Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de...

17
Une entrevue avec PATRICK BOUFFARD Choix des textes, recherche généalogique et harmonisation par Louise Senécal Relations publiques par Lorraine Poulin Fluet

Transcript of Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de...

Page 1: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

573

Une entrevue avec

PATRICK BOUFFARD

Choix des textes, recherche généalogique et harmonisation par Louise SenécalRelations publiques par Lorraine Poulin Fluet

Page 2: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

574

La ferme familiale desBouffard, située au175, Rang 5 Sud.Provenance :Madeleine Bouffard Fortin

Philibert Bouffard et sonépouse, Marie-LouisePomerleau.Provenance : MadeleineBouffard Fortin

Généalogie

Honoré BouffardPhilibert Bouffard Saint-Victor 26-11-1861

Aurélie LachanceOmer Bouffard Saint-Benoît 3-7-1893

Frédéric Pomerleau à Étienne**Marie-Louise Pomerleau Saint-Victor 12-1-1858

Marie Bizier

Patrick Bouffard Saint-Victor 7-5-1929Olivier Rodrigue

Olivier Rodrigue Saint-François 9-1-1882Marie Quirion

Marguerite Rodrigue Saints-Anges 2-9-1902

Diana Leclerc

Saint-Victor 13-8-1966Samuel Doyon

Thomas Doyon Saint-François 1862Zoé Mercier

Hormidas Doyon Saint-Joseph 9-1-1893Georges Grondin

Georgianna Grondin Saint-FrançoisMarie Bolduc

Huguette Doyon Saint-Éphrem 23-8-1915 née le 27-10-1935 Georges-S. Doyon soeur de Marie-Antoinette , Alphonse Doyon Saint-François 1862 mariée à Paul-Eugène Bolduc Philomène Boucher

Béatrice Doyon Saint-Victor 18-6-1894Paul Dupuis (origine acadienne*)

Délina Dupuis dit GilbertLucie Poulin (originie amérindienne)

*Voir Du sang acadien chez-nous, dans l’entrevue d’Irène Pomerleau Cliche

** à Étienne et Sophie Bisson (voir S urvol his torique)

Page 3: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

575

HDB– Nous sommes à Saint-Victor, le16 septembre 1995. Je me nommeHuguette Doyon Bouffard etj’interviewe mon mari, PatrickBouffard (à Omer).

Voudrais-tu nous dire quelssont les grands travaux qui ont permisle développement de la paroisse?

PB– Je dirais que c’est, en premier lieu,la construction du chemin d’fer, versles années 1900 (1892-1894),l’électrification rurale, vers les années’47, le creusage de la rivière le Brasvers les années ’48 et ’52, et laconstruction de la route 108 (route 28)en 1957.

Train – La Station – 1892-1894

HDB– Parle-nous de la construction duchemin de fer?

PB– Pour le chemin d’fer, c’est engrande partie à cause du SénateurBolduc (Joseph à Augustin), qui étaitau Sénat, à ce moment-là. Il avait faitdes pressions, pour que le chemin defer se développe, ici, dans la Beauce,et que, entre autres, il passe à Saint-Victor.

C’était fait, à c’moment-là,sans électricité et sans pelle mécanique.C’était tout’ fait à la corvée, par desgens qui travaillaient avec des chevaux,à la pelle et avec des scrapers4, pourramasser la terre, de chaque côté,creuser les fossés, et cetera.

Et puis ils avaient fait laclôture et ils avaient aussi posé le filpour le télégraphe, à c’moment-là. Celafut le grand développement du temps.

C’est à cette époque-là, aussi,que La Station s’est développée, avecla bricade. Il y avait une manufacture,pour faire de la brique, et ils chargeaientça sur le train qui était, à c’moment-là,le moyen d’transport par excellence,pour descendre à Québec ou pour allerà Montréal, transporter lesmarchandises et les passagers. Parceque les passagers voyageaient en train,aussi, à c’moment-là.

HDB– Est-ce que les gens d’ici ontcontribué au chemin d’fer?

PB– Oui. C’étaient des gens d’laparoisse, en partie, qui travaillaient surla construction, des jeunes enparticulier. J’avais un de mes grandsoncles qui venait de Saint-Benoît et quivenait travailler ici. Les gensapportaient, alors, le cheval avec lefoin, pour la semaine, et retournaientchez eux, la fin de semaine, après queleur semaine était faite.

C’étaient des bons salaires quipourraient se comparer, un peu, à ceuxqui vont actuellement travailler dans LeGrand Nord, à la Baie James. C’étaientles grands travaux du temps.

L’électrification rurale – 1947-48

Est venue, après ça,l’électrification rurale, sous le régimedu gouvernement de l’Union nationale,avec Maurice Duplessis, à Saint-Victoren 1947, avec la Shawinigan Water&Power. Elle fut vendue à l’Hydro-Québec actuelle, sous la nationalisationde l’électricité du gouvernement libéralde Jean Lesage. Ça a été le moteur del’économie, qui a monté, à c’moment-là, vers les années ’50.

C’est à ce moment-là qu’on a

vu beaucoup de développement puisbeaucoup de choses s’améliorer, grâceà l’électricité.

Parce qu’à ce moment-là, il yavait juste les villages qui avaient del’électricité. Il y avait de l’électricitédans le village, ici, à Saint-Victor(1924), à Saint-Éphrem et dans lesvilles.

Mais c’était pas du groscourant et i’ servait qu’à la lumière. I’y avait pas de moteur électrique, à cemoment-là, et i’ y avait pas le 220(volts). Il y avait seulement que du 110(volts), pour s’éclairer, les lumières derue puis les lumières dans les maisons.Mais dans les paroisses, i’ y en avaitpas. Et puis ç’a été le départ del’évolution de l’industrie puis del’agriculture, avec l’électricité, àc’moment-là.

Fromagerie – Technologie

HDB– L’industrie, comme lesmanufactures fonctionnaient comment,avant?

PB– Les beurreries, c’étaient les enginsà vapeur qui fonctionnaient et leschauffages au bois, avec les boileurs2.Ils chauffaient l’eau puis la vapeurfaisait une pression, ce qui faisaitmarcher les moteurs. Mais c’était pasaussi puissant et constant quel’électricité et les moteurs. Tout était àbase de feu. C’étaient des brûleurs au

Saint-Victor aura aussi sagare, construite toute de bois, avecsalle d’attente et dépôt pour lesbagages dès 1894-1895. On yconstruira également une voied’évitement de 1000 pieds pouraider aux manoeuvres ferroviaires.

Source : Centre d’interprétation ferroviairede Vallée-Jonction Inc.

L’embranchement Mégantic,de Tring-Jonction à Lac Méganticfut le point de départ d’un importantdistrict d’agriculture et ducommerce du bois, il fut tellementexploité qu’il renfloua l’entrepriseet l’aida énormément à améliorerson service.

Source : Marc D. Carette, L’épopée duQuebec Central, 1985,p. 55

Provenance: Caisse populaire Desjardins de Saint-Victor

Page 4: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

576

bois, des boileurs2 chauffés au bois, quiproduisaient de la vapeur.

Creusage rivière le Bras – 1948-’52

HDB– Parle-nous du creusage du Bras(rivière)?

PB– Le creusage du Bras, ce fut p’t-être la chose la plus extraordinaire quis’est passée ici, dans la paroisse et puisdans bien grand. Parce qu’à cetteépoque-là, le creusage de la rivière leBras a débuté, en 1948, à La Station deSaint-Victor, pour creuser la rivière endirection de Saint-Éphrem, et s’estterminé en ’52.

À cette époque-là, jamaispersonne n’avait vu de pelle mécaniquepuis de bulldozer travailler dans de groschantiers. La venue de la pellemécanique, à Saint-Victor, ç’avait ététout un exploit, tout un émoi, de voircreuser une grosse machine comme ça,une pelle mécanique qui venait duministère de l’Agriculture. C’était pascomme on a actuellement. C’étaientplutôt des pelles avec des câbles et ungrand mât.

Les câbles envoyaient la pelleau milieu d’la rivière ou de l’autre côtéde la rivière. Ils emmenaient unepelletée de terre au bord et ladéversaient plus loin. Ils faisaient desbuttes, des tas d’terre. L’annéed’ensuite, le bulldozer étendait cetteterre-là de chaque côté de la rivière oudans des endroits plus bas.

Ç’a été un travail d’envergure,pour le temps, parce que la rivière (leBras) avait, de La Station de Saint-Victor à La Station de Saint-Éphrem,16 milles, si on parcourait la rivière parle nid (lit) de la rivière naturelle, et puisquand il a été creusé, il est tombé à8 milles. Ils ont donc diminué de moitiéle cours d’eau de la rivière. Il y avaitbeaucoup de méandres, surtout à partirdu cinquième rang sud, en montant àLa Station de Saint-Éphrem. I’ y avaitdes endroits où la rivière faisait degrands ronds, dans les Fonds, puis ellerevenait presque au même endroit. Lecreusage du Bras a permis de couperles croches1.

Ce fut une grosse améliorationsur la crue des eaux, parce qu’àc’moment-là, la rivière débordait puisl’eau pouvait demeurer sur le terrainpendant quinze jours. Ça prenait biendu temps avant de descendre, parce quela rivière le Bras est une rivière qui n’aseulement que 6 pouces de pente aux1000 pieds. C’est pas une grosse pente,c’est presque plat.

Et puis plusieurs s’étaient fait’des ponts et des traverses, alors ilsavaient rétréci le nid (lit) d’la rivière, àcertains endroits. Donc, l’eau circulaitplus lentement.

HDB– Est-ce qu’ils la creusaientprofonde?

