Voyage d’études des Elèves-sommeliers en Terres Bordelaise et Cognaçaise.

Mardi 12 juin

Château d'Yquem : La référence mondiale pour les vins liquoreux du

Sauternais. Propriété du groupe LVMH, ce domaine est dirigé par Pierre Lurton (également gestionnaire du Château Cheval Blanc, Premier Grand Cru Classé A de Saint-Émilion et du Cheval des Andes en Argentine). Le vignoble compte aujourd'hui 189 ha, dont 102 exploités. Le prix de départ à la sortie du millésime se situe autour de 400 € la bouteille. Si le procédé d'élaboration des vins liquoreux, leur dégustation et les données générales du terroir du Sauternais sont largement connus des élèves-sommeliers, la visite a mis en évidence les spécificités du domaine et de ses vins dans plusieurs aspects : nature du sol, exposition propice au développement du Botrytis Cinerea (« un champignon qui transforme la mort en or » disait le Comte Alexandre de Lur Saluces,

une viticulture raisonnée et la recherche de la quintessence aromatique (un pied de vigne ne produit qu'une bouteille). La visite s’est poursuivie par une dégustation du millésime 2008 : si certains élèves ont déjà eu l'occasion en stage de découvrir Yquem, il s'agit pour une majorité d'une première rencontre avec le vin liquoreux le plus prestigieux du monde ! Dégustation enthousiasmante d'un grand vin dont le potentiel de garde apparaît nettement mais qui procure déjà du plaisir grâce à sa richesse, sa complexité et son équilibre subtil.

Point de départ du séjour, cette visite et dégustation d'exception (il y en aura d'autres) remettent les élèves sommeliers en contact avec un monde qu'ils ont connu en début d'année lors de leur stage « vendanges » chez nos partenaires-vignerons d'Anjou et de Touraine. Dès lors, les questions se sont mises à fuser, s'appuyant sur leurs propres expériences et consolidant leurs savoirs.

Château Closiot Il s’agit d’une entreprise familiale bien connue par les esthètes œnophiles, aujourd'hui gérée par Françoise et Bernard Sirot-Soizeau et Willy Imbert aux commandes du chai. Les vignes (8 ha en viticulture raisonnée), en appellation Sauternes et Barsac, sont enclavées dans une zone bien fréquentée : le domaine a pour voisins quelques grands noms du Sauternais tels le Château Guiraud et le Château Climens (Premiers Crus Classés des vins de Sauternes en 1855). Le choix s'est porté sur une production de 4 vins liquoreux d'appellation Barsac ou Sauternes et d'un vin blanc sec en appellation Graves. La visite des vignes et du chai met en avant les différences entre une grande maison de renommée internationale et un domaine à taille familiale : les dirigeants sont aussi des vignerons « de terrain », les moyens sont sans commune mesure avec ceux d'un grand nom, mais l'exigence et la passion du métier permettent d'élaborer des vins présents sur les grandes tables françaises et étrangères. En remontant du

chai, nous analysons les trois vins liquoreux du domaine : « Premières Brumes de Closiot », « Château Closiot » et le délicieux nectar « La Passion de Closiot ».

Château Loudenne Une chartreuse située en bordure de l'estuaire de la Gironde, aujourd'hui propriété de Marie-Claude et Jean-Paul Lagragette. Un vignoble de 132 ha situé en appellation Médoc. C'est dans cette demeure au calme et à la sérénité impressionnants (à l'image des propriétaires) que le groupe passe sa première soirée en terre bordelaise. Le repas servi à la table d'hôtes, gourmand et convivial, est accompagné des différentes cuvées du domaine :

Château Loudenne (cru bourgeois du Médoc), dégusté sur plusieurs millésimes.

Château Loudenne (Bordeaux blanc), l'occasion de découvrir les blancs médocains, moins connus que leurs voisins de Graves et de Pessac-Léognan et pourtant constituant une offre alternative tout à fait intéressante à ceux-ci.

Pink Loudenne (Bordeaux rosé), tout en légèreté (il ne s'agit pas d'un clairet), pour rappeler que Bordeaux sait aussi faire d'excellents vins rosés.

Rives de Loudenne (Médoc), le Second Vin du domaine, petit frère du Château Loudenne mais au caractère bien affirmé.

Hippocampus (Médoc Cru Bourgeois Supérieur), l'élite du domaine.

Mercredi 13 juin La route des châteaux du Médoc Du village de Saint-Estèphe à celui de Margaux, la route longe les grands domaines médocains. Si les noms des châteaux sont familiers aux élèves-sommeliers, c'est souvent sur une carte du vignoble et au travers des cours qu'ils les ont rencontrés (bien que leur stage en restaurant leur ait donné l'occasion de goûter de grandes références et pourquoi pas celles-ci). Apparait alors la variété des terroirs (nature des sols, expositions). Une route qui nous mènera à l'un des plus célèbres châteaux au monde...

