tablier, décrit conformément à l’aquarelle du “Précis Exact… de 1813 confirme le rituel de 18400/1850 : « Mandil blanco orillado de negro en el que se bordan ó pintan dos ramas, la una de laurel y la otra de olivo, que forman una corona abierta, encerrando la letra Z ». A titre anecdotique, un recueil de titre (et d’esprit) équivalent : « Liturgias de los treinta y tres grados de la verdera Mazoneria ó Rito antiguo aceptado escoces »79 en 1866 donne un nom au frère second inspecteur : « el segundo Vigilante se nombra ”introductor”, y es Azarias80 ». 77 Elder David Bernard, Utica, 1829 78 Vicente A. de Castro, Nueva Orleans, 1859

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Notons en outre que le mot de passe de ces deux documents est bien Ziza. Il serait toutefois hasardeux de se référer à ces documents étrangers pour en déduire que Ziza a définitivement détrôné Zizon. En effet, de nombreuses divergences de fond existent entre ces documents et leurs homologues français (décors de Loge, âge, batterie, titres des officiers etc.). Ce sera, plus tard, le rôle du Convent de Lausanne de tenter d’y remédier… Dans cette revue des documents en langue étrangère, nous ne manquerons pas de signaler le célèbre « Manual de la Masoneria »81 de 1867 qui tournant le dos aux rituels scientistes pré-cédents, redonne à celui du 4e degré son sens “traditionnel“, mais ce faisant n’en fait, au point de vue de l’histoire, qu’une simple traduction du rituel américain du début du siècle. 34- Des années 1860 au Convent de Lausanne. ∆∆ En France, le “Manuel de l’initié“82 de 1861 rompt timidement le silence sur le grade de Maître Secret. Encore ce tuileur ne consacre t-il que trois petites pages à notre degré. Nous y apprenons toutefois que : - Le mot de passe est bien Ziza malgré que « quelques rituels portent abusivement Zizon ». - « Salomon a un sceptre en main et « sur un autel triangulaire [placé devant Salomon], est

un maillet garni en étoffe noire, et une couronne de laurier et d’olivier, dont il est fait usage dans les réceptions »83.

- Le cordon bleu est large de 11 centimètres et est porté en sautoir. ∆∆ Le grand silence des rituels français s’interrompt avec un rituel de Maître Secret du Suprê-me Conseil de France des années précédant le Convent de Lausanne. Sur la page de couvertu-re de celui-ci, outre les informations :

Rite Ecos∴ Anc∴ Acc∴ Sup∴ Cons∴ de France

Grades Capitulaires Rituel du 4e Degré

Maître Secret Nous trouvons, en bas de page, la mention manuscrite, bien plus tardive « entre la modifica-tion de 1863 et le rituel imprimé de 1898 ». Quelle est la nature de cette modification ? Mys-tère. Aucun document n’est là pour nous renseigner. Peut-on dater plus précisément le rituel ? Sachant que les décisions du convent de Lausanne ne sont pas prises en compte par le rituel, sa rédaction semble se situer entre 1863 et 1875. Nous le daterons c. 1870 en sachant bien qu’en cette année funeste pour la France, les membres du Suprême Conseil de France avaient sûrement d’autres sujets de préoccupations ! Quoiqu’il en soit, ce cahier de vingt-six pages manuscrites soulève de nombreux commentai-res. Suivant l’exemple des rituels espagnols déjà cités, et se conformant à l’esprit rationaliste

79 Viriato Alfonso de Covadonga, Brownsville, 1866 80 « le second surveillant se nomme ”introducteur”, il représente Azarias. Deux personnages bibliques partagent ce patronyme : un roi de Judée (nommé aussi Osias) devenu lépreux en raison des fautes de son peuple -cité dans 2Rs 15, 1-6 & 2Chr 26- et un chef de guerre du temps de la révolte des Maccabées -cité dans 1Mac 5,55-62-. Les deux personnages sont postérieurs à l’époque de Salomon. 81 Andres Cassard, Nueva York 1867 (5e édition) 82 J-M Ragon, Collignon libraire-éditeur, Paris 1861. 83 Quel est l’usage du maillet ? Aucun rituel (connu de nous) n’y fait allusion.

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du milieu dans lequel il évolue, il épouse les données “scientistes“ de son époque et les tra-duits dans les séquences du rituel84. Ainsi, tandis que chaque symbole ou phrase symbolique est commentée dans le sens “à la mode “, une planche d’instruction présentant le degré en ces sens historiques, astronomiques et moraux clôt le rituel. Avant d’examiner ces “nouveautés“, et à la décharge des rénovateurs du rituel de l’époque, il faut tout de même leur rendre hommage d’avoir su résister si long-temps avant de souscrire aux thèses publiées en 1794 par Dupuis dans son livre sur « L’origine de tous les cultes »85. Car depuis cette date, toute interprétation symbolique s’est peu à peu alignée sur la clef astronomique, tout comme elle a tendance aujourd’hui à s’aligner sur la clef psychanalytique. Au niveau de la forme, nous pouvons relever de nombreuses innovations : • Le Maître des Cérémonies s’appelle désormais Intendant des Cérémonies et les Frères en-trent en Loge par la marche du grade : « quatre pas directs représentant en nombre les solsti-ces et equinoxes de la première année de l’humanité ». Mais le mémorandum du grade, situé en fin de rituel, précise « Marche : Pas ! ou quatre pas directs ou celle de Maître ». • Le Trois Fois Puissant fait procéder à la couverture de la Loge :

