Vous restez imperméable à la physique ? Parler … · (Physique des Particules Expérimentale)....

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1 http://www.futura-sciences.com/fr/print/doc/t/physique/d/voyage-au-coeur-de-la- matiere_176/c3/221/p1/ Voyage au coeur de la matière - 13/02/2003 Dossier réalisé par David Calvet chargé de Recherche au CNRS (Physique des Particules Expérimentale). Vous restez imperméable à la physique ? Parler d'atomes, de radio-activité, vous semble un autre monde ?! Alors ce dossier est fait pour vous : tous les rudiments de la physique, expliqués simplement. Cet ensemble de pages est destiné à explorer la structure de la matière en partant des atomes et en allant jusqu'aux particules fondamentales. 1/49 1 Repris du site http://www.futura-sciences.com/

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1http://www.futura-sciences.com/fr/print/doc/t/physique/d/voyage-au-coeur-de-la-

matiere_176/c3/221/p1/

Voyage au coeur de la matière - 13/02/2003

Dossier réalisé par David Calvet chargé de Recherche au CNRS (Physique des Particules Expérimentale).

Vous restez imperméable à la physique ? Parler d'atomes, de radio-activité, vous semble un autre monde ?! Alors ce dossier est fait pour vous : tous les rudiments de la physique, expliqués simplement. Cet ensemble de pages est destiné à explorer la structure de la matière en partant des atomes et en allant jusqu'aux particules fondamentales.

1/491 Repris du site http://www.futura-sciences.com/

1.1. De quoi est faite la matière ?

Si on prend un morceau de fer et qu'on le divise en morceaux de plus en plus petits, il arrivera un moment où il ne sera plus possible de le diviser en morceaux de fer. Ce plus petit morceau de fer possible est l'atome de fer. Un atome de fer peut être divisé mais les morceaux qui restent après la division ne sont plus du fer (on obtient un noyau et des électrons)...

Si on prend de l'eau et qu'on la divise en parties de plus en plus petites, il arrivera aussi un moment où il ne sera plus possible de la diviser en parties d'eau. La plus petite partie d'eau possible est la molécule d'eau. La molécule d'eau peut être divisée mais les morceaux qui restent après la division ne sont plus de l'eau : ce sont un atome d'oxygène et deux atomes d'hydrogène (la molécule d'eau est donc notée H2O)...

Ainsi, il est possible de faire de l'eau avec de l'oxygène et de l'hydrogène, au cours d'une réaction chimique. Par contre, il n'est pas possible de faire du fer par une réaction chimique (mais il est possible d'extraire du fer d'une molécule qui en contient).

Une molécule est donc un assemblage de plusieurs atomes. Certains corps, tels que l'eau, sont des corps composés, leur plus petite partie est une molécule, d'autres, comme le fer, sont des corps purs, leur plus petite partie est un atome. La chimie permet de faire des corps composés à partir de corps purs, mais pas de faire des corps purs à partir d'autres corps purs...

1.2. Un peu d'histoire...

Les grecs anciens, et en particulier Démocrite, avaient déjà imaginé que la matière devait être discrète et non continue, c'est à dire qu'elle ne peut pas être divisée indéfiniment. Ils avaient ainsi postulé l'existence de grains de matière indivisibles qu'ils appelèrent atomes (atomos en grec signifie insécable). Néanmoins, pendant des siècles, l'idée généralement admise était que toute matière pouvait être formée à partir de quatre éléments fondamentaux : l'eau, l'air, la terre et le feu... Les notions modernes d'éléments et d'atomes sont apparues plus tard avec les débuts de la chimie. La notion d'élément telle qu'elle est connue actuellement a été définie en 1661 par Robert Boyle. Ensuite, John Dalton en 1808 et Avogadro en 1811 élaborèrent la notion d'atome et de molécule afin d'expliquer les réactions chimiques, mais ce schéma ne fut adopté officiellement qu'en 1860. Il fallut attendre la fin du XIXème siècle pour que l'atome soit aussi étudié par les physiciens et pas seulement par les chimistes.

1.3. Qu'est-ce que le nombre atomique ?

Le nombre atomique est ce qui permet de différencier les atomes entre eux, il est égal au nombre d'électrons ou de protons contenus dans cet atome. Par exemple, le nombre atomique du fer est 26, celui de l'oxygène est 8 et celui de l'hydrogène est 1. Ce nombre permet de ranger les atomes dans une table, appelée table périodique des éléments :

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Chaque case correspond à un atome différent avec son symbole (Fe pour fer, O pour oxygène, H pour hydrogène...) et son nombre atomique.

1.4. Combien y a-t-il d'atomes différents ?

En principe, il y a une infinité d'atomes différents, puisque le nombre atomique peut varier de 1 à l'infini ! En pratique, le nombre d'atomes connus actuellement est d'environ 112, les plus répandus sont ceux qui ont un nombre atomique faible, en particulier, l'hydrogène est le corps le plus abondant (75% des atomes) dans l'univers. La plupart des atomes de nombre atomique élevé ont été créés par réactions nucléaires et se désintègrent très rapidement, on ne peut donc pas les trouver dans la nature...

1.5. Comment sont créés les éléments ?

Les divers éléments qui existent dans la nature n'ont pas été créés au début de l'univers mais sont principalement créés dans les étoiles.

Lors du Big Bang (le début de l'univers), les protons, neutrons et électrons se sont combinés pour former les atomes simples, essentiellement l'hydrogène et l'hélium, mais aussi en plus faible quantité le lithium, le béryllium et le bore.

A partir de cette matière primordiale, les premières étoiles se forment, essentiellement constituées d'hydrogène. Grâce à la fusion nucléaire la plupart des atomes plus lourds (jusqu'au fer) sont alors créées au sein des étoiles. Les atomes plus lourds que le fer seraient créés lors de l'explosion de certaines étoiles, les supernovae.

Ainsi, le Soleil et son système planétaire dont nous faisons partie ne peuvent avoir été formés qu'à partir d'atomes qui ont été synthétisés dans des étoiles maintenant mortes.

La Terre et tout ce qui s'y trouve, en particulier les êtres vivants, sont donc constitués de poussière d'étoiles...

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1.6. Peut-on transformer le plomb en or ?

Le rêve des alchimistes de transformer le plomb en or est en effet possible en réalisant des réactions nucléaires, capables de transformer un noyau de plomb en un noyau d'or. Mais, la quantité d'or ainsi produite est tellement faible par rapport à l'énergie nécessaire que ces réactions ne présentent aucun intérêt...

1.7. Qu'est-ce que l'anti-matière ?

L'anti-matière est constituée d'anti-particules. Une anti-particule a exactement la même masse que la particule correspondante mais des nombres quantiques opposés. Par exemple, l'anti-électron a une charge électrique positive et de même amplitude que celle de l'électron. En combinant des anti-protons, des anti-neutrons et des anti-électrons, il est possible de faire des anti-atomes. Des atomes d'anti-hydrogène ont déjà été produits.

Lorsqu'une particule de matière rencontre son anti-particule, elles s'annihilent mutuellement en libérant la totalité de leur énergie sous forme de rayonnement. Les collisions particule-anti-particule sont couramment utilisées dans les expériences de physique des particules. La durée de vie de l'anti-matière dans notre environnement est très faible puisqu'elle rencontre rapidement de la matière et s'annihile alors. Il n'y a donc pas d'anti-matière sur Terre ou dans le système solaire ni même dans notre galaxie. Il semble même qu'il n'y ait nulle part dans l'univers d'anti-matière en quantité importante, pouvant par exemple former des étoiles d'anti-matière. Or, la matière et l'anti-matière sont supposées avoir été créées en quantités égales lors du Big Bang. Le fait que toute l'anti-matière ait disparu est un phénomène inexpliqué pour l'instant.

La première anti-particule, l'anti-électron, a été découverte en 1933 à l'aide des rayons cosmiques. En effet, les particules du rayonnement cosmique interagissent avec l'atmosphère et peuvent alors créer des anti-particules.

2.1 De quoi est fait un atome ?

Un atome contient un noyau situé en son centre et des électrons qui "tournent" autour du noyau. Le noyau contient des nucléons, c'est à dire des protons et des neutrons.

Les électrons ont une charge électrique négative. Les protons ont une charge électrique positive, de même valeur que celle de l'électron. Les neutrons n'ont pas de charge électrique, ils sont neutres.

Il y a exactement le même nombre d'électrons et de protons dans un atome, un atome est donc électriquement neutre. Le nombre d'électrons (ou de protons) dans un atome détermine ses propriétés physiques et chimiques, c'est le nombre atomique. Par exemple, un atome d'hydrogène a 1 électron et 1 proton, le nombre atomique d'un atome de carbone est 6, celui d'un atome d'oxygène 8, d'un atome de fer 26, d'un atome d'uranium 92, etc (voir la table des éléments)...

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échelle non respectée

Le nombre de neutrons dans un atome est variable, en général il est proche du nombre de protons. Deux atomes de même nombre atomique mais ayant un nombre de neutrons différents sont des isotopes : leurs propriétés chimiques sont identiques mais leurs propriétés physiques sont différentes (par exemple, certains isotopes d'atomes stables sont radio-actifs). Pour différencier les isotopes entre eux, on donne en général le nombre de nucléons avec le nom de l'atome. Par exemple, l'uranium 235 contient 92 protons et 143 neutrons (235=92+143) et l'uranium 238 contient 92 protons et 146 neutrons (238=92+146).

2.2. Un peu d'histoire

Notre connaissance des atomes est très récente. En effet, la structure des atomes était totalement inconnue en 1895 ! C'est la découverte des rayons X par Röntgen en 1895 puis de la radio-activité par Henri Becquerel en 1896 et Pierre et Marie Curie à partir de 1898 qui a permis de commencer à comprendre la structure des atomes. Les électrons ont été identifiés par J. J. Thomson en 1897, puis, en 1911, Ernest Rutherford découvre l'existence du noyau atomique. Cependant, pendant plusieurs années, les physiciens pensaient que le noyau était formé de protons et d'électrons. Dans le même temps, pendant les années 1924-27, le développement de la mécanique quantique permet de décrire de manière précise le comportement des électrons des atomes. Seul le noyau restait incompris...

En 1931, Irène et Frédéric Joliot-Curie observent les neutrons mais sans comprendre leur nature. En 1932, James Chadwick montre que le neutron est un partenaire neutre du proton. La structure de l'atome est comprise...

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2.3. Qu'est-ce qui lie les électrons au noyau ?

Les électrons et le noyau d'un atome sont liés par l'interaction électromagnétique. En effet, le noyau atomique a une charge électrique positive, grâce aux protons, alors que les électrons ont une charge électrique négative. Ainsi, parce que leurs charges électriques sont opposées, le noyau atomique et les électrons s'attirent, ce qui permet aux atomes de ne pas perdre leurs électrons. Lorsque deux atomes sont suffisamment proches l'un de l'autre, ils peuvent échanger certains de leurs électrons, cet échange permet alors de lier ces deux atomes en un objet composite qui est une molécule. Ce processus est une réaction chimique.

2.4. Que signifie le mot atome ?

Le mot atome vient du grec atomos qui signifie indivisible, insécable. Il convenait donc parfaitement au concept d'atome lorsqu'il a été élaboré par les chimistes au début du XIXème siècle, c'est à dire comme la plus petite partie d'un corps pur.

