Vacuite Definition

8
Śūnyatā Śū nyat ā ,terme sanskrit,(devanāgarī : श◌ून◌्यत◌ा ;en pāli suññat ā ,enchinoisk ōng ),désignedansle bouddhisme la vacuité des êtres et des choses, leur absence d'être en soi (anā tman), autrement dit l'inexistence de toute essence, de tout caractère xe et inchangeant. Elle s’ap- pliqueauxchosesaussibienqu'auxpenséesetauxétats d'esprits.Elleestbeaucoupliéeàl'ainsité(tathātā). L’ Enso estlesymboledelavacuitédansle bouddhismezen. 1 Tentatived'approche La vacuité est un terme qui peut être mal interprété. Ainsi, Ringou Tulkou Rimpotché en parle en ces termes [réf.souhaitée] : « Selon le bouddhisme, tout est en es- sencevacuité(śūnyatā),tantle samsâra quele nirv āṇa. Śūnyatā ne signie pas “vide”. C'est unmottrèsdicileàcomprendreetà nir. C'est avec réserve que je le traduis par “va- cuité”.Lameilleuredénitionest,àmonavis, interdépendance”, ce qui signie que toute chosedépenddesautrespourexister.[...]Tout est par nature interdépendant et donc vide d'existencepropre.» D’autres bouddhistes francophones disent que « La va- cuiténevidepasleschosesdeleurcontenu,elleestleur véritable nature » [1] . Il ne s’agit donc pas de nihilisme. Dansle Prajñā nā mamūlamadhyamakak ā rik ā ,ditTrai- té du Milieu, Nāgārjuna arme quant à lui que « nous appelonsvacuitécequiapparaîtendépendance» [2] . Selonlathèsedelavacuité,les phénomènes sedénissent nonpasparunenaturepropre,une choseensoi qui leur appartiendraitenpropre,maisuniquementparl'ensemble desrapportsqu'ilsontentreeux:ilsnetiennentpasleurs propres caractéristiques d'eux-mêmes. Dans cette pers- pective, parler d'un phénomène isolé n'est donc l'eet qued'uneconventiondelangage.Bienquenotreespritne puisse se passer d'une telle convention, cette disjonction n'apasd'êtrepropre,sonexistencedépendd'autresphé- nomènesquinepeuventêtresimultanémentappréhendés dufaitdelimites cognitives. Selon FranciscoVarela «il n’yarienàsaisirquiferaitdespersonnesetdesphéno- mènescequ’ilssont» [3] . Cependant, il serait erroné de ramener exclusivement la vacuitébouddhiqueàl'idéed'interdépendanceoudere- lativité:lavacuitén'estpasunconceptquirelèveseule- ment de la pensée discursive, elle est destinée d'abord à ouvrir l'intuition métaphysique (prajñā ) du pratiquant. Il s’agit de comprendre qu'il y a une diérence fonda- mentale entre la façon dont nous percevons le monde, y compris nous-même, et la réalité de ce monde. Le réa- lismenaïf,quivoitlemondecommepeupléd'entitésau- tonomes, séparées et durables, objectivement existantes, est ici déclaré comme une erreur métaphysique que la prajñā , à mesure qu'elle se développe, permet de dissi- per,parlavuedirectede śūnyat ā ;parexempleaumoyen de vipassanabhavana .C'estuneperceptiondirecte, non duale etnon-intellectuelle,delanaturedesphénomènes: « La vacuité n'est ni le néant ni un es- pace vide distinct des phénomènes ou exté- rieur à eux. C'est la nature même des phé- nomènes. Et c'est pour cela qu'un texte fon- damental du bouddhisme, le SoûtraduCœur, dit : “La vacuité est forme et la forme est vacuité extquotedbl. D'un point de vue ab- solu, le monde n'a pas d'existence réelle ou concrète.Donc,l'aspectrelatif,c'estlemonde phénoménal,etl'aspectabsolu,c'estlavacuité. 1

description

Vacuite Definition

Transcript of Vacuite Definition

  • nyat

    nyat, terme sanskrit, (devangar : ; en plisuat, en chinois kng), dsigne dans le bouddhismela vacuit des tres et des choses, leur absence d'treen soi (antman), autrement dit l'inexistence de touteessence, de tout caractre fixe et inchangeant. Elle sap-plique aux choses aussi bien qu'aux penses et aux tatsd'esprits. Elle est beaucoup lie l'ainsit (tatht).