« F∴ Insp∴ où sommes nous ? - T∴ F∴ P∴ Dans le Saint des Saints. - Quels soins devez vous prendre ? - Celui d’examiner si tous ceux qui s’y trouvent font bien partie de la Tribu de Levi, celui de vérifier si l’Etat de la cloison comporte sécurité. »

• L’age est de « neuf ans accomplis », représentant neuf espaces de temps qui sont : « les 3 de l’App∴, les 2 du comp∴ les 3 du M∴ et un nouvel espace, celui du lévite, espace qui corres-pond à la marche apparente du Soleil alors qu’il recommence une course ascendante vers l’équinoxe du printemps ». Le mémorandum en fin de rituel diffère quelque peu : « Age : trois fois vingt ans86 accomplis ou neuf années » • Le signe, la batterie du grade et l’acclamation écossaise “Houzzai, Houzzai, Houzzai“ sont toujours présentes à la fin de l’ouverture et de la clôture des travaux. • Le mot de passe donné par le T∴F∴P∴ au récipiendaire devient pour la première fois dans un rituel français “Ziza“, mais le mémorandum du grade dit le contraire :

«Mot de Passe : en faisant le signe le Tuileur dit Zi, vous rendez le signe et répondez Zon. Zizon est le mot de Passe. »

• L’obligation est prêtée en position debout, un flambeau à la main (sans plus de précision). Au niveau du fond, chaque série de question-réponse est suivie d’un commentaire plus ou moins développé. - Certaines apportent une simple réflexion sur le sujet :

84 Cette constatation est également valable pour les rituels des degrés symboliques du GODF (rituel Murat) mais aussi, quoique dans une moindre mesure, du SCDF (rituel 1877) 85 Et d’avoir conservé ce que le GODF avait supprimé en 1857, l’obligation de travailler à la Gloire du G∴A∴D∴L’U∴. 86 Le mot “sept“ a été omis. Oubli du « copieur » du rituel ?

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« Le T∴F∴P∴ - Qu’entendez-vous par ces paroles : j’ai passé de l’Equerre au com-pas ? Le F∴ Insp∴ - J’entends qu’après m’être livré durant les trois premiers degrés à l’étude de l’angle droit à l’aide de l’Equerre, je suis venu dans la quatrième étudier le cercle à l’aide du Compas. » « Qu’entendez-vous par là ? » (l’heure d’ouverture des travaux) : « Que le soleil, dont la course descendante en sa marche apparente avait plongé l’humanité dans l’inquiétude et la tristesse, reprend sa course ascendante et renouvel-le les espérances dont il avait réjoui l’homme au cours de sa première révolution. »

- D’autres un sens symbolique totalement nouveau :

« …ce laurier (l’olivier ne figure plus dans la confection de la couronne) placé sur vo-tre tête comme signe de mérite et comme gage de paix symbolise le triomphe du savoir sur l’ignorance » « Le bleu de votre cordon a pour but de vous représenter le ciel, le blanc de votre ta-blier de vous représenter la pureté des sentiments du R∴ M∴ … »

- D’autres encore cumulent les deux :

« Que signifie l’œil ouvert brodé sur le tablier du grade ? - Il signifie que les M∴M∴ Secrets ne doivent pas plus cesser de veiller et de repous-ser la lumière intellectuelle parmi les maçons que le Soleil qui est l’œil de la nature ne cesse de veiller et d’éclairer physiquement le Monde ; qu’en d’autres termes, les suc-cesseurs d’Hiram doivent aider leurs chefs à faire triompher dans le Temple le Savoir sur l’Ignorance, comme les astres aident le Soleil dans l’espace à faire triompher la lumière sur les ténèbres. - Ne signifie-t-il rien de plus ? - Il signifie qu’au règne de la petite lumière va succéder celui de la Grande Lumière, qu’aux Ten∴ de la commencent à succéder les trav∴ du Chap∴ sans que la pen-sée qui y préside soit différente mais seulement plus développée afin qu’en s’élevant, elle éclaire comme le soleil a mesure qu’il s’élève un plus grand nombre d’hommes et leur inspire d’avantage le sentiment du juste et l’amour de la vérité. »

∆ ∆ La même année paraît à Londres, Edimbourg et Glasgow un opuscule de J. T. Loth devenu célèbre en raison des illustra-tions commentant chacun des trente trois degrés décrits : « The ancient and accepted Scottish Rite ; illustrations of the em-blems of the thirthy-three degrees with a short description of each » ; un travail patronné par le Suprême Conseil d’Écosse. Si la description du 4e degré n’apporte aucun élément nouveau (sinon que le tablier n’est pas encore conforme aux décisions du Convent de Lausanne), l’illustration qui l’accompagne, est une bonne représentation des symboles du grade. Elle nous permet en outre de constater, par leur présence sur le blason (tables de la loi, chandelier, lettre iod dans le triangle) que le SC d’Écosse était resté fidèle à l’esprit des rituels tradi-tionnels.