Maintenant, on sait que les atomes ne sont pas indivisibles, qu'on peut en arracher des électrons, fissionner leur noyau, etc... Mais le nom est resté !

2.5. Qu'est-ce qu'un ion ?

Un ion est un atome ou une molécule dont on a enlevé ou ajouté un ou plusieurs électrons. Ainsi, un atome ou une molécule étant toujours électriquement neutre, un ion est soit positif soit négatif. Un ion a donc des propriétés physico-chimiques différentes de la molécule dont il provient. Un ion positif est appelé un cation et un ion négatif est appelé un anion.

L'ionisation de la matière consiste à arracher des électrons aux atomes. La grande majorité des systèmes de détection des particules est basée sur l'ionisation.

2.6. Quelle est la taille d'un atome ?

Un atome a une taille de l'ordre de 10-10m, soit un dixième de millionième de millimètre ! Un noyau d'atome a une taille de l'ordre de 10-15m, soit cent mille fois plus petit que l'atome lui-même !

Un électron est théoriquement une particule ponctuelle, elle ne doit donc pas avoir de taille... En tout cas, si l'électron a une taille, elle est inférieure à 10-18m, soit au moins cent millions de fois plus petit que l'atome !

Un atome est donc très petit: il y a onze milliards de milliards d'atomes de fer dans un milligramme de fer !

2.7. Quelle est la masse d'un atome ?

La masse d'un nucléon est de 1,7 10-27kg, soit moins de deux millièmes de milliardième de milliardième de milligramme ! Les protons et les neutrons ont quasiment la même masse.

La masse d'un électron est de 9,1 10-31kg, soit 1836 fois moins qu'un nucléon !

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Ainsi, 99,97% de la masse d'un atome est dans son noyau !Comme le noyau est très petit, la masse d'un atome est donc très concentrée. Ainsi, si on supprimait le vide qu'il y a autour des noyaux des atomes, la Terre pourrait tenir dans une sphère de seulement 150m de rayon !

2.8. A quoi ressemble un atome ?

Si on grossit mille milliards de fois un atome d'hydrogène: - le noyau est constitué d'un seul proton, il a une taille de un millimètre et a une masse de 1,7 millions de tonnes ! - l'unique électron a une taille inférieure à un micron (un millième de millimètre) et a une masse de 900 tonnes ! - cet électron "tourne" autour du noyau dans un volume d'environ 100m de diamètre: c'est la taille de cet atome d'hydrogène, tout le reste est vide !

2.9. Un atome est-il vide ?

Le volume du noyau est un million de millards de fois plus petit que celui de l'atome. Le volume de l'atome est donc défini comme le volume dans lequel on a une chance non négligeable de trouver un des électrons de cet atome.

Le volume de l'atome est donc constitué d'au moins 99,9999999999999% de vide !

En théorie, les particules qui forment les protons et les neutrons (les quarks) sont, tout comme l'électron, des particules ponctuelles, c'est à dire des particules sans volume. En théorie, un atome est donc constitué de 100% de vide ! Il n'est bien sûr pas possible de prouver que c'est vrai...

3.1 Qu'est-ce qu'un nucléon ?

Un nucléon est le constituant du noyau atomique. Il y a deux sortes de nucléons : - les protons qui ont une charge électrique positive, - les neutrons qui n'ont pas de charge électrique (ils sont électriquement neutres).

3.2 De quoi est fait un nucléon ?

Un nucléon est un objet composite très complexe. Dans la vision la plus simple, on peut dire que les nucléons sont constitués de trois quarks : - les quarks up (notés u), de charge électrique +2/3 de la charge d'un électron, - les quarks down (notés d), de charge électrique -1/3 de la charge d'un électron. Ainsi, les protons sont constitués de deux quarks up et d'un quark down (uud), sa charge électrique est donc +1 (=+2/3+2/3-1/3). Les neutrons sont constitués d'un quark up et de deux quarks down (udd), sa charge électrique est donc 0 (=+2/3-1/3-1/3).

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3.3. Un peu d'histoire

Lorsque les protons et les neutrons furent découverts (entre 1911 et 1932), les physiciens pensaient que ces particules étaient élémentaires, c'est à dire qu'elles étaient indivisibles, qu'elles n'avaient pas de structure interne.

Il fallut attendre les années 1967-70 pour que Bjorken et Feynman imaginent la présence d'une structure dans les nucléons, c'est à dire les quarks. Mais, comme il est théoriquement impossible d'observer un quark libre, ce n'est qu'en 1975 que l'existence des quarks put être prouvée expérimentalement.

3.4. Qu'est-ce qui lie les quarks entre eux ?

Les quarks d'un proton ou d'un neutron sont liés par l'interaction forte.

Cette interaction, en plus de lier les quarks entre eux au sein d'un nucléon, permet aussi aux nucléons de s'attirer pour former un noyau atomique. En effet, les protons ayant tous la même charge électrique, ils se repoussent par l'interaction électromagnétique. Heureusement, cette dernière est beaucoup plus faible que l'interaction forte, qui attire les nucléons entre eux, et permet donc aux noyaux atomiques de rester stables. De plus, les neutrons étant totalement insensibles à l'interaction électromagnétique (leur charge électrique est nulle), ils ne peuvent être liés à l'atome que par l'interaction forte.

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3.5. Quelle est la taille d'un nucléon ?

La taille d'un nucléon est d'environ 10-15m, soit un millionième de millionième de millimètre ! Un quark est théoriquement une particule ponctuelle, elle ne doit donc pas avoir de taille... En tout cas, si les quarks ont une taille, elle est inférieure à 10-18m, soit au moins mille fois plus petit que le nucléon !

3.6. Quelle est la masse d'un nucléon ?

La masse d'un nucléon est environ de 1,7 10-27kg, soit moins de deux millièmes de milliardième de milliardième de milligramme ! Les protons et les neutrons ont quasiment la même masse : celle du proton est de 1,673 10-27kg, celle du neutron est de 1,675 10-27kg.

Bien que leur masse soit très petite, les nucléons constituent 99,97% de la masse de la matière !

4.1. Qu'est-ce qu'un fermion élémentaire ?

Un fermion élémentaire est une particule qui forme la matière, comme par exemple les électrons ou les quarks. Dans "fermion élémentaire", il y a d'abord fermion... Un fermion est une particule de spin demi-entier, en pratique tous les fermions élémentaires ont un spin 1/2 (le spin est une propriété quantique de la matière assez étrange). Les fermions ont la propriété suivante : si on prend une boite et qu'on y met des fermions, il arrivera un moment où elle sera pleine et il ne sera alors plus possible d'en ajouter... La matière ne peut donc pas être comprimée à l'infini (alors qu'il y aurait toujours de la place dans la boite pour des bosons, qui sont les particules de spin entier).

Dans "fermion élémentaire", il y a aussi élémentaire... Une particule élémentaire est une particule qui ne contient aucune sous-structure : elle ne peut pas être divisée. Expérimentalement, la taille d'un fermion élémentaire n'a jamais pu être mesurée, en tout cas elle doit être inférieure à 10-18m soit inférieure à un millionième de milliardième de millimètre ! Théoriquement, un fermion élémentaire est une particule ponctuelle, c'est à dire une particule sans volume donc sans taille.

Les fermions élémentaires sont séparés en deux catégories : les leptons (comme l'électron ou le neutrino) et les quarks.

4.2. Qu'est-ce qu'un lepton ?

Un lepton est un fermion élémentaire qui n'est pas sensible à l'interaction forte, il n'est donc sensible qu'à l'interaction faible et éventuellement l'interaction électromagnétique.

Les deux leptons les plus connus sont l'électron et le neutrino.

Comme le neutrino est électriquement neutre, il n'est sensible qu'à l'interaction faible. Ainsi, les neutrinos interagissent extrèmement peu avec la matière, ils sont donc très difficiles à détecter. Ainsi, les neutrinos peuvent facilement traverser la Terre sans subir le moindre choc.

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Vous êtes traversé par environ 400 000 milliards de neutrinos par seconde (qui viennent presque tous du soleil), sans que cela ait le moindre effet sur vous (heureusement) !

4.3. Qu'est-ce qu'un quark ?

Un quark est un fermion élémentaire qui est sensible à toutes les interactions : l'interaction électromagnétique, l'interaction faible et aussi l'interaction forte. Les quarks sont les constituants des nucléons, qui constituent le noyau atomique.

4.4. La matière ordinaire

La matière ordinaire, c'est à dire celle qu'on trouve sur Terre et qui constitue la majorité de la matière visible de l'univers est formée de seulement quatre fermions élémentaires différents : - les quarks up et down permettent de former les nucléons et donc les noyaux des atomes, - l'électron permet, avec les noyaux atomiques, de former les atomes, - le neutrino électronique est créé dans la radio-activité beta et est en grande quantité dans l'univers.

Le nombre en haut à gauche est la charge électrique, par définition le proton a une charge +1. Le nombre du milieu est la masse exprimée en électron-volt, les masses des quarks sont mal connues, la masse du neutrino n'a pas encore pu être mesurée.

L'électron a été découvert en 1897 par J. J. Thomson. Les quarks ne furent mis en évidence expérimentalement qu'en 1975 après avoir été imaginés par Bjorken et Feynman dans les années 1967-70 pour expliquer les propriétés des protons, neutrons et autres particules contenant des quarks.

Bien que la radio-activité ait été découverte en 1898, le neutrino est resté longtemps inconnu, en raison de sa très faible interaction avec la matière qui le rend très difficilement détectable. Néanmoins, il est rapidement apparu (vers 1925) qu'une autre particule que l'électron devait être présente dans la désintégration beta. Ainsi, en 1930, W. Pauli fit l'hypothèse de l'existence du neutrino. Puis, en 1933, E. Fermi baptisa le neutrino (="petit neutre") et élabora une première théorie de l'interaction faible. Finalement, il fallut attendre 1956 pour que F. Reines et C. Cowan observent pour la première fois des neutrinos, en se plaçant à proximité d'une des premières centrales nucléaires, source intense de neutrinos.

Pour chacune de ces particules existe aussi une anti-particule : anti-quarks, anti-électron, anti-neutrino.

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4.5. Les trois familles de fermion

En 1937, une nouvelle particule fut découverte dans les rayons cosmiques : elle possède les mêmes propriétés que l'électron, sauf sa masse qui est environ 200 fois supérieure. Cette nouvelle particule fut appelée le muon. A partir de 1947, toujours dans les rayonnements cosmiques, de nombreuses nouvelles particules, des hadrons, furent découvertes, paraissant étranges. C'est pour interpréter ces nouvelles particules, ainsi que les particules déjà connues, que le concept de quarks fut élaboré, avec seulement au début trois quarks : le up, le down et le quark s (pour strange), quark contenu dans ces nouvelles particules. Ce quark s possède les mêmes propriétés que le quark d, sauf sa masse plus élevée. En 1962, une expérience montra qu'il existe un autre neutrino, le neutrino muonique, compagnon du muon comme le neutrino électronique est compagnon de l'électron dans la désintégration beta.

Ainsi, il apparut que, en plus de la matière ordinaire (les quarks u et d, l'électron et le neutrino électronique), existaient d'autres particules semblables aux premières mais seulement plus lourdes. Ces nouvelles particules peuvent se ranger dans une deuxième famille, la première famille regroupant la matière ordinaire. Mais, pour compléter la deuxième famille, il manquait un quark, le compagnon du s, et il fut donc introduit dans la théorie par Glashow, Iliopoulos et Maiani en 1970 sous le nom de charme. La découverte de ce quark en 1974 confirma la théorie, et permit de compléter la deuxième famille de leptons.