    LEnso est le symbole de la vacuit dans le bouddhisme zen.

    1 Tentative d'approche

    La vacuit est un terme qui peut tre mal interprt.Ainsi, Ringou Tulkou Rimpotch en parle en cestermes[rf. souhaite] :

    Selon le bouddhisme, tout est en es-sence vacuit (nyat), tant le samsra que lenirva. nyat ne signifie pas vide. C'estun mot trs di cile comprendre et dfinir.C'est avec rserve que je le traduis par va-cuit. La meilleure dfinition est, mon avis,interdpendance, ce qui signifie que toute

    chose dpend des autres pour exister. [...] Toutest par nature interdpendant et donc vided'existence propre.

    Dautres bouddhistes francophones disent que La va-cuit ne vide pas les choses de leur contenu, elle est leurvritable nature [1]. Il ne sagit donc pas de nihilisme.Dans le Prajnma mla madhyamaka krik, dit Trai-t du Milieu, Ngrjuna a rme quant lui que nousappelons vacuit ce qui apparat en dpendance [2].

    Selon la thse de la vacuit, les phnomnes se dfinissentnon pas par une nature propre, une chose en soi qui leurappartiendrait en propre, mais uniquement par l'ensembledes rapports qu'ils ont entre eux : ils ne tiennent pas leurspropres caractristiques d'eux-mmes. Dans cette pers-pective, parler d'un phnomne isol n'est donc l'e etque d'une convention de langage. Bien que notre esprit nepuisse se passer d'une telle convention, cette disjonctionn'a pas d'tre propre, son existence dpend d'autres ph-nomnes qui ne peuvent tre simultanment apprhendsdu fait de limites cognitives. Selon Francisco Varela ilny a rien saisir qui ferait des personnes et des phno-mnes ce quils sont [3].

    Cependant, il serait erron de ramener exclusivement lavacuit bouddhique l'ide d'interdpendance ou de re-lativit : la vacuit n'est pas un concept qui relve seule-ment de la pense discursive, elle est destine d'abord ouvrir l'intuition mtaphysique (praj) du pratiquant.Il sagit de comprendre qu'il y a une di rence fonda-mentale entre la faon dont nous percevons le monde, ycompris nous-mme, et la ralit de ce monde. Le ra-lisme naf , qui voit le monde comme peupl d'entits au-tonomes, spares et durables, objectivement existantes,est ici dclar comme une erreur mtaphysique que lapraj, mesure qu'elle se dveloppe, permet de dissi-per, par la vue directe de nyat ; par exemple au moyende vipassana bhavana. C'est une perception directe, nonduale et non-intellectuelle, de la nature des phnomnes :

    La vacuit n'est ni le nant ni un es-pace vide distinct des phnomnes ou ext-rieur eux. C'est la nature mme des ph-nomnes. Et c'est pour cela qu'un texte fon-damental du bouddhisme, le Sotra du Cur,dit : La vacuit est forme et la forme estvacuit extquotedbl. D'un point de vue ab-solu, le monde n'a pas d'existence relle ouconcrte. Donc, l'aspect relatif, c'est le mondephnomnal, et l'aspect absolu, c'est la vacuit.

    1

  • 2 3 DANSLE BOUDDHISMEMAHYNA

    [] Les phnomnes surgissent d'un processusd'interdpendance de causes et de conditions,mais rien n'existe en soi ni par soi. La contem-plation directe de la vrit absolue transcendetout concept intellectuel, toute dualit entre su-jet et objet.

    Le Moine et le Philosophe, Jean-Franois Revel,Matthieu Ricard, 1997

    L'absence de nature propre est en fait une interprtationpossible de la notion de vacuit. C'est l'interprtation laplus courante, enseigne par le Madhyamaka. Dautrescoles bouddhistes proposent des interprtations di -rentes. Par exemple dans l'cole idaliste du Cittamtra,la vacuit correspond l'absence de dualit entre sujetet objet, cette dualit n'tant qu'une construction concep-tuelle (parikalpita), les phnomnes n'ayant ni caractris-tique inhrente (lakana-nihsvabhavata), ni productioninhrente (utpatti-nihsvabhavata), ni caractre ultime in-hrent (paramrtha-nihsvabhavata).[rf. souhaite]

    2 Dans le Bouddhisme theravda

    La vacuit, traduction de suat, enseigne que toutesles sensations, perceptions, la conscience sont dpourvuesd'une personnalit (antman) et dpourvues de perma-nence (anitya). Le terme de vacuit est trait dans plu-sieurs suttas, en tant que

    Qualit, caractristique des choses ; Objet sur lequel est porte l'attention ; Contemplation de la vacuit : suata vipassana.