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∆ ∆ Face aux divergences de pratiques entre les divers Suprêmes Conseils, le Convent de Lau-sanne réunit sur l’initiative du Suprême Conseil de France tenta d’imposer un semblant d’ordre. C’est ainsi que dans sa cinquième séance, le 13 septembre 1875 (séance mémorable en ce qu’elle adopta également la ”Déclaration de Principes de la Maçonnerie écossaise”), le Convent « décide de ne fixer d’une manière formelle que les signes, mots, attouchements et acclamations de chaque degré, afin de rendre uniformes les moyens à l’aide desquels les ma-çons écossais se reconnaissent dans le monde entier. Le soin de régler par des décrets spé-ciaux les questions de forme, les points de détail, est laissé aux différents Suprêmes Conseils agissant chacun dans sa juridiction. »87 Un tuileur étant édité à cet effet, nous y trouvons, momentanément fixés : • La décoration de la Loge qui représente le Saint des Saints ; • Les titres des Officiers : le Vénérable se nomme Trois Fois Puissant ; l’unique Surveillant est appelé Inspecteur. • Le signe dit du silence est de « mettre sur la bouche l’index et le médius de la main droi-te » ; sa réponse est de « mettre également sur la bouche les deux premiers doigts de la main gauche ». • Ni l’attouchement, ni la batterie, ni l’âge, ni les mots sacrés, ni les décors ne changent par rapport aux errements précédents. Et, malgré tous les dénigrements des tuileurs ”Delaulnaye” ou ”Vuillaume”, le mot de passe reste ce qu’il était : ZIZON ! 4. Les rituels « imprimés ». 1898. Le Suprême Conseil de France édite le premier rituel imprimé à l’intention des Loges de Per-fection travaillant du quatrième au quatorzième degré. Ne comportant ni cérémonie de récep-tion ni instruction du grade, il n’était donc pas pratiqué en tant que tel, ou tout au moins n’était pas usité pour les réceptions, celles-ci se faisant directement au quatorzième degré. Nous y apprenons toutefois : • Que le contre signe est abandonné au profit du seul signe effectué par tous les Frères avec les deux doigts de la main droite. • Que Salomon a un maillet noir en guise de sceptre et que son cordon est désormais porté en sautoir.88 Ce court rituel fait l’objet d’une modification partielle89 entre 1907 (date de l’attribution de l’exemplaire que nous avons entre nos mains) et 1922 qui : • Change le titre du Président selon les prescriptions du tuileur du Congrès de Lausanne, le “Trois fois Puissant“ devient “Trois Fois puissant Maître“ ; • Rétablit l’âge normal du grade : « Trois fois 27 ans accomplis » ; • Introduit la circulation du tronc et du sac des propositions ce qui prouve que le degré était alors, ou pouvait être, pratiqué seul ; • Voit l’apparition d’un rajout à l’ouverture des travaux. À la question d’ordre : « Êtes-vous Maître Secret ? », il est répondu : 87 Compte-rendu des travaux du Convent des Suprêmes Conseils du Rite Écossais Ancien et Accepté réunis à Lausanne (Suisse) en septembre 1875. Publié par les soins du suprême Conseil de Suisse. 88 C’est du moins le premier document qui en fait mention ; le rituel précédent (c.1870) étant quasiment muet sur la décoration de la Loge et les décors des Officiers. 89 Malheureusement les bandeaux collés sur le texte original rendent ce dernier illisible.

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« Je m’en glorifie, j’ai été reçu sous les oliviers et les lauriers, en passant de l’équerre au compas, j’ai vu le tombeau… »

ainsi qu’un dialogue totalement inédit à la clôture. Ceux-ci s’étaient toujours terminés sur la question : « Que nous reste-t-il à faire ? » à laquelle l’Inspecteur répondait par : « Pratiquer la vertu, fuir le vice et demeurer en silence », celle ci est remplacée par :

« - Que vous a-t-on appris ? - À garder les secrets, être obéissant et demeurer fidèle. »

192290. Si cette nouvelle édition du rituel du quatrième degré ne présente aucune nouveauté dans l’ouverture, la fermeture de la Loge ou l’instruction (nous y apprenons tout de même que Ziza signifie ”resplendeurs”), elle marque un tournant dans la pratique de la cérémonie de récep-tion. Introduisant la notion de “Devoir“91, le nouveau rituel renouvelle, presque entièrement, la cérémonie de réception traditionnelle. : -le tuilage de l’impétrant qui était autrefois simplement mentionné et effectué dans les parvis, fait l’objet de nombreux dialogues en Loge entre le T∴F∴P∴M∴ l’expert et le maître des Cérémonies qui assure la Loge de la qualité du futur Maître Secret en déclarant :

