Un mythe athée - pourquoi l'Humanite est-elle un Destin
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Un mythe athée : pourquoi l’Humanité est-elle un destin ?
À propos du documentaire la Révélation des Pyramides
https://www.youtube.com/watch?v=uEGrro4BiQY
« Je veux raconter maintenant l’histoire
de Zarathoustra. La conception fondamentale
de l’œuvre, l’idée de l’Éternel Retour, cette
formule suprême de l’affirmation, la plus haute
qui se puisse concevoir, date du mois d’août de
1881. Elle est jetée sur une feuille de papier
avec cette inscription : À 6 000 pieds par delà
l’Humain et le temps. Je parcourais ce jour-là la
forêt, le long du lac de Silvaplana ; près d’un
formidable bloc de rocher qui se dressait en
pyramide, non loin de Surlei, je fis halte. C’est
là que cette idée m’est venue. »
F. Nietzsche, Ecce Homo1.
En comparant l’architecture et la localisation de nombreux sites antiques, le
documentaire dont il est question entend remettre en cause notre vision du passé. Est en jeu
La manière dont l’Humanité perçoit sa propre Histoire : son passé et son futur.
Les auteurs du documentaire, Patrice Pooyard et Jacques Grimault, jettent le
discrédit sur leurs adversaires idéologiques (les Archéologues et Conservateurs de Musée,
tenant-lieu de l’Histoire officielle) au moyen d’un montage habile et peu glorieux. Patrice
Pooyard et Jacques Grimault ont été plus inspirés en choisissant de donner la parole à des
Professionnels, Architectes, Géologues et Ingénieurs, officiant dans de grandes entreprises
privées, afin de bénéficier de leur point de vue sur la construction de la Grande Pyramide2.
1 « Ecce Homo est une expression latine signifiant « Voici l’homme ». C’est
l’expression utilisée par Ponce Pilate dans la traduction de la Vulgate de l’Evangile de Jean, lorsqu’il
présente Jésus à la foule, battu et couronné d’épines. » : http://fr.wikipedia.org/wiki/Ecce_homo. Dans
son Ecce Homo, Nietzsche aspire à mettre à bas l’unicité du « moi ». Ce qui est en jeu derrière la
figure de Dionysos, c’est un désir de vivre, une affirmation inconditionnelle de la vie.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ecce_Homo_(Nietzsche)
Sont présentés un certain nombre de faits qui remettent en cause notre vision du
passé, mettant à mal ce que nous savons de l’Histoire de l’Humanité :
1- Tous les Historiens s’accordent sur le fait que la Grande Pyramide ait été érigée
pour être le tombeau de Kheops et qu’elle a été construite pour cela en une
vingtaine d’années. Selon l’auteur du documentaire, ce chantier colossal n’a pu
être réalisé en si peu de temps avec l’outillage de l’époque (un burin et une pierre
ronde). Par ailleurs, Archéologues et Conservateurs spécialistes de l’Egypte
ancienne, sont incapables de rendre raison de la précision des objets sphériques
datant de cette époque (ceux conservés au Musée de Louvre). Il est inconcevable
que des objets d’une telle précision aient pu être conçus avec pierre et burin.
2- La Pyramide de Kheops est composée de 8 faces, ce qui constitue une
complication architecturale. La pyramide marque avec précision les équinoxes qui
se reflètent à sa surface. Son orientation vis-à-vis des quatre points cardinaux
témoigne d’une précision millimétrique3.
3- La Grande Pyramide est un objet géométrique parfait : le nombre PI et le nombre
d’or (Phi) sont inscrits dans ses moindres proportions. Son architecture et ses
proportions mettent en exergue une relation entre la coudée (Pi - Phi² = 0,5236),
Pi, le nombre d’or et le mètre : si la pyramide avait été plus grande ou plus petite
de 50 cm, si la Chambre Haute avait été plus grande ou plus petite de 5cm, ces
coïncidences n’auraient pas été possibles. Ses rapports de proportion ne se
révèlent qu’en utilisant des instruments de mesure modernes. Outre le fait que le
mètre ait été adopté en 1793 sur proposition de Talleyrand, à partir de la
connaissance de la circonférence de la Terre, l’Histoire actuelle n’admet pas que
les Egyptiens aient disposé de tels concepts mathématiques. Ceci remettrait en
cause l’état de nos connaissances sur les outils et techniques qui étaient les
2 Parmi ceux-ci : Pier Luigi Copat, Architecte-Consultant pour le chantier de la
Potdzdammer Platz de Berlin. Chris Wise, Ingénieur-Structure du Millénium Bridge de Londres. Jean-
Pierre Martin, Chef de projet du Viaduc de Millau (Eiffage).Luc Glaud, Compagon Tailleur de pierre.