PB– Ça pouvait avoir 8 ou 9 pieds.Mais ça dépendait des endroits, parceque les côtés d’la rivière ’sont jamaisbien hauts, ici, dans le Bras. Au début,ça ’répandait pratiquement pas, parceque le drainage des terres ’était pasfait’, à cette époque-là, puis l’eauprenait plus de temps à venir à larivière. Comme le nid (lit) d’la rivièreétait creusé, les premières années furentextraordinaires, l’eau ’montait plus. Parla suite, comme c’est une rivière qui ’apas d’roches et qu’i’ y a pas d’arbres,sur les côtés, la terre a déboulé dans larivière et ça s’est rempli, un peu.

Après ça, il y a la rivièrePrévost, qui est une rivière très rapideet qui vient de Sainte-Clothilde, qui adescendu beaucoup de gravier, dans lebout de La Station de Saint-Victor etpuis ça l’a fait’ que l’eau s’écoule pluslentement. Et comme elle n’a jamaisété renettoyée, le débit a ralenti.

HDB– Tu nous as dit qu’i’ y avait pasd’roches. Est-ce que c’est unique à cetterivière-là?

PB– Non. C’est parce que cette rivièrecircule dans un bas-fond et puis lesterres alluvionnaires, i’ y pas d’roches,c’est yen que1 d’la terre. Alors ças’mine plus facilement.

Mon père (Omer Bouffard àPhilibert) voyageait des barils, la pellemécanique fonctionnait au diesel,comme aujourd’hui.

Mais à c’moment-là, i’ y avaitpas de camions, alors les barils étaienttransportés avec des chevaux. C’étaitle ministère qui venait porter du diesel,à c’moment-là, en barils de 45 gallons.Il les déchargeait sur les terrains despropriétaires, le long de la rivière, etaprès ça, ils prenaient les chevaux etallaient porter les barils de 45 gallonsà la pelle mécanique tous les matins,pour la journée. Mon père a fait’ ça unété d’temps.

Il y avait André Roy (àHonorius), aussi, de Saint-Victor, quitravaillait comme helpeur2, sur la pellemécanique. Il y avait un conducteur etun helpeur2, qui graissait la pellemécanique, qui conduisait à l’occasionpuis qui réparait.

Parce que tout c’creusage-làs’est fait’ sur des matelas, qu’ilsappelaient. C’étaient des trappes debois, qui avaient à peu près 10 poucesd’épaisseur et 5 ou 6 pieds de largeur,et elles étaient boltées1. Ils en mettaientune à côté de l’autre puis la pellemarchait sur ces matelas-là, parce quele sol, près de la rivière, n’était pasassez solide pour supporter la pelle. Lesmatelas étaient des supports, pour nepas que la pelle cale1 dans la terre, pourne pas qu’elle s’enlise.

Omer Bouffard, 1947.Éva Lessard, photographeProvenance: Madeleine Bouffard Fortin

Page 5: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

577

HDB– C’était la pelle quiredéménageait les matelas?

PB– Oui. Quand elle en avait un boutd’creusé, ils prenaient le bucket4, le mâtd’la pelle, puis ils faisaient faire le touraux matelas et les mettaient en avant.

HDB– Qui conduisait la pellemécanique.

PB– C’était un monsieur Bélanger, unemployé du gouvernement?

HDB– Il demeurait où?

PB– Chez des cultivateurs, le long dela rivière le Bras, où il pensionnaitpendant quinze jours ou un mois.

Routes et chemins – 1957

HDB– Pour la construction de la route108 (anciennement route 28), est-ceque ce fut aussi grandiose?

PB– Non, quoi que ce fut bi’nimportant. Ils ont redressé des croches1,en faisant la route 108 (route 28), et ilsont reconstruit un nouveau pont, sur larivière le Bras, près de Saint-Victor,près du chemin d’fer.

HDB– Pour la construction de la route,est-ce que c’étaient encore des pelleset des camions qu’ils avaient, pour ça?

PB– Oui, ils avaient des pellesmécaniques et des bulldozers. Mais àc’moment-là, c’était pas mal plus tard.Il y avait eu une évolution rapide dansles années ’50.

HDB– Quelles étaient les industries dutemps, avant l’électricité?

PB– Tout s’faisait comme ça s’faitaujourd’hui, mais sans électricité. Alorsc’étaient des moyens bi’n différents,qui étaient utilisés, pour arriver à

produire c’que les gens avaient à faire.Il y avait la beurrerie, la scierie et lemoulin à farine, qui était en mêmetemps le moulin à carde, tenu parmonsieur William Duval (à Charles).

Moulins – Beurrerie – Fromagerie

HDB– Voudrais-tu nous parler de labeurrerie?

PB– La beurrerie, j’peux en parler, carelle était près d’nous-autres.

C’était la beurrerie de chezCharlotte Fortin (Charles à Fortunat),sur la route 108 (route 28), juste au coindu cinquième rang sud et du cinquièmerang nord. La route 108 (route 28) afait avancé la fermeture de la beurrerie,

parce que la beurrerie du tempss’trouve sous la route 108 actuelle. Labeurrerie (chez Charles Fortin) étaitorganisée pour fonctionner au bois et àla vapeur et puis il y avait des chambresà glace, où ils mettaient la glace.

TFVB– Chez Charlotte Fortin(Charles à Fortunat), il y avait unebeurrerie qui était bâtie pas loin dela côte (au 115, Rang 5 Nord). Lamaison était en face de la côte, maissur l’autre bord, du côté de PatrickBouffard (à Omer). Sa beurrerieétait de ce côté-ci du chemin, maisplus loin. Il y avait une école (duBrûlé).

Source : Entrevue de Thérèse Fluet VeilleuxBertrand, par Lorraine Poulin Fluet,17 février 1995

Le creusage de la rivière le Bras.Provenance: Madelaine Bouffard Fortin

Provenance: Gilberte Veilleux Poulin

Page 6: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

578

Ils faisaient la glace, l’hiver,sur la rivière le Bras et l’apportaient àla beurrerie. Ils plaçaient la glace dansles chambres à glace, pendant l’hiver,en mettant du brin de scie1 entre chaquerang et entre chaque morceau de glace.

HDB– Qui apportait cette glace?

PB– Ils faisaient des corvées, avec desgens des alentours, du septième ranget d’la route 108 (route 28). ThomasCouture (à Pierre), Euclide Roy et cesgens-là. Des gens du rang, ici. Et puisça s’faisait, généralement, pendant lesfêtes1 ou après le Jour de l’An. Il y avaitun endroit, sur la rivière, où il y avaitprofond d’eau, une douzaine de piedsd’eau, puis ils sciaient d’la glace, touteà la main. Ils faisaient des briques d’àpeu près 3 pieds et demi de long par24 pouces de large puis la glace, àc’moment-là, avait entre 18 et20 pouces d’épaisseur. C’était unecorvée, la glace, qui durait deux ou troisjours.

Des hommes avaient desgrandes scies à glace, comme desgodendarts, qu’i’ appelaient. C’était unmanche, avec une grande scie de 7 ou8 pieds de long. La scie passait entreleurs deux jambes, en montant et endescendant. Elle avait des dentsd’environ 3 pouces de long et puis laglace flottait sur l’eau, quand lemorceau était coupé.

Avec des grandes pinces, ilsprenaient les glaces et les montaientdans les voitures. Ils mettaient à peuprès une douzaine de briques de glace,dans une voiture avec deux chevaux.Ils partaient d’sur la rivière, avec leteam1 de chevaux, et i’ allaient porterla glace à la beurrerie puis ils revenaientchercher un autre voyage. Il devait yavoir cinq ou six teams1 de chevaux,un team

1 de chevaux, c’étaient deux

chevaux avec une voiture, quitransportaient la glace, et il y avait cinqou six hommes qui la sciaient.

C’était quand même assezrapide à scier, mais l’affaire qu’il yavait, l’inconvénient, c’était qu’enremontant la scie, l’eau montait avecles dents. Comme c’était toujours trèsfroid, à c’moment-là, le gars qui sciait

la glace, il gelait, ses pattes de culottes.Il avait des grandes overaîlles

1 par-

dessus ses bottes puis l’eau gelait aprèsses pattes de culottes, alors i’ ’venaitcomme un bonhomme de neige,presque. Mais à cette époque-là, ondirait qu’il faisait plus froid puis laglace était plus épaisse.

HDB– Est-ce qu’ils sortaient ça à maind’homme?

PB– Oui. Il y avait deux hommes, surles pinces, parce que c’était quandmême assez pesant. Un bloc de glace,ça pouvait peser 3 ou 400 livres. Ils lemontaient dans la sleigh

3, où il y avait

un genre de dalle. Ils mettaient deuxbriques de large puis cinq ou six briquesde long.

HDB– À quoi servait, exactement, cetteglace?

PB– Elle servait, pendant tout’ l’été, àrefroidir la crème. La crème étaitemmenée, par les cultivateurs, à labeurrerie, dans des bidons, et elle étaitsouvent plus ou moins froide. Eux-autres aussi ramassaient la crème. Ilsavaient une voiture avec un cheval etils allaient chercher une charge debidons, dans le septième rang, unejournée, puis l’lendemain, ils allaientau lac (Fortin). La beurrerie runnait

1 à

tous les jours puis les gens des alentoursallaient porter leur crème à tous lesdeux jours.

