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une attention éperdue aux enfants une attention éperdue aux enfants - Livre d’artiste Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel 30 exemplaires numérotés - 12x12x1cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle texte (extrait): ceux qui s’approchent, tendus, ceux qui s’écroulent — avec l’enfant, les ballots, les sacs en plastique — le pain mouillé, les papiers, un peigne — se relèvent, s’entêtent, VRXIÀHQW XQ LQVWDQW OH WHPSV GH VH UHIDLUH XQH ¿JXUH WULHU les cheveux et la pluie, pleurent sans s’en rendre compte, sans vraiment, sont arrivés sur l’autre bord — ici — rient, sans s’en rendre compte, l’enfant serré contre soi, ballot contre elle, contre lui, ceuxlà accrochent la main de celui — s’agrippent — ne lâchent l’enfant se réveille — dans les regards, s’y love — force qu’ils puisent pour quelques mots, un morceau de pain mouillé — l’enfant se tait, alerté — fait silence contre la peur, contre elle, sa mère éperdue, tout contre — gravé — ça — sans paroles à l’intérieur de l’enfant, s’entête — ça — mordu de sel — ça — les autres qui ont échappé, glissé des mains les bras d’un homme sale, sali, pas dormi, aux aguets de chaque bruit de nuit, de mer, de hoquet du moteur, de houle, de réveil des enfants, de plaintes, les mâchoires serrées de froid, un homme qui la tend, la petite, du bateau à la plage, à d’autres bras — la passe — la petite (...) l’enfant serré contre soi, contre lui — le poids d’un de trois ans dans les bras — endormi — les petites jambes qui ballotent les bras qui pendent — ce poidslà inscrit dans le corps des mères — l’enfant passé à d’autres bras gravé — ça — sans paroles — ça — les autres qui ont échappé, glissé des mains avec une attention éperdue si tendre à en être facilement entamée, à vif, en effroi des paupières, des joues, du dos — ils se passent un enfant — ils tiennent bon, l’enfant, de bras en épaule en mains — avec une attention éperdue, des brassées d’enfants (...) Des personnes cherchent refuge, désemparées, dans des conditions épouvantables: elles ont tout quitté, elles attendent, ne savent pas, perdent espoir, s’agrippent, se noient, éperdues... Et parmi elles, des enfants, transportés, ballottés, précieusement...

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une attention éperdue aux enfants

une attention éperdue aux enfants - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 12x12x1cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

ceux   qui   s’approchent,   tendus,   ceux   qui   s’écroulent   —  avec  l’enfant,  les  ballots,  les  sacs  en  plastique  —  le  pain  mouillé,  les  papiers,  un  peigne  —  se  relèvent,  s’entêtent,  

les  cheveux  et  la  pluie,  pleurent  sans  s’en  rendre  compte,  sans  vraiment,  sont  arrivés  sur  l’autre  bord  —  ici  —  rient,  sans  s’en  rendre  compte,  l’enfant  serré  contre  soi,  ballot  contre  elle,  contre  lui,  ceux-­là  accrochent  la  main  de  celui  —  s’agrippent  —  ne  lâchentl’enfant  se  réveille  —  dans   les  regards,  s’y   love  —  force  qu’ils   puisent   pour   quelques  mots,   un  morceau  de   pain  mouillé  —  l’enfant  se  tait,  alerté  —  fait  silence  contre   la  peur,  contre  elle,  sa  mère  éperdue,  tout  contre  —  gravé  —  ça  —  sans  paroles  à  l’intérieur  de  l’enfant,  s’entête  —  ça  —  mordu  de  sel  —  ça  —  les  autres  qui  ont  échappé,  glissé  des  mainsles  bras  d’un  homme  sale,  sali,  pas  dormi,  aux  aguets  de  chaque  bruit   de  nuit,   de  mer,  de  hoquet  du  moteur,   de  houle,   de   réveil   des   enfants,   de   plaintes,   les  mâchoires  serrées   de   froid,   un   homme   qui   la   tend,   la   petite,   du  bateau  à  la  plage,  à  d’autres  bras  —  la  passe  —  la  petite  (...)l’enfant  serré  contre  soi,  contre  lui  —  le  poids  d’un  de  trois  ans   dans   les   bras  —   endormi  —   les   petites   jambes   qui  ballotent  les  bras  qui  pendent  —  ce  poids-­là  inscrit  dans  le  corps  des  mères  —  l’enfant  passé  à  d’autres  bras  gravé  —  ça  —  sans  paroles  —  ça  —  les  autres  qui  ont  échappé,  glissé  des  mainsavec   une   attention   éperdue   —   si   tendre   à   en   être  facilement   entamée,   à   vif,   en   effroi   des   paupières,   des  joues,  du  dos  —  ils  se  passent  un  enfant  —  ils   tiennent  bon,   l’enfant,   de   bras   en   épaule   en  mains  —   avec   une  attention  éperdue,  des  brassées  d’enfants  (...)