Eric Gonthier, Géologue et Ethnominéralogiste (Musée de l’Homme de Paris).Philippe Robert, PDG
de La Générale du Granit. Chris DUNN, Ingénieur Manufacture aviation civile et militaire (Danville
Metal Stamping Co). Claude Genzling, Mathématicien et Ingénieur Polytechnicien. Jean-Louis
Basdevant, Physicien-Professeur à l’Ecole Polytechnique. Michel Fortugne, Paléoclimatologue, Institut
de Physique du Globe de Paris.3 http://www.chez-web.com/la-revelation-des-pyramides-decryptage-et-analyse-
presentation-et-13-premieres-considerations-mathematiques-qui-impliquent-des-connaissances-
abouties-dans-le-domaine/
leurs. Selon les auteurs du documentaire, il faudrait également rendre raison du
fait que les Egyptiens connaissaient le Mètre des millénaires avant son adoption4.
4- Les constructions des sites antiques qui parcourent le globe sont massives et
témoignent d’une technicité (taille des pierres, prise en compte de normes
antisismiques, architecture qui dénote un savoir astronomique poussé)
difficilement reproductible avec des moyens modernes. Les similitudes que
présentent ses sites antiques sont d’autant plus troublantes que les peuples en
question n’avaient pu entrer en contact (Pérou, Egypte, Mexique, Iles de Pâques).
5- La géométrie du site de Gizeh (orientation de la Grande Pyramide et du Sphinx)
met en exergue le phénomène de précession des équinoxes5.
6- La ligne qui va de l’Ile de Pâques à Gizeh est une partie d’un cercle de 40 000km
de long, la longueur de notre équateur terrestre. Large d’une centaine de
kilomètre, ce cercle englobe de nombreux sites antiques (le Chandelier de
Paracas, les Pistes de Nazca, Ollantaytambo, le Machu Picchu, Cuzco et
Sacsayhuaman et les Pyramides de Paratoari au Pérou, le site de Gizeh en
Egypte, Mohenjo Daro au Pakistan, Angkor Vat au Cambodge…une vingtaine au
total pour aboutir à l’Ile de Pâques, endroit le plus isolé au Monde).
Cette ligne de 40 000km de circonférence est inclinée à 30 degré de
l’équateur. Si ce cercle était un équateur, son pôle nord serait situé à un point du
globe qui, reliant Nazca et Gizeh, serait un triangle respectant les proportions de
la Grande Pyramide. Par ailleurs, ce point correspondrait au centre d’oscillation
du pôle magnétique terrestre6.
4 http://www.chez-web.com/la-revelation-des-pyramides-decryptage-et-analyse-23-
probleme-de-metre/ 5 http://fr.wikipedia.org/wiki/Pr%C3%A9cession_des_%C3%A9quinoxes : La
précession des équinoxes est le lent changement de la direction de l’axe de rotation de la Terre. Ce
mouvement de rotation de la Terre sur son axe déplace l’orientation du Pôle Nord parmi les étoiles.
Ainsi, nous changeons d’étoile polaire au fil des siècles. Ce mouvement de l’axe des pôles terrestres
entraîne avec lui celui de l’équateur. De ce fait, le point équinoxial précède chaque année sa position
antérieure sur l’équateur par rapport à l’écliptique.
www.jf-noblet.fr/calendrier/sol2.htm : L’axe de la terre tourne comme une toupie mais
de façon très lente. Il lui faut environ 26 000 ans pour faire un tour (dans le sens inverse des aiguilles
d’une montre vu du Pôle Nord. Cela équivaut à 1° tous les 72 ans.6 Le pôle magnétique terrestre n’est pas un point fixe sur la Terre. Il se déplace de
40km environ par an. Ce phénomène d’oscillation du pôle magnétique terrestre augmente
significativement depuis quelques décennies : http://www.planete-revelations.com/t8006-
documentaire-arte-sur-l-inversement-des-poles .
Selon les auteurs du documentaire, la raison d’être de ce cercle de 40 000km
de diamètre et de son décalage de 30 degrés par rapport à notre Equateur
indiquerait un lien entre le cycle de précession des équinoxes et le pôle
magnétique terrestre.