« Revêtu des décors de V∴M∴, je me suis assis sur les Col∴ de la L∴ des trois pre-miers degrés à laquelle il appartient. J’ai constaté son assiduité aux Trav∴ ; j’ai été témoin du soin paternel avec lequel il instruisait les apprentis en les débarrassant des superstitions, des préjugés et des erreurs qu’ils avaient apportés du monde profane. Je l’ai entendu donner des conseils de F∴ aîné à des Com∴ pour les préparer à devenir de bons MM∴ Maç∴. Enfin, j’ai assisté aux communications qu’il a faites de mor-ceaux d’Arch∴ dont il était l’auteur, et aux discussions auxquelles il a pris part au su-jet de morc∴ d’Arc∴ préparés par d’autres VV∴ MM∴. J’ai été frappé de l’esprit fraternel qu’il montrait en critiquant les Trav∴ d’Autrui et en répondant à la critique de ses propres travaux. Cela m’a fait penser qu’il pourrait s’instruire d’avantage, pour son plus grand bien et celui de la Maçon∴ entière. Je me suis décidé alors à vous le proposer, afin qu’il lui soit conféré le Gr∴ de M∴S∴. »

L’impétrant, la tête recouverte du bandeau symbolique transparent se voit appliqué, par le Maître des Cérémonies, le sceau du secret sur les lèvres « pour clore symboliquement la bou-che du V∴M∴ néophyte ». Il effectue alors quatre voyages symboliques une corde au cou (la corde avait disparu avec le rituel de c.1870) au cours desquels, lorsqu’il passe à l’Orient, le T∴F∴P∴M∴ prononce les quatre sentences symboliques que nous connaissons encore aujourd’hui (même si leur énoncé à quelque peu changé) : - « … tu ne te forgeras point d’idoles humaines… » - « … n’accorde de confiance aveugle à n’importe quel homme… » - « …Quelque admiration que t’inspire le spectacle de l’univers… » - « …ce que la maç∴ te demande, c’est d’aimer la justice, la révérer… »

90 Rituel réédité en 1932 en copie conforme. 91 Cf. l’étude de Patrick Chéné in Ordo ab Chao n°42 (deuxième semestre 2000) et spécialement pages 31 à 34.

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Le T∴F∴P∴M∴ apprenant ensuite, par l’entremise du Maître des Cérémonies que celui qui voyage n’est autre qu’ « un Ven∴ M∴ qui cherche la Parole Perdue », des voix s’élèvent : - A l’Orient : « Malheur à ceux qui aspirent à ce dont ils sont indignes ! » - Au Nord : « Malheur à ceux qui assument une charge qu’ils ne peuvent pas porter ! » - Au Midi : « Malheur à ceux qui ensuite acceptent légèrement des devoirs et qui ensuite,

les négligent ! » La “Maxime du Taciturne92“ (sans que soit révélé le nom -ni le surnom- de son auteur) est alors prononcée par le T∴F∴P∴M∴, et le néophyte conduit à l’autel où le Maître des Céré-monies lui met un flambeau en main gauche. De nouvelles sentences sur le devoir sont alors prononcées par les mêmes voix que précé-demment : - A l’Orient : « Le Devoir est pour nous aussi inflexible que la Fatalité ! » - Au Nord : « En santé ou en maladie, en prospérité ou en adversité, le Devoir est pour

nous aussi exigeant que la Nécessité ! » - Au Midi : « Il [le devoir] s’éveille avec nous le matin et prend place sous notre oreiller la

nuit. Dans le tumulte de la cité, dans la solitude du désert, le Devoir est avec nous tou-jours, impératif comme la Destinée ! »

Le corps incliné, la main gauche (tenant la lumière) placée sur la Constitution93 et la Clef et les deux premiers doigts de la main droite (c’est-à-dire en faisant le “signe du Silence“) sur le cœur, le néophyte prononce son serment (dont le fond ne change toujours pas). La corde lui est ensuite retirée et le T∴F∴P∴M∴ étendant le Glaive sur la tête du néophyte, le reçoit et institue l’un des Maîtres Secret de la Loge. Il le couronne ensuite d’une « guirlande de laurier et d’olivier, emblème de victoire et de triomphe » et l’investi du cordon, du tablier et de la clef d’ivoire « symbole de la discrétion » avant de le faire reconnaître par la Loge. 1950. La tourmente de la guerre passée, les Ateliers du suprême Conseil reprennent leurs travaux. Un nouveau rituel est imprimé dont les rituels d’ouverture et de fermeture ne diffèrent pas ce ceux de 1922 ou 1932. La cérémonie réception est à la fois raccourcie en quantité et rallon-gée d’éléments nouveaux. Habillé en Maître, la tête recouverte d’un bandeau transparent sur lequel, au milieu, est fixée une petite équerre d’argent, le néophyte, après avoir été tuilé dans les parvis par le Maître des cérémonies, est introduit en Loge. Il est alors réexaminé par l’Expert, puis l’Orateur lui fait lecture des “enseignements préparatoires“ « qui vous ont été donnés et que votre intelligence a dû vous faire comprendre » :

92 « Il n’est pas besoin d’espérer pour combattre ni de réussir pour persévérer. » Attribué à Guillaume de Nas-sau, 1533-1584 93 Ce qui implique, a contrario, que la Bible n’était pas présente, mais que la clef était déjà sur, ou à coté, du livre sur lequel était prononcé le serment. Quand la Bible a-t-elle été remplacée par les Constitutions ? Le dernier rituel à la mentionner expressément est celui de Dalcho, mais probablement faisait-elle partie des “meubles “ fixes de la Loge jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle. Rappelons-nous que la “suppression“ du G∴A∴D∴L’U∴ au GODF date de 1857 et que l’ambiance scientiste qui prévalait alors n’épargnait pas les Ateliers du SCDF.