C’étaient les garçons deCharles Fortin (dit Charlotte àFortunat), on l’appelait toujoursCharlotte, qui faisaient ça. L’abbéGilles (Fortin) et l’abbé Réal (Fortin),qui sont prêtres actuellement, faisaientbeaucoup ça, pendant leurs vacances.Après ça, il y a Lucien (Fortin à Charlesdit Chalotte) qui l’a fait’, aussi. Ilsengageaient, après ça, des jeunes desalentours, pour aller ramasser la crème.Monsieur Charlotte, il restait à labeurrerie pour préparer la crème, pourfaire le beurre.

À mesure que la crèmearrivait, il la pesait et la mettait dans lepasteurisateur, qu’i’ appelaient. C’étaitun grand bassin, avec un serpentin àl’intérieur, et puis il y avait une grossefournaise, un boileur2, qu’i’ appelaient.Ça, c’était de l’eau, qu’i’ y avait dedans,puis la vapeur passait dans le serpentin.Il y avait une pression qui faisait monterla crème au point d’ébullition, pour tuerles bactéries puis tout ça.

Comme cette crème était trèschaude, il fallait la refroidir. Alors il yavait un bassin où il mettait de l’eau etpour que l’eau reste froide et qu’ellerefroidisse la crème, il mettait desmorceaux de glace, dedans. Chaquejour, il allait chercher une brique de

La beurrerie de Charlotte en 1946.Provenance: Gabrielle Fortin Cloutier

Page 7: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

579

glace, pour refroidir la crème, car i’pouvait pas faire de beurre si la crèmen’était pas suffisamment froide.

Quand elle était suffisammentfroide, il la sortait du pasteurisateurpuis il la mettait dans la baratte, pourbaratter le beurre. Ça tournait, ça, labaratte, puis à force de tourner, la crèmedevenait en beurre.

Il moulait le beurre avec unmoule de une livre, comme on aactuellement. C’était pour vendre audétail et il l’enveloppait dans despapiers cirés. Il vendait aussi du beurrequi allait à Québec et qu’il envoyait parles camions. Il le mettait dans des boîtesde 50 livres, avec du papier ciré toutl’tour. C’était une boîte en bois, quipesait 50 ou 60 livres (voir l’entrevuede Louis Fluet). Il mettait un couvert1

par-dessus, cloué, et la mettait dans unechambre froide.

La glace, là où elle étaitentreposée, elle faisait le tour de cettechambre et y conservait la fraîche1. Onconservait le beurre dans la chambrefroide, en attendant de l’livrer àQuébec. On livrait le beurre à Québec,une fois par semaine, environ.

HDB– Quelle année c’était, environ?

PB– C’était dans les années ’40 à ’57.La beurrerie fonctionnait seulementl’été. L’hiver, c’était fermé. Elle ouvraitvers le premier mai, pour fermer, à peuprès, vers la fin octobre. Parce qu’àc’moment-là, les cultivateurs ’avaientpas d’vaches, pour faire du lait, l’hiver.Alors les vaches vêlaient au printempset se tarissaient au mois d’octobre, pourpasser l’hiver à l’intérieur, sans donnerd’lait puis donner un veau auprintemps.

Souvent, ces vaches-là étaientnourries, une partie de l’hiver, avec dela paille d’avoine puis du foin pas trèsbon. Il était assez vieux et pas propiceà faire du lait. Ils les maintenaient doncen bonne condition, pour le prochainvêlage, seulement.

Us & coutumes

HDB– Puis les cultivateurs achetaientleur beurre ou s’ils le fabriquaient eux-mêmes?

PB– Plusieurs cultivateurs enfabriquaient eux-mêmes puis plusieursen achetaient, aussi. Souvent, les gensavaient été habitués à manger du beurrebi’n, bi’n salé puis quand ils sont

arrivés avec des beurreries comme ça,il y avait des normes du gouvernementà suivre, au point d’vue de commentmettre de sel dans le beurre, pour qu’ilait un goût standard, un peu partout.

Alors les gens n’aimaient pastellement c’beurre-là, parce qu’ilsdisaient qu’il était trop doux. Les gensétaient habitués de manger très salé, àc’moment-là, parce qu’ils étaienthabitués de manger du lard salé. Toutétait salé. Il y avait du poisson salé puisde la viande salée.

Valeur de l’argent

HDB– Quel prix pouvait valoir unelivre de beurre?

PB– À cette époque-là, ’me semble quec’était cinquante cennes1 la livre.

HDB– Est-ce qu’il y en avait d’autresbeurreries, dans la paroisse?

PB– Non. Mais avant cette beurrerie,c’était une fromagerie qu’ils avaientconvertie, parce qu’il y avait déjàd’autres fromageries, dans la paroisse.Il y en avait une dans le premier ranget il y en avait une dans le cinquièmerang nord.

Fromagerie

VP– La beurrerie était où Toine Couture (Antoine à Thomas). De ce côté-là, c’était pas Toine Couture, c’était une beurrerie. Moi,j’étais allé à la beurrerie, mener le bidon, et je remontais du lait sûr.

Source : Entrevue de Victor Poulin à Amédée, par Lorraine Poulin Fluet, été 1987

LPF– Quand vous étiez jeune, est-ce qu’il y avait une fromagerie, ici, pas loin?

JB– J’ai entendu dire qu’il y en avait une pas loin, mais j’m’en souviens pas.

LPF– Est-ce qu’il y en avait une au village?

JB– J’me suis toujours fait dire qu’elle était dans le jardin de François Roy (à Théodore). La fromagerie et la beurrerie étaient là(au 157, rue Commerciale).

LPF– Est-ce que vous l’avez déjà vue?

JB– Non, mais monsieur Alphonse Bouffard (à Honoré) m’en a parlé souvent.

Source : Entrevue de Jean-Rock Bureau, par Lorraine Poulin Fluet, 3 mars 1995

Antoine Couture a caché le ciment des fondations de l’ancienne fromagerie, qui était juste en face de chez Tanis Fortin (àJoseph).

Source verbale : Colette Couture

Page 8: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

580

HDB– Qui avait ça?

PB– Monsieur Philippe Veilleux (àDavid) avait celle au premier rang(dans le rang 3 Nord, il y avait lafromagerie de Jules Cloutier à Dédasseet dans le rang 5 Nord, celle d’ArthurLessard).

Technologie agricole

HDB– Les ponts de batteuses et descies, qu’est-ce que c’était?

PB– Avant que l’électricité et lesmoteurs à essence arrivent, les enginsà gazoline qu’i’ appelaient, il y avaitdes ponts de batteus’s, parce que pourfaire marcher une machine à grains, çaprenait du pouvoir puis il fallait que çatourne, alors ils avaient des ponts, uneespèce de ’monte-pente. Ils mettaientun ou deux chevaux, qui étaientinstallés en montant, puis les chevaux,en marchant, faisaient rouler un pont,en dessous d’eux-autres, qui faisaitrouler une grande roue, sur laquelle ily avait une strap

1 qui faisait tourner la

batteuse. Ils sciaient du bois, aussi, decette façon-là. Ça fonctionnait bien,mais si les chevaux s’essouflaient, ilsallaient moins vite et ils perdaient dupouvoir.

Les engins à gazoline sontarrivés après, vers les années ’40 ou

’45. Ç’a été un gros développement,parce que c’était un peu comme unmoteur électrique, ç’avait unepuissance. Seulement, il fallait les partirà la main et c’était pas toujours facile.C’était avec des manitours, qu’i’appelaient. C’était un mécanisme quiproduisait une étincelle puis l’étincellemettait l’feu à la gazoline, qui faisaittourner l’moteur. Il y avait des rouesd’air, après ça, puis il y avait une poulie,après les roues. Ils mettaient une strap

1,

sur la poulie, puis sur la batteuse, surla scie ronde qu’i’ appelaient, pour scierle bois.

Corvées

HDB– Ça doit être là qu’ont commencéles corvées?

PB– Oui. Bi’n, à cette époque-là,’fallait qu’i’ aillent plusieurs hommes,parce que quand ils battaient ou qu’ilssciaient l’bois, ça prenait beaucoupd’monde, alors c’est pour ça que lesvoisins s’entraidaient beaucoup.

À c’moment-là, s’i’ battaientà une place, ça prenait huit ou dixhommes. Ça veut dire qu’il y avait, engénéral, deux hommes par maison, àpeu près. Alors ça pouvait prendre cinqou six voisins qui s’entraidaient, quifaisaient les corvées. Ils battaient su’

1

un et l’lendemain, ils battaient su’1

l’autre. Chacun battait à son tour; ilsmouvaient

1 la batteuse et l’engin à

gazoline.Le bois, ça, c’était l’hiver.

Souvent, c’était après les fêtes1. Les

cultivateurs charroyaient leur bois. Ilsbûchaient l’automne puis ils lecharroyaient yen que

1 l’hiver, parce

qu’i’ pouvaient pas charroyer sur desroues.

L’été, i’ y avait pas d’chargeuse,alors c’était tout’ fait’ à bras. Alors ilsattendaient que la neige tombe, pourprendre les voitures à chevaux, lessleighs

3, qu’i’ appelaient. C’était

beaucoup plus bas d’terre alors là, ilspouvaient passer à ras les djyardes debillots. Ils chargeaient les billots sur lasleigh

3 et les emmenaient à ’maison.

Ça, ça s’faisait souvent avant les fêtes1

et pendant les fêtes1. Après les fêtes

1,

après Noël et après le Jour de l’An, bi’nlà, ils commençaient à faire des corvéespour scier le bois qu’ils avaienttransporté. Là, ils le mettaient dans untas. Dans l’hiver, ils le fendaient p’isdans l’printemps suivant, ils lecordaient1 pour qu’il sèche pendantl’été.