Des personnes cherchent refuge, désemparées, dans des conditions épouvantables: elles

ont tout quitté, elles attendent, ne savent pas, perdent espoir, s’agrippent, se noient,

éperdues... Et parmi elles, des enfants, transportés, ballottés, précieusement...

à tenter de voir dans la nuit — un homme?

à tenter de voir dans la nuit — un homme? - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 17x21x1,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extraits):

(...) après un chemin de ponts tordus, de

manteau serré au cou, d’ombres sur les

grands champs et de forêt dense, de pots de

café, de vieille femme qui frotte ses seins

de boue, de chant blessé, de légumes pelés,

de souvenirs de coton et de cheval de bois

après un chemin de chambres de hasard, de

ratures, de fond de hangars et de dégoûts,

de toiles rapiécées, de mains, loin — une mer

grise, hachée, nerveuse, agitée en surface,

un ressac sur la côte, une simple tempête

d’hiver

après ce chemin où les enfants ont commencé à

manger de la terre — la houle — tu embarques

nuit après nuit

tu ne dors pas

le pan de ciel fait masse, sans bords,

lieu d’absences, lieu d’un absurde, vide,

engloutissant

ciel opaque et silencieux — un bloc sombre

(...)

La plupart des personnes sont tombées à

l’eau et se sont noyées.

sans bruit — la masse du ciel encore

et comme si

l’ombre d’un oiseau qui passe — qui passerait

le vent silencieux

comme rien

comme juste avant — une trace, à peine là-

bas, juste là, un insecte perdu

comme si le jour allait revenir — des

pointillés, des trous — comme de coutures

défaites (...)

ils sont corbeaux

ils sont corbeaux - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 15x15x1,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

(...) écriture du ciel — on les observe, le ciel journal du monde — parfois on se regarde

furtivement, on parle un peu, ou pas — silence paisible des paysages, du soir qui vient — on

se retrouve le soir, dans les cafés, autour d’un verre — eux aussi, le soir, pas loin d’ici

— on les regarde — eux aussi, de leurs yeux transparents — on se pose entre deux voyages,

des provisions d’histoires au fond des sacs, des pensées dénichées — on écoute — eux aussi

leurs récits, de leurs voix éraillées, effarouchés, entre deux migrations — parfois, on

marche solitaire dans nos pensées, comme un qui a perdu ses mots — celui-là déambule, tête

rentrée dans sa veste — on marche avec lui, entre les herbes et les chemins, les arbres

hauts — et lentement, on reprend conversation — chacun — ils marchent désoeuvrés, petits

sauts, pas de côté, nonchalants — quand on les trouve au bord des routes, palpitants,

effrayés, ils nous semblent petits riens, choses douces et chaudes, tombés nus (...)

et qui déjà s’éloigne

et qui déjà s’éloigne - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 10x27x1cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

je roulais le brouillard comme le vent rampant par-dessous l’herbe — rasant le sol les

herbes rousses inquiètes bord de route en tapis — frissons parcourant les jambes et les

arbres dans l’éblouissement de l’hiver les oiseaux avaient quitté le ciel

et parfois ce visage

maison pour l’hiver sans fenêtres ou alors les volets bloqués barres de bois clouées depuis

longtemps (...)

et qui hante

et qui hante - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 28x14x2,5 cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extraits):

(...) Tu abandonnes un bout de toi dehors —

un chien qui t’attendrait et toujours comme

s’il pleuvait et toujours l’air de pleurer.

Comme entendre le vent hurler dans l’espace

entre nos bouches — le froissement des vols

d’étourneaux, leur danse insolente — et se

mordre et s’arracher les lèvres, s’abîmer et

la terre se dérobe et nous laisse éreintés.

(...) Il se chauffe au soleil le dos contre

il pense à des chemises blanches de femmes

dans le vent, et l’odeur du café.

Le dos contre le chaud des pierres, lui,

son corps, les yeux fermés en place de

larmes, décanter un vol d’oiseaux les ailes

ébouriffées, les caresses des femmes, une

cabane balayée par le vent.

Dans l’espace entre nos bouches — ne se

frôlent pas — à peine — une femme s’est

perchée sur nos épaules — oiseau maigre —

et chante un cri strident. (...)

ici ne repose pas

ici ne repose pas - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 25x8x1cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

colline sèche dont on ignore le nom, là-bas. Un homme arpente

à peine le sol de son ombre — quelques-uns, compagnons.