    De mme, dans le Visuddhimagga, la vacuit correspond l'absence demoi, ou anatta. La vacuit, dans le Therav-da, renvoie donc aux trois caractristiques de l'existence :

    La simple expression vide de soi r-sume lesmots impermanent (anicca), insatis-faisant (dukkha) et sans soi (anatt) . Quandquelque chose est en perptuelle volution, d-nu de tout lment permanent et stable, onpeut aussi dire de lui quil est vide.

    Buddhadasa Bhikkhu, Manuel pour lHumanit, 1964

    La vacuit correspond aussi la voie moyenne boud-dhique qui se place distance des deux extrmes que sontl'ternalisme et le nihilisme. Ajahn Brahm donne la com-paraison du point mathmatique :

    Un point n'a pas de taille : il est plus petitque tout ce qui est mesurable, et pourtant il estplus grand que rien du tout. Dans un sens, on

    ne peut dire qu'il existe, car il ne persiste pas, iln'est pas continu dans l'espace. Mais on ne peutdire qu'il n'existe pas, puisqu'il di re claire-ment du rien. Il est semblable la nature ins-tantane de l'exprience consciente. Rien n'estpermanent, donc ce n'est pas quelque chose,mais quelque chose se produit, donc ce n'estpas rien[4].

    Le thme de la vacuit apparat dans le Sua Sutta duCanon pli : tant donn qu'il est dpourvu d'un soi oude quoi que ce soit appartenant un soi, on dit dans cesens que le monde est vide .

    Le Cula-suata Sutta y voit un objet de mditation : Vous devez vous entraner en disant : Entrant dans cettevacuit qui est compltement pure, incomparable et su-prme, j'y demeure . De mme, Edward Conze souligneson aspect sotriologique :

    La vacuit n'est pas une thorie, maisune chelle qui mne vers l'infini. Une chelleest faite non pas pour qu'on en discute, maispour qu'on y grimpe. C'est un concept pratique,qui incarne une aspiration, et non un point devue. Elle ne sert qu' nous aider nous dbar-rasser de ce monde et de l'ignorance qui nousy attache. Elle n'a pas un sens unique, maisplusieurs sens, qui se dvoilent successivementpar tapes au cours du processus par lequel ontranscende le monde par la sagesse.

    Selected Sayings from the Perfection of Wisdom, 1978

    La vacuit fait galement partie des trois samadhis, ouportes du nirva : vacuit, sans-signe (animitta), sansprhension (apranihita).

    3 Dans le bouddhisme mahyna

    Dans le bouddhisme mahyna, la vacuit est l'objet dela Prajaparamita, la Perfection de la Sagesse, groupe destras du Mahyna portant sur la sagesse transcendante,centre autour de la vacuit. Elle est notamment tudiepar Nagarjuna, qui a fond ainsi l'cole Madhyamaka quirepose entirement sur la notion de vacuit. Entre autres,Nagarjuna nonce dix-huit formes particulires de vacui-t, la principale, qui rsume toutes les autres, tant la va-cuit de tous les dharma (sarvadharmanyat).

    En e et, dans son Rtnaval, rya Ngrjuna dit quetant qu'on a l'apprhension des agrgats (ou phnomnes= dharmas), on aura une apprhension du soi person-nel (skt. skandhagraho yavad asti, tavad evham iti api).C'est pourquoi ses ouvrages dialectiques semploient d-construire toute forme de rification.

    Qu'est-ce qui est vide ? Et vide de quoi ? Ce sont des ques-tions essentielles pour le Bouddhisme car les rponses

  • 3.2 Dix-huit vacuits 3

    sont d'un intrt sotriologique incontournable.

    Tout est vide, depuis le moindre grain de poussire jus-qu' tout l'univers et ce qui le caractrise.

    Mais vide de quoi ?

    Vide d'une existence intrinsque, inhrente ou indpen-dante ; vide d'une nature propre, rsistant l'analyse ; videde toute essence objective. De ce fait, cette vacuit et laVoie du Milieu qui l'enseigne transcendent les extrmesque sont l'ternalisme et le nihilisme :

    Assimiler l'absence d'tre en soi l'inexistence est une vue d'annihilation quimne aux existences infortunes. D'autre part,surimposer un tre en soi la vacuit est unevue d'ternalisme qui perptue le cycle[5].