Parce que l’bois, c’était trèsimportant, à c’moment-là. I’ y avait pasles poêles électriques. Alors il fallaitque toute la nourriture se fasse sur lepoêle à bois. Le lavage, aussi, se faisaitsur le poêle à bois. L’eau chaude étaitchauffée par le poêle à bois. Souvent,c’était le bouillage

2 du linge, qu’i’

appelaient. Ils mettaient de l’eau sur lepoêle, dans un grand boileur

2, ils

mettaient du caustique dedans, de lasoude caustique, puis là, ils mettaientle linge blanc, entre autres, parce quele linge de couleur, i’ pouvaient pas lefaire bouillir, puis là, ils le faisaientbouillir et quand i’ était bouilli, il fallait

La corvée de bois. De gauche à droite: Raymond,Oliva, Yvon, Fernand et André Veilleux.Provenance: Jérémy Veilleux

André Veilleux, photographeProvenance: Jérémy Veilleux

Page 9: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

581

qu’ils le relavent de nouveau puis lerincent, avant d’aller l’étendre sur lacorde, pour le faire sécher. Mais çafaisait du linge très blanc, qui sentaittrès bon puis qui était très propre.

Électricité – Us & coutumes

Les laveuses1 du temps,c’étaient des laveuses1 à bras. C’étaitune laveuse1 en bois, une espèce decuve en bois, avec un couvercle par-dessus. Il y avait une roue d’engrenage,par-dessus, avec une espèce de pivot àtrois pattes, à l’intérieur, en dessous ducouvert1 qui brassait le linge.

C’était comme les laveuses1

actuelles, mais les pattes qui fonttourner le linge, au lieu d’être dansl’fond, elles étaient su’ l’dessus. Ellesdescendaient dans l’linge puis dansl’ tourage d’la cuve, il y avait desrainures, comme des encavures debois, comme on appelle, une planche àlaver autour d’la cuve de bois. Le linge,en passant autour de ça, il se frottait etse nettoyait.

C’était actionné par un brasd’homme ou de femme. C’était lafemme, qui lavait le linge, ou unhomme, qui le brassait. I’ lavaient pasle linge à tous ’es jours, commeaujourd’hui. Ils lavaient le linge unefois par semaine, c’était ordinairementle lundi. Ça, c’était la journée dulavage.

Corvées

HDB– Pour faire le ciment, est-ce qu’ily avait des corvées?

PB– Ah! oui. Ça, l’ciment, c’étaitencore une corvée, parce que le cimentétait brassé à ’pelle p’is quandquelqu’un faisait son étable ou sonsolage1 en ciment, bi’n là, i’ y avait unegrande boîte de bois, qui avait à peuprès 12 pieds de long et 4 pieds de largepuis 6 pouces de hauteur. Là, ilsmettaient ça à environ un pied d’terrepuis i’ s’mettaient cinq ou six hommespour mixer la gravelle1 avec le ciment.

Pour un bon ciment, c’étaienttrois parties d’gravelle1 pour une partiede ciment. Ils mélangeaient la gravelle1

avec le ciment, comme il faut, avec unepelle ronde, les hommes avaient chacunune pelle ronde, puis après ça, ilsfaisaient un trou, au centre. Ils mettaientl’eau au centre, ils prenaient de lagravelle1 à la pelle puis ils en jetaientdans l’eau. Un moment donné, quandça devenait assez clair, ilsremélangeaient tout ça.

Quand ils avaient fini demélanger et que c’était vide, ils lemettaient dans un boyard1, c’était uneboîte d’à peu près 3 pieds d’long puisd’deux pieds d’large, avec deuxmanchons de chaque côté, un peucomme une civière. I’ y avait unhomme qui s’mettait chaque bout p’isi’ prenaient la gravelle1 mélangée auciment, qu’ils avaient fait dans lagrande boîte de 12 par 4 p’is là, ilsprenaient des pelles puis ilsremplissaient le boyard1. Ça, ça pouvaitpeser un 100, 150 livres.

Là, quand i’ était plein, lesdeux hommes partaient avec puis ilsallaient le déposer là où les autresl’attendaient, pour l’étendre soit su’l’plancher ou dans les formes deciment, pour faire un solage1 ouquelque chose comme ça.Ordinairement, ils faisaient troisboyards1 pour une batch2 de ciment.

HDB– Ça devait être dans desbrouettes, qu’ils transportaient ça?

PB– Non, i’ y avait pas d’brouettes. Ilstransportaient ça au boyard1. À

c’moment-là, les brouettes à ciment, çan’existait pas encore. Peut-être sur lesgrosses constructions.

Les corvées commençaientassez tard, le matin, puis c’était là oùils avaient fait la corvée qu’ils dînaient.Alors tous les hommes qui avaient faitla corvée, pendant l’avant-midi, allaientdîner à la maison où ils travaillaientpuis là, ça jasait p’is ç’avait du fun1.Ils étaient heureux. En travaillant, çajasait, aussi, c’était un peu une fête.

HDB– Ça s’passait l’été, l’automne etl’hiver... n’importe quelle saison?

PB– Oui. Il y avait, aussi, lesconstructions. Quand ils réparaient unegrange, quand ils faisaient desréparations majeures à des bâtisses, etcetera, ils étaient habitués aux corvées.Ils avaient besoin du monde puis toutle monde y allait. Il y avait des étés oùj’ai vu des hommes donner jusqu’àvingt jours de leur temps, dans descorvées, d’un bord à l’autre. Puis lescorvées, ça pouvait s’étendre. Des fois,ça pouvait aller jusqu’à un ou 2 millesde distance. Ils allaient aider les amis.Quand il y en avait un qui construisaitune grange, souvent, il y avait la moitiéde la paroisse qui y allait (voirl’entrevue de Jean-Roch Bureau etFernande Mathieu).

HDB– Est-ce qu’ils le faisaient surtoutpar plaisir ou pour rendre service?

Provenance: Rena Poulin Breton

Page 10: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

582

PB– Bi’n, c’était pour rendre service.C’était de cette façon-là qu’ilsréussissaient à survivre. Ils dépensaientle moins possible, parce que personneavait d’argent, alors tout le monde étaità peu près pareil. Ils vivaient et ilsétaient heureux comme ça.

Dynamitage

HDB– Voudrais-tu nous parler dudynamitage de roches?

PB– À cette époque-là, la dynamite,c’était pas comme aujourd’hui. Toutl’monde pouvait en avoir, il s’agissaitd’aller au magasin. Ça s’tenait paspartout, mais à Beauceville, il y avaitune place, le Magasin à Renault, qu’i’appelaient.

C’était une grosse quincaillerie,pour le temps, puis ils vendaient de ladynamite. C’était pas quelque chose quise vendait comme du lait, là, quandmême. Les cultivateurs, s’ils avaientbesoin de dynamiter quelque chose, ilsallaient acheter de la dynamite et toutl’monde avait l’droit d’acheter de ladynamite, sauf les enfants.

C’était quelque chose de biencouru. Ils faisaient sauter des roches etdes souches, du temps du défrichage.Quand il y avait des grosses souchesqu’ils ne pouvaient pas arracher, ils lesfaisaient sauter à la dynamite. Ilsperçaient un trou d’sour1 puis ilsmettaient un bâton de dynamite, endessous. Ils faisaient partir ça puis lasouche sautait.

Il y avait aussi les roches,mais là, il fallait creuser un trou à ladrille1, dedans. C’était une drille1 qu’ontenait à la main puis qu’on faisaittourner (voir l’entrevue de PolycarpeVachon).

Après la dynamite, tu mettaisune ratelle1, un bout d’corde groscomme un crayon d’plomb et d’lalongueur que tu voulais. Ça brûlait tantd’pieds à la minute et ça permettait demettre le feu à la ratelle1 et de te sauveravant que la roche explose, pour ne pass’faire faire mal.

La roche fendait en quatre oucinq morceaux, ça dépendait commentla roche était dure. C’étaient des

grosses roches qu’on ne pouvait pasmanoeuvrer avec les chevaux. En lesfendant comme ça, on pouvait ramasserles morceaux et aller les déposer surun tas de roches, à quelque part. Parcequ’i’ y avait pas de bulldozers à cetteépoque-là.

HDB– Est-ce que tous les gens étaientassez habiles pour l’utiliser ou si çaprenait des experts?

PB– Oh! non. Ils avaient de l’expérience,parce que tout le monde avait travailléavec de la dynamite. N’importe quipouvait l’faire puis i’ arrivait pasd’accidents, sauf que... Il y en a eu desaccidents avec ça, aussi. Des gens quiavaient mis le feu après la ratelle1 puisla ratelle1 avait brûlé, mais elle étaitmorte, un moment donné. La rochesautait pas, parce que ça prenait pasd’temps, ça. Ça pouvait prendre 2 ou3 minutes, avant que la roche saute.T’avais l’temps de te sauver, mais là,le gars, il disait : «Elle ’a pas brûlé, elleest mal amanchée1.» Quelque chosede même. Ils allaient voir et un momentdonné, la roche leu’s explosait dans’face. On a entendu parler d’unecoup’e2 d’accidents. Il y en a qui se sontfait tuer, d’autres se sont fait blesser.

Puits – Eau

HDB– Pour creuser les puits, commentest-ce qu’ils s’y prenaient?

PB– Les puits, pour avoir de l’eau,c’étaient des puits à maçonnerie, qu’ilsappelaient, à c’moment-là. C’étaientdes puits qu’ils creusaient en surface,parce qu’il y avait des puits de surfacepartout, i’ était pas question des puitsartésiens.