En outre :
- La distance Angkor Vat-Nazca est identique à la distance entre Mohenjo Daro et
l’Ile de Pâques.
- La distance entre l’Ile de Pâques et Gizeh vaut 10 000 fois le nombre d’or.
- La distance Angkor-Gizeh multipliée par le nombre d’or est égale à la distance
Gizeh-Nazca et la distance Gizeh-Nazca multipliée par le nombre d’or est égale à
la distance Nazca-Angkor Vat7.
Le documentaire crée parfois la confusion en amalgamant les faits et leur interprétation. En
témoigne, la tentative de faire correspondre les prophéties du passé (le Déluge) et les
hypothèses de la Science moderne (les conséquences liées au phénomène d’inversion des
pôles magnétiques terrestres). Forçant le lien entre un phénomène géophysique et
prophéties apocalyptiques, ce documentaire n’hésite pas à présenter les textes anciens
comme étant des « prévisions basées sur des connaissances réelles ».
« Au début de notre Civilisation, la connaissance était détenue par les Prêtres, étaient-ils les
gardiens d’un ancien savoir dans un monde en reconstruction ayant eu pour mission de
transmettre le message salvateur à travers les âges ? » : en voilà une question qui fait
semblant d’en être une.
La thèse des auteurs du documentaire :
L’existence d’une civilisation antérieure à la nôtre et technologiquement plus avancée
aujourd’hui disparue de la surface de la Terre. Cette civilisation aurait construit et agencé les
principaux sites antiques. Les rapports de proportion présents dans ces constructions,
l’équidistance des sites à la surface du globe témoignent des connaissances
mathématiques, géophysiques et astronomiques avancées de cette civilisation. La raison
d’être de ce projet titanesque : ces « Bâtisseurs » tenteraient de mettre en garde une
civilisation ultérieure contre un danger qui la menace. Ce danger : l’inversion des pôles
magnétiques terrestres, période durant laquelle le champ magnétique de la Terre s’estompe
voire disparaît, avec la perspective de dérèglements climatiques d’envergure et d’impacts
irréversibles sur la biodiversité et l’espèce humaine.
7 http://www.chez-web.com/la-revelation-des-pyramides-decryptage-et-analyse-33-on-
voyage-pour-conclure/
Il faut reconnaître un mérite à ce documentaire : les rapports de proportion des constructions
antiques et les rapports d’équidistance entre des sites antiques éloignés, leur répartition sur
la surface du globe, est vérifiable et se vérifient avec une marge d’erreur infime compte tenu
de l’échelle considérée8. Malgré cela, la seconde partie de la thèse des auteurs du
documentaire bat de l’aile. Celle qui concerne la raison d’être du projet de cette soi-disant
civilisation antérieure. En effet, vérification faite, le pôle nord du cercle qui relie les principaux
sites antiques à la surface du globe ne correspond pas au nord magnétique terrestre. Cet
argument était utilisé dans le documentaire pour justifier la raison d’être du projet des
bâtisseurs : en indiquant le nord magnétique terrestre cette civilisation antérieure aurait
cherché à attirer notre attention sur le phénomène d’inversion des pôles et ses
conséquences apocalyptiques pour l’espèce humaine. Le Déluge et « les prophéties du
passé » se trouvaient ainsi légitimés par un phénomène bien réel : les excursions
magnétiques et les inversions des pôles magnétiques terrestres dont les traces sont
conservées dans les roches volcaniques depuis des centaines de milliers d’années.
La vérité est ailleurs.
En voulant impérativement changer notre vision du passé, les auteurs du documentaire
confondent interprétation et vérité des faits. Ce faisant, la version des faits présentée dans le
documentaire, les liens de causes à effets qui les fondent comme faits, n’est pas perçue par
ses auteurs comme interprétation mais comme vérité. Cette version de l’Histoire est aveugle
quant à ses prétentions à s’affranchir de la part de récit qu’elle comporte. Elle en paie le
prix : une indicernabilité de la vérité et de la réalité. Une version des faits qui, niant ce qu’elle
est, considère ce qui la nie comme une falsification de la réalité, et ceux qui la nie comme
des faussaires. La « Vérité » des auteurs du documentaire, c’est la réalité des faits excluant
la part d’interprétation qui en fonde la trame.
Essayons de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.