    En e et, les choses existent mais pas de la manire dontelles nous apparaissent, pas en soi. C'est pourquoi cetteontologie typiquement bouddhiste est qualifie de vacuitde soi (skt. svabhava-nyat, tib. rangtong).

    Selon la branche trs subtile Prasagika de la Voie m-diane, l'existence de toutes choses est purement nominale(tib. ming tsam) car dpend d'un nom ou d'un concept(tokpai tak tsam) qui les dsigne sur la base de leurs ca-ractristiques ou base d'imputation (tak shi).

    Les enseignements trs prcis duMahyna sur la vacuitne sont que des dveloppements du non-soi enseign dansle Vhicule Fondamental car tout y est dj inscrit expli-citement ou implicitement. Le PrasagikaMdhyamikaconsidre que les Arhats ont ralis exactement la mmevacuit profonde que les Bouddhas. La seule di rencerside dans l'aspect vaste de la Voie.

    Voir les nombreux enseignements de Sa Saintet le DalaLama, comme Se voir tel qu'on est, ou Cent lphants surun brin d'herbe, entre autres.

    3.1 Quatre vacuits

    1. Bhva-nyat : vacuit des choses substantielles

    2. Abhva-nyat : vacuit des non-choses : l'espace,le nirva

    3. Prakrti-nyat : vacuit de la nature inhrente

    4. Parabhva-nyat : vacuit autre, soit le caractretranscendant des phnomnes.

    3.2 Dix-huit vacuits

    Le Prajaparamita stra expose seize vacuits queCandrakrti commenta. D'autres textes en donnent 18 ou20. Nagarjuna en distingue 18 :

    1. Adhyatma-nyat : vacuit des phnomnes in-ternes (il, oreille, nez et autres facults des sens),vacuit du sujet

    2. Bahirdha-nyat : vacuit des phnomnes ex-ternes, perus, vacuit de l'objet

    3. Adhyatma-bahirdha-nyat : vacuit interne et ex-terne la fois (la distinction entre interne et externe,entre sujet et objet, est illusoire)

    4. nyat-nyat : vacuit de la vacuit (la vacuitelle-mme n'est pas une essence)

    5. Mah-nyat : vacuit de l'immensit (vide et irra-lit de l'espace) ou vide de la distinction entre condi-tionn et inconditionn (selon les interprtations)

    6. Paramrtha-nyat : vacuit de l'ultime (de la V-rit ultime, de la chose en soi : le nirvana est videde nirvana)

    7. Samskrita-nyat : vacuit des phnomnes com-poss, qui existent de par la loi de causalit, voircoproduction conditionne

    8. Asamskrita-nyat : vacuit des phnomnes in-composs, incrs (l'espace, le nirvana)

    9. Atyanta-nyat : vacuit de ce qui est au-del desextrmes (du nant et de la permanence), vacuit del'infini

    10. Anavaragra-nyat : vacuit de ce qui n'a ni com-mencement ni fin, le samsara, le temps, ou l'ternit

    11. Anavakara-nyat : vacuit de l'indestructible, oude la dispersion, ou de la non-rpudiation

    12. Prakrti-nyat : vacuit de nature des phnomnes

    13. Sarvadharma-nyat : vacuit de tous les dhar-mas (phnomnes conditionns ou inconditionns)

    14. Svalakana-nyat : vacuit des caractres propres,de l'individuation

    15. Anupalambha-nyat : vacuit del'inapprhendable, de l'imperceptible (aucuneralit ne peut tre perue dans les phnomnes)

    16. Abhava-nyat : vacuit du non-tre, des non-choses

    17. Svabhava-nyat : vacuit de nature propre, del'tre

    18. Abhavasvabhava-nyat : vacuit de la naturepropre et du non-tre, l'opposition entre tre et non-tre est elle-mme nie.

  • 4 4 DANSL'HINDOUISME

    3.3 Deux vacuits

    L'anagrika Prajnanda indique deux sens possiblespour la vacuit, exprims par exemple dans des crits telsque le Stra du Cur :