Alors ils creusaient un troudans la terre, là où il y avait une veined’eau qui sortait, ils cordaient1 desroches tout l’tour, ils faisaient unemaçonne1, qu’i’ appelaient, peut-êtreun 7 ou 8 pieds de diamètre, que lasource avait, un coup qu’elle était finie.Ils mettaient un couvert1 en bois par-dessus puis l’eau sortait comme ça.Généralement, c’était près des bâtisses,parce qu’i’ allaient pas chercher l’eau

bi’n loin, dans c’temps-là. Elle étaitdans des auges de bois ou des tuyauxd’fer. C’étaient des sapins, qu’ilscreusaient à l’intérieur avec une mèchep’is ils amanchaient1 les sapins un aubout d’l’autre. C’étaient des sapins de7 ou 8 pouces de diamètre puis l’eaucoulait à l’intérieur.

Dans la terre, du sapin avecde l’eau, ça pouvait durer longtemps,parce que ça ne pourrissait pas. C’étaitdans des endroits assez frais,généralement. Avec les sapins, il fallaitqu’il y aye une pente, pour que l’eauvienne au fil de l’eau, parce qu’il s’enperdait toujours un p’tit peu, dans lajanture des sapins.

Il y avait des machines, pourtailler le bout des sapins, un peu commedes crayons d’plomb, et puis ils lesembouchetaient un dans l’autre. Alors,l’eau passait de l’un à l’autre d’cettefaçon-là.

Les dépenses d’eau ’étaientpas énormes, dans c’temps-là.Souvent, ils avaient huit ou dixanimaux puis ils avaient la maison etça ne dépensait pas énormément d’eau,parce qu’i’ y avait pas les toilettes àl’eau, à c’moment-là, puis toutes ceschoses-là. Ça se passait dans les années’40 et même jusqu’en ’50.

HDB– Avec les auges de bois?

PB– Avec le bois, il y en a qui ont poséjusqu’en ’50. À Saint-Évariste, j’avaisun d’mes oncles (Wilfrid Bouffard àPhilibert) qui avait posé ça en bois. Àc’moment-là, c’étaient les derniers.

Après ça, ce fut les tubes defer. En ’45, nous-autres, on en avaitposé en tubes de fer. C’étaient destuyaux de 20 pieds de long, comme ilexiste encore aujourd’hui, mais quel’monde se servent plus, pour poserdans ’terre. C’était tout’ vissé, les unsaprès les autres. Nous-autres, on avaitposé 2 800 pieds, à c’moment-là, detuyaux d’fer. Puis c’était d’l’ouvrage,c’était pesant, c’était dur à poser.

Après ça est arrivé les tuyauxd’plastique. Ç’a été tout un évènement!Ils sont arrivés vers les années ’50, maislà, personne n’y croyait trop, auxtuyaux d’plastique, parce que c’était

Page 11: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

583

nouveau puis ils disaient que ça nedur’rait pas longtemps. «C’est moupuis ça va user vite.» Mais ceux quiont posé ça, dans ’es années ’50, ilscoulent encore aujourd’hui puis ilsmarchent encore numéro un, ils ’sontpas usés.

HDB– Pourquoi le tuyau d’fer n’a pasduré plus longtemps?

PB– I’ y avait trop d’inconvénients.Quand le monde a connu les tuyaux deplastique puis qu’ils ont vu commentc’était bon et facile à poser. Et là, il yavait des rouleaux, au lieu des barresde 20 pieds. Tu pouvais avoir unrouleau de 2 ou 300 pieds de long. Enplus, il y avait l’avantage que s’i’ gelait,i’ fendait pas, tandis que l’tuyau d’fer,à cette époque-là, i’ y avait pas lespépines2, pour creuser des canals, pourmettre les tuyaux d’fer. C’était creuséà la main, alors souvent, ç’avait pasplus que 3 pieds, 2 pieds et demi etc’était dur, tout’ creuser à la p’tite pelle.

Quand ils sont arrivés avec lestuyaux d’plastique, à c’moment-là, lespépines2 sont arrivées, aussi. Même, onen a posé chez monsieur Ernest Tardif(à Edmond), à la main, des tuyauxd’plastique, et ça ’gelait pas. C’étaitdans la prairie puis il y avait plus épaisde neige qu’aujourd’hui.

Électricité – Eau

HDB– Les pompes électriques, c’estvenu après l’électricité?

PB– Les pompes électriques sontvenues après que l’électricité soitarrivée, tandis qu’avant, c’étaient despompes à bras, avec un clapet. Onpompait puis le vide, que la pompefaisait, faisait que l’eau montait. ’Fallaitpas qu’le puits soit trop loin. Tu pouvaistirer l’eau de 50 ou 100 pieds. Çadépendait d’la pente qu’i’ y avait, aussi.S’i’ y avait pas assez une grosse pente,le niveau de l’eau n’arrivait pas àmonter, dans l’auge des vaches ou à lamaison.

Si elle venait à 7, 8 ou10 pieds du plancher, là, avec unepompe, ils réussissaient à la faire

monter dans le sink1 ou dans l’augepour les vaches.

Il y a les puits artésiens quisont arrivés dans les années ’48 ou ’49.Monsieur Jos Prévost (Joseph à Joseph-Gédéon dit Bébé) a été le premier àfaire creuser un puits artésien, àc’moment-là.

C’était un type qui avaitbeaucoup manqué d’eau et qui avaitbeaucoup de difficulté à trouver del’eau, autour de sa maison. Il avaitmonté sur la côte, en avant de samaison, puis quelqu’un lui avait ditqu’il y avait une veine, de creuser làpuis que ce serait bon. Il avait creuséet il était descendu à 180 pieds. Pour letemps, c’était énorme. Tout le mondetrouvait ça extraordinaire, maisc’étaient des drilles1 à marteau, àc’moment-là.

Ça devait avoir pris au moinsune semaine pour creuser ce 180 piedslà. Il avait fait descendre 180 pieds entuyaux de fer dedans, avec un injecteur,puis ça avait fonctionné. Il y avaitl’électricité à c’moment-là, pourpomper l’eau (voir l’encadré LesSourciers, qui suit cette entrevue).

Commerce de chevaux – Lesouests

HDB– À plusieurs reprises, tu nous asparlé des chevaux. Quelle était leurimportance et où les prenaient-ils?

PB– Pour les chevaux, il y avait desmaquignons, dans c’temps-là, qu’i’appelaient, des commerçants dechevaux, puis il y avait des chevauxélevés par ici. Mais il y avait aussi deschevaux qui arrivaient de l’ouest, quin’étaient pas domptés et qui avaienttrois ans, en général. Ils arrivaient surle train, ces chevaux-là.

Quand ils débarquaient dutrain, c’était un maquignon qui avaitacheté ces chevaux-là puis il les avaità vendre, alors souvent, il les apportaitpuis il passait dans le village et dans laparoisse. Si tu as une voiture, avec uncheval qui conduit, en avant, p’is tu asvingt chevaux lousses1, ceux d’enarrière, ils vont tout’ suivre le chevald’en avant. I’ chercheront pas à prendre

le côté du chemin puis à s’séparer. Ilsse tiennent tous ensemble, un en arrièrede l’autre, ou trois, quatre de large.

Alors, souvent, le maquignon,qui avait plusieurs chevaux à vendre,venait passer dans le village, ledimanche après la messe, avec seschevaux. Il en emportait sept ou huit ettout le monde voyait passer ces beauxchevaux puis ça donnait envie àplusieurs de changer d’chevaux ou d’enacheter des plus beaux que c’qu’ilsavaient chez eux. Alors c’était unefaçon d’faire de la publicité, pour seschevaux.

HDB– Est-ce qu’ils étaient domptés?

PB– Non, non, i’ étaient pas domptés.C’était ça, le problème, on disaitsouvent que c’étaient des mauditsouests2, parce que imaginez-vous queces chevaux-là arrivaient de l’Ouestcanadien. Ils n’avaient jamais eu unlicou ou une bride, dans ’tête, ni unharnais, su’l’dos. Ils avaient trois anset ils étaient un peu comme deschevaux sauvages.

Dompter ça, à cet âge-là,c’était un peu difficile. Ils restaient deschevaux nerveux. Ils n’avaient pas étéhabitués à la civilisation, ils étaientdans les grands pâturages, là-bas, alorsc’étaient pratiquement des chevauxsauvages.

Tandis que les chevaux, parici, bi’n souvent, ils étaient élevés avecles enfants puis la famille autour. Aumoment où le p’tit poulain venait aumonde, ils lui donnaient du lait, ils luidonnaient de la moulée1, ils le flattaient.

Alors ces poulains-là, ilsétaient dociles, i’ étaient pas nerveux.C’est pour ça que bien des gens’voulaientpas avoir ces ouests2-là.

Souvent, aussi, c’étaient lesfemmes qui raclaient au grand râteau,qu’i’ appelaient, ou qui allaient à lamesse et au village en voiture. Ça faitque s’ils avaient un cheval qui n’étaitpas docile, c’était pas pratique. Il y enavait qui avaient peur de ça, aussi.

HDB– Ils se permettaient de traverserle village avec des chevaux, comme ça?

Page 12: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

584

PB– Ah! oui. C’était pas un problème,parce que ça s’suit, des chevaux. Deschevaux pas d’brides, lousses1, ça faitune belle parade, c’était très beau à voir(voir les entrevues de Thérèse FluetVeilleux Bertrand et de PatriceVeilleux).

Chemins et routes

HDB– Ils entretenaient les cheminsd’été et d’hiver, avec des chevaux,aussi?

PB– Le chemin, quand il passait sur taferme, c’était ta responsabilité. Alorsil fallait gratter notre chemin et lemettre passable1, en été et en hiver.