Et l’on interdira aux enfants d’y aller jouer à cause des

Ici ne repose pas.

Un homme. Ce qu’il porte et qu’il rabat sur son visage la

nuit pour dormir. (...)

Les lieux qui ont accueilli des charniers, même quand le temps a longuement passé et

effacé les traces, restent sans repos dans la mémoire des hommes: des lieux impossibles,

impensables. J’ai eu envie de représenter ce «non-repos» des lieux.

désordre des étés

désordre des étés - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 30x12,5x1,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

Des riens d’enfant.

Des cailloux que tu changes de

place, tout le long du jour.

appelle pour le dîner.

Et le vent tout ce temps

murmurait à l’oreille on ne

savait pas quoi mais des

histoires. L’enfant complice. Un

chant que même l’oiseau n’entend

pas. On ne savait pas quoi mais

des histoires.

Tu sais qu’elle peut — la mère —

le sourire les plis des yeux et

qu’elle peut se pencher un peu

s’approcher comme dire quelque

chose à l’oreille, embrasser. Tu

es debout, là, percluse d’attente

et refrain rauque, lancine.

Ensuite, l’enfance cachée dans

un sac sur la tête.

L’enfance est le temps de

construire le sac sur la tête,

Enfouir (...)

aussi l’envers du décor: taches rouges, cicatrices, noeuds...

les traversées

les traversées - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 9x9x2cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

(...) quelqu’un — quelqu’un attend —

d’autres attendent ne courent pas la

nuit rampant

la peur et se serrent — sans doute il

pleut — regards —

pas d’arbres de ce côté le froid

quelqu’un — il est parti un soir — on

s’en souvient et s’échappe

(...)

Questionner la frontière comme lieu de possibles rencontres avec l’autre.

Au-delà d’être limitation ou fermeture, la frontière travaille la notion de «seuil»: le

lieu de la présence ou du voisinage de l’autre, le lieu de l’altérité. Un lieu ni ici, ni

là-bas. Là-bas étant chargé de fantasmes, de curiosités, de peurs ou d’attirances, voire

d’espoirs.

Images laissant un vide central. Deux groupes de personnes, différents dans leurs attitudes,

donnent l’impression qu’ils s’observent, s’attirent...

amertume

amertume - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 15x15x3cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte:

on entre dans les cafés du port avec des vagues

sous les pieds, des possibles

les gens, leurs mots, ceux qu’on sait…

on entre à tirant d’eau, à limite habitable,

certains soirs le vent traverse, laisse des

par les vitres des câbles barbelés, des guerres

d’eau et de traces

certains soirs on déborde à haut-le-cœur, la

marée ne crève pas ni en sanglots

les paroles se serrent contre les autres

les gens engloutis dans leurs mots, ceux qu’on

sait…

on s’immerge, amertume des jours et des paroles

et tout près l’océan en murmures incertains

comme ces mots, ceux qu’on sait…

aller de côté et d’autre en parlant des choses

aller de côté et d’autre en parlant des choses - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 15x27x6,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

Je vais marcher dans la ville inventer

une histoire, vraie. Vous allez me suivre

même fatigué. Il faudra marcher. Je suis

passager d’ici de ma route à l’abandon

je m’invente. J’ai vu des manches à air,

leur plainte silencieuse bouche bée et

des arbres taillés. Ne reste qu’une

branche entêtée. Il faudra donner quelque

chose d’épais à manger à la solitude,

l’apprivoiser, aller voir de l’autre côté

de son charme. L’empâter.

Je boite, il paraît.

Je marche le dimanche et l’ennui calme.

Des pavés dans les rues un peu en pente

en virages des cafés fermés dans les

coins. Les maisons sont hautes et maigres

éclaboussées de lichen et de goélands. Il

passe une musique une ville qui hante. Jours

entiers à errer à éprouver le monde chemin

faisant n’avoir aucune raison d’être là

La lumière est juste sous l’horizon. Une

ligne. Le reste est gris un calme posé là

prend à la gorge une chaloupe un oiseau

solitaire. Je me souviens. Partir. Je

voulais. (...)

Le livre à tiroirs, qui permet une lecture

déambulatoire : des bouts d’images, des

fragments de textes apparaissent, ou pas,

de manière aléatoire, et accompagnent

ainsi le texte.

murmures

murmures - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 16,5x6x2cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

(...) une nuit à travers

à traverser, attendre, tendre

une nuit

le noir cogne à travers à mi-clos, bat

une nuit à entendre le noir à travers

te souviens des battements

lente attente

et se noyer — nahe Nacht — en une nuit tendue

de peine

à peine au matin

entre deux

entre deux - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 12x12x1,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extraits):

Là.