    D'une part, la qualit phnomnale d-notant la non-essence des phnomnes ; mieuxque par vacuit, elle pourrait se traduire parbullit. Les phnomnes sont comparables des bulles qui naissent, gonflent, se dgonflentou crvent. Cette notion de vacuit-bullitest toujours accoler tathat, la tellit, laquiddit. Chaque bulle est vide mais telle. Ladeuxime signification est ce que l'on pour-rait appeler vacuit absolue, par exemple : -nyatyam na rpam, na vedan, na samj, nasamskra, na vijnam (dans la vacuit, il nya ni forme, ni sensation, ni notion, ni facteurdexistence ni connaissance discriminative).La ngation est totale. (Bouddhisme gnostique,1981)

    Par ngation totale, la Voie mdiane ne nie pas l'existencedes phnomnes ou leur existence relative, illusoire, maispar contre cette ngation totale nie compltement toutenature propre ou intrinsque des phnomnes. On pour-rait dire qu'il y a de l'existence, mais pas d'essence. Lesphnomnes ne sont pas nis, ce qui est ni est leur es-sence que nous concevons tort et de manire innecomme intrinsque ou indpendante. Et comme c'estl'existence indpendante des phnomnes qui est nie,leur existence dpendante ou purement nominale (tib.tokpai tak tsam) est a rme. C'est pourquoi les deuxtypes de vacuits exprims par l'anagrika Prajnandasont unis en un seul par les tenants du Prasagika ex-gtes des Prajpramit Stras.

    La distinction entre vacuit relative et vacuit absoluerejoint la distinction tablie par Nagarjuna entre vritconventionnelle et vrit absolue, distinction qui est elle-mme conventionnelle. Plutt que de parler de deux typesde vacuits, on parlera de deux types de vrits :

    La premire est la vrit absolue, la se-conde celle de l'apparence. Destitues de lapremire, les choses vides d'tre propre pos-sdent pleinement la seconde. Elles existentcomme voile derrire lequel il n'y a rien, maiselles existent en tant que voile. La doctrine pro-fesse en de du voile a rme qu'il n'y a rienau-del, en vrit absolue, mais professe aussila vrit du voile en tant que tel. Selon le pointde vue d'o elle envisage les choses, elle niel'existence ou elle l'a rme. Elle se tient doncentre l'a rmation et la ngation, dans une pro-position moyenne d'o le nom qui le dsignecouramment ct de celui de nyavda et qui

    vise prcisment cette proposition : Madhya-maka, la Moyenne. (Jean Filliozat, Les philo-sophies de l'Inde, PUF, 1987)

    La vacuit relative des phnomnes ne constitue pas defaon ultime une nature propre, vacuit de la vacuit, etle conditionnement ne peut tre inconditionn : la non-dualit ne dbouche pas sur un quelconque monisme, carsil est vrai que les tres sont vides, le non-tre est vide, etl'Absolu lui-mme est vide, et la distinction entre relatifet absolu n'a pas lieu d'tre ultimement. Nous ne sommesdonc pas di rents de l'Absolu, et c'est pour cela qu'unelibration (nirva) est possible :

    Tous les phnomnes sont semblables un arc-en-ciel : exempts de toute ralit tan-gible. Une fois ralise la vraie nature du rel,qui est d'tre vide et pourtant de se manifes-ter sous la forme du monde des phnomnes,l'esprit se libre de l'emprise de l'illusion.Quand vous saurez laisser vos penses se dis-soudre par elles-mmes mesure qu'elles sur-gissent, elles traverseront votre esprit de lamme faon qu'un oiseau parcourt le ciel : sanslaisser de trace.

    Dilgo Khyentse Rinpoch

    Cet Absolu n'a pas d'existence absolue car rien n'en pos-sde ; c'est une ralit omniprsente et c'est en cela qu'onpeut dire que nous ne sommes pas di rents de cette ra-lit vide. Et en dfinitive, ni Ngrjuna ni ses suivantsprasagikas ne font de di rence entre les deux types devacuit car le fait de nier l'existence inhrente de la forme,par exemple revient a rmer qu'elle existe bien maisseulement de manire dpendante.

    Voir la fameuse stance bouddhique :

    Puisqu' il n'est r ien qui ne soit dpendant, Il n'estr ien qui ne soit vide.

    (Ngrjuna, Madhyamakastra (Madhyamakvatra(en)), stance 19 du Chapitre XXIV)

    4 Dans l'hindouisme

    Le bouddhisme n'est pas la seule doctrine avoir dvelop-p la notion de vacuit. Certaines coles hindoues y fontaussi rfrence. Le shivasme du Cachemire a particuli-rement dvelopp cette notion. Par exemple, le VijnaBhairava Tantra a rme :

    Tout cet univers est priv de ralit limage dun spectacle fictif. Quelle est la ra-lit dun tel spectacle ? Si lon est fermementconvaincu de cette vrit, on acquiert la paix.