Le nombre en haut à gauche est la charge électrique, par définition le proton a une charge +1. Le nombre du milieu est la masse exprimée en électron-volt, les masses des neutrinos n'ont pas encore pu être mesurées. Peu après la découverte du quark c, un nouveau lepton fut découvert, encore plus massif que le muon mais possédant les mêmes propriétés, il fut appelé le tau. Ce nouveau lepton semblait donc montrer l'existence d'une troisième famille de fermions.

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Ainsi, afin de compléter la troisième famille et pour expliquer un phénomène nouveau (la violation de la symétrie CP), une troisième famille de quarks, les quarks b et t, furent introduits dans la théorie. Le quark b fut ensuite découvert en 1977 et le quark t plus récemment en 1994.

Néanmoins, pour que la troisième famille soit complète, il manque le neutrino tau dont l'existence n'est pas remise en question mais n'a pour l'instant pas été mise en évidence expérimentalement de manière directe. Par contre, le nombre de neutrinos de masse inférieure à 45GeV a été mesuré et il est de trois, ce qui rend l'existence du neutrino tau indispensable.

Il existe ainsi trois familles de fermions élémentaires dont les propriétés sont identiques, la seule différence entre ces familles étant la masse. Cette structure est pour l'instant totalement inexpliquée. La première famille constitue la matière ordinaire, les autres familles ne sont présentes que dans les rayons cosmiques et lors de collisions dans des accélérateurs de particules.

Pour chacune de ces particules existe aussi une anti-particule : anti-quarks, anti-électron, anti-muon, anti-tau, anti-neutrinos.

4.6. Peut-on observer des quarks libres ?

La théorie de l'interaction forte (QCD) montre que les quarks ne peuvent jamais être libres : il n'est donc pas possible d'observer un quark seul. Les quarks sont donc toujours confinés à l'intérieur de particules composites appelées hadrons. Les protons et les neutrons sont des exemples de hadrons.

On distingue deux catégories de hadrons : - les hadrons formés de trois quarks sont des baryons, comme les protons ou les neutrons,

- les hadrons formés d'un quark et un anti-quark sont des mésons.

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4.7. Quelle est la masse des neutrinos ?

La masse des neutrinos est théoriquement nulle, mais il n'existe aucun argument pour que ces masses soient réellement nulles. Pour l'instant, les masses des neutrinos n'ont pas été mesurées et seulement des limites supérieures sur ces masses existent. Ce qui est sûr, c'est que ces masses sont très faibles par rapport aux leptons associés. Par exemple, le neutrino électronique a une masse au moins 30 mille fois plus faible que celle de l'électron.

Le 5 juin 1998, au Japon, l'expérience Super-Kamiokande a annoncé avoir mis en évidence une masse non-nulle pour un neutrino. Cette masse est très faible mais est différente de zéro. Il faudra attendre d'autres résultats pour en savoir plus sur la masse des neutrinos...

5.1. Quelles sont les interactions fondamentales ?

Tous les processus physiques, chimiques ou biologiques connus peuvent être expliqués à l'aide de quatre interactions fondamentales : - l'interaction gravitationnelle, responsable de la pesanteur, de la marée ou encore des phénomènes astronomiques, - l'interaction électromagnétique, responsable de l'électricité, du magnétisme, de la lumière ou encore des réactions chimiques et biologiques, - l'interaction forte, responsable de la cohésion des noyaux atomiques, -l'interaction faible, responsable de la radio-activité beta, qui permet au Soleil de briller. La théorie qui décrit la gravitation est la relativité générale, celle qui décrit les trois autres est le modèle standard.

5.2. Qu'est-ce que l'interaction gravitationnelle ?

L'interaction gravitationnelle est une force toujours attractive qui agit sur toute forme d'énergie, mais avec une intensité extrèmement faible (c'est l'interaction la plus faible des quatre interactions fondamentales). Ainsi, ses effets ne sont perceptibles que lorsque des objets très massifs (la masse est une forme d'énergie) sont en jeu, c'est le cas pour les objets astronomiques.

L'énorme masse des étoiles, des planètes ou des galaxies les rend donc très sensible à la gravitation et c'est la seule interaction en jeu pour expliquer les mouvements de ces objets.

De même, l'énorme masse de la Terre (6 1024kg, soit six mille milliards de millards de tonnes !) la rend très attractive pour des objets moins massifs. Ainsi, la pesanteur et donc le poids des objets sur Terre sont le résultat de l'attraction gravitationnelle de la Terre sur ces objets. C'est pourquoi, le poids d'un objet est plus faible sur la Lune que sur Terre, puisque la masse de la Lune est plus faible que celle de la Terre.

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Enfin, c'est l'attraction gravitationnelle de la Lune sur l'eau des océans (dont la masse totale est importante) qui permet d'expliquer le phénomènes des marées. Le premier à avoir compris que la pesanteur terrestre et les mouvements astronomiques étaient le résultat d'une seule et même interaction est Isaac Newton, qui publia en 1687 un livre dans lequel il a établi les lois de la gravitation. Il fallut ensuite attendre 1915 pour que Albert Einstein développe la théorie de la relativité générale, qui permet d'expliquer la gravitation par une théorie géométrique mais non quantique. La gravitation n'est donc pas du tout prise en compte par la physique des particules, mais son intensité est totalement négligeable à l'échelle des particules élémentaires.

5.3. Qu'est-ce que l'interaction électromagnétique ?

L'interaction électromagnétique est une force répulsive ou attractive qui agit sur les objets ayant une charge électrique. Deux objets de charges électriques de même signes se repoussent alors que deux objets de charges électriques de signes opposés s'attirent. Comme les atomes sont électriquement neutres, il y a peu d'effet de cette interaction à grande échelle.

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L'interaction électromagnétique est bien sûr à l'origine de tous les phénomènes électriques et magnétiques. L'interaction électromagnétique permet aussi la cohésion des atomes en liant les électrons (charge électrique négative) et le noyau des atomes (charge électrique positive). Cette même liaison permet de combiner les atomes en molécules et l'interaction électromagnétique est donc responsable des réactions chimiques. Enfin, la chimie de certaines classes de molécules permet d'expliquer la biologie.

Cette interaction peut, dans certaines conditions, créer des ondes électromagnétiques, parmi lesquelles on distingue la lumière, les ondes radio, les ondes radar, les rayons X...

En bref, l'interaction électromagnétique permet d'expliquer presque tous les phénomènes de la vie quotidienne (mis à part la pesanteur)...

La première grande étape dans la compréhension de l'électromagnétisme vient de l'unification de l'électrodynamique et du magnétisme en une seule et même interaction par J. C. Maxwell en 1860. Puis, en 1864, Maxwell comprit que la lumière était une onde électromagnétique. Enfin, en 1887, H. Hertz montre l 'existence d'ondes électromagnétiques autres que la lumière.

Quelques années plus tard, la mécanique quantique se développe et la théorie de l'électromagnétisme est quantifiée, la nature quantique de cette interaction (l'existence du photon) ayant déjà été découverte par Einstein en 1905. Finalement, après la résolution de problèmes techniques, la première théorie à la fois quantique et relativiste est achevée dans les annéees 1948-49 par Tomonaga, Schwinger et Feynman, c'est l'électrodynamique quantique ou QED. Mais, comment fonctionne QED ?

5.4. Qu'est-ce que l'interaction forte ?

L'interaction forte est une force qui agit sur les quarks et par extension sur les hadrons. Les leptons y sont totalement insensibles.

L'interaction forte permet la cohésion des noyaux atomiques en liant les protons et les neutrons entre eux au sein de ce noyau. Si cette interaction n'existait pas, les noyaux ne pourraient pas être stables et seraient dissociés sous l'effet de la répulsion électrostatique des protons entre eux.

L'interaction forte est aussi responsable des réactions nucléaires, source d'énergie des étoiles et donc du Soleil.

L'histoire des interactions fortes commence en 1911 avec la découverte du noyau atomique par Rutherford. En effet, il fallut trouver une nouvelle force pour expliquer que les noyaux atomiques ne se disloquent pas sous l'effet électrique répulsif des protons entre eux. Néanmoins, il fallut attendre 1967-70 et le développement du modèle des quarks pour que la théorie de l'interaction forte soit élaborée, c'est à dire la chromodynamique quantique ou QCD. Mais, comment fonctionne QCD ?

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5.5. Qu'est-ce que l'interaction faible ?

L'interaction faible est une force qui agit sur toutes les particules. En particulier, c'est la seule force à laquelle sont sensibles les neutrinos.

L'interaction faible est responsable de la radio-activité beta qui permet les réactions nucléaires qui sont la source d'énergie du Soleil. La radio-activité naturelle est probablement aussi une source d'énergie importante pour maintenir le magma en fusion sous la croûte terrestre.

L'histoire de l'interaction faible commence bien sûr en 1896 avec la découverte de la radio-activité par Becquerel. Il faut ensuite attendre 1933 pour que E. Fermi élabore le premier modèle des interactions faibles en incorporant l'existence non encore démontrée du neutrino. Puis, en 1961, S. L. Glashow tente d'unifier l'interaction faible et l'électromagnétisme en une seule interaction électrofaible. Cette unification prédit l'existence d'une interaction faible par courant neutre qui est découverte en 1973. Elle prédit aussi l'existence de vecteurs de cette interaction, les W+, W- et Z0, qui sont à leur tour découverts en 1983. Mais, comment agissent les W et le Z0 ?

5.6. Interactions et échanges de particules

Les interactions sont expliquées en physique des particules comme l'échange entre particules de matière de particules de rayonnement.

Le dessin ci-dessous montre deux bateaux qui s'éloignent l'un de l'autre car leurs occupants échangent un ballon (par le principe d'action-réaction bien connu). Il y a donc interaction à distance entre les deux bateaux par échange d'un objet intermédiaire (le ballon). Cet objet est appelé le vecteur de l'interaction.

Ainsi, en physique des particules, on explique toute interaction entre particules par l'échange entre ces particules de vecteurs (qui sont eux-même des particules).

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Exemple d'interaction entre deux particules (bleue et rouge) par l'échange d'une particule (magenta), tout comme les deux bateaux bleu et rouge interagissent en échangeant un ballon (magenta). On peut aussi imaginer que plus le ballon est lourd, plus il sera difficile aux occupants du bateau de le lancer loin. Ainsi, si le ballon est trop lourd, les bateaux ne pourront plus interagir au-delà d'une certaine distance. De même, en physique des particules, plus la particule vecteur d'une interaction sera lourde, plus cette interaction sera de courte portée.

6.1. Qu'est-ce que la radio-activité ?

Certains atomes sont radio-actifs, c'est à dire qu'ils émettent un rayonnement. En fait, c'est le noyau de ces atomes qui émet ce rayonnement, car ce noyau est instable. Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, la radio-activité est un phénomène tout à fait naturel.

On distingue trois types de radio-activité d'origines différentes : les radio-activités alpha, beta et gamma.

6.1.1. La radio-activité alpha

Un atome radio-actif alpha émet une "particule alpha", c'est à dire un noyau d'hélium (en fait deux protons et deux neutrons). Ainsi le noyau, en perdant deux protons, change de nature. Par exemple, un atome de polonium 210 (84 protons et 126 neutrons) devient, par radio-activité alpha, un atome de plomb 206 (82 protons et 124 neutrons). L'origine de la radio-activité alpha est une instabilité globale du noyau de l'atome qui se stabilise en éjectant ces deux protons et deux neutrons.