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« La franc-Maçonnerie est un Temple ouvert à tous les bons sentiments, à toutes les nobles pensées, à toutes les aspirations de l’homme ; Elle est la sentinelle avancée du progrès et de la civilisation. Mais, pour rendre son enseignement plus efficace, elle l’a enveloppé de symboles et d’emblèmes et l’a divisée par classes ou degré, afin de mieux observer l’intelligence de ses adeptes et de ne leur donner qu’une instruction proportionnée à leurs forces. Reconnaissant tout d’abord la nécessité d’enseigner à ses adeptes l’histoire tout entiè-re de l’humanité, -non au point de vue des faits, mais au point de vue de l’influence de ses croyances sur son développement intellectuel et moral, elle a cherché un moyen simple et pratique qui, sans exiger de longues et laborieuses études, pût les initier graduellement aux connaissances qu’il leur est nécessaire d’acquérir. Né et vivant au milieu de peuples dont les conceptions religieuses avaient leur source dans les traditions bibliques, elle a puisé tous ses symboles, tous ses mythes, toutes ses premières légendes dans les livres hébraïques. Partant de l’affirmation d’un Dieu unique, qu’elle a nommé le Grand Architecte de l’Univers, elle a, sans jamais dévier de sa route, et en suivant l’esprit humain dans toutes ses manifestations religieuses, passé du judaïsme à toutes les sectes qui en déri-vent, pour aboutir à la philosophie pure, c’est-à-dire à la Raison. »

Suit un résumé de la philosophie des grades d’Apprenti, Compagnon et Maître, après quoi commence réellement la réception qui ne diffère que par sa concision des rituels précédents. 1956. Un nouveau rituel est imprimé. L’ouverture et la clôture demeurent inchangées. Seules «inno-vations, dans la cérémonie de réception, la longue tirade sur les “enseignements préparatoi-res“ ainsi que sur les trois premiers degrés est supprimée. …Mais elle est remplacée par le retour de celle prononcée par le Maître des Cérémonies assurant la Loge de la qualité du néo-phyte : « Revêtu des décors de V∴M∴, je me suis assis sur les Col∴ de la L∴ des trois pre-miers degrés… » La présence de la Bible en Loge a été rendue obligatoire par le convent de la Grande Loge de France en 1953. pourtant, trois ans plus tard, le serment est toujours prononcé la main « sur la Constitution et la Clef », bévue ou oubli, toujours est-il qu’un rajout manuscrit rétablit l’ordre en indiquant, en marge du texte de l’obligation :”Serment sur la Bible”. 1978. Ce nouveau rituel apporte de nombreuses modifications : - Alors que depuis 1764 « il n’y a qu’un seul surveillant qui se nomme adoniram », le présent rituel en rajoute un second (dont le rôle ne semble être que celui d’un effet d’alignement et d’harmonie sur tous les autres degrés du Rite)94. - Les diverses sentences lues lors de l’initiation au degré ne le sont plus par des voix anony-mes, mais par les Frères Orateur, Hospitalier et Trésorier. - La lecture de la colonne gravée des précédents travaux et son adoption, les excuses adres-sées par les frères absents ainsi que la lecture du courrier sont incluses dans le rituel. 94 Il a toutefois un rôle d’instruction auprès des nouveaux Maîtres Secrets, mais en cela aussi l’on peut voir un alignement avec les pratiques des loges bleues.

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- Et surtout, la présence de la Bible, ouverte après la déclaration d’ouverture des travaux et avant la lecture de la colonne gravée, est désormais officielle et obligatoire :

« Capitaine des Gardes95, veuillez ouvrir le Volume de la Loi Sacrée à la première page du Livre des Rois »96

Autre innovation, le rituel précise la décoration du Temple ou « Saint des Saints » : - « Derrière le trône, à l’Orient, un grand cartouche circulaire, entouré d’un cercle jaune d’or. Sur le fond jaune pâle, se déta-che, en rouge, le triangle sacré portant en son centre l’étoile flamboyante, en bleu. »