Considérant que la vérité ait la structure d’une fiction, faisons comme si l’interprétation des
faits des auteurs du documentaire était vraie. La « vérité » en ce sens, est la prospection des
valeurs incluses dans le récit, c'est-à-dire dans l’interprétation des faits. En ce sens, la vérité
des faits, c'est-à-dire les valeurs incluses dans l’interprétation qui en est faite, accepte
plusieurs versions divergentes mais non contradictoires des faits.
Ayant pris soin d’éviter de prendre des vessies pour des lanternes, explorons ainsi les
valeurs incluses dans le récit proposé par les auteurs du documentaire.
Considérons donc pour vrai qu’il eût existé une civilisation antérieure à la nôtre,
technologiquement plus avancée. Considérons comme acquis que cette civilisation ait érigé
8 http://www.chez-web.com/la-revelation-des-pyramides-decryptage-et-analyse-33-on-
voyage-pour-conclure/
des constructions sur des sites antiques qui fonctionnent comme un système de signes
avertissant une civilisation ultérieure du danger qui la menace. Bien que l’état de nos
connaissances sur les conséquences d’une inversion des pôles magnétiques ne soient pas
encore connues et fassent l’objet de débats au sein de la communauté scientifiques9, nous
savons que l’espèce humaine en fera les frais. Ce que nous ne savons pas, c’est le montant
de la facture.
Nos prédécesseurs tenteraient ainsi de nous faire signe pour que nous regardions vers le
futur. Pour nous dire qu’il est plus raisonnable de s’interroger sur ce qui nous attend, de
savoir où l’on veut aller, plutôt que de s’acharner à connaître nos origines, à savoir d’où l’on
vient.
Le choix d’inclure des objets mathématiques (pi, phi et le mètre) dans les constructions
permettent de déduire qu’il s’agit d’un système de signes. « Le message, c’est le
médium10 » : le système de signes érigés à l’échelle planétaire a une fonction indiciaire. Le
choix de l’échelle planétaire indique que le phénomène dont il est question affecterait
l’équilibre global de la planète. Le choix d’inclure dans les constructions présentes sur les
sites antiques des normes antisismiques indiquent que nos prédécesseurs ont voulu graver
dans le marbre ce système, de sorte à ce qu’il soit lisible à travers les âges. Par ailleurs, les
indices mathématiques qui nervurent les constructions assurent l’universalité du message.
Hormis les mathématiques, aucun langage ne peut prétendre à l’éternité. Un message
éternel, parce qu’exprimé en un langage universel, à destination d’une espèce mortelle.
Quel serait donc ce message ? Le message est ce que son médium montre : un phénomène
géophysique qui a la propriété de menacer les espèces vivantes de disparition. En
substance : « Toi qui a été capable de t’approprier le message, tu connais désormais le
destin tragique qui attend ton espèce: la mort. Sa disparition. »
Le message est vide, au sens où il ne contient aucune prescription. Comment réagir à cela?
Nous pourrions envisager trois attitudes idéales-typiques face à l’annonciation du destin
tragique de l’Espèce. Il y aurait trois rapports possibles, à mettre en parallèle avec trois âges
de la vie de l’Espèce.9 Les scientifiques les plus optimistes évoquent une surmortalité relative à
l’augmentation du nombre de cancers liés aux rayonnements cosmiques. Outre l’apparition possible
de nouvelles espèces, les scientifiques les plus pessimistes évoquent la disparition de nombreuses
espèces existantes, dont l’espèce humaine, comme conséquence possible d’une excursion
magnétique ou d’une inversion des pôles. Les bombardements cosmiques liés à la disparition du
champ magnétique terrestre engendreraient en outre des catastrophes naturelles d’envergure,
compte-tenu de la modification des équilibres de notre planète.10 M. Mac Luhan in Understanding Media: the extensions of man (1964): Le vrai
message, c’est le medium. La nature d’un media compte plus que le sens ou le contenu du message.
La religiosité est le nom de l’enfance de l’Espèce. La religiosité est produite par l’effroi
que peut susciter l’annonce du destin tragique. Elle est une attitude protectrice, une réaction
de défense face au néant. La religiosité invente un arrière-monde, une vie après la mort, un
ensemble de prescriptions pour oblitérer le néant et obtenir le salut éternel. La religiosité est
l’expression traumatique d’un déni envers le destin tragique de l’Espèce. Les figures divines
ou démoniaques en sont la catharsis. Dieu & co contribue à mettre en forme un récit qui
donne une origine à la vie et un sens à la mort. Elles participent à la mise en scène de la
Tragédie.