Alors l’été, s’il y avait destrous ou des roches, parce que la plupartdes chemins étaient en terre, àc’moment-là, c’était le propriétaire duterrain qui réparait son chemin. Il avaitsa voiture puis il allait chercher de lagravelle1, pour remplir les trous. Aprèsça, la voirie a commencé à entretenirles chemins, au moins à passer lagratte1. Ça a pris du temps, mais c’estvenu.

Après ça, l’hiver, il fallaitgratter le chemin. Alors chacun devaitgratter le chemin qu’il avait sur sonterrain. Là, souvent, ils faisaient deséchanges avec les voisins, parce quedes fois, il y avait des terrains quiétaient plus loin et qu’i’ fallait qu’tugrattes pareil. Si c’était à un mille de lamaison, il fallait que tu ailles gratter lechemin. Alors, partir avec la gratte1

puis aller gratter à un mille.Mais il fallait que les chemins

soient grattés, pour que les enfantsd’école puissent aller à l’école, parcequ’ils y allaient à pied. Il fallait qu’ilssoient capables de passer. P’is la malle1,c’était très important à c’moment-là. Lamalle1 était en voiture.

C’était une gratte1 en bois,avec deux manchons en avant, puis laplupart du temps, deux chevaux. I’ enavait qui avaient yen que1 un cheval,aussi. I’ avait un rond au milieu, il yavait des borlots3, qu’i’ appelaient.

Comme des voitures àchevaux, mais le cheval marchait àdroite d’la voiture. Il ’marchait pas au

centre, parce que tous les cheminsétaient entretenus pour marcher avecdes chevaux doubles. Il y avait un rondde neige, au milieu, plus haut de 6 à8 pouces puis les côtés, là où les lisses1

des voitures marchaient, c’était plusprofond.

Ça permettait de monter unpeu de neige puis à mesure que l’hiveravançait, bi’n, le chemin montait. Unmoment donné, à la fin d’l’hiver, lechemin pouvait avoir 4 pieds d’épaisde neige, au-dessus de la terre, parcequ’il avait monté et ils l’avaient tapé àmesure que la neige se poudrait etmontait.

Avant l’entretien des cheminsd’hiver, il y a eu l’ouverture, auprintemps, avec les grosses charrues1

qui prenaient les 4 pieds de neigeramassés pendant l’hiver et enmettaient la moitié sur un bord et lamoitié sur l’autre. Ça faisait un canalqui pouvait avoir, des fois, 8 ou10 pieds de profondeur.

Mais là, du moment où lesoleil prenait, le fond du canal fondait,parce qu’i’ y avait pas épais d’neige. I’y avait pas d’glace, c’était juste d’laneige, et la terre sortait vite. On étaiten voiture d’été puis il y avait des grosbancs de neige, de chaque côté duchemin. Ça prenait du temps à fondre,ça.

Le printemps, c’était tout’ unefête, quand l’bulldozer venait ouvrir leschemins, parce que même la route 108(route 28) n’était pas entretenue.

Pendant les années ’50, la route étaitentretenue entre Beauceville et LaGuadeloupe, pour passer en machine2,mais c’était bien malcommode1, parceque souvent, i’ y avait de la terre, dansle chemin, puis le printemps, comme i’y avait pas beaucoup de neige, ellefondait avant les routes de côté.

Alors ça prenait presque deuxvoitures : une voiture d’hiver, pour allerà la route, puis après ça, une voitured’été, pour t’en aller su’a route. Ç’aduré d’même quelques années, parceque c’étaient des particuliers, les taxis,entres autres, de Beauceville, Saint-Éphrem, Saint-Victor, et cetera, quipayaient pour faire entretenir la route,pendant tout’ l’hiver.

Puis il y avait des postes depayage, alors, où l’chemin déviait laroute. Il passait dans le clos puis il yavait une barrière. Si tu voulais t’enaller à Saint-Éphrem en auto, la barrièreétait au septième rang, chez monsieurOvide Bernard. C’était sa fille (Estelle)qui gardait la barrière et si tu voulaispasser en auto, il y avait un câble quibarrait le chemin. Elle sortait puisdébarrait le câble et il fallait que tupayes pour passer la barrière en auto.C’était pas tellement dispendieux, maissi tu étais en voiture, ça ’t’coûtait rien.

Entre la barrière, il y avait unbout où tu ’pouvais pas passer par laroute, parce que c’était entretenu avecles chevaux, alors t’avais pas l’choix.Si t’étais en auto, il fallait absolumentque tu passes par la barrière et si t’étais

Provenance: SPSVB, Fonds Candide Plante Pomerleau

Page 13: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

585

en voiture, bi’n, tu passais drette1, tupassais par le chemin d’neige puis tucontinuais.

HDB– Les gens devaient pas rester làà coeur de1 jour?

PB– Ils restaient là 24 heures par jour.Ils restaient dans la maison. Ah! bi’nles machines2 ’passaient pas une à lasuite de l’autre. Il pouvait en passer huitou dix par jour puis rendu à 8 ou9 heures, i’ devait plus en passer.

HDB– Est-ce qu’elles avaient de ladifficulté à passer, les autos?

PB– Il y avait de la glace, des fois. Il yavait des chaînes sur les autos, dansc’temps-là. C’était pas des tires2 àclous. Ça prenait des chaînes, pourmarcher, la plupart du temps. C’étaitpas sur l’asphalte, dans l’fond, puis ilrestait quand même assez épais d’neigedans l’chemin. Puis comme i’ y avaitpas beaucoup d’trafic, il restaitbeaucoup de neige dans le chemin, depas tapée. Tu ’pouvais pas circuler enpneus, là-dessus.

Puis il y avait lessnowmobiles2, aussi, des autoneiges,qu’i’ appelaient, qui avaient des lydes.Ça, ç’a été avant l’ouverture de la route.Après l’ouverture de la route, ç’afonctionné encore, parce que là, c’étaitle moyen qui pouvait aller su’es deux.Ils pouvaient aller sur les cheminsgrattés par les chevaux puis sur la routequi était grattée pour les autos. Ilsembarquaient, dans les snowmobiles2,dix ou douze personnes. Elles étaientassises sur les côtés puis il y avait depetites vitres rondes.

HDB– Ça devait se remplir de neigerapidement, quand il ventait ou quandil neigeait?

PB– Bi’n là, c’était l’problème. Quandils ouvraient les chemins, l’printemps,avec les gros bulldozers, qu’ils faisaientdes remparts de 10 ou 12 pieds de hautpuis qu’il venait une grosse tempête, àla fin d’mars, souvent, la poudrerieremplissait c’canal-là. Alors, ça pouvaitêtre pendant quinze jours bouché, parce

qu’i’ y avait plus moyen d’rouvrir ça.I’ avaient plus d’place à mettre la neige.

Ils avaient ouvert une premièrefois et fait un canal, mais l’deuxièmecanal, les ailes de la charrue1 ’étaientpas assez hautes pour envoyer la neigepar-dessus les remparts. Souvent, ilfallait qu’ils attendent que cette neige-là fonde. Elle fondait plus vite, parcequ’elle avait tombé tout d’un coup, puiscomme ils ’pouvaient plus passer par-dessus, sauf les snows2 encore, ilsavaient d’la misère. D’une lame (deneige) à l’autre, ça ’pouvait pas circuler.

Comme le soleil était plusfort, au printemps, et qu’il plongeaitdans l’canal, il faisait fondre cettenouvelle neige assez vite, alors çarevenait sur la terre assez vite. Maispendant des années, ç’a été la solution,il a fallu attendre que l’soleil fassefondre la neige dans le canal.

Il y avait la clôture à neige,aussi, qu’ils mettaient de chaque côtédu chemin, pour garder la neige dansl’clos. C’étaient des clôtures comme ily en a encore aujourd’hui pour entourerles fleurs. C’étaient des barres de boisavec des fils de fer qui tenaient ça, de4 pieds de haut, environ. Ils piquaientdes gros piquets, dans l’clos, à 75 ou100 pieds d’la route, aux endroits où ilventait le plus fort. C’étaitl’entrepreneur des chemins qui posaitcette clôture, pour avoir moins d’misèreà entretenir les chemins, parce qu’i’avaient que les charrues1, pour lesentretenir. Les souffleurs2 à neige’étaient pas inventés, encore.

Quand les souffleurs2 à neigesont arrivés, ç’a été un développementextraordinaire, parce qu’avec lescharrues1, c’était bi’n dur. Ici, on a euHermyle Roy (à Frisé), qui a fait lespremiers chemins d’hiver. Lui, il a faitson argent avec ça, parce que les gensétaient très exigeants. Il fallait qu’ilsviennent au village et quand leschemins ’étaient pas ouverts, i’pouvaient pas venir. Alors c’était pireque dans l’temps où c’était entretenupar les chevaux, parce qu’avec lesautos, si les chemins étaient malouverts, i’ pouvaient plus sortir (voirl’entrevue de Hermyle Roy).

HDB– Donc, monsieur Hermyle Roy(à Frisé), c’était l’entrepreneur dutemps?

PB– Oui, c’était l’entrepeneur local. Ila entretenu les chemins au moins unevingtaine d’années, avant que lamunicipalité ne s’charge d’acheter desmachineries et d’ouvrir elle-même laparoisse.

HDB– Il (Hermyle Roy à Achille)ouvrait seulement dans Saint-Victor?

PB– Oui, mais la route 108 (route 28)était entretenue par d’autresentrepreneurs de Beauceville, parfois.Par la suite, la Municipalité a pris lesrangs et la voirie, la route 108 (route28).

HDB– L’été, l’entretien des chemins,c’était plus facile?