6.1.2. La radio-activité beta

La radio-activité beta existe sous deux formes : beta+ et beta-. Un atome radio-actif beta- émet un électron et un anti-neutrino électronique. Un atome radio-actif beta+ émet un anti-électron (ou positron) et un neutrino électronique. En plus de cette émission de particules, la nature des nucléons de ce noyau est modifiée. Ainsi, dans le cas d'une désintégration beta-, un neutron se change en proton. Dans le cas d'une désintégration beta+, c'est un proton qui se change en neutron. Le noyau change donc de nature.

Par exemple, un atome de potassium 40 (19 protons et 21 neutrons) devient, par radio-activité beta-, un atome de calcium 40 (20 protons et 20 neutrons). De même, un atome de carbone 14 (6 protons et 8 neutrons) se désintègre en un atome d'azote 14 (7 protons et 7 neutrons). L'origine de la radio-activité beta est une désintégration d'un proton ou d'un neutron par interaction faible.

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Plus précisément, c'est un des quarks du nucléon qui se désintègre. Ainsi, dans le cas de la radio-activité beta-, un quark down du neutron se désintègre en un quark up, un électron et un anti-neutrino électronique. Il reste donc dans le nucléon deux quarks up et un quark down, le neutron devient donc un proton. Dans le cas de la désintégration beta+, un quark up du proton se désintègre en un quark down, un positron et un neutrino électronique, le proton devient donc un neutron.

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6.1.3. La radio-activité gamma

Un atome radio-actif gamma émet un photon (aussi appelé gamma). L'origine de cette radio-activité est une excitation globale du noyau qui se désexcite en émettant ce photon (donc en perdant de l'énergie). Cette excitation initiale du noyau est souvent due à une première désintégration par radio-activité alpha ou beta et la radio-activité gamma accompagne donc souvent ces deux premières.

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La radio-activité gamma ne change pas la nature de l'atome qui la subit, puisque le nombre de nucléons ne change pas dans le noyau.

6.2. Un peu d'histoire

La découverte de la radio-activité est très récente, puisqu'elle remonte à la fin du XIXème siècle, et a révolutionné la science. En effet, c'est cette découverte qui a permis de commencer à comprendre la structure des atomes.

En 1896, Henri Becquerel découvre la radio-activité de l'uranium, alors qu'il étudie les rayons X découverts par Röntgen un an plus tôt. Quelques mois plus tard, Marie Sklodowska, qui vient d'épouser Pierre Curie, soutient sa thèse et montre que, comme l'uranium, le thorium est aussi radio-actif. En 1898, Pierre et Marie Curie découvrent un élément beaucoup plus radio-actif, qu'ils appellent le polonium. Puis, ils découvrent un autre élément très radio-actif, la radium, ce qui leur vaut le prix Nobel de physique en 1903. De plus, Marie Curie reçoit le prix Nobel de chimie en 1911 pour sa mise au point d'un procédé permettant d'isoler le radium.

Enfin, en 1934, Irène et Frédéric Joliot-Curie (Irène est la fille de Pierre et Marie Curie) découvrent la radio-activité artificielle. Ils sont récompensés l'année suivante par le prix Nobel de chimie.

6.3. Qu'est-ce que la période d'un élément radio-actif ?

Un élément radio-actif alpha ou beta change de nature à mesure que ses atomes se désintègrent. Ainsi, si on a une quantité d'un certain élément radio-actif, après un certain temps une partie de cet élément aura été transformée en un autre élément, la quantité d'élément de départ aura diminué. Au bout d'un certain temps, il ne restera plus que la moitié de l'élément de départ, ce temps est la période de cet élément.

Par exemple, si on a 10 grammes de polonium 210 au départ, il faudra attendre environ 138 jours pour n'en avoir plus que 5 grammes, on aura alors aussi environ 5 grammes de plomb 206. La période du polonium 210 est donc de 138 jours. Autre exemple, si on a 10 grammes de potassium 40 au départ, il faudra attendre 1,3 milliards d'années pour n'en avoir plus que 5 grammes ! Enfin, la période du carbone 14 est de 5 600 ans. On peut donc voir que les périodes peuvent être très différentes pour différents éléments.

6.4. La radio-activité naturelle

La radio-activité naturelle est très importante mais assez mal connue. C'est probablement une source d'énergie importante qui contribue à maintenir le magma en fusion sous la croûte terrestre (que l'on aperçoit quelque fois en surface sous la forme de lave).

Un corps humain contient environ 20 milligrammes de potassium 40, un élément radio-actif beta naturel.

Ainsi, un corps humain produit environ 340 millions de désintégrations beta par jour, naturellement !

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La connaissance des proportions naturelles des éléments radio-actifs et de leurs périodes permet de calculer l'age d'objets qui les contiennent. Cette méthode est largement utilisée pour dater des objets par les archéologues, par exemple en utilisant le carbone 14.

6.5. La radio-activité artificielle

Certains éléments radio-actifs sont naturellement présents dans la nature : par exemple le carbone 14 ou le potassium 40. Cependant, il est aussi possible de créer artificiellement des éléments radio-actifs qui ne se trouvent pas dans la nature, c'est la radio-activité artificielle. Pour cela, il faut bombarder des atomes "naturels" avec des protons ou des neutrons (ou des noyaux d'hélium, les "particules alpha"). De cette manière, les noyaux des atomes de départ sont modifiés, c'est donc une réaction nucléaire.

6.6. Qu'est-ce que la fission nucléaire ?

La fission d'un atome correspond à la séparation en deux morceaux du noyau de cet atome, avec en plus quelques neutrons. Les deux atomes restant sont en général radio-actifs.

Un atome peut fissionner soit de manière spontanée si son noyau est trop lourd, soit parce qu'il a été heurté par un neutron. Ainsi, les neutrons émis lors de la fission vont engendrer d'autres fissions, ce qui se traduit par une réaction en chaine. C'est ce processus qui est utilisé dans les réacteurs nucléaires et les bombes A, car la fission s'accompagne de libération d'énergie.

6.7. Qu'est-ce que la fusion nucléaire ?

La fusion de deux atomes apparait lorsque les noyaux de ces deux atomes sont suffisamment proches l'un de l'autre pour fusionner, c'est à dire pour former un unique noyau. Comme les noyaux ont une charge électrique positive, ils se repoussent mutuellement, ce qui les empêche de fusionner. Si ces atomes sont dans un milieu très chaud, ils auront des vitesses suffisamment élevées pour pouvoir fusionner avant d'être séparés par la répulsion électromagnétique. C'est pourquoi on parle souvent de fusion thermonucléaire. Au coeur du Soleil, la température est suffisamment élevée pour que des réactions de fusion nucléaires aient lieu : c'est ce qui fait briller le Soleil, car ces réactions s'accompagnent de libération d'énergie.

La fusion n'est pas encore utilisée pour produire de l'énergie car il est très difficile de faire un réacteur fonctionnant à la température nécessaire de plusieurs millions de degrés ! Par contre, elle est malheureusement utilisée dans les bombes H.

7.1 Qu'est-ce que le modèle standard ?

Le modèle standard de la physique des particules (en abrégé "modèle standard") est la théorie actuelle qui permet d'expliquer tous les phénomènes observables à l'échelle des particules. Le modèle standard englobe donc toutes les particules connues ainsi que les trois interactions ayant un effet à l'échelle des particules : l'interaction électromagnétique, l'interaction forte et l'interaction faible. Le modèle standard permet donc d'expliquer tous les phénomènes naturels sauf la gravitation qui, pour l'instant, résiste aux théoriciens pour une théorie quantique...

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Le modèle standard est une théorie de champs quantique, c'est donc une théorie à la fois quantique et relativiste.

Le modèle standard contient deux interactions distinctes : l'interaction forte expliquée par QCD et l'interaction électrofaible qui est une unification de l'interaction faible et de l'électromagnétisme, dont la théorie (QED) est inclue dans cette interaction. Ces interactions sont expliquées par l'échange de bosons de jauge (les vecteurs de cette interaction) entre fermions élémentaires.

Le modèle standard prédit aussi l'existence du boson de Higgs, particule qui permet de donner une masse aux autres particules de la théorie. Cette particule n'a pas encore été découverte.

7.2. Quelles sont les particules élémentaires ?

Les particules élémentaires du modèle standard sont au nombre de 24 : - 12 bosons de spin 1 qui sont les particules de "rayonnement" et qui sont les vecteurs des différentes interactions : - 8 gluons qui transmettent l'interaction forte, - les W+ et W- qui transmettent l'interaction faible, - le Z0 qui transmet une forme de l'interaction faible provenant de l'interaction électrofaible, - le photon qui transmet l'interaction électromagnétique.

- 12 fermions de spin ½ qui sont les particules de "matière", séparées en deux catégories : - 6 quarks et leurs anti-quarks, qui forment des particules composites : les hadrons, - 6 leptons et leurs anti-leptons.

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7.3. Un peu d'histoire...

Le modèle standard est le fruit de plus de quarante années de recherche théorique et expérimentale. Le point de départ est QED, achevée entre 1948 et 1949, qui est la théorie quantique et relativiste de l'interaction électromagnétique. En 1954, C. N. Yang et R. Mills généralisent QED en développant les théories de champs de jauge, outil indispensable pour l'élaboration du modèle standard et, en particulier, la première tentative d'unification des interactions faible et électromagnétique en une théorie électrofaible par S. L. Glashow en 1961. Le problème principal de la théorie électrofaible de Glashow est que les particules qu'elle décrit sont sans masse, ce qui est en désaccord avec la réalité. En 1967, S. Weinberg et A. Salam modifient ce modèle en y incorporant le boson de Higgs qui permet de donner une masse aux particules de la théorie.

Finalement, en 1970, S. L. Glashow, J. Iliopoulos et L. Maiani intègrent les quarks à la théorie électrofaible en prédisant l'existence du quatrième quark, le charme. Quelques années plus tard, QCD est ajoutée à la théorie électrofaible pour expliquer l'interaction forte : le modèle standard est achevé.

Une des principales prédictions de la théorie électrofaible est l'existence de l'interaction faible par courant neutre, découverte quelques années plus tard, en 1973, ce qui confirme de manière éclatante ce modèle. L'autre prédiction très importante est l'existence des bosons de jauge W et Z0 responsables des interactions faibles. Leur découverte en 1983 couronne le succès du modèle standard qui reste pour le moment la seule théorie valable.

7.4. QED ou comment agissent les photons

Dans l'électrodynamique quantique (QED), l'interaction électromagnétique est expliquée comme l'échange de photons entre fermions élémentaires possédant une charge électrique. Le photon est donc le vecteur de l'interaction électromagnétique. Le photon n'ayant pas lui même de charge électrique (il est neutre), les particules qui échangent des photons conservent leur charge électrique inchangée après l'échange. La masse du photon étant nulle, la portée de l'interaction électromagnétique est infinie.

Exemple d'échange d'un photon (en magenta) entre deux fermions de charges électriques opposées (en rouge et bleu). Le temps va de la gauche vers la droite.

Le neutrino n'ayant pas de charge électrique, c'est le seul fermion élémentaire qui n'est pas sensible à l'interaction électromagnétique.

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7.5. QCD ou comment agissent les gluons ?