- « Devant le plateau du Président, l’autel triangulaire des Serments. » - « Sur les plateaux du Président, du Frère Inspecteur et du 2ème Surveillant, un flambeau à

trois branches. » - « Une étoile est allumée en permanence sur le plateau du Président. » Il indique aussi les décors de tous les membres de l’Atelier. - C’est ainsi que nous apprenons officiellement que tous les frères portent des gants blancs, que le T∴F∴P∴M∴ porte désormais un tablier du 14e degré ainsi que les officiers et tous les frères membres de la Loge possédant ce degré. De même, nous apprenons que, hormis le ”Président” de l’Atelier, tous les autres officiers portent le sautoir du 14e degré portant l’attribut de leur fonction97. - Salomon a perdu son sceptre98 et son manteau noir doublé d’hermine. Il portait ce dernier, au moins dans les rituels, depuis 1764. 1987. Ce nouveau rituel comporte quelques changements. ∆∆ Dans l’ouverture des travaux : - Un nouveau dialogue apparaît :

« - Frère premier Inspecteur, que cherchez-vous ? -La Vérité et la Parole perdue. »

phrase qui était employée depuis 1922 au cours de la cérémonie de réception. - La formule d’ouverture consacre désormais les travaux à la gloire du G∴A∴D∴L’U∴ :

« À la Gloire du Grand Architecte de l’Univers, Au nom et sous les auspices du Su-prême Conseil de France, en vertu des pouvoirs dont je suis investi… »

∆∆ Dans la cérémonie d’initiation : - Le sceau du secret disparaît matériellement des décors du Roi Salomon. Le sceptre rem-plira désormais son usage, et comme le T∴F∴P∴M∴ ne peut pas confier l’insigne de son

95 C’est la première fois que ce titre est employé en Loge de perfection pour désigner l’Expert. 96 Le Livre des rois, (avec celui des Chroniques) est celui où est relatée la construction du Temple de Jérusalem. 97 Aucune raison n’en est donné avant le mémento de 2000. 98 De 1764 (rituel St Domingue) à 1961 (Manuel de l’initié) Salomon a un sceptre ; en 1922 le maillet tient guise de sceptre ; en 1978, le terme même de “sceptre“ sera retiré des attributs de Salomon, mais en 1987, il réapparaît, tandis que disparaît le sceau du secret !

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pouvoir au Maître des Cérémonies, c’est lui qui descend clore les lèvres des futurs maîtres Secrets. - La position de l’impétrant pour sa prestation de serment continue d’évoluer99. Il est de-bout, quitte la lumière qu’il tenait en main gauche depuis 1922 et permute la position de ses mains sur le Volume de la Loi Sacrée.

« Vénérables Maîtres, (leur demande le T∴F∴P∴M∴) posez votre main droite dé-gantée sur le Volume de la Loi Sacrée, puis votre main gauche sur le cœur. »

- Son serment qui jusqu’alors était prononcé « En présence du Grand Architecte de l’Univers et des frères ici assemblés… » devient « A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers, en présence des frères ici assemblés… » - Le T∴F∴P∴M∴ « crée, institue et reçois » le nouveau Maître Secret alors qu’il se contentait jusqu’alors de le « recevoir et instituer ». - Le Capitaine des Gardes disparaît et l’on retrouve le Frère Expert. - Ziza retrouve en partie sa définition historique : elle signifie désormais « resplendeur »100 ou « balustrade ». - Le cartouche du grade est rétabli sur le modèle de 1956 et sa description est précisée :

« Derrière le trône, à l’Orient, bien en vue, est un grand cer-cle dans lequel est placé le triangle sacré, pointe en haut, le tout tracé en noir sur fond blanc, portant en son centre l’étoile flamboyante. »

Hélas pour les dessinateurs de cette belle iconographie, les hachures du cartouche correspondent, en héraldique à des émaux bien spécifi-ques. L’or est représenté par des points, le gueules par des hachures verticales et l’azur par des hachures horizontales101. En réalité le des-sin de 1987 (ci contre) n’est pas conforme à sa description et reprend tout simplement celui, en couleur, de 1978…

Il apporte aussi, par le changement d’un seul mot, une petite préposition, un grand boulever-sement. Après deux siècles passés102 à répondre de la même façon à la même question :

Q. « En quel lieu avez-vous été reçu ? » ou « Où sommes-nous ? » R. « Dans le Saint des Saints »

Le rituel de 1987 introduit une nouvelle localisation : Q. « Frère Inspecteur, en quel lieu sommes-nous ? R. « Trois Fois Puissant Maître, nous sommes dans le temple du Roi Salomon devant le Saint des saints. »

1998. 99 Rappelons qu’il était à genoux de 1764 à c.1820, debout vers 1870 et incliné de 1922 à 1987. 100 Au singulier. 101 En héraldique, couleur se dit émail, rouge gueules et bleu azur. 102 La première question (et réponse) est celle du Ms de St Domingue de 1764