Le nihilisme est le nom de l’adolescence de l’Espèce. Le nihilisme est le produit de la
mort de Dieu. Age de l’Humanité où l’Homme ne se perçoit plus comme une créature de
Dieu, le nihilisme désigne la fin de la croyance en un ordre cosmique qui fait de Dieu le
Créateur de la vie et l’instigateur de la mort. La mort de Dieu est la mort du Maître de
cérémonie préposé au destin de l’Espèce. Chaotique, le monde est à l’image de son origine,
hasardeux. Les prescriptions morales propres à la religiosité perdent leur sens. Plus de sens
préexistant à l’existence. Le repos éternel sent le sapin. Equivalent à un clap de fin.
S’il n’y a ni Dieu ni au-delà, nous sommes tous voués à terme au néant, dès les premiers
instants de notre vie. Contrairement à la religiosité, le nihilisme ne refoule pas la mort. Il est
aveuglé par une mort qu’il regarde de trop près. Le nihilisme évalue tout objet à l’aune de
son obsolescence et toute chose à l’aune de sa finitude. Sachant qu’il n’y a personne pour
nous juger, sachant que nous allons tous périr, sachant que rien n’est absolu, tout peut être
relativisé. Transgression, dérision cynique, divertissement et finitude sont les points
cardinaux du nihilisme. Le nihilisme est un courtermisme consacrant le triomphe de l’individu
producteur-consommateur sur l’Espèce (« après moi, le Déluge »). Le nihilisme fait fi des
externalités négatives liées à l’usage des techniques productivistes : le gaspillage et
l’épuisement des ressources en sont le symptôme. Le nihilisme consacre la mort comme la
vérité de la vie. « Sa philosophie de la vie » pourrait être résumée ainsi : « la vie est trop
courte pour se prendre la tête ! Profite ! Ne te soucie pas des conséquences à long terme de
tes actes. Tu es libre de faire ce que tu veux. Tu es libre et irresponsable, tant que tes actes
ne tombent pas sous le coup de la loi humaine.» Le nihilisme est l’expression traumatique
d’un ressentiment envers la vie telle qu’elle est : hasardeuse, précaire, éphémère. Il est
l’expression d’une lucidité maniaco-dépressive qui évalue chaque chose à l’aune de sa fin.
Le nihilisme juge la vie. Son attitude envers elle est un reproche adressé à la vie d’être ce
qu’elle est : La vie vaut-elle vraiment le coût d’être vécue sachant qu’elle a une fin : la Mort ?
Le nihilisme répondra oui à cette question en son for intérieur mais pestera que la fin du
scénario lui soit imposé. Il est le nom de l’adolescence d’une Espèce qui voue un culte pieux
au néant auquel elle est vouée.
Qu’y a-t-il au-delà du nihilisme ?
L’exploration des valeurs incluses dans la vérité fictionnelle élaborée par les auteurs du
documentaire LRDP nous met sur la piste.
Erigé à l’échelle du globe, le système de signes hérité d’une civilisation antérieure véhicule
un message contenu dans ce qu’il montre : le destin tragique de toute espèce vivante, sa
disparition à terme de la surface du globe, compte-tenu du phénomène d’excursion et
d’inversion des pôles magnétiques terrestres.
Cette vérité révélée par un dispositif ingénieux est gravée sur la surface de la Terre pour
l’éternité. Il survivra à la disparition de l’Homme compte-tenu de la manière dont il a été
construit. Il accompagnera la planète dans la tombe, avec ou sans vie à sa surface.
A l’instar de toute forme de vie, la civilisation qui a construit ce système de signes n’était pas
exempte de ce destin tragique. En découvrant l’éternel retour de la Tragédie, cette
civilisation a souhaité graver dans l’éternité le destin de toute espèce vivante et son savoir
dans l’architecture et la disposition de sites liés entre eux par des proportions géométriques
à l’échelle planétaire. Ce faisant, cette civilisation permet à toute espèce qui lui succèderait
et en aurait les capacités de s’approprier le destin tragique qui est le sien.
Quel acte pourrait constituer une plus haute affirmation de la Vie que l’inscription du destin
tragique qui menace toute espèce vivante d’extinction ? Quel acte pourrait constituer une
plus haute affirmation de la Vie que celui qui consiste à prévenir une civilisation ultérieure du
danger qui la menace ? Quel acte pourrait constituer une plus haute affirmation de la Vie que
de tenter de préserver, à travers les âges, une autre forme de vie que la sienne?