Dans la chromodynamique quantique (QCD), l'interaction forte est expliquée comme l'échange de gluons entre fermions élémentaires possédant une charge de couleur. Les gluons sont donc les vecteurs de l'interaction forte. Il existe 8 gluons de charges de couleur différentes (des combinaisons d'une couleur et d'une anti-couleur).

Seuls les quarks possèdent une charge de couleur, les leptons sont donc neutres vis à vis de l'interaction forte, ils n'y sont donc pas sensibles. La charge de couleur peut prendre trois "valeurs" : elle peut être rouge, verte ou bleue (ces couleurs n'ont rien à voir avec les couleurs visibles, c'est simplement une façon poétique de nommer une notion n'ayant pas d'équivalent à notre échelle).

Les gluons possèdent eux-mêmes une charge couleur. Ainsi, lors d'un échange de gluon entre quarks, les quarks échangent leurs couleurs respectives.

Exemple d'échange d'un gluon (en orange) entre deux quarks de charges de couleur différentes. L'échange du gluon permet aux deux quarks d'échanger leurs couleurs. Le

temps va de la gauche vers la droite.

La masse des gluons est nulle, mais comme ils portent une charge de couleur et donc peuvent interagir entre eux, la portée de l'interaction forte n'est pas infinie, elle est de l'ordre de 10-15m, elle est donc très courte ! Le comportement de l'interaction forte est ainsi assez bizarre : plus les quarks sont éloignés, plus leur interaction est forte... A la limite où ils sont infiniment proches, ils n'interagissent plus du tout, c'est ce qu'on appelle la liberté asymptotique. Cette caractéristique est à l'origine du confinement des quarks à l'intérieur des hadrons : les quarks ne peuvent pas être libres.

Les particules directement observables sont donc les hadrons, c'est à dire des états liés de plusieurs quarks. Ces hadrons doivent être "blancs", c'est à dire avoir une charge de couleur nulle. Ainsi, on peut avoir : - des baryons, qui contiennent trois quarks : un rouge, un vert et un bleu, le total est donc le blanc (et aussi les anti-baryons),

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- des mésons qui contiennent un quark d'une couleur (rouge, vert ou bleu) et un anti-quark de l'anti-couleur correspondante, le total étant aussi l'absence de couleur.

7.6. Comment agissent les W+, W- et Z0 ?

Dans la théorie électrofaible, l'interaction faible présente deux aspects : - l'interaction faible par courants chargés où les vecteurs de l'interaction sont les W+ et W-, - l'interaction faible par courant neutre où le vecteur de l'interaction est le Z0. Ces deux formes de l'interaction faible agit entre tous les fermions élémentaires, en particulier c'est la seule interaction à laquelle est sensible le neutrino. La masse des W et du Z0 est très élevée (80GeV pour les W et 91GeV pour le Z0, soit presque cent fois plus qu'un proton), la portée de l'interaction faible est donc très courte, de l'ordre de 10-18m !

Les W ont une charge électrique non nulle, ce qui signifie que lors de l'échange d'un W, les fermions changent de charge électrique, ils changent donc aussi de saveur (on appelle la "saveur" d'un fermion sa nature : électron, neutrino, quark u, quark d, etc...). Ainsi, la radio-activité beta d'un neutron est expliquée par l'émission d'un W- par un quark d du neutron, qui change donc alors de saveur et devient un quark u, puis le W- se matérialise en un électron et un anti-neutrino électronique.

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Exemple de désintégration d'un quark d (en rouge) en un quark u (en magenta) avec émission d'un W- (en bleu) qui se matérialise en un électron (en noir) et un anti-neutrino

électronique (en blanc). Le temps va de la gauche vers la droite

Le Z0 n'a pas de charge électrique, il n'y a donc pas de changement de saveur lors d'une interaction faible par courant neutre. En fait, l'interaction faible par courant neutre est assez similaire à l'échange d'un photon. En règle générale, si deux fermions peuvent échanger un photon, ils peuvent aussi échanger un Z0. Par contre, un neutrino peut échanger un Z0 avec une autre particule mais pas un photon.

7.7. Qu'y a-t-il au delà du modèle standard ?

Malgré les grands succès du modèle standard et bien qu'il n'ait jusqu'à présent jamais été mis en échec, le modèle standard n'est pas la théorie ultime de la physique. La raison principale est l'absence de la gravitation dans la théorie. Ensuite, le modèle standard est incapable d'expliquer l'existence des trois familles de fermions, ni de prédire leurs masses. Enfin, il semble naturel de tenter d'unifier toutes les interactions, ce qui a partiellement été fait avec la théorie électrofaible, en une seule interaction universelle (c'est ce qu'on appelle les théories de grande unification).

Ainsi, la recherche continue pour tenter de percer les mystères de la matière, sur le plan expérimental comme sur le plan théorique...

- anti-particule : une anti-particule possède la même masse que la particule correspondante, mais ses nombres quantiques sont opposés, en particulier la charge électrique

- atome : Un atome est la plus petite partie d'un corps pur. Il est formé d'électrons et de nucléons.Le nom atome vient du grec et signifie "insécable". Maintenant, on sait que les atomes sont divisibles mais le nom est resté.

- baryon : Un baryon est un hadron composé de trois quarks, comme les nucléons.Le nom baryon vient du grec et signifie "lourd". En effet, dans les années 1950, les trois catégories de particules connues étaient les leptons, les mésons et les baryons,

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correspondant aux mots grecs "léger", "moyen" et "lourd". Maintenant, on connait un lepton plus lourd que certains baryons mais le nom est resté.

- boson : Un boson est une particule de spin entier, il obéit à la statistique de Bose-Einstein. Les photons, les gluons, les W, le Z0 et le Higgs sont des bosons.

- éléctrofaible : La théorie électrofaible est une unification de QED et des interactions faibles à la base du modèle standard. La théorie électrofaible explique l'interaction faible comme une interaction entre fermions et W et prédit l'existence d'une interaction faible par courant neutre avec une interaction entre fermions et Z0.

- électron : Un électron est un lepton. C'est un des constituants de l'atome, avec les nucléons. Il a une charge électrique négative de -1,6 10-19C, qui est la charge électrique élémentaire (on dit donc que sa charge est -1). Sa masse est de 9,1 10-31kg, soit 0,511MeV.

- électron-volt : L'électron-volt (eV) est l'unité d'énergie utilisée en physique des particules : c'est l'énergie acquise par un électron soumis à un potentiel électrique de 1V. Ainsi, on a 1eV=1,6 10-19J, c'est donc une unité très faible. Les multiples sont le keV=103 eV, le MeV=106 eV, le GeV=109 eV...Par la relation de la relativité restreinte E=mc2 (c=299 792,458km/s est la vitesse de la lumière dans le vide), on peut donc exprimer la masse en unités d'énergie. Ainsi, la masse de l'électron de 9,1 10-31kg correspond à une énergie de 0,511MeV.

- fermion : Un fermion est une particule de spin demi-entier, il obéit à la statistique de Fermi-Dirac. Les leptons et les quarks sont des fermions.

- gluon : Un gluon est un boson, c'est la particule qui transmet l'interaction forte.Le nom gluon vient de "glue", car il permet de "coller" les quarks entre eux par l'interaction forte qui, comme son nom l'indique, est beaucoup plus forte que les autres interactions.

- hadron : Un hadron est une particule composite formée de quarks. Il y a deux sortes de hadrons : les baryons et les mésons.Le nom hadron vient du grec et signifie "fort". En effet, les hadrons sont les particules qui sont sensibles à l'interaction forte, contrairement aux leptons.

- Higgs : Le boson de Higgs est la particule du modèle standard qui permet de donner une masse à toutes les autres particules. Il n'a pour l'instant pas été découvert.

- lepton : Un lepton est un fermion élémentaire insensible à l'interaction forte. Il existe six sortes de leptons : l'électron, le muon, le tau et les neutrinos électronique, muonique et tau.Le nom lepton vient du grec et signifie "léger". En effet, dans les années 1950, les trois catégories de particules connues étaient les leptons, les mésons et les baryons, correspondant aux mots grecs "léger", "moyen" et "lourd". Maintenant, on connait un lepton plus lourd que certains baryons mais le nom est resté.

- méson : Un méson est un hadron composé d'un quark et d'un anti-quark.Le nom méson vient du grec et signifie "moyen". En effet, dans les années 1950, les trois catégories de particules connues étaient les leptons, les mésons et les baryons, correspondant aux mots grecs "léger", "moyen" et "lourd". Maintenant, on connait un lepton plus lourd que certains baryons mais le nom est resté.

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- muon : Un muon est un lepton. C'est la réplique de l'électron de la deuxième famille.

- neutrino : Un neutrino est un lepton. Il existe trois sortes de neutrinos : le neutrino électronique, le neutrino muonique et le neutrino tau.Le nom neutrino signifie "petit neutre" par opposition au neutron dont la masse est élevée alors que le neutrino semble ne pas avoir de masse.

- neutron : Un neutron est un nucléon, il forme le noyau de l'atome avec les protons. Sa charge électrique est nulle.

- nucléon : Un nucléon est un baryon. C'est un des composants de l'atome avec les électrons (il forme le noyau atomique). Il y a deux sortes de nucléons : les protons et les neutrons.

- photon : Un photon est un boson, c'est la particule qui transmet l'interaction électromagnétique. Il est souvent noté gamma.Le nom photon vient du grec et signifie "lumière". En effet, le photon transmet l'interaction électromagnétique, la lumière étant un exemple d'onde électromagnétique.

- proton : Un proton est un nucléon, il forme le noyau de l'atome avec les neutrons. Sa charge électrique est +1, l'inverse de celle de l'électron.Le nom proton vient du grec et signifie "le premier", c'est en effet une des premières particules à avoir été identifiée.

- QCD : La QCD (Quantum ChromoDynamics ou chromodynamique quantique) est la théorie des interactions fortes dans le modèle standard. La QCD explique l'interaction forte comme une interaction entre quarks et gluons.

- QED : La QED (Quantum ElectroDynamics ou électrodynamique quantique) est la théorie des interactions électromagnétique, elle est inclue dans le modèle standard. La QED explique l'interaction électromagnétique comme une interaction entre particules électriquement chargées et photons.

- quark : Un quark est un fermion élémentaire sensible à l'interaction forte. Il forme les hadrons. Il existe six sortes de quarks : le quark up (u), le quark down (d), le quark étrange (s), le quark charmé (c), le quark beau (b) et le quark top (t).Le nom quark a été donné à ces particules par Gell-Mann et vient d'un poème de James Joyce Finnegan's Wake.

- spin : Le spin d'une particule est son moment angulaire intrinsèque. Le spin est une propriété quantique, il ne peut prendre que des valeurs entières ou demi-entières. Une particule de spin demi-entier est un fermion, une particule de spin entier est un boson.

- tau : Un tau est un lepton. C'est la réplique de l'électron de la troisième famille.

- W : Un W est un boson, c'est la particule qui transmet l'interaction faible.Le nom W vient de l'anglais et signifie "faible" (weak), car il transmet l'interaction faible qui, comme son nom l'indique, est beaucoup plus faible que les autres interactions.

- Z0 : Un Z0 est un boson, c'est la particule qui transmet l'interaction faible par courant neutre.Le nom Z vient de "zéro" car sa charge électrique est nulle.