On entre, en présence des lieux. La tendresse

en plein visage, marquée de taches de couleurs,

du rouge surtout, et des lignes brisées, des

mots. Est-ce qu’on connaît ce lieu ? Les images

un paquet de bonheurs sur la table. Mais aussi

un escalier plein d’amis effacés. C’est aussi

là-bas qu’elle habite. Un autre lieu. Les mêmes

mots. On avance vers l’abstrait. Respiration

dans le vide. Toutes les images sont orientées

autrement. Regarde, il n’y a rien d’autre, on

est entre deux. Quelqu’un et quelqu’un d’autre.

(...)

On est perdu. On regarde au loin. On respire à

grandes goulées. Beaucoup d’ombres avalées. Noyé

dans un mélange de tendresse, à pleurer doucement

et de regrets, de douceurs à venir. Temps si

perceptible, et le vent qu’on a perdu, retrouver

le temps salé des promenades à écrire, à préparer

des gâteaux pour elles. Sœurs d’amour. Etre leur

mère et un bateau glisse. L’océan violet dessine

du temps. L’image suspendue permet le rêve.

L’air ressemble à un ventre de mère depuis déjà

tant. Et elles, affamées, en attente. Le ciel

dans un miroir. L’océan manque. On met au monde

trop à déborder, de toute façon trop loin. (...)

tu sais

tu sais - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - Ø26x3cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

tu sais

tu sais, j’ai quelque chose à te

dire, à toi, et pourtant,

tu sais

tu sais, j’ai quelque chose à te

dire, à toi, et pourtant,

il n’y a pas de raison

quelque incertaine chose

folle

pourtant, il y a de la raison

pourtant, tant pis, temps qui passe

enfance qui repasse

vache qui pisse, pis que pendre,

rien à perdre

rien à perdre ?

si

toi

s’il te plaît

il pleut

tu sais, je voyage, toujours un peu

seule

je traîne et je trame, je regarde et

respire

un peu là, un peu seule, un peu lasse

je voyage en train, cahots, cahin-

caha, câlin, pas là

pas toi, pas toi, pas toi, pas toi,

pas toi, en train

tu sais, j’ai quelque chose à te dire

ma mère est

folle

à gérer, à digérer

et je retourne toujours chez elle

et je tourne et je retourne toujours

chez elle, et je tourne et je tourne,

chez elle

chez ma mère, je retourne toujours,

jours

à gérer, à digérer, à tourner, en

train

(...)

C’est un livre impossible à fermer...

C’est un texte qui ne s’arrête pas, qui ressasse,

qui évoque la pluie qui tombe, les trains qui

passent et repassent, une mère qu’on visite, encore

et encore, et qui nous renvoie à l’enfance, qui

ne passe pas...qui reste en travers de la vie...

papiers rayés, roue du livre qui tourne sur elle-

même...

Malgré tout, dans l’enfer de ce livre infermable, si

l’on cherche bien, on peut trouver des ouvertures,

timides, incertaines, discrètes, de petites

éclaircies dans le texte et dans les images qui

l’accompagnent... un silence qui espère...

Le livre est construit comme une roue, chaque

page est un rayon de cette roue. Il n’y a pas de

fois, entrecoupé d’images évoquant des roues ou des

escaliers.

frisson

frisson - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

50 exemplaires numérotés - 11x11x1cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

Elle a tellement à dire, le temps qui

passe, des souvenirs troués, depuis son

ventre, le tendre de ses pieds et ses

ongles rongés. Elle parle. Des mots

graves, des corbeaux qui passent en cris,

d’épaule en épaule, une mouette défaite,

ébouriffée qui déchire le paysage. Elle

frissonne. Le vent emporte les mots et

les oiseaux un peu plus loin. Elle va dans

ce plus loin avec le tendre de ses pieds.

moque. Son ventre se serre et se tait pour

qu’elle écrive.

C’est une journée tranquille, comme une

autre. Elle a des amis-il-paraît. Le vent

ils vont, ou se posent. Les moineaux, non.

Un café. On parle, du monde qui va mal, de

la solitude, d’un enfant qui ne sourit pas

trop, comment dire ? Les mots s’affolent.