Si l’existence à un sens, ce dernier ne s’accomplit que dans le lit de son cours. Le sens de
l’existence s’entend dans la capacité de l’Homme à aller au-delà de lui-même, à sortir de lui-
même pour préserver la vie.
L’athéisme est le nom de l’âge adulte de l’Espèce qui aura réussi à vaincre l’esprit du
nihilisme. Athéisme désigne une Espèce sans Dieu, capable de sortir d’elle-même, d’opérer
un dépassement de soi suffisamment abouti pour aimer la vie au-delà de la perspective de
sa propre disparition. L’athéisme est l’expression accomplie de la volonté de préserver la vie
au-delà de la mort, sans avoir besoin d’un recours à Dieu.
Affirmation d’une vie sans pourquoi, l’athéisme est l’expression de la Surhumanité de
l’Espèce qui aura été capable d’aimer la Vie au point d’accepter son destin Tragique et
d’affirmer simultanément qu’elle vaut d’être vécue et préservée pour d’autres au-delà de sa
propre disparition de la surface du globe.
Au-delà du nombrilisme dont font preuve le nihilisme et la religiosité.
Selon les auteurs du documentaire, il est tout à fait probable que les Egyptiens aient investi
la Grande Pyramide qui se trouvait déjà à son emplacement depuis des lustres. Si l’on
accepte cette hypothèse, on se rend compte que les Egyptiens auront placé leur tombeau en
lieu et place du vide des proportions mathématiques. Faisant ainsi obstruction à
l’appréhension de cet objet géométrique parfait. Les Egyptiens auraient fait de leur propre
mort quelque chose de central, au point de mettre le plus divin d’entre eux au centre du
squat. Ce faisant, il crée la confusion en obstruant le message : en mettant au centre des
Pyramides leur corps sans vie, les Pharaons tentent d’obtenir leur propre salut. Illustration du
nombrilisme de l’Homme quant au rapport qu’il entretien à la Mort. Bien qu’ils captent
inconsciemment que le message ait attrait à la Mort, il le parasite en plaçant un « homme
d’exception » au cœur du dispositif. Dispositif qui vaut pour l’Humanité présente, à venir et
au-delà d’elle.
Dans le même registre, le supplice de la croix est la tentative d’inscrire dans le réel le
traumatisme de la Mort. Traumatisme du destin tragique de l’Espèce, incarné par la
souffrance d’un homme. Un homme qui est la métonymie de l’Espèce à laquelle il appartient.
Jésus Christ est la parodie incarnée du Destin tragique de l’Espèce.
Ainsi soit-il.
L’Humanité est l’Espèce qui sait qu’elle disparaîtra un jour. Sachant cela, le salut de l’Espèce
ne peut venir que d’un rapport à la Vie qui triomphe du pathos de la Mort. Le salut ne peut
venir que d’une Espèce qui n’aura pas besoin de l’aide d’un Tiers pour envisager
sereinement sa disparition. Le salut est le nom de l’affirmation de la Vie portée par une
Espèce, au-delà d’elle-même.
Pour poursuivre la vérité fictionnelle proposée par le documentaire, nous pourrions imaginer
le scénario suivant :
Une Espèce vient de comprendre un peu tard qu’une excursion magnétique est
imminente. Dans moins d’un siècle, elle est vouée à disparaître de la surface du globe. Un
choix binaire s’offre à chacun de ses membres : soit la colonisation spatiale - l’exil -, soit
l’inscription du destin tragique de toute espèce vivante sur la surface du globe.
« Sacrifiés » est le nom de ceux qui auraient choisi de prévenir une forme de
vie qui leur succèderait. Ceux-là auraient accepté leur destin tragique pour inscrire à la
surface du globe, dans le langage de l’éternité, ce qui vaut le coût d’être vécu par d’autres,
au-delà d’eux-mêmes. La Vie. Son affirmation. Les sacrifiés sont en ce sens les Christs de
l’athéisme.
Les « exilés » désignent ceux qui auraient choisi de quitter la Terre avec la
perspective de créer ailleurs des conditions favorables à la Vie11.
11 http://www.dailymotion.com/video/xnp4h_coloniser-l-espace_tech#.URYzJh2ZSGk
Ce choix ne manquera pas de se poser un jour aux membres de l’Espèce humaine.