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http://www.futura-sciences.com/fr/print/doc/t/physique/d/le-boson-de-higgs-une-cle-fondamentale-de-lunivers_532/c3/221/p3/Laurent Sacco

Le boson de Higgs : une clé fondamentale de l'Univers ? - 26/05/2005

Le boson de Higgs est une particule prédite par le fameux "modèle standard" de la physique des particules élémentaires. Elle constitue en quelque sorte le chaînon manquant et la pierre d'achoppement de ce modèle. En effet, cette particule est supposée expliquer l'origine de la masse de toutes les particules de l'Univers (y compris elle-même !), mais en dépit de ce rôle fondamental, elle reste encore à découvrir puisque aucune expérience ne l'a pour l'instant observée de façon indiscutable.

Il peut être utile, avant de continuer, de prendre connaissance de l'excellent dossier de David Calvet "Voyage au coeur de la Matière". Que ce soit pour rafraîchir sa mémoire ou simplement comme introduction à ce dossier.

Peter Higgs

Un dernier point, le texte qui va suivre est une tentative de compromis entre deux niveaux de lecture.

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Les lecteurs de Futura-Sciences sont assez hétérogènes, on y trouve de simples curieux de sciences jusqu'à des personnes ayant un bagage scientifique poussé (pas nécessairement en physique). C'est donc un problème redoutable que d'essayer de satisfaire les uns et les autres. Certaines parties seront par conséquent difficiles à comprendre pour le néophyte et d'autres trop simples pour un étudiant en physique.

Le fil conducteur du texte est l'évolution des idées en physique concernant la description des masses des particules, et ce en liaison avec les différentes forces dans l'Univers.

Selon les besoins du lecteur, beaucoup d'illustrations ou d'informations (schémas, équations, données historiques/expérimentales) qu'il (elle) trouvera nécessaires pour mieux comprendre ou satisfaire plus avant sa curiosité se trouvent dans les liens tout à la fin. On s'est efforcé de renvoyer vers ces références précises tout au long de ce dossier.

On espère ainsi permettre une grande flexibilité de lecture prenant appui sur les grandes lignes et perspectives indiquées dans le texte.

D'une certaine façon l'origine du boson de Higgs remonte au début du XX ème siècle, lorsque des théoriciens comme Lorentz et Poincaré cherchaient à mieux comprendre la structure de la matière et surtout celle de l'électron. Leur idée, en conformité avec certains résultats sur l'émission de la lumière par les électrons, était de représenter ceux-ci par une petite sphère ou une petite boule uniformément chargée. La force d'auto interaction de celle-ci pouvait servir à expliquer différentes choses comme la masse de l'électron, ou encore le rayonnement émis lors d'une accélération. L'inertie, la masse d'une particule chargée, était alors simplement une conséquence des lois de l'électromagnétisme de Maxwell-Lorentz. Un tel résultat était renforcé par la découverte de la relativité par Einstein et la dérivation de la fameuse formule E=mc². En effet on peut associer une énergie potentielle électrostatique à une telle boule et donc une masse.

A gauche James C Maxwell Unificateur de l'électricité et du magnétisme - Anton. H Lorentz Continuateur de Maxwell et créateur de la théorie des électrons classiques.

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Précisons un peu cela. Si l'on considère une petite boule uniformément chargée, alors chaque partie exercera une répulsion sur une autre, donnant lieu à une énergie d'auto interaction. Lorsque deux charges de signes opposées s'attirent elles possèdent une énergie de liaison négative. Dans le cas considéré, on aura une énergie positive et donc une masse positive pour l'électron ainsi conçu (il faut bien sûr introduire des forces supplémentaires pour empêcher l'électron d'exploser, on négligera ce point ici).

L'espoir d'alors était de rendre compte de l'existence de toutes les particules chargées, comme le proton et l'électron, et même d'expliquer précisément leurs masses et leurs tailles à partir d'extensions non linéaires des équations de Maxwell Lorentz. Les tentatives les plus célèbres furent celles de Mie et surtout de Born-Infeld. La découverte du neutron et de la mécanique quantique allait mettre ces théories en sommeil jusqu'au milieu des années 50,si la masse d'une particule est liée à sa charge comment en effet rendre compte du neutron ?.

Photo de gauche : à gauche Max Born (Prix Nobel), à droite Leopold Infeld / Photo de droite : Max Born

Au passage, voici quelques éclaircissements sur la théorie de Born Infeld. Les équations de Maxwell Lorentz sont linéaires, c'est-à-dire que la somme des champs électrique et magnétique créés par une charge, ou un courant, est encore une solution des équations précédentes. Tel quel, le champ d'une des particules n'influe pas sur l'autre directement, et il faut rajouter à ces équations une loi de force qui indique comment le champ électrique de l'une modifie le mouvement de l'autre, en l'occurrence c'est l'expression de la force de Lorentz.

Autre chose, si on représente un électron par une boule chargée, cette charge n'est pas une solution des équations de Maxwell Lorentz, elle se surimpose aux champs dans le vide et c'est une hypothèse supplémentaire.

Maintenant, imaginons qu'un champ électrique puisse directement influencer un autre champ électrique, les équations de Maxwell modifiées ne sont alors plus linéaires. Comme

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le carré d'un champ électrique (ou magnétique) définit une énergie, une localisation particulièrement intense de champ électrique pourra donc être représentée, d'après la relativité, par un paquet d'énergie, une particule donc !

On fait ainsi d'une pierre deux coups car les équations de champs non linéaires donnent automatiquement une solution décrivant une particule ainsi que la loi de déplacement de cette particule. On parle de théorie non dualiste des champs et de la matière.

Dans un contexte quantique, c'est ce qui inspirera plus tard Heisenberg et, de nos jours, on retrouve cela dans la théorie des cordes.

Entre temps la théorie des forces nucléaires s'était développée, ainsi que celle portant sur la structure du noyau. Quatre noms sont particulièrement importants, ceux de Heisenberg, Yukawa, Bohr et surtout Fermi. Heisenberg avait montré que la mécanique quantique permettait de considérer le proton et le neutron comme deux états d'une même particule, baptisée nucléon, avec une quantité conservée analogue à la charge électrique et au spin d'un électron. Cette quantité fut donc appelée isospin pour cette raison.

Yukawa imagina que, de même qu'un photon était émis par des particules chargées, une particule liée à cette ʻcharge' nucléaire que représentait l'isospin devait elle aussi être émise et devait être responsable des forces nucléaires liant protons et neutrons dans le noyau. Celles-ci devaient être beaucoup plus intense que la force de répulsion électrostatique entre deux protons pour assurer leur liaison et devait être véhiculée par une particule massive afin d'expliquer sa courte portée. Ce fut le fameux méson pi de Yukawa décrit par un champ scalaire.

Hideki Yukawa (prix Nobel)

En effet, on peut se représenter, avec certaines précautions, l'électron comme une petite sphère en rotation. Il possède donc un moment cinétique, que l'on représente dans les schémas ci-dessous par des flèches et que l'on nomme spin.

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Selon qu'il ʻtourne' dans un sens ou dans l'autre, on parlera de spin bas ou de spin haut.

Différent états de spin d'une même particule, l'électron.

En émettant ou absorbant un photon, l'électron peut passer d'un état à un autre. Il se produit alors un changement dans l'énergie associée à l'électron.

Dans le cas des protons et des neutrons, n'ayant pas exactement la même masse (donc énergie associée) mais se comportant de façon identique dans les expériences de physique nucléaire faisant intervenir les forces fortes, on peut les traiter comme deux états d'une même particule, le nucléon , pouvant passer d'un ʻisospin' haut à un ʻisospin' bas en émettant l'analogue d'un photon, ici le méson pi de Yukawa.

Peu de temps après Yukawa, Bohr fit une des première théorie de la structure des noyaux. En raison du nombre important de nucléons dans ceux-ci, des caractéristiques d'intensité et de courte portée des forces nucléaires, il fut conduit à introduire des modèles de goutte de liquide très visqueux et chargé pour comprendre les caractéristiques des noyaux (tailles, énergies, réactions de fission etc.).

On voit déjà apparaître une connexion entre l'étude des forces nucléaires et l'électrodynamique des milieux condensés. Cela se trouvera être important comme la suite le montrera.

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A gauche Niels Bohr (prix Nobel) - à droite : Fission d'un noyau selon N. Bohr, notez les déformations analogues à la fission d'une goutte de liquide.

Modes d'oscillations d'un noyau, notez à nouveau les analogies avec une goutte de liquide.

Enfin Fermi introduisit dans les mêmes années sa théorie de la radioactivité bêta (cf. d3, d4). Il s'inspira pour cela de la dualité onde/corpuscule manifestée aussi bien par la lumière que par la matière ainsi que de la théorie de l'émission de la lumière par un système atomique.

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La désintégration bêta d'un neutron en un proton avec émission d'un électron et d'un anti-neutrino est alors similaire à une transition entre deux niveaux d'un atome avec émission de photons. A la différence qu'ici, c'est la force nucléaire faible, et non la force électromagnétique, qui est responsable de l'émission d'un électron et d'un anti-neutrino.

Le début des années 50 fut marqué par la découverte d'un grand nombre de particules élémentaires, suite à la mise en place de puissants accélérateurs de particules. On découvrit différents types de mésons ainsi qu'un cousin de l'électron, le muon. L'étude des noyaux se poursuivit et la connexion avec les problèmes à N corps en physique du solide se fit de plus en plus nette.

Devant autant de particules liées aux phénomènes nucléaires on se posa tout naturellement la question de savoir si elles étaient toutes élémentaires et surtout la nécessité se fit plus pressante d'avoir une théorie rendant compte précisément de celles-ci et des forces nucléaires.

A nouveau le problème de la dérivation des différents types de particules et de leurs masses devint à l'ordre du jour.

Deux contributions importantes apparurent alors.

• A : La théorie de Yang-Mills (cf. d3, d4)En 1954 deux jeunes théoriciens proposèrent une théorie audacieuse des forces nucléaires. Ils firent remarquer que les équations de l'électromagnétisme, avec la conservation de la charge, se trouvaient liées à une propriété de symétrie particulière, appelée invariance de jauge, construite avec ce qu'on appelle un groupe, nommé ici U(1). Or, comme Heisenberg l'avait montré, il existe une ʻcharge' conservée liée aux forces nucléaires, l'isospin, que l'on peut associer à une symétrie, une invariance de jauge là aussi, mais décrite par un groupe nommé SU(2).

Par conséquent se dirent-ils, on doit pouvoir construire l'analogue des équations de l'électromagnétisme avec l'équivalent des vecteurs électrique et magnétique, sauf que le groupe de symétrie des équations n'est plus U(1), avec comme conséquence la conservation de la charge électrique, mais le groupe SU(2) avec conservation de l'isospin.

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Malheureusement leur enthousiasme fut rapidement refroidi par un problème de taille : pour être cohérente et éviter certains problèmes, comme l'apparition d'infinis dans les calculs (exigence de renormalisabilité), les ʻphotons' du champ nucléaire devaient impérativement être sans masse, en contradiction avec l'expérience !

Quelques précisions sur ces infinis et la renormalisabilité.

Lorsqu'ils ont essayé de faire une théorie quantique des champs, prenant en compte la théorie de la relativité d'Einstein, les théoriciens sont rapidement tombés sur un casse-tête. La première théorie de champ quantifiée fut bien sûr l'électromagnétisme, or les calculs initiaux conduisaient à donner une valeur infinie à la masse l'électron ainsi qu'à d'autres quantités calculables dans cette théorie. On a cependant trouvé une série d'opérations mathématiques, dites de renormalisation, qui permettent de donner malgré tout un sens à ces calculs.