  • 5Comment y aurait-il connaissance ou activitpour un Soi a ranchi de toute modalit ? Lesobjets externes dpendent de la connaissanceet partant de l, ce monde est vide. (traductionLilian Silburn)

    Pour eux, la vacuit est une tape ncessaire, mais nonsu sante. Elle est destine tre dpasse. Il y a doncplusieurs stades de vacuit allant de l'infrieur ( com-mencer par le sommeil profond), aux stades suprieurs.Il y aurait sept sortes de vide, exposs dans un crit telque le Svacchandatantra[6] :

    le vide infrieur : il met fin aux impressions de dua-lit l'gard de sa personne limite et de son corps ;

    le vide intermdiaire : pure conscience de soi, sa-mdhi actif de pure intriorit extquotedbl, intui-tion du quatrime tat (nirvikalpasamdhi) extquo-tedbl ;

    le vide suprieur : le Je purifi met fin aux limitesindividuelles, le Soi se rvle ;

    le vide universel de l'nergie omnipntrante : har-monie spontane entre vie intrieure et vie ext-rieure, vyoman ou immensit cosmique ;

    le vide de l'galit (saman) : fondement apaisde la manifestation universelle, extquotedblnergieimpassible et gale ;

    le vide supramental (unman) : non-vide absolu quilimine le vide et son oppos extquotedbl ;

    le septime vide : le Vide parfait, l'absolu, la pl-nitude, la flicit cosmique, Paix suprme ou Para-maiva non-di rent de sa libre nergie.

    La vacuit y est conue comme une sorte de vide ou detrou caractristique d'un dveloppement insu sant de laconscience. Il vaut donc mieux ne pas sy attarder, ou bienon risque de sy perdre sans remde.

    C'est ainsi qu'ils ont dvelopp un principe critique dela vacuit bouddhiste contre laquelle ils ont adress desvres mises en garde. Cependant, la dfinition utilisevarie entre les deux mouvements : tandis que les boud-dhistes considrent la vacuit comme tant la vritablenature des choses, le shivasme du Cachemire la consi-dre comme un moyen de dveloppement spirituel. Bienque les termes soient semblables, ils ne recouvrent pas lesmmes concepts.

    En e et, ce qui est nomm vacuit extquotedbl n'estpas forcment cette ngation non-a rmative (prasajya-pratiseddha) ou cette vacuit de soi (skt. svabhava-shunyata) dont parle le bouddhisme avec surtout sa philo-sophie consquentialiste de la VoieMdiane (Prasangika-Madhyamika)[7]. D'un point de vue hindouiste, on peuttre dans un vide mais ce vide peut tout simplement tre

    une vacuit d'altrit (parabhava-shunyata), une vacuitqui nie des phnomnes autres que l'objet vide, mais pasforcment la vacuit de nature propre de cet objet.

    Dans son Brahmasutrabhasya, Shankara ne cherchemme pas rfuter la vacuit bouddhique, alors mmequ'il tente longuement de rfuter deux autres concep-tions bouddhiques, celles des Sarvstivdins et celle desVijnanavadins :

    Pour ce qui est du troisime point devue, celui des Sunyavdins (Mdhyamakas),qui soutiennent que tout est vide (sunya), ilne mrite pas discussion, car les pramanas r-futent clairement cette thse, et les Sunyav-dins n'ont avanc aucune nouvelle raison posi-tive pour justifier leur point de vue.

    Les matres vdantistes (par exemple Swmi Siddheswa-rnanda[8]) voquent occasionnellement la vacuit boud-dhique, en la rapprochant de l'expriencemystique de nir-vikalpa samadhi :

    Le nirguna-brahman du Vednta et lesnya desMdhyamikas se rfrent vraisem-blablement la mme exprience spirituelleque nous appelons nirvikalpa samdhi[9].

