Usine nouvelle 14-01-2016 - Le cas Acome

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guide BONNES PRATIQUES / ORGANISATION INDUSTRIELLE / DROIT / INDICES / ACHATS 48 STEFAN MEYER / ACOME ; D.R. É viter que les différents services travaillent en silo : un vœu pieux dans la plupart des entreprises, mais une réalité chez Acome. Les dirigeants du fabricant de câbles en cuivre et fibre optique installé à Mortain, dans la Manche, ont décidé de creuser la question. « Depuis dix ans, nous avons lancé de nombreux projets qui ont amélioré localement la performance dans les services, mais dont les retombées sur le résultat de l’entreprise n’ont pas été celles attendues », relate Jean-Yves Goblot, le directeur de la stra- tégie, des programmes et des projets du groupe. Pour fédérer tous ses services autour d’un objectif commun, il faut un indicateur partagé par tous. En 2012, l’industriel entend parler d’une méthode appelée PIG, pour performance interactionnelle globale. Il s’agit de créer un indicateur unique, compréhensible par tous (une valeur entre 0 et 1) et partagé par les différents services de l’entreprise (vente, conception, achat, production, logistique). « L’indice PIG permet de s’assurer qu’un projet a un réel impact sur la per- formance globale. Il est calculé à partir de la valeur ajoutée, du temps de traversée des produits, de la qualité et de toutes les charges d’exploitation », détaille José Gramdi, enseignant- chercheur à l’Université de technologie de Troyes, qui a mis au point la méthode et fondé le cabinet de conseil Interaxys. La méthode PIG permet à Acome d’identifier les familles de produits les plus rentables et de faire des choix de production. ORGANISATION INDUSTRIELLE Acome fait converger ses services Le spécialiste du câblage utilise la méthode PIG pour fédérer tous ses services autour d’un objectif unique : améliorer le résultat global de l’entreprise. FRÉDÉRIC PARISOT Pour calculer cet indice, il faut modéliser toutes les activités de l’entreprise. Acome décide de tester la méthode sur sa divi- sion Fibre optique. Il faut plusieurs semaines pour recueillir les informations nécessaires à cette modélisation, mais, dès lors que l’indice PIG est opérationnel, il devient un élément fédérateur pour l’entreprise. « Nous avons désormais une vue globale de la valeur ajoutée », commente Jacques de Heere, le président du groupe Acome qui emploie 1 500 personnes pour un chiffre d’affaires de 405 millions d’euros. Un outil pour mieux décider La méthode PIG est avant tout un outil d’aide à la déci- sion. Les responsables de la division Fibre optique d’Acome l’utilisent comme arbitre dans les discussions. « Pour chaque projet envisagé, on regarde si cela améliore l’indicateur PIG. Si oui, c’est qu’il y a une piste à creuser, si non, le projet est abandonné, indique Jean-Yves Goblot. De telles décisions peuvent être prises en moins d’une heure. » Pour cela, on utilise comme un outil de simulation le modèle réalisé sous Excel. « Nous créons des scénarios, ce qui permet d’identi- fier les familles de produits les plus compétitives », raconte Christian Romero, le responsable de l’unité de production fibres et câbles optiques. Et, partant de ces scénarios, les diri- geants peuvent prioriser leurs investissements. « La méthode PIG nous a permis d’identifier quel type de machines nous devions acheter et notre programme d’investissement 2014- 2016 a été défini en partie sur la base de ces résultats », assure Jean-Yves Goblot. Bien sûr, comme tout outil d’aide à la décision fondé sur la simulation, le modèle propose parfois des solutions irréalistes. Une expertise humaine sera donc toujours indispensable pour déterminer quelles pistes sont envisa- geables. Néanmoins, il dégage des tendances générales qui peuvent se transformer en préconisations. Notamment pour les commerciaux. « Nous avons entré, dans le modèle, les familles de produits et les familles de clients et démontré aux commerciaux que si l’on vend un produit X à un client Y, la performance globale de l’entreprise se dégrade », illustre Lucas Zukervar, le directeur associé d’Interaxys, qui a conduit le projet chez Acome. À terme, Acome déploiera la méthode PIG dans ses autres divisions. « Sur l’activité automobile, nous l’utiliserons pour l’aide à la décision, mais aussi pour le pilotage des plans d’amélioration, prévoit Jean-Yves Goblot. Les collaborateurs proposent de nombreux projets, mais la méthode PIG permettra de définir les chantiers prioritaires à lancer, chantiers qui offriront une réelle contribution à la performance globale de l’entreprise avec les équipes et ressources disponibles. » ❚❚ « On regarde, pour chaque projet envisagé, s’il améliore l’indice PIG. Si oui, c’est qu’il y a une piste à creuser. Si non, le projet est abandonné. » Jean-Yves Goblot, directeur de la stratégie, des programmes et des projets chez Acome

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guideBONNES PRATIQUES / ORGANISATION INDUSTRIELLE / DROIT / INDICES / ACHATS

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É viter que les différents services travaillent en silo : un vœu pieux dans la plupart des entreprises, mais une réalité chez Acome. Les dirigeants du fabricant de

câbles en cuivre et fibre optique installé à Mortain, dans la Manche, ont décidé de creuser la question. « Depuis dix ans, nous avons lancé de nombreux projets qui ont amélioré localement la performance dans les services, mais dont les retombées sur le résultat de l’entreprise n’ont pas été celles attendues », relate Jean-Yves Goblot, le directeur de la stra-tégie, des programmes et des projets du groupe.