En gros, les infinis présents peuvent se soustraire pour donner des résultats finis. Bien que mathématiquement justifiées, de telles procédures ne sont que des recettes de calculs dont l'origine physique est obscure, en dernier ressort leur justification est seulement de donner des résultats en accord avec l'expérience.

Seules des théories admettant ces procédures de renormalisation, et par conséquent dites renormalisables, sont acceptables pour modéliser quantiquement les champs de particules fondamentales. Dans l'absolu, on pense qu'une théorie exacte des interactions ne devrait pas nécessiter de renormalisations car tous les résultats y seraient automatiquement finis (ce qui semble être le cas en théories des cordes). Comme nous ne l'avons pas encore il nous faut nous contenter de ces approximations pour le moment,elles donnent malgré tout des prédictions remarquablement bonnes.

• B : La théorie des champs unifiés de Heisenberg

Werner Heisenberg (prix Nobel)

A peu près au même moment, Heisenberg s'était lancé dans l'élaboration d'une théorie unifiée des interactions et des particules élémentaires dans laquelle un seul champ fondamental existait. Celui-ci était gouverné par une ʻéquation du Monde', avec un champ de proto-matière décrit par l'équivalent de l'équation de Dirac pour l'électron

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sauf qu'un terme d'auto interaction non linéaire remplaçait la partie de l'équation de Dirac décrivant la masse.

Ainsi, on partait initialement d'un champ de particule de masse nulle mais, par self interaction, comme dans la vieille théorie des électrons du début du XX ème siècle , une masse apparaissait automatiquement comme conséquence des équations avec une valeur fixée par la théorie elle-même. Cela allait même beaucoup plus loin, les différentes particules et forces devenaient des effets plus ou moins non linéaires ou composites des champs de particules fondamentaux. Un photon pouvait ainsi être non élémentaire et résulter d'une ʻfusion' de deux quanta de champ de cette équation ressemblant à celle de Dirac. Cela se comprend aisément car deux fermions de spin ½, comme des électrons, sont susceptibles de s'associer pour donner une particule de spin 1 comme un photon.

Or de tels effets se trouvaient déjà dans la théorie de la physique du solide, dans celles de la supraconductivité et du ferromagnétisme. De fait les moyens de surmonter les obstacles aux développements de la théorie de Yang et Mills viendront des théoriciens ayant travaillé aussi bien en théorie quantique des champs qu'en physique du solide.Des gens comme Nambu, Englert, Brout et surtout Higgs (cf. a1, a2, a3).

Les idées que Yang et Mills avaient proposées en 1954 allaient se révéler cruciales dans le déve loppement du fameux modè le s tandard compor tan t l'électromagnétisme et les lois des forces nucléaires fortes et faibles.

Le "principe de jauge" revêt toute son importance en 1961, sous l'impulsion des travaux de Salam et Ward, qui proposent alors une méthode générale pour construire une théorie de champs en interaction les uns avec les autres. Selon ce principe, la symétrie de jauge n'est pas seulement une symétrie globale, elle doit être élevée au rang de symétrie locale. Déjà en électrodynamique classique, un potentiel de jauge est introduit, à partir duquel peuvent se déduire les champs électrique et magnétique.

Partons d'une théorie ne contenant que des particules matérielles. Cette théorie possède une invariance globale, la possibilité de choisir arbitrairement la "phase" des fonctions d'ondes phi des particules matérielles. Une fonction d'onde prend des valeurs complexes, et se représente donc comme une "flèche" dans un plan complexe dont les axes correspondent aux parties réelles et imaginaires. La phase d'un nombre complexe correspond à la direction de la flèche le représentant (on se reportera utilement à « Lumière et matière :une étrange histoire » de R .Feynman). Dire qu'une théorie est invariante sous un changement de phase globale, c'est dire qu'il n'y a pas de direction privilégiée dans ce plan. Lorsqu'on élève cette invariance globale au rang d'invariance locale, on permet à cette direction arbitraire de dépendre de la position dans l'espace du point où la fonction d'onde est évaluée.

En conséquence, de nouveaux termes apparaissent dans les dérivées que l'on effectue sur ces fonctions d'ondes et qui permettent de construire les équations gouvernant les particules. Il est donc nécessaire d'introduire de nouveaux champs pour compenser ces termes supplémentaires, les nouvelles dérivées se transforment alors en ʻdérivées covariantes'. Ces nouveaux champs correspondent au potentiel de l'électrodynamique.

En mathématiques, on les nomme "connexions" car ils permettent de connaître la variation de la phase d'un point à un autre et ainsi de définir une opération de transport parallèle d'un point a un autre, ce qui est intuitivement semblable à la définition d'un opérateur de

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dérivation. Physiquement, ils correspondent aux champs des "bosons vecteurs" qui portent l'interaction entre les particules matérielles.

En fait, cette symétrie de jauge est très contraignante. A première vue, elle impose que toutes les particules soient sans masses, aussi bien les particules matérielles que les particules portant les interactions. Il semble donc qu'il n'y ait que peu d'espoir qu'en tel principe gouverne les constructions modernes de modèles pour les interactions fondamentales. Et pourtant...

• A - Le mécanisme de Higgs, Brout, Englert (cf. d3)Ici va intervenir un théorème important sur les caractéristiques d'équations susceptibles d'être utilisées pour les champs de Yang-Mills, le théorème de Goldstone. Celui-ci indique que pour chaque brisure spontanée de symétrie une particule sans masse doit apparaître. Voyons donc ce qui se cache derrière ce terme "brisure spontanée de symétrie".

Une image amusante a été proposée par Salam. Considérez une table ronde, prête à recevoir ses convives. Le long du périmètre de cette table alternent régulièrement assiettes et cuillères. Avant le début du repas, la situation est parfaitement symétrique et invariante par rotation. Mais lorsque le premier convive s'assoit, il choisit une cuillère à droite ou à gauche de son assiette. Ensuite, tous les autres convives doivent respecter la même convention que lui, faute de quoi l'un des convives n'aurait pas de cuillère.

On parle de brisure spontanée de symétrie lorsque les lois gouvernant l'évolution d'un système sont invariantes sous une certaine transformation, mais l'état fondamental (le vide en théorie des champs) ne respecte pas une telle invariance. Comme tous les états sont construits à partir de l'état fondamental, il résulte que la symétrie est cachée.

Anderson découvrit en 1963, dans le contexte des oscillations de plasma et dans un formalisme non relativiste, que le spectre d'une théorie avec brisure spontanée de symétrie peut en fait ne plus contenir ce fameux boson de Goldstone. Ce mécanisme a été ensuite redécouvert peu de temps plus tard, par Higgs, par Englert et Brout, et par Guralnik, Hagen et Kibble (cf. a1, a2, a3).

François Englet, et Robert Brout

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Ces travaux ont permis d'établir que le théorème de Goldstone n'était pas valable pour une symétrie locale. Dans le cas d'une symétrie locale, un calcul rigoureux montre en effet que le degré de liberté associé au boson de Goldstone est absorbé par le boson de jauge, qui acquiert ainsi une masse. De même, le couplage des particules matérielles au champ de Higgs donne un terme analogue à un terme de masse. La masse d'une particule est donc déterminée par l'intensité de son couplage au champ de Higgs.

Illustrons ceci de façon plus concrète, dans une théorie de type Yang-Mills on introduit l'analogue de l'équation du potentiel vecteur du champ électromagnétique ( ), que l'on va noter ici . Ce nouveau champ correspond a une connexion et permet de définir une opération de dérivation covariante :

Si il y avait un terme de masse, on aurait une équation de type Proca (cf. b1, b2). Or, on l'a vu, ceci ne peut se faire aussi simplement sans introduire des quantités infinies non renormalisables.

L'astuce est d'introduire un champ scalaire décrivant une particule, le fameux boson de Higgs.

Maintenant, les équations des champs en physique des particules sont dérivées d'une fonction mathématique appelée lagrangien. Il existe, par exemple, un lagrangien pour les équations de Maxwell du champ électromagnétique. On peut voir clairement que lorsqu'on effectue certaines transformations sur les variables de champs celui-ci reste invariant, et cela implique alors des lois de conservations comme celle de la charge.

On a alors un théorème général pour les lagrangiens d'équations de champ, dit théorème de Noether, qui relie les invariances de ces lagrangiens à des quantités conservées, comme par exemple des isospins pour les équations de Yang Mills.

Lorsqu'on écrit le lagrangien L d'un champ scalaire, on obtient une expression de la forme suivante : : L = où peut être considéré en première approximation comme la fonction d'onde dont on a parlé précédemment (on somme de 0 à 3 sur les indices, c'est la convention d'Einstein).

Une transformation de jauge correspond à un déphasage donné dans ce cas simple par :

On assure l'invariance du lagrangien du système champ de Higgs+champ de Yang-Mills en utilisant les dérivées covariantes dont on a déjà parlé.

La substitution donne alors : L=

Où l'on a tenu compte du fait que est un champ complexe. En développant l'expression

apparaît « magiquement » le terme :

Ainsi lorsque n'est pas nul, le facteur est équivalent à une masse pour le champ, ce qui nous donne une masse pour un boson W. A partir du lagrangien on obtient alors l'équation décrivant le champ de ce boson W.

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Elle s'écrit :

On peut montrer que la renormalisabilité de la théorie est assurée et l'on a donc introduit une masse pour nos bosons responsables de forces nucléaires.

C'est tout à fait similaire à l'apparition de masses pour les photons dans un plasma ou dans les phénomènes de supraconductivité comme l'effet Meissner, rien d'étonnant alors à ce que ce soit des gens travaillant en physique de la matière condensée qui en ont eu l'idée.

Un point clé reste à éclaircir, pourquoi le champ a-t-il une valeur non nulle dans le vide ? Pour cela il nous faut introduire un potentiel d'auto interaction du champ, de la forme donnée par le graphique suivant.

On y voit que l'état d'énergie minimum est donné par alors que, lorsque est nul, le champ se trouve dans une position d'équilibre instable, et que de légères perturbations suffiront à lui faire dévaler la pente de la colline.

On donne souvent l'exemple de la brusque déformation d'un clou soumis à une pression et c'est cela qui est aussi relié à l'idée d'une brisure spontanée de symétrie.

Des potentiels de la forme indiquée étaient déjà connus dans la théorie du ferromagnétisme.

Ils décrivent l'orientation des moments magnétiques (liés au spin) des atomes, ceux-ci se comportent alors comme des minis aimants. Lorsque =0, le matériau n'est pas aimanté mais lorsque ne l'est plus, les moments magnétiques s'alignent spontanément pour donner un matériau aimanté. Il y a bien brisure de symétrie car la direction arbitraire des moments, l'invariance par rotation dans l'espace, n'existe plus lorsqu'ils sont majoritairement alignés dans une même direction.

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En fait comme on a affaire à un champ complexe pour le champ du boson de Higgs, =1+i 2, le potentiel est mieux représenté par la surface à deux dimensions suivante.

On reconnaît au centre l'état d'équilibre instable du potentiel où le champ de Higgs s'annule.