    5 Voir aussi

    5.1 Articles connexes

    Les trois caractristiques de l'existence condition-ne :

    --- Dukkha, ou insatisfaction

    --- Anatt, ou non-soi

    --- Anitya, ou impermanence

    Deux textes de la Prajaparamita :

    --- Le Stra du Cur

    --- Le Stra du Diamant

    Autres textes traitant de la vacuit :

    --- Sutra de Vimalakirti

    --- Stra de lEstrade

    5.2 Liens externes

    Qu'est-ce que la ralit ?, par Lama Thubten Yeshe

    Mahayana Idea of Emptiness (en)

  • 6 8 BIBLIOGRAPHIE

    6 Citations

    Dans le bouddhisme, personne ne va nulle part,puisque la personne n'existe pas, et que le mondetant un tout, on ne peut aller nulle part, il sagitseulement d'tre pleinement au monde, un mondevide de distinctions, un monde blanc. Vivre et voya-ger ainsi, c'est suivre le chemin du vide (snyavda).(KennethWhite, La figuredu dehors, Grasset, 1982)

    Vacuit de vacuit, tout n'est que vacuit et dlicesde l'me immobile. (Prajnanda)

    La vrit ultime, c'est la vacuit. La vacuit n'estpas le nant, mais l'absence d'existence inhrente.Notre esprit de saisie du soi projette fallacieusementl'existence inhrente sur les phnomnes. Tous lesphnomnes apparaissent naturellement notre es-prit comme existant de faon inhrente, et ne ra-lisant pas que cette apparence est fallacieuse, nousy croyons instinctivement et croyons que les ph-nomnes existent de faon inhrente, ou vraiment.C'est la raison fondamentale pour laquelle noussommes dans le samsara. (Gush Kelsang Gyatso,Introduction au bouddhisme, 2003)

    Ce que les bouddhistes appellent la vacuit, ce n'estpas le vide inerte, le fait qu'il n'y ait dans le mondeque nant, c'est l'espace ouvert, fray par la mise l'cart, la limite, de l'a rmation comme de la n-gation. videmment, de cette vrit ultime qu'est lavacuit, il n'y a rien dire. (Roger-Pol Droit, Desides qui viennent, O. Jacob, 1999)

    Labsolu nest ni existant ni non-existant, ni lafois existant et non-existant, ni di rent la fois delexistence et de la non-existence. Pour le Madhya-maka, la raison et le langage ne sappliquent quaumonde fini. Transfrer des catgories finies aumonde infini serait comme tenter de mesurer la cha-leur du soleil avec un thermomtre ordinaire. Denotre point de vue, labsolu nest rien. On lappellesnyam, car aucune catgorie lie aux conditionsdu monde nest adquate pour le dcrire. Lappelertre est une erreur, car seules des choses concrtesexistent. Lappeler non-tre est galement une er-reur. Il vaut mieux viter toute description. La pen-se fonctionne de manire dualiste, et ce qui est, estnon-dual (advaita)[10].

    Il se peut qu'il nous arrive de percevoir l'absence del'ego d'un seul coup d'il. Mais nous n'accepterionspas une vrit aussi simple. En d'autres termes, ilnous faut apprendre dsapprendre. L'ensemble duprocessus consiste dfaire l'ego. On commence parapprendre traiter les penses nvrotiques et lesmotions. Puis, les concepts errons sont balays parla comprhension de la vacuit, de l'ouverture. C'estl'exprience de nyat. (Chogyam Trungpa, Pra-

    tique de la voie tibtaine - Au-del du matrialismespirituel)

    7 Rfrences

    [1] Philippe Cornu, citant le philosophe madhyamika qu'estNgrjuna, Dictionnaire encyclopdique du bouddhisme,2001, Seuil

    [2] Trait du Milieu, chapitre 24, 18

    [3] La gnose : une question philosophique, Cerf, 2000

    [4] Paticca-samuppada - Dependent origination by AjahnBrahmavamso

    [5] Ngrjuna, Trait du Milieu, commentaires de Tsong-khapa Losang Drakpa et Chon Drakpa Chdrub, Seuil,1995)

    [6] Les sept vacuits d'aprs le ivasme du Cachemire, LilianSilburn, in Le Vide, exprience spirituelle en Occident eten Orient, ditions des Deux Ocans, 1989

    [7] Cf. The Geluk/Kagyu Tradition of Mahamudra ou LeMonde du Bouddhisme Tibtain ou encore le Sens de laVie, de Sa Saintet le Dala Lama.