PB– Chaque cultivateur entretenait sonchemin avec sa voiture puis sa pelle. Ilallait au pic de gravelle1, s’chercher dela gravelle1 pour remplir les trous.

HDB– Ils étaient obligés de faucher lescôtés de chemin?

PB– Les côtés de chemin, c’était bienentretenu, dans c’temps-là. Chacunentretenait chaque côté du chemin quipassait sur son terrain. Il fauchait ça àla petite faux puis i’ y avait pas unebranche, pas un p’tit arbre.

Gédéon Leclerc.Provenance: Mariette Leclerc Bureau

Page 14: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

586

Ils commençaient rarementles foins avant le premier juillet et avantça, ils commençaient par faucher lescôtés d’chemin. C’était très propre,c’était très beau. Entre autres, monsieurThomas Couture, au coin de La-Route-à-Gatton, il y avait une route d’un millede long qui passait sur son terrain, etpuis c’était son terrain des deux côtés.Alors lui, il (Thomas Couture) avait2 milles de long à faucher, à la p’titefaux.

HDB– I’ aurait pas pu prendre safaucheuse?

PB– Oh! non, c’était impossible. Leschemins ’étaient pas larges dansc’temps-là. I’ avaient pas 20 pieds, dechaque côté de la route, mais ils avaientles fossés, le côté du chemin puis lamontée, de l’autre côté, près de laclôture. Ils entretenaient leur clôture,aussi. Même la route 108 (route 28),avant la construction. Même s’i’avaient pas d’terrain, les cultivateursavaient une part de clôture à aller faire,à la route. Chaque cultivateur,dépendamment2 de la grandeur de sonterrain, avait une part de clôture à allerfaire à la route.

HDB– Qui décidait ça?

PB– La première construction de laroute 108 (route 28) qui avait été faite,vers les années 1925, 1930, qui avaitété faite à la voiture et où ils avaientfait un autre pont en ciment, parcequ’avant, il y avait un pont couvert,avant le pont actuel, mon père (OmerBouffard à Philibert) y avait travaillé.Ils chargeait d’la gravelle1 et allaientdéposer ça pour faire le fond d’la route.

Bois – Foresterie

HDB– Le bois était une autre utilité,dans l’temps. Comment est-ce qu’i’abattaient le bois?

PB– Les gros arbres étaient abattus augodendart, qu’i’ appelaient. C’était unescie avec une poignée et un homme dechaque bout. Ils tiraient et poussaientchacun leur tour. C’est un outil qui avait

6 pieds de longueur, environ, et quiavait des grosses dents d’un pouce etdemi de longueur. C’était assez rapide,surtout pour le bois franc1.

Il y avait des boxas3, qu’i’appelaient, ou des sciottes, pour abattrele bois mou1, entre autres. C’était unelame plus mince. Mais il y avait lespremiers boxas3 à dents simples, quiavaient tout’ des dents égales et dont lalame était plus épaisse.

Après ça, ils sont arrivés avecdes boxas3 plus modernes, avec unelame plus mince et des rockers, qu’i’appelaient. C’est des dents qui coupentle bois et d’autres dents qui sortent lebrin de scie1 du trait d’scie. Alors,c’était beaucoup plus rapide et dans leschantiers1, les lames de boxas3, ças’vendait beaucoup, mais c’était pluscassant. Ç’avait qu’un pouce de largeuret 3 pieds de longueur, à peu près. Il yavait une armature en fer. Avant lesscies mécaniques, c’était l’outil le plusmoderne.

La scie mécanique est arrivéedans les années ’50, environ. Maisc’étaient pas celles qu’on a aujourd’hui.C’étaient des scies à deux hommes. Ily avait une lame, avec un moteur, et unhomme de chaque bout. La scie avaitenviron 4 pieds d’long. Ça ’tournait pasvite et c’étaient des gros moteurs.C’était pesant.

HDB– Avez-vous utilisé ça?

PB– Pas celles-là. Les premières quisont sorties existaient, dans leschantiers1. Mon père (Omer Bouffardà Philibert) n’a jamais eu d’sciemécanique. Moi, j’en ai eue une, audébut.C’étaient des Homelite, àc’moment-là, et j’ai acheté ça en ’54.Ces scies pesaient entre 25 et 30 livres.Elles tournaient quand même assezbien, mais elles étaient pesantes.

HDB– Pour fendre le bois?

AL– En 1955, j’ai commencé à ré-parer des scies avec un fanal, dansune cave, et j’ai tout le temps pro-gressé, depuis ce temps-là. /.../ Jevoyais de l’avenir, dans le petitmoteur, la scie mécanique était sor-tie. /.../ Ça pesait 40 livres.

HLC– Ça veut dire qu’un tra-vailleur forestier devait avoir cepoids-là toute la journée dans lesbras?

AL– Oui.

Source : Entrevue d’Armand Lapointe, parHuguette Lessard Champagne, 9 octo-bre 1995

Provenance: Rena Poulin Breton

Armand Lapointe et Viateur Cloutier.Provenance: Armand Lapointe

Page 15: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

587

PB– Ils le fendaient à la main. I’ y avaitpas d’fendeuses, à c’moment-là.C’étaient pas des machines bi’ncompliquées, les fendeuses, mais ellessont arrivées vers les années ’60. Il yen avait quelques-unes, mais ellesétaient très grosses.

Le pic qui fend le bois étaitmû par un gros mécanisme, avec uneroue excentrique. Ça prenait deschevaux, pour la transporter, ça devaitpeser une affaire comme 2000 livres.C’était très puissant, mais c’était pasrapide.

HDB– Est-ce qu’il y en avait, dansSaint-Victor?

PB– Non. Il y en avait une à EastBroughton et une à Sainte-Anne-de-la-Pocatière. C’est les deux seules que j’aivues.

HDB– Mais ici, c’était avec la hache?

PB– Oui. On a toujours fendu le bois àla hache.

HDB– Ça devait prendre une partie del’hiver pour fendre ce bois-là?

PB– Non, on fendait quand même assezvite. On ’fendait pas une journéecomplète. On pouvait fendre une heureet demie, 2 heures, dans l’avant-midi,et une heure et demie, 2 heures dansl’après-midi, parce que ça devenaitessouflant, quand même, fendre dubois. Ils le fendaient puis ils lecordaient. Ils partageaient ça. L’hiver,i’ avaient pas yen que1 ça à faire.

Agriculture – Autarcie

Tout l’monde avait desmoutons, qu’ils gardaient pour la laine.Il y avait la culture du lin, aussi, qu’ilssemaient le printemps et qu’ilsrécoltaient l’automne. Il fallait, alors,qu’il soit brayé1, qu’i’ appelaient. C’estdes fibres qu’il y a là-d’dans et il fautque l’écorce soit cassée. Alors, pourcasser l’écorce sur le lin, il fallait lefaire chauffer.

I’ s’faisaient un treillis,mettaient le lin dessus et allumaient un

feu d’sour1. La chaleur faisait sécherla tige de lin, qui était une plante verte,au début, et qui avait mûri, qui étaitrendue sec’. Mais il fallait la fairesécher davantage.

Après ça, ils la mettaient dansune braye1. C’était en bois. Il y avaitun rond, en bas, puis une poignée quimontait plus haut. Ça avait environ4 pieds de longueur, 3 pieds de hauteuret 4 pouces de large. Ils plaçaient lapoignée de foin de lin dans ça etcassaient l’écorce en montant et enbaissant l’bois (voir l’entrevued’Honora Latulippe Giroux) .

Je l’ai vu faire, une fois. I’ yavait une espèce de peigne avec desdents d’fer. Ils prenaient les couettes1

et passaient le peigne dedans. Lesécailles avaient été toutes cassées parla braye1, mais il fallait les enlever. I’pouvaient pas enlever ça à la main,c’était bi’n trop piquant. À force depasser le peigne dans la couette1 de lin,i’ restait qu’le fil. Les pailles partaienttoutes. Après ça, il fallait qu’ils le filent,pour faire une corde, avec. Ils tissaientça au métier.

Ils faisaient même des sous-vêtements, avec ça. Mais la plupart,c’était pour faire des serviettes, pouressuyer la vaisselle ou s’essuyer lesmains. Quand c’était frais tissé, il restaitdes agrafes, qu’i’ appelaient, dedans,et c’était à l’usure que ça partait. Quandles agrafes étaient parties, ça faisait unbeau tissu mou et c’était très absorbant.C’était très résistant.

HDB– Tu dis que tu l’as vu faire, unefois. À quel endroit c’était?

PB– C’était ici. Ma mère (MargueriteRodrigue Bouffard) en a semé, une fois.J’étais jeune puis elle n’en a jamaisr’semé.

Mais ce qui est arrivé, c’estqu’elle était dans les Fermières. Puisles bobines de fil de lin à acheter sontarrivées. Alors là, c’était pas mal moinsd’ouvrage que de l’faire soi-même. Çafait qu’ils achetaient les bobines de linet elles les tissaient. À c’moment là, i’y avait pas d’agrafes et l’linge était bi’ndoux. Il était p’t-être un peu moins bonque celui qu’il y avait avant, parce qu’i’

était plus fin, mais c’étaient des bobinesindustrielles, à c’moment-là. C’étaitp’us artisanal (voir les entrevues deFlorence Mathieu Giroux etd’Émérentienne Poulin Prévost).

HDB– Pour faire les vêtements, à quelendroit elles prenaient d’autres tissus?

PB– Entre autres, ils achetaient la farineen 100 livres, de la Robin Hood, dansl’temps, et c’était dans des pochesfleuries, dans du beau coton. Il y avaittoutes sortes de fleurissage.