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• B - La théorie unifiée de Glashow Salam Weinberg (cf. d3, d4)

Tous prix Nobel en 1979

Le modèle standard décrit de façon cohérente les interactions électromagnétique et nucléaire faible. La recette pour construire une théorie de jauge est aujourd'hui bien comprise :

- Choisir un groupe de symétrie et rassembler des particules dans des ʻ isospins' associés, on parle alors de multiplets.- Introduire les bosons de jauge qui portent les interactions et les champs de matière en choisissant leur représentation.- Ajouter les champs de Higgs afin de générer les masses des bosons vecteurs.- Définir une dérivation covariante produisant les termes d'interactions entre les champs.- Choisir alors l'état du vide de telle sorte que son énergie soit minimale. A cette étape cruciale une partie des symétries est spontanément brisée.

Glashow proposa ainsi en 1961 le groupe de jauge SU(2)*U(1) pour unifier électromagnétisme et interaction nucléaire faible. Un modèle similaire fut proposé en 1964 par Salam et Ward.

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Enfin Weinberg en 1967 et Salam en 1968 ont synthétisé ces efforts, en incluant le mécanisme de Higgs afin de préserver l'invariance de jauge.

Remarquez que quarks et leptons forment trois familles et qu'ils sont groupés par doublets d'isospins (ex quark u et d , électron et neutrino électronique).

Il n'était alors pas encore démontré que le modèle ainsi construit était renormalisable (cf. section suivante).

Cette théorie considère que le champ électromagnétique est véhiculé par un photon associé à un potentiel vecteur , sans masse, et les processus nucléaires dits faibles étant dus à l'échange de bosons massifs, le neutre et les , chargés associés à des potentiels vecteurs et .

Notons qu'à ce stade le modèle ne contient pas encore la chromodynamique quantique, qui décrit l'interaction des quarks et des gluons et est responsable de la cohésion nucléaire.

Il s'agit de l'interaction forte (par opposition à l'interaction faible, responsable de la désintégration bêta du noyau).

Le groupe employé est ici SU(3),son incorporation fut rapidement faite avec le modèle des quarks et les bosons vecteurs associés que l'on nomme gluons notés g.

Notons également que la gravitation n'est toujours pas incluse dans le modèle standard. Dans le contexte général de l'origine de la masse et considérant le rôle fondamental de la notion de masse pour les phénomènes gravitationnels, ce problème théorique criant est pour le moins déplaisant.

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• C : La révolution ʻt Hooft (cf. d1, d2)

Gerard t Hooft

Au début des années 70, Gerard ʻt Hooft et Martinus Veltman (prix Nobel de physique 1999) apportent les dernières contributions qui feront de la théorie électrofaible de Glashow-Salam-Weinberg une théorie opérationnelle.

Il fallait en effet prouver la renormalisabilité de la théorie. C'est ce qu'ils firent en prouvant la possibilité d'éliminer tous les infinis dans toutes les théories de Yang-Mills non abélienne massives comportant le mécanisme de Higgs.

Ils firent appel aux techniques mises au point vingt ans plus tôt par Richard Feynman l'un des créateurs de l'électrodynamique quantique relativiste, lui aussi prix Nobel avec Schwinger et Tomonaga (1965).

Notamment ʻt Hooft fit grand usage de la fameuse intégrale de chemin de Feynman, une formulation différente des lois de la mécanique quantique de Heisenberg/Schrödinger, mieux adaptée aux calculs en théorie quantique des champs.

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Richard Feynman, grand théoricien

• D : Les confirmations expérimentales : les courants neutres et les bosons W

Courant neutres (chambre à bulles Gargamelle 1973)

Le début des années 70 voit la mise en évidence des courants neutres, c'est-à-dire l'existence de processus d'interaction faible liés à l'échange de Z0 et la découverte du quark charmé.

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Découverte boson W (CERN1982)

Le modèle électrofaible et les théories de jauge acquièrent subitement une grande crédibilité et le couronnement aura lieu au début des années 80 avec la mise en évidence directe au CERN des bosons W et Z.

Désintégration de Z0 (expérience UA2, CERN)

Naturellement les succès de ce qu'on va maintenant appeler le modèle standard vont rapidement convaincre les théoriciens d'aller plus loin, et ce dès le milieu des années 70 après la découverte des courants neutres et du quark charmé.

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La première idée est bien sûr d'avoir une théorie complètement unifiée des interactions électromagnétiques et nucléaires.

On peut y arriver, en principe du moins, en étendant le groupe de symétrie des équations de champs (cf. d5). La première tentative fut celle de Howard Georgi, elle fut malheureusement trop belle pour être vraie. Il proposa le groupe SU(5) comme groupe fondamental, celui-ci donnant effectivement par brisure de symétrie les groupes SU(3)*SU(2)*U(1).

C'était particulièrement séduisant, notamment parce que l'augmentation du nombre d'états possibles pour les particules de type Higgs, nécessaire dans cette théorie, permettait non seulement de donner des masses aux bosons intermédiaires responsables des interactions, mais aussi maintenant à toutes les particules de matière comme les leptons et les quarks à partir d'un seul et unique groupe.

En bonus la possibilité d'expliquer l'asymétrie matière/anti-matière de l'Univers était contenue dans celle-ci. Malheureusement cela impliquait un taux de désintégration du proton que l'expérience n'a pas validé.

Simultanément des tentatives pour incorporer la gravitation furent faites. La plus importante de toute est l'idée de supersymétrie (cf. d5). En étendant les symétries de l'espace-temps, il devenait possible de considérer les bosons et les fermions, et donc dans un certain sens les particules de matière et les bosons vecteurs des interactions, comme deux états d'une même super particule.

On introduit alors une sorte de super isospin comme pour la théorie des forces nucléaires. Plus remarquable, si l'on introduit donc bien un groupe de supersymétrie et qu'on le ʻjauge' la gravitation apparaît automatiquement,cette supersymétrie locale prend d'ailleurs le nom de supergravité. Le modèle le plus simple de supersymétrie consiste à associer à chaque particule du modèle standard son partenaire supersymétrique.

Cela conduit, au minimum, à doubler le nombre de doublets (complexes) de Higgs et implique des relations entre les différentes masses des particules.

Il y a toutefois des difficultés, si la supersymétrie était exacte les partenaires supersymétriques de ces particules du modèle standard devraient avoir la même masse. Ainsi le sélectron, le boson associé à l'électron, devrait avoir une masse identique et être produit facilement en accélérateur. Ce n'est pas le cas, ce qui indique une brisure de la supersymétrie et des masses élevées pour ces particules.

Le problème de l'origine des masses des particules, malgré de grands progrès reste donc entier.

- A : Recherches au LEP

Du point de vue de l'expérience, on ne peut pas détecter le Higgs directement, mais on peut le faire indirectement par les particules dans lesquelles il se désintègre lors de certaines réactions dont on mesure les caractéristiques (types de particules produites,probabilités de ces réactions etc…) (cf. b3, b4).

On peut aussi avoir des renseignements indirects sur sa masse par la mesure de certains paramètres comme la masse du quark top.

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On a donc cherché le Higgs au LEP à Genève par l'intermédiaire de collisions électron- positron.

On voit ici des produits possibles de la collision d'électrons et de positrons, par ex en particule de Higgs (Ho) se désintégrant en quarks ʻbeau' (b).

On a d'ailleurs peut-être fait sa détection quelques temps avant la fermeture programmée du LEP en 2000(c1) . Sa masse serait de 115 GeV environ.

- B : Découvertes du Higgs au LHC ?

Le LHC, ou Large Hadron Collider, est tout désigné pour découvrir le Higgs.

On y fera entrer en collision des protons, et l'énergie mise en jeu pour chaque collision pourra être de 14 Tev alors que l'on pense pour des raisons liées à la théorie électrofaible (unitarité) que sa masse ne peut pas dépasser 1 Tev.

Les détecteurs Atlas et CMS y auront pour tâche principale la détection du Higgs et des particules supersymétriques. La mise en évidence de la supersymétrie au LHC aurait de profondes conséquences sur notre conception du Higgs, s'il existe, et plus généralement sur l'origine de la masse des particules et l'unification des interactions (cf. b3).

Du point de vue de la théorie il y a de nombreux prolongements. Le boson de Higgs pourrait ne pas être fondamental et sa structure pourrait être composite. Il pourrait en fait être un état lié de deux fermions comme dans les théories dites de « technicolor ». D'autres, comme le physicien théoricien Christophe Grojean, explorent la possibilité de s'en passer totalement dans le cadre des cosmologies branaires avec des dimensions d'espace supplémentaires.

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Une autre hypothèse est celle de l'Univers avec deux feuillets issue d'une généralisation de la géométrie appelée géométrie non commutative. Une hypothèse dont le promoteur est le mathématicien français Alain Connes, lauréat de la médaille Fields, l'équivalent du prix Nobel en mathématiques. Le boson de Higgs est alors un effet dérivé de cette géométrie.

Alain Connes

Dans le cadre des théories de grandes unifications comme SU(5), SO(10) etc… la présence de champs de Higgs et de la brisure de symétrie selon le mécanisme de Higgs a de nombreuses conséquences intéressantes pour la cosmologie et, là aussi, des modèles issus de la physique de la matière condensée sont d'une grande importance. C'est un vaste sujet et l'on ne saurait faire mieux que de renvoyer à l'excellent dossier de Thierry Lombry sur la théorie de l'inflation.

On y verra le rôle central joué par des champs scalaires de type Higgs.

Avec de la chance, la découverte du Higgs avec le LHC vers 2007/2008 apportera enfin une réponse à une vielle question : quelle est l'origine de la masse des particules.

L'auteur de ce dossier remercie chaleureusement Loïc Villain et François Xavier Girod pour toute l'aide reçue dans l'élaboration de ce dossier. Celle-ci fut précieuse aussi bien pour la forme que le fond et, selon la formule consacrée, s'il devait rester des erreurs, ce serait les miennes et non les leurs... Place aux liens !

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A : L'historique et le témoignage de Peter Higgs lui même

- a1 : physicsweb.org/articles/world/17/7/6- a2 : wlap.physics.lsa.umich.edu/umich/mctp/conf/2001/sto2001/higgs/

- a3 : Englert et Brout sur Yang Mills et la brisure de symétrie :

xxx.soton.ac.uk/abs/hep-th/0203096xxx.soton.ac.uk/abs/hep-th/0203097xxx.soton.ac.uk/abs/hep-th/0406162

B : Des résumés ou introductions techniques

- b1 :http://www.phy.duke.edu/courses/346/section1/EssayDeanHidas.pdf

- b2 : www-cosmosaf.iap.fr/IAP_web/Cosmology-Particle-astro/Particules%20et%20champs.htm

- b3 : hep.ps.uci.edu/quarknet/LectureJohnson.ppt

- b4 : www1.physik.tu-muenchen.de/~bmusch/uni/Higgs/Higgs.pdf

C : La découverte du Higgs au LEP ?

- c1 : dphs10.saclay.cea.fr/Spp/Higgs/higgs/

D : Sur la théorie quantique des champs et le modèle standard

Bell :- d1 : www.lpthe.jussieu.fr/DEA/bell.htmlʻt Hooft :- d2 : www.phys.uu.nl/~thooft/lectures/basisqft.pdf

modèle standard :

- d3 : xxx.lanl.gov/abs/hep-ph/0001283

modèle électrofaible (Quigg) :

- d4 : arxiv.org/abs/hep-ph/0204104

Ellis (unifications)

- d5 : xxx.lanl.gov/abs/hep-ph/9812235

  Compilation HPG ULg 1/2009

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