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Est édité à cette date le « Mémento pour l’installation et la décoration des Temples du 4ème au 14ème degré du R∴E∴A∴A∴». Illustré, pour chaque degré, d’un plan de Loge avec disposition de tous les décors nécessaires ainsi que de photos des principaux décors mu-raux, ce mémento apporte quelques précisions : Une lumière éternelle (noire) est placée sur le plateau du TFPM ainsi que, pour les initiations, une clef d’ivoire et un sceau du secret représenté selon l’iconographie du document par une main à l’index tendu. 2000. Ce nouveau rituel n’apporte que peu de modifications. Quelques ajouts de précision. Ainsi, à l’ouverture des travaux, lors de la reconnaissance de la qualité de Maître Secret par le frère inspecteur le TFPM fait-il mettre les frères « Debout, face à l’Orient » alors qu’auparavant, ils étaient seulement « Debout ». Autre petite modification, les termes de l’obligation qui avaient inclus, en 1987, une clause d’obéissance au règlement intérieur de la Loge de Perfection, ont été supprimé. La même année est édité un mémento intitulé « Décors et Bijoux des degrés pratiqués dans la Juridiction du Suprême Conseil de France ». Les décors du 4e degré sont précisés avec soin et, signe de temps modernes, le “code Pantone” de chaque couleur est même indiqué. Ces décors reprennent ceux décrits par les derniers rituels en vigueur, et une précision est même apportée pour les sautoirs des officiers de la Loge de Maître Secret :

« En l’absence de sources historiques décisives et par référence à l’usage, les attributs des Officiers de l’Atelier de Perfection sont identiques à ceux des Officiers remplissant les mêmes fonctions dans la Loge symbolique. »

En conclusion, que retenir ce rapide survol des rituels que le génie de nos prédécesseurs nous a laissé ? L’étude de la philosophie de ses diverses variations n’est pas de notre propos. Pour-tant, nous pouvons la deviner en parcourant les grandes phases ayant abouti au rituel que nous connaissons aujourd’hui dans notre Juridiction. 1ère phase, les balbutiements. Des origines à 1760 environ, nous y apprenons le substrat « historique » du grade. Hiram est mort, les frères le pleurent, les premiers symboles du grade sont mis en place : le mot « Gizon », la clef, l’ébauche du cartouche, la première question d’ordre « j’ai passé de l’Equerre au compas, j’ay vu le tombeau du Respble Gd∴ me∴ hiram abif, et j’ay joint mes larmes avec celles de mes ff∴ ». Pour fixer cette phase dans le temps, nous pouvons dire qu’elle se termine avec le départ d’Etienne Morin pour les Amériques. 2e phase, la structure. Avec le rituel de St Domingue (1764), le grade est structuré pour près de cent ans. Le rituel d’ouverture et de fermeture des travaux est désormais fixé dans ces grandes lignes. Les décors sont fixés, les principaux schèmes symboliques présents : question d’ordre (« êtes-vous Maî-tre secret », réponse « oui je le suis et en fait gloire »), heure d’ouverture, de clôture, batterie, lieu de l’action : le Saint des Saints.... La cérémonie de réception est codifiée : un tuilage, une mise à genoux et un serment, une consécration par l’imposition d’une couronne de laurier et d’olivier. La remise d’un nouveau tablier et d’un nouveau cordon auquel est suspendue une

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clef d’ivoire. La reconnaissance enfin de la qualité de Lévite pour le nouvel impétrant et une instruction basée sur la connaissance des décors du Saint des Saints. Cette structure perdurera, selon les documents connus, jusque dans les années 1820 et vrai-semblablement jusque dans les années positivistes.103 3e phase, le scientisme. Le rejet de tout ce qui, de près ou de loin, peut rappeler une forme religieuse entraîne un rituel, aux alentours des années 1870, où toute explication relève d’un scientisme outrancier voit la production d’un rituel réduit « au strict nécessaire ». Les arcanes du grade ne sont pas touchés, du moins dans leur énoncé, mais leurs commentaires leur enlè-vent toute portée initiatique. Ce rituel, unique dans l’histoire du 4e degré du Rite Écossais, semble n’avoir eu (heureuse-ment) que peu d’influence et n’avoir pas su, en raison même de son caractère anti-traditionnel, résister aux “outrages du temps“. 4e phase, le Devoir. Depuis le début du siècle, le grade de maître Secret est peu à peu pratiqué. La Grande Guerre et les questions existentielles qu’elle n’a pas manquées de développer ont à leur tour leurs répercutions sur le rituel. Si les phases d’ouverture et de fermeture restent stables, il n’en est pas de même de la cérémonie d‘initiation. Tout en rejetant les innovations scientistes du siècle précédent, le rituel de 1922 ne réintroduit pas les notions traditionnelles. Peut-être les juge-t-il trop empreintes de religiosité ? Une nouvelle notion, totalement inédite en Franc-maçonnerie (probablement parce qu’auparavant elle était tout simplement naturelle) fait son apparition dans la structure de base : celle du Devoir. Elle renouvelle quasiment tout le rituel de la céré-monie de réception. Aucun des éléments d’avant 1820 n’est conservé à l’exception de l’imposition, somme toute assez laïque, de la couronne de laurier et d’olivier et de la remise des décors au nouveau Maître Secret. Cette phase perdure encore aujourd’hui et aucune modification ni aucun état d’esprit nouveau n’est venu la troubler. Au point de vue qui l’anime, nul doute que l’ambiance religieuse dans laquelle baignait la société au XVIIIème siècle, a grandement influé sur la rédaction de ces rituels. Petit à petit, parfois brusquement comme dans la seconde moitié du XIXème siècle, parfois plus insidieu-sement tout au long de son histoire, le rituel de Maître Secret s’est transformé pour être celui que nous connaissons et pratiquons aujourd’hui. Il a suivi, c’est certain, l’évolution de la société, en évoluant lui-même et en s’adaptant à la culture du pays qui le porte. Prenons un exemple de cette transformation sur lequel nous nous garderons de porter un quelconque jugement de valeur, ce sujet étant hors de propos de notre étude. Examinons un élément apparemment « neutre » du rituel : la position de l’impétrant lors de sa prestation de serment ;