C’étaient pas des fleurs bi’n,bi’n fines. C’était du coton blanc avecdes fleurs jaunes, des fleurs roses...toutes sortes de fleurs. Elles se faisaientbi’n gros de robes et de tabliers, avecces poches-là. Quand ç’a sorti, lespoches de farine fleuries, c’était toutun évènement. Parce qu’avant,c’étaient des poches de farine, maisc’était blanc. Elles s’en servaient pourfaire des linges à vaisselle p’is d’autreschoses. Mais elles pouvaient pas s’enservir pour faire des choses de fancyautant, comme des robes.

Elles se faisaient des robes desemaine ou pour travailler aux champs,dans l’étable, des choses comme ça.C’était roffe2 un peu, et épais, mais pourl’été, c’était bon.

HDB– Les hommes fumaient. Lesfemmes, peut-être, aussi?

PB– J’ai pas vraiment connu defemmes qui fumaient. J’ai connu unevieille femme qui fumait la pipe, maisj’en ai pas connues d’autres. Leshommes fumaient la pipe et ilschiquaient, ils mâchaient du tabac. Laplupart cultivaient leur tabac, dans leurjardin. Ils avaient peut-être un 100,150 pieds de tabac dans leur jardin. I’v’nait beau, i’ v’nait 4 ou 5 pieds delong.

L’automne, ils le ramassaientet le faisaient sécher. Ils avaient deshaches2 à tabac, qui étaient illégales. Ily en avait qui s’en faisaient pareil, maisils les cachaient. Il devait probablementy avoir une taxe sur le tabac, à cetteépoque-là.

Page 16: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

588

Ils vendaient le tabac haché etil y en avait, aussi, au magasin, enfeuilles. Mais le tabac en feuilles étaitvendu généralement pour chiquer.

HDB– Pour semer leur tabac, il fallaitqu’ils aient leurs graines?

PB– Oui. Mais j’sais pas s’ilsrécoltaient leurs graines ou s’ils lesachetaient. Mais ça n’en prenait pasbi’n, bi’n, d’la graine de tabac. C’estfin.

HDB– Ils pouvaient conserver ça toutl’hiver et tout l’été?

PB– Oui. C’était comme aujourd’hui.Puis c’était qui avait fait le plus beautabac. Ils faisaient goûter leur tabac.«’Gard’ comme mon tabac est bon».(voir l’entrevue d’Israël Lapointe)

HDB– I’ goûtait pas pareil?

PB– Bi’n, ’faut croire. Ça devait êtreun peu comme les jardins d’aujourd’hui.Si tes tomates sont plus belles quecelles du voisin.

Les graines de jardin, ilsrécoltaient tout, mais ils en achetaientaussi. Comme les choutiams1, lescarottes, les graines de tomates, lesgraines d’oignon, les graines de maïs...Il y avait du blé d’Inde1 sucré et du blé

d’Inde1 poffé. La graine de mil, je l’aivue, quelque fois, mais ç’a disparuassez rapidement.

Cercle agricole

I’ s’sont mis à l’acheter aumagasin. Mais ils le laissaient bienmûrir, après les foins, et ils lecoupaient avec une faucille et lerécoltaient à la main, parce que aufaucheux, ils auraient perdu toute lagraine. Ils la mettaient dans une espècede vailloche1, un tas d’foin, à terre,puis ils laissaient javeler ça un peu.Quand il était bi’n sec, ils allaient fairebattre le grain au Cercle Agricole.

Le Cercle Agricole, c’étaitun groupe de cultivateurs. Souvent,c’était toute la paroisse qui étaitensemble, sur différents objets quiétaient trop dispendieux pour qu’ils sel’achètent eux-autres mêmes. Ils lepossédaient en commun. Toute laparoisse payait cinquante cenne1 parannée pour faire partie du CercleAgricole.

À c’moment-là, ils avaientl’droit d’aller faire battre leurs grainesau moulin à graines, parce que c’étaitune batteuse spéciale pour battre lagraine de mil et la graine de trèfle.

Le trèfle, ils le récoltaientl’automne, tard, et ils le mettaient dansun tas et le laissaient javeler. Après ça,ils l’étendaient et le faisaient sécher. Ilsle chargeaient dans une voiture, unmoment donné, et allaient l’faire battreà c’moulin-là.

Ce moulin-là (le moulind’Adalbert Bureau), nous-autres, il étaitentre Saint-Éphrem et Saint-Victor,dans l’septième rang. Il y avait unepetite grange spéciale, pour cettemachine-là. C’était une assez grossemachine.

HDB– Qui possédait c’moulin-là?

PB– C’était le Cercle Agricole. Aprèsça, ils avaient l’coupe-cornes2, pour lesanimaux. I’ coupaient pas les cornes desjeunes veaux, comme aujourd’hui. Ilsattendaient que l’animal ait deux outrois ans. C’était un gros coupe-cornes2. Ça avait 4 ou 5 pieds de long.

Ils avaient aussi un crible,pour sasser l’avoine, le printemps. Ilspassaient ça dans cette machine-là etça enlevait la balle et l’avoine folle,qu’i’ appelaient, qui ’germait pas, oules trop p’tits grains d’avoine. Puis lesmauvaises herbes et les impuretés qu’ily avait dans leur avoine. C’était unemachine qui avait à peu près 4 piedsde hauteur, 3 pieds de largeur puis5 pieds de longueur. Ils passaient çad’un cultivateur à l’autre, en voiture.Chacun l’emmenait chez eux, il criblaitson grain et allait le porter à un autre.C’était fait à la main. Ça tournait avecune manivelle. Le bon grain tombaitdans une boîte, en dessous.

Fin de l’entrevue

Le tabac.Provenance: Marthe Lacourcière

Page 17: Une entrevue avec PATRICK BOUFFARDpatrimoinesaintvictor.com/s_data/doc/32patrick_bouffard.pdfpuis de bulldozer travailler dans de gros chantiers. La venue de la pelle mécanique, à

589

Les sourciers

(Les sourciers étaient : Narcisse Patry, Florian Bolduc, ÉmileBolduc, Clémence Doyon Bernard, Bernardin Bernard, AlfredPoulin (Grand Fred), Séraphin Rodrigue, Françoise CloutierPlante et Louise Poulin à Victor Amédée.)

Albert Gosselin a fait tirer un puits par un sourcier, AlfredPoulin. Albert avait une pompe pour se procurer de l’eau etpour l’avoir à gravité, le sourcier était venu en montant la côtepour avoir du niveau. C’est sûrement une habileté pour ne pasdire un don relié au corps. C’était pour un puits de surface.

Source : Guy Fluet

Les sourciers se servaientde : barre soudée aubronze, en cuivre, jarre decerises, jarre de noisettes enfourche, elle travaillaitpour descendre vers le bas.Philéas Fortin à David tiraitles puits dans les années’50.

Source : Normand Fortin

LPF– Parlez-moi de votrepère, quand il était sourcier,il tirait des puits?

HP– Ah! oui, i’ venaient lechercher chez nous. I’ ( Alfred Poulin à Alfred à Charles Poulin)montait tirer des puits puis (la jarre) i’ a prenait comme ça etelle virait. On voulait pas le creire1, nous-autres. On disait :«C’est toi qui la vire». Mais elle faisait casser l’écorce. C’étaitpas lui qui la faisait virer, c’était l’eau. Là, il nous disait : «J’va’svous dire combien c’est creux.» I’ faisait trois pas su’ l’eau, eti’ disait : «Là, ici, i’ y a de l’eau.» I’ y en avait, itou2.

LPF– Considérez-vous que c’était un don que votre père avait?

GP– Moi, j’me souviens, quand on était jeunes, i’ venait et çacraquait dans les mains, ça venait tout rouge. I’ prenait la jarrede noisettes et ça craquait dans les mains. On l’croyait pas,nous-autres, mais on l’a vu faire, grand-papa (Alfred Poulin àAlfred à Charles Poulin).

HP– Ah! oui, la veine marchait bien.

FCP– C’est une espèce de fourche.

EPJ– C’est un Y.

HP– Dès que tu vas avoir senti grouiller, arrête là. C’est làqu’elle est, la veine. Puis tu peux dire au monde combien creuserde profondeur de terre avant de frapper l’eau. Le père nousdisait : «Si j’faisais trois pas, c’était 3 pieds du pas. Ça faisait9 pieds.». Quand i’ avait trouvé la veine, i’ se reculait puis enmarchant trois pas, ça faisait 9 pieds. À 9 pieds, tu vas trouverde l’eau. Quand i’ approchait de la veine, la jarre commençaità vouloir baisser tout’ suite. I’ voulaient arrêter puis i’ dit :«Arrête pas. Fais-toi un bassin.» Mais ça montait assez, nous-autres, dans le puits, ça venait quasiment jusqu’au couvert.

FCP– Le père Séraphin Rodrigue, qui restait dans le (rang) 4(Sud), i’ tirait des puits, des veines d’eau. I’ était venu chezEugène Plante, dans le cap. I’ on défoncé le cap et là, l’eau estsortie tant qu’i ont voulu puis c’était de la bonne eau fraîche etpure. I’ est encore là, le puits (au 510, Rang 3 Sud).

LPF– C’était qui, Narcisse Patry?

HP– C’était un Patry, du lac. C’était le bonhomme qui étaitvenu ici (tirer le puits).

FCP– Moi itou2, j’en tire des puits.

Source : Entrevue de Françoise Cloutier Plante, Éva Poulin Jacques, GisèlePoulin, Henri Poulin à Alfred, par Lorraine Poulin Fluet, 1 Août 1999

HP–Oui

Provenance: Guy Fluet