    [8] L'Intuition mtaphysique, Dervy livres, 1976

    [9] Comment discriminer le Spectateur du spectacle ? pageLXXIV, d. A. Maisonneuve, 1977

    [10] Sarvepalli Radhakrishnan, Indian Philosophy, 1923

    8 Bibliographie

    Cula-suata Sutta, petit discours sur la vacuit,(Majjhima Nikaya, 121)

    Maha-suata Sutta, grand discours sur la vacuit(Majjhima Nikaya, 122)

    Mhan Wijayaratna (trad.), Majjhima Nikya (5tomes), ditions Lis, 2009-2011.

    Sua Sutta, vide (Samyutta Nikaya, XXXV, 85) Le Trait du milieu, Nagarjuna, Seuil. Stances du Milieu par excellence, Nagarjuna, trad. etcomm. Guy Bugault, d. NRF

    The Geluk/Kagy Tradition of Mahamudra, S.S. leDala Lama, d. Snow Lion.

    Analyse du Trait sur linpuisable Lampe du zen deTorei (1721-1792) et sa vision de lEveil, Jean-MarcVivenza, Institut belge des Hautes tudes chinoises,daprs la traduction de MichelMohr, Connaissancedes Religions, n 60, 1999.

  • 7 Ngrjuna : la vacuit (snyatvad) comme dia-lectique de la non-substance, Jean-Marc Vivenza,Connaissance des Religions, n 61-64,2000.

    Ngrjuna et la doctrinede la vacuit, Jean-Marc Vi-venza, Albin-Michel, 2001.

    Vacuit (nyat) et compassion (karu) dans lebouddhisme madhyamaka, Ludovic Vivard, Publi-cations de l'Institut de civilisation indienne - fasc.70, Collge de France, Paris, 2002.

    Kalupahana, David J. (1994), A history of Buddhistphilosophy, Delhi : Motilal Banarsidass PublishersPrivate Limited

    9 Liens externes

    Bhikkhu, Thanissaro (trans.) (1997), Cula-suaSutta, Majjhima Nikaya 121, The Lesser Discourseon Emptiness

    Bhikkhu, Thanissaro (trans.) (1997), Maha-suataSutta,MajjhimaNikaya 122, The Greater Discourseon Emptiness

    Bhikkhu, Thanissaro (trans.) (1997), Phena Sutta,Samyutta Nikaya XXII.95, Foam

    Bhikkhu, Thanissaro (trans.) (1997), SN 35.85,Sua Sutta

    Portail du bouddhisme

    Portail du sanskrit

  • 8 10 SOURCES, CONTRIBUTEURSET LICENCESDU TEXTE ET DE LIMAGE

    10 Sources, contributeurs et licences du texte et de limage

    10.1 Texte nyat Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/nyat?oldid=102954804 Contributeurs : Menchi, Dilbert, Nojhan, Symac, Phe, MedBot,Phe-bot, Psychoslave, ~Pyb, Kan, Jef-Infojef, Criric, Leag, Sherbrooke, Vincent Simar, Chobot, David Berardan, Gzen92, Buddho, Es-kimbot, Ico, 16@r, Schtong, Oxo, Jrcourtois, Thijs !bot, Grook Da Oger, Chaoborus, A2, Circular, Christophe Dioux, Salebot, Akeron, Ly-kos, Vajrallan, DodekBot, Idioma-bot, VolkovBot, AlleborgoBot, BotMultichill, YonaBot, Andoni, MystBot, DumZiBoT, GLec, Ir4ubot,Sardur, PixelBot, BOTarate, Manoillon, Colindla, HerculeBot, ZetudBot, JeanLucCoulon, MER-C, Kwjbot, GrouchoBot, Xqbot, Leche-minlu, Nouill, RatBOT, Coyote du 86, TobeBot, Zhuangzi, EmausBot, Lionel June, HRoestBot, Slippingspy, OrlodrimBot, D-Lemon, Gattifabien1, Addbot, Knifewaldo, JimRenge et Anonyme : 32

    10.2 Images Fichier:Dharmacakra.svg Source : http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/66/Dharmacakra.svg Licence : Public domainContributeurs : Travail personnel Artiste dorigine : Liebeskind

    Fichier:Enso.jpg Source : http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f1/Enso.jpg Licence : CC-BY-SA-3.0 Contributeurs : ? Ar-tiste dorigine : ?

    Fichier:Sanskrit.png Source : http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c8/Sanskrit.png Licence : CC-BY-SA-3.0 Contribu-teurs : Originally from fr.wikipedia ; description page is/was here. Artiste dorigine : Original uploader was Vincent Ramos at fr.wikipedia

    10.3 Licence du contenu Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0