Se préparer à ce choix, c’est accepter de devenir Adulte. Il s’agit pour l’Humanité d’accepter
d’aller au-delà d’elle-même pour devenir la Surhumanité qu’elle est en puissance. Il s’agit
pour l’Humanité d’accepter son Destin Tragique sans quoi il n’est point de salut possible.
Surhomme est le nom de ceux qui sont capable d’aimer la Vie et de vouloir qu’elle continue
à être, malgré la perspective de leur mort. Surhomme est le nom de ceux qui aiment la Vie
au point de vouloir qu’elle leur survive. Qu’elle survive sous une autre forme de vie que celle
que leur Espèce incarne. Que la Vie vive au-delà de la forme de vie qu’ils auront été.
Surhomme est le nom de ceux qui aiment la Vie au point de vouloir qu’elle continue à
prendre forme avec ou sans eux.
Cette affirmation de la Vie au-delà de soi est le fruit de la Volonté de puissance du
Surhomme. Surhomme qui devient lui-même en croquant à pleine dent la Vie qu’il affirme,
dans la perspective d’un Eternel Retour de l’Apocalypse12.
« Zarathoustra, cependant, regardait le peuple et s’étonnait. Puis il dit :
L’homme est une corde tendue entre la bête et le Surhumain, — une corde sur l’abîme.
Il est dangereux de passer de l’autre côté, dangereux de rester en route, dangereux de regarder en arrière — frisson et arrêt dangereux.
Ce qu’il y a de grand dans l’Homme, c’est qu’il est un pont et non un but : ce que l’on peut aimer en l’homme, c’est qu’il est un passage et un déclin.
J’aime ceux qui ne savent vivre autrement que pour disparaître, car ils passent au delà.
J’aime les grands contempteurs, parce qu’ils sont les grands adorateurs, les flèches du désir vers l’autre rive.
J’aime ceux qui ne cherchent pas, derrière les étoiles, une raison pour périr ou pour s’offrir en sacrifice ; mais ceux qui se sacrifient à la terre, pour qu’un jour la terre appartienne au Surhumain.
J’aime celui qui vit pour connaître et qui veut connaître afin qu’un jour vive le Surhumain. Car c’est ainsi qu’il veut son propre déclin.
J’aime celui qui travaille et invente, pour bâtir une demeure au Surhumain, pour préparer à sa venue la terre, les bêtes et les plantes : car c’est ainsi qu’il veut son propre déclin.
J’aime celui qui aime sa vertu : car la vertu est une volonté de déclin, et une flèche de désir.
12 « Dans la philosophie de Nietzsche, la notion de Surhomme est liée à deux autres
grandes notions, la Volonté de puissance et l’Eternel Retour. Le Surhomme est, par hypothèse,
l’incarnation de la Volonté de puissance humaine la plus haute, accomplissement de la vie qui trouve
à s’affirmer dans la pensée de l’Eternel Retour. Cette idée d’un accomplissement de la Volonté de
puissance humaine est, pour Nietzsche, un essai pour surmonter le nihilisme et donner un sens à
l’Histoire sans but de l’Humanité. » http://fr.wikipedia.org/wiki/Surhomme
J’aime celui qui ne réserve pour lui-même aucune parcelle de son esprit, mais qui veut être tout entier l’esprit de sa vertu : car c’est ainsi qu’en esprit il traverse le pont.
J’aime celui qui fait de sa vertu son penchant et sa destinée : car c’est ainsi qu’à cause de sa vertu il voudra vivre encore et ne plus vivre.
J’aime celui qui ne veut pas avoir trop de vertus. Il y a plus de vertus en une vertu qu’en deux vertus, c’est un nœud où s’accroche la destinée.
J’aime celui dont l’âme se dépense, celui qui ne veut pas qu’on lui dise merci et qui ne restitue point : car il donne toujours et ne veut point se conserver.
J’aime celui qui a honte de voir le dé tomber en sa faveur et qui demande alors : suis-je donc un faux joueur ? — car il veut périr.
J’aime celui qui jette des paroles d’or au-devant de ses œuvres et qui tient toujours plus qu’il ne promet : car il veut son déclin.
J’aime celui qui justifie ceux de l’avenir et qui délivre ceux du passé, car il veut que ceux d’aujourd’hui le fassent périr.
J’aime celui qui châtie son Dieu, parce qu’il aime son Dieu : car il faut que la colère de son Dieu le fasse périr.
J’aime celui dont l’âme est profonde, même dans la blessure, celui qu’une petite aventure peut faire périr : car ainsi, sans hésitation, il passera le pont.