Château Margaux Château Margaux est l'un des cinq Premiers Grands Crus Classés du Médoc en 1855. Il appartient aujourd'hui à Corinne Mentzelopoulos, fille d'André Mentzelopoulos, un homme d'affaires un peu aventurier (au sens noble du terme) qui a acheté Château Margaux en 1977 et a

mené toutes les actions à la vigne comme au chai qui ont relancé le domaine, aujourd'hui étendu sur 262 ha.

Tout comme celle d'Yquem, la visite de Château Margaux montre qu'une entreprise viticole peut être bien plus complexe dans son organisation que celles que les élèves-sommeliers ont fréquentées pendant leur stage « vendange ». Tous les corps de métiers nécessaires à la vie et au développement de l'entreprise sont gérés en interne : bien évidemment les métiers liés à la viticulture et à l'élaboration de vin, mais aussi Direction, Administration, Accueil, Marketing, Finances et Stratégies, Technique, Recherche et Développement.

Nous avons pu déguster deux vins issus du même millésime : Pavillon Rouge de Château Margaux 2008 (Margaux) : le

second vin rouge du domaine. Grand Vin de Château Margaux 2008 (Margaux Premier Grand

Cru Classé) : une dégustation qui laisse perplexe tant ce vin à peine né se présente pour l'instant timidement mais laisse entrevoir un devenir exceptionnel.

La Winery La Winery est un complexe de type « wine center » dédié non seulement aux crus bordelais mais également à tous les vins de France et du monde. L'occasion de découvrir en boutique une méthode de commercialisation basé sur la recherche du « signe oenologique » du consommateur : établissement du profil de consommation du client après dégustation, matérialisé par un logo qui servira de repère au moment de l'achat en boutique. Une nouvelle façon de classer les vins sur une carte au restaurant ?

Le caviar d'Aquitaine

L’estuaire de la Gironde a longtemps été l'hôte de populations d'esturgeons. L'arrivée d'immigrants russes au début du 20ème siècle a lancé la production de caviar en Aquitaine. Depuis, plusieurs élevages se sont développés en Aquitaine. La visite du Moulin de la Cassadotte a permis de découvrir le caviar sur toute la chaîne de production par le biais de la visite des bassins d'élevage et d'une vidéo : l'esturgeon (différentes variétés, mode de vie, élevage), la fabrication du caviar (prélèvement des œufs, lavage, salage, affinage, conditionnement).

Une dégustation a permis, pour la plupart d'entre nous, de découvrir ce produit, d'évoquer son mode de service, de le tester en accompagnement d'un vin blanc de la région et de faire des hypothèses sur d'autre accords possibles. Nous avons également pu comparer gustativement le caviar frais et le caviar affiné dont les notes plus affirmés ont séduits les membres du groupe. Si le caviar reste un produit de niche et peu présent sur les cartes de restaurant, sa découverte était importante pour des élèves-sommeliers, dont beaucoup iront travailler dans de grandes maisons, donc susceptibles de commercialiser des vins ou boissons appropriées à ce mets d'exception.

Château Bernateau Organisée par Florence Varaine (Comité Interprofessionnel des Vins de Saint-Emilion), partenaire historique de la mention sommellerie, la visite du Château Bernateau nous renvoie dans une entreprise viticole familiale. Le Château Bernateau et Tour Peyronneau produisent des vins rouges en appellation Saint-Emilion Grand Cru. Monsieur Lavau a repris en 2005 l'intégralité de la gestion de ces domaines familiaux et met en place de

nouvelles procédures de travail pour obtenir la certification « Agriculture Biologique » en 2014. Menée par Mr Lavau lui-même, la visite du chai a été particulièrement intéressante : de formation scientifique et oenologique, Mr Lavau est rentré très en profondeur et de façon pédagogique dans des champs de connaissances auxquels les élèves-sommeliers ont été initiés dans les domaines de la viticulture, de l'oenologie et des vinifications.

Les vins des deux châteaux ont été dégustés sur plusieurs millésimes, déclenchant chez de nombreux participants une vague d'achats, liée à la qualité des vins mais également à la qualité de l'accueil et au discours précis de Mr Lavau.

Dîner organisé par le Comité Interprofessionnel des Vins de Saint-Emilion

C'est dans un restaurant du village de Saint-Emilion, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, que le dîner a eu lieu. Une dégustation de vins de Saint-Emilion en Grand Cru et Grand Cru Classé ainsi que des vins issus des « satellites » de Saint-Emilion (Lussac et Puisseguin) a été réalisée autour d'un menu simple et de mets bien cuisinés. L'occasion de refixer les connaissances sur les terroirs du Libournais.