Les moineaux, non. On parle. Le vent ne

s’en mêle pas. Rien ne se passe. Les amis

n’ont pas les vêtements dérangés, les

cheveux en lambeaux, les moineaux leur

picorent la tête. Les mots s’éteignent et

les amis-il-paraît s’en retournent. Elle

reste sans ses mots. Le vent l’emporte un

peu plus loin, juste à côté. le vent, il

paraît...

(...)

neige

neige - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 20x16x2cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

(...)

Marcher dans du blanc, au hasard. Et j’attends. Je reprends ma marche dans le blanc,

tranquillement perdu. Attendre. Marcher et je dessine, à force, des traces imperceptibles.

Quelque chose a changé sans m’en apercevoir, à force un nouveau paysage. Et s’il fallait

effacer un peu plus les traces, en cet endroit incertain, qu’il ne reste qu’un seuil,

laisser la place pour que quelqu’un approche, puisse approcher. Oser murmurer.

pour troubler la vue, évoquer la neige qui tombe, zébrer l’espace... Le doigt passe sur

pages deviennent de plus en plus vides et blanches au fur et à mesure.

les jardins

les jardins - Livre d’artiste

Texte, images et réalisations: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 7x7x2,5cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extraits):

Les jardins... après la ville, les

rues, les cafés, les jardins...

Après la voie ferrée, posés en bas,

reposés. (...)

Les jardins, escargots en balade,

cailloux qui pointent leur nez,

dentelles de rouille, collection

ça couine, brouette.

Les jardins, humbles théâtres pour

un public d’oiseaux, chaise à trois

pattes, cabane aveugle, petit tas de

sable rond, oiseaux, oiseaux, oiseaux

qui n’ont pas de noms, oiseaux communs

ensemble, tiges qui leur répondent.

(...)

soin de toi

soin de toi - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 12x12x2cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extraits):

(...) Un lundi il passe, passe qui

vient dans le vide sans se poser

des traces de pensées, rien. Le

gars en errance a besoin d’un café

un croissant rassis ce qu’on donne

besoin de lacets. Les chiens à

l’entrée chiens tranquilles assis

attendent que passe, qu’il revienne,

le gars. Ses yeux doux attendent

ont besoin, rien regardent ceux

qui passent dans le vide regardent

le temps bouge. A chacun qui passe

attendre. Leurs yeux regardent en

douceur, le gars et son chien.

L’envie de ça, de douceur.

(...) Un lundi on voit à peine son

visage. Il est passé devant une

porte gueule ouverte dans un coin

mains dans les poches un peu de vent.

Un peu noir le vent. Il marche ciel

bas cependant la porte à visage le

suit des yeux. Il ne parle pas ne

se souvient plus de rien son chien

délaissé. Les feuilles craquent au

vent une ombre fébrile.

(...)

Texte écrit en écho à la rencontre de personnes sans domicile, en errance; livre comme

une enveloppe protégeant quelque chose de fragile, à ouvrir avec précaution.

une ressemblance qui s’arrache du visage

une ressemblance qui s’arrache du visage - Livre d’artiste

Texte, images et réalisation: brigitte Mouchel

30 exemplaires numérotés - 14x17,5x2cm - impression jet d’encre - façonnage: technique personnelle

texte (extrait):

le visage retentit, apparaît, fascine.

c’est un visage. c’est l’image. le regard

apparaît. c’est un regard qu’on connaît.

un regard qu’on croît connaître. on sait

qu’on le connaît. c’est quelqu’un qu’on

connaît. avant. qu’on connaissait avant.

c’est une mère avant d’être née. avant

qu’on soit né. une mère et sa vie à venir.

naît. avec un regard qui ressemble. ou

pas. c’est un visage. le regard apparaît.

c’est un regard qu’on connaît. un regard

qu’on croit connaître. c’est soi avant.

avant soi. temps raccourci de soi à soi.

il ressemble à un autre. la ressemblance

inquiète. le regard hante. c’est un visage.

c’est un regard qu’on connaît. on sait

elle. on se souvient. l’image ressemble.

on ne sait plus. on en connaît d’autres.

d’autres visages inconnus. on capture

des regards qui hantent. on capture des

visages qui habitent. on est devant des

regards qui se fondent. on est devant. on

est devant des regards qui s’estompent.

qui disparaissent. on est devant des

images qui ressassent et qui perdent. on

se perd. il y a le temps. être perdu là.

et avant. le temps d’avant. la mémoire.

les regards dans la mémoire et les autres

qui hantent. la mémoire de regards qu’on

ne connaît pas. qu’on connaît cependant.

qui sont convoqués. qu’on convoque. de

soi à soi. des ressemblances. jusqu’à

épuisement. un ressassement de visages

jusqu’à la disparition, jusqu’à un

tremblement. (...)