Pour fédérer tous ses services autour d’un objectif commun, il faut un indicateur partagé par tous. En 2012, l’industriel entend parler d’une méthode appelée PIG, pour performance interactionnelle globale. Il s’agit de créer un indicateur unique, compréhensible par tous (une valeur entre 0 et 1) et partagé par les différents services de l’entreprise (vente, conception, achat, production, logistique). « L’indice PIG permet de s’assurer qu’un projet a un réel impact sur la per-formance globale. Il est calculé à partir de la valeur ajoutée, du temps de traversée des produits, de la qualité et de toutes les charges d’exploitation », détaille José Gramdi, enseignant-chercheur à l’Université de technologie de Troyes, qui a mis au point la méthode et fondé le cabinet de conseil Interaxys.

La méthode PIG permet à Acome d’identifier les familles de produits les plus rentables et de faire des choix de production.

ORGANISATION INDUSTRIELLE

Acome fait converger ses servicesLe spécialiste du câblage utilise la méthode PIG pour fédérer tous ses services autour d’un objectif unique : améliorer le résultat global de l’entreprise.FRÉDÉRIC PARISOT

Pour calculer cet indice, il faut modéliser toutes les activités de l’entreprise. Acome décide de tester la méthode sur sa divi-sion Fibre optique. Il faut plusieurs semaines pour recueillir les informations nécessaires à cette modélisation, mais, dès lors que l’indice PIG est opérationnel, il devient un élément fédérateur pour l’entreprise. « Nous avons désormais une vue globale de la valeur ajoutée », commente Jacques de Heere, le président du groupe Acome qui emploie 1 500 personnes pour un chiffre d’affaires de 405 millions d’euros.

Un outil pour mieux déciderLa méthode PIG est avant tout un outil d’aide à la déci-

sion. Les responsables de la division Fibre optique d’Acome l’utilisent comme arbitre dans les discussions. « Pour chaque projet envisagé, on regarde si cela améliore l’indicateur PIG. Si oui, c’est qu’il y a une piste à creuser, si non, le projet est abandonné, indique Jean-Yves Goblot. De telles décisions peuvent être prises en moins d’une heure. » Pour cela, on utilise comme un outil de simulation le modèle réalisé sous Excel. « Nous créons des scénarios, ce qui permet d’identi-fier les familles de produits les plus compétitives », raconte Christian Romero, le responsable de l’unité de production fibres et câbles optiques. Et, partant de ces scénarios, les diri-geants peuvent prioriser leurs investissements. « La méthode PIG nous a permis d’identifier quel type de machines nous devions acheter et notre programme d’investissement 2014-2016 a été défini en partie sur la base de ces résultats », assure Jean-Yves Goblot.

Bien sûr, comme tout outil d’aide à la décision fondé sur la simulation, le modèle propose parfois des solutions irréalistes. Une expertise humaine sera donc toujours indispensable pour déterminer quelles pistes sont envisa-geables. Néanmoins, il dégage des tendances générales qui peuvent se transformer en préconisations. Notamment pour les commerciaux. « Nous avons entré, dans le modèle, les familles de produits et les familles de clients et démontré aux commerciaux que si l’on vend un produit X à un client Y, la performance globale de l’entreprise se dégrade », illustre Lucas Zukervar, le directeur associé d’Interaxys, qui a conduit le projet chez Acome. À terme, Acome déploiera la méthode PIG dans ses autres divisions. « Sur l’activité automobile, nous l’utiliserons pour l’aide à la décision, mais aussi pour le pilotage des plans d’amélioration, prévoit Jean-Yves Goblot. Les collaborateurs proposent de nombreux projets, mais la méthode PIG permettra de définir les chantiers prioritaires à lancer, chantiers qui offriront une réelle contribution à la performance globale de l’entreprise avec les équipes et ressources disponibles. » ❚❚

« On regarde, pour chaque projet envisagé, s’il améliore l’indice PIG. Si oui, c’est qu’il y a une piste à creuser. Si non, le projet est abandonné. »

Jean-Yves Goblot, directeur de la stratégie, des programmes et des projets chez Acome

L’Usine Nouvelle N°3451 du 14 janvier 2016
L’Usine Nouvelle N°3451 du 14 janvier 2016