De 1764 à 1820, il est à genoux au pied de l’Autel. En 1870, il est debout, un flambeau dans la main. En 1922, il est incliné, sa main gauche tenant une lumière est placée sur la Constitu-tion, la main droite sur le cœur, au signe du silence. En 1978 sa position n’est pas expressément mentionnée, mais il est debout, sa main gauche tenant la lumière est sur le Volume de la Loi sacrée, sa main droite sur le cœur au signe du silence.

103 Auguste Comte (1798-1857), fondateur du positivisme a vulgarisé ses conceptions divulguées dans son “Cours de philosophie positiviste“ de 1830 à 1842.

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Depuis 1987, il est toujours debout, sa main droite dégantée sur le volume de la Loi Sacrée et la main gauche sur le cœur.

Nous voyons que la forme du rituel s’identifiant bien à l’époque qu’elle traverse (religieuse jusqu’en 1850 environ, plus rationnelle ensuite), l’impétrant passe de la station de soumission (à genoux) à celle d’acceptation (debout) sans que le fond du message (le serment) soit chan-gé104 . Mais quelles que soient (ou quelles qu’aient pu être) les tendances son évolution, le rituel, parce qu’il n’est pas une fin en soi mais un moyen, nous permet de progresser sur notre che-min initiatique. Un chemin nécessairement différent de celui du maçon du XVIIIème comme de celui du XXIIème siécle. Évoluant comme un être vivant selon ses propres besoins, mais aussi selon les nôtres, il permet ainsi de progresser en adaptant son message à ceux qui le pra-tiquent tout en gardant son essence pour ne pas se trahir lui-même.

104 Le changement de position des mains, en 1987, intervertissant les cotés actifs et passifs ne fait que parfaire cette évolution.

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Documents et rituels consultés. Rituels « divers »

• Rituel 4e degré Collection Bonseigneur C. 1750/60 Kloss • Rituel de Maître Elu Parfait ou Grand Ecossais C. 1750 (Latomia n°101) • Rituel de Maître Secret c.1765, Collection Claude Gagne • Rituel 4e degré « Cayers maçonniques » C. 1765 BN d’Australie (Latomia n°175-12) • Rituel 4e degré « St Domingue » 1764 BN Fonds Baylot FM415 • Rituel 4e degré « Morin Ritual » 1769 • Rituels Franchen 1783 • Rituel de Grand Élu de Londres C. 1785 (Latomia n°7) • Rituel 4e degré « The original and complete Rituals, 4e-33e of the first Supreme Counsil, 33e at Charleston, South Carolina -1801 • Rituel 4e degré REAA - GODF 1805 KLOSS XXVII • Rituel 4e degré REAA - Ms Pyron 1811 • Tuileur du 4e degré Ms C. Gagne 1810/1820 • Ms 40 Collection SDCF C. 1820 • Ms 216 Collection SCDF C. 1820 • MS 709 Collection SCDF C. 1820 • Rituel 4e degré Collection particulière c.1840/1850

Rituels du SCDF • Rituel c. 1870 “ Entre la modification de 1863 et le rituel imprimé de 1998 ”. • Rituel 1898 : 1er rituel imprimé avec seulement ouverture et fermeture au du 4e degré • Rituel 1922 : 1er rituel imprimé avec la cérémonie d’initiation du 4e degré. • Rituel 1932 • Rituel 1950 • Rituel 1956 • Rituel 1978 • Rituel 1987 • Rituel 2000

Autres Documents : Langue française

• 1770, tableau de Loge (collection complète de tous les tableaux des différents grades et loges de la Maçonnerie - collection GLDF) • Documents SHARP • Thuileur de DELAULNAYE édition 1820

• Tuileur de VUILLAUME édition 1830 • Tuileur Général de la Franc-maçonnerie par J-M Ragon Paris (1861) • Tuileur du convent de Lausanne 1875 Langue espagnole •Liturgias de los 33 grados de la Verdadera Mazoneria Brownsville1866 •Liturgias de los 33 grados de la Verdadera Mazoneria Nueva Orleans 1859 •Manual de la Masoneria por Andres Cassard Neuva York 1867 Langue anglaise • BERNARD Elder, David « Light on Masonry » Utica (USA) 1829 •LOTH « The ancient and Accepted Scottish Rite » Londres 1875 •BRIDGE « The intermediate degrees » Londres 1977