J’aime celui dont l’âme déborde au point qu’il s’oublie lui-même, et que toutes choses soient en lui : ainsi toutes choses deviendront son déclin.
J’aime celui qui est libre de cœur et d’esprit : ainsi sa tête ne sert que d’entrailles à son cœur, mais son cœur l’entraîne au déclin.
J’aime tous ceux qui sont comme de lourdes gouttes qui tombent une à une du sombre nuage suspendu sur les hommes : elles annoncent l’éclair qui vient, et disparaissent en visionnaires.
Voici, je suis un visionnaire de la foudre, une lourde goutte qui tombe de la nue : mais cette foudre s’appelle le Surhumain.
*
Quand Zarathoustra eut dit ces mots, il considéra de nouveau le peuple et se tut, puis il dit à son cœur : « Les voilà qui se mettent à rire ; ils ne me comprennent point, je ne suis pas la bouche qu’il faut à ces oreilles.
Faut-il d’abord leur briser les oreilles, afin qu’ils apprennent à entendre avec les yeux ? Faut-il faire du tapage comme les cymbales et les prédicateurs de carême ? Ou n’ont-ils foi que dans les bègues ?
Ils ont quelque chose dont ils sont fiers. Comment nomment-ils donc ce dont ils sont fiers ? Ils le nomment civilisation, c’est ce qui les distingue des chevriers.
C’est pourquoi ils n’aiment pas, quand on parle d’eux, entendre le mot de « mépris ». Je parlerai donc à leur fierté.
Je vais donc leur parler de ce qu’il y a de plus méprisable : je veux dire le dernier homme.13»
Le documentaire la Révélation des Pyramides tombe dans la mystification. En tentant
d’inscrire une vérité fictionnelle dans le réel, Jacques Grimault et Pascal Pooyard sautent à
pied joint dans la psychose. Ils loupent le coche de ce qu’ils ont effectivement inventé : un
authentique mythe athée. Un mythe sans Dieu ni chimère qui met l’Homme face à son
Destin tragique.
L’énigme du Sphinx était une tentative d’annoncer le Destin tragique de l’Homme tout
en y échappant :
- « Quel être, pourvu d’une seule voix, a d’abord quatre jambes le matin, puis deux
jambes l’après-midi, et trois jambes le soir ? »
- « L’Homme, car dans sa prime enfance, il se traîne sur ses pieds et ses mains, à
l’âge adulte, il se tient sur ses pieds et ses jambes, et dans sa vieillesse, il s’aide d’une
canne pour marcher. ».
Le mythe d’Œdipe est une allégorie de la Mort qui annonce que l’Homme est un
genre de mortels, tout en proposant une alternative à la Mort incarnée par la figure
œdipienne de l’aveuglement et de l’errance vis-à-vis du Destin tragique de l’Humanité qu’il
incarne. A l’instar de la Religion, ce mythe regarde en direction de l’Origine. Regard qui incite
Œdipe au port et à l’affirmation des péchés qui l’ont conduit à l’aveuglement et à l’errance.
Le Christ va plus loin qu’Œdipe. A travers sa mort, il inscrit la mort de l’Homme non
dans le symbolique mais dans le réel, par la médiation de la crucifixion. Le mythe du Christ
annonce la mort de Dieu en Jésus Christ, qui est la parodie incarnée du Destin tragique de
l’Espèce. La tentative d’inscrire dans le réel, le traumatisme de la Mort, à travers la
souffrance d’un homme qui accepte son Destin.
Il est temps de regarder la Mort de l’Homme en face sans avoir froid aux yeux. Il est
temps de tourner notre regard vers notre commun avenir plutôt que vers notre commune
origine. Il est temps que nous prenions chacun et collectivement notre Destin en main.
13 F. Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, Prologue, (les mots et phrases en gras ont
été surlignés par nos soins).
« Le Dernier homme est une expression utilisée par F. Nietzsche pour désigner
l’extinction à venir du dépassement de soi de l’Homme. Il représente l’état passif du nihilisme, dans
lequel l’Homme ne désirera plus rien que le bien-être et la sécurité, et se réjouira de son absence
d’ambition. Il s’oppose ainsi à l’affirmation de la Volonté de puissance et à l’élévation de l’Homme,
dont le symbole est la figure à venir du Surhomme. » http://fr.wikipedia.org/wiki/Dernier_homme
Julien Rousseau
Février 2013