Jeudi 14 juin

Château la Perrière à Lussac Saint-Emilion Il s’agit d’un domaine d’environ 18 ha récemment racheté par Jean-Michel Sylvain, président de la tonnellerie française. Le terroir calcaire possède une matrice sablonneuse qui permet de facilement identifier les vins de Lussac par rapport à l’appellation Saint-Emilion. Les élèves ont donc pu déguster et apprécier des vins plus rapidement prêts à être consommés, après des élevages plus ou moins longs en fonction des

différentes cuvées. L’exploitation récente offre également une très belle visite autour de fûts de collection, cœur de métier du propriétaire des lieux.

Château de Villemaurine à Saint-Emilion Très belle visite d’un petit domaine de 7 ha situé en plein Saint-Emilion sur un sol exclusivement calcaire. Le site de production moderne a la particularité de posséder d’immenses caves souterraines dans une partie desquelles les élèves ont pu apprécier le spectacle son et lumière expliquant les origines de la ville de Saint-Emilion et son évolution au cours de l’histoire de France.

La visite du domaine s’est terminée par la dégustation de la cuvée principale du château 2008 en Saint-Emilion Grand Cru et du second vin : les Angelots de Villemaurine 2007.

Tonnellerie Allary à Archiac (Charentes-Maritime)

Grande découverte pour les élèves qui n’ont jamais pu apercevoir une fabrique de fûts et tonneaux. Cette visite très pédagogique retrace toutes les étapes de la confection depuis le choix du bois jusqu’à l’assemblage des douelles, le cerclage et le ponçage des barriques. La rencontre fut d’un grand intérêt pour les élèves qui ont pu comprendre l’intérêt du passage du vin « sous bois » et l’apport gustatif que cela représente. Ci-joint, une

photo de Katell qui s’essaye au montage des douelles sur un fût de 5 litres.

Vendredi 15 juin

Conférence au BNIC Nous avons été reçus par Monsieur David Boileau, Ambassadeur des Cognacs. La conférence a démarré par une explication généraliste du cognac face aux produits spiritueux analogues (armagnac et brandies divers), puis nous avons étayé la notion de crus et les particularités de la production avant de découvrir les principales caractéristiques du marché du cognac (réseaux de distribution, clientèles principales, évolution de marché). Après la théorie, une mise en pratique nous a fait comparer 5 cognacs (blanche, Réserve, 5, 10 et 15 ans d’âge). Les étudiants ont mis en évidence les caractéristiques visuelles, olfactives et gustatives de

chaque échantillon provenant de crus différents. D’autre part, ils ont pu découvrir l’effet de saponification

par l’ajout d’eau dans un cognac d’où un bon respect des règles de rectification pour abaisser correctement le taux d’alcool à 40% avant la commercialisation.

Distillerie Hennessy Il s’agit de la plus grande Maison de cognac. Cette distillerie d’origine irlandaise présente un beau parcours touristique recensant les grandes étapes de production du cognac. Entre les pieds de vigne, la vinification, la distillation, le vieillissement et l’assemblage des eaux-de-vie, toutes les phases clefs de l’élaboration du cognac ont été présentées visuellement aux élèves-sommeliers.

Distillerie Frapin Ce fut une vraie chance de pouvoir rencontrer Monsieur Patrice Piveteau, directeur général et Maître de Chais de la célèbre Maison Frapin. Cette distillerie cultive depuis plus de 20 générations l’excellence dans l’art de la distillation. En outre, le cognac « Multimillésime numéro 1 » a bénéficié du titre suprême de meilleur spiritueux du monde en 2008. Ce fut la première fois qu’une eau-de-vie non élaborée à partir de céréales comme les gins et whiskies, qui plus est française, gagne un tel concours.

Monsieur Piveteau nous a délivré la philosophie de cette grande Maison en nous faisant découvrir l’un des trois sites de production. Les élèves peuvent naviguer entre les différents chais en écoutant le discours avisé et pédagogique de notre amphitryon. Les lieux sont marqués par la torrula, ce champignon atypique qui noircit les murs sous l’effet de la « part des anges », évaporation naturelle de l’eau-de-vie vieillie en tonneaux de 350 litres. Nous retiendrons également que cette « perte »annuelle est estimée à environ 23 millions de bouteilles par an dans le cognaçais. La visite s’est terminée par une dégustation extrêmement rare d’une large et luxueuse gamme de cognacs Frapin. A titre indicatif, la Cuvée 1888 que nous avons eue la chance de découvrir date de la même année et est vendue au prix du millésime (1888 euros). Olivier Geslin et Marc Michaud – Professeurs